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Le département fantôme: Alban et Mitch
Le département fantôme: Alban et Mitch
Le département fantôme: Alban et Mitch
Livre électronique441 pages4 heures

Le département fantôme: Alban et Mitch

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À propos de ce livre électronique

ALBAN ET MITCH

LE DÉPARTEMENT FANTÔME

« Les autorités s’intéressent trop à nos affaires. »

« Alors, on fait quoi ? »

« On nettoie nos opérations françaises. Comme le Titanic, mais sans les canots de sauvetage... »

Au cœur d’une multinationale de la finance, deux agents aux passés troubles, Alban et Mitch, sont réunis pour former une équipe peu conventionnelle. Chacun très indépendant, leur collaboration devient une exploration de leur dynamique unique et parfois explosive.

Assignés à une mission aux contours flous, ils évoluent au sein d’un « Département Fantôme », une section aussi efficace que mystérieuse, coupée de la maison mère. Alors que cette entité accumule les succès, une série d’incidents troublants commence à semer le doute et la méfiance parmi les employés.

Alban et Mitch doivent naviguer à travers les intrigues internes et affronter les spectres de leur propre passé. Vont-ils réussir à surmonter leurs différences et devenir une véritable équipe, pour dévoiler la conspiration qui se cache derrière les accidents mortels ?

Découvrez « Alban et Mitch et le Département Fantôme », un roman où chaque page dévoile un pan plus sombre de l’âme humaine et des machinations financières.

Attention, les cadavres s’accumulent plus vite que les bonus annuels.

Et cette fois, ce ne sont pas les stagiaires qui vont écoper.
LangueFrançais
ÉditeurPublishroom
Date de sortie25 juin 2025
ISBN9782386256011
Le département fantôme: Alban et Mitch

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    Aperçu du livre

    Le département fantôme - Jean-Francois Chambon

    Prologue

    37e étage.

    La pièce est plongée dans l’obscurité la plus totale. Seules les lumières des tours environnantes permettent de deviner, ici, un ordinateur, là, des fauteuils. Une ombre de forme humaine se détache dans ce décor froid. Immobile, la silhouette semble plaquée sur la baie vitrée.

    Le long du couloir, des pas feutrés effleurent la moquette épaisse de l’étage de direction. Les fantômes pénètrent dans la pièce. Ils se rapprochent sans bruit de l’homme dont l’attention est absorbée par ces lucioles extérieures. Pourtant, sans se retourner, l’ombre se met à parler.

    – Vous vous rendez compte que chaque point lumineux est une porte ouverte sur la vie d’une famille.

    – …

    – Vous êtes en retard, comme toujours.

    – Mais…

    – Asseyez-vous !

    – …

    – Les autorités s’intéressent d’un peu trop près à nos affaires.

    – On fait comme d’hab’, chef ? On les paye et, s’ils ne veulent pas, on s’occupe d’eux ?

    – Non, pas cette fois-ci.

    – Bon, on fait quoi, alors ?

    – On nettoie nos opérations françaises.

    – On ferme tout ? Comme le Titanic ?

    – Exactement comme le Titanic, mais sans les canots de sauvetage…

    image.

    Alban

    La voiture de sport détonne un peu à côté des véhicules tout-terrain couverts de boue. Le conducteur s’étire devant le bâtiment de la mairie. Si son allure générale reste détachée, sa mâchoire se crispe quand il se retourne. Son regard traverse la place principale du village, s’attache à une grande demeure, un manoir construit au siècle dernier par un riche banquier parisien. D’un pas assuré, il avance vers l’imposant portail qui ferme la propriété. Sa main gantée ignore la sonnette et saisit directement la poignée de fer forgé d’un autre âge.

    – Ouvert, bien sûr ! Ils sont trop sûrs d’eux.

    Au lieu de suivre le chemin de pierres blanches, il se lance à l’assaut du gazon, ou plutôt, de la boue parsemée ici et là de touffes vertes.

    – Bon sang !

