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net/publication/273950117

Gestion des déchets dans les villes en développement : transfert, adaptation

de schéma et sources de financement

Article  in  Déchets Sciences et Techniques · March 2015

DOI: 10.4267/dechets-sciences-techniques.169

CITATIONS READS

2 3,939

5 authors, including:

Koledzi Edem J. Tonyi Agbébavi

Université de Lomé Université du Québec à Montréal
35 PUBLICATIONS   92 CITATIONS    20 PUBLICATIONS   122 CITATIONS   

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Demagna Koffi Guy Matejka

Université du Québec à Trois-Rivières National School of Engineers of Limoges ENSIL
91 PUBLICATIONS   370 CITATIONS    115 PUBLICATIONS   996 CITATIONS   

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Applied heat transfer View project

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 31

Gestion des déchets dans les villes en développement :

transfert, adaptation de schéma et sources de financement
KOLEDZI K. Edem, BABA Gnon
Laboratoire GTVD, Faculté des Sciences-Université de Lomé, BP 1515 Lomé-Togo
AGBEBAVI James, KOFFI Demagna
Centre de Transfert et d’Adaptation de Technologie, Université de Québec à Trois-Rivières, C.P. 500, Trois-Rivières, Québec, Canada G9A 5H7
MATEJKA Guy
Groupement de Recherche Eau, Sol et Environnement, Université de Limoges - Parc Ester Technopole, 16 rue Atlantis 87068 Limoges Cedex

Auteur/s à qui la correspondance devrait être adressée : [email protected]

RESUME ABSTRACT

La gestion des déchets rencontre des difficultés dans la plupart The urban solid waste management sector in Developing Coun-
des PED. L’analyse des retours d’expérience révèle cependant que tries encounters difficulties and great challenges. Scientific re-
la mise en application du principe « pollueur – payeur » contribue search data show that it is possible to control the waste manage-
à une meilleure maîtrise de cette gestion. Cette étude montre que ment if the households or the first line actors are accountable or if
l’organisation de la collecte des déchets municipaux à Lomé est the polluter pays. It appears from this study that the organization
similaire à celle de la ville de Trois-Rivières, QC, Canada. Bien que of the urban waste collection in Developing Countries may be
la composition des déchets ne soit pas identique, les modes de inspired by what is practiced in Canadian cities, namely the City
financement du secteur déchet de la ville de Trois-Rivières pour- of Trois-Rivières, Quebec. Although the composition of their waste
raient être transplantées à Lomé. L’organisation du territoire et is not identical, the funding sources of waste could be mirrored.
la disposition de compte bancaire pour chaque citoyen à Trois- The structured subdivision and occupation of the territory and the
Rivières facilite le payement des taxes et des redevances liées à availability of a municipal tax account to every citizen or house-
la gestion des déchets. Sur la base des atouts (réseaux de télé- hold or home in Trois-Rivières facilitates the collection of the taxes
phonie mobile, compagnie électrique, réseaux d’eau potable) dont and the fees to finance the waste management.The development,
disposent le Togo, un scénario de prélèvement de taxe de dévelop- the implementation and the monitoring of regulations are also of
pement durable pourrait être fixé sur les compagnies jugées de great help to solve the management problems in this sector. On
première importance par la population. the basis of assets available to developing countries, a scenario
to levy taxes for the urban salubrity or for the sustainable de-
MOTS-CLÉS : Déchets, Organisation, Financement, Développe- velopment could be based on some taxation vectors considered
ment durable as priorities by the population, namely Mobile phone, electricity
consumption, running water or oil products. So municipalities in
developing countries can face their responsabilities in this area
and get rid of the burden of some of external fundings.

KEYWORDS : Waste, Organization,Taxes, Sustainable development

.

Déchets Sciences et Techniques - N°68 - Novembre 2014

32

Gestion des déchets dans les villes en développement :

