CHAPITRE II : TRANSMISSION PHYSIQUE DE L’INFORMATION
II.1- Introduction
L'histoire de la communication est aussi ancienne que l'histoire de l'humanité. Depuis les
origines, l'homme a eu besoin de communiquer. Pour cela il mit au point des codes, des
alphabets et des langages. Parole, gestes de la main, signaux de fumée, tam-tam, document
écrit... tout était bon pour véhiculer le message.
Mais ces différents mécanismes de transmission avaient leurs inconvénients. Les signaux
sonores et visuels ne pouvaient pas être utilisés sur des longues distances et dans n'importe
quelle condition. Le document écrit transmis par des messagers mettait trop de temps à
arriver.
Ce n'est qu'avec la "fée électricité" que le télégraphe électrique vit le jour avec P. Shilling
(1832). Un nouveau code télégraphique fut établi par S. Morse (1837) et l'administration du
télégraphe fut créée.
En 1854, un premier projet de téléphone fut proposé par F. Bourseul mais il fallait attendre
1876 pour qu'un brevet soit déposé par G. Bell. Le téléphone est né mais on ne voyait pas son
intérêt.
L'étude sur la propagation des ondes va faire de très importants progrès: Lois de
l'électromagnétisme (J. Maxwell - 1860), Ondes radioélectriques (H. Hertz - 1887),
Radiodiffusion (W. Crooker - 1892)...
En 1896, la première liaison de TSF fut établie par G. Marconi. En 1915, le téléphone
automatique apparaît et en 1917 E. Baudot développe un nouveau système télégraphique.
La première moitié du vingtième siècle va voir apparaître et s'institutionnaliser la
radiodiffusion, la télévision, le radar, le télex et le téléphone. De multiples réseaux vont se
développer.
En 1943, le premier calculateur électronique fut construit. C'est le début de l'ère du traitement
électronique de l'information: l'Informatique.
Les moyens de télécommunications vont être utilisés pour relier les équipements
informatiques mettant à jour un nouveau réseau : le réseau informatique.
II.2- Généralités sur les transmissions en bande de base
L'information peut être soit analogique (ex. voix) soit numérique (ex. bits). Dans l'ordinateur,
le signal est numérique et utilise deux tensions pour représenter le bit. Le signal correspondant
à la séquence binaire et circulant sur le support de transmission est soit un signal analogique
soit un signal numérique. Le choix est fait selon les caractéristiques du support et ceux du
signal à transmettre.
La technique de transmission numérique est appelée Transmission en Bande de Base tandis
que la transmission analogique est appelée Transmission par Transposition de Fréquence.
L'équipement mettant en oeuvre une technique de transmission est l'ETCD(Equipement
Terminal de Circuit de Données).
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II.2.1- Quelques définitions
Bande Passante (Hz) :
FCaractérise tout support de transmission, c’est la bande de
Fréquences dans laquelle les signaux sont correctement reçus
FW = Fmax - Fmin
ex : l ’oreille humaine est sensible dans la bande 15-15000 Hz
Débit binaire qui caractérise une liaison
(bits/s ou bps) : formule de Shannon
est une fonction directe de la bande passante (W) :
D = W log2 (1 + S/N) avec S/N = signal/bruit
– c’est la quantité maximale d’information transmissible sur une voie
– ex : W=3100 Hz, S/N=1000 D#30000 b/s.
Unités
Hertz (Hz) :
La fréquence d’un signal, exprimée en Hertz, est le nombre de périodes (ou d’oscillations) par
seconde– kHz, MHz, GHz ...
II.2.2- Transmission en bande de base
Dans cette technique, l'information est directement codée par des tensions et le signal généré
est transmis sur la ligne. Cette transmission est celle effectuée au sein de l'ordinateur. La
transmission directe de ce signal (suite de 0 et 5 volts) sur un support de transmission peut
être envisagée mais différents éventuels problèmes de transmission conduisent à considérer
une autre solution de codage.
Voilà quelques uns de ces problèmes:
- confusion de l'état 0 volt avec rupture de transmission;
- atténuation des amplitudes;
- synchronisation des horloges;
Pour résoudre un ou plusieurs de ces problèmes lorsqu'ils risquent de se poser, différents
codages ont été proposés.
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Figure 2.2.1: Différents codages en bande de base de la séquence 0110010.
