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Les méandres d’une amitié trahie
Les méandres d’une amitié trahie
Les méandres d’une amitié trahie
Livre électronique216 pages2 heures

Les méandres d’une amitié trahie

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À propos de ce livre électronique

"Les méandres d’une amitié" trahie explore le drame déchirant d’une famille kabyle, victime d’une trahison dévastatrice. Hend, parti en France pour soustraire les siens à la misère, se dévoue corps et âme, ignorant que son ami Amezyan détourne les fonds destinés à son épouse, Chabha, la laissant sombrer dans une pauvreté insupportable. Tandis qu’Hend se sacrifie sans relâche, Amezyan abuse de sa confiance, aggravant le désarroi de la famille. Jusqu’où peuvent aller les faux-semblants d’une amitié pervertie ? Ce récit dévoile la brutalité des trahisons sous couvert de loyauté et les conséquences irréparables des abus de confiance.

 À PROPOS DE L'AUTEUR

Mohand Salah Aknouche fait de l’écriture une nécessité vitale pour révéler des vérités souvent tues. À travers ses récits, il explore la trahison, la résilience, et témoigne du poids des traditions et des luttes invisibles qui façonnent nos vies. Son objectif est d’éveiller une réflexion collective sur les défis universels que sont l’amitié, la famille et la survie.
LangueFrançais
ÉditeurLe Lys Bleu Éditions
Date de sortie11 oct. 2024
ISBN9791042247768
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    Aperçu du livre

    Les méandres d’une amitié trahie - Mohand Salah Aknouche

    1

    Il venait à peine de franchir la vingtaine lorsque Hend fut confronté à l’accablement de la démesure et à l’autorité de tutelle plus lourde qu’un monceau d’injustices. Son jeune âge ne pouvait ni souffrir d’asservissement ni supporter les déchirements de la faim. Les plaies sociales lacéraient sa petite âme d’indigène et brûlaient son petit cœur noyé dans le fiel amer. Sa perception de la vie était encore brumeuse, mais horriblement tourmentée par l’impénétrabilité d’un monde étrange qui démura sa postadolescence avec haine et violence. L’angoisse de l’incompréhension le harcelait par des interrogations inquiétantes que les adultes esquivaient avec un geste d’impuissance. Il n’avait pas la hardiesse d’un âge ayant été mûri par des expériences pratiques pour faire face à l’indigence et à la situation discriminatoire des plus graves que son âge ne pouvait distinguer les contours flous de l’autorité occupante. La puissance d’impact de l’immonde sauvagerie était plus forte que la chute brutale de roches sur sa tête. À la tyrannie odieuse des monstres venus d’ailleurs s’ajoutait la maladie qui décimait des familles entières. Toute sa tendre enfance était bercée par la haine attisée, un peu plus, chaque jour. L’inhumanité brutale et inqualifiable exercée sur les hommes et les femmes kabyles l’avait douloureusement stigmatisé. Il ne comprenait pas le sombre firmament qui enténébrait, de plus en plus, son beau village, les belles collines et montagnes de sa Kabylie. La faim avait atteint le point culminant du désespoir. En raison des mécanismes qui avaient été mis en place pour le recouvrement forcé de l’impôt, il était une bonne fortune d’avoir quelques chèvres, quelques brebis ou une vache qui permettaient à peine de titiller la luette et tisonner les gargouillis de l’estomac. Pour compenser la perte de revenus, l’apport en lait et en laine était précieux comme avantage vital. Hend, comme tous les enfants de son âge, n’avait pas choisi d’être berger. À cette époque, l’école n’existait pas dans son village, car la priorité des hordes guerrières et conquérantes était d’assujettir le peuple. Bien loin de penser à l’instruction des indigènes, elles s’empressaient, préférablement, à s’implanter, à dompter, à tyranniser les rebelles et insoumis qui persistaient à se dresser contre la puissance dominante. C’était le dénuement qui avait fait des enfants kabyles de petits pâtres. De la flûte à la charrue, du divin enfançon à l’homme fait, Hend prit le taureau par les cornes. Il brava, stoïquement, la faim, l’humiliation, les coups de rangers et l’exclusion sociale. Il se maria avec Chabha.

