À propos de ce livre électronique
Depuis longtemps déjà Roland Petijoie s’est habitué aux colères de son épouse, Sandrine. L’idée de divorcer lui a parfois traversé l’esprit, mais il lui faudrait alors perdre le confort auquel il tient. Il a donc pris le parti de se taire et de la supporter en silence. Pourtant, la situation va échapper à tout contrôle. Un soir, alors qu'il rentre chez lui, il est agressé et assommé par un inconnu. Quelques jours plus tard, c’est Sandrine qui disparaît et voilà que sa mère est emmenée dans un état grave à l’hôpital où quelqu’un tente de l’assassiner. Mais ce n’est pas tout. Roland apprend qu’en disparaissant, son épouse a emporté les deux tableaux suspendus depuis des années au mur du salon. Tous ces événements tissent une trame autour de la vie de Roland et emmêlent les fils de plusieurs destins. Et c’est aussi le moment que choisit son ancien ami Jeremy, énigmatique détective privé, pour réapparaître dans sa vie… et les choses s’emballent. Le commissaire Roman, de la criminelle, aura beaucoup de difficultés à démêler cet écheveau de chantage et de règlements de compte dont les racines remontent jusqu'aux années sombres de la dernière guerre, d’autant que sa vie privée n’est pas non plus exempte de complications.
Suivez pas à pas les investigations du commissaire Roman, bien décidé à démêler cet écheveau de chantage et de règlements de compte.
EXTRAIT
C'est à peine si elle lui avait laissé le temps d'ouvrir la bouche. Sans attendre qu'il ait terminé ses reproches, elle lui avait jeté son venin au visage.
— Qui gagne le plus ici, qui fait bouillir la marmite ? avait-elle lancé, comme on jette une pierre. Ce n’est certes pas avec ton salaire de misère que nous aurions pu faire bâtir !
Pour donner plus de poids à ses propos, elle avait levé la main, menaçante. Alors il s’était tu.
Loin de s'attendre à une telle levée de boucliers, il avait cru qu'apeurée par ses cris elle s'effacerait. Or, voilà que c'est lui qui avait dû battre en retraite.
Le dos rond, un air de chien battu, il s’était rapidement éloigné. Par crainte de recevoir des coups et pour cacher ses larmes de honte.
À PROPOS DE L'AUTEUR
René Cyr vit dans le département du Nord, à Neuville sur Escaut, à une trentaine de kilomètres de la frontière belge. Il a été Ingénieur Conseil et expert en bâtiment, il dirige depuis cinq années une Association d'aide à domicile auprès de personnes âgées dépendantes. Passionné de lecture depuis sa jeunesse, il s'est tourné vers l'écriture d'un premier roman policier édité en mai 2006 avant de donner une suite aux aventures du commissaire Roman et du commandant Quentin.
En savoir plus sur René Cyr
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Aperçu du livre
Outrages - René Cyr
Outrages
René Cyr
Thriller
Dépôt légal juin 2012
ISBN : 978-2-35962-289-8
Collection Rouge
ISSN : 2108-6273
©Couverture hubely
© 2012 — Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction intégrale ou partielle, réservés pour tous pays.
Éditions Ex Aequo
6 rue des Sybilles
88 370 Plombières les bains
http://www.editions-exaequo.fr
www.exaequoblog.fr
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La correction de cet ouvrage a été réalisée
par Elodie Guillot pour « Corrections à La loupe »
Email : [email protected]
Après quelques années, la vie à deux n’est tolérable qu’à la condition de permettre à chacun de devenir soi-même !
A papa et à maman… à Arthur et à Simonne, avec toute mon affection !