Dans la figure 2.2.1 nous trouvons quelques exemples de codage de l'information pour une
transmission en bande de base.
le code tout ou rien : c'est le plus simple, un courant nul code le 0 et un courant positif
indique le 1
le code NRZ (non retour à zéro): pour éviter la difficulté à obtenir un courant nul, on
code le 1 par un courant positif et le 0 par un courant négatif.
le code bipolaire : c'est aussi un code tout ou rien dans lequel le 0 est représenté par un
courant nul, mais ici le 1 est représenté par un courant alternativement positif ou
négatif pour éviter de maintenir des courants continus.
le code RZ : le 0 est codé par un courant nul et le 1 par un courant positif qui est
annulé au milieu de l'intervalle de temps prévu pour la transmission d'un bit.
le code Manchester : ici aussi le signal change au milieu de l'intervalle de temps
associé à chaque bit. Pour coder un 0 le courant sera négatif sur la première moitié de
l'intervalle et positif sur la deuxième moitié, pour coder un 1, c'est l'inverse.
Autrement dit, au milieu de l'intervalle il y a une transition de bas en haut pour un 0 et
de haut en bas pour un 1.
le code Miller : on diminue le nombre de transitions en effectuant une transition (de
haut en bas ou l'inverse) au milieu de l'intervalle pour coder un 1 et en n'effectuant pas
de transition pour un 0 suivi d'un 1. Une transition est effectuée en fin d'intervalle pour
un 0 suivi d'un autre 0.
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Si le signal comporte de longues suites de bits identiques il peut se poser un problème
d’horloge du côté du récepteur, en effet deux méthodes de transmission de l’horloge sont
utilisées.
- On émet le signal de l’horloge en le superposant au signal de données.
- On restitue l’horloge à partir des transitions du signal.
Les codes BHDn (Bipolaires à Haute Densité d’ordre n) :
Ces codes sont des variantes du code bipolaire simple afin d’apporter une solution au codage
des longues suites de zéro. Les longues suites de zéro transmises sont remplacées par des
suites de remplissage. Dans un code BHDn, il y au plus n intervalles de temps sans impulsion
et la séquence de remplissage est de longueur n+1 La séquence de remplissage viole
l’alternance des +a et –a utilisée pour transmettre les 1.
Viole +
+a --
-a Viole -
Figure 2.2.2 Exemple de codage BHD1 de la suite 10001000001
Viole +
+a --
-a
Viole -
Figure 2.2.3 Exemple de codage BHD2 de la suite 10001000001
La dégradation très rapide des signaux en fonction de la distance parcourue constitue le
principal problème de la transmission en bande de base. Si le signal n’est pas régénéré
régulièrement, il se déforme, et le récepteur est incapable de l’interpréter. Cette méthode de
transmission ne peut donc être utilisée que sur de très courtes distances. Sur des distances plus
longues, on utilise un signal sinusoïdal. Ce type de signal, même affaibli, autorise un
décodage simplifié pour le récepteur. . Ce signal sinusoïdal est obtenu grâce à un modem
(modulateur-démodulateur) qui est un équipement électronique capable de prendre en entrée
un signal en bande de base pour en faire un signal sinusoïdal (modulation) et l'inverse à savoir
restituer un signal carré à partir d'un signal sinusoïdal (démodulation). Autrement dit il permet
de passer de signaux numériques discrets (0 ou 1) à des signaux analogiques continus.
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II.3- Généralités sur les modulations
Définition :
Un signal se présente sous la forme d’une onde de base régulière : porteuse, il est caractérisé
par :– son amplitude A, sa fréquence f, et sa phase ф, tel que :
y(t) = A sin (2 л f t + ф)
avec f = 1 / T et– (T = période)
la modulation et un procédé permettant de transformer la suite des données à transmettre
(représenté par un signal en bande de base) en un signal adapté à la transmission sur un
support de transmission à bande passante limitée. Cette transformation consiste à manipuler
les trois caractéristiques du signal : son amplitude, sa phase et sa fréquence. Il existe trois
types de modulation :
II.3.1- La modulation d’amplitude
la modulation d'amplitude envoie un signal d'amplitude différente suivant qu'il faut
transmettre un 0 ou un 1. Cette technique est efficace si la bande passante et la fréquence sont
bien ajustées. Par contre, il existe des possibilités de perturbation (orage, lignes électriques...),
car si un signal de grande amplitude (représentant un 1) est momentanément affaibli le
récepteur l'interprétera à tort en un 0.
Figure 3.1 : Modulation d’amplitude
II.3.2- La modulation de fréquence
la modulation de fréquence envoie un signal de fréquence plus élevée pour transmettre un 1.
Comme l'amplitude importe peu, c'est un signal très résistant aux perturbations (la radio FM
est de meilleure qualité que la radio AM) et c'est assez facile à détecter.