transfert, adaptation de schéma et sources de financement

KOLEDZI K. Edem, AGBEBAVI James, BABA Gnon, KOFFI Demagna et MATEJKA Guy

1. Introduction générés et par la transformation de la fraction potentiellement

valorisable. Sur la base de la connaissance des déchets de la
La gestion des déchets dans les Pays en Développement ville de Lomé au Togo et de la ville de Trois-Rivières, QC, au
(PED), rencontre de très nombreuses difficultés, tant du point Canada, ce travail propose un schéma de gestion des matières
de vue technique et économique que méthodologique et résiduelles autonome par rapport aux financements exté-
organisationnel. Confrontés à des problèmes de planification, rieurs avec un focus sur la pré-collecte pour la ville de Lomé.
de gestion et de financement, les responsables locaux n’ont
pas pu maîtriser l’implantation des populations les plus dému- 2. cadre d’étude et méthodologie
nies dans les zones les plus exposées. Les principales difficultés
rencontrées sont les suivantes :
- des infrastructures urbaines inopérantes (hôpitaux, routes, 2.1. Cadre d’étude
eau potable,…..),
- un financement très irrégulier des dépenses, Cette étude a été réalisée dans deux villes de taille moyenne
- des problèmes de fonctionnement et de maintenance des choisies au hasard, l’une en développement (Lomé, Togo) et
équipements de base, l’autre développée (Trois-Rivières, QC, Canada). La gestion
- des personnels sous-qualifiés des déchets dans ces villes est à l’image de chacune de leur
- le manque chronique de données locales et de stratégies développement.
publiques adaptées aux situations locales. Lomé (Cf. figure 1) se situe à l’extrême Sud - Ouest du Togo
sur la côte du golfe du Bénin exactement à 06°07’ latitude
Face à l’envergure des problèmes dans le domaine de la ges- Nord, 01°11’ longitude Est et à une altitude moyenne de 5
tion des déchets au regard des moyens mobilisés, la décharge mètres au-dessus du niveau de la mer. Cette ville est déli-
est devenue l’unique moyen disponible pour l’élimination des mitée au Nord Est par la basse vallée du Zio, à l’Ouest par
déchets, conduisant pour ces dépôts sauvages ou insuffisam- la frontière entre le Togo et le Ghana et au Sud par l’Océan
ment contrôlés à des risques sanitaires et environnementaux Atlantique, elle ne se développe que par l’Est et le Nord. Les
(Cyrille Harpet, 2003, Samira Ben Ammar, 2006, Aloueimine, deux zones principales de la ville sont séparées par la lagune : au
2006). La mise en décharge (dans le cas de l’enfouissement Nord de la lagune se situe le plateau de Tokoin et au Sud se
technique) présente l’avantage, lorsqu’elle est conduite dans trouve une zone plate située entre la lagune et la mer. Cette
de bonnes conditions, d’éliminer d’importants volumes à des dernière fut pendant longtemps la zone la plus habitée de la
coûts raisonnables. Mais malheureusement, elle se limite sou- ville. La population de la commune de Lomé a été estimée
vent dans les PED à un dépôt sauvage ou au remblayage des en 2008 à 999 594 habitants (Mairie de Lomé, 2008) avec un
carrières sans protection des nappes phréatiques. Les données taux de croissance annuel de 3,1%.
existantes proviennent de travaux issus soit de laboratoires de La ville de Trois-Rivières occupe (Cf. figure 2) la portion Sud
recherche académique qui prennent en compte des aspects de la région administrative de la région Mauricie en bordure
particuliers sans pouvoir rendre compte de l’ensemble d’un du fleuve Saint-Laurent avec un territoire de 288,2 Km2. Ses
processus de fonctionnement, soit des institutions multilaté- limites sont contigües au territoire de quatre municipalités
rales (bailleurs de fonds) qui donnent des recommandations régionales : -la Municipalité Régionale du Comté (MRC) de
d’ordre général, soit de bureaux d’études ou d’entreprises Maskinongé à l’ouest, -la MRC des chenaux à l’est et au nord,
qui n’ont pas toujours pu faire référence à des cas pratiques - la nouvelle ville de Shawinigan, elle-même issue de la fusion
dans ces contextes. Au-delà de la maîtrise des risques sani- en 2002 de six municipalités, soit les villes de Cap-de-la-Ma-
taires et environnementaux, la gestion des déchets à Lomé deleine, Pointe-du-Lac, Saint-Louis-de-France, Sainte-Marthe-
peut contribuer à réduire l’évolution globale du réchauffement du-Cap, Trois-Rivières et de Trois-Rivières-Ouest. Ces six
climatique, ne serait-ce que par la réduction du biogaz produit municipalités anciennement MRC de Francheville forment la
par les déchets stockés, par la collecte de tous les déchets nouvelle ville. La population permanente de la ville de Trois-

Gestion des déchets dans les villes en développement : transfert, adaptation de schéma et sources de financement
 3

Rivières, en 2001, était de 126 454 habitants dont près de 40% 3. Résultats et discussion
résident dans le secteur Trois-Rivières (RGMRM, 2001). On
compte 189 résidences saisonnières. 3.1. Situation de la gestion des déchets dans
les pays en développement (PED)