Dans la même collection
L’enfance des tueurs – François Braud – 2010
Du sang sur les docks – Bernard Coat L. — 2010
Crimes à temps perdu – Christine Antheaume — 2010
Résurrection – Cyrille Richard — 2010
Le mouroir aux alouettes – Virginie Lauby – 2011
Le jeu des assassins – David Max Benoliel – 2011
La verticale du fou – Fabio M. Mitchelli — 2011
Le carré des anges – Alexis Blas – 2011
Tueurs au sommet – Fabio M. Mitchelli — 2011
Le pire endroit du monde – Aymeric Laloux – 2011
Le théorème de Roarchack – Johann Etienne – 2011
Enquête sur un crapaud de lune – Monique Debruxelles et Denis Soubieux 2011
Le roman noir d’Anaïs – Bernard Coat L. – 2011
À la verticale des enfers – Fabio M. Mitchelli – 2011
Crime au long Cours – Katy O’Connor – 2011
Remous en eaux troubles –Muriel Mérat/Alain Dedieu—2011
Thérapie en sourdine – Jean-François Thiery — 2011
Le rituel des minotaures – Arnaud Papin – 2011
PK9 - Psycho tueur au Père-Lachaize – Alain Audin- 2012
…et la lune saignait – Jean-Claude Grivel – 2012
La sève du mal – Jean-Marc Dubois - 2012
L’affaire Cirrus – Jean-François Thiery – 2012
Blood on the docks – Bernard Coat traduit par Allison Linde – 2012
La mort en heritage – David Max Benoliel – 2012
Accents Graves – Mary Play-Parlange – 2012
7 morts sans ordonnance – Thierry Dufrenne – 2012
Stabat Mater – Frédéric Coudron – juin 2012
Outrages – René Cyr – juin 2012
Table des matières
Chapitre I
Chapitre II
Chapitre III
Chapitre IV
Chapitre V
Chapitre VI
Chapitre VII
Chapitre VIII
Chapitre IX
Chapitre X
Chapitre XI
Chapitre XII
Chapitre XIII
Chapitre XIV
Chapitre XV
Chapitre XVI
Chapitre XVII
Chapitre XVIII
Chapitre XIX
Chapitre XX
Chapitre XXI
Chapitre XXII
Chapitre XXIV
Chapitre XXVI
Chapitre XXVIII
Chapitre XXIX
Épilogue
Chapitre I
— Roland, murmura Sandrine, Jacqueline est une emmerdeuse. Elle n’en finit pas de pleurnicher et ça m’agace !
L'intéressé posa calmement sur la table de chevet le livre qu'il tenait en mains et se tourna vers son épouse. Le menton calé dans le creux de l'oreiller, il se mit à la dévisager, avec l'ébauche d'un sourire sur les lèvres.
Il s'agissait d'une nouvelle manière pour lui d'affronter ses colères qui comportait deux avantages. Celui de cacher sa peur derrière le masque tranquille d'une conscience au repos, en même temps que l'espoir secret de la voir crever au plus vite. Car le voyant sourire, elle n'allait pas manquer d'exploser, ce qui mettrait en péril les artères de son cerveau.
Sans l'épaisse couche de maquillage dont elle se couvrait matin et soir, sa peau, percée d'une multitude de petits trous, ressemblait à une moustiquaire.
Depuis quelques semaines, de larges cernes noirs s'étaient mis à grandir sous ses yeux, contribuant à rendre son regard plus méchant encore. Quant à ses rondeurs naissantes, elles communiquaient à l'ensemble l'impression malsaine d'une masse gélatineuse et glaciale.
Il croisa malencontreusement son regard. Son sourire se figea aussitôt sous l'emprise de l'angoisse qui montait.
Il venait de deviner l'objet de leur entretien. Cela faisait quelques semaines qu’elle tentait d'aborder le sujet. Cette fois, elle paraissait décidée à vider son sac.
Sans volonté aucune, il n'avait jamais trouvé suffisamment de force pour se rebeller contre elle. D'ailleurs, il n'était même pas question de force. Cela s'était fait comme ça, tout naturellement, au fil des ans. Il la craignait et il n'était pas question de résister à sa volonté farouche, encore moins de s'opposer à ses décisions au risque de la voir aussitôt entrer dans une colère terrible.
Jusqu'à présent, il ne s'en était pas plaint, il s’était même fait à l'idée que c'était elle qui portait la culotte et non lui.
C'est une loi de la nature, dans chaque paire l'un commande tandis que l'autre obéit.
Au bureau, ce qu'il subissait était pire encore, même si les choses s’étaient quelque peu arrangées avec ses collègues depuis sa nomination à un poste élevé dans la hiérarchie.
Malgré tout, par habitude ou par lâcheté, il était resté leur souffre-douleur et quelques-uns se permettaient parfois des libertés à la limite de l'insubordination.
