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Anafa

Guide

LES DROITS
DE LA
FEMME
Dépôt légal: 2000
ISBN: 2-913530-17-6
édité par: Fondation Friedrich Ebert
B.P. 3246 Dakar, Sénégal.
12, Av. Albert Sarraut
Tél.: 823 01 50 / Fax: 823 01 51
e-mail: [email protected]
et
Association nationale pour l'Alphabétisation
et la Formation des Adultes (ANAFA)
B.P. 10358 Dakar, Sénégal.
Immeuble 306, rue 10 Grand Dakar.
Tél.: 825-48-50 / Fax: 824-43-30
e-mail: [email protected]
Responsables: Babacar DIOP Buuba
Peter Skalweit
Maquette: Africome, B.P. 11451 Dakar.
Tél./fax 837-07-63 / [email protected]
Imprimerie: Nouvelles Imprimeries du Sénégal
Copyright: by Friedrich Ebert Stiftung, Dakar 2000
Association nationale pour l'Alphabétisation
et la Formation des Adultes
(ANAFA)

GUIDE

LES DROITS DE LA FEMME

Maître-d’œuvre : Réseau Femme & Développement de l’ANAFA.


Avec la collaboration de Me Nafissatou DIOUF, Avocate à la Cour
Secrétaire générale de l'Association des Juristes sénégalaises (A.J.S.)

FONDATION FRIEDRICH EBERT


Département de la Coopération Internationale
Bureau Dakar, 2000
LES DROITS DE LA FEMME

SOMMAIRE

Préface 5

Avant-propos 6

Chapitre premier : L’état civil 7

Chapitre deuxième : Le mariage 14

Chapitre troisième : L’obligation alimentaire 44

Chapitre quatrième : Les violences contre la famille 52

Chapitre cinquième : Le divorce 60

Chapitre sixième : La séparation de corps 71

Chapitre septième : Les cérémonies familiales 75

Chapitre huitième : Le droit de succession 80

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LES DROITS DE LA FEMME

PREFACE
Dans un pays comme le Sénégal où près de 80% des femmes sont analphabètes,
la problématique liée à l'accès des femmes à l'éducation et à la formation se pose
avec acuité et se traduit entre autres par une méconnaissance des textes juridiques
qui régissent les femmes au quotidien. Cette situation est révélatrice d'un ensemble
de dysfonctionnements dans un contexte socioculturel, économique et politique
qui n'évolue pas au rythme des mutations que vit le monde.
S'il est unanimement admis que le développement d'une nation dépend dans
une large mesure de la qualité de l'éducation de son peuple, il apparaît dès lors
que la famille, en tant que cellule première d'éducation et de socialisation, est le
creuset à partir duquel se façonnent les modèles de comportement des femmes
et des hommes.
Ainsi, c'est d'abord au sein de la famille que naissent les discriminations et
injustices dont sont victimes les femmes dans la société. Il est par conséquent
d'une impérieuse nécessité que les femmes prennent en charge leur auto
promotion dans la famille, ce qui constitue une condition sine qua non pour
surmonter les obstacles qui entravent la promotion de leur statut social.
Conscientes des efforts à mener dans ce domaine, l'ANAFA et la Fondation
Friedrich Ebert ont procédé à la publication du présent guide sur les droits de la
femme qui se veut un instrument de vulgarisation des droits et obligations de la
femme à la lumière du droit de la famille. Ce guide vise à faire des femmes
sénégalaises des citoyennes à part entière suffisamment outillées pour faire valoir
leurs droits acquis et s'atteler à la conquête de nouveaux droits.
Rédigé dans un langage accessible au large public, ce guide, illustré par
plusieurs exemples, présente les textes juridiques dans les domaines suivants :
Etat civil, Fiançailles et Mariage, Obligations alimentaires, Violences conjugales,
Divorce, Cérémonies familiales, Successions.
Nous formulons le vœu que cet ouvrage contribue à largement vulgariser le
droit de la famille et devienne un véritable instrument de promotion du statut
social des femmes sénégalaises.
Babacar DIOP Buuba Peter SKALWEIT
Président de l'Anafa Représentant Résident
Fondation Friedrich Ebert

5
LES DROITS DE LA FEMME

AVANT-PROPOS
Un adage dit que nul n'est censé ignorer la loi. La teneur du droit sénégalais
n’est pourtant pas maîtrisée, pour ne pas dire qu'elle est ignorée par la plupart
de ses destinataires. De nombreuses études ont été menées sur les justificatifs
socioculturels de cette méconnaissance du droit. Les réponses apportées ont été
aussi multiples que diverses, allant ainsi de la simple indifférence, à l'ignorance
due à des obstacles tel l'analphabétisme.
La démarche pragmatique, adoptée par l’ANAFA et la Fondation Friedrich Ebert,
consiste à mettre sur pied un dispositif de responsabilisation individuelle des Sénégalaises
et Sénégalais en mettant le droit à leur portée. Du coup, plus de prétextes. La loi n'est
plus l'apanage d'un certain nombre d'initiés, mais devient accessible à tous. Cette
démarche a inspiré ce guide de vulgarisation pour la promotion des droits de la femme.
Le guide permet, d’une part, de rendre le droit accessible pour tout un cha-
cun, mais surtout pour les femmes, catégorie qui en est particulièrement éloi-
gnée. Il permet, d’autre part, de faire passer la responsabilisation dans le couple,
et au sein de la famille, par l’étape indispensable de la connaissance suffisante
de quelques normes essentielles du droit de la famille. Cet outil peut en outre
faciliter une appropriation, par les populations, du droit positif organisant la vie
de famille et cela, au bénéfice notamment de l’abandon de certaines pratiques
attentatoires aux droits humains fondamentaux.
Utilisatrices et utilisateurs de ce guide sauront désormais quelle portée le
droit sénégalais donne aux fiançailles, et quels sont les droits et devoirs dont
sont effectivement tenus les époux dans le mariage. C’est ainsi qu’il est expliqué,
dans le détail, en quoi consiste l’obligation alimentaire, quand est-elle due, à qui
et par qui. Ce guide présente, de façon accessible, des domaines parfois réputés
complexes même pour les professionnels du droit (successions, état civil), la
position du législateur devant certaines situations moins heureuses dans la vie
familiale (violences conjugales, divorce).
Les pages de cet ouvrage ne se liront pas comme celles d'un roman : en une
fois et d'un seul trait ; elles devront être fréquentées de sorte à créer et entretenir
avec le droit sénégalais de la famille une certaine familiarité !

Me Nafissatou DIOUF,
Avocate à la Cour,
Secrétaire générale de l'Association des Juristes sénégalaises (A.J.S.)

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LES DROITS DE LA FEMME

CHAPITRE PREMIER :
L’ETAT CIVIL

Articles 29 à 93 du Livre I, Chapitre IV du Code de la Famille (CF).

1.1. Définition et généralités


L’état civil a deux sens : le premier désigne le statut juridique particulier attribué
à chaque personne qui découle de sa situation familiale (naissance, mariage,
décès). Dans le deuxième sens, l’état civil désigne le service public chargé de
l’enregistrement, de l’archivage et de la délivrance des extraits d’actes d’état
civil. Ces services sont les mairies, les centres d’état civil principaux et les centres
d’état civil secondaires, les sous-préfectures et le domicile du chef de village
dans certaines zones rurales.
L'Etat n'a pas pour unique mission la gestion des affaires économiques ; la
gestion des hommes fait aussi partie de ses attributions. Pour cela, il a besoin
d’identifier les personnes dès la naissance, en même temps que leur situation,
en cas de mariage ou de décès. Dès lors, un service d’état civil, communément
appelé mairie, est mis en place pour recevoir toute information concernant la
naissance, la situation matrimoniale (mariage) et le décès de tout Sénégalais,
vivant ou non au Sénégal. Ces informations doivent faire l’objet de déclarations
enregistrées dans les centres d’état civil, pour être ensuite délivrées sous forme
de copies (exemple : extrait du bulletin des actes de naissance, certificat de
mariage, certificat de décès ).

1.2. Principaux actes d'état civil


Il s’agit de l’acte de naissance, l’acte de mariage et l’acte de décès. Chaque
centre d’état civil tient annuellement des registres destinés à inscrire les
déclarations de naissance, de mariage et de décès. Chaque registre, en ce qui le
concerne, constitue une archive de référence permettant d’établir une copie
pour les actes déclarés.
Les autres faits et actes sont portés en marge des actes. Ce sont les mentions
marginales, inscrites sur les extraits, et non sur les bulletins. Par exemple, le
mariage est mentionné sur l’extrait de naissance et le divorce sur l’acte de mariage.
L’acte d’état civil ne peut être modifié sans autorisation du juge.

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LES DROITS DE LA FEMME

1.2.1. Acte de naissance


1.2.1.1. Définition
Le bulletin de naissance, l’extrait de l’acte de naissance sont les principaux
documents qui contiennent l’identité de l’individu, quant à son nom et prénom(s),
et ceux de son père et de sa mère, sa date et son lieu de naissance.
Des copies sont délivrées gratuitement par l’Officier de l’état civil, chaque fois
que de besoin, moyennant le paiement d’un timbre fiscal.
1.2.1.2. Intérêts de l’acte de naissance
D’une manière générale, l’acte de naissance permet d’identifier avec précision
les personnes. C’est un instrument de preuve de l’état de la personne et de ses
attributs en vue de pouvoir bénéficier des avantages liés à cet état. Par exemple
dans une affaire d’héritage, il est important de prouver que l’on est le fils ou la
fille du défunt. On doit produire un acte de naissance pour que soit délivré un
jugement d’hérédité.
Pour avoir certains papiers, comme la carte d’identité nationale, il faut produire
un acte de naissance.

1.2.2. Acte de mariage


1.2.2.1. Définition
Tout mariage, célébré à la mairie, à la mosquée, à l’église ou en tout autre
lieu, doit être inscrit sur les registres d’état civil. Cette inscription permet aux
époux de disposer d’un certificat de mariage qui informe sur l’identité des époux,
le régime matrimonial, l’option monogamique ou polygamique.
1.2.2.2. Intérêts du certificat de mariage
Le certificat de mariage délivré par l’Officier de l’état civil informe sur la situation
exacte de chacune des personnes. Particulièrement, il sert de preuve à la situation
des mariés et permet de bénéficier des avantages liés à une telle situation (réduction
d’impôts, prise en charge médicale par l’IPM de son mari ). Le défaut de certificat
de mariage est préjudiciable aux époux. Par exemple en cas de divorce, celui-ci ne
peut pas être prononcé par le juge à défaut d’un certificat de mariage.

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LES DROITS DE LA FEMME

1.2.3. Acte de décès


1.2.3.1. Définition
C’est un document délivré par l’Officer de l’état civil sur la base de la déclaration

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LES DROITS DE LA FEMME

de décès dans les conditions fixées par la loi (voir supra). Lorsqu’une personne
meurt, son décès est nécessairement enregistré à l’état civil.
1.2.3.2. Intérêts de l’acte de décès
L’acte de décès établit la situation d’une personne décédée. Le certificat de
décès, délivré par l’Officier de l’état civil, sert de preuve pour déclencher la
procédure de succession en cas d’héritage.

1.3. Déclaration de l'état civil


1.3.1. Qui reçoit la déclaration ?
Chaque municipalité dispose d’un centre d’état civil où se font les déclarations
d’état civil. Elles sont reçues par l’Officier de l’état civil, le maire ou son adjoint, le
conseiller municipal ou un autre fonctionnaire dans les villes et les préfectures
Les centres d’état civil n’ont pas tous la même importance. Ainsi, il existe des
centres principaux et des centres secondaires que l’on retrouve le plus souvent
dans les hôpitaux, les maternités, centres de santé, etc.
Les chefs de village ou de quartier peuvent recevoir les déclarations de
naissance ou de décès.
En cas de naissance survenue dans un navire ou un aéronef, la déclaration est
enregistrée par le commandant de l’appareil sur le livre de bord. Ensuite, une
copie d’état civil est adressée au centre du Premier Arrondissement de Dakar.
Les Sénégalais résidant à l’étranger peuvent s’adresser aux services
diplomatiques sénégalais (ambassades, consulats ) à l’étranger.

1.3.2. Qui peut faire la déclaration ?


• S’agissant de la naissance, la déclaration peut être faite par le père, la
mère, les grands-parents, le médecin, la sage-femme du village ou toute
personne ayant assisté à l’accouchement. La déclaration doit être faite
dans un délai d’un mois. Le chef de village ou de quartier doit le faire
dans les quinze (15) jours qui suivent ce délai d’un mois.
Dans le cas de l’enfant né de parents non mariés (enfant naturel), la
déclaration doit être faite par le père s’il le reconnaît. A défaut de
reconnaissance par le père de l’enfant, seule la mère ou les parents de
celle-ci peuvent faire la déclaration sans mentionner le nom du père.
L’enfant portera alors le nom de sa mère. Le déclarant sera alors

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LES DROITS DE LA FEMME

accompagné de quatre (4) témoins munis de leurs cartes d’identité. Ces


personnes font toutes les déclarations relatives à la naissance devant
l’Officier de l’état civil. A la place du nom du père inconnu, on mettra la
mention P.N.D. (père non déclaré).
• S’agissant du mariage, la déclaration est faite par les époux eux-mêmes
devant l’Officier de l’état civil. Si le mariage n’est ni célébré, ni constaté
par l’Officier de l’état civil, les époux ont la possibilité, dans les six (6) mois
qui suivent sa célébration, de faire une déclaration tardive devant l’Officier
de l’état civil. Passé ce délai, une autorisation d’inscription donnée par le
juge du tribunal départemental est nécessaire pour faire inscrire le mariage
sur les registres de l’état civil.
• S’agissant du décès, les déclarations peuvent être faites par un parent ou
toute autre personne pouvant fournir les renseignements requis à l’état
civil. L’acte de décès est établi dans les mêmes conditions que l’acte de
naissance. Ainsi, la déclaration doit être faite immédiatement ou dans le
délai d’un mois. A défaut, le chef de village ou de quartier dispose d’un
délai de quinze (15) jours pour faire cette déclaration. Celle-ci porte sur
l’ensemble des renseignements concernant le défunt (nom, prénom, âge,
sexe, filiation, profession, époux, épouse ).
A l’expiration de ces délais (un mois + quinze jours), l’inscription ne sera
possible qu’après la production d’un certificat émanant d’un médecin
ou du témoignage de deux personnes majeures attestant le décès.
Au-delà d’un an, seul le juge du tribunal départemental peut autoriser
l’inscription.

1.4. Autres actes délivrés à l'état civil


D’autres actes peuvent être délivrés par l’Officier de l’état civil. On peut citer
notamment :
• Le livret de famille. Au moment de l’établissement de l’acte de mariage, il
est remis gratuitement à l’époux un livret de famille portant l’indication de
l’identité des époux, la date et le lieu de la célébration ou de la constatation
du mariage et, le cas échéant, des options souscrites par chacun des époux.
Cette première page est signée par l’Officer de l’état civil et par les conjoints.
Sur les pages suivantes, sont inscrits les naissances et décès des enfants, les
adoptions, les reconnaissances et légitimations d’enfants naturels, le décès
ou divorce des époux ou leur séparation de corps.

11
LES DROITS DE LA FEMME

Le livret de famille, ne présentant aucune trace d’altération et dûment côté


par l’Officier de l’état civil, fait foi de sa conformité avec les registres d’état
civil jusqu’à inscription de faux.
Le livret de famille peut donc valablement attester de certains faits comme
le mariage, le décès ou la naissance des enfants. Par exemple, pour
apporter la preuve du mariage dans une procédure de divorce, l’épouse
qui ne dispose pas de son acte de mariage peut introduire sa requête de
divorce avec son livret de famille.
Nota bene : En cas de perte d’un livret de famille, l’époux peut en demander le
rétablissement. Le nouveau livret portera la mention « duplicata ».
• Le certificat de non-inscription. Les époux, qui n’ont pas déclaré leur
mariage à l’Officier de l’état civil au bout de six (6) mois, peuvent se faire
délivrer un certificat de non-inscription à l’état civil pour pouvoir bénéficier
d’une autorisation d’inscription par le tribunal.
Il en est de même lorsqu’un acte de naissance ou de décès n’a pas
été établi.
• Le certificat d’individualité
• Le certificat de vie collectif
• Le certificat de non-remariage, etc.

1.5. Rectification des actes de l'état civil


L’état civil doit être fixe et immuable.
Dans les cas d’omissions ou d’erreurs purement matérielles commises dans la
rédaction des actes dressés dans leur ressort, il appartient concurremment au
juge départemental et au Procureur de la République de faire procéder d’office à
leur rectification.
Dans tous les autres cas d’omissions ou d’erreurs, la requête en rectification
peut être présentée par toute personne intéressée ou par le ministère public au
tribunal départemental dans le ressort duquel l’acte à rectifier a été dressé. Il ne
doit y avoir ni surcharge, ni grattage sur les actes d’état civil.

1.6. Responsabilité de l'Officier d'état civil


Tout manquement, même involontaire, aux règles relatives à la tenue des
registres et à la délivrance des copies, entraîne pour l’Officer de l’état civil

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LES DROITS DE LA FEMME

l’application d’une amende civile, de cinq (5) à dix mille (10 000) FCFA, prononcée
par le tribunal départemental.
Toute altération, destruction, tout faux dans les actes d’état civil ou leurs copies,
toutes inscriptions de ces actes sur une feuille volante et autrement que sur les
registres destinés à cet effet, donne lieu à indemnisation des personnes lésées par
l’Officier de l’état civil.

1.7. Surveillance et contrôle


La tenue des registres d’actes d’état civil fait l’objet d’un contrôle permanent
par les présidents de tribunaux départementaux, en cotant et parafant l’ensemble
des pages des registres avant leur ouverture. Le juge peut également faire des
descentes inopinées dans les centres d’état civil.

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LES DROITS DE LA FEMME

CHAPITRE DEUXIEME :
LE MARIAGE

Articles 101 à 107 du Livre II, Chapitre I du Code de la Famille


L’équilibre d’une société dépend, pour une large part, de la stabilité de la vie
des familles qui la composent. C’est l’objectif visé par le Code de la Famille en
réglementant le mariage qui est le premier acte officiel de fondation de la cellule
familiale. La loi en régit chacune des étapes :
• les fiançailles qui correspondent à la période d’avant mariage ;
• les conditions de formation du mariage liées à l’âge, au sexe, l’ac-
cord des époux, la dot, le nombre d’épouses, la sauvegarde des
liens de sang et de certaines alliances, la prévention des conflits de
paternité par le délai de viduité imposé à la femme après le divorce
ou le décès de l’époux ;
• les effets du mariage dans les relations entre époux : obligation de
cohabitation, devoir de fidélité, devoir de secours et d’assistance ;
• les effets sur le patrimoine des époux selon le régime matrimonial
choisi ;
• les effets du mariage dans le ménage : les charges du ménage et les
rapports parents-enfants.

2.1. Les fiançailles


Il en existe deux catégories : les fiançailles officialisées devant l’Officier de
l’état civil et les fiançailles non officialisées. Les fiançailles ne sont qu’une formalité
facultative précédant le mariage.
Elles sont définies comme étant une convention solennelle par laquelle un
homme et une femme se promettent mutuellement le mariage au bout d’un
certain temps qui ne peut excéder un an. Les parties exprimeront ce qu’elles
accepteront l’une de l’autre pendant le mariage. Les parties aux fiançailles sont
soumises aux mêmes conditions que pour le mariage sauf pour l'âge qui est
réduit d'un an.

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LES DROITS DE LA FEMME

2.1.1. Les conditions de formation des fiançailles


2.1.1.1. L'âge et le sexe
Les fiançailles se font entre un homme et une femme, âgés respectivement
de 17 ans et plus et quinze (15) ans et plus.
2.1.1.2. Le consentement
Les fiancés doivent donner leur consentement libre de toute contrainte parentale.
Cependant, l’autorisation des parents est nécessaire lorsqu'il s'agit de mineurs.
2.1.1.3. Les témoins de la convention de fiançailles
La convention de fiançailles est conclue en présence de deux (2) témoins au
moins pour chaque fiancé et un représentant de chaque famille.
2.1.1.4. La durée des fiançailles
La durée des fiançailles ne peut excéder un (1) an. Il s’agit d’une durée indicative
qui n’empêche pas les fiancés de se marier plus tard.

