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La malédiction des toubabs
La malédiction des toubabs
La malédiction des toubabs
Livre électronique199 pages2 heures

La malédiction des toubabs

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À propos de ce livre électronique

Dans le cadre de la coopération franco-ivoirienne, Paola et Damien sont affectés au lycée de garçons de Bingerville, où ils savourent les mystères de l’Afrique avec émerveillement. Mais leur bonheur est de courte durée. Dès la seconde année, une série de crimes secoue la communauté des coopérants, plongeant Paola et Damien dans une spirale de suspense et de danger. La police peine à résoudre ces énigmes, tandis que chaque nouvelle découverte les rapproche au cœur d’une intrigue périlleuse.

À PROPOS DE L'AUTEUR

À la suite d’une carrière riche et diversifiée, Daniel Maître vous entraîne, à travers ses personnages, dans un voyage captivant au cœur de l’Afrique. Entre amitié, amour, haine et vengeance, il offre aux lecteurs une histoire policière assez surprenante dans La malédiction des toubabs.


LangueFrançais
ÉditeurLe Lys Bleu Éditions
Date de sortie17 août 2024
ISBN9791042238605
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    Aperçu du livre

    La malédiction des toubabs - Daniel Maître

    Des culs blancs en Afrique noire

    Au-dessus des nuages

    C’était un dimanche, c’était à Orly, comme dans la chanson de Gilbert Bécaud.

    Je m’en vais l’dimanche à Orly.

    Sur l’aéroport on voit s’envoler

    Des avions pour tous les pays.

    Pour l’après-midi j’ai de quoi rêver.

    Je me sens des fourmis dans les idées

    Quand je rentre chez moi la nuit tombée.

    L’enfant de l’escalier 6, bloc 21 ne réalisera sans doute jamais son rêve…

    Damien, lui, ne rêvait pas. Il était bel et bien à bord d’un DC 8 de la compagnie Air Afrique. En ce temps-là, la vie des honnêtes gens n’était pas pourrie par des fanatismes religieux. Pas de file d’attente harassante, pas de fouille humiliante ; on embarquait dans un avion comme on monte dans un bus. Dans le sac de Paola, le 7.65 du grand-père était passé comme une lettre à la poste !

    Pour la première fois, il avait en face de lui une hôtesse de l’air, comme dans les livres, qui le priait de boucler sa ceinture. Pour la première fois, il entendait la musique rassurante de l’orchestre Caravelli, pour la première fois, comme dans les romans d’aventures qu’il avait dévorés dans sa jeunesse, il voyait à travers le hublot défiler de plus en plus vite le sol détrempé du tarmac dans le vrombissement assourdissant des réacteurs ; puis le retour au calme, comme un soulagement, après la petite angoisse du décollage, le bruit des ceintures qu’on déboucle, le ronronnement des moteurs en vitesse de croisière, la voix chaleureuse du pilote qui souhaite aux passagers la bienvenue à bord.

    Damien était aux anges, pressant très fort la main de sa femme blottie contre lui. Paola l’observait avec un petit sourire en coin. Pour elle, ce vol était loin d’être un baptême de l’air. Lors de ses nombreux allers-retours entre le Continent et la Corse, où elle aimait se ressourcer à Auddè, son village natal, elle avait connu bien sûr les bateaux de la Compagnie Générale Transatlantique, mais aussi le DC-4 puis la Caravelle d’Air France. Mais elle n’avait jamais entrepris un voyage aussi long dans un tel confort. Cependant, elle prenait un malin plaisir à jouer les blasées face à l’enthousiasme de son mari.

    Ils avaient quitté un Paris noyé sous un crachin tenace. L’avion poursuivait son ascension dans un épais brouillard. Et puis soudain, il émergea de la grisaille, débouchant dans la pureté d’un ciel azuréen, survolant une mer immaculée de nuages.