N'osant pas rétorquer aux quolibets qui se propageaient dans son dos, pour tous, il n'était qu'un idiot. Parfois, au cours de réunions de travail, il s'en trouvait même certains pour vanter sur un ton plaisant sa douceur de caractère. Et Roland souriait, piètre défense contre les traits acérés de ses collègues.
Son unique tentative de rébellion contre Sandrine lui revint brusquement en mémoire.
Cela faisait deux années qu'ils étaient mariés, deux années écoulées dans une atmosphère de crise larvée. Trop de discussions n'étaient en réalité que des scènes de ménage déguisées, à la suite desquelles leurs nuits se terminaient dos à dos dans le lit conjugal.
Un soir, peu de temps après la nomination de Sandrine au poste de directrice commerciale, fatigué de ses scènes continuelles, il avait décidé de s'imposer en force, de lui montrer qui était le chef.
C'est à peine si elle lui avait laissé le temps d'ouvrir la bouche. Sans attendre qu'il ait terminé ses reproches, elle lui avait jeté son venin au visage.
— Qui gagne le plus ici, qui fait bouillir la marmite ? avait-elle lancé, comme on jette une pierre. Ce n’est certes pas avec ton salaire de misère que nous aurions pu faire bâtir !
Pour donner plus de poids à ses propos, elle avait levé la main, menaçante. Alors il s’était tu.
Loin de s'attendre à une telle levée de boucliers, il avait cru qu'apeurée par ses cris elle s'effacerait. Or, voilà que c'est lui qui avait dû battre en retraite.
Le dos rond, un air de chien battu, il s’était rapidement éloigné. Par crainte de recevoir des coups et pour cacher ses larmes de honte.
***
Et puis, tout était rentré dans l'ordre. Elle décidait, il obéissait. Or, voilà que depuis quelques jours, il se sentait de nouveau capable de s'opposer à elle et à son projet de placer sa mère en maison de retraite. Placement qu'elle avait plusieurs fois évoqué sans toutefois en parler vraiment comme par crainte de ses réactions, mais cela semblait ne pas pouvoir durer.
Toute la journée, la tension avait été palpable. Il savait qu'elle ne s'achèverait pas sans que survienne un conflit et que finalement il allait plier. Dès le saut du lit, cette idée s'était imposée à lui. Cette fois encore il allait devoir supporter l’insupportable.
Il poussa un profond soupir et cala son visage contre l’oreiller.
— Oui ? articula-t-il de sa voix la plus douce, qu’y a-t-il ma chérie ? Que t’a encore fait maman ?
L’angoisse le tenaillait, comme une lame acérée fouillant au plus profond de ses entrailles. Elle posa sur lui un regard dur et brillant de colère. Le fait qu'il ait deviné l'objet de leur entretien devait l'irriter davantage.
Il se mordilla les lèvres, regrettant sa question, tandis que Sandrine soufflait comme un dragon par ses narines largement ouvertes.
Puis, soudain, elle lança son attaque. Une longue litanie de reproches qu'elle envoya d'un trait comme un tir d'artillerie.
Ses entretiens étaient d'ailleurs réglés comme des campagnes militaires ; avec un ordre de défilement de ses critiques quasi immuable, le principal motif allait venir ensuite.
Elle commença par leur absence de vacances et de sorties, puis sa totale insatisfaction sexuelle.
Comme chaque fois qu’elle s’énervait, sa voix était devenue aiguë et blanche. Pour compenser l’absence de graves, elle haussa brusquement le ton. Au moment d'entrer dans le vif du sujet, elle hurlait.
— Nous avons la quarantaine, regarde comment nous vivons… on dirait… je ne sais pas moi, on dirait deux vieillards. Ta mère est âgée et nous attire vers le bas. C’est à peine si j’ose encore inviter des amis de notre âge… il faut sans cesse la surveiller pour éviter qu’elle ne se blesse. Dans deux mois, tout le monde sera en vacances, sauf Roland et Sandrine Petijoie !
À l'énoncé de son nom, sa poitrine fut secouée par un ricanement nerveux. Elle faillit s’étouffer et dut se taire un instant. Roland savoura ces quelques secondes de silence, mais elle reprit aussitôt.
— Petijoie… avec un nom pareil, j’aurais dû me méfier. Au bureau, j'ai subi toutes sortes de moqueries à cause de ce nom ridicule. Mais je leur ai montré les dents et c’est moi qui ai eu le dessus. Maintenant, ils sont tous à ma botte et viennent me manger dans la main et toi aussi tu me manges dans la main !