L’objectif ultime de la gestion des déchets étant de réduire

le volume des matériaux destinés à la décharge finale pour
minimiser les risques de pollution qu’ils peuvent causer pour
la santé et l’environnement (potentiel polluant, émission du
biogaz, lixiviat, pathogènes, etc.) (MBT, 2003). L’élimination des
déchets nécessite une approche technologique et méthodolo-
gique. Cette vision devrait être traduite par le développement
de technologies adaptées au contexte local et devrait prendre
en compte la croissance des populations, les concentrations
des déchets, les préoccupations environnementales et le dé-
Figure 1 : Carte de zonage de pré collecte et localisation veloppement durable. Les stratégies de gestion doivent donc
des centres de transit passer par l’application de principes simples qui permettent
d’atteindre les objectifs spécifiques correspondants (Wicker,
2000). Il s’agit surtout de la mise en œuvre d’un schéma de
collecte et des filières de réutilisation, de recyclage et de com-
postage des déchets. Jusqu’au seuil des années 90, il n’existait
presque pas de stratégies nationales en matière d’assainisse-
ment pour les villes en développement car les priorités étaient
données à d’autres secteurs de développements tels que la
lutte contre la désertification, la recherche de l’autosuffisance
alimentaire, la santé publique, l’éducation, etc. Les transferts
de technologie des pays développés sans étude approfondie
de terrain continue ont conduit à l’échec la plupart des sché-
Figure 2 : Zonage de la ville de Trois-Rivières mas de gestion des déchets. Le coût des projets financés par
des bailleurs externes tant pour la collecte que pour le traite-
ment n’est pas négligeable. Ces acteurs (secteur public, privé,
2.2. Méthodologie utilisée lors de l’étude informel, ONG, associations, la population) restent toujours
préoccupés par la collecte et l’évacuation des ordures, et non
Les données antérieures sur les déchets au Togo ne sont ba- seulement ils ignorent la valeur économique de ces déchets
sées que sur les statistiques et des estimations. Aucune étude mais ils n’arrivent pas à s’organiser dans un seul schéma et à
réelle n’a jamais été effectuée. On estime à près de 800 tonnes situer les responsabilités (Medina, 1998 ; Yeye, 2002). La prise
les déchets produits tous les jours dans la commune de Lomé de conscience des différents gouvernements en matière de
sur la base d’une production journalière de 0,91 kg/hab (Kole- gestion des déchets, appuyée par les politiques mondiales de
dzi et al. 2011). Elle est basée sur une étude descriptive et protection de l’environnement, s’est concrétisée par la créa-
comparative des données sur les déchets des deux villes. Les tion des ministères de l’environnement ou de structures équi-
données de caractérisation physique et physico-chimiques ont valentes dans les années 90. Différents textes orientés sur la
été déterminées sur deux saisons et sur deux ans (Koledzi décentralisation ont par la suite été votés. Rares sont les Pays
et al., 2011), et ont été utilisées dans cette étude compara- en Développement (PED) ayant une législation spécialement
tive. Les travaux sur les déchets (gestion administrative, les dédiée aux déchets urbains qu’ils auraient repris des pays dé-
activités de collectes, gestion financière) à Trois-Rivières ont veloppés. Le peu existant dans ce domaine est actuellement
été réalisés dans les Services des Travaux Publics de la ville désuet à cause de leur faible fréquence de révision. Au Togo,
et auprès des populations pendant l’automne et l’hiver. Une trois lois ont été adoptées très récemment : le Plan Natio-
analyse des documents des infrastructures de première néces- nal d’Action Pour l’Environnement adopté en juillet 2001 (et
sité (Téléphonie mobile, Réseau électrique, Régie des eaux du en particulier sur ses aspects correspondant à la gestion des
Togo) à Lomé a été effectuée. Une enquête de terrain a été déchets, la lutte contre la pauvreté, la protection des zones lit-
conduite dans le quartier Avédji (quartier pauvre) auprès de torales, la maîtrise des phénomènes de désertification, la lutte
150 ménages pour déterminer les possibilités de déplacement, contre les changements climatiques) ; la Loi-cadre sur l’envi-
les sources d’eaux utilisées ainsi que la méthode d’évacuation ronnement Déchets
au Togo (Loietn°
Sciences 2008-005
Techniques - N°68 du 30 mai
- Novembre 20142008) insti-

des ordures ménagères. tuant que les collectivités territoriales ont la charge de la ges-
34