    Submergé par l’émotion, Damien ressentit pleinement l’intensité de cet instant qu’un chanteur exprimera en allemand sous le nom de Reinhardt Mey et en français sous le nom de Frederik Mey :

    Über den Wolken………………………...Au-dessus des nuages

    Muss die Freiheit wohl grenzenlos sein..……La liberté semble être infinie

    Alle Ängste, alle Sorgen……. Toutes nos craintes et nos peines

    Sagt man…………………………………………………….Dit-on

    Blieben darunter verborgen………….Seraient ensevelies sous l’horizon

    Sous ce plafond nébuleux, tout en bas, il laissait les bonheurs et aussi les tracas, cette année de lune de miel dans leur petit appartement lyonnais alors qu’il effectuait son stage de CAPES pratique et qu’elle poursuivait ses études tout en enseignant dans un collège de la ville ; puis le service militaire qu’il avait eu la chance d’effectuer sur place grâce à ses talents de footballeur, une période pourtant frustrante avec ce sentiment de perdre son temps, alors que Paola « faisait bouillir la marmite ».

    Les choses s’étaient gâtées lorsqu’après avoir été démobilisé, il avait dû rejoindre le poste qui lui avait été attribué, du côté de Valenciennes.

    Même si les collègues et les élèves avaient pleinement justifié la réputation de gentillesse et de convivialité des gens du Nord, la situation était intenable.

    C’est alors qu’il s’était souvenu d’une conversation avec un camarade de régiment, enseignant, qui constituait un dossier pour partir dans l’un de ces pays africains depuis peu indépendants au titre de la « coopération ». Il avait ainsi appris l’existence d’un Ministère de la Coopération. À l’occasion d’un jour de congé, il fit un saut à Paris et se présenta au 20, rue Monsieur.

    Rien ne vaut le contact direct. Dans les bureaux du Ministère, tout alla très vite. Depuis Lyon, Paola clamait qu’elle était prête à suivre son mari jusqu’au bout du monde. Ce ne fut pas le bout du monde, mais tout de même… la Côte d’Ivoire !

    Leur départ avait été précédé d’un séminaire à Bordeaux où on leur avait administré les vaccins obligatoires et où un envoyé de Côte d’Ivoire leur avait expliqué ce qui les attendait dans son pays. Il était du genre facétieux et s’était complu à noircir (sans jeu de mots !) le tableau, leur montrant la photo d’une piste en latérite en la faisant passer pour une route nationale. Mais globalement, sa présence à Bordeaux avait atteint son but : les rassurer avant le grand saut dans l’inconnu.

    Tandis que le tapis de nuages s’effilochait peu à peu pour laisser entrevoir les cimes des Alpes, Damien avait « plein de fourmis dans les idées »…

    L’Afrique ! Il allait enfin connaître ce continent mystérieux où ses lectures l’avaient emmené sur les traces d’aventuriers, d’explorateurs, de missionnaires de légende : le Docteur Samuel Ferguson durant ses Cinq semaines en ballon, René Caillé à Tombouctou, Stanley à la recherche de Livingston, Mungo Park qui se noya dans le Niger, Charles de Foucauld assassiné à la porte de son ermitage saharien, De Monfreid en Mer rouge, le Docteur Schweitzer à Lambaréné, Savorgnan de Brazza au Congo quelques années avant Tintin, ou la Baronne von Blixen-Finecke dans sa ferme africaine.

    Le seul dont il n’avait jamais entendu parler était un certain BINGER, explorateur puis administrateur de la Côte d’Ivoire. On a donné son nom à une ville qui en fut la capitale entre 1900 et 1934 : BINGERVILLE.

    Et c’est dans cette ville, au lycée de garçons que, par un curieux caprice du destin, Damien et Paola avaient été affectés !

    L’Afrique. Il en avait rêvé. Elle se matérialisa soudain lorsqu’après le bleu de la Méditerranée ce fut de l’ocre à l’infini : Le Sahara ! Le visage collé au hublot, il dévorait des yeux cette immensité de sable, tandis que des mots magiques envahissaient son esprit : oasis, touareg, caravane, dromadaire, razzia, le Ténéré, Agadès, Tamanrasset ou encore le nom d’un lieu qu’il avait cru longtemps imaginaire : Tataouine ! Il pensa à tous ces voyageurs qui étaient morts de soif sous un soleil de plomb et qu’on n’avait jamais retrouvés ; disparus à jamais dans cet océan minéral comme des marins en mer.

    Avec une pensée pour tous ces malheureux, il commanda deux coupes de champagne.