Le ton de sa voix s’était fait plus doux. Elle devait savourer sa victoire et le fait qu'une fois de plus il n'avait pas osé lui répondre.
— Tu ne dis rien, comme d’habitude… que ferons-nous dis-tu. Tu veux que je te dise ce que nous allons faire ?
De nouveau, elle haussa le ton.
— Ta mère nous gâche la vie et pas seulement la nôtre, mais également celle des enfants. Alors voilà, figure-toi que je ne vais pas encore passer un mois à arpenter le gazon !
Emportée par sa verve, elle dut s'arrêter pour reprendre son souffle. C’est ce moment que choisit Roland pour prendre la parole à son tour.
— Mais… ma chérie… combien de fois t’ai-je entendu dire que tu préférais rester à la maison plutôt que te faire rôtir bêtement comme tant d'idiots sur la plage !
Elle faillit s'étrangler et roula des yeux furieux. Comme chaque fois que le calme et la raison de Roland risquaient de lui donner tort, elle s'emporta brusquement.
— C’est comme ça, hurla-t-elle… écoute-moi bien… j’ai pris ma décision… !
Elle bégayait et devait reprendre son souffle entre chaque bribe de phrase.
— Dès demain, je me mets à la recherche d’une maison de retraite. Dorénavant, c’est elle ou moi… tu m’entends… elle ou moi !
Puis elle tourna brusquement le dos et demeura silencieuse. L’entretien était clos, il n’y avait plus à y revenir, c’est de cette manière que les choses allaient se dérouler.
Il avait beau déglutir, la boule ressentie quelques jours auparavant dans sa gorge et qui l'empêchait d'avaler était toujours là. À présent elle enflait au point de l’étouffer.
Le silence lui faisait mal aux oreilles. Une vague de désespoir voila brusquement son regard, tandis que sa lèvre inférieure fut soudain prise de tremblements. Il ne parvenait plus à retenir ses larmes et plutôt que lui montrer sa défaite, il préféra, lui aussi, se tourner de son côté.
Il saisit le drap à pleines dents et mordit dedans de toutes ses forces pour masquer ses sanglots. De son côté, Sandrine fulminait de rage.
Cela devait faire longtemps qu’elle préparait son attaque.
L'image de sa mère, seule, dans une grande maison anonyme, s'imposa à son esprit et son chagrin redoubla. Elle allait se laisser mourir et les enfants, qu'allaient-ils en penser ?
Et voilà que peu à peu l'idée de les mettre de son côté se mit à germer dans son esprit, comme un ultime espoir de victoire.
Les enfants étaient sa seule arme pour contrer la volonté de Sandrine. Elle serait bien obligée de céder ou de tempérer si elle ne voulait pas passer pour un monstre aux yeux du reste de la famille.
Il trouva l'idée fort séduisante et cessa aussitôt de pleurer. Rassuré, il ferma les yeux et remonta le drap pour se couvrir les oreilles et ne plus entendre la respiration de Sandrine qui soufflait comme une locomotive à vapeur dans une côte.
Trop anxieux pour dormir, il ouvrit de nouveau les yeux et se mit à fouiller les ténèbres du regard dans l’espoir d’une solution de rechange. Mais seule l'idée de lui mettre les enfants à dos tournait dans son esprit comme une grosse mouche paresseuse.
Il n’osait plus bouger. Il aurait voulu s'endormir pour oublier l’existence d'un monde capable de contenir des femmes comme Sandrine, mais il était décidément trop nerveux.
Il avait beau maintenir ses paupières fermement serrées, rien n’y faisait. Le sommeil ne venait toujours pas. La dernière phrase de son épouse lui trottait sans cesse dans la tête. Sitôt chassée, elle revenait s’incruster, plus forte, plus précise. Pas moyen de s’en débarrasser.
Sa mère allait pleurer, supplier qu’on la garde. Elle allait s’humilier, comme tant de fois il l’avait vue faire dans le passé. Lorsque son père était décédé, renversé par une voiture dont le chauffeur avait pris la fuite, elle avait décidé de travailler pour les faire vivre.