Togolaise « Amélioration de la gouvernance environnemen- 3.1.2. Evolution de la gestion des déchets à Lomé
tale au Togo »- adopté en 2008. Mais tout comme pour les
autres PED, l’application sur le terrain de ces lois est confron- A Lomé, la gestion des déchets n’a pas toujours été une pré-
tée à d’autres difficultés et ne contribue pas à résoudre les occupation comme pour les autres villes des PED. Aujourd’hui
problèmes de propreté urbaine. malgré plusieurs projets dans le domaine de la gestion des
déchets qu’a pilotés la municipalité, on constate toujours une
3.1.1. Organisation administrative à Lomé multitude de dépotoirs aux abords des rues avec pour exu-
toire le remblaiement d’une carrière. Plusieurs projets ont por-
La figure 3 présente l’organisation administrative de la gestion té sur cette décharge mais la plupart ont été voués à l’échec
des déchets à Lomé. Les services de la municipalité sont reliés par manque de connaissance du site et surtout, par manque
à la haute magistrature. de données sur les déchets. La valorisation des déchets reste
Dans ce schéma le niveau minimal de prise de décision est la alors à l’initiative des populations. Dans les Pays Développés
direction de cabinet du Ministre.Tout se décide au Conseil des la plupart des projets de recherche sont conçus de manière
Ministres. Il est donc difficile voire impossible de prendre des collective et les résultats sont partagés contrairement à la plu-
décisions à la base ou de tester certaines expériences sans part des PED. A Lomé, plusieurs projets de recherche (Koledzi,
avoir un avis formel venant au moins du ministère. Dans ce 2011, Tchegueni, 2011, Segbeaya, 2012, Bodjona, 2012) sur la
schéma les niveaux de prises de décision se chevauchent et les gestion des déchets ont été effectués mais les résultats de ces
responsabilités sont mal identifiées. La position de la popula- recherches sont restés dans les laboratoires. Il n’existe aucun
tion dans cette organisation montre qu’il n’y a aucune relation lien entre chercheurs, ingénieurs et les municipalités ou auto-
directe entre celle-ci et la direction des travaux publics sauf rités. En conséquence plusieurs données restent inexploitées
dans les quartiers privilégiés. Dans la plupart des quartiers comme la quantité de déchets valorisables. La composition
la collecte primaire (pré-collecte) des déchets est effectuée des déchets par catégorie de valorisation est présentée dans
par les ONG et associations des ménages qui assurent leur le tableau 1 sur la base du ratio de production, du nombre
transport vers les centres de transit. La post-collecte (collecte d’habitants et de la composition des déchets à Lomé.
secondaire) est effectuée par les entreprises sous contrat avec Le développement de filières de valorisation des déchets peut
la municipalité. Le système de zonage existant n’est pas res- diminuer les quantités à « éliminer » par la communauté urbaine
pecté ni par les entreprises ni par les ONG. Devant l’incapa- de Lomé de 30-35 % de leur masse totale (cf. tableau 1). La prise
cité des autorités de réorganiser le système, de nombreuses en compte de la gestion des déchets dans les ménages pourra
associations non reconnues opèrent dans toute la ville. aussi diminuer la quantité de fines (sable), soit 50% de la masse
totale, dans les matières résiduelles. Dans cette logique il ne
Président de la République
resterait que 15 – 20 % de déchets pour l’enfouissement. La
valorisation des putrescibles en compost, du papier-cartons
Ministre de l’Administration Territorial en briquette sont des voies possibles. Bien qu’une partie soit
souvent récupérée pour le fumage des poissons, les papiers-
Directeur de Cabinet cartons sont souvent brûlés ou enfouis sur les décharges, alors
que les besoins en énergie de chauffe restent importants.
L’objectif serait de transformer ces papiers cartons, après
Cabinet du Maire
macération, moulage et séchage, en briquette, servant de
combustibles pour les ménagères et les fours pour la cuis-
Direction des Travaux Publics son des briques de terre cuite. La réutilisation du verre non
cassé est pratiquée aujourd’hui chez les populations. Elle peut
être renforcée grâce à des campagnes de sensibilisation et à la
Entreprises, et ONG de Collecte promotion de débouchés tels que la réutilisation des embal-
lages (bouteilles de jus, boites de conserves, etc.). Quant au
Population
recyclage du plastique, les filières sont plus difficiles à mettre
en place. La solution pour réduire les impacts négatifs liés au
Collecte et Enfouissement
rejet anarchique d’emballages plastiques serait d’en limiter
Figure 3 : Organisation administrative de la gestion des voire d’en interdire l’usage, ce qui s’avère toujours difficile,
déchets à Lomé compte-tenu des intérêts économiques en jeu localement. La
stratégie proposée est d’inviter les utilisateurs à ne plus jeter
ces déchets dans la nature. Cela passe par une sensibilisation
Les ONG ou les entreprises profitent de ce système et ne au respect de l’environnement bien sûr, mais plus sûrement en
déclarent donc pas à la municipalité le nombre total de leurs donnant à ces sacs une valeur marchande en les valorisant en
abonnés car dans ce schéma elles doivent verser à la munici- produits secondaires. Des études (Cascade, 2011), ont permis
palité un montant proportionnel au nombre d’abonnés. de démontrer qu’il était possible de les transformer par fusion,