2.1.2. Les effets de la convention de fiançailles


2.1.2.1. Existe-t-il une relation entre les fiançailles et le mariage ?
Non ! Parce que les fiançailles n’obligent pas les parties à se marier plus tard,
et les fiancés n’ont pas les mêmes obligations que dans la relation de mariage.
2.1.2.1.1. Les fiançailles n’aboutissent pas à une obligation de mariage
Exemple : Fatou ne peut pas obliger Aliou à l’épouser, simplement
parce qu’il y a eu une convention de fiançailles entre eux. De même,
Aliou ne peut pas forcer Fatou au mariage, simplement sur la base de
cette convention.
2.1.2.1.2. Les fiançailles ne constituent pas une condition du mariage
Un homme et une femme peuvent bel et bien se marier, même s’ils n’ont pas passé
au préalable une convention de fiançailles. Celle-ci n’est pas une condition du mariage.
2.1.2.1.3. Obligation alimentaire ou de cohabitation entre fiancés?
Les obligations imposées dans les relations de mariage ne s’appliquent pas
aux fiancés.
Les fiancés ne sont soumis à aucune obligation alimentaire ou de cohabitation,
aucun devoir de fidélité, d’assistance et de secours. A tout le moins, la convention

15
LES DROITS DE LA FEMME

de fiançailles fait naître un droit de visite et une obligation de réserve qui impose
de la retenue dans les relations avec les tiers, c’est-à-dire un autre homme ou
une autre femme.
2.1.2.2. Liberté de rupture des fiancés
La liberté de rupture est reconnue à chacun des fiancés. Cependant, cette
liberté comporte des limites.
2.1.2.2.1. Les obligations des fiancés et la rupture légitime
Les fiancés peuvent se rendre réciproquement visite conformément aux usages.
Ils doivent se conduire l’un et l’autre d’une manière réservée à l’égard des tiers.
Tout manquement à l’une de ces obligations constitue un motif légitime de
rupture souverainement apprécié par le juge du tribunal départemental
compétent pour ce genre de litige.
2.1.2.2.2. La forme de la rupture
Lorsque l’un des fiancés est mineur, la rupture doit être exprimée en présence
de témoins et représentants des deux familles.
2.1.2.2.3. La rupture sans motif légitime
La rupture, sans motif légitime imputable à la fiancée, l’oblige à restituer le
cadeau qu’elle a reçu, et dont la valeur maximum est fixée par la loi. Mais, les
dépenses occasionnées par les fiançailles ne peuvent être remboursées.
2.1.2.2.4. Les conséquences de la rupture abusive
Si un fiancé rompt les fiançailles sans motif légitime, il commet une faute et doit
réparer le préjudice causé en payant des dommages-intérêts au profit de la victime.
La rupture abusive procède d'une légèreté blâmable ou faite de manière
offensante, d'un caprice.

2.2. Le mariage
2.2.1. Définition
Le mariage est une union officialisée de deux personnes de sexes différents,
célébrée selon des formes établies. Le mariage est différent du concubinage qui
est une vie commune ne respectant pas les règles de formation prévues pour le
mariage. Il est différent également de l’union libre qui existe en France, mais
n’est pas admise au Sénégal.

16
LES DROITS DE LA FEMME

Au Sénégal, il existe deux formes de mariage : le mariage célébré et le mariage


coutumier. Ces formes de mariage peuvent présenter plusieurs aspects. Il existe
le « Takku–suuf », ou mariage secret, qui respecte toutes les formalités du
mariage, mais se produit en la présence de quelques personnes seulement. Il y a
également le « Takko », qui est une union lâche entre deux personnes et qui, au
même titre que le mariage secret, remplit toutes les formalités du mariage.
Seulement dans ce dernier cas, les obligations du mariage sont exécutées avec
beaucoup de souplesse. C’est le cas, par exemple, de l’obligation de cohabitation
où le couple peut se voir une fois par mois, ou tous les deux mois selon les cas.
Par sa nature, le mariage est un contrat, puisqu’il unit deux personnes ayant
chacune sur l’autre des droits et des obligations.
Le mariage est aussi une institution, puisqu’elle crée la famille, qui est la cellule
de base de la société. Il crée des liens de parenté et d’alliance entre les époux.

2.2.2. Les conditions de formation du mariage


Les conditions fixées par la loi tentent de garantir la stabilité et l’harmonie de la
vie familiale dont dépend, pour une large part, l’équilibre des membres qui la
composent. Il en est ainsi, par exemple, du libre consentement, exigé pour éviter
les mariages forcés et leurs conséquences néfastes sur la vie du couple et
l’épanouissement des enfants. De même, l’interdiction de mariage, entre des
personnes ayant un lien de sang, permet d’écarter les risques de malformations
physiques et psychiques consécutives aux mariages consanguins.
Il existe des conditions de fond et des conditions de forme.
2.2.2.1. Les conditions de fond
Ce sont les conditions dont le non-respect peut entraîner l’annulation du mariage.
2.2.2.1.1. L’âge et le sexe
2.2.2.1.1.1. L’âge
Le mariage ne peut être contracté qu’entre un homme âgé de plus de 18 ans
et une femme âgée de plus de 16 ans, sauf dispense d’âge accordée pour motif
grave par le président du tribunal régional après enquête.
2.2.2.1.1.2. Le sexe
Les époux doivent être de sexes différents, c’est-à-dire que le mariage doit se
faire entre un homme et une femme au Sénégal. Les relations homosexuelles
sont contraires à la morale et aux bonnes mœurs et réprimées par la loi.

17
LES DROITS DE LA FEMME

2.2.2.1.2. L’accord des époux


2.2.2.1.2.1. L’accord doit être donné personnellement par les époux
Il consiste au consentement libre des époux au mariage projeté.
Le consentement est différent de l’acquiescement, même s’ils ont les mêmes
effets. Par exemple, il y a acquiescement lorsque Kiné accepte ou ne réagit pas
négativement vis-à-vis de la proposition de ses parents de la marier à son cousin
Abdou. Il peut s’agir d’un consentement tacite.
Exemple : Modou et Astou ont une fille âgée de 18 ans. Elle est donc
majeure. Pour qu’un homme puisse l’épouser, les parents de Modou
et Astou ne peuvent pas dire oui à sa place. L’accord n’est valable que
si c’est la fille en personne qui l’exprime.

2.2.2.1.2.2. L’accord doit être donné librement par les époux, sans aucune contrainte
Exemple : Modou et Astou ne peuvent obliger leur enfant à se marier par
la violence ou la menace. Le mariage forcé est interdit par la loi au Sénégal.

2.2.2.1.2.3. La loi protège le consentement des mineurs


L’autorisation des parents est nécessaire si les enfants sont encore mineurs,
c’est-à-dire lorsqu’ils ont moins de 18 et 16 ans, respectivement pour le garçon
et la fille. La loi considère que les mineurs n’ont pas toujours une claire conscience
de leurs choix et de la mesure des conséquences qui en découlent. En donnant
leur autorisation, les parents seront mieux disposés à les aider à dépasser les
difficultés et conflits liés à l’inexpérience des jeunes mariés.
Il faut préciser aussi que le mineur doit consentir personnellement au mariage.
2.2.2.1.3. Les liens de parenté ou d’alliance
Le mariage entre certaines personnes est interdit du fait de l’existence de
liens de parenté ou d’alliance entre-elles.
Est prohibé, pour cause de parenté ou d’alliance, le mariage de toute
personne avec :
• ses ascendants (père, mère et grands-parents) ou ceux de son
conjoint ;
• ses descendants (fils, fille ou leurs enfants) ou ceux de son conjoint ;
• les descendants de ses ascendants ou de ceux de son conjoint
jusqu’au 3e degré ;

18
LES DROITS DE LA FEMME

• ses frères et sœurs et ceux du conjoint.


Toutefois, il n’y a plus prohibition, pour cause d’alliance entre beau-frère et
belle-sœur, lorsque l’union qui provoquait l’alliance a été dissoute par le décès
d’un des conjoints.
Exemple : Modou peut épouser Fatou, la sœur de Kiné, son ex femme,
après le décès de celle-ci. Toute comme Ibra, le frère de Modou, peut
épouser Kiné, la femme de son frère, après le décès de celui-ci.

2.2.2.1.4. Le délai de viduité


2.2.2.1.4.1. Définition
Le délai de viduité, c’est le temps pendant lequel la loi interdit à une femme,
qui vient de divorcer ou dont le mari vient de mourir, de se remarier. En effet, il
peut être difficile de connaître le véritable père de l’enfant, lorsque la femme se
remarie juste après le divorce d’avec son précédent mari, ou le décès de ce
dernier. Il risque d’y avoir un conflit de paternité.
2.2.2.1.4.2. La durée du délai de viduité
La loi impose à la femme un délai de 300 jours soit dix (10) mois avant de se
remarier. Cependant, ce délai peut être diminué par le juge.
• Jusqu’à trois (3) mois, lorsqu’elle a divorcé.
• Jusqu’à quatre (4) mois dix (10) jours, lorsque le mari est décédé.
• Dans tous les cas, le délai prend fin lorsque la femme qui était enceinte
accouche.
2.2.2.1.4.3. Effets du non-respect du délai
Si la femme ne respecte pas le délai de 300 jours, l’enfant ne bénéficiera pas
de la présomption de paternité, c’est-à-dire qu’il ne sera pas considéré par la loi
comme étant issu du précédent mari de sa mère, sauf preuve contraire.
2.2.2.1.5. La dot
2.2.2.1.5.1. Définition
La dot, c’est la somme fixée par les époux pour la conclusion du mariage.
C’est l’époux qui doit la verser à la femme. C'est une condition de fond du
mariage. Dans ce cas, le mariage ne sera valable que si la dot a été,
entièrement ou partiellement, versée à l’épouse.

19
LES DROITS DE LA FEMME

2.2.2.1.5.2. Qui est le bénéficiaire de la dot ?


La dot est attribuée à l’épouse et c’est sa propriété exclusive, même si dans la
pratique, c’est la famille de la jeune fille qui la reçoit.
2.2.2.1.5.3. Le montant de la dot
La loi sur les cérémonies familiales fixe le montant de la dot à trois mille (3
000) FCFA, et à quinze mille (15 000) FCFA, les dépenses pour les réjouissances.
2.2.2.1.5.4. Le dépassement du montant de la dot fixé par la loi constitue un délit
La loi sur les cérémonies familiales sanctionne les futurs époux et leurs
complices qui dépassent le montant qu’elle a fixé pour la dot et les dépenses
prévues pour la fête. En effet, la loi vise à empêcher les gaspillages qui sont
fréquents à l’occasion des cérémonies familiales et qui ruinent l’épargne des
ménages, et au-delà, l’économie nationale.
2.2.2.1.5.5. Les sanctions prévues
Les auteurs du dépassement du montant fixé par la loi et leurs complices risquent
de payer une amende de vingt-cinq (25) à cinq cent mille (500 000) FCFA.
2.2.2.2. Les conditions de forme du mariage
Les conditions de forme varient selon qu’il s’agit du mariage célébré ou du
mariage constaté.
La loi reconnaît deux (2) formes de mariage : le mariage célébré, encore
appelé mariage civil, qui se passe directement devant l’Officier de l’état civil ; et
le mariage constaté, que l’on appelle mariage coutumier, qui se passe devant
une autorité religieuse ou coutumière (imam ou prêtre), mais sous la présence
de l’Officier de l’état civil ou son représentant. Cela veut dire que, dans les deux
cas, l’Officier de l’état civil devra leur délivrer un acte de mariage et un livret de
famille leur permettant de bénéficier de tous les avantages reconnus par l’Etat
aux personnes mariées (réduction d’impôts, allocations familiales, prise en charge
médicale, etc.).
2.2.2.2.1. Le mariage célébré
2.2.2.2.1.1. Les démarches à entreprendre
Les fiancés doivent d’abord contacter l’Officier de l’état civil pour l’informer
de leur désir de faire célébrer leur mariage à la mairie et prendre un rendez-vous
pour cela.

20
LES DROITS DE LA FEMME

2.2.2.2.1.2. Les conditions à remplir


• Chacun des époux doit remettre à l’Officier de l’état civil une copie
de son acte de naissance, datant de moins de trois (3) mois, ou un
acte de notoriété délivré par le tribunal départemental.
• Une copie de l’autorisation des parents, ou une dispense accordée
par le président du tribunal permettant à l’époux, qui n’a pas l’âge
requis, de se marier.

21
LES DROITS DE LA FEMME

22
LES DROITS DE LA FEMME

• Chacun des futurs époux devra être assisté par un témoin majeur
muni de carte d’identité.
2.2.2.2.1.3. La fonction de l’Officier de l’état civil
Vérifie les conditions exigées pour le mariage
• L’accord pour le mariage : il faut se rappeler que le libre
consentement des futurs époux est une condition indispensable de
formation du mariage. Il doit donc être exprimé par les personnes
concernées, elles-mêmes, devant l’Officier de l’état civil.
• La dot : il demande aux futurs époux si une dot a été prévue comme
condition de formation du mariage, quelle portion doit être perçue par
la femme avant la célébration et quel terme est prévu pour le solde.
• L’option de monogamie ou de polygamie (avec ou sans limitation)
du mari.
• Le régime matrimonial choisi par les futurs époux pour décider de
la séparation ou du partage communautaire de leurs biens. S’il n’y a
pas d’option expresse, on applique le régime de la séparation. Il en
est de même en cas de polygamie.

Célèbre le mariage
Une fois que l’Officier de l’état civil a reçu des réponses claires sur l’accord,
l’option et le régime matrimonial choisis par les futurs époux, il pourra alors les
déclarer mari et femme.

Délivre les actes


L’Officier de l’état civil, après la déclaration de mariage, établit ensuite l’acte
de mariage, et remet gratuitement au mari le livret de famille, et à la femme,
une copie conforme de ce livret.
2.2.2.2.2. Le mariage constaté
2.2.2.2.2.1. Les démarches à entreprendre
Les futurs époux doivent informer l’Officier de l’état civil (ou son représentant)
de la commune ou de la localité où le mariage aura lieu. L’information doit se
faire un mois à l’avance pour que l’Officier de l’état civil puisse le programmer
dans son calendrier.

23
LES DROITS DE LA FEMME

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LES DROITS DE LA FEMME

2.2.2.2.2.2. Les conditions à remplir


Ce sont les mêmes que celles exigées pour le mariage célébré, à savoir une
copie de l’acte de naissance de chacun des futurs époux, l’autorisation des parents
ou la dispense accordée par le juge pour les époux mineurs. Mais dans le cas du
mariage constaté, la loi impose la présence de deux (2) témoins majeurs pour
chacun des futurs époux.
2.2.2.2.2.3. La fonction de l’Officier d’état civil
La présence à la célébration du mariage
L’Officier de l’état civil, ou son représentant, assiste au mariage. Mais, celui-ci
est directement célébré par l’autorité religieuse ou coutumière (imam ou prêtre).

La délivrance des pièces d’état civil constatant le mariage


Après la célébration du mariage par l’autorité religieuse ou coutumière, l’Officier
de l’état civil délivre les mêmes pièces et dans les mêmes conditions que pour le
mariage célébré à la mairie, à savoir l’acte de mariage et le livret de famille.
Nota bene : Rama et Alpha, qui ont célébré leur mariage par l’autorité religieuse
ou coutumière, et l’ont fait constater par l’Officier de l’état civil ou son
représentant, ont les mêmes pièces de mariage et les mêmes droits que Marie et
Jacques qui ont célébré leur mariage à la mairie, directement par l’Officier de
l’état civil.
En un mot, la loi reconnaît de la même manière le mariage constaté (coutumier
ou traditionnel) que le mariage célébré (ou mariage civil).
2.2.2.2.3. Le mariage non célébré et non constaté
La célébration ou la constatation du mariage par l’Officier de l’état civil est une
obligation imposée par la loi à toutes personnes qui se marient. Les futurs époux
sont donc tenus d’informer l’Officier de l’état civil dans les délais et les conditions
fixés par la loi. Sinon, la loi prévoit des sanctions à l’encontre des époux qui ne
respectent pas cette obligation.
Toutefois, le Code de la Famille leur donne des possibilités de réparer cet
oubli ou cette négligence.

25
LES DROITS DE LA FEMME

2.2.2.2.3.1. Les sanctions contre les époux en cas de


mariage non célébré et non constaté
Sanctions
Si les époux n’ont ni fait célébrer, ni fait constater le mariage par l’Officier de
l’état civil, sans motif estimé valable par le juge, ils risquent d’être condamnés à
payer une amende de trois (3) à dix-huit mille (18 000) FCFA.

Des atténuations quant à la validité du mariage


La loi considère le mariage non célébré et non constaté comme valable malgré
tout, et les enfants qui sont nés d’un tel mariage sont des enfants légitimes. Par
contre, les époux ne pourront pas demander à l’Etat les avantages familiaux
(exemple : prestations familiales, prises en charge par l'institution de prévoyance
maladie du conjoint, etc.). En effet, à défaut d’un certificat de mariage délivré par
l’Officier de l’état civil, les époux ne pourront pas prouver leur situation de mariés.
A cause des inconvénients qui en découlent, et pouvant porter indirectement
atteinte aux droits des enfants, par exemple, la privation des allocations familiales,
la loi permet aux époux, en cas de faute, de régulariser leur situation plus tard.
2.2.2.2.3.2. Les modes de régularisation du mariage non célébré et non constaté
Déclaration tardive du mariage
Dans les six (6) mois qui suivent la conclusion du mariage, les époux, qui n’ont
ni célébré, ni constaté leur mariage par l’Officier de l’état civil, devront se présenter
personnellement devant celui-ci pour faire une déclaration tardive du mariage.
Par cette déclaration, ils font reconnaître leur union par l’Etat et se font établir
un certificat de mariage.

Le jugement d’autorisation d’inscription


• Une fois le délai de six (6) mois dépassé, les époux devront obtenir un
jugement d’autorisation d’inscription au tribunal départemental en
présentant un certificat de non-inscription, délivré par l’Officier de
l’état civil.
• Après enquête, le juge ordonne la transcription sur le registre des
mariages. Ils pourront alors se faire établir un certificat de mariage
par l’Officier de l’état civil.

26
LES DROITS DE LA FEMME

2.2.2.2.4. La preuve du mariage


2.2.2.2.4.1. Le certificat de mariage
La loi prévoit que l’existence du mariage doit être prouvée par le certificat de
mariage. Celui-ci est délivré par l’Officer de l’état civil au moment de la célébration
du mariage, de sa constatation, après une déclaration tardive ou un jugement
d’autorisation d’inscription.
2.2.2.2.4.2. Le livret de famille
Il est délivré par l’Officier de l’état civil à chacun des époux et comporte un
certificat de mariage sur la page une. L’époux doit être en mesure de fournir ces
pièces à chaque fois que de besoin.
2.2.2.3. Option de polygamie ou de monogamie : le nombre d’épouses
Au Sénégal, la loi prévoit en faveur du mari une option qui lui permet de fixer
le nombre d’épouses qu’il compte avoir jusqu’à un maximum de quatre (4)
épouses. Par contre, la femme ne peut pas avoir plusieurs maris. Ce système
conjugal, qu’on appelle la polyandrie, est interdit au Sénégal.
Ainsi, l’homme peut choisir soit la monogamie, soit la polygamie avec deux
(2) ou trois (3) épouses, ou sans limitation jusqu’à quatre (4) épouses.
2.2.2.3.1. Les différentes options
2.2.2.3.1.1. La monogamie
Dans ce premier cas, le mari choisit de n’avoir qu’une seule épouse. On dit
qu’il est monogame. L’option de monogamie est irrévocable (voir plus loin le
caractère définitif de l'option monogamique).
2.2.2.3.1.2. La polygamie
Dans ce second cas, le mari choisit d’avoir plusieurs épouses. On dit qu’il est
polygame. La polygamie peut revêtir deux (2) formes :

La polygamie à quatre (4) épouses,


ou polygamie sans limitation
Le maximum autorisé par la loi est de quatre (4) épouses.