    Un coup d’œil à ses chaussures lui confirme l’état déplorable du jardin. La pluie qui tombe depuis plusieurs jours a transformé la terre en un marécage gluant et ses pieds profitent d’un bain de boue régénérant, jusqu’à la cheville.

    – Des mocassins presque neufs !

    Les volets du premier étage sont tous fermés. En revanche, tout le rez-de-chaussée est illuminé et les abords de la maison s’en trouvent éclairés comme en plein jour. De la porte-fenêtre du salon s’échappent des éclats de voix.

    – Tu aurais entendu le vieux ! Il tremblait tellement que j’entendais ses os s’entrechoquer !

    – Plus ils sont riches, plus ils ont peur !

    – C’est parce qu’ils ont plus à perdre que les autres !

    – Pas comme nous !

    – Peut-être que nous aussi, après ce coup-là.

    – On reçoit quand le pognon ?

    – L’argent arrive dans deux jours.

    – Et la fille ?

    – On l’élimine demain.

    – Elle est plutôt mignonne, on peut en profiter un peu avant, quand même ?

    – Bien sûr, comme d’habitude…

    À l’extérieur, l’homme serre ses mâchoires à s’en faire mal. Sa main glisse sous sa veste pour caresser la crosse de l’arme qui ne le quitte jamais dans ce genre de mission. Après un instant d’hésitation, il pivote sur lui-même et s’éloigne des voix, contournant la demeure. L’arrière du bâtiment s’ouvre sur un parc qui s’étend à perte de vue.

    – Pourquoi les voyous ont toujours les plus belles maisons ?

    Prudemment, il jette des coups d’œil rapides à chacune des ouvertures.

    – Une fenêtre qui n’est pas fermée… C’est presque trop facile ! Ils sont vraiment trop sûrs d’eux !

    D’un bond, il est dans la pièce. Sa main glisse sur des pages de journaux dispersées sur un large bureau en chêne.

    – Il manque des lettres sur plusieurs pages. C’est donc ici qu’ils ont rédigé leur demande de rançon…

    Dans le couloir, un pas traînant approche. Alban se dissimule en hâte derrière la porte qui s’ouvre à la volée. Une voix irritée s’élève :

    – Qu’est-ce qu’ils ont à toujours laisser les fenêtres ouvertes ?

    L’individu fait quelques pas vers la fenêtre et se fige. Les yeux rivés sur le sol, il pointe du doigt des traces de chaussures boueuses.

    – Qu’est-ce que… ?

    Le son d’un sifflement de gaz qui s’échappe. L’apprenti cambrioleur retient la masse du ravisseur et le pousse dans un vieux fauteuil en cuir.

    – Et d’un ! Drôlement efficaces, ces nouveaux vaporisateurs !

    Fort de ce premier succès, la silhouette se glisse dans le couloir. L’homme avance lentement, les semelles de crêpe de ses chaussures étouffent le moindre bruit. Un son de chasse d’eau et un grognement précèdent l’ouverture de la porte des toilettes. L’individu n’a pas le temps d’émettre la moindre parole qu’un délicat nuage de gaz le paralyse aussitôt. En douceur, Alban le fait se rasseoir sur le trône.

    Le brouhaha d’une discussion animée s’élève du salon, au bout du couloir.

    – Inutile d’aller chercher les ennuis par là…

    Aucune porte n’est verrouillée. La plupart donnent sur des pièces vidées de tout meuble quand…

    – Enfin !

    Un dos musclé est courbé sur le corps d’une jeune fille qui se débat.

    – J’ai bien vu que tu essayais de défaire tes liens. Avec ça, impossible de bouger !

    – Mmm !

    – Non ! Je te laisse ton bâillon !

    La petite matraque frappe l’homme juste derrière l’oreille. Il s’effondre sans un bruit. La fille pose un regard méfiant sur son sauveur, comme pour le jauger.

