Chapitre 2
kh
Interpolation Polynomiales
2.1 Introduction
Le problème est le suivant : à partir d’une fonction f (x) connue seulement en (n + 1)
i
points de la forme (xi , f (xi )) pour {i = 0, 1, 2, . . . , n}, peut-on construire une approximation
de f (x), et ce, pour tout x ? Les xi sont appelés abscisses ou nœuds d’interpolation tandis
che
que les couples (xi , f (xi )) pour {i = 0, 1, 2, . . . , n},sont les points de collocation ou points
d’interpolation et peuvent provenir de données expérimentales ou d’une table. En d’autres
termes, si l’on ne connait que les points de collocation (xi , f (xi )) d’une fonction, peut-on obtenir
une approximation de f (x) pour une valeur de x différente des xi .
Si x se situe en dehors de cet intervalle, le problème est appelé extrapolation. Le problème
de l’interpolation polynomiale consiste à trouver un polynôme Pn (x) de degré inférieur ou égal
à n, tel que Pn (xi ) = f (xi ) pour {i = 0, 1, 2, . . . , n} À travers deux points distincts, nous
pouvons construire un polynôme unique de degré 1 (Fig 2.1 a ). À travers trois points distincts,
nous pouvons construire un polynôme unique de degré 2 (Fig 2.1 b) ou un polynôme unique de
degré 1 (si les points sont alignés). À travers quatre points distincts nous pouvons construire
Be
un polynôme unique de degré 3 (Fig 2.1 c) etc. . . . En général, par n + 1 points distincts, nous
pouvons construire un polynôme unique de degré n.
Théoreme 2.1 : Étant donné n + 1 points distincts x0 , .., xn et n + 1 valeurs correspondantes
y0 , ..., yn , il existe un unique polynôme Pn (x) de degré ≤ n tel que Pn (xi ) = yi pour i = 0, ..., n.
2.2 Méthode directe
M.
Une manière apparemment simple de résoudre ce problème est d’écrire le polynôme sous la
forme :
n
Pn (x) = ck pk (x) pk = xk (k = 0, 1 . . . , n) (2.1)
k=0
(a) (b) (c)
8
10
6
8 20
4
2 6
0 4 0
−2 2
−4 −20
−2 −1 0 1 2 3 −2 −1 0 1 2 3 −6 −4 −2 0 2
Figure 2.1 – Graphes de polynôme de degrés 1 ,2 et 3
13
2.3. Méthode d’interpolation de Lagrange 14
Le problème d’interpolation conduit alors au système d’équations linéaires dont les constantes
ci à déterminer.
Pn (xi ) = f (xi ) (2.2)
⎛ ⎞⎛ ⎞ ⎛ ⎞
x00 x10 . . . xn0 c0 f (x0 )
⎜ x0 x1 . . . xn ⎟ ⎜ c1 ⎟ ⎜ f (x1 ) ⎟
⎜ 1 1 1⎟ ⎜ ⎟ ⎜ ⎟
⎜ .. .. .. .. ⎟ ⎜ .. ⎟ = ⎜ .. ⎟ (2.3)
kh
⎝. . . . ⎠ ⎝ . ⎠ ⎝ . ⎠
0 1 n
x n x n . . . xn cn f (xn )
Résoudre un tel système d’équations à (n + 1) inconnues n’est pas une tache triviale. Cette
méthode pour trouver le polynôme Pn (x) n’est donc pas une bonne méthode en pratique. Dans
la suite on va étudier des méthodes plus astucieuses pour construire le polynôme. Pn (xi ).
i
2.3 Méthode d’interpolation de Lagrange
che
Dans ce cas, toutes les fonctions pk (x) sont des polynômes de degré n. Qui seront notées
Lk (x)
Définition 2.1 Le polynôme suivant est appelé polynôme de Lagrange
n
x − xi
Lk (x) = (k = 0, 1 . . . , n) (2.4)
i=0,i=k
xk − xi
Pour satisfaire (2.2) les polynômes de Lagrange ont donc la propriété :
Be
1:i=k
Lk (xi ) = δki = (2.5)
0 : i = k
Exemple 2.1 À titre d’illustration, nous considérons un problème d’interpolation avec les
points suivants : x0 = −2 ; x1 = 0 et x2 = 1.