La polygamie avec moins de


quatre (4) épouses, ou polygamie limitée
Dans ce cas, le mari décide qu’il aura deux (2) épouses seulement, ou trois (3)
épouses seulement. C’est la limitation de polygamie.

27
LES DROITS DE LA FEMME

2.2.2.3.1.3. Où et quand le mari fait-il son option ?


Le choix du mari, pour le régime de la polygamie ou de la monogamie, est
fait devant l’Officer de l’état civil à la mairie. Il peut le faire au moment de la
célébration du mariage, au moment de sa constatation, ou à une autre date.
2.2.2.3.1.4. Le défaut d’option de la part du mari
En cas de silence, c’est-à-dire si le mari n’exprime pas son choix, la loi considère
qu’il opte pour le système de polygamie à quatre (4) épouses.

28
LES DROITS DE LA FEMME

2.2.2.3.1.5. Le caractère définitif de l’option monogamique


L’option pour le nombre d’épouses est une option définitive et engage le
mari toute sa vie. La loi lui permet uniquement de diminuer le nombre d’épouses,
mais elle ne lui permet pas de l’augmenter.
Exemple 1 : Si au moment de son mariage avec Kiné, Saliou a opté
pour la monogamie, celui-ci ne pourra jamais, durant toute sa vie,
avoir plus d’une épouse, même s’il divorce avec Kiné, ou en cas de
décès de celle-ci.
Exemple 2 : Si Modou a opté pour la polygamie limitée à deux épouses
en se mariant avec Bineta et Fatou, il ne pourra jamais avoir trois (3)
épouses en même temps, que ce soit en cas de divorce avec l’une
d’elles, ou en cas de décès de l’une d’elles.
Exemple 3 : Modou, qui a opté pour la polygamie à deux (2) épouses,
peut réduire le nombre en devenant monogame. De même s’il avait
opté pour trois (3) ou quatre (4) épouses, il peut en réduire le nombre
respectivement à deux (2), ou à trois (3) épouses.
2.2.2.3.2. Le délit de bigamie : Le non-respect par le mari de l’option de
monogamie ou de polygamie limitée
2.2.2.3.2.1. Les éléments constitutifs du délit : quand peut-on dire qu’il y a
bigamie de la part du mari ?
Si le mari épouse un nombre de femmes supérieur à celui autorisé par son
option, il ne respecte pas la loi, et commet de ce fait le délit de bigamie. C’est
ainsi le cas :
• Lorsqu’il a deux (2) épouses, alors qu’il avait opté pour la monogamie.
• Lorsqu’il a trois (3) épouses, alors qu’il avait opté pour la polygamie
limitée à deux (2) épouses.
• Lorsqu’il a quatre (4) épouses, alors qu’il avait opté pour la polygamie
limitée à trois (3) épouses.
• Lorsqu’il a plus de quatre (4) épouses, alors que le maximum autorisé
par la loi se limite à quatre (4) épouses.
2.2.2.3.2.2. Les sanctions du délit de bigamie
Ainsi dans les cas cités plus haut, le mari est alors coupable de bigamie. Il
risque une amende, de vingt (20) à trois cent mille (300 000) FCFA, et un
emprisonnement de six (6) mois à un (1) an.

29
LES DROITS DE LA FEMME

2.2.2.3.3. Délit de bigamie commis par la femme : Les cas de polyandrie


2.2.2.3.3.1. Les éléments constitutifs du délit : quand peut-on dire qu’il y a
bigamie de la part de la femme ?
Comme l’homme, la femme peut être coupable du délit de bigamie. Elle
commet ce délit lorsqu'elle se remarie alors que :
• Elle n’a pas encore divorcé avec son premier mari.

30
LES DROITS DE LA FEMME

• Le divorce n’a pas été prononcé par le juge.


• Le jugement prononçant le divorce n’est pas encore définitif lorsqu’il
y a appel de la décision.
Nota bene : Le divorce n’est valable que lorsqu’il a été prononcé par le juge,
même si le mariage a été célébré traditionnellement sans que l’Officier de l’état
civil en soit informé pour le constater.
Exemple : Ainsi, si Astou se contente de retourner chez ses parents
lorsqu’elle est « répudiée » par son mari sans en saisir le juge, le mariage
reste valable aux yeux de la loi. Elle commettra alors le délit de bigamie,
si elle se remarie entre temps avec un autre homme.
2.2.2.3.3.2. Les conséquences du délit de bigamie
Sur les mariages constitutifs du délit
Lorsqu’il y a délit de bigamie, la loi considère que le juge doit prononcer la
nullité du ou des mariages constitutifs du délit, c’est-à-dire ceux qui ont été
contractés avant que le juge n’ait prononcé le dissolution du premier mariage.
Le mariage délictuel sera alors dissout au jour du jugement prononçant la
nullité. La dissolution peut être demandée par les époux eux-mêmes, par toute
personne intéressée, ou par le ministère public.

Sur les enfants nés de la bigamie


Les enfants, nés du mariage contracté avant le jugement prononçant la
nullité du précédent mariage, sont considérés comme des enfants légitimes,
nés de père et de mère mariés. Ainsi, le mariage sous un régime de bigamie
produit les effets du mariage régulier au moins pour ce qui est du statut des
enfants. Il s’agit de protéger les enfants contre les conséquences des fautes de
leurs parents.

2.2.3. Les effets du mariage


Pour que le couple puisse vivre ensemble une union harmonieuse et stable, le Code
de la Famille fixe des obligations qui traduisent des normes de comportement dans les
relations des époux entre eux, et dans leurs relations avec leurs enfants, quant aux
conditions d’exercice de l’autorité parentale et aux charges qui en découlent...
Pour la première catégorie d’obligations qui s’imposent dans les relations
entre les époux, la loi les soumet à :

31
LES DROITS DE LA FEMME

§ une obligation de cohabitation permettant au mari et à la femme de


vivre pleinement leurs relations en partageant le même toit ;
§ un devoir de fidélité visant à interdire l’adultère et à préserver la
moralité au sein du couple et de la famille en général ;
§ un devoir de secours et d’assistance instituant une complémentarité
et une solidarité effectives entre les époux.
Dans les relations entre les époux, il existe aussi d’autres types d’effets du
mariage appelés les effets patrimoniaux, c’est-à-dire les rapports pécuniaires entre
les époux et à l’égard des tiers. Ces rapports dépendent du régime matrimonial
choisi par les conjoints entre la séparation ou la communauté des biens.
La deuxième catégorie d’obligations est liée à l’exercice de l’autorité au sein
de la famille. Elle concerne les charges du ménage, elle détermine le détenteur
de cette autorité et les conséquences qui en découlent, notamment dans les
relations parents-enfants, des pouvoirs que détiennent les parents, mais aussi
des charges d’éducation et d’entretien vis-à-vis des enfants.
2.2.3.1. Les effets liés à la coexistence des époux
2.2.3.1.1. L’obligation de cohabitation
Le mariage impose aux époux de vivre ensemble, d’avoir des relations intimes.
En cas de polygamie, les épouses doivent être traitées sur un pied d’égalité, la
cohabitation doit se faire sur un nombre égal de jours avec chacune des épouses.
Aucune d’entre-elles ne doit être délaissée au profit d’une autre.
2.2.3.1.1.1. Le lieu de la cohabitation
En tant que chef de famille, c’est le mari qui choisit le lieu de cohabitation.
C’est le domicile conjugal où les époux vivent ensemble. Lorsque le lieu fixé par
le mari présente des dangers, ou est source d’insécurité pour la femme ou ses
enfants, le juge peut autoriser celle-ci à choisir une autre maison. Par exemple,
lorsque les difficultés liées au voisinage conduisent à des disputes et des bagarres
interminables. En cas de menaces immédiates ou imminentes, de simples témoins
suffisent pour que la femme quitte le domicile conjugal en attendant de saisir le
juge du tribunal départemental.
2.2.3.1.1.2. Les sanctions du non-respect de l’obligation de cohabitation
La cohabitation est une des conditions permettant de constater que la relation
de mariage est effective, tant pour les relations intimes, que pour la prise en
charge des membres de la famille. C’est pour cette raison que la loi prévoit des

32
LES DROITS DE LA FEMME

sanctions en cas de violation de cette obligation. Une requête en intervention


auprès du juge est possible en tant que voie de conciliation pour ramener le
fautif à la raison.

Sur le plan civil


Lorsque l’un des époux ne respecte pas l’obligation de cohabitation, l’autre
peut demander au juge la séparation de corps ou le divorce. L’époux abandonné
peut demander que lui soient versés des dommages et intérêts par le conjoint
fautif à cause du défaut de soutien matériel et moral.

Sur le plan pénal : le délit d’abandon de famille


Lorsqu’un époux ne respecte pas l’obligation de cohabitation, en vivant ailleurs
que dans le domicile conjugal, il commet le délit d’abandon de famille. Et d’une
manière générale, lorsque le mari ne s’occupe pas convenablement de sa famille,
la femme peut procéder, auprès du tribunal, à une assignation pour contribution
aux charges du ménage.
Pour que le délit existe, il faut que :
• Le mari ou la femme s’absente sur une période de plus de deux (2) mois.
• L’absence est constatée par un huissier qui lui fait une mise en
demeure de retourner au domicile abandonné dans un délai de quinze
(15) jours. C’est seulement si la personne ne s’exécute pas, après la
mise en demeure faite par l’huissier, que le délit d’abandon de famille
est constitué.
Exemple : Depuis plus de deux (2) mois, Moussa a quitté le domicile
conjugal pour aller vivre ailleurs avec une autre femme. Sa femme
Kiné saisit l’huissier qui constate l’absence et écrit une lettre à Moussa
lui imposant de retourner au domicile conjugal. Au bout de quinze
(15) jours, Moussa refuse toujours de rejoindre son domicile. Ce n’est
qu'à partir de ce moment qu’il commet le délit d’abandon de famille.
La loi prévoit alors, contre le fautif, une peine d’emprisonnement de trois
(3) mois à un (1) an et une amende de vingt-mille (20 000) FCFA.
2.2.3.1.2. Le devoir de fidélité
Le devoir de fidélité traduit l’interdiction de commettre l’adultère. L’adultère
est défini comme étant le fait d’avoir des relations sexuelles avec une personne
autre que le conjoint. Il en est ainsi pour l’époux polygame lorsque ses relations
ont lieu en dehors des limites fixées par son option.

33
LES DROITS DE LA FEMME

Exemple : Au moment du mariage, Ibra a opté pour la polygamie à


deux (2) épouses ; s’il a des relations sexuelles avec une troisième femme,
il commet le délit d’adultère en même temps que le délit de bigamie.
Compte tenu de sa gravité et des conséquences que cela entraîne dans la vie
familiale, la loi prévoit des règles particulières pour la dénonciation de l’adultère
et des sanctions civiles et pénales à l’encontre de son auteur.
2.2.3.1.2.1. Comment dénoncer l’adultère ?
L’adultère est une cause de divorce et est considéré comme un délit qui porte un
grave préjudice moral à l’un des conjoints. Il est de ce fait soumis à des sanctions
civiles et pénales. La gravité est donc telle que la loi limite aux seuls époux la possibilité
de sa dénonciation.
La loi dispose en effet que :
• L’adultère ne peut être dénoncé que par le conjoint. La stabilité du
couple est ainsi préservée contre les dénonciations fantaisistes ou
motivées par certaine jalousie ou une volonté délibérée de détruire
la stabilité du couple.
• L’adultère doit faire l’objet d’un constat d’huissier ou un Officer de
police judiciaire. A défaut, il faudra des témoins.
2.2.3.1.2.2. Les sanctions du délit d’adultère
La loi prévoit des sanctions civiles et pénales en cas de violation du devoir de fidélité.

Sur le plan civil


Le conjoint trompé peut demander la séparation de corps et même le divorce.
Il peut également demander que lui soient versés des dommages et intérêts. Car
l’adultère est une tromperie, une trahison douloureuse qui bouleverse moralement
la personne qui en est victime. Les dommages et intérêts ont alors pour but de
« réparer » le préjudice moral ainsi causé.

Sur le plan pénal


L’adultère est puni d’une amende de vingt-mille (20 000) à cent mille (100 000)
FCFA. La condamnation peut être évitée si le conjoint retire sa plainte.

La complicité en cas d’adultère


Le complice est celui ou celle avec qui l’époux coupable a eu des relations sexuelles.
• Le complice risque la même peine que le conjoint fautif.

34
LES DROITS DE LA FEMME

• La complicité peut être prouvée selon trois (3) moyens principalement :


- le flagrant délit, c’est-à-dire le fait de le surprendre avec le conjoint
coupable en train de commettre l’acte sexuel ;
- les lettres qu’il a adressées au conjoint coupable faisant allusion
aux relations sexuelles qu’ils ont eues ensemble ;
- les déclarations (ou aveux) par lesquelles il reconnaît les faits qui
lui sont reprochés.
2.2.3.1.3. Le devoir de secours et d’assistance
L’exécution du devoir de secours et d’assistance est différenciée selon que le
couple vit ensemble ou qu’il est en séparation de corps.
2.2.3.1.3.1. Lorsque les époux vivent ensemble
Le devoir de secours et d’assistance se traduit par l’obligation pour le conjoint
de subvenir aux besoins de l’autre, aussi bien sur le plan de l’alimentation, que
pour les besoins de son état de santé. Les frais se feront dans la mesure des
moyens du couple.
Le devoir d’assistance s’applique aussi à des raisons autres que la santé. Par
exemple, lorsque le conjoint est en danger ou traverse de sérieux problèmes
d’existence nécessitant un appui moral, des conseils, de la consolation, etc.
2.2.3.1.3.2. En cas de séparation de corps
Si les époux ne vivent plus ensemble à la suite d’une séparation de corps autorisée
par le juge, le devoir de secours et d’assistance se traduit par la prise en charge des
frais médicaux en cas de maladie, ou par le versement d’une pension alimentaire.
2.2.3.1.3.3. Les sanctions du non-respect du devoir de secours et d’assistance
Lorsqu’un des époux ne respecte pas le devoir de secours et d’assistance, la
loi prévoit des sanctions civiles et pénales.

Sur le plan civil


L’époux abandonné peut demander :
• L’autorisation de quitter le domicile conjugal.
• La séparation de corps.
• Le divorce pour défaut d’assistance ou d’entretien.
• Une exécution forcée par le juge au moyen d’une saisie sur les biens
de l’époux qui ne remplit pas son devoir.

35
LES DROITS DE LA FEMME

• Des dommages et intérêts pour le préjudice physique et/ou moral,


causé du fait de la non-assistance. Par exemple, celle-ci peut en effet
provoquer une aggravation de la maladie ou une dépression du fait
de l’abandon et de la solitude pendant une période aussi difficile.

Sur le plan pénal


Le non-respect du devoir de secours et d’assistance est considéré par la loi
comme le délit d’abandon de famille ou de violence économique. Le conjoint
fautif devra subir la même peine d’emprisonnement de trois (3) mois à un (1) an
et une amende de vingt-mille (20 000) FCFA.
Dans tous les cas, le recours en intervention auprès du juge est possible et
celui-ci va procéder à la conciliation des époux.
2.2.3.2. Les effets sur les patrimoines des époux : le régime matrimonial
Le régime matrimonial règle les effets patrimoniaux du mariage, c’est-à-dire
les rapports pécuniaires entre les époux, et à l’égard des tiers.
Il existe trois (3) sortes de régimes :
La séparation des biens
Le régime dotal
Le régime communautaire de participation aux meubles et acquêts
2.2.3.2.1. La séparation des biens
La séparation de biens constitue le régime de droit commun, c’est-à-dire
qu’à défaut d’option, la loi impose ce régime matrimonial aux époux.
Mais, ces derniers peuvent choisir l’un des deux autres régimes organisés par la loi.
Cependant, il faut noter que lorsque le mari n’a pas souscrit l’option de
monogamie, il ne peut choisir le régime communautaire.
Dans les mariages polygamiques, le mari ne peut utiliser les revenus de l’une
des épouses au profit des autres.
2.2.3.2.1.1. Exercice de l’option
L’option s’exerce au moment du mariage sous la forme d’une déclaration
commune recueillie par l’Officer de l’état civil.
L’option est irrévocable et les époux ne peuvent changer de régime pendant
le mariage.

36
LES DROITS DE LA FEMME

Nota bene : Le mineur, qui a reçu le consentement nécessaire pour son mariage,
peut exercer son droit d’option.
Cependant le majeur, en tutelle ou en curatelle, ne peut adopter un régime
matrimonial autre que le régime de la séparation des biens sans l’assistance de
son tuteur ou curateur.
2.2.3.2.1.2. Le régime de droit commun de la séparation des biens
Sous ce régime, chacun des époux conserve l’administration, la jouissance et
la libre disposition de ses biens personnels.
Chaque époux reste seul tenu de ses dettes personnelles, nées avant ou
pendant le mariage, sauf les dettes concernant les charges du ménage.
A la dissolution du lien conjugal, chacun des époux reprend les biens qui
lui appartiennent.
2.2.3.2.2. Le régime dotal
C’est un régime sous lequel certains biens, donnés à la femme à l’occasion
de son mariage par d’autres personnes que son conjoint, sont soumis à une
gestion spéciale.
Ces biens sont appelés biens dotaux. Il peut s’agir de biens qui lui ont été
donnés par ses parents, par des amis, etc. En aucun cas, les biens donnés par le
mari ne peuvent être soumis au régime dotal.
Il est important de préciser que le régime dotal n’a aucun rapport avec la dot
que le mari verse à son épouse à l’occasion du mariage.
L’institution du régime dotal vise à assurer aux époux et à leurs futurs
enfants la garantie d’une certaine sécurité au niveau matériel et financier.
• NATURE DES BIENS SOUMIS AU REGIME DOTAL
La loi dispose que les biens soumis au régime dotal ne peuvent être que des
immeubles immatriculés, des valeurs mobilières déposées dans une banque à
un compte spécial dit compte dotal, ou des animaux constituant un cheptel.
Sont également soumis à ce régime les biens acquis en échange d’un bien dotal.
Les autres biens des époux sont soumis au régime de la séparation des biens.
• ADMINISTRATION DES BIENS SOUMIS AU REGIME DOTAL
Bien que les biens dotaux appartiennent à la femme, ils sont administrés
pendant le mariage par le mari.

37
LES DROITS DE LA FEMME

Cependant, si les biens soumis au régime dotal sont mis en péril par la mauvaise
administration du mari, la femme peut demander la séparation des biens
devant le juge.
• INALIENABILITE DES BIENS DOTAUX
Le régime dotal vise à assurer la sécurité matérielle de la famille durant le mariage.
C’est pourquoi les biens dotaux ne peuvent être donnés, vendus ou
hypothéqués, ni par le mari, ni par la femme, ni par les deux conjointement.
Cependant, la loi prévoit deux exceptions :
- La femme peut, avec le consentement du mari, donner un immeuble
soumis au régime dotal pour l’établissement des enfants communs,
c’est-à-dire les enfants qui sont issus de leur mariage présent.
- Des biens dotaux peuvent être vendus avec le consentement du mari,
si l’intérêt de la famille ou la bonne administration du patrimoine de
la femme l’exige. Mais dans ce cas, il faut une autorisation du juge.
• RESTITUTION DES BIENS DOTAUX
Les biens dotaux sont restitués sans délai à la femme, par le mari ou ses
héritiers, à la dissolution du mariage, en cas de séparation de corps ou de
séparation de biens prononcée par le juge.
2.2.3.2.3. Le régime communautaire de participation aux meubles et acquêts
Ce régime est communément appelé régime de la communauté des biens.
Quand les époux se marient sous le régime communautaire, leurs biens sont
gérés, pendant le mariage, comme sous le régime de la séparation des biens, et
liquidés, à la dissolution du régime, comme s’ils étaient communs.
Cela signifie que, durant le mariage, les biens des époux sont gérés comme
sous le régime de la séparation des biens. Ainsi, chaque époux conserve la libre
administration de ses biens personnels. Il en conserve aussi la libre disposition
sauf dans certains cas prévus par la loi.
• ADMINISTRATION DES BIENS DES ÉPOUX
Par l’adoption du régime communautaire, les époux se donnent le pouvoir
réciproque et irrévocable d’accomplir sur leurs biens tous actes
d’administration. Chaque époux peut donc effectuer sur ses biens propres,
aussi bien que sur ceux de son conjoint, tous les actes nécessaires à leur
conservation ou à leur mise en valeur.