À l’époque, il était enfant. Il se souvint que quelques jours seulement après les funérailles, elle avait évoqué une curieuse visite de la part d'individus vêtus de noir qui parlaient le français avec un accent germanique très prononcé. Ils désiraient savoir si quelques jours plus tôt son époux ne lui avait pas ramené deux tableaux représentant, pour le premier, des personnages courbés vers le sol et pour le second, un paysage de montagne. Ces deux pièces leur appartenaient et ils feraient tout pour les récupérer.
Des tableaux… non, elle ne comprenait pas. Elle n’avait jamais vu André revenir à la maison avec des tableaux. Et puis, elle ne savait rien des activités de son époux, elle les soupçonnait, sans aucune certitude.
En cette époque troublée de l’année 1943, elle se doutait bien que ses absences prolongées devaient cacher quelque louche activité. Et puis, tant d'argent lui passait entre les mains, ce n'était certes pas le fruit d’un travail honnête. D'ailleurs, de travail, il n'en avait pas.
Néanmoins, en femme polonaise soumise, elle s’était toujours montrée discrète et obéissante. Et puis, cette relative opulence ne lui déplaisait pas, elle lui permettait même de mettre de l’argent de côté. La guerre finirait bien un jour, pourquoi ne pas profiter des occasions qu'elle lui apportait. Tant pis pour ceux qui avaient des scrupules.
Devant les deux hommes, elle avait joué les étonnées et répondu par la négative. Ils avaient insisté, la bousculant même un peu, mais elle n'avait pas craqué. Voyant que leurs menaces ne servaient à rien, ils avaient changé de tactique, lui proposant même une importante somme d’argent. Mais elle avait continué de nier. Non, elle n’avait jamais vu ces toiles.
Les seuls tableaux qu’elle possédait étaient les quatre croûtes sans grande valeur ni intérêt, dont elle était, nue ou vêtue, la seule représentation.
Modèle chez un peintre installé depuis quelques années à Beaucaire, elle posait régulièrement pour lui. Ils n'avaient qu'à regarder, il s’agissait pour la plupart d’essais ratés.
Homme sans grand talent, ce peintre avait la chance d’être doté de parents aisés qui s’occupaient de récupération de métaux dans le Nord. Occupation très lucrative durant la guerre, tandis qu’il tentait pour sa part de trouver l’inspiration dans le Sud auprès de jeunes femmes qu’il rétribuait largement pour se déshabiller, sous le prétexte de créer une œuvre unique dans l’histoire de l’art.
Œuvre dont il était malheureusement le seul à reconnaître les mérites. Ses essais répétés demeurant toujours aussi médiocres.
Sa réputation de coureur de jupons n’était plus à faire. Jacqueline s’en moquait, car prendre la pose lui permettait de gagner beaucoup d’argent. En effet, si le peintre n’avait aucun talent artistique, il avait beaucoup de cœur et puis il ne lui déplaisait pas.
Cependant, privée des recettes que lui amenait le commerce de son époux, elle avait dû rapidement se résoudre à rechercher un emploi plus substantiel.
Tout en continuant de poser, elle s'était rendue, sur les conseils d’Isabelle Genêt, l’institutrice avec qui elle semblait avoir sympathisé, au café le Palladium, siège du football club local.
La recommandation était solide, elle fut donc embauchée immédiatement. Et puis, son époux avait très souvent fréquenté l’endroit, le patron gardait encore son souvenir en excellente estime.
Son travail consistait à faire le ménage, accessoirement, à servir les repas aux clients. Ces clients qui, curieusement, ne payaient jamais à l’aide de tickets.
Lorsqu’elle terminait, il était alors environ quatorze heures, elle rentrait chez elle pour s’occuper de Roland, son fils unique.
Le décès d'André avait provoqué une avalanche de problèmes administratifs et financiers, dont celui du paiement de leur logement. Fort heureusement, lors de l’achat de la maison, les époux avaient eu la sagesse de contracter une assurance vie. La compagnie solda donc l’emprunt, ce qui lui ôta une sacrée épine du pied.
Durant les mois qui suivirent, les curieux personnages que la mort d'André Petijoie n’avait pas éloignés pour autant continuèrent à rôder autour de la maison.
Dans la rue, au travail, partout, ce sentiment d’être toujours surveillée. Mais jamais elle n’avait cru que cela irait plus loin qu’une simple surveillance.