    L’Afrique ! Au sortir de l’avion, une bouffée de chaleur, comme une chape de plomb, une moiteur accablante ; le sol brûlant comme une plaque chauffante. Au pied de la passerelle l’oncle de Paola, Zio Anto, la chemise trempée de sueur, les attendait. Il avait ses entrées à l’aéroport. Les Corses ont des entrées partout ! Après avoir serré sa nièce dans ses bras, il toisa avec circonspection le Lyonnais endimanché. « O maschju, si tu ne tombes pas la veste tu vas mourir de chaleur ! Et enlève la cravate. On n’est pas à Lyon ici ! »

    Après avoir récupéré les bagages, ils embarquèrent dans un véhicule qui ressemblait plus à un char d’assaut qu’à un 4x4. Le tonton conduisait très vite. En quelques minutes, ils arrivèrent à destination.

    Abidjan

    Antoine et sa femme Vanina habitaient en Zone 4, le quartier des expatriés, à proximité de l’aéroport. La maison était vaste, entourée d’une végétation luxuriante et, raffinement suprême aux yeux de Damien, agrémentée d’une piscine.

    Vanina était une pure Ajaccienne, une Benedetti. Anto était le frère cadet du père décédé de Paola, un Giraschi de Propriano. Il dirigeait une grosse entreprise spécialisée dans le transport de grumes, ces troncs d’arbres non équarris qu’il fallait acheminer du fin fond de la brousse jusqu’au port d’où ils étaient expédiés dans tous les coins du monde.

    Il avait débuté avec un seul camion – un grumier – qu’il conduisait lui-même ; puis il avait développé son entreprise et se trouvait à la tête d’une flotte de dix véhicules. Vanina assurait la comptabilité tout en dirigeant sa maison ; mais pas toute seule ! Ce qui interpella Damien au plus haut point ce furent les boys ! Mais les boys des années 60 en Côte d’Ivoire n’étaient pas ceux, maltraités et exploités, de l’époque coloniale. C’étaient des « gens de maison » rétribués au tarif syndical sous le contrôle d’un inspecteur du travail. Malgré tout, le terme de « boy » gardait aux yeux de Damien une connotation colonialiste désagréable.

    « Ça te passera », lui glissa le tonton avec un sourire narquois. Excepté les nounous pour les enfants en bas âge, les « gens de maison » étaient généralement des hommes. Mamadou était au service des Giraschi depuis leur installation en Côte d’Ivoire. Sous la direction de Vanina, il était devenu un excellent cuisinier. Le civet de phacochère, version africaine du sanglier en sauce corse, n’avait pas de secret pour lui. C’est ce que Damien et Paola purent constater ce soir-là.

    Mais le reste du repas fut typiquement corse : muscat de Patrimonio, vin du Sartenais, charcuterie de Cozzano et pour finir le fiadone¹. La cerise sur le gâteau fut une liqueur de myrte concoctée avec amour par une mina² de Propriano.

    Les yeux embués de larmes, la tante de Paola leur parla de leurs enfants qui avaient dû quitter le nid familial après le bac pour poursuivre leurs études à Marseille. En attendant la création de l’université d’Abidjan, c’était malheureusement le lot de tous les jeunes expatriés.

    La chambre était climatisée et ils purent goûter une nuit de sommeil bienvenue après une telle journée.

    Le lendemain, à la demande de Damien, Antoine se fit un plaisir de les emmener sur son lieu de travail.

    « Et voilà les bestiaux ! » s’exclama-t-il en montrant les grumiers³ bien alignés sur un immense parking.

    « Il en manque trois qui sont en brousse. Celui-là est en instance de départ. »

    Effectivement, un chauffeur s’affairait sur l’un des monstres, vérifiant les niveaux, les pneus et les courroies énormes destinées à arrimer les grumes. Il était assisté d’un jeune garçon qui s’installa sur le siège passager.

    « Lui, c’est l’apprenti-calé. Il est là pour apprendre, mais surtout pour sauter du camion lors d’un arrêt et placer des cales sous les roues.

    Quant aux chauffeurs, ce qui est important lors de leur recrutement, c’est de vérifier que leur permis est authentique et qu’ils ne l’ont pas acheté. La vente de permis est une pratique courante.

    — Où partent-ils ? » demanda Paola.

    « Du côté de Daloa, à 300 kilomètres. Mais attention : ce n’est pas de l’autoroute ; c’est de la piste en latérite, ce qui explique cette poussière rouge qui recouvre tout. Elle s’insinue même dans les coffres des voitures ! Le pire, c’est la tôle ondulée ; si tu ralentis en dessous de 30 km/h, tu as l’impression que le camion va se désagréger ! »

    Damien ne put

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