38
LES DROITS DE LA FEMME

De même les actes, que l’un des conjoints fait seul, engagent solidairement les
deux époux.
Les époux sont aussi tenus de payer solidairement les dettes, quel que soit
l’époux qui les contracte, et même si ces dettes sont antérieures au mariage.
Par exemple, si l’épouse avait contracté un prêt auprès d’une banque avant
son mariage, son mari sera aussi obligé de participer au paiement de cette
dette tant que durera leur mariage.
• ACTES DE DISPOSITION SUR LES BIENS DES ÉPOUX
Les actes de disposition, c’est-à-dire la vente, la donation, ou l’hypothèque
portant sur un immeuble, un fonds de commerce ou sur des droits sociaux
non négociables, ne peuvent s’effectuer sans le consentement des deux époux.
Par exemple, si le mari veut vendre une maison qui lui appartient
personnellement, il lui faut obligatoirement l’accord de son épouse pour
pouvoir le faire.
Ce consentement des deux époux est également nécessaire :
- pour donner à bail un immeuble à usage commercial ;
- pour les baux à usage d’habitation supérieurs à neuf (9) ans.
Dans tous les autres cas, l’époux peut disposer librement de ses biens, comme
sous le régime de la séparation des biens.
• ACQUISITION DE BIENS PAR LES ÉPOUX
Chaque époux peut acquérir seul, et sans le consentement du conjoint, toutes
espèces de biens.
Cependant, le consentement du conjoint est nécessaire :
- pour accepter une succession dévolue à l’un des époux, sauf si ce
dernier l’accepte sous bénéfice d’inventaire ;
- pour accepter une donation avec charge faite à l’un des époux. Cette
restriction s’explique par le fait que, dans le régime communautaire,
les dettes doivent être payées solidairement. En acceptant purement
et simplement un héritage ou une donation avec charge, l’héritier ou
le donataire peut se retrouver avec des dettes que son conjoint devra
payer avec lui. Dès lors, il est donc normal que le conjoint donne son
consentement pour être engagé.

39
LES DROITS DE LA FEMME

• DISSOLUTION DU RÉGIME COMMUNAUTAIRE


A la dissolution du régime résultant du décès, du divorce ou de la séparation
de corps, il est procédé à la liquidation de la communauté.
Nota bene : Si le désordre des affaires d’un époux, ou sa mauvaise administration,
donne lieu de craindre que la continuation du régime communautaire ne
compromette les intérêts du conjoint, celui-ci peut demander la séparation des
biens devant le juge.
Pour liquider la communauté, les biens du couple sont divisés en deux catégories :
- les biens propres de chaque époux ;
- les biens composant la communauté.
• LES BIENS PROPRES
Ce sont les immeubles immatriculés dont l’époux était propriétaire avant le
mariage, ceux qu’il a acquis personnellement pendant la mariage par
succession ou libéralité (les biens qu’il n’a pas achetés), les droits exclusivement
attachés à la personne.
• LES BIENS COMMUNS
Ce sont tous les autres biens acquis pendant le mariage à titre onéreux, c’est-
à-dire qui ont été achetés par un des époux ou par les deux conjointement. Il
s’agit aussi des salaires et autres gains des époux.
• LIQUIDATION DE LA COMMUNAUTÉ
Les biens communs du couple servent d’abord à régler les dettes régulièrement
nées pendant le mariage. Cela veut dire que ces biens pourront être vendus,
si nécessaire, pour éponger les dettes que le couple doit payer solidairement.
Cependant, il faut souligner que seules les dettes « régulières » sont prises
en compte. Les dettes de jeu, les amendes pour infraction pénale, par exemple,
ne seront pas supportées par la communauté, mais par l’époux qui est
personnellement tenu.
Après règlement des dettes, le surplus sera partagé par moitié entre les époux
ou leurs héritiers.
Si le passif est supérieur à l’actif, les époux seront tenus de combler le manque
sur leurs biens propres, chacun pour moitié.

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LES DROITS DE LA FEMME

2.2.3.3. Les effets du mariage dans le ménage : les charges du ménage


Le ménage se compose de la famille légitime issue du mariage. Il se compose
du père, de la mère et des enfants. C’est dire que la loi méconnaît la famille

41
LES DROITS DE LA FEMME

élargie, comme on en voit le plus souvent au Sénégal, où les tantes, les neveux,
les oncles, etc. sont, de fait, partie intégrante de la famille. Ainsi, pour organiser
la vie familiale, la loi détermine le chef de famille qui détient l’autorité au sein de
la famille. Cette position déterminera les relations parents–enfants et l’obligation
de supporter les charges du ménage.
2.2.3.3.1. Les rapports parents–enfants
Le Code de la Famille vise d’abord à protéger l’enfant et à garantir les conditions
de son épanouissement par l’éducation, la nourriture, et l’entretien à la charge
des parents. La loi considère l’exécution de ces charges comme un des attributs
de la puissance paternelle au nom de l’intérêt de l’enfant. Ce sont les parents qui
exécutent les actes graves à la place des enfants.
2.2.3.3.1.1. Définition de la puissance paternelle
La puissance paternelle, ou autorité parentale, désigne tous les pouvoirs
que détiennent les parents à l’égard de leurs enfants mineurs, c’est-à-dire âgés
de moins de dix-huit (18) ans.
La puissance paternelle ne consiste pas à obliger l’enfant à faire tout ce que les
parents désirent. D’après la loi, l’autorité parentale s’exerce dans l’intérêt de l’enfant.
Ainsi, le père et la mère ont l’obligation de nourrir, entretenir, élever et éduquer
leurs enfants.
2.2.3.3.1.2. L’exercice de la puissance paternelle : le rôle de chef de famille
La puissance paternelle appartient aussi bien au père qu’à la mère. C'est
pourquoi, le nouveau projet de loi sur le Code de la Famille, non encore en
vigueur, la désigne sous le terme de puissance parentale. Seulement, l’exercice
de cette autorité est confié au père qui, par la loi, est qualifié de chef de famille.
Toutefois, la loi prévoit des cas où la mère exerce la puissance paternelle
selon l’intérêt de l’enfant. C’est le cas par exemple :
• Lorsque le père n’a plus la qualité de chef de famille, du fait de son
absence ou de son éloignement, il peut y avoir une délégation de
puissance paternelle au profit de la mère.
• Lorsque le père est condamné pour abandon de famille.
• Lorsque les parents divorcent et que la garde des enfants est confiée à
la mère.

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LES DROITS DE LA FEMME

2.2.3.3.2. Les charges du ménage


2.2.3.3.2.1. Définition des charges du ménage
Ce sont les dépenses nécessaires à l’entretien du ménage (nourriture, frais de
santé, habillement, logement, etc.) et à l’éducation des enfants.
2.2.3.3.2.2. Qui supporte les charges du ménage ?
C’est le mari, désigné par la loi chef de famille, qui supporte, à titre principal,
les charges du ménage.
La femme n’est cependant pas dispensée de contribuer aux charges du
ménage ; lorsqu’elle travaille et a des revenus, elle doit participer aux frais
nécessaires à l’entretien du ménage et à l’éducation des enfants.
Si elle refuse, le mari peut saisir le juge pour l’obliger à contribuer aux charges
du ménage.
Les dettes liées aux charges du ménage, contractées par l’un des époux, doivent
être payées par les deux conjoints solidairement, sauf si les dépenses qui les ont
suscitées sont manifestement exagérées par rapport au train de vie du ménage.

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LES DROITS DE LA FEMME

CHAPITRE TROISIEME :
L’OBLIGATION ALIMENTAIRE

3.1. Définition et caractéristiques


3.1.1. Définition
L’obligation alimentaire est une obligation imposée à une personne de nourrir,
loger, vêtir, éduquer une autre personne, en vertu des relations familiales qui les
lient. Ces relations peuvent être des relations de mariage (entre époux), parenté
(parents-enfants) ou d’alliance (membres de famille du conjoint). Ces obligations
sont fixées en fonction des besoins du bénéficiaire et des moyens du débiteur.
Dans certains cas, il est tenu compte même des besoins ludiques (équitation,
cours de piano ).

3.1.2. Caractéristiques
3.1.2.1. L’obligation alimentaire légale ou conventionnelle
L'obligation alimentaire peut être légale ou conventionnelle. Cette obligation
peut être imposée par la loi (obligation légale) ou par une convention, c’est-à-
dire un « accord » entre les parties (obligation conventionnelle).
3.1.2.2. L’obligation en nature
L’obligation peut-être en nature (riz, savon, vêtements ) ou en espèces, c’est-
à-dire une somme d’argent fixée par le juge ou par un accord entre les parties.

3.1.3. Les conditions de l’obligation alimentaire


L’obligation est exécutée par le débiteur : dans la mesure de ses moyens ; et
si le créancier est dans le besoin. Ce qui se traduit :
• Pour le débiteur, de cesser l’exécution s’il n’en a plus les moyens. Exemple :
S’il a perdu son emploi ou autres sources de revenus, ou demander la
réduction du montant de l’obligation si ces revenus ont baissé.
• Pour le créancier, s’il a un revenu suffisant lui permettant de prendre en
charge ses besoins, il n’a plus droit à l’entretien de la part du débiteur.
S’il a la possibilité d’avoir un revenu qu’il perd du fait de sa négligence
ou par paresse, le débiteur peut refuser de lui verser la pension.

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LES DROITS DE LA FEMME

3.2. LES DIFFERENTES SORTES


D’OBLIGATIONS ALIMENTAIRES
La loi prévoit différentes sortes d’obligations alimentaires, appelées obligations
alimentaires légales, imposées pendant le mariage, et après la dissolution du
mariage, et selon la nature des relations dans le cadre de la famille. A côté des
obligations alimentaires légales, existe l’obligation alimentaire conventionnelle,
exécutée sur la base d’un accord entre les parties.

3.2.1. Les obligations alimentaires légales


3.2.1.1. L’obligation alimentaire résultant du mariage
3.2.1.1.1. Pendant le mariage
Cette obligation fait partie des charges du ménage qui s’exécutent à deux
niveaux : dans les relations entre époux, et dans les relations entre parents et enfants.
3.2.1.1.1.1. Entre époux
C’est-à-dire entre mari et femme, il s’agit de l’obligation pour le mari de
nourrir, loger et vêtir la femme. Cela correspond à l’obligation d’entretien. En
cas de divorce ou de séparation du corps, cette obligation est remplacée par la
pension alimentaire.
3.2.1.1.1.2. Entre parents et enfants
Dans les relations parents-enfants, c'est l’obligation alimentaire réciproque.
L’obligation alimentaire incombe aux parents vis-à-vis des enfants mineurs.
En particulier, c’est le père, en tant que chef de famille, qui a le devoir de nourrir,
loger, vêtir et éduquer les enfants. Mais au-delà de l’obligation d’entretien des
enfants qui incombe aux parents, l’obligation alimentaire est une obligation
réciproque qui se perpétue dans le cadre familial. Dans ce cas, elle devient une
obligation réciproque entre parents et enfants. Cela veut dire qu’un père peut
l’obtenir de son fils, et ce dernier peut aussi l’avoir de son père.
Exemple : Le fils qui travaille doit prendre en charge l’alimentation de
ses parents retraités ou sans revenus.
3.2.1.1.2. Après la dissolution du mariage
La dissolution du mariage est constatée soit en cas de divorce, soit en cas de
décès de l’un des conjoints. L’exécution de l’obligation alimentaire varie selon
chacune des situations.

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LES DROITS DE LA FEMME

3.2.1.1.2.1. En cas de divorce


Il faut distinguer les causes du divorce, selon que c’est pour des raisons
d’incompatibilité d’humeur, ou de maladie grave et incurable.

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LES DROITS DE LA FEMME

En cas de divorce pour incompatibilité d’humeur


En cas de divorce pour incompatibilité d’humeur, le mari qui obtient le divorce
doit verser à la femme une pension alimentaire pour remplacer l’obligation d’entretien.
Cette pension est versée, à compter du jour du jugement, pour une durée de six (6)
mois à un (1) an.

En cas de divorce pour m


 aladie grave et incurable
Si c’est le mari qui demande le divorce, il devra verser une pension alimentaire.
Celle-ci sera versée pendant une durée maximale de trois (3) ans.
Si c’est la femme qui demande le divorce pour maladie grave et incurable du
mari, le Code de la Famille ne prévoit pas qu’elle devra verser une pension
alimentaire au mari.
3.2.1.1.2.2. En cas de décès du mari
Les héritiers doivent à la veuve l’alimentation et le logement pendant trois
cents (300) jours, soit dix (10) mois à compter du décès. Mais, cette obligation
cesse si la veuve se remarie avant l’expiration du délai.
Elle pourra exiger le versement de la pension alimentaire à l’un quelconque
des héritiers (généralement le plus riche), et ce dernier est obligé de payer. Cette
règle est valable toutes les fois qu’il y a plusieurs débiteurs de la pension
alimentaire. Celui qui paiera pourra se retourner vers les autres pour exiger le
remboursement. C’est la règle de solidarité de la dette alimentaire. S’agissant
d’un besoin vital, la loi favorise le créancier pour faciliter sa satisfaction. La règle
de la solidarité est un moyen de garantir le paiement de la dette alimentaire.
3.2.1.2. L’obligation alimentaire résultant de la parenté de l’alliance
3.2.1.2.1. Entre parents
L’obligation alimentaire peut être à la charge du père vis-à-vis du fils et vice
versa. Mais, il faut distinguer les cas de la famille légitime, la famille naturelle, et la
famille adoptive.
3.2.1.2.1.1. La famille légitime
Il s’agit de la famille où le père et la mère sont mariés. Dans ce cas, l’obligation
alimentaire existe entre : le père et la mère ; le père, la mère et leurs enfants ;
entre les frères et sœurs, qu’ils soient du même père et de la même mère, ou
seulement du même père, ou seulement de la même mère.
L’obligation alimentaire, entre frères et sœurs, ne s’étend pas à leurs enfants.

47
LES DROITS DE LA FEMME

3.2.1.2.1.2. La famille naturelle


Il s’agit de la famille dont les parents ne sont pas mariés. Il faut distinguer :
• Si l’enfant est reconnu par le père, il jouit des mêmes droits et
obligations alimentaires que les enfants légitimes.
• Si l’enfant n’est pas reconnu, si le père refuse de le déclarer alors
qu’il a procédé au baptême de l’enfant, la mère peut saisir le juge
pour obtenir qu’il verse la pension alimentaire avant que le bébé
n’ait deux (2) ans.
Si l’enfant atteint la majorité, il pourra demander à son père la pension
alimentaire jusqu’à sa 22ème année.
3.2.1.2.1.3. La famille adoptive
C’est la famille où le père et la mère sont étrangers à l’enfant pris en charge et
n’ont aucun lien de sang. L’obligation alimentaire existe dans la famille adoptive entre
l’adoptant et l’adopté.
Cette obligation sera exécutée différemment selon qu’il s’agit d’une adoption
plénière ou d'une adoption limitée.
• Cas de l’adoption plénière
L’adoption est dite plénière lorsqu’il y a rupture totale avec la famille
d’origine. Même le nom que l’enfant va porter sera celui de la famille
adoptive. L’obligation alimentaire répond ici aux mêmes conditions que
dans la famille légitime, c’est-à-dire dont le père et la mère sont mariés.
• Cas de l’adoption limitée
L’adoption est dite limitée lorsque les liens avec la famille d’origine
sont maintenus. Dans pareil cas, lorsque la famille adoptive est en
difficulté, l’enfant pourra réclamer des aliments à la famille d’origine.
3.2.1.2.2. Entre alliés
L’alliance est la parenté née du mariage. Un époux et les frères, sœurs, père,
mère, enfants du conjoint sont des alliés. L’obligation alimentaire entre alliés est
limitée. Elle n’existe qu’entre l’époux et les enfants du conjoint. Les frères, les
sœurs, les parents et les grands parents n’en font pas partie.
En cas de divorce des époux ou du décès du conjoint, l’obligation alimentaire cesse.

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LES DROITS DE LA FEMME

3.2.2. L’obligation alimentaire conventionnelle


Elle existe lorsqu’une personne décide de verser une pension alimentaire alors
que la loi ne la lui impose pas.
Exemple : Moussa Fall, qui ne doit pas de pension alimentaire au père
de sa femme décédée, peut le faire volontairement car la loi ne l’y
oblige pas.
Dans ce cas, on aura une obligation alimentaire conventionnelle.
Celle-ci est limitée à une année, sauf en cas de vieillesse, d’infirmité ou de
maladie du créancier d’aliments.
Exemple : Lorsque le père est frappé d’une incapacité totale à exécuter
une activité rémunératrice quelconque. Dans ce cas, l’obligation
alimentaire peut durer plus d’une année.

3.3. L’exécution de l'obligation alimentaire


3.3.1. L’objet de l’obligation alimentaire
Le débiteur d’aliments a le choix entre :
1) Verser chaque mois une certaine somme d’argent au créancier
d’aliments, il s’agit d’une obligation en argent.
2) Donner au créancier des vêtements, du riz, du savon, etc. Il
s’agit d’une obligation en nature.
3) Héberger le créancier d’aliments chez lui, et dans ce cas,
l’obligation alimentaire s’exécutera en nature.
Nota bene : L’hébergement n’est pas obligatoire si le débiteur d’aliments ne
le veut pas.

3.3.2. Les conditions d’exécution de l’obligation alimentaire


L’obligation alimentaire existe lorsque :
1) Le créancier est dans le besoin, c’est-à-dire lorsque la
pension alimentaire constitue le seul moyen d’assurer la
subsistance, ou en constitue la source principale.
2) et si le débiteur est en mesure de lui venir en aide.
Cela veut dire que l’exécution de l’obligation alimentaire dépend des moyens
dont dispose le débiteur d’aliments. Ainsi, le juge ne peut pas le forcer à verser la

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LES DROITS DE LA FEMME

pension alimentaire si ses revenus ne couvrent pas ses besoins personnels et


ceux des membres de sa famille dont il a la charge.
De même, l’obligation alimentaire peut être diminuée, augmentée ou même
supprimée, en tenant compte des possibilités financières du débiteur.

3.3.3. Les caractères de l’obligation alimentaire


3.3.3.1. L’obligation alimentaire est personnelle
Cela veut dire qu’on ne peut pas la transmettre en héritage. Elle cesse avec la
mort du créancier d’aliments.
3.3.3.2. La compensation légale est interdite en matière
d’obligation alimentaire
Cela veut dire qui si le créancier a une dette envers le débiteur alimentaire,
supérieure ou égale au montant de la pension alimentaire, le débiteur ne peut
pas se fonder sur sa créance pour ne pas exécuter l’obligation alimentaire.
Exemple : Sidi Diop doit, à son fils Mamadou, la somme de vingt-cinq
(25 000) FCFA qu’il lui avait empruntés au courant du mois. A la fin de
celui-ci, Mamadou doit verser la totalité des 25 000 FCFA qu’il lui doit
chaque mois, au titre de pension alimentaire, sans tenir compte de la
dette de 25 000 FCFA que son père lui doit.

3.3.4. La réclamation de la pension alimentaire


3.3.4.1. La demande de pension
Le créancier d’aliments doit faire la demande de la pension alimentaire dans
un délai de deux (2) mois. Passé ce délai, on suppose qu’il n’est pas dans le
besoin, et on considère alors que le débiteur ne lui doit rien. Cependant, il peut
prouver que son inaction a une autre cause que l’absence de besoin. Par exemple,
il peut avoir voyagé pendant cette période de deux (2) mois.
3.3.4.2. Arriérés de pension
En cas de demande en justice, le créancier, qui aura obtenu jugement de con-
damnation, pourra réclamer la somme échue depuis la demande en justice, sans
que le débiteur puisse lui opposer la prescription de deux mois prévue par la loi.