Gestion des déchets dans les villes en développement : transfert, adaptation de schéma et sources de financement
 35

avec adjonction de sable ou non, en divers produits d’excel- et règlent les différends entre les citoyens et les entreprises
lente qualité, comme des panneaux de signalisation, des pavés qui constituent le gros du travail. La figure 4 présente l’organi-
de sol, des dalles de caniveaux et de latrines. Les autres débou- gramme administratif dans la gestion des matières résiduelles.
chés comme la fabrication de cordes, de tapis, de produits Elle permet de comprendre la responsabilité du citoyen dans
obtenus par tressage, de jouets etc. ont été abandonnés, leur la propreté urbaine et les niveaux de prise de décision. Les
rapport qualité/prix n’ayant pas été jugé satisfaisant (Cascade, élections municipales permettent aux populations de déléguer
2011). On peut aussi les incinérer et utiliser l’énergie de com- de façon commune le pouvoir aux élus pour l’organisation
bustion qui en résulte pour faire tourner des moteurs ou pro- des travaux dans les villes. Ainsi ceux-ci ont la charge d’organi-
duire de l’électricité. Enfin, l’expérience montre qu’avant de ser la propreté urbaine en mettant en application les décrets
s’engager dans ce type de filières de valorisation, il est bon de provinciaux et communaux à travers les délégués. Les pro-
s’assurer qu’il y a un marché rémunérateur et que les consom- jets stratégiques ou les actions pilotes sont élaborés et mis en
mateurs potentiels s’approprieront le produit. Dans l’état ac- œuvre par la municipalité. Le coût de la gestion suit l’évolution
tuel des choses et dans un contexte climatique comme celui du niveau de vie et est imputé sur les taxes et prélevé sur le
de Lomé, la valorisation du plastique de type PE en des nou- compte des propriétaires des habitations, ce qui permet aux
veaux sacs et en pavés avec récupération et traitement des autorités d’assurer la gestion des déchets et d’informer les
gaz de combustion peut être une solution à privilégier. citoyens à travers les bulletins d’information.
Population
3.2. Situation de la gestion des déchets dans les
pays développés Vérificateur Général

Cabinet du Maire Comité exécutif

La mise en place d’outils réglementaires et juridiques dans les
pays développés comme le Canada a joué un rôle essentiel Direction Générale
dans la gestion rationnelle et saine des déchets (Mizpah A. et
al., 2009). Ainsi un arsenal de textes régulant la gestion des Direction Général Adjoint
déchets a vu le jour depuis les années 1990 qui implique l’ad- Service aux citoyens

ministratif, l’environnement, le réglementaire, le scientifique, le

Conseil Spécial aux
marché et la technologie (Naushad K. et al., 2009). En général, Infrastructures

la gestion des déchets dans les pays développés est du ressort

Direction Travaux Publics
des collectivités locales ou des villes. Il n’est pas rare que celles-
ci se regroupent en syndicats intercommunaux, communautés
urbaines ou districts pour faire face aux difficultés croissantes Délégués aux Matières Résiduelles

d’ordre technique et organisationnel (ADEME, 2000). Pour le

Québec et la Mauricie, une évolution des textes et applica- Entreprises de Collecte
tions ont permis d’atteindre un résultat que nul ne conteste à
ce jour (RECY-QUEBEC, 2012). La théorie de 3RV-E (Réduire,
Réutiliser, Recycler, Valoriser et Eliminer) a beaucoup évolué RGMRM Centre d’Enfouissement

dans le concept du développement durable (Naushad K. et

al., 2009). Figure 4. Organisation administrative de la gestion des
matières résiduelles
3.2.1. Organisation administrative à trois-rivières, qc, Canada
Le travail organisationnel de la collecte des déchets est effec- 3.2.2 Prévision et gestion quotidienne des déchets à
tué par les délégués aux matières résiduelles. Ceux-ci s’as- trois-rivières
surent du respect des contrats des fournisseurs, implantent les Les Canadiens et en particulier les Trifluviens continuent
changements du mode de collecte, travaillent en collaboration d’examiner des solutions alternatives pour la gestion des
avec la RGMRM (Régie de Gestion des Matières Résiduelles déchets grâce à une organisation où chaque entité joue son
de la Mauricie) concernant la collecte sélective et l’enfouisse- rôle. Déjà au vu de la taille du pays et de la quantité relative
ment. Ils vérifient la collecte dans la ville par les entreprises, de l’espace disponible, les études ont suggéré qu’une grande
contrôlent la fiche de payement fournie par les entreprises partie du pays devra s’appuyer sur la mise en décharge pour