    Chabha, une belle fille de la famille Iznahen, habitait à quelques mètres de la maison de Hend. Sa beauté lumineuse ne laissait pas indifférent au village. Tout en elle était naturel. Elle n’avait aucune fausse apparence ni se donnait un air qui n’était pas le sien. Elle avait de grands yeux en amande, une chevelure abondante, saine et soyeuse qu’elle comprimait avec un foulard lustré aux franges de fil noir. Sa bouche fraîche et saine qu’elle enfermait dans son cœur était souvent souriante et sobre en paroles. Son corps était fluet et avait une belle carnation au visage. Sa taille était juste parfaite. Elle était fille unique parmi sept frères qui avaient été décimés par la peste et le mal-être. Elle avait miraculeusement survécu aux cruelles et terribles vicissitudes du climat social et politique. Elle avait connu la maladie, la faim, la tristesse et en surcroît du poids du lot, elle devait subir, sans gémir, l’implacable haine nommée misogynie. Elle était chétive de corps, mais sa santé mentale était vigoureuse et florissante. Elle n’avait pas seize ans lorsqu’elle épousa Hend, avec lequel elle eut quatre enfants.

    Mohand, l’aîné, était d’une douceur exceptionnelle. Il était l’espoir et la consolation de la famille en proie à une misère des plus grandes. Les impératifs dictés par des conditions de vie et la perpétuation du nom de la famille privilégiaient la naissance d’un garçon. Il égayait par son charme et sa candeur la maison de Hend. La joie de Chabha était infinie. Avant lui naquirent deux charmantes et jolies jeunes filles : Zahra et Cherifa. Et son puîné Medour, le benjamin de la famille, irradiait la gentillesse à travers chaque geste, animant chaque instant de sa présence dynamique et contagieuse, répandant la joie de vivre avec un enthousiasme débordant qui illuminait tous ceux qui l’entouraient. Le cocon familial était, pour Hend et Chabha, le jardin d’Éden. Ce fut, sans doute, cet espace édénique qui leur faisait oublier le plus sombre et le plus misérable quotidien. Tout se gagnait par la sueur des journées longues et laborieuses. À la maison, toute la famille obéissait à l’instinct de survie. Tout se calculait parcimonieusement, souvent on se contentait de quelques fèves grillées autour de l’âtre tout en brodant des contes enchanteurs pour tromper la faim. La misérable nourriture était compensée par des herbes comestibles comme : Taɣeddiwt (Scolyme), Ẓidlmum (Cousteline), Tuɣmas n temɣart (Dent de lion/Pissenlit), Tiffaf (Laiteron des champs), et des dizaines d’autres qui faisaient cesser les borborygmes et les torsions des boyaux. La coloration verte des lèvres inculpait la probable polyphagie qui vidait querelle à l’équilibre alimentaire. L’indigence ne permettait pas une miette de perdue, ou de gaspiller un grain de blé ni de pois chiche ou de lentilles. Hend et Chabha se démenaient comme des forçats pour prendre soin de leurs enfants. Malgré la situation inhumaine imposée par les bourreaux, agissant sous la bannière coloniale, et en dépit d’une soumission aliénante de plus en plus oppressive, rien ne les décourageait à braver l’insupportable pour les faire grandir. L’inextinguible soif de bestialité coloniale atteignait le summum de l’insensibilité. La lâche politique dominante était ancrée dans le mépris. Elle n’avait aucun scrupule à accroître l’hostilité et de déverser sa haine sur des villageois. Cyniquement, elle bafouait le respect et les droits élémentaires de ceux qui ne faisaient pas allégeance à l’avidité de l’ogresse bleue, aux grandes dents. À la privation de liberté s’ajoutaient l’arrogance, le mépris, la famine, la peste et l’horreur de l’empiétement. Les tensions causées par la cruauté excessive exacerbaient la souffrance des familles. Bien que la solidarité active et l’aide mutuelle atténuassent, un tant soit peu, les affres de l’âme, la persécution délirante restait sourde et implacable. Les causes profondes de l’injustice patente, et les conditions infrahumaines ne laissèrent à Hend aucun autre choix que celui de quitter son village. Cette décision ne pouvait être envisagée sans le besoin pressant, voire impératif, d’affermir une amitié indéfectible prête à tout sacrifier pour un ami. Il jugeait impérieusement nécessaire de nouer des liens de cœur et d’âme avec Amezyan. Cette entente était essentielle dans un contexte de fortes tensions psychologiques et sociales. Il ne pouvait se soustraire à se plier aux injonctions qui le contraindraient, soit à l’intérieur du pays, soit au-delà des mers, à l’émigration, loin, bien loin, de l’épouse et des enfants. Les vagues d’exodes des Kabyles vers d’autres contrées inconnues, particulièrement la France, la Tunisie et le Maroc furent provoquées par le contexte économique des périodes successives et exceptionnelles des guerres. À partir de mille neuf cent quarante, l’expatriation prit un essor inquiétant et, du point de vue des sentiments éthiques, le déracinement représentait une tragédie des plus sombres, cautérisant douloureusement les âmes et les esprits. Aucun bon sens ne pouvait résister aux multiples facettes du désespoir. Les effets collatéraux de ces déchirements dévastaient moralement des familles, car, dans la conscience d’un Kabyle, s’éloigner de sa terre et de sa famille était inenvisageable pour des raisons de codes de déontologie. La désaffection envers les conventions ancestrales était indigne de pardon. Toutefois, pour un bon nombre d’entre eux, l’émigration était temporaire, et ils revenaient chez eux après un travail saisonnier. Malgré la douleur et la honte qui l’éviscéraient de son humanité, Hend, après mûre réflexion, n’hésita pas un instant à transgresser les principes de l’éthique. Les Kabyles considéraient comme sacrilège l’éloignement du foyer conjugal. Quitter le village était moralement blasphématoire, car en Kabylie, on ne se séparait pas de sa famille, on n’abandonnait pas ses terres, on n’abdiquait pas devant la rudesse de la vie, mais on faisait front, même si les tensions demeuraient élevées. La détresse sociale et émotionnelle ne laissa à Hend aucun autre choix que de ne plus rester impassible face à sa famille qui languissait en silence, devant les tribulations et la souffrance. Il devait accepter l’humiliation de voir son fils Medour endurer, avec un ventre creux et sans vêtements chauds, un froid à claquer des dents. Souffrir de ce sentiment était un moindre mal comparé à celui d’assister impuissamment à la violence de la douleur muette de ses enfants. Rien ne pouvait soulager sa souffrance à la vue de son fils marchant pieds nus sur la neige d’un hiver rigoureux. Le spectre de l’insécurité planait au-dessus de lui. Il voyait la maladie et la mort rôder autour de sa famille. Tout représentait un risque certain pour la santé de ses enfants. Entre vivre ou mourir de faim, il prit la résolution de faire fi de l’astreinte morale pour tenter de sauver ce qui restait à sauver, mais avant cela, il devait, pendant son absence, confier le destin de sa famille entre les mains d’un ange tutélaire. Celui qui n’avait pas de proche parent comme protecteur capable de veiller sur la famille devait mandater un ami. Hend délégua à la fidélité de son amitié certains pouvoirs vis-à-vis de l’administration et de la collectivité locale. La mort dans l’âme, il avait conclu un marché avec son cœur et sa conscience. Il décida de partir, peut-être ne jamais revenir, personne ne le savait. Sa pugnacité avait failli, et son acharnement au travail n’avait pas suffi à remplir le ventre creux de ses enfants. Malgré toutes ses précautions et son grand discernement, Hend ne pouvait imaginer que le sort qui attendait sa famille serait des conséquences désespérantes, et plus sévères que la pauvreté, mais il n’avait pas le don de lire l’avenir. Il devait partir.