2
x − xi x(x − 1) x(x − 1)
L0 (x) = = =
M.
x − xi
i=1 0
(−2 − 0)(−2 − 1) 6
2
x − xi (x + 2)(x − 1) (x + 2)(x − 1)
L1 (x) = = =
i=0,i=1
x1 − xi (0 + 2)(0 − 1) 2
2
x − xi (x + 2)x (x + 2)x
L2 (x) = = =
i=0,i=2
x2 − xi (1 + 2)(1 − 0) 3
Aux points d’interpolation xi , la propriété (2.5) s’applique au polynôme d’interpolation. Et
puisque Pn (xi ) = f (xi ) alors ci = f (xi ) et le polynôme d’interpolation de Lagrange s’écrit :
n
Pn (x) = f (xk )Lk (x) (2.6)
k=0
14
2.3. Méthode d’interpolation de Lagrange 15
Exemple 2.2 Nous recherchons le polynôme d’approximation pour la fonction y = sin x qui
passe par les trois points (0, 0),(π/2, 1) et (π, 0).
Les polynômes de Lagrange sont :
2
x − xi (x − π/2)(x − π)
L0 (x) = =
x − xi
i=1 0
π 2 /2
2
x − xi x(x − π)
kh
L1 (x) = =
i=0,i=1
x1 − xi (−π 2 /4)
2
x − xi x(x − π/2)
L2 (x) = =
i=0,i=2
x2 − xi (π 2 /2)
Et le polynôme d’interpolation de Lagrange est :
i
(x − π/2)(x − π) x(x − π) x(x − π/2) x(x − π)
P2 (x) = 0. + 1. + 0. =
π 2 /2
che (−π 2 /4) (π 2 /2) (−π 2 /4)
1
sin x
0.8 P2 (x)
0.6
y
0.4
0.2
0
Be
0 0.5 1 1.5 2 2.5 3
x
Figure 2.2 – Graphes sin x et P2 (x)
Exemple 2.3 Nous recherchons le polynôme d’approximation pour la fonction y = sin x qui
passe par les quatre points (0, 0),(π/2, 1),(π, 0) et (3π/2, −1) .
M.
Les polynômes de Lagrange sont :
(x − x1 )(x − x2 )(x − x3 ) (x − π/2)(x − π)(x − 3π/2)
L0 (x) = =
(x0 − x1 )(x0 − x2 )(x0 − x3 ) −3π 3 /4
(x − x0 )(x − x2 )(x − x3 ) x(x − π)(x − 3π/2)
L1 (x) = =
(x1 − x0 )(x1 − x2 )(x1 − x3 ) π 3 /4
(x − x0 )(x − x1 )(x − x3 ) x(x − π/2)(x − 3π/2)
L2 (x) = =
(x2 − x0 )(x2 − x1 )(x2 − x3 ) −π 3 /4
(x3 − x0 )(x3 − x1 )(x3 − x2 ) x(x − π/2)(x − π)
L3 (x) = =
(x3 − x0 )(x3 − x1 )(x3 − x2 ) 3π 3 /4
15
2.4. L’erreur dans l’interpolation polynomiales 16
1 y sin x
0.5 P3 (x)
x
1 2 3 4
−0.5
−1
kh
Figure 2.3 – Graphes sin x et P3 (x)
Puisque f (x0 ) = f (x2 ) = 0 on a besoin seulement de L1 (x) et L3 (x) pour écrire le polynôme
d’interpolation de Lagrange
x(x − π)(x − 3π/2) x(x − π/2)(x − π) 8x(x − π)(x − 2π)
i
P3 (x) = 1. − 1. =
(π /4)
3
che (3π /4)
3 3π 3
Exemple 2.4 Nous recherchons le polynôme d’interpolation de Lagrange qui passe par les
points (−1, 1),(1, −1),(2, 4) et (5, 1).
Les polynômes de Lagrange sont :
(x − x1 )(x − x2 )(x − x3 ) (x − 1)(x − 2)(x − 5)
L0 (x) = =
(x0 − x1 )(x0 − x2 )(x0 − x3 ) 36
(x − x0 )(x − x2 )(x − x3 ) (x + 1)(x − 2)(x − 5)
L1 (x) = =
(x1 − x0 )(x1 − x2 )(x1 − x3 ) 8
Be
(x − x0 )(x − x1 )(x − x3 ) (x + 1)(x − 1)(x − 5)
L2 (x) = =
(x2 − x0 )(x2 − x1 )(x2 − x3 ) 9
(x3 − x0 )(x3 − x1 )(x3 − x2 ) (x + 1)(x − 1)(x − 2)
L3 (x) = =
(x3 − x0 )(x3 − x1 )(x3 − x2 ) 72
Et le polynôme d’interpolation de Lagrange est :
M.