Tableau 1. Flux par types de déchets sur la décharge (Koledzi, 2011)

Saison Compostables T/J Recyclables T/J Stockables T/J
Putrescibles Papiers-cartons Plastiques Métaux Verres CNC, INC, textiles, spéciaux, Fines <20 mm
Sèche 111-182 23-37 81-95 5-13 8 121-123 388-479
Humide 99-121 23-85 54-119 5-8 3-5 98-103 469-482

Déchets Sciences et Techniques - N°68 - Novembre 2014

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Tableau 2. Prévision annuelle de la collecte des ordures ménagères dans treize zones à Trois-Rivières
Quantité en tonne par année*
Année 2013 2014 2015 2016 2017
Total 14269 14212 14154 14098 14042
* Chiffres de la ville de Trois-Rivières

Tableau 3. Production moyenne des ordures ménagères dans 4 villes de Québec

Ordures ménagères (RECY-QUEBEC, 2012)
Ville Population
Total (t) Kg /hab /an
Laval 404639 144078 356,07
Montreal 1701782 490338 288,13
Trois-Rivières 130901 42562 325,14
Québec 515638 147786 286,61

l’avenir prévisible en supposant que la mise en décharge soit Le travail des délégués aux matières résiduelles consiste es-
une source d’énergie future (Sawell S. E et al, 1996). En ver- sentiellement à régler les contentieux
tu du 1er alinéa de l’article 53.23 de la Loi sur la qualité de - attitude des éboueurs et gros rebus ;
l’environnement, le plan de gestion est révisé tous les cinq ans - bac endommagé ;
par le conseil (RECY-QUEBEC, 2011). Ainsi la politique Qué- - collecte des ordures ménagères ;
bécoise de gestion des matières résiduelles prévoit un rejet - collecte des ordures ménagères par levée frontale (ordures
zéro de matière organique d’ici 2020, ce qui remet en cause la multi-logements) ;
source d’énergie prévisionnelle. Une estimation de la quantité - collecte sélective (bac et conteneurs non collectés ou brisés)
des déchets à collecter est élaborée jusqu’en 2017. Le tableau ou équipements contenant des halo-carbures (réfrigérateurs,
2 est établi par rapport au ratio, à la population de chaque climatiseurs, congélateurs) ;
zone et à la production antérieure. - insatisfaction du citoyen portant sur la collecte des ordures
On peut constater que la production prévue devrait diminuer. ménagères ;
Ceci pourrait être lié aux déplacements des habitants soit - parcs et espaces publics (demande d’ajout de collecte, pou-
dans la zone concernée soit dans la ville. On peut aussi penser belles brisées ou volées,…).
que la population a adopté un autre mode de consommation,
par la réduction à la source ou par la réutilisation. Ces valeurs Dans tous les cas une procédure existe pour la résolution de
permettent donc à la ville de Trois Rivières de faire des esti- chacun des cas.
mations sur les coûts de collecte et de traitement des ordures Le suivi des levées des conteneurs dans chaque secteur par
ménagères. semaine et par mois à partir des fiches a permis de connaître
Il est prévu qu’à la fin de l’année 2013, 14 269 tonnes de le nombre de conteneurs enlevé par l’entreprise en charge
déchets seront collectées à un coût de collecte et de trans- et d’étudier la nécessité d’apporter un conteneur supplémen-
port estimé à $ 2 297 298 CAD (RECY-QUEBEC, 2012). La taire, le cas échéant de diminuer ou de supprimer ce poste
diminution de la quantité de déchets ménagers à éliminer d’apport volontaire.
entre 2013 et 2017 serait étroitement liée à des services de Suivant le nom de l’entreprise, la zone de collecte, du secteur,
3RV. Lorsque l’on compare la situation de Trois - Rivières à le site d’enfouissement et le tonnage reçu, les délégués aux
trois autres grandes villes de la province (cf. tableau 3), on matières résiduelles confrontent les données reçues auprès
peut constater que la production totale dépend de la taille des entrepreneurs avec celles de la Régie de Gestion de Ma-
de la population, mais les facteurs qui influent sur le rapport tières Résiduelles de la Mauricie. Un rapport établi à cet effet
pourraient être le niveau de vie de la ville et des habitudes permet de connaître l’évolution du poids total des matières
alimentaires. La théorie sur la production des déchets pour résiduelles.
laquelle le ratio le plus élevé est observé dans les villes les plus
développées, n’est pas respectée au vu des données de Mon- 3.3. Situation de Trois-rivières vis-à-vis de lomé
tréal. On peut donc supposer qu’à un niveau donné du déve-
loppement la production de déchets dépend uniquement des Concernant le zonage (cf. fig.1 et 2), le service ou le type de
habitudes alimentaires. collecte effectué par les entreprises, la ville de Lomé présente
Il existe 3 types de collecte : la collecte porte à porte (collecte un schéma similaire à celui de Trois-Rivières : pré-collecte et/
des bacs), l’apport volontaire dans les conteneur) et la collecte ou collecte puis valorisation et/ou enfouissement, mais la mise
sur rue. en application présente des difficultés à Lomé et les indica-