    Derrière son bâillon, elle grommelle des paroles inintelligibles. Si Alban devine un « ami ou ennemi ? », il n’en montre rien et se concentre sur la corde qui entrave les jambes de la prisonnière. Son attention se porte ensuite sur les poignets attachés aux montants métalliques du lit. En quelques secondes, Alban la libère de ses liens d’acier.

    Il pose un doigt sur ses lèvres pour lui demander le silence, puis lui tend la main pour l’aider à se lever. Loin de lui en être reconnaissante, la jeune fille lui adresse la parole d’un ton méprisant et hautain.

    – Vous êtes qui, vous ?

    – Chut, n’attirons pas l’attention de vos ravisseurs, vos parents m’ont envoyé pour vous sortir d’ici, murmure Alban avant de se diriger vers la fenêtre.

    – Attendez ! Je ne vais pas vous suivre par-là ! Vous savez qui je suis ? Dans ma famille, personne ne fuit par les lucarnes, on n’emprunte que la porte principale.

    – Oui, mais la situation est un peu spéciale…

    – Jamais ! Plutôt rester prisonnière que…

    Alban sourit en extirpant de sa veste son atomiseur de poche.

    – Juste une petite touche…

    La jeune fille sent un vertige l’envahir. Elle ne lutte pas quand une main l’entraîne fermement vers l’extérieur. Son corps ne lui obéit plus, elle vacille sous la poigne de cet inconnu qui la guide hors du domaine. Un faible grognement s’échappe de ses lèvres lorsqu’elle est poussée dans une voiture.

    La jeune femme rassemble alors toute sa volonté pour sortir de l’état d’ivresse dans lequel elle est engluée.

    – Ça ne va pas dans votre tête ?! Qu’est-ce que vous m’avez envoyé comme gaz ? Vous avez perdu l’esprit !

    – Chut ! On peut encore nous entendre, votre voix porte assez loin.

    – Comment osez-vous ! On ne traite pas de cette façon une Dellington !

    – Mais je viens de vous tirer des griffes de…

    Elle hurle maintenant.

    – Vous allez me payer ça ! Quand mon père l’apprendra !

    – Je vous en prie, c’est véritablement un plaisir de vous sauver la vie.

    – Oh, vous allez entendre parler de moi, croyez-moi ! Mon père a des relations, vous allez le regretter !

    – Silence ! On est encore trop près de… trop tard !

    Alerté par la voix stridente, un gardien se précipite sur un bouton rouge et déclenche l’alarme dans toute la propriété. Alban démarre en trombe. Deux véhicules sombres le prennent aussitôt en chasse. Les cris de la jeune Dellington vrillent les tympans du sauveteur, couvrant même le rugissement du moteur.

    Un instant, Alban se perd dans ses pensées…

    – Où ai-je bien pu ranger ce vaporisateur… ? Ce truc est censé neutraliser des ennemis, pas apaiser une furie… Mais a-t-elle vraiment besoin de le savoir ?

    Très vite, il se reconcentre sur la route qui file vers la ville

    – Arrêtez cette voiture immédiatement !

    – Mademoiselle Dellington, pourriez-vous cesser de crier quelques minutes ? Nous ne sommes pas encore sortis d’affaire.

    – Je m’en moque ! Laissez-moi descendre !

    – Je suis venu vous libérer, vous en avez conscience, au moins ?

    – Les miens n’ont jamais eu besoin d’être sauvés par des mercenaires.

    Les mains d’Alban se crispent sur le volant. Il pousse un long soupir exaspéré.

    – Juste cinq minutes de silence ? Est-ce trop demander ?

    – Donnez-moi votre nom, que mon père vous fasse jeter en prison ! Il connaît bien le ministre de la Justice, vous savez ?

    – Jeune fille…

    – Je suis une femme, espèce de… !

    – … Oui, une « jeune femme » enlevée à la sortie de son cabinet d’avocat par une bande qui, historiquement, ne relâche jamais ses otages, même après le versement de la rançon.

    Il marque une pause, son regard se durcit.