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LES DROITS DE LA FEMME

3.3.4.3. Sanction du débiteur défaillant


En cas de non respect de l’obligation alimentaire par le débiteur, il risque une
peine d’emprisonnement et une amende. On considère qu’il a fait un abandon
de domicile.
3.3.4.4. Le tribunal compétent
Le tribunal compétent, pour régler le litige né de l’exécution de l’obligation
alimentaire, est le tribunal départemental du domicile ou de la résidence du
créancier ou de celui du débiteur au choix du créancier.

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LES DROITS DE LA FEMME

CHAPITRE QUATRIEME :
LES VIOLENCES CONTRE LA FAMILLE

Il s'agit ici de répertorier toutes les infractions prévues et punies parce que
compromettant l'équilibre du foyer familial.

4.1. Les violences morales et matérielles


4.1.1. L'abandon de la famille
Il se présente sous deux (2) formes : l'abandon moral et matériel et celui pécuniaire.
4.1.1.1. L’abandon moral et matériel de la famille
4.1.1.1.1. Quand peut-on dire qu’il y a abandon
moral et matériel de la famille ?
Selon l'article 350 du Code pénal, c’est le cas du conjoint qui abandonne,
sauf motif grave, pendant plus de 2 mois, la résidence familiale et se soustrait à
tout ou partie des obligations d'ordre moral et matériel résultant du mariage,
ainsi que de la puissance paternelle. Le délai de deux mois ne pourra être
interrompu que par un retour au foyer, impliquant la volonté de rejoindre
définitivement la vie familiale.
4.1.1.1.2. Sanction de l’abandon
L’article 350 du Code pénal dispose que le coupable « sera puni d’un
emprisonnement de trois (3) mois à un an et d’une amende de vingt (20) à deux
cent cinquante mille (250 000) FCFA.
La loi précise que, pour obtenir répression du délit d'abandon par le conjoint,
la poursuite comporte initialement une sommation ou interpellation constatée
par procès-verbal de la personne poursuivie par un huissier, et un délai de quinze
(15) jours lui sera accordé pour exécuter ses obligations.
4.1.1.2. L’abandon pécuniaire de la famille
4.1.1.2.1. Quand peut-on dire qu’il y a abandon pécuniaire ?
Selon l'article 351 du Code pénal, c’est le fait de toute personne qui, au
mépris d'un acte exécutoire ou décision de justice l'ayant condamné à verser
une pension alimentaire à son conjoint, à ses ascendants, à ses descendants,

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LES DROITS DE LA FEMME

53
LES DROITS DE LA FEMME

sera volontairement demeurée plus de deux (2) mois sans fournir la totalité des
subsides déterminés par le juge, ni acquitter le montant intégral de la pension.
4.1.1.2.2. Sanctions du délit
Le coupable sera puni des mêmes peines que pour l’abandon moral et matériel
et pourra être frappé de l'interdiction de ses droits civiques, civils et de famille.

4.1.2. L'adultère
L'article 329 du Code pénal dispose que l'adultère est le fait pour une personne
mariée d'avoir des relations sexuelles avec quelqu'un qui n'est pas son conjoint,
ne pourra être dénoncé que par l'autre époux. L'article 329, alinéa 2, retient que
des usages tolérés par la coutume ne sauraient en eux-mêmes constituer
l'adultère. Le délit n'est puni que d'une amende de vingt (20) à cent mille
(100 000) FCFA.

4.1.3. La bigamie
Le délit de bigamie consiste pour une personne à "contracter un second mariage
alors qu'elle en était empêchée par l'effet d'un précédent mariage non dissout, même
si ce précédent mariage n'a pas été célébré, ni constaté, ni déclaré tardivement".
Le mari coupable sera puni des mêmes peines d'emprisonnement que pour
l'adultère et d'une amende de vingt (20) à trois cent mille (300 000) FCFA.

4.1.4. La répudiation
Le Code de la Famille retient dans son article 166 que le divorce ne peut être
invoqué que pour causes bien précises.
Il ne peut être que judiciaire, la répudiation n'est plus admise en droit sénégalais.
Il n'existe pas de sanction pénale de la répudiation, mais le mari qui répudie
sa femme peut être condamné à lui payer des dommages et intérêts.

4.2. Les violences physiques


4.2.1. Les coups et blessures volontaires
4.2.1.1. Définition générale et sanctions
L'article 294 du Code pénal dispose que "Tout individu qui, volontairement,
aura fait des blessures ou porté des coups ou commis toute autre violence ou
voie de fait, s'il est résulté de ces sortes de violences une maladie en une incapacité
totale de travail personnel pendant plus de vingt (20) jours, sera puni d'un

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LES DROITS DE LA FEMME

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LES DROITS DE LA FEMME

emprisonnement d'un an à cinq ans et d'une amende de 20 000 à 250 000


francs; le coupable pourra en outre être privé des droits mentionnés en l'article
34 pendant cinq ans au moins et dix ans au plus".
4.2.1.2. Coups et blessures volontaires contre des personnes vulnérables
4.2.1.2.1. Qu’entend-t-on par personne vulnérable ?
Il s’agit de personne de sexe féminin, ou de personne particulièrement
vulnérable en raison de son état de grossesse, de son âge avancé, ou de son état
de santé ayant entraîné une déficience physique. Le coupable de coups et
blessures sur ces personnes sera puni d'un emprisonnement d'un an et d'une
amende de trente (30) à cent cinquante mille (150 000) FCFA. Le sursis à
l'exécution de la peine pourra être prononcé.
4.2.1.2.2. La vulnérabilité et la préméditation en tant que causes
d’aggravation de la sanction
L'article 295 du Code pénal prévoit des circonstances aggravantes pour les
coups et blessures volontaires. A cet effet, il dispose : "Lorsqu'il aura eu
préméditation ou guet-apens, la peine sera, si la mort s'en est suivie ou si les
violences ont eu pour conséquence la mutilation, l'amputation ou la privation de
l'usage d'un membre, la cécité ou la perte d'un œil ou d'autres infirmités
permanentes, celle des travaux forcés à temps de dix (10) à vingt (20) ans...".
4.2.1.3. Coups et blessures entre conjoints
4.2.1.3.1. Définition
Selon l'article 297 bis du Code pénal, il s’agit de coups portés ou de blessures
volontairement commises, toute autre violence ou voie de fait sur la personne de
son conjoint.
4.2.1.3.2. Sanctions
Le coupable sera puni d'une peine d'emprisonnement d'un an à cinq ans, et
d'une amende de cinquante (50) à cinq cent mille (500 000) FCFA, s'il résulte de
ces violences une maladie ou une incapacité de travail de plus de vingt (20) jours.
Lorsque les coups, ou d'autres violences ou voies de fait n'auront pas
occasionné une maladie ou une incapacité totale de travail d'une durée égale à
vingt (20) jours, le coupable sera passible d'un emprisonnement d'un an et d'une
amende de trente (30) à cent cinquante mille (150 000) FCFA. Le sursis à
l'exécution de la peine ne pourra être prononcé.

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LES DROITS DE LA FEMME

S'il résulte des différentes sortes de violence, la mutilation, l'amputation ou la


privation de l'usage d'un membre, la cécité ou la perte d'un œil, ou toutes autres

57
LES DROITS DE LA FEMME

infirmités permanentes, la peine sera celle des travaux forcés à temps de dix (10)
à vingt (20) ans.
Si les coups ou violences habituellement pratiqués ont entraîné la mort sans intention
de la donner, la peine des travaux forcés à perpétuité sera toujours prononcée.
Si les coups ou violences habituellement pratiqués ont entraîné la mort, les
auteurs seront punis comme coupables d'assassinat.

4.2.2. L’excision
4.2.2.1. Définition
L’excision est le fait de porter ou de tenter de porter atteinte à l'intégrité de
l'organe génital d'une personne de sexe féminin, par ablation totale ou partielle
d'un ou plusieurs de ses éléments, par infibulation, par insensibilisation ou par
un autre moyen.
4.2.2.2. Sanction
L’article 299 bis du Code pénal prévoit contre le coupable une peine
d’emprisonnement de six (6) mois à cinq (5) ans. La peine maximale sera appliquée
lorsque ces mutilations sexuelles auront été réalisées ou favorisées par une
personne relevant du corps médical ou paramédical.
4.2.2.3. En cas de mort de la victime
Lorsqu'elles auront entraîné la mort, la peine des travaux forcés à perpétuité
sera toujours prononcée.
Sera punie des mêmes peines toute personne, qui aura par des dons,
promesses, influences, menaces, intimidation, alors d'autorité ou de pouvoir,
provoqué ces mutilations sexuelles ou donné les instructions pour les commettre.

4.2.3. Le viol conjugal


Même si le cadre de la famille n'est pas spécifiquement visé, le viol conjugal
peut être réprimé par le biais de l'article 320 du Code pénal.
Cet article dispose que tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature
qu'il soit, commis sur la personne d'autrui par violence, contrainte, menace ou
surprise est un viol.
Le viol sera puni d'un emprisonnement de cinq (5) à dix (10) ans.
Si l'infraction a été commise sur un enfant au-dessus de treize (13) ans
accomplis, ou une personne particulièrement vulnérable en raison de son état

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LES DROITS DE LA FEMME

de grossesse, de son âge avancé ou de son état de santé ayant entraîné une
déficience physique ou psychique, le coupable subira le maximum de la peine.

4.2.4. L'inceste et la pédophilie


4.2.4.1. Définition et sanction de l’inceste
L'inceste se caractérise principalement par des relations sexuelles, le plus
souvent forcées, entre un ascendant et son enfant. Une lecture combinée des
articles 319 et 320 bis du Code pénal donne une idée sur l'incrimination et la
sanction de l'inceste en droit. L'article 319 dispose : "Tout attentat à la pudeur
consommé ou tenté sans violence sur la personne d'un enfant de l'un ou de
l'autre sexe âgé de moins de treize ans, sera puni d’un emprisonnement de deux
à cinq ans". L'attentat à la pudeur commis par tout ascendant ou toute personne
ayant autorité sur la victime mineure, même âgée de plus de 13 ans, est sanctionné
du maximum de la peine.

4.2.4.2. La pédophilie
L'article 320 bis relatif à la pédophilie dispose : "Tout geste, attouchement,
caresse, manipulation pornographique, utilisation d'image ou de sons par un
procédé technique quelconque, à des fins sexuelles sur un enfant de moins de
seize ans de l'un ou l'autre sexe constitue l'acte pédophile puni d'un
emprisonnement de cinq à dix (10) ans". Si le délit a été commis par un ascendant
ou une personne ayant autorité sur le mineur, le maximum de la peine sera
toujours prononcé.
La tentative est punie comme le délit consommé.

4.2.5. Le mariage forcé


Le Code pénal, en son article 300, punit quiconque, qui pour consommer un
mariage célébré selon la coutume, accomplit ou tente d'accomplir l'acte sexuel
sur la personne d'un enfant, de moins de treize (13) ans accomplis, d'un
emprisonnement de deux (2) à cinq (5) ans.

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LES DROITS DE LA FEMME

CHAPITRE CINQUIEME :
LE DIVORCE

5.1. Définition
Le divorce est la rupture du lien conjugal prononcée par le juge. Cela veut
dire que le divorce prononcé par toute personne autre que le juge n'est pas
valable. C'est ainsi que la loi ne considère pas comme tel :
• le divorce décidé par les parents ou l'un quelconque des membres
de la famille du conjoint ;
Exemple : Mécontent du comportement de Modou, le mari de sa fille,
Issa, le père de celle-ci, dit à Modou qu’il met fin au mariage et qu’il ne
cherche plus à revoir sa fille. Dans ce cas, la loi considère qu’il ne peut
pas y avoir de divorce sur la simple décision du père de la femme. Le
mariage reste alors valable.
• le divorce décidé sur la simple répudiation de la femme par le mari.
Exemple : Moussa, à la suite de l’une des disputes qui marquent
quotidiennement leur vie de couple, dit à sa femme "Je te répudie". Si
cette dernière considère qu'elle a divorcé et retourne chez ses parents,
la loi ne considère pas qu'il y a divorce. Leur mariage reste valable.
Dès lors, la femme ne peut pas se remarier sous peine de commettre le délit de
bigamie. Tout comme, l'homme ne peut pas prendre une autre épouse s'il a fait
une option de monogamie au moment du mariage. Dans ce cas, il commettra lui
aussi le délit de bigamie.
Ainsi donc pour que le divorce existe, il faut qu'il soit demandé personnellement
par les époux et qu'il soit prononcé par le juge. Dans ce cas, la loi prévoit différentes
formes de divorce.
A côté du divorce, il y a la séparation de corps qui peut être définie comme
un relâchement de la relation matrimoniale.

60
LES DROITS DE LA FEMME

5.2. Les différentes formes de divorce


Deux (2) formes de divorce sont retenues par la loi : celui obtenu d'un commun
accord entre les époux, appelé divorce par consentement mutuel ; et celui obtenu
à la demande de l'un des époux, appelé le divorce contentieux.

5.2.1. Le divorce par consentement mutuel


Les époux doivent se rendre ensemble devant le président du tribunal départemental
de leur maison conjugale pour introduire une requête en vue de divorce.
Exemple : Si le domicile conjugal se trouve à Tivaouane, c'est le
Président du Tribunal départemental de Tivaouane qui sera saisi.
Mais, il faut que certaines conditions fixées par la loi soient réunies pour que
le juge puisse prononcer le divorce. Ces conditions sont liées aux pièces à fournir,
et à la demande de divorce devant préciser l'accord des époux sur un certain
nombre de points, dont l'accord des deux époux pour divorcer, le partage des
biens dans le cas d'une communauté de biens, et la garde des enfants.
5.2.1.1. Les pièces à fournir
• Le certificat de mariage qui sert à prouver l'existence du mariage.
S'il s'agit d'un mariage non célébré à la mairie et non constaté par
l'Officier de l’état civil dans le cas de mariage coutumier, les époux
peuvent recourir aux possibilités que la loi leur offre de régulariser
leur mariage pour pouvoir obtenir le certificat de mariage.
Ainsi, lorsque le mariage n'est ni célébré, ni constaté par l'Officier de
l’état civil :
1) Dans les six mois (6) qui suivent la célébration du mariage, les
époux peuvent faire une déclaration tardive pour obtenir un
certificat de mariage.
2) Au-delà des six (6) mois, ils devront obtenir d'abord une
autorisation d'inscription sur le registre des mariages par le juge
départemental avant d'avoir un certificat de mariage.
• Le livret de famille, délivré au moment du mariage, ou dans les mêmes
conditions que le certificat de mariage en cas de déclaration tardive.
• Les actes de naissance ou de décès de tous les enfants issus du mariage.
5.2.1.2. Le contenu de la demande de divorce
La demande doit préciser l'accord des époux :

61
LES DROITS DE LA FEMME

• sur le libre consentement des époux pour divorcer, d’où le nom de


divorce par consentement mutuel ;
• sur le partage des biens appartenant aux époux, s'ils avaient signé
pour une communauté de biens ;
• sur la garde des enfants, pour déterminer celui à qui elle sera
confiée dans le meilleur de leurs intérêts pour leur entretien, leur

62
LES DROITS DE LA FEMME

éducation et leur moralité. La loi cherche à les protéger au


maximum contre les conséquences du divorce.
5.2.1.3. Le jugement de divorce
Lorsque le juge constate que les conditions posées par la loi sont remplies, à
savoir la sauvegarde de l'éducation et de l'entretien des enfants, le partage sans
contestation des biens du ménage, le libre accord des conjoints sans menace ni
contrainte, il prononce un jugement qui constate le divorce sur le champ. Les
effets sont immédiats et aucun recours en appel n’est possible.
Il faut faire ensuite la publicité du divorce en marge de leur pièce d’état civil
(certificat de mariage, acte de naissance, livret de famille ).
Dans le cas contraire, il leur demande de revoir leur accord et leur fixe un
autre rendez-vous dans un délai d'un mois.
Nota bene : Il n'est pas nécessaire de donner un quelconque motif au divorce par
consentement mutuel. Les conditions posées par la loi se suffisent à elles-mêmes.

5.2.2. Le divorce contentieux


C'est le divorce demandé seulement par l'un des époux. Personne d'autre ne
peut le faire à sa place. La loi fixe donc les conditions à la demande de divorce,
ainsi que les cas (limités à 10) dans lesquels le juge peut prononcer un jugement
de divorce contentieux.
5.2.2.1. La demande de divorce contentieux
5.2.2.1.1. Qui peut demander le divorce ?
Seul l'époux (l'homme ou la femme) en personne peut demander le divorce. Ni
leurs parents, ni aucun membre de leur famille, ne peuvent le faire à leur place.
5.2.2.1.2. A qui adresser la demande de divorce ?
• L'époux (l’homme ou la femme) doit présenter en personne une demande
au président du tribunal départemental du domicile de la femme.
5.2.2.1.3. Les formes de la demande
• La demande peut être écrite ou orale. Si la demande est faite oralement,
elle doit être constatée par le greffier et signée du demandeur.

63
LES DROITS DE LA FEMME

5.2.2.1.4. Le tribunal compétent


Si c'est la femme qui demande le divorce, elle a la possibilité de saisir soit le
président du tribunal départemental du domicile conjugal, ou celui de la localité
où elle habite si elle a quitté le domicile conjugal.
Si c'est le mari qui demande le divorce, il devra s'adresser au président du
tribunal départemental de la localité où réside la femme. Cela permet d'éviter à
celle-ci les frais de déplacement pour assister aux audiences du procès.
Nota bene : Pour éviter d'être condamnée du délit d'abandon du domicile conjugal,
la femme a besoin de l'autorisation du juge avant de quitter le domicile conjugal.
5.2.2.2. Les causes de divorce contentieux
La loi limite les causes de divorce à dix (10) dans le but de ne pas faciliter la
séparation définitive des couples qui présente beaucoup d’inconvénients sur le
plan social. La dislocation des familles, les risques sur l'éducation et la sécurité
des enfants constituent souvent de menaces graves pour la stabilité de la société
et de l'ordre public. C'est pourquoi le Code de la Famille en fait une situation
d'exception, en limitant les possibilités du divorce aux cas suivants :
5.2.2.2.1. L'absence déclarée de l'un des époux
C'est le cas lorsque le conjoint est parti de chez lui depuis quatre (4) ans au
moins sans donner de ses nouvelles. Cette absence doit être constatée par une
décision de justice. Il existe deux types d’absences.
- L’absence sans aucune nouvelle
• Au bout d’un an, il peut être demandé au juge un jugement déclaratif
d’absence après enquête.
• Au bout de quatre (4) ans, le conjoint peut obtenir un jugement
déclaratif d’absence pouvant motiver le divorce.
• Au bout de dix (10) ans, il est possible d’obtenir un jugement de décès.
- La disparition
• Peut être déclarée, lorsque la personne a disparu dans des
circonstances mettant sa vie en danger. Dans ce cas, il est possible
d’obtenir un jugement de déclaration de décès. C’est le cas lorsque
le manque de nouvelles rend l’existence incertaine, il faut alors
adresser une lettre au Procureur de la République.