Gestion des déchets dans les villes en développement : transfert, adaptation de schéma et sources de financement
 37

teurs de performance de la collecte ont permis d’évaluer son - La téléphonie mobile

inefficacité. Aujourd’hui les communications téléphoniques sont devenues
Si l’on définit les indicateurs de collecte suivants: un « luxe de première nécessité » pour la majorité des popu-
lations des villes en développement même pour les jeunes
A élèves, collégiens, lycéens et étudiants. L’analyse des abonne-
- Taux d’abonnement, TA. TA %% =
TA .100
H ments montre qu’il y a plus d’abonnés en téléphonie mobile
C que le nombre d’habitants connu, ce qui permet de penser
- Taux de collecte, TC. : T %=
CTC% .100 que les enfants et les jeunes de moins de 18 ans sont parmi
PH
les abonnés.
C
- Rendement de collecte, RC. :R %=
CRC.% .100
- La distribution d’électricité
PA
L’analyse des données montre que toutes les maisons au
- Ratio de production = R= 0,91 kg/habt/j centre-ville de Lomé sont branchées sur le réseau électrique.
TA
T
A Grâce au système de sous-compteur et aux connexions illé-
avec PA = PH . en kg/J et PH = H . R en kg/J gales, toutes les banlieues de Lomé utilisent globalement le
100
réseau électrique. Les compagnies électriques utilisent ce
A : nombre d’abonnés ; H : nombre d’habitants ; C : quantité créneau pour prélever les taxes de l’électrification des voies
de déchets collectés ; PH : quantité de déchets produits ; PA : publiques.
quantité de déchets produits par les abonnés.
Le taux d’abonnement dans le quartier Avédji représente - La distribution d’eau potable ou d’eau courante
23%. Le coût de collecte est de 27 €/tonne et le frais de col- Il vient en troisième position car l’Etat semble se désengager
lecte est de 24 €/tonne pour une charge horaire faible pour des adductions d’eau courante surtout dans les banlieues. Un
le personnel (0,4T/H/J). La filière de collecte présente donc système de forage non contrôlé s’est installé dans les nou-
des difficultés. Dans ce système les populations sont libres de veaux quartiers ou les banlieues sans aucune taxe.
s’abonner pour la collecte de leur déchet. Dans la plupart des
cas les déchets sont déversés sur la voie publique ou sont - La consommation d’hydrocarbures (pétrole,
brûlés dans la nuit ou sont enterrés. essence, gazoil)
Tout ceci ne peut être corrigé que si la collecte et la responsa- Les résultats de l’enquête de terrain montrent que les ha-
bilité des citoyens sont maîtrisées comme dans le cas de villes bitants d’une grande majorité (95 %) des maisons dans les
développées (exemple à Trois-Rivières et Montréal). Les pro- quartiers pauvres disposent d’au moins une moto et auront
blèmes se situent au niveau de l’organisation administrative et besoin d’essence.
de la gestion des conflits découlant de la gestion des déchets.
Au-delà de ces difficultés auxquelles font face ces villes en 3.4.2. Scénario : exploitation d’un nouveau système
voie de développement, on note l’occupation anarchique du Le schéma actuel dans les PED montre que les populations
territoire. Du coup les Etats ou les municipalités n’ont aucune n’ont pas d’obligation en matière de gestion des déchets. Les
méthode pour prélever les taxes et faire face aux problèmes. abonnements auprès des ONG et des entreprises (PME) sont
En outre il faut noter que la majorité de la population est dans facultatifs. Chaque habitant gère ses déchets. Par contre les
le secteur informel ou artisanal et n’a donc pas de compte ONG et les PME ont l’obligation de verser mensuellement ou
bancaire pouvant permettre à l’Etat d’opérer directement les annuellement selon les cas des ristournes ou des redevances
prélèvements via les banques. en rapport avec le nombre d’abonnés. Pour régulariser et
rendre obligatoire la gestion des déchets au niveau de tous les
3.4. Approche intégrée du système de gestion acteurs, on peut créer une taxe de Développement Durable
à Lomé via les compagnies de premières nécessités. Grâce au système
de géo-localisation ces taxes pourront être attribuées en fonc-
Tout en s’inspirant des données des villes développées et tion des quartiers et devront être versées aux ONG et les
sachant que la ville de Lomé ne peut toujours pas compter PME de pré-collecte qui jusque-là versaient des redevances
sur des bailleurs via les projets, il est important d’explorer des aux municipalités.
scénarii sur la base des secteurs de première nécessité (télé- La Figure 5 représente un plan de gestion stratégique et inté-
phonie mobile, réseau électrique, réseau d’eau potable). grée des déchets solides pour la ville de Lomé. Ce plan devra
prendre en compte des sources de production de déchets,
3.4.1. Réseaux qui sont mieux développés au Togo la quantité produite, les caractéristiques et la structure so-
L’analyse des cahiers de charges de ces entreprises étatiques cio-économique et culturelle de chaque ville. Dans la mise
montre que leurs activités représentent une source de revenu en œuvre de ce plan, tous les intervenants possibles dans la
pour l’Etat. gestion des déchets tels qu’identifiés doivent être intégrés.