    – Leurs cadavres finissent généralement par réapparaître quelques jours plus tard. Au fait, savez-vous que leurs victimes sont systématiquement abusées et torturées à mort ? Je vous en prie, ne me remerciez pas de vous avoir sorti d’une telle situation.

    – Je m’en moque ! Vous n’avez aucune manière !

    – …

    – Ce n’est pas un sauvetage. C’est une humiliation.

    Un premier coup de feu interrompt brutalement leur échange. Une balle des ravisseurs pulvérise le rétroviseur gauche. Alban sursaute.

    – Ils ne respectent rien !

    À l’entrée de la ville, les pneus crissent sur l’asphalte. Les deux véhicules lancés à leur poursuite pilent d’un coup avant de faire demi-tour. Alban expire lentement, libérant la pression qui lui enserrait la poitrine.

    – Enfin… ils nous lâchent.

    Un cri strident éclate sur le siège passager. Alban serre les dents.

    – Silence !

    – Arrêtez cette fichue voiture !

    – Tu peux te calmer deux minutes ? Ne touche pas au volant !

    D’une main ferme, il la repousse sur son siège.

    – Bon sang, tu veux bien arrêter ? Je suis en train de te sauver !

    Mais la voix, telle une sirène d’alerte, ne faiblit pas. Le véhicule s’engouffre à toute vitesse dans un parking souterrain. La barrière vole en éclats. Quand la voiture s’immobilise enfin, la jeune femme hurle toujours à plein poumons. Alban, impassible, sort du véhicule, calme, mais avec une lueur inquiétante dans le regard.

    Quelques minutes plus tard, le moteur de la voiture ronronne doucement en remontant à la surface. Derrière le volant, le conducteur affiche un sourire apaisé tandis qu’un flot de musique classique s’envole par la vitre entrouverte.

    Après une heure de route, l’environnement se transforme drastiquement à l’entrée dans les quartiers chics. Roulant au ralenti devant les propriétés aux jardins dignes des plus beaux parcs nationaux, Alban apprécie visiblement l’élégance de cette partie de la ville. C’est une belle journée, la mission est accomplie. Ses sourcils se froncent légèrement quand des bruits sourds se font entendre. Il hausse les épaules et, d’un doigt, monte le volume de la musique, l’habitacle s’emplit des Quatre Saisons de Vivaldi.

    Le décor se fait encore plus cossu. Derrière de hauts murs de pierre, les demeures victoriennes disparaissent dans de vastes jardins ombragés.

    Alban ralentit devant une grille surmontée de pointes dorées. Aussitôt, un gardien à la mine patibulaire s’avance.

    – Vous n’avez pas à vous arrêter là ! Circulez !

    – Monsieur Dellington m’attend, j’ai une livraison pour lui.

    – Votre nom ?

    – Alban.

    – Alban, qui ?

    – Simplement Alban.

    En grommelant, l’homme se dirige vers une cabine sans quitter le véhicule des yeux. Quand il revient, l’air penaud, sa voix est plus douce :

    – Pardonnez-moi, monsieur Alban, il y a tant de personnes qui…

    – Ne vous inquiétez pas.

    Le véhicule emprunte l’allée jusqu’à une petite cour pavée qui fait face à l’entrée de la demeure. Il s’immobilise aux pieds d’un majestueux escalier de marbre. Un homme aux tempes argentées, vêtu d’un costume trois-pièces impeccable, attend sur le seuil, incapable de masquer une certaine impatience.

    – Bonjour, monsieur Dellington.

    – Bonjour…

    Dellington jette un regard anxieux à l’intérieur du véhicule avant de se tourner vers Alban.

    – Ma fille ! Où est-elle ?

    – Rassurez-vous, monsieur Dellington, tout s’est déroulé sans encombre.

    – Où est Karen ?

    – Ah oui… Elle n’arrêtait pas de crier pendant le trajet, alors je l’ai mise dans le coffre.

    Dellington ouvre la bouche, mais aucun mot ne franchit ses lèvres. D’un geste tranquille, Alban ouvre le coffre, libérant une jeune fille en furie, qui déverse un flot d’insultes sans interruption.