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Figure 3.2 : Modulation de fréquence
II.3.3-La modulation de phase
la modulation de phase change la phase du signal (ici de 180 ) suivant qu'il s'agit d'un 0
(phase montante) ou d'un 1 (phase descendante).
Figure 3.2.3 : Modulation de phase
Il est possible de coder le bit comme le dibit ou le tribit... Cette multivalence permet
d'augmenter le débit. Dans les exemples donnés ci-dessus on a seulement 2 niveaux possibles
à chaque fois, donc on a uniquement la possibilité de coder 2 valeurs différentes à chaque
instant, dans ce cas 1 baud = 1bit/s. De manière plus sophistiquée il existe des modems
capables de moduler un signal suivant plusieurs niveaux, par exemple 4 fréquences différentes
que le modem récepteur saura lui aussi distinguer. Dans ce cas, chaque signal envoyé code 2
bits donc 1 baud = 2bit/s.
Figure 3.2.4 : Modulation de phase à quatre moments
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II.4- Débit binaire et rapidité de modulation
- Le débit binaire mesure la quantité d'informations binaires émises par unité de temps (Bits
par seconde (bps)).
- Nous avons vu que l'information est représentée sous forme d'un signal pour la transmission.
La rapidité de modulation caractérise le nombre de changements d'états (ou nombre d'états)
par unité de temps. Prenons comme unité le nombre d'états par seconde.
- Nous appelons valence le nombre d'états utilisés pour représenter l'information. Ainsi, si on
utilise deux états (par ex. +5 volts pour le bit 1 et 0v pour le bit 0) la valence est de 2 et le
signal est bivalent. Mais un état de signal peut représenter, non pas un bit, mais plusieurs bits.
C'est la multivalence (Valence >2). Ainsi, en codant les dibits (ensemble de 2 bits), la
valence est de 4 (2²). Pour un débit donné, la multivalence permet de générer un signal plus
adapté au support.
- Trouvons maintenant la relation entre débit binaire et rapidité de modulation. Nous appelons
n le nombre de bits représentés par un état, V la valence d'un signal, D le débit et R la rapidité
de modulation. Nous avons D=n*R. Or V=2n et n=log2(V). D'où D=R*log2(V). Nous
voyons que le débit binaire et la rapidité de modulation ne sont identiques que lorsque la
valence est 2.
La rapidité de modulation est exprimée en Bauds (du nom de l'ingénieur Baudot). Elle
caractérise le signal transmis.
II.5- Circuits et liaisons de données
II.5.1- Eléments de base
Il est d’usage de structurer la transmission en un ensemble de “ boîtes noires ”, chacune
remplissant une fonction particulière.
– L’ETTD, Équipement Terminal de Traitement des Données, désigne l’équipement
informatique qui génère les données à transmettre et traite les données reçues. L’ETTD est,
par exemple, un ordinateur personnel.
– L’ETCD, Équipement de Terminaison du Circuit de Données, reçoit en entrée la suite de
données binaires et fournit en sortie un signal dont les caractéristiques sont adaptées au
support de transmission. Il effectue également l’opération inverse : recevant le signal qui s’est
propagé dans le support, il en extrait une suite de données binaires.
L’ETCD rend ainsi transparente à l’utilisateur la nature du support de transmission réellement
utilisé.
Figure 5.1 : Constitution d’un circuit de données
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L’ETCD est couramment appelé modem pour modulateur-démodulateur. Il est souvent intégré
aux ordinateurs. Pour permettre une indépendance entre les ordinateurs et les ETCD, une
interface a été définie sous le nom de V24.
L’ensemble constitué par le support et les deux ETCD placés à chaque extrémité constitue un
circuit de données.
Compte tenu des caractéristiques du support que nous venons de voir, on peut dire que le
circuit de données est une entité capable d’écouler une suite de données binaires à un débit
donné avec un délai donné, mais sans garantie de qualité
II.5.2- Nature des liaisons de données
Considérons deux équipements A et B.
- Si les données sont émises dans un seul sens de A vers B, la transmission est
unidirectionnelle ou simplex.
- Si les données peuvent être émis dans les deux sens, la transmission est bidirectionnelle ou
duplex.
- On distingue le Half Duplex (ou alternat) le cas où les données sont transmis dans un sens
à un instant donné et change ensuite de sens.
- Le Full Duplex (ou simultané) le cas où les données peuvent être transmis dans les deux
sens en même temps.