64
LES DROITS DE LA FEMME

S’il y a un jugement déclaratif d’absence, on ne revient sur aucun des actes


faits avant son retour, même en cas d’héritage.
Exemple : Ibrahima, le mari de Kiné, est parti du domicile conjugal
depuis cinq (5) ans sans écrire, sans envoyer de quoi entretenir la famille.
Kiné pourra alors faire constater par le juge cette absence, avec l'aide
de témoins, et demander le divorce sur cette base.
5.2.2.2.2. L'adultère de l'un des époux
L'adultère doit être constaté par un huissier, un policier ou un gendarme
suite à une investigation, grâce à une plainte auprès du Procureur, ou de la
police ou de la gendarmerie. L’adultère peut entraîner un désaveu de paternité.
5.2.2.2.3. La condamnation de l'un des époux à une peine infamante
Il s'agit d'une peine entraînant le déshonneur, la condamnation à la peine de
mort, aux travaux forcés à perpétuité ou à temps, la détention criminelle ou à la
dégradation civique. Dans ce dernier cas, le condamné ne peut être ni électeur
ni éligible à une fonction publique.
5.2.2.2.4. Le défaut d'entretien de la femme
C'est le fait pour le mari de ne pas contribuer aux charges du ménage
(nourriture, habillement, frais de santé...), ou de contribuer de manière insuffisante
alors qu’il dispose de revenus suffisants.
5.2.2.2.5. Le refus de l'un des époux d'exécuter les engagements
pris en vue de la conclusion du mariage
Par exemple :
• Non-paiement des sommes dues pour compléter l'intégralité de la
dot après la célébration du mariage.
• En cas de bigamie, c'est-à-dire le non-respect de l'option de
monogamie ou de limitation de polygamie. C’est le cas lorsque
Moussa prend une deuxième épouse alors qu’il avait opté pour la
monogamie ; de même que s’il épouse une quatrième femme alors
qu’il avait opté pour une polygamie limitée à trois (3) épouses.
5.2.2.2.6. L'abandon de famille ou du domicile conjugal
Pour la femme, elle ne peut quitter le domicile conjugal contre la volonté ou
à l’insu de son mari. C’est ce qu’on appelle le « faay » en wolof qui signifie
l’abandon du domicile conjugal par la femme contre la volonté de son mari.

65
LES DROITS DE LA FEMME

5.2.2.2.7. Les mauvais traitements, excès, sévices ou injures


graves rendant l'existence en commun impossible
Il peut s’agir de violences physiques ou morales infligées au conjoint, des

66
LES DROITS DE LA FEMME

humiliations, du refus de préparer à manger par la femme alors que le mari


contribue normalement aux charges du ménage, de la répudiation de l’épouse
par le mari, du refus d’entretenir des relations sexuelles avec son conjoint, du fait
d’entretenir des relations douteuses avec un tiers, etc.
5.2.2.2.8. La stérilité définitive médicalement établie
C'est-à-dire l'impossibilité pour le conjoint d'avoir un enfant. Le juge dans ce
cas peut ordonner toutes expertises de façon à établir la stérilité définitive du
conjoint par un médecin.
5.2.2.2.9. La maladie grave et incurable de l'un des
époux découverte pendant le mariage
C'est le cas pour le Sida, le cancer ou toute autre maladie grave et incurable
que le conjoint ignorait au moment de se marier. La loi exclut de ce fait la maladie
qui était censée connue du conjoint avant le mariage.
5.2.2.2.10. L’incompatibilité d'humeur rendant
intolérable le maintien du lien conjugal
Exemple : Les conjoints ne s'entendent sur presque rien. Ce qui se
manifeste par la fréquence des disputes, des agressions physiques ou
morales, ou que les conjoints n'arrivent plus à se parler.
Il faut noter que cette cause peut être invoquée par un époux qui veut divorcer
sans soulever de griefs précis. Mais, il peut être condamné à des dommages et
intérêts si l’autre époux le demande, outre la pension alimentaire que le mari
devra verser à la femme pendant une période qui ne peut excéder un an.
5.2.2.3. La décision du juge départemental
Le juge départemental écoute d'abord les explications des époux en dehors
de leurs avocats. Il pourra ensuite :
• Tenter de les réconcilier, s'il estime que le rapprochement est possible.
La réconciliation rend caduques tous les jugements antérieurs.
• Ou bien, si la demande de divorce est maintenue, renvoyer l'audience
en leur fixant un rendez-vous dans un délai de six (6) mois au plus
tard. Cette période permettra de mettre à profit les chances de
réconciliation. C’est du temps de réflexion pour éviter les décisions
prises sous le coup de la colère.

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LES DROITS DE LA FEMME

• Renouveler le délai sans que l'ajournement puisse dépasser au total


un délai d'un an, c'est-à-dire pour six (6) mois encore au maximum.
• Si les époux ne se réconcilient pas, un procès-verbal de non
conciliation est dressé par le juge qui statue sur les mesures provisoires
(garde des enfants, droits de visite, pension alimentaire des enfants
et de l’épouse).
• La phase contentieuse commence et se termine par le jugement
de divorce.
En cas d’appel, le mariage survit, c’est-à-dire qu’il y a impossibilité pour la
femme de se remarier ; elle peut continuer à rester dans le domicile conjugal et
l’obligation d’entretien qui pèse sur le mari demeure toujours valable. Jusqu’au
jour où le jugement de divorce sera prononcé, la femme bénéficie de la pension
alimentaire. Après le divorce, seuls les enfants continuent d’en bénéficier. Les
demandes nouvelles sont admises en appel dans une procédure de divorce.
Exemple : révision de la garde, pension alimentaire.

5.3. Les effets du divorce


D'une manière générale, le divorce a pour effet la dissolution du lien matrimonial
pour l'avenir. Les ex-époux sont déchargés de l'ensemble des obligations réciproques
fondées sur la relation de mariage à quelques exceptions près. Ensuite, il faut aller
chez le Greffier en chef pour faire la publicité du divorce dans le sens du respect
des droits des tiers.

5.3.1. La fin des obligations nées du mariage


Les obligations de fidélité, de cohabitation, de secours, d’assistance ne sont
plus supportées par les ex-conjoints, une fois le divorce constaté par le juge.
Dès lors, ils recouvrent leur liberté et le mari pourra immédiatement se remarier
avec une autre personne. Par contre, la femme devra respecter le délai de viduité
(ou yidë en ouolof) pour une durée de trois (3) mois, à compter du jour où le
jugement ne peut plus être contesté devant la Cour d'Appel ou la Cour de
Cassation. Autrement dit, lorsque le jugement de divorce est définitif. Le juge
départemental peut cependant la dispenser de ce délai. L'autre raison
fondamentale de l’instauration de ce délai est de prévenir d’éventuels conflits de
paternité pour l'enfant qui serait né du mariage suivant.

68
LES DROITS DE LA FEMME

Nota bene : La loi n'empêche pas le remariage de conjoints qui viennent de divorcer.
Les époux doivent seulement retourner devant l’Officer de l’état civil pour une
nouvelle union.

5.3.2. La survivance de l'obligation d'entretien


5.3.2.1. A l'égard de la femme
L'obligation d'entretien se transforme en l'allocation d'une pension
alimentaire lorsque :
• Le mari a obtenu le divorce pour cause d’incompatibilité d'humeur.
La pension sera versée pour une durée de six (6) mois à un (1) an.
• Le mari a obtenu le divorce pour cause de maladie grave et incurable
de la femme. La pension sera versée pour une durée maximale de
trois (3) ans.
5.3.2.2. A l'égard des enfants
• Dans le cas du divorce par consentement mutuel, la garde des enfants
sera confiée d'un commun accord à l'un des conjoints.
• Dans le cas du divorce contentieux, c'est le juge qui décidera de la
garde des enfants en tenant compte de leurs intérêts, quant à la
nourriture, l’entretien, l’éducation, la moralité des ex-conjoints, etc.
• L'obligation d'entretien et d'éducation pèse sur le père et la mère,
quelle que soit la personne à laquelle la garde a été confiée. En tant
que chef de famille déclaré au nom de la loi, le père continue d'en
avoir la charge à titre principal.

5.3.3. La suppression des avantages


consentis par l'un des époux
Le divorce obtenu aux torts exclusifs de l'un des époux entraîne pour lui la perte
de tous les avantages que l'autre lui avait faits soit à l'occasion du mariage, soit
depuis sa célébration. Par exemple en cas de divorce, le mari peut reprendre le salon,
la chaîne à musique, et tout matériel qu’il avait acheté de lui-même, à l’exclusion de
la chambre à coucher.

5.3.4. Allocation de dommages et intérêts


En cas de divorce prononcé aux torts exclusifs de l’un des époux, le juge peut
allouer à l’époux qui a obtenu le divorce des dommages et intérêts pour le préjudice

69
LES DROITS DE LA FEMME

matériel et moral que lui cause la dissolution du mariage, compte tenu notamment
de la perte de l’obligation d’entretien. En effet, la femme sans revenu propre, qui
ne comptait que sur son mari pour subvenir à ses besoins, va être confrontée à de
sérieux problèmes de survie.
Sur le plan moral, une relation de mariage faite d’incompréhension, de conflits,
agressions verbales et/ou physiques, peut être la cause d’une déprime constante,
voire d’une dépression, mais également de déshonneur, tant au sein de la famille,
que vis-à-vis de l’entourage. C’est en cela que le divorce peut causer un préjudice,
tant matériel que moral, qui exige une réparation sous forme d’allocation de
dommages et intérêts.

70
LES DROITS DE LA FEMME

CHAPITRE SIXIÈME :
LA SEPARATION DE CORPS

La séparation de corps est régie par les articles 181 à 187 du Code de la Famille.
Aux termes de l’article 181 du Code de la Famille : « La séparation de corps
met fin à l’obligation du cohabitation, impose aux époux le régime de la séparation
de biens s’ils n’y étaient pas déjà soumis et maintient les autres effets du mariage
entre époux ».
Et parce que c’est une notion difficile à cerner, il faut préciser qu’elle se différencie
de la séparation de fait, en ce que cette dernière correspond plutôt à la situation
de deux époux qui vivent séparément, sans y avoir été autorisés par un jugement
de divorce ou de séparation de corps ; alors que la séparation de corps est un
simple relâchement du lien conjugal, consistant essentiellement en la dispense du
devoir de cohabitation. La séparation de corps est donc prononcée par un jugement
et résulte des mêmes causes que le divorce.
Il faut noter également qu’il existe deux formes de séparation de corps : l’une
résulte du consentement mutuel des époux constaté par le juge du tribunal
départemental ; et l’autre d’une décision judiciaire la prononçant à la demande
de l’un des époux, c’est la séparation de corps contentieuse.
Toutefois, il faut souligner que ses causes restent inchangées, quelle que soit
la forme de séparation adoptée.

6.1. Séparation de corps par consentement


mutuel et séparation de corps contentieuse
La séparation peut être prononcée pour absence déclarée de l’un des époux,
pour adultère de l’un des époux, pour condamnation de l’un des époux à une
peine infamante, pour défaut d’entretien de la femme par le mari, pour refus de
l’un des époux d’exécuter les engagements pris en vue de la conclusion du
mariage, pour abandon de famille ou du domicile conjugal, pour mauvais
traitements, excès, sévices ou injures graves rendant l’existence en commun
impossible, pour stérilité définitive médicalement établie, pour maladie grave et
incurable d’un des époux découverte pendant le mariage, pour incompatibilité
d’humeur rendant intolérable le maintien du lien conjugal.

71
LES DROITS DE LA FEMME

6.1.1. La séparation de corps par consentement mutuel


L’objet du consentement des époux portant uniquement sur le relâchement
du lien matrimonial, la séparation par consentement mutuel est régie, quant à
ses conditions de fond, quant à la procédure, la publicité, le jugement et ses
effets, par les articles 158 à 180. Il faut souligner que le consentement de chacun
des époux n’est valable que s’il émane d’une volonté libre, éclairée et exempte
de vice. Pour faire reconnaître leur séparation de corps, les époux doivent se
rendre ensemble et en personne devant le juge du tribunal départemental de
leur domicile et lui présenter verbalement ou par écrit leur acte de mariage, leur
livret de famille, ainsi que s’il y a lieu, des actes de naissance et de décès de tous
les enfants issus du mariage. La déclaration de séparation de corps doit être
obligatoirement accompagnée d’une déclaration écrite ou orale précisant quelle
sera la situation respective des époux quant aux biens qu’ils possèdent et le sort
réservé aux enfants nés du mariage. Le jugement constatant la séparation de
corps par consentement mutuel est rédigé dans la forme des jugements ordinaires.
Ensuite, le juge du tribunal départemental porte indication du jugement de
séparation de corps sur le livret de famille, en faisant référence à la date et au
numéro de jugement, et rend une copie à chacun des époux. Il adresse, dans le
délai maximum de huit (8) jours, une expédition du jugement à l’Officer de l’état
civil, du lieu où le mariage a été célébré, aux fins de mention en marge des actes
de mariage et de naissance des deux époux.

6.1.2. La séparation de corps contentieuse


Articles 165 à 180 et 183 du Code de la Famille
Dans tous les cas où il y a lieu à la demande en divorce, les époux sont libres
de ne demander que la séparation de corps. En effet, chacun des époux peut
agir en séparation de corps en fondant son action sur l’une des causes admises
par la loi.
Le juge prononce la séparation de corps contentieuse pour les mêmes causes
et suivant la même procédure que s’il s’agissait d’une demande de divorce
contentieuse. Il prend toutes les mesures provisoires qu’il estime nécessaires.
Il est permis, en tout état de cause, à l’époux demandeur de transformer sa
demande en séparation de corps en demande de divorce, et à l’époux défendeur
de répondre à l’action en séparation de corps par une demande reconventionnelle
en divorce.

72
LES DROITS DE LA FEMME

Le jugement prononçant la séparation de corps est soumis aux mêmes mesures


de publicité que le jugement de divorce, et prend effet : du jour où le jugement
n’est plus susceptible de voies de recours, en ce qui concerne les effets personnels
du mariage ; du jour de la demande en séparation de corps, en ce qui concerne
les rapports pécuniaires entre les époux ; et du jour de la mention en marge de
l'acte de naissance, en ce qui concerne les tiers.

6.2. Les effets de la séparation de corps


Il faut distinguer entre les effets patrimoniaux de la séparation de corps et ses
effets extra patrimoniaux.

6.2.1. Les effets patrimoniaux


En cas de séparation de corps contentieuse, le juge fait application des
dispositions des articles 177, 179 et 180 du Code de la Famille.
En effet selon l’article 179, « En cas de séparation de corps contentieuse prononcée
aux torts exclusifs de l’un des époux, le juge peut allouer à l’époux qui a obtenu la
séparation de corps des dommages et intérêts pour le préjudice matériel et moral
que lui cause le relâchement du lien conjugal, compte tenu, notamment de la perte
de l’obligation d’entretien».
Le juge décide, selon les circonstances de la cause, si ces dommages et intérêts
doivent être versés en une seule fois ou par fractions échelonnées.

6.2.2. Les effets extra patrimoniaux


Ce sont les articles 177 et 180 qui régissent cet aspect de la question. Ainsi
aux termes de l’article 177, « La séparation de corps prononcée aux torts exclusifs
de l’un des époux entraîne pour lui la perte de tous les avantages que l’autre
époux lui avait consentis, soit à l’occasion du mariage, soit depuis sa célébration ».
Quant aux enfants issus du mariage, leur garde et la puissance paternelle
exercées sur eux sont dévolues par le juge selon leur intérêt.

6.3. La fin de la séparation de corps


La séparation de corps peut prendre fin par sa conversion en divorce, ou par une
réconciliation entraînant une extinction de l’action en séparation de corps. Toutefois,
il faudra préciser au préalable quand est-ce qu'elle prend effectivement fin.

73
LES DROITS DE LA FEMME

6.3.1. Quand prend effectivement fin la séparation de corps?


Elle prend fin par :
• la reprise de la vie commune après réconciliation ;
• le décès de l’un des époux ;
• le divorce par consentement mutuel, ou prononcé à la demande de
l’un des époux pour cause nouvelle ;
• la conversion en divorce, prononcée obligatoirement par le juge à la
demande de l’un des époux, après que trois (3) ans se soient écoulés
depuis l’intervention du jugement.

6.3.2. De la séparation de corps à la réconciliation


Les époux doivent faire une déclaration conjointe de réconciliation devant le
tribunal départemental de leur résidence qui en fait dresser le procès-verbal par
le greffier et procède à la publicité dans les mêmes formes et conditions que
pour le jugement de séparation de corps.
Les époux peuvent également faire procéder à cette publicité sur la production
d’une expédition du procès-verbal sus-évoqué.
Le régime de la séparation de biens continue à régir les époux réconciliés.

6.3.3. De la séparation de corps au divorce


Article 187 du Code de la Famille
L’époux demandeur en conversion saisit le juge de paix du domicile de son
conjoint. La cause est débattue et instruite en la forme ordinaire en audience
non publique et le jugement rendu en audience publique.
Le juge transforme le jugement de séparation de corps en jugement de divorce
pour les mêmes causes et motifs.
Il statue le cas échéant sur l’exécution de l’obligation alimentaire dans le cas
prévu à l’article 178. Il statue également, s’il y a lieu, sur les dommages et intérêts
complémentaires pour tenir compte de la disparition de l’obligation d’entretien.
Les dépens relatifs à la demande sont mis à la charge de celui des époux,
même demandeur, contre lequel la séparation de corps a été prononcée.

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LES DROITS DE LA FEMME

CHAPITRE SEPTIEME :
LES CEREMONIES FAMILIALES

Elles sont régies par la loi n°67-04 du 24 février 1967.


Les dépenses improductives privent les ménages sénégalais d’une grande
partie de leur épargne. Les cérémonies familiales constituent, entre autres, l’une
des principales causes de gaspillage de cette épargne. Cela est un handicap pour
l’économie nationale dont une part importante d’investissement potentiel est
ainsi détournée. C’est pour cette raison que le législateur a pris une loi visant à
éradiquer ce fléau.

7.1. Les cérémonies visées par la loi


Il s’agit du baptême, de la circoncision, de la communion solennelle, des
fiançailles, du retour de pèlerinage et du décès.

7.1.1. Le baptême
• On ne peut tuer qu’un animal par enfant
• Les dépenses de réjouissances
Les dépenses relatives au baptême, de quelque nature qu’elles soient,
ne peuvent dépasser dix mille (10 000) FCFA, compte non tenu de
l’animal. Cela veut dire qu’en plus du mouton, les autres frais (riz,
légumes ) sont limités à dix mille (10 000) FCFA.
Les demandes et dons sont interdits, à l’exception des dons faits à
un ministre du culte (imam ou prêtre) qui baptise l’enfant.
• Durée du baptême
S’il a lieu le matin, il doit prendre fin au plus tard à onze (11) heures,
à vingt (20) heures si c’est l’après-midi.

7.1.2. Le retour de pèlerinage


La loi interdit toute manifestation qu’elle soit publique (organisée dans la rue
avec des haut-parleurs) ou privée (organisée dans la maison). Les offres, dons ou
cadeaux sont interdits.

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LES DROITS DE LA FEMME

Exception : Les souvenirs de caractère religieux tels que les chapelets, boîtes
d’eau bénite, etc., peuvent être offerts par le pèlerin.

7.1.3. Le décès
Les rassemblements à caractère religieux sont autorisés. Exemple : prière
mortuaire, récitation du Coran, etc.
Seuls sont interdits les rassemblements ayant un caractère de réjouissances. Il
en est de même pour les dons, cadeaux, sauf ceux offerts au ministre de culte
(imam, prêtre).

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LES DROITS DE LA FEMME

L’aumône aux pauvres est également autorisée. Les personnes doivent rentrer
chez elles dans un délai maximum de 24 heures. Seules sont autorisées à rester
celles dont la présence est indispensable aux parents proches du défunt.

7.1.4. La circoncision
Un seul animal doit être tué par famille. Même s’il y a dix (10) enfants circoncis
dans une famille, un seul animal sera tué comme celle qui n’a qu’un enfant
circoncis. Les dépenses, en dehors du prix de l’animal, ne peuvent pas dépasser
cinq mille (5 000) FCFA.
Il est interdit de donner ou de recevoir des cadeaux, de quelque nature que
ce soit, sauf ceux offerts au ministre de culte.

7.1.5. La communion solennelle


L’ensemble des dépenses relatives à une communion solennelle ne peut
dépasser dix mille (10 000) FCFA. Les dons, les cadeaux et les offres sont interdits,
sauf ceux ayant un caractère religieux faits aux communiants et aux prêtres.