    – Monsieur Dellington, mission accomplie, je vous la rends saine et sauve.

    – …

    – Et bon courage !

    *

    * *

    Le lendemain matin, Alban entre, le sourire aux lèvres, dans la cour d’un immeuble discret de l’impasse Férou.

    – Bonjour, chef.

    – Alban, asseyez-vous.

    – Encore une mission accomplie !

    – Alban, M. Dellington m’a contacté. Vous souvenez-vous de sa fonction ?

    – Mmm… Un indice ?

    – Ambassadeur des États-Unis d’Amérique !

    – Ah oui, un beau métier. Il devait être content, non ?

    – Était-il vraiment nécessaire de lui livrer sa fille enfermée dans le coffre, comme un vulgaire colis ?

    – Là, chef, je vous arrête : ma voiture n’a jamais transporté quoi que ce soit de vulgaire.

    – Dans le coffre, Alban ! Vous l’avez mise dans le coffre ! Mais qu’est-ce qui vous est passé par la tête ?

    – Avez-vous déjà essayé de conduire avec quelqu’un qui vous hurle dessus non-stop ?

    – Je… Vous me fatiguez, Alban.

    – …

    – Une dernière chose à propos de cette mission, pourriez-vous m’expliquer ceci ?

    Le responsable saisit une facture venant d’un célèbre bottier de Londres.

    – Mais chef, c’est pour une nouvelle paire de chaussures. J’ai dû traverser un terrain terriblement accidenté qui a totalement ruiné les miennes ! Je venais de les cirer, en plus.

    – Vous plaisantez ! Vous avez vu le prix ?!

    – De bien beaux souliers, je m’y étais beaucoup attaché, vous savez ? Notez que je n’ai pas pris le modèle supérieur.

    – Parce qu’il y a un modèle supérieur ? Avec cette somme, je peux me payer au moins trois costumes !

    – Avec tout le respect que je vous dois, chef…

    – Ne dites rien que vous pourriez regretter, Alban !

    – … Ça se voit.

    – Mais enfin, qu’est-ce que je viens de vous dire ?!

    L’homme, son supérieur depuis plusieurs années déjà, le fixe, les lèvres pincées.

    – Ça va, chef ? Je ne voulais pas vous vexer…

    – Passons ! Votre prochaine mission…

    – Mais non ! On avait convenu que je pourrais prendre des vacances après ça !

    Le chef lève un sourcil, faussement surpris.

    – Je n’ai absolument aucun souvenir d’une conversation de ce type !

    – Mais…

    – De toute façon, ce n’est plus entre mes mains…

    – Comment ça, plus entre vos mains ?

    – Alban, vous êtes dans mon service depuis…

    – Un peu plus de dix ans, chef !

    – Exactement ! Je m’en souviens comme si c’était hier… Vous étiez le meilleur pilote d’essai de notre armée, et votre chef d’escadrille ne me l’a jamais pardonné… Voilà pourquoi je suis un peu triste.

    Alban se redresse sur sa chaise, méfiant.

    – Chef… ?

    – Vous avez déjà entendu parler des Corsaires ?

    – Les marins d’autrefois qui…

    – Non, quoique… Je parle d’une unité très spéciale, propre à notre pays.

    – Les Corsaires… Le service qui n’existe pas, « pas de règles, pas de limites ». Une légende… N’est-ce pas chef ?

    – Vous allez le découvrir par vous-même. Votre affectation prend effet immédiatement !

    Alban sent son estomac se nouer.

    – Mais chef, qu’est-ce que j’ai fait pour mériter ça ?

    – Ne vous y trompez pas, Alban, c’est une promotion, et même un sacré bond en avant. Vous allez faire équipe avec…

    – Mais j’ai l’habitude de travailler seul ! Je ne veux pas d’un bleu dans les pattes !

    – Il fait partie de leurs meilleurs agents. Mitch, ça vous parle ?