II.6- La numérisation
Presque tous les transports d’information s’effectuent aujourd’hui en numérique : téléphone,
TV numérique, Web, etc. Pour ce faire, les signaux analogiques doivent au préalable être
transformés en suite d’éléments binaires. Le signal analogique est transformé en un signal
numérique grâce à un équipement appelé codec qui délivre une suite de données binaires. Le
signal numérique est transmis et à l'arrivée, l'opération inverse est effectuée. Il s'agit de
reconstituer correctement le signal sachant que la transformation analogique/numérique
engendre toujours des pertes.
La numérisation résulte des études effectuées par Nyquist et Shannon. C'est la technique
MIC (Modulation par impulsion et codage) ou PCM (Pulse Code Modulation).
Pour illustrer les étapes de la numérisation, nous allons prendre l'exemple du réseau
téléphonique. En effet, le signal de la parole (que nous appellerons signal téléphonique) fut
le premier à être numérisé pour être transmis sur un réseau appelé RNIS (Réseau Numérique
à Intégration de Services) ou ISDN (Integrated Services Digital Network).
Trois opérations successives doivent être réaliser pour arriver à cette numérisation.
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II.6.1- L’échantillonnage
Le signal analogique est un signal continu qui par définition contient un nombre infini
d'éléments. L'échantillonnage consiste à prélever un nombre déterminé d'éléments
(échantillons) qui seront suffisants pour reconstituer à l'arrivée un signal analogique de
qualité. Les différentes études ont montré qu'il suffit d'échantillonner à deux fois la fréquence
supérieure contenu dans le signal. Ainsi, pour un signal de la parole où l'information est
contenue dans une bande de 4000 Hz (0-4000), un échantillonnage à 8000 Hz suffit (c'est à
dire toutes les 125 µs). Echantillonner à une fréquence plus faible conduit à un signal restitué
de mauvaise qualité, et un échantillonnage plus élevé augmente le volume de données à
transmettre sans une augmentation significative de la qualité.
Figure 6.1 Echantillonnage
II.6.2-La Quantification:
Elle consiste à représenter un échantillon par une valeur numérique au moyen d’une loi de
correspondance. La loi la plus simple consiste à diviser l’ordonnée en segments égaux. Le
nombre de segments dépend du codage. Par exemple un codage sur 8 bits engendre 28
segments. L'erreur effectuée dans l'approximation est appelée bruit de numérisation. Pour le
signal téléphonique, 256 niveaux ont été retenus
Figure 6.2 : Quantification
II.6.3- Le Codage
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La troisième phase est le codage, qui consiste à affecter une valeur numérique aux
échantillons obtenus lors de la première phase. Pour permettre le codage des différentes
valeurs, 8 bits sont nécessaires pour la numérisation de la voix téléphonique.
Figure 6.3 : Codage
Figure 6.4 : Exemple de numérisation
La valeur totale du débit de la numérisation de la parole téléphonique est obtenue en
multipliant le nombre d’échantillons par la longueur du code. Ainsi, pour le signal
téléphonique (4000 Hz), nous avons 8000 échantillons/s (8000 Hz) codés sur 8
bits/échantillon. Cela donne 64 000 bits/s. Un canal à 64 kbps est nécessaire pour transmettre
un signal téléphonique de base.
II.6.4- Les avantages de la numérisation
Les avantages de la numérisation sont nombreux. Les plus importants sont:
Fiabilité de la transmission: L'information transmise étant une séquence binaire, les
valeurs représentés par un signal appartiennent à un ensemble discret et limité (un bit a
deux valeurs, un dibit a 4 valeurs, un tribit 8 valeurs...). Ainsi, contrairement à une
source d'information analogique, il est possible d'utiliser des techniques de
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reconnaissance lors de la déformation du signal transmis (qu'il soit analogique ou
numérique). Après reconnaissance par discrimination, le signal est régénéré (répété)
offrant ainsi une transmission fiable.
Banalisation de l'information transmise: Indépendamment de la source,
l'information transmise correspond à des séquences binaires. Ainsi, le support véhicule
un type d'information: le bit. Ce dernier peut aussi bien représenter du texte, de la
voix, de l'image (fixe ou animée). Par conséquent, au lieu de constituer un réseau par
type d'information, il est possible de constituer un réseau multi-usages.
Compression: Les algorithmes de compression informatiques pourront être utilisés
dès la phase de numérisation terminée. Dans ce cas, il est possible de choisir entre tel
ou tel algorithme selon le contenu informationnel d'origine.
Cryptage: De la même façon que la compression, il est possible d'appliquer des
techniques de cryptage issus du monde informatique.
Protection contre les erreurs: Lorsque l'application le permet (pas de contrainte
temporelle élevée), des techniques de protection contre les erreurs peuvent être mises
en oeuvre offrant ainsi encore plus de fiabilité.
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