Un jour, de retour de son travail, elle eut l’impression d'une présence étrangère chez elle. Les cadres suspendus au-dessus du divan, légèrement de travers, avaient été déplacés, ainsi que divers autres objets.
Elle signala immédiatement ce fait à la gendarmerie, mais aucune suite ne fut donnée à sa plainte.
Du moins en apparence, car deux semaines plus tard, l’artiste peintre était emmené au siège de la Gestapo. Une lettre anonyme l’ayant désigné comme membre actif de la résistance locale. Sa disparition était-elle liée aux recherches des deux hommes ? Elle n'en sut jamais rien. De même qu'elle n’eut plus jamais la moindre nouvelle de lui.
Ce n’est qu’une fois la libération survenue, qu’elle apprit des autorités qu’il avait été sauvagement torturé avant d'être déporté dans un camp où il était mort quelques jours seulement après son arrivée.
La disparition de l'artiste devait marquer un tournant dans la vie paisible de Jacqueline et Roland Petijoie. Trois semaines après cette arrestation, un soir qu’elle rentrait du cinéma, elle découvrit sa maison en flammes. Une foule se pressait à proximité. Les pompiers déclarèrent avoir trouvé des bidons d’essence disséminés au rez-de-chaussée.
L’incendie était bien d’origine criminelle et même si rien ne le laissait supposer, Jacqueline ne put s'empêcher de songer aux deux hommes dont elle avait surpris la présence à maintes reprises autour de chez elle.
Malheureusement, la série de catastrophes ne devait pas encore s’arrêter là.
Quelques jours plus tard, c’est le patron du bar Le Palladium que l’on retrouva pendu dans sa remise. Sa maison avait été mise à sac.
L’enquête conclut hâtivement à un suicide. Pourtant, dès le lendemain, des bruits coururent en ville sur son éventuel assassinat. Quelqu’un avait aperçu les nombreuses traces de coups qu'il portait au visage et sur l’ensemble du corps. Visiblement, avant de se pendre, il avait été passé à tabac.
Des bruits circulaient également sur un trafic à grande échelle organisé avec la complicité de certains membres de la Gestapo locale et sur une histoire de vengeance au sujet d’un partage qui aurait manqué d’équité.
En attendant de trouver à se reloger, Jacqueline s’installa chez sa sœur, à quelques kilomètres de là, avec son fils Roland et de menues bricoles dont ses quatre toiles qu'elle avait eu le réflexe de cacher à la cave.
Ils demeurèrent trois mois chez cette sœur, le temps pour la compagnie d’assurances de lui verser le dédommagement du sinistre. Elle acheta ensuite une petite maison où ils vécurent durant cinq années.
Un jour, au beau milieu de l'année scolaire, sans rien confier de leurs intentions, ils bouclèrent leurs valises, embrassèrent une dernière fois Isabelle Genêt et quittèrent définitivement Beaucaire pour s’installer à Lille. Une tante perdue de vue depuis de nombreuses années y résidait déjà.
L'annonce de leur départ provoqua chez Isabelle Genêt un déluge de larmes dont Jacqueline sembla se moquer totalement. Pourtant, le chagrin de son amie faisait réellement peine à voir. Mais elle n’éprouvait aucun regret. Trop de mauvais souvenirs étaient attachés à Beaucaire et puis Roland, à présent âgé de quatorze ans, devait découvrir une autre vie. Elle voulait rompre avec celle qu'ils avaient connue jusqu'à présent. Une vie faite de méfiance et de souvenirs de marché noir que les habitants colportaient dans leur dos.
Elle voulait mettre de la distance avec ce passé. Alors, tant qu’à partir, autant le faire à l’autre bout de l’Hexagone.
Ils s'établirent donc dans la banlieue lilloise, à Lomme, dans un petit pavillon qu’elle obtint pour un prix intéressant.
Elle trouva rapidement un emploi de femme de ménage dans une école proche de la mairie et Roland entreprit des études de comptabilité.
Les gens se montraient aimables, au moins ne connaissaient-ils rien de leur passé. Pour répondre aux questions, elle avait inventé une histoire de persécution familiale que le voisinage s’était passé de bouche à oreille.
Estimée dans son quartier, elle commençait à oublier sa vie passée. Roland réussit tellement bien ses études qu’il trouva un emploi quelques mois seulement après l’obtention de son diplôme, dans une importante société de transports de Lille.