    Un silence. Alban se frotte la tempe, l’air contrarié.

    – De réputation, patron. C’est ma punition pour avoir mis la fille dans le coffre ? Mitch… C’est bien le type un peu dingue ?

    – Exactement, vous vous entendrez à merveille !

    Le supérieur ouvre un tiroir, en sort une carte de visite qu’il pousse lentement devant lui.

    – Présentez-vous à cette adresse dans deux jours.

    *

    * *

    image.

    Mitch

    Les deux hommes ne sont que des ombres. Tous deux font face à la ville, dont les lumières sont autant de lucioles défiant les ténèbres.

    – Ton appartement est quand même drôlement bien situé, Valentin.

    – Merci. Je te ressers ?

    – Je suis incapable de refuser du Dom Pérignon, même après une première bouteille…

    – À la tienne, Gaston !

    – Santé !

    Gaston trinque, puis fixe son vieux compagnon d’armes.

    – Valentin, tu es sûr… ?

    – Sûr de quoi, Gaston ?

    – Mitch est disponible ?

    – Depuis peu. Steve est allé le chercher à Saint-Malo, et je l’ai aussitôt envoyé en mission, en précisant que l’ordre venait de toi, bien sûr…

    – Et ses entreprises ?

    – Il en a revendu la majorité il y a deux mois.

    – Et les hautes sphères, elles sont prêtes à accepter son retour ?

    L’avantage avec les politiques, c’est qu’ils changent tout le temps. Cette vieille affaire est déjà oubliée !

    *

    * *

    Un ronronnement sourd traverse le village et vient s’immobiliser devant la mairie. Le conducteur scrute les environs, visiblement en quête de quelque chose.

    – Bonjour, monsieur. Je suis le maire de ce village. Comment puis-je vous aider ?

    – Bonjour, monsieur le maire ! Je cherche une gentilhommière au toit rouge, au milieu d’un parc, avec un étang… Elle devrait se trouver dans les environs.

    – Ah, le château ! Enfin, on l’appelle le château parce que c’est la plus grande maison du coin. Suivez cette route et, lorsque vous verrez un large portail sur votre droite, vous serez arrivé ! Vous ne pouvez pas la manquer.

    – Merci, monsieur le maire.

    *

    * *

    Adrien, le gardien, ne dissimule pas sa mauvaise humeur. D’un geste rageur, il saisit son fusil et le passe en bandoulière avant de décrocher une laisse et un collier, rapidement passé autour du cou épais d’un Boxer, un chien de taille massive.

    – Allez, Éclair, on sort !

    L’homme s’arrête sur le perron de la petite maison qu’il occupe, au fond d’un vaste parc. Plus loin, une demeure bicentenaire se dresse, majestueuse.

    – Pourquoi faut faire des rondes toute la journée ? Surtout par ce froid ! De toute façon, il ne se passe jamais rien. Et puis… qu’est-ce qu’ils font, enfermés du matin au soir ? Les nouveaux proprios sont vraiment bizarres.

    Ses yeux s’écarquillent à la vue d’une silhouette masculine qui se dessine près du mur, à l’intérieur du domaine.

    – Encore un de ces touristes !

    Sans lâcher le chien, Adrien marche d’un pas ferme vers l’intrus en maugréant.

    – Toi, là-bas ! Qu’est-ce que tu fous ?

    – Bonsoir, monsieur, je cherche une maison à acheter dans la région et…

    – C’est une propriété privée ! Y’a rien à vendre ici, dégage !

    – Oui, mais…

    Le gardien redresse son fusil et le braque sur l’intrus.

    – Tu dégages, ou je t’enterre ici !

    – Bien, bien, je suis vraiment désolé de vous avoir importuné, monsieur…

    Le jeune homme s’excuse encore avant de s’éloigner rapidement.

    – Tu as vu ça, Éclair ? Quel minable ! Et pourquoi t’as rien dit, toi ? Allez, viens, on continue la ronde.