    L’exilé est un mort

    sans tombeau.

    De Publius Syrus / Sentences

    2

    Au diable vauvert, dès les premières lueurs du jour, le coq de la maison laissant libre cours à sa syrinx se mit à coqueriquer sous son cimier trémoussant pour annoncer le nouveau jour, heureux pour les uns maudit pour d’autres. Chabha, bouffie d’insomnie et assaillie par des pensées moroses et effrayantes, pensait déjà aux lendemains incertains. Une douloureuse anxiété et l’affreuse inquiétude de se retrouver seule l’avaient empêchée de dormir. Elle finit par abandonner l’idée de trouver le sommeil. Le jour fatidique fut annoncé par le cocorico perçant qui, pour la première fois, convainquit Chabha de la nuisance sonore de son coq, dont se plaignaient les voisins. Elle sortit de sa paillasse comme un condamné à mort qu’on sort de sa cellule pour l’amener à la potence. Ce matin-là, elle crut entendre un arioso dolent qui lui transperça le cœur. Depuis le jour où il avait pris la terrible décision de quitter son cocon de tendresse, Hend ne dormait presque plus. Ses nuits étaient agitées, longues et pénibles, hantées par le spectre de l’avenir incertain de sa femme et de ses enfants. Il n’avait aucune envie de se lever de son grabat. Dormant à même le sol, sur un paillasson, il n’avait aucune difficulté à se redresser, mais le poids moral qui pesait sur lui le faisait vaciller entre le regret et sa noble témérité. Chabha, les yeux larmoyants, avait déjà tout préparé. Elle n’éprouvait aucune peine à rassembler le nécessaire de voyage. Pour tout viatique : quelques figues sèches, une petite bouteille d’huile d’olive, quelques galettes et une boîte de semoule grillée assaisonnée avec de gros sel et d’huile d’olive, maigres provisions qui bringuebalaient dans une petite valise en carton. Une maigre consolation dans l’océan de la détresse. Hend caressa du regard chaque recoin de sa maison, ses yeux éteints s’arrêtant sur la soupente où dormaient ses enfants. Il n’espérait

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