(x − 1)(x − 2)(x − 5) (x + 1)(x − 2)(x − 5)
P3 (x) = − −
36 8
(x + 1)(x − 1)(x − 5) (x + 1)(x − 1)(x − 2)
−4 +
9 72
2.4 L’erreur dans l’interpolation polynomiales
L’interpolation permet, à partir d’un certain nombre de données sur les valeurs d’une fonc-
tion, de faire l’approximation de f (x) en tout point x. Toutefois, cette opération entraı̂ne une
erreur d’interpolation qu’il convient d’étudier en détail
16
2.5. Méthode d’interpolation de Newton 17
Théoreme 2.2 Soit x0 < x1 < x2 . . . < xn les abscisses des points de collocation. On suppose
que la fonction f (x) est définie dans l’intervalle [x0 , xn ]et qu’elle est (n + 1) fois dérivable
dans ]x0 , xn [. Alors, pour tout x dans l’intervalle [x0 , xn ], il existe ξ(x)appartenant à l’intervalle
]x0 , xn [ tel que l’erreur En (x) est donnée par :
f (n+1) (ξ(x))
n
En (x) = f (x) − Pn (x) = (x − xi ) (2.7)
(n + 1)! i=0
Exemple 2.5 Estimez l’erreur dans l’exemple 2.3
kh
sin(n+1) ξ(x))
| E3 (x) |=| sin x − P3 (x) |= | (x − 0)(x − π/2)(x − π)(x − 3π/2) |
(n + 1)!
ξ(x) ∈ [0, 3π/2] alors sin(ξ(x)) 1. et (n + 1)! = 4! = 24
ainsi :
1
| sin x − P3 (x) || x(x − π/2)(x − π)(x − 3π/2) |
i
24
Pour chaque x donné on peut trouver une borne de l’erreur. Et sur l’intervalle entier on
che
utilise le graphe de y = x(x − π/2)(x − π)(x − 3π/2) :
| x(x − π/2)(x − π)(x − 3π/2) | 6.088068199
Ainsi la borne d’erreur est :
1 1
| sin x − P3 (x) | | x(x − π/2)(x − π)(x − 3π/2) | 6.088068199 = 0.25367
24 24
2.5 Méthode d’interpolation de Newton
Be
La méthode de Lagrange permet de trouver le polynôme d’interpolation mais elle n’est pas
la plus efficace d’un point de vue pratique. En effet, pour calculer le polynôme d’interpolation
d’un ensemble de (n + 1) points on doit calculer les (n + 1) polynômes L0 , L1 , . . . , Ln .Si ensuite
on ajoute un point d’interpolation, on doit calculer les (n + 2) polynômes L0 , L1 , . . . , L(n+1) qui
diffèrent tous des (n + 1) calculés précédemment (comparez exemple 2.2 et 2.3). La méthode
de Newton est basée sur le choix d’autre fonctions de base de sort à ce que l’ajout d’un point
M.
comporte juste l’ajout d’une fonction c.à.d. un polynôme . Dans la méthode de Newton les
polynômes de base sont :
p0 (x) = 1
p1 (x) = (x − x0 ) (2.8)
..
.
pn (x) = (x − x0 )(x − x1 ) . . . (x − xn−1 )
La forme générale est :
k−1
pk (x) = (x − xi ) (2.9)
i=0
Pour les points de collocation ces polynômes ont la propriété suivante :
17
2.5. Méthode d’interpolation de Newton 18
pk (xi ) = 0 (i < k) (2.10)
Cela signifie que p0 (x) est non nul pour tous les nœuds. Le polynôme p1 (x) est nul en x0
et il est non nul pour les autres nœuds. Le nombre de zéros parmi les points de collocation est
toujours en augmentation continue jusqu’à ce que le dernier polynôme pn (x) est nul pour tous
les nœuds de x0 à xn−1 . Et ne diffère de zéro que pour xn .Cette propriété garantit l’approche
n
Pn (x) = ck pk (x) = c0 + c1 (x − x0 ) + c2 (x − x0 )(x − x1 ) . . . (x − xn−1 ) (2.11)
kh
k=0
D’où
Pn (x0 ) = f (x0 ) = c0
Pn (x1 ) = f (x1 ) = c0 + c1 (x1 − x0 )
Pn (x2 ) = f (x2 ) = c0 + c1 (x2 − x0 ) + c2 (x2 − x0 )(x2 − x1 ) (2.12)
..
i
.