    Adrien fait le tour de la propriété avant de revenir près du portail.

    – Bon, Éclair, mission accomplie ! Prochaine patrouille dans une heure. En attendant, je me prendrais bien un petit grog, histoire de me réchauffer un peu.

    Telle une goutte de rosée s’étirant sur le pétale d’une fleur, une silhouette glisse le long du mur. Adrien n’a pas le temps de se retourner. Un choc sourd trouble le murmure du vent dans les feuilles… Le gardien ouvre la bouche, mais aucun son ne sort. Son corps s’affaisse lourdement. Éclair fixe l’agresseur qui s’approche. L’intrus s’accroupit, caresse la tête du Boxer et gratte son cou, pour le plus grand plaisir de l’animal.

    – Désolé, le chien, il va falloir que j’y aille. Tu restes ici, veille bien sur ton maître. Il ne va pas se réveiller tout de suite.

    D’un geste sûr, l’homme vérifie l’arme automatique glissée sous sa veste. Puis sa silhouette disparaît dans l’ombre du parc, se faufilant d’arbre en arbre, jusqu’à atteindre la maison principale.

    Des voix fortes s’échappent d’une porte-fenêtre entrouverte.

    – Alors, il paie le vieux ?

    – Qu’est-ce que tu crois ? Il chialait au téléphone, mort de trouille à l’idée qu’on abîme sa gamine.

    – Parfait ! On touche quand le pactole ?

    – Demain matin. On lève le camp juste après.

    – Et la gamine, on en fait quoi ? Comme d’habitude, on s’occupe d’elle juste avant de partir ?

    – Non, tu t’en charges dès ce soir, et tu l’enterres dans la cave.

    – Je fais ça après dîner. Elle ne va pas s’enfuir : je l’ai menottée au radiateur.

    L’ombre se remet en mouvement et se dirige vers l’arrière de la maison. Une tête apparaît brièvement devant un carreau de la fenêtre, une fois, deux fois. Deux doigts extraient une bague d’une poche, l’appuient délicatement contre la vitre et dessinent un cercle parfait. Un coup léger détache le morceau de verre, qui vient s’écraser mollement sur la moquette. Une main glisse dans l’ouverture et déverrouille le loquet.

    L’homme se faufile dans la pièce sous les yeux apeurés d’une fillette. Sa bouche est couverte par un mouchoir.

    L’intrus porte un doigt à ses lèvres pour lui demander le silence. Quand un large couteau surgit de sa poche, le corps de l’enfant s’agite de tremblements incontrôlés. Dans ses yeux, la peur se mue en terreur.

    – Tu es Julie, n’est-ce pas ? demande l’inconnu d’une voix douce.

    Un simple hochement de tête de la prisonnière fait naître un sourire sur le visage de l’intrus.

    – C’est ton papa et ta maman qui m’envoient. Nous allons quitter cette maison dans les dix prochaines minutes, mais il faut que tu restes parfaitement silencieuse, tu peux y arriver ?

    La fillette hoche la tête à nouveau. Le couteau passe sous le bâillon et le coupe d’un coup sec. L’homme fait saillir les muscles de ses mâchoires quand il découvre les marques rouges, aux coins de la bouche de l’enfant.

    – Ils ont trop serré ce foulard, tu as eu mal, hein ?

    Malgré un ton de voix qui se veut léger, une nouvelle lueur de fureur contenue traverse le regard de l’homme à la vue des menottes qui enserrent le poignet minuscule. En quelques secondes, la voilà délivrée. Il tend son couteau, puis dépose à côté de la fillette un objet emballé dans du papier journal.

    – Détache tes jambes, Julie. Je reviens te chercher plus tard. Toi, tu ne bouges pas de là. Et ça, dit l’homme en désignant le paquet, c’est du cake aux fruits. C’est moi qui l’ai fait, ajoute-t-il non sans une pointe de fierté.

    – …

    – Tu n’aimes pas le cake ?

    – Si, monsieur…

    – Bien. Tiens-toi prête à

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