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LES DROITS DE LA FEMME

7.1.6. Les fiancailles et le mariage


• A L’OCCASION DES FIANÇAILLES
Le cadeau en nature remis à la fiancée ne peut avoir une valeur
supérieure à cinq mille (5 000) FCFA. Les dépenses pour la fête ne
doivent pas dépasser cinq mille (5 000) FCFA, en dehors du cadeau
de la fiancée.
• A L’OCCASION DU MARIAGE
La dot ne peut être supérieure à trois mille (3 000) FCFA. Les dépenses
relatives à la fête ne peuvent dépasser quinze mille (15 000) FCFA.
Tout autre don ou cadeau est interdit.
Au total, la dot et les dépenses festives ne peuvent pas dépasser la
somme de dix-huit mille (18 000) FCFA.

7.2. La dispersion des rassemblements


7.2.1. Personnes chargées de la dispersion
L’organisateur ou le propriétaire du lieu de rassemblement doit procéder à la
dispersion :
• à 11h, l’heure pour le baptême.
• au plus tard trois (3) heures après la célébration du mariage.
A défaut, la force publique (police, gendarmerie) peut intervenir.

7.2.2. L’intervention de la force publique


En cas de violation de la loi sur la cérémonie familiale, les chefs de circonscriptions
administratives peuvent demander l’intervention de la force publique.
Exemple : Le sous-préfet, les chefs de village, les délégués de quartier
doivent informer l’Officier de l’état civil ou l’Agent de police judiciaire
le plus proche. De même, tout citoyen peut le faire.

7.3. Les sanctions


En cas de violation de cette loi, une amende de vingt mille (20 000) FCFA sera
appliquée à ceux qui ont sacrifié plus d’animaux que prévu, ou dépensé une somme
supérieure à celle autorisée pour les réjouissances, offert des cadeaux aux griots,
aux autres personnes non autorisées à recevoir, organisé une manifestation
grandiose à l’occasion du retour de pèlerinage. Il en est de même pour ceux qui

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LES DROITS DE LA FEMME

ont participé à ces rassemblements, et pour ceux qui ont la charge de la dispersion
desdits rassemblements et ne l’exécutent pas.
En cas de récidive (c’est-à-dire pour les personnes ayant déjà fait l’objet de
condamnation pour le même délit), une peine d’emprisonnement d'un (1) à six
(6) mois leur sera appliquée.
Le tribunal départemental est le tribunal compétent pour juger ces infractions.

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LES DROITS DE LA FEMME

CHAPITRE HUITIÈME :
LE DROIT DE SUCCESSION

Introduction
Au Sénégal, il existe deux droits applicables en matière de succession : le droit
commun, applicable aux non-musulmans ; et le droit musulman (article 571 du
Code de la Famille) aux musulmans décédés. Ces deux modes de succession diffèrent
par leur mode de détermination des héritiers et de leurs parts.
Les héritiers peuvent rester dans l’indivision ou faire le partage. Toutefois, nul
n’est tenu de rester dans l’indivision. Le partage peut être demandé par n’importe
lequel des héritiers et à tout moment.
Le premier acte, après la déclaration de décès, c’est l’établissement du
jugement d’héridité. Lorsque le défunt n’a pas d’héritier, c’est-à-dire ni femme,
ni enfant, ni parent jusqu’au sixième (6e) degré, il s’agit d’une succession en
déshérence qui revient à l’Etat.
S’il y a partage, il faut :
• liquider tous les biens de la succession, c’est-à-dire les évaluer en
francs CFA ;
• déterminer la part de chaque héritier ;
• partager la valeur totale entre les héritiers, en tenant compte de la
part de chacun, et en respectant les dons faits par le défunt. Toutefois,
le défunt n’a le droit de céder qu’un tiers (1/3) de ses biens. Toute
cession supérieure à cette quotité peut être révoquée.
Les testaments sont exécutés sous réserve du respect des droits des héritiers,
« l’égalité est l’âme du partage ». En cas de non respect de cette égalité, on
corrige en faisant payer aux nantis une soulte.
Si le partage est fait à l’amiable et qu’il n’y a aucune contestation, les héritiers
peuvent alors faire dresser un procès-verbal qu’ils feront homologuer par le
président du tribunal départemental du lieu du partage.

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LES DROITS DE LA FEMME

8.1. Dispositions générales


8.1.1. De l’ouverture des successions
Moment et lieu d’ouverture de la succession
La succession s’ouvre par la mort et par la déclaration judiciaire du décès, en
cas d’absence ou de disparition.
Exemple : Si la famille de Moussa Fall fait constater par le juge l’absence
ou la disparition sans nouvelle de celui-ci pendant plusieurs années, il
faut une déclaration judiciaire qui constate sa mort pour permettre à
ses héritiers d’ouvrir la succession.
La date du décès peut être connue ou inconnue, en cas d’absence ou de
disparition. Dans ce cas, la date de mort est présumée à partir du jugement déclaratif.
La succession s’ouvre au dernier domicile du défunt. La loi applicable est celle
en vigueur à la date d’ouverture de la succession. Ainsi, les coutumes en vigueur
s’appliquent lorsque le décès survient avant l’entrée en vigueur du Code de la
Famille. Cela veut dire que l’application du code prévaut devant la coutume
depuis que le Code de la Famille est entré en vigueur.

8.1.2. Les qualités requises pour succéder


8.1.2.1. Existence du successible
Pour succéder, l’existence des personnes doit être certaine à l’instant du décès.
C’est le cas de l’enfant conçu et qui naît vivant. D’après l’article 1er du Code
de la Famille, "La date de conception d’un enfant est fixée légalement et de
façon irréfragable entre le 180e et le 300e jour précédant sa naissance".
L’enfant, qui naît pendant cette période, est considéré comme étant celui du
défunt et a donc droit à la succession.
8.1.2.2. Exclusion de la succession
8.1.2.2.1. Indignité successorale de plein droit
Est indigne de succéder, celui qui a été condamné en tant qu’auteur, coauteur
ou complice pour avoir donné la mort, ou tenté de donner la mort ou porté des
coups mortels au défunt. Celui qui est à l’origine du décès du défunt, à titre principal
ou impliqué à quelque titre que ce soit, est par ce fait exclu de la succession.
8.1.2.2.2. Indignité successorale facultative
Peut être déclaré indigne de succéder :

81
LES DROITS DE LA FEMME

• l’auteur de sévices, délits, ou d’injures graves envers le défunt ;


• celui qui a gravement porté atteinte à l’honneur, à la considération
ou aux intérêts matrimoniaux du défunt ou de sa famille.
Exemple : Astou Diop, l’une des femmes du défunt, dénonce
publiquement l’origine douteuse de la fortune de son mari, le taxant
d’usurier, en même temps qu’elle dilapide tous les biens qui lui sont
confiés par son mari. Le juge peut se fonder sur un tel comportement
pour l’exclure de la succession.
Nota bene : Toute personne peut intenter une action en déclaration d’indignité visant
à demander au juge de prononcer l’exclusion de la femme indigne de la succession.
8.1.2.2.3. Le défunt peut accorder le pardon et faire cesser l’indignité
8.1.2.3. Preuve de la qualité d’héritier
La qualité d’héritier s’établit par tous moyens :
• un intitulé d’inventaire notarié ;
• un acte de notoriété dressé par un notaire ;
• un jugement d’hérédité établi par le juge de paix.
Toutefois, la parenté (père, mère et fils) se prouve par un acte d’état civil.
L’action en pétition d’hérédité est portée devant le juge du lieu d’ouverture
de la succession. Elle se prescrit par l’expiration d’un délai de dix (10) ans.
8.1.2.4. Obligation de restituer
L’hériter apparent est tenu de restituer à l’héritier, dont la qualité a été
reconnue, tous les biens composant l’hérédité. Si l’héritage a porté des fruits, il
doit les restituer s’il est de mauvaise foi. S’il est de bonne foi, il fait les fruits siens
jusqu’au jour de la demande.
Exemple : Doudou Fall a usurpé la place de son cousin Moussa Fall
pour la succession du père de ce dernier sur la base de faux documents.
La fraude a été découverte à la suite d’une action devant le juge.
L’héritage portant sur un fonds de commerce, il devra rendre le fonds
de commerce et tous les bénéfices qu’il a pu en tirer.
Toutefois les actes d’administration de l’héritier apparent sur les biens
héréditaires sont opposables à l’héritier véritable. Cela veut dire que les dettes
qu’il a contractées ou autres actes de vente continuent de produire leurs effets.

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LES DROITS DE LA FEMME

8.1.3. De la transmission de l’actif et du passif héréditaire


8.1.3.1. Prise en charge de l’actif et du passif par l’héritier
Les héritiers légitimes du défunt, les héritiers naturels et le conjoint survivant
sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt, sous l’obligation
d’acquitter toutes les charges de la succession.
Exemple : Les héritiers ne peuvent bénéficier pleinement des biens
immeubles hypothéqués par le défunt qu’à condition de payer les dettes
qui font l’objet de l’hypothèque pour la faire cesser. Cela veut dire que
l’héritier, en plus des biens, droits et actions, doit supporter également
les dettes du défunt.
8.1.3.2. Les titres exécutoires
Les titres exécutoires (telle que la saisie des biens du défunt) sont pareillement
exécutoires contre l’héritier personnellement. Néanmoins, les créanciers ne
peuvent en poursuivre l’exécution que huit (8) jours après la signification de ces
titres à la personne ou au domicile de l’héritier. Cela veut dire que ce dernier doit
en être informé huit (8) jours auparavant.
Il en est de même :
• lorsqu’il renonce, même gratuitement, à sa part de la succession au
profit d’un ou plusieurs de ses cohéritiers ;
• lorsqu’il renonce, même en faveur de tous cohéritiers indistinctement,
et qu’il reçoit le prix de la renonciation.

8.1.4. L’option des héritiers


Toute personne, à laquelle une succession est dévolue, peut l’accepter
purement et simplement, l’accepter sous bénéfice d’inventaire, ou y renoncer.
Toute acceptation, renonciation, antérieure à l’ouverture de la succession,
est nulle. Le successible ne peut être tenu de prendre partie avant l’expiration du
délai de trois (3) mois, à compter du jour où la succession lui est dévolue.
Il dispose de ce délai pour faire son option. Pendant ce temps, aucune
condamnation ne peut être obtenue contre lui.

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LES DROITS DE LA FEMME

8.1.4.1. De l’acceptation pure et simple


8.1.4.1.1. L’acceptation peut être expresse ou tacite
• Elle est expresse lorsque le titre ou la qualité d’héritier est pris dans
un acte authentique (fait par le notaire par exemple) ou privé, c’est-
à-dire écrit et signé par lui-même.
• Elle est tacite lorsqu’il fait un acte juridique qui suppose nécessairement
son acceptation, et que seul peut faire celui qui a la qualité d’héritier.
8.1.4.1.2. L’acceptation présumée
Toute cession, à titre gratuit ou onéreux (don, prêt, vente, etc.), faite par le
successible de ses droits dans la succession, comporte acceptation pure et simple.
8.1.4.1.3. Actes ne présumant pas l’acceptation
• Le payement des frais funéraires
• Les actes conservatoires et de pure administration rendus nécessaires
par l’urgence (ventes de denrées périssables, récoltes arrivées à
maturité), à moins que le successible n’ait pris à cette occasion la
qualité d’héritier acceptant.
Il en est de même lorsque le successible a été autorisé par la justice à accomplir
ces actes dans l’intérêt de la succession.
8.1.4.1.4. Vices du consentement
L’acceptation et la renonciation peuvent être déclarées nulles pour cause de
dol, de violence ou d’erreur sur la substance de la succession.
8.1.4.2. De l’acceptation sous bénéfice d’inventaire
8.1.4.2.1. Inscription au greffe
La déclaration de l’héritier, qui entend ne prendre cette qualité que sous
bénéfice d’inventaire, doit être inscrite au greffe du tribunal dans le ressort duquel
la succession s’est ouverte.
La déclaration faite au greffe doit être précédée ou suivie d’un inventaire fidèle
et exact des biens de la succession, dressé dans les formes prévues par le Code de
Procédure civile.
Passé un délai de deux mois après l’acceptation, cet inventaire ne peut plus
être valablement effectué. L’héritier est alors privé du bénéfice d’inventaire et
réputé acceptant pur et simple.

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LES DROITS DE LA FEMME

8.1.4.2.2. Effets de l’acceptation bénéficiaire


L’effet du bénéfice d’inventaire est de donner à l’héritier l’avantage :
• de n’être tenu du paiement des dettes de la succession que jusqu’à
concurrence de la valeur des biens qu’il a recueillis.
• de pas confondre ses biens personnels avec ceux de la succession.
8.1.4.3. De la renonciation
8.1.4.3.1. Inscription au greffe
La renonciation à une succession ne peut résulter que d’une déclaration faite
et inscrite au greffe du tribunal dans le ressort duquel la succession s’est ouverte.
8.1.4.3.2. Effets de la renonciation
L’héritier qui renonce est censé n’avoir jamais été héritier, et la succession est
dévolue aux héritiers comme s’il avait cessé d’exister à la date du décès.
8.1.4.3.3. Rétraction de la renonciation
Dans un délai de dix (10) ans pendant lequel le droit d’option est encore possible,
l’héritier qui a renoncé conserve la faculté d’accepter encore la succession, si elle
n’a pas été déjà acceptée par d’autres, ou n’a pas été dévolue à un autre héritier.

8.1.5. De l’indivision
8.1.5.1. Le caractère temporaire de l’indivision
En l’absence d’une convention expresse et sauf dispositions légales
particulières, nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision et le partage
peut être toujours provoqué.
8.1.5.2. La convention d’indivision à durée déterminée
La convention d’indivision peut être conclue pour une durée déterminée qui,
sauf stipulation contraire, est égale à cinq (5) ans. Cette convention est renouvelable.
Le partage ne peut pas être provoqué, sauf motif jugé légitime, avant
l’expiration du délai fixé.
8.1.5.3. La convention d’indivision à durée indéterminée
La convention d’indivision peut être conclue pour une durée indéterminée.
Elle peut dans ce cas résulter d’un accord tacite. Le partage peut être provoqué
à tout moment, pourvu qu’il ne le soit pas de mauvaise foi, ou à contretemps ou
contraire aux usages.

85
LES DROITS DE LA FEMME

8.1.5.4. L’administration de l’indivision


8.1.5.4.1. La gestion de l’indivision
8.1.5.4.1.1. La nomination du gérant
L’administration des biens indivis peut être confiée à un ou plusieurs gérants.
Le gérant est nommé par la majorité en nombre et en parts indivises, sauf dispositions
contraires. Les mineurs et autres incapables ont leurs représentants légaux pour
participer à cette nomination. A défaut de désignation par les indivisaires, le gérant
peut être désigné par le président du tribunal statuant en référé à la demande
d’un ou plusieurs indivisaires.
8.1.5.4.1.2. Les pouvoirs du gérant
Le gérant peut faire tous les actes administratifs relatifs aux biens indivis.
Pour certains actes, l’autorisation des indivisaires est nécessaire, par exemple,
donner à bail des immeubles ou les fonds de commerce, lorsqu’ils n’étaient pas
destinés à la location lors de la naissance de l’indivision.
Il en est de même pour les contrats d’emprunts ou la constitution
d’hypothèques sur les biens indivis, ou la vente d’un bien déterminé. L’autorisation
de la majorité des indivisaires est toujours nécessaire.
8.1.5.4.2. Les droits sur l’indivision
8.1.5.4.2.1. Exercice des droits indivis
Chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis, conformément à leur
destination, en tenant compte des droits des autres indivisaires, et en vertu des
actes valablement passés par le gérant. Par exemple, recevoir sa part des loyers
de l’immeuble ou du fonds de commerce objet de l’indivision, etc.
8.1.5.4.2.2. Pertes et profits
Chaque indivisaire a droit aux profits provenant des biens indivis et en
supporte les pertes, proportionnellement à sa quote-part dans l’indivision.
8.1.5.4.2.3. Cession des droits indivis à titre onéreux
Tout indivisaire, qui entend céder à titre onéreux à une personne étrangère à
l’indivision tout ou partie de sa part dans les biens indivis ou dans l’un de ses
biens, est tenu de notifier à ces co-indivisaires et au gérant, par acte extrajudiciaire,
le prix et les conditions de la cession projetée.
Dans un délai d’un mois qui suit cette notification, tout co-indivisaire peut faire
connaître qu'il exerce un droit de préemption aux prix et conditions qui lui ont été

86
LES DROITS DE LA FEMME

notifiés. Il pourra ainsi acquérir le ou les biens cédés, par préférence à l’acquéreur
étranger à l’indivision.
Est nulle toute décision consentie par un indivisaire à une personne étrangère
à l’indivision, en violation des prescriptions du présent article.
Exemple : Si Moussa FALL vend l’appartement constituant sa part de
l’immeuble sous indivision à un collègue de bureau sans le notifier aux
co-indivisaires et au gérant, le juge prononcera la nullité de la vente à
la demande d’un des co-indivisaires.
Nota bene : L’action en nullité ne peut être exercée que par les co-indivisaires
du cédant.

8.1.6. Du partage
On peut distinguer deux formes de partage : le partage amiable et le
partage judiciaire.
8.1.6.1. Le partage amiable
Si tous les héritiers sont présents et capables, le partage peut être fait dans la
forme et par tel acte que les intéressés jugent convenables. Un partage amiable,
effectué par tous les héritiers dans les conditions de conciliation prévues par
l’article 21 du Code de Procédure civile, doit être homologué par le juge.
Il est aussi admis que le défunt peut, par testament, réaliser le partage de ses
biens du futur entre les successibles, en opérant par avance le partage qu’ils auront.
8.1.6.1.1. Composition des lots et licitation
Les héritiers, qui procèdent à un partage amiable, composent des lots à leur
gré et décident d’un commun accord de leur attribution ou de leur tirage au
sort. Si les héritiers estiment nécessaire de procéder à la vente des biens à partager
ou de certains d’entre-eux, ils fixent également, d’un commun accord, les
conditions et les formes de la vente.
8.1.6.1.2. Suspension du partage
Si parmi les successibles se trouve un enfant simplement conçu, le partage
est suspendu jusqu’à la naissance.
8.1.6.2. Le partage judiciaire
8.1.6.2.1. Cas prévus pour le partage judiciaire
Il est prévu dans certains cas :

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LES DROITS DE LA FEMME

• Si parmi les héritiers, il existe des absents ou des non-présents.


• En cas de désaccord entre héritiers capables et présents, sauf la faculté
pour lesdits héritiers de s’entendre pour n’observer que certaines de
ces formes et conditions prévues par le Code de la Famille.
• Le partage judiciaire concernant un incapable peut également être imposé
par une délibération du conseil de famille conformément à l’article 329.
8.1.6.2.2. Sanctions
Le partage, fait conformément aux règles ci-dessus prescrites au nom des
incapables, des non-présents ou des absents, est définitif. La décision prise en
présence de leurs représentants les engage. Par contre, le partage n’est que
provisoire si ces formes n’ont pas été observées.
8.1.6.2.3. Cas d’oppositions d’intérêts
Si plusieurs incapables, ayant un même représentant, ont des intérêts opposés
dans le partage, il doit être nommé à chacun d’eux un représentant particulier.
8.1.6.2.4. Les lots
La loi fixe les conditions de formation des lots. Les intéressés peuvent convenir de
leur attribution. A défaut, les lots sont tirés au sort.
8.1.6.2.4.1. Formation et composition des lots
On doit éviter de morceler les immeubles ruraux et de diviser les exploitations
de toute nature. Exemple : le morcellement peut rendre certains champs
inexploitables. C’est le cas lorsqu’on sépare dans un verger la partie contenant le
puits des autres parties du champ.
Dans la mesure où le morcellement des immeubles et la division des
exploitations peuvent être évités, chaque lot doit, autant que possible, être
composé soit en totalité, soit en partie de meubles ou d’immeubles, de droits ou
de créances de valeur équivalente.
L’inégalité de valeur des lots se compense par une soulte. Il s’agit d’une somme
d’argent versée en plus pour compenser l’inégalité de valeur entre les lots partagés.
8.1.6.2.4.2. Licitation des biens
Vente des biens en cas d’impossibilité
ou de désaccord sur le partage
Si certains biens ne peuvent être commodément partagés ou distribués, les
intéressés peuvent décider, d’un commun accord, de procéder à leur vente. A

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LES DROITS DE LA FEMME

défaut d’accord, la vente peut également être ordonnée par le président du


tribunal ou le juge commis.