Pn (xn ) = f (xn ) = c0 + c1 (xn − x0 ) + +cn (xn − x0 )(xn − x1 )(xn − xn−1 )
che
Cela conduit à la détermination des inconnues ci
c0 = f (x0 )
f (x1 ) − f (x0 )
c1 = (2.13)
x1 − x0
f (x2 )−f (x1 )
x2 −x1
− f (xx11)−f
−x0
(x0 )
c2 =
x2 − x0
..
.
Be
Nous introduisant maintenant la notion de différence divisée.
Définition 2.2 : Différences divisées
Soit {(xi , yi ) i = 0, 1, , n} un ensemble de (n + 1) points distincts. La différence divisée d’ordre
0 pour xi est simplement la valeur de f (x) en xi .
f [xi ] = f (xi ) (2.14)
M.
La différence divisée d’ordre 1 de xi et xi+1 est
f [xi+1 ] − f [xi ]
f [xi , xi+1 ] = (2.15)
xi+1 − xi
La différence divisée d’ordre 2 de xi , xi+1 et xi+2 .
f [xi+1 , xi+2 ] − f [xi , xi+1 ]
f [xi , xi+1 , xi+2 ] = (2.16)
xi+2 − xi
La différence divisée d’ordre n des (n + 1) points {xi , , xn+1 } est définie par récurrence en
utilisant deux différences divisées d’ordre n − 1 comme suit :
f [xi+1 , ..., xi+n ] − f [xi , ..., xi+n−1 ]
f [xi , ..., xi+n ] = (2.17)
xi+n − xi
18
2.5. Méthode d’interpolation de Newton 19
Pour expliciter le processus récursif, les différences divisées peuvent être calculées en les
disposants de la manière suivante dans un tableau :
xi f [xi ] f [xi, xi+1 ] f [xi , xi+1 , xi+2 ] f [xi , xi+1 , xi+2 , xi+3 ] .... ...
x0 f [x0 ]
f [x0 , x1 ]
x1 f [x1 ] f [x0 , x1 , x2 ]
f [x1 , x2 ] f [x0 , x1 , x2 , x3 ]
x2 f [x2 ] f [x1 , x2 , x3 ]
kh
...
f [x2 , x3 ] f [x1 , x2 , x3 , x4 ] ...
x3 f [x3 ] f [x2 , x3 , x4 ] ...
f [x3 , x4 ] f [x2 , x3 , x4 , x5 ]
x4 f [x4 ] f [x3 , x4 , x5 ]
f [x4 , x5 ]
x5 f [x5 ]
i
Théoreme 2.3 Formule de Newton
Soit {(xi , yi ) i = 0, 1, . . . , n} un ensemble de (n + 1) points distincts. Le polynôme d’interpo-
che
lation de Newton est donné par :
n
Pn (x) = f [x0 ] + f [x0 , x1 , ..., xk ](x − x0 )...(x − xn−1 ) (2.18)
k=1
.
Exemple 2.6 Trouver le polynôme d’interpolation de Newton qui passe par les points (−1, 1),(1, −1),
(2, 4), et (5, 1).
En utilisant la diagonale supérieure ,les coefficients (en gras) du polynôme de Newton sont mis
Be
en évidence dans le diagramme suivant
xi f [xi ] f [xi, xi+1 ] f [xi , xi+1 , xi+2 ] f [xi , xi+1 , xi+2 , xi+3 ]
−1 1
−1−1
1−(−1)
= -1
5−(−1)
1 −1 2−(−1)
=2
−3
4−(−1) 2
−2
2−1
=5 5−(−1)
=-7/12
−1−5 −3
M.
2 4 5−1)
= 2
1−4
5−2
= −1
5 1
Ainsi, le polynôme d’interpolation de Newton est écrit sous la forme :
7
P3 (x) = 1 − (x + 1) + 2(x + 1)(x − 1) − (x + 1)(x − 1)(x − 2)
12
7 3 19 2 5 19
P3 (x) = − x + x − x−
12 6 12 6
On peut aussi utiliser la diagonale inférieure et les coefficients en gras dans le tableau sui-
vant :
19