Déchets Sciences et Techniques - N°68 - Novembre 2014

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Municipalités

ONG, Entreprises

Téléphonie mobile
Compagnies de Courant électrique
Matières
Téléphonie, courant, Eau potable
résiduelles Pétrole
Eau, Pétrole

Population
Habitation

Figure 5: Organisation du prélèvement des taxes et de collecte des matières résiduelles

Ainsi les indicateurs de performance et de prélèvement des pollueur-payeur qui devra donc participer aux coûts de la
taxes doivent être correctement communiqués à toutes gestion des matières résiduelles en acquittant une taxe de
pour qu’ils se sentent concernés et puissent s’engager dans la développement durable à travers les compagnies de télépho-
réussite d’une gestion saine des déchets. nie mobile, et/ou celles de réseau électrique, et/ou celles de
distribution d’eau potable et/ou celles d’énergie fossile. Ain-
CONCLUSION si les municipalités pourront se dispenser des financements
extérieurs pour une gestion durable des déchets.
Dans le souci de rechercher une méthode cohérente de ges-
tion et de financement de la filière déchet dans les PED, ce Remerciements
travail a présenté entre autre un état qualitatif de la gestion Ce travail a été réalisé grâce au soutien financier de
des déchets à Lomé. Il ressort que malgré les investissements Programme Canadien de Bourse de la Francophonie.
importants des bailleurs externes et l’implication des ONG,
entreprises (PME) et municipalités le devenir de cette filière
reste encore incertain. Le manque d’implication de la popula-
Références bibliographiques
tion comme acteur principal et de l’Etat comme régulateur du
cadre logique de la filière en sont fondamentalement les rai- ADEME, 2000. Déchets municipaux 2ième édition. Paris, ADEME édition, 11 p.
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financement auprès de la population pollueur, le manque de BEN AMMAR S., 2006. Les enjeux de la caractérisation des déchets ménagers
compte bancaire pour la majorité de la population pourraient pour le choix des traitements adaptés dans les pays en développement : Ré-
sultats de la caractérisation dans le grand Tunis, Mise au point d’une méthode
être aussi certaines des raisons qui limitent les actions de l’Etat. adaptée. Thèse de doctorat Institut National Polytechnique de Lorraine, oc-
Sur la base de l’organisation de la même filière à Trois-Rivières, tobre.
QC, Canada et sur les atouts dont disposent ces PED, un scé-
BODJONA, 2012. Contamination du sol de la décharge finale de la ville de
nario d’organisation du financement de la filière est établi. Ce Lomé par les métaux lourds : Cas du plomb, cadmium, nickel, cuivre et du zinc.
scénario met la population devant sa responsabilité comme Thèse de doctorat N° 455/FDS de l’Université de Lomé.

Gestion des déchets dans les villes en développement : transfert, adaptation de schéma et sources de financement
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Déchets Sciences et Techniques - N°68 - Novembre 2014

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