Les conditions et les formes de la vente


Elles sont fixées d’un commun accord par les intéressés et, à défaut, par le
président du tribunal ou le juge commis.
Si parmi les héritiers, il existe des incapables, des absents ou des non-présents,
les intéressés ne peuvent décider la vente et en fixer les formes que dans les
limites et avec les habilitations prévues au présent code pour les biens dont la
vente est envisagée (la représentation des absents ou des incapables fixe d’un
commun accord le prix et les conditions de la vente ).
8.1.6.3. Attribution préférentielle
8.1.6.3.1. Qualités de bénéficiaire
Nonobstant l’opposition d’un ou plusieurs de ses copartageants, le conjoint
survivant ou tout autre héritier peut demander l’attribution par voie de partage.
8.1.6.3.2. Rapport du bénéficiaire avec le lot à partager
Il peut s’agir de l’entreprise commerciale, industrielle, artisanale ou agricole,
à l’exploitation de laquelle il participait effectivement au jour du décès.
Si l’entreprise était exploitée sous forme sociale, le conjoint survivant ou l’héritier
peut demander, sous les mêmes conditions, des droits sociaux dépendant de la
succession. C’est le cas des parts d’actions détenues dans la société par le défunt.
La demande d’attribution concerne l’immeuble ou partie d’immeuble servant
effectivement d’habitation au conjoint ou à l’héritier. Le droit au bail des locaux,
leur servant effectivement d’habitation, est aussi concerné.
8.1.6.3.3. La demande d’attribution est adressée au président du tribunal
8.1.6.3.4. Estimation des biens
Les biens faisant l’objet d’attribution sont estimés à leur valeur au jour du
partage. A défaut d’accord entre les parties, l’estimation est faite par des experts
choisis par les parties ou désignés par le président du tribunal.
8.1.6.3.5. Le paiement de la soulte
Le président du tribunal pourra accorder, pour le paiement de la moitié de la soulte,
des délais qui ne pourront être supérieurs à cinq (5) ans. Sauf convention contraire, le

89
LES DROITS DE LA FEMME

surplus de la soulte devra être payé immédiatement par l’attributaire. La partie de la


soulte, dont le paiement sera ainsi différé, produira des intérêts au taux légal.
En cas de vente de la totalité du bien attribué, la fraction de soulte restant due
deviendra immédiatement exigible. Au cas de vente partielle, le produit de ces ventes
sera versé aux copartageants et imputé sur la fraction de soulte restant due.
8.1.6.4. De la nullité du partage
8.1.6.4.1. Vices du consentement
Le partage, même partiel, peut être annulé pour une cause de dol, de violence
ou d’erreur sur la cause.
Est entaché d’erreur sur la cause, le partage dans lequel un cohéritier ou un bien
héréditaire ont été omis, ou qui comprend un bien n’appartenant pas à la succession.
Il peut y avoir partage complémentaire ou rectificatif dans le cas où le vice
dont le partage est affecté ne serait pas jugé de nature à en entraîner la nullité.
8.1.6.4.2. Fin de non-recevoir
Le cohéritier qui a aliéné son lot, en tout ou en partie, n’est plus recevable à
intenter une action en nullité pour cause de dol, de violence ou d’erreur sur la cause,
si l’aliénation qu’il a faite est postérieure à la découverte de l’erreur ou du dol, ou à
la cessation de la violence.
8.1.6.4.3. Rescision pour cause de lésion
Le partage, même partiel, peut également être annulé lorsqu’un des héritiers
établit qu’il a subi un préjudice dans l’évaluation, de plus du quart (1/4), au
partage des biens compris dans son lot.

8.2. La dévolution successorale


8.2.1. Les successions de droit commun
Les droits successoraux
La succession placée sous le régime de droit commun est dévolue aux
héritiers dans l’ordre suivant :
• les enfants et descendants du défunt (petits-enfants) ;
• les ascendants du défunt (père, mère, grands-parents) ;
• les parents collatéraux (frère et sœurs, tantes, oncles) et à son conjoint.
On appelle souche, l’auteur commun de plusieurs descendants.
La branche est constituée par la ligne directe des parents issus d’une même souche.

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LES DROITS DE LA FEMME

8.2.1.1. Des droits successoraux des descendants légitimes


Les enfants et les autres descendants légitimes succèdent à leur père et
mère et autres ascendants, même s’ils sont issus de différents mariages.
Ils succèdent par égale portion (part égale) et par tête quand ils sont tous au
premier degré et appelés de leur chef.
Ils succèdent par souche lorsqu’ils viennent par représentation.
Représentation successorale
Les enfants, qui sont morts avant le défunt ou qui sont indignes de lui
succéder, sont représentés par leurs descendants légitimes.
Les représentants ont tous les droits qu’aurait eu le représenté.
Le partage s’opère par souche entre les enfants qui héritent directement et
les représentants des autres.
La subdivision s’opère par souche dans chaque branche et les membres d’une
même branche partagent entre eux par tête.
8.2.1.2. Droits successoraux des ascendants
et des frères et sœurs légitimes
A défaut de descendants légitimes, la succession est dévolue pour moitié aux
père et mère légitimes du défunt et pour l’autre moitié à ses frères et sœurs
légitimes ou, à défaut, aux descendants de ces derniers sous réserve des droits
du conjoint survivant et des enfants naturels.
La part dévolue aux père et mère se partage entre eux par tête.
Si un seul d’entre eux vient à la succession, il recueille la totalité de cette part.
La part dévolue aux frères et sœurs se partage entre eux par tête.
Cependant, s’il existe à la fois des frères et sœurs germains et des frères et
sœurs utérins ou consanguins, la part qui leur est dévolue se divise par moitié
entre la ligne paternelle et la ligne maternelle. Les frères et sœurs germains
prennent part dans les deux lignes, et les frères et sœurs utérins ou consanguins
dans leur ligne seulement.
Les frères et sœurs prédécédés, déclarés indignes, présumés ou déclarés
absents sont représentés par leurs descendants légitimes.
A défaut de père et mère légitimes, la succession est dévolue pour le tout aux
frères et sœurs légitimes ou à leurs descendants légitimes.

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LES DROITS DE LA FEMME

A défaut de frères et sœurs ou de descendants légitimes de frères et sœurs,


la succession est dévolue pour moitié aux ascendants de la ligne maternelle.
La moitié dévolue à chaque ligne est recueillie par le père ou la mère, et à leur
défaut, par l’ascendant le plus proche dans la ligne considérée.
S’il existe dans une ligne plusieurs ascendants de même degré, la portion
dévolue à cette ligne se répartit entre eux par tête.
A défaut d’ascendant dans une ligne, la succession est dévolue pour le tout
aux ascendants de l’autre ligne.
8.2.1.3. Droits successoraux des collatéraux autres
que les frères et sœurs : Règle de la fente
A défaut d’ascendants et de frères ou sœurs ou descendants d’eux, la succession
est dévolue pour moitié aux autres collatéraux de la ligne paternelle et pour moitié
aux autres collatéraux de la ligne maternelle.
La moitié dévolue à chaque ligne est recueillie par le collatéral le plus proche
en degré dans la ligne considérée.
Si dans une ligne, il existe plusieurs collatéraux de même degré, la portion
dévolue à cette ligne se répartit entre eux par tête.
8.2.1.4. Droits successoraux du conjoint survivant
Le conjoint survivant, contre lequel n’existe pas de jugement de séparation
de corps passé en force de chose jugée, est appelé à la succession, même lorsqu’il
existe des parents.
Lorsqu’il existe plusieurs veuves, la part fixée par la loi se partage entre elles
par tête.
Lorsque le défunt laisse des enfants légitimes ou des descendants d’eux, le
conjoint survivant, ou éventuellement chacun des conjoints survivants, a droit à
une part d’enfant légitime le moins prenant, sans qu’elle puisse être supérieure
au quart de la succession.
A défaut de descendants légitimes et de parents au degré successible, la
succession est dévolue en totalité au conjoint survivant.

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LES DROITS DE LA FEMME

8.2.1.5. Droit successoraux des enfants naturels et de leurs descendants


ASSIMILATION AUX ENFANTS LÉGITIMES
Les enfants naturels, reconnus par leur père ou leur mère et ceux dont la
filiation maternelle est juridiquement établie, sont appelés à la succession de
leurs père et mère dans les mêmes conditions que les enfants légitimes.
Cependant, lorsqu’il s’agit d’un enfant né hors mariage, l’auteur de la
reconnaissance qui était engagé dans les liens du mariage au moment de la
reconnaissance doit, pour qu’elle produise son plein effet, justifier de
l’acquiescement de son ou ses épouses.
Cet acquiescement pourra être donné soit dans l’acte de reconnaissance,
soit par une déclaration souscrite devant un Officer de l’état civil.
Faute par le de cujus (défunt) d’avoir obtenu l’acquiescement de son conjoint
à la reconnaissance, l’enfant né hors mariage n’aura droit qu’à la moitié de la
part successorale d’un enfant légitime.
ENFANTS INCESTUEUX
Les enfants naturels incestueux, dont la filiation se trouve juridiquement
établie, ont les mêmes droits que les enfants naturels simples.
8.2.1.6. Dévolution de la succession de l’enfant naturel
Si le défunt est un enfant naturel, sa succession est dévolue à ses enfants
et descendants légitimes, à son conjoint, à ses enfants naturels et aux
descendants légitimes de ces derniers.
S’il ne laisse ni descendants légitimes ni conjoint, sa succession est dévolue
pour le tout à ses enfants naturels ou aux descendants légitimes de ces derniers.
S’il ne laisse ni descendants légitimes, ni enfants naturels, ni descendants légitimes
de ces derniers, sa succession est dévolue pour moitié à son conjoint et pour moitié
à celui de ses père et mère à l’égard duquel la filiation est juridiquement établie.
Si la filiation est juridiquement établie à l’égard de ses deux parents, la moitié
leur revenant se répartit entre eux par tête.
S’il ne laisse ni descendants légitimes, ni enfants naturels, ni descendants légitimes
de ces derniers, ni père, ni mère, sa succession est dévolue pour le tout à son conjoint.
8.2.1.7. Dévolution en l'absence de conjoint ou descendants
Si le défunt est un enfant naturel qui ne laisse ni enfants naturels, ni descendants
légitimes de ces derniers, ni conjoint, sa succession est dévolue à celui de ses père

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LES DROITS DE LA FEMME

et mère à l'égard duquel sa filiation a été juridiquement établie ou pour moitié à


chacun d'eux si sa filiation a été établie à l'égard de l'un ou l'autre.
SI le défunt a en outre des frères et sœurs légitimes ou naturels, sa succession
est dévolue pour moitié aux frères et sœurs qui partagent entre eux par tête.
8.2.1.8. Dévolution de la succession des enfants incestueux
La succession des enfants naturels incestueux, dont la filiation est juridiquement
établie, est dévolue comme celle des enfants naturels simples.
8.2.1.9. Droits successoraux des enfants adoptifs, des père
et mère adoptifs et des enfants de ces derniers
Dans le cas d'adoption plénière ou limitée, l'adopté conserve tous ses droits
héréditaires dans sa famille d'origine.
Sous réserve du cas d'adoption sans vocation successorale, l'adopté et ses
descendants légitimes ont dans la succession de l'adoptant les mêmes droits que
ceux de ses enfants légitimes.
8.2.1.10. Dévolution de la succession de l'adopté
Si l'adopté meurt sans descendants, les biens donnés par l'adoptant ou recueillis
dans sa succession font retour à l'adoptant ou à ses descendants, s'ils existent
encore en nature lors du décès de l'adopté.
L'adoptant devra cependant s'acquitter, jusqu'à concurrence de la valeur de
ses biens, des dettes laissées par l'adopté.
Les biens, que l'adopté avait reçus à titre gratuit de ses père et mère d'origine,
sont également restitués à ces derniers.
Cependant, les biens donnés par l'adopté à son conjoint ne peuvent être restitués.
Ce qui reste des biens de l'adopté est divisé entre sa famille d'origine et la
famille de l'adoptant.
Lorsqu'il n'y a pas d'héritiers dans une de ces familles, la succession est dévolue
pour le tout aux héritiers de l'autre.
Dans la famille adoptive, seuls peuvent hériter de l'adopté : l'adoptant, ses
descendants et ses ascendants.
Les frères et sœurs adoptifs n'héritent pas.

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LES DROITS DE LA FEMME

8.2.1.11. Droits de l'Etat


Dans toute succession, s'il n'existe pas de parents légitimes, naturels ou adoptifs
ou de conjoints, la succession est donnée à l'Etat.

8.2.2. Les successions de droit musulman


Les règles relatives aux successions de droit musulman ne s'appliquent qu'aux
successions des personnes qui, de leur vivant, ont expressément ou par leur
comportement, indiscutablement manifesté leur volonté de voir leur héritage
dévolue selon les règles du droit musulman.
8.2.2.1. Ordre des héritiers
Selon les règles de dévolutions musulmanes, les héritiers sont divisés en deux groupes:
1) les héritiers légitimaires ;
2) les héritiers universels ou aceb.
8.2.2.1.1. Les héritiers légitimaires
Un héritier légitimaire est un héritier auquel la loi affecte une part déterminée,
appelée légitime, à prendre dans la succession.
Les héritiers légitimaires de sexe masculin sont :
• le père ;
• l'ascendant paternel (grand-père, arrière-grand-père..) ;
• le frère utérin (de même mère) ;
• le mari survivant.
Les héritiers légitimaires de sexe féminin sont :
• la fille ;
• la fille du fils ;
• la fille du petit-fils né d'un fils ;
• la mère ;
• l'aïeule maternelle ou paternelle (grand-mère, arrière-grand-mère ) ;
• la sœur ;
• la veuve.
8.2.2.1.2. Les héritiers aceb
L'héritier aceb est un parent de sexe masculin dont le lien avec le défunt n'est
interrompu par aucune génération féminine. On l'appelle héritier universel parce
qu'il recueille, s'il est seul, la totalité de la succession.
On l'appelle aussi héritier résiduaire, parce qu'en présence d'héritiers légitimaires,

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LES DROITS DE LA FEMME

il n'hérite que du reliquat après prélèvement des parts réservés à ces derniers.
Les aceb se divisent en cinq (5) classes :
1) les descendants (fils, petits-fils) ;
2) le père ;
3) les autres ascendants (grand-père, arrière-grand-père ) et les frères
germains (même père et même mère) et consanguins (même père) ;
4) les descendants des frères germains et consanguins ;
5) les oncles germains et consanguins et leurs descendants.
Ces héritiers sont appelés "aceb par eux-mêmes".
D'autres héritiers peuvent avoir la qualité d'aceb. Il s'agit de la fille, de la fille
du fils, de la sœur germaine, de la sœur consanguine qui, lorsqu'elles ont un
frère de même lien, se voient enlever la fraction de la succession qui leur serait
revenue comme légitimaire et deviennent aceb.
Ainsi, la fille en concurrence avec un fils, la petite-fille en concurrence avec
un frère germain, la sœur consanguine en concurrence avec un frère consanguin,
deviennent des aceb et succèdent en cette qualité.
De même la petite-fille, en présence de deux ou plusieurs filles, est rendue aceb par
un descendant mâle d'un degré de parenté avec le défunt plus éloigné que le sien.
La sœur germaine ou consanguine devient aceb lorsqu'elle est en concurrence
avec un aïeul paternel.
Enfin la sœur germaine ou la sœur consanguine, lorsqu'elle est en concurrence
avec une ou plusieurs filles ou petites-filles, et qu'il n'y a pas de frère germain ou
consanguin, succède en qualité d'aceb.
8.2.2.2. Exclusion de certains successibles
Il y a exclusion lorsque l'héritier, à cause de la présence d'un ou de plusieurs
successibles qui lui sont préférés, est écarté de la succession.
L'exclusion peut être totale ou partielle.
L'exclusion est totale lorsque l'héritier est entièrement écarté de la succession.
L'exclusion est partielle lorsque l'hériter, légitimaire ou aceb, subit une
réduction de sa part.
Six successibles échappent à l'exclusion totale. Il s'agit :
1) du père ;
2) de la fille ;
3) de la mère ;

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LES DROITS DE LA FEMME

4) du mari survivant ;
5) du fils ;
6) de la veuve.
Tous les autres héritiers, légitimaires ou aceb, peuvent être totalement exclus.
8.2.2.3. Préférence dans l'ordre des légitimaires
L'exclusion totale d'un successible légitimaire peut être causée par la présence
d'un autre légitimaire.
• Ainsi, le père exclut complètement le grand-père paternel et la
grand-mère paternelle.
• La mère exclut toutes les aïeules et la grand-mère maternelle
exclut les aïeules paternelles d'un degré plus éloigné.
• La fille et la petite-fille excluent les frères utérins.
• Les filles excluent la petite-fille né d'un fils prédécédé.
• Les sœurs germaines excluent la sœur consanguine qui n'a pas
été rendue aceb par un autre héritier.
• Les frères et sœurs utérins sont exclus par le père, l'aïeul paternel,
le fils et le fils du fils.
8.2.2.4. Règles générales de dévolution
• Les héritiers légitimaires prélèvent dans la succession la part qui leur
est réservée par la loi. Si ces prélèvements abordent la totalité de la
succession, les aceb sont exclus.
• En l'absence d'héritiers légitimaires ou s'il en existe, lorsque les
prélèvements opérés par eux laissent disponible une partie de la succession,
la totalité de la succession, ou ce qu'il en reste après prélèvement de la
légitime (part fixe), est dévolue à l'ordre des héritiers aceb.
• Lorsqu'après les prélèvements pratiqués par les légitimaires, il y a
un reliquat et qu'il n'est point d'aceb pour le recueillir, ce reliquat
est partagé entre les légitimaires en fonction de la part de succession
réservée à chacun d'eux.
8.2.2.5. Droits sucessoraux
8.2.2.5.1. Droits successoraux des héritiers légitimes
• Le mari a droit à la moitié (1/2) de la succession si la femme décède
sans descendants.

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LES DROITS DE LA FEMME

Il hérite du quart (1/4) de la succession lorsque la femme laisse un


ou plusieurs enfants ou petits-enfants.
• La veuve a droit au quart (1/4) de la succession lorsque le mari est
décédé sans laisser de descendants.
S’il existe plusieurs veuves, ce quart (1/4) doit être divisé entre elles.
La part de la veuve est du huitième (1/8) de la succession si le mari
défunt a laissé un ou plusieurs descendants. S’il y a plusieurs veuves,
ce huitième (1/8) doit également être réparti entre elles.
• La mère a droit au tiers (1/3) de la succession si le défunt n’a laissé
ni descendants, ni deux ou plusieurs frères ou sœurs germains,
consanguins ou utérins.
Elle a droit au sixième (1/6) de la succession, lorsque le défunt a
laissé un ou plusieurs descendants successibles, ou bien deux ou
plusieurs frères et sœurs.
• Le père a droit au sixième (1/6) de la succession lorsque le défunt a
laissé un ou plusieurs descendants.
8.2.2.5.2. Droits successoraux des héritiers universels ou aceb
8.2.2.5.2.1. Ordre successoral
Les héritiers aceb succèdent dans l’ordre suivant :
1) les descendants ;
2) le père ;
3) les autres ascendants et les frères germains et consanguins ;
4) les descendants des frères germains et consanguins ;
5) les oncles germains et consanguins et leurs descendants.
Chaque aceb d’une classe exclut l’héritier aceb des classes suivantes.
Par exemple, le fils et/ou le petit-fils, qui sont des descendants, excluent le
père et les autres ascendants.
8.2.2.5.2.2. Partage par tête
Entre héritiers aceb, les partages s’opèrent par tête s’ils sont tous du même sexe.
Si les aceb appelés à concourir ne sont pas tous du même sexe, les hommes
reçoivent une part double de celles des femmes.

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