Le seul problème était ce jeune homme taciturne, à peine plus âgé que lui, avec lequel il s’était lié d’amitié durant ses études universitaires, au point de l’inviter plusieurs fois dans le pavillon familial.
Dès son arrivée, les deux amis s’enfermaient dans la chambre à coucher jusqu'à parfois très tard et même au-delà de la nuit tombée.
Jacqueline demeurait au bas de l’escalier, recroquevillée sur elle-même, avec l’angoisse qui lui nouait la gorge. Elle écoutait leurs rires et leurs longs silences, s’inquiétant de ce que cet homme bizarre pourrait faire à son fils.
Décidément, elle ne l’aimait pas du tout. Il la mettait trop mal à l’aise avec son regard, tantôt fuyant, tantôt arrogant.
Dès son départ, après l’avoir salué, elle courait dans la cuisine se laver les mains à grandes eaux.
Il lui faisait peur. Il lui rappelait trop ces hommes qui, des années plus tôt, après le décès de son époux, avaient rôdé autour de sa maison de Beaucaire.
Plusieurs fois, elle tenta de confier ses craintes à Roland, mais sans succès. Dès qu’elle commençait l'amorce d'une discussion au sujet de son ami, il se fermait comme une huître.
Alors, elle décida de le fuir. Sitôt qu’elle l’aper-cevait à travers les rideaux, elle courait se réfugier dans sa chambre pour ne ressortir que fort tard, après son départ.
Ce cauchemar dura deux années, deux longues années au cours desquelles elle crut devenir folle. Puis, aussi soudainement qu’il était apparu, il disparut et ne donna plus le moindre signe de vie.
Jacqueline n’en comprit la raison que quelques semaines plus tard. Roland avait fait la connaissance d’une jeune fille qui se prénommait Sandrine.
Au cours du repas auquel elle fut conviée, elle se mit à vanter avec véhémence sa pureté et son refus de connaître l'amour avant le mariage.
Jacqueline ressentit immédiatement de la défiance envers elle. Un tel emportement n'était-il pas le signe d'un caractère excessif, porté sur la méchanceté et l'avarice. Et puis, le fait qu'aucun homme ne cherche à la connaître ne devait-il pas inciter à la méfiance.
Malgré les mises en garde de Jacqueline, Roland l’épousa, après de rapides fiançailles qui durèrent trois mois à peine, rétorquant que pour sa part, il voyait dans cette fille rejetée de tous un signe de la providence.
Au fil des mois, il devait cependant rapidement déchanter. Si personne ne l’avait désirée pour épouse, c’est qu’elle avait simplement très mauvais caractère et ce dernier, loin de s’arranger avec le mariage, n'avait fait qu'empirer.
Les deux époux s'installèrent dans un appartement de la rue Abélard, face au Jardin botanique au sud de Lille.
Dès le départ de son fils, Jacqueline décida de cesser de travailler. Âgée de soixante-deux ans, elle avait mis suffisamment d’argent de côté pour profiter de la vie. Elle allait enfin pouvoir vivre tranquille et même chichement.
Deux ans après son mariage, Sandrine décrocha un emploi subalterne au sein d’une importante compagnie d’assurances.
Après quelques mois de présence, arrachée à force de ténacité, elle obtint sa nomination à un poste à responsabilités.
L’idée maîtresse de sa vie était depuis toujours la réussite financière. Cette seule idée accaparait entièrement son esprit, mobilisant la totalité de ses forces. Influençant même l’existence de ses proches soumis à ses sautes d’humeur et à ses écarts de langage et de brutalité. Bref, cette femme était pire qu’un homme et encore s’agissait-il du pire d’entre eux.
Durant la semaine qui suivit sa nomination, elle se mit à rêver d’une vie luxueuse.
Désormais, une autre idée se mit à compter pour elle, la construction d’un pavillon individuel. Son standing se devait d'être à l’image de sa réussite professionnelle.
Elle trouva rapidement un terrain sur la commune d'Orchies et s’occupa de tout sans que Roland n’ait quoi que ce soit à redire. Les travaux avançaient rapidement. La construction était parvenue à la couverture, lorsqu’elle s’aperçut d’une légère erreur d’appréciation dans ses calculs. Elle avait tout simplement oublié quelques millions.