Le marché et les mécanismes de l’économie de marché
L’économie de marché désigne le système dans lequel les agents économiques
peuvent vendre et acheter librement des biens, des services et des capitaux. La spécificité
de ce type d’économie est que chaque agent économique agit en fonction de ses intérêts. Le
profit, con-sidéré positivement, y figure comme la récompense du risque.
Une telle économie s’organise autour du marché et repose principalement sur les lois du mar-
ché, notamment celles de l’offre et la demande pour réguler les activités économiques.
I-1/ La notion de marché
Le marché est le lieu de rencontre entre une offre et une demande d’un bien, sur lequel va
s’établir un prix d’équilibre. C’est ce prix qui détermine les quantités du bien ou du service
échangées.
Un marché est défini par différents critères à savoir : la nature des biens échangés, le lieu et
sa périodicité.
- La nature des biens échangés : on y trouve, le marché des biens et services, le marché
de travail, le marché des matières premières, etc.
- Le lieu : marché réel et marché fictif
- La périodicité : marché quotidien, marché hebdomadaire
La notion de marché est souvent liée à l’existence d’une opération d’échange. Ainsi le rôle du
marché s’avère primordial dans notre système économique. Pour fonctionner de manière sa-
tisfaisante, les échanges doivent être organisés.
I-2/ Les déterminants du marché
L’économie de marché désigne une économie où la régulation s’opère par la confrontation de
l’offre et la demande sur un marché. Pour comprendre l’établissement de cette confrontation,
voyons l’intervention de chacun de ces deux agents économiques sur le marché à l’aide d’une
représentation graphique.
I-2-1/ La fonction de la demande : Sur le marché, le consommateur cherche à maximiser sa
satisfaction sous contrainte de son budget et du prix qui y figure. La quantité du bien demandé
sera fonction du prix. Si la demande de consommation varie avec le prix, il existe une relation
qui peut être représentée par la courbe de demande de la manière suivante :
͞ ͞p
͞q Qd
Qd = a – b*p, a et b deux scalaires positifs, représente la loi de la demande d’un bien et appa-
raît comme une fonction décroissante entre la quantité demandée d’un bien, au cours d’une
période, et les différentes valeurs possibles de prix.
- Si Qd = 0, le niveau de prix noté ͞p = a/b s’appelle le prix de réservation
- Si P = 0, la quantité maximale que le consommateur souhaite acquérir c’est ͞q = a et
représente la quantité de saturation.
Un point donné sur la courbe indique une combinaison Prix-Quantité.
I-2-2/ La fonction d’offre : L’offre des producteurs dépend du prix des facteurs de produc-
tion, de l’état de la technologie et des prix des autres biens, c’est à dire des concurrents.
P
p = c/d
Qo
Qo = -c + d*p, c et d deux réels positifs, représente la loi de l’offre et apparaît comme une
fonction croissante entre la quantité maximale offerte d’un bien au cours d’une période et les
différentes valeurs possibles de prix.
Si le prix P ≤ c/d, Qo = 0. C'est-à-dire, si le prix de vente est inférieur à un certain seuil, défini
en liaison avec l’importance des coûts de production, l’activité de production n’est plus inté-
ressante.
La courbe est indéfiniment croissante signifie qu’il n’y a pas de limite supérieure à la produc-
tion. Le producteur est disposé à augmenter son offre autant et aussi longtemps que le prix
s’élève.
I-2-3/ L’équilibre du marché : La loi de l’offre et la demande donne le prix d’équilibre.
Offre
P1 ----------------------------------------
P* ------------------------------ E
P2 -------------------------------------------
Demande
Q2o Q1d Q* Q1oQ2d Q
A l’intersection entre les deux fonctions, la quantité de bien ou service offerte est égale à la
quantité de bien ou service demandée, et ce pour un prix qui correspondra au prix d’équilibre.
La flexibilité des prix entraine l’égalité des quantités d’offre et de demande.
- Si P1 > P*, la demande des consommateurs diminue et l’offre des producteurs dépasse
la demande, traduisant une situation de mévente.
- Si P2 < P*, la demande des consommateurs augmente, alors que l’offre des producteurs
baisse, c’est l’excès de la demande caractérisant une situation de pénurie.
La flexibilité des prix fait que le marché est auto régulateur.
L’économie de marché est caractérisée par le fait que le prix et les quantités produites dé-
pendent pour l’essentiel de la confrontation de l’offre et la demande. Elle est synonyme
d’économie libérale et d’économie capitaliste. L’efficacité de l’économie de marché s’expli-
que par la concurrence qui a pour effet de permettre l’ajustement de l’offre à la demande.
Il y a concurrence lorsque le producteur est libre de vendre un bien au prix qu’il souhaite et
avec les procédés qu’il désire. Afin de réduire le prix de revient au niveau le plus bas, il doit
adopter la meilleure combinaison des facteurs de production (capital, travail).
Le fondateur de l’économie classique A. Smith assimile le marché à un organisme qui
s’autorégule grâce à la "main invisible″ et dans lequel l’intervention de l’Etat n’est pas déci-
sive. Cependant A. Smith n’exclut pas une certaine forme de régulation par l’autorité pu-
blique.
Les avantages de l’économie de marché :
- En jouant sur les prix, les décisions de production et les choix des consommateurs
deviennent cohérents
- L’investissement est dirigé vers les productions rentables
- Le progrès technique et l’innovation sont plus développés dans une économie de
marché.
Souvent la concurrence est considérée comme un moteur d’innovation qui caractérise
l’économie de marché.
Comme la concurrence rend l’économie plus dynamique, il est nécessaire que les intervenants
respectent ses lois car dans le cas contraire cela entrainerait des dysfonctionnements.
Lorsque l’organisation du marché est entravée par des abus tels que la concurrence déloyale,
la publicité mensongère ou les ententes (pour bénéficier des pouvoirs de monopole),
l’efficacité économique est réduite.
I-2-4/ Organisation et limites de l’économie de marché : Les défenseurs de l’économie de
marché estiment que dans la société chaque individu agit en fonction de ses intérêts et qu’un
″ tel laissez faire " conforte la croissance économique.
Pour garantir son efficacité, le marché doit être organisé, d’où la nécessité de règles qui exer-
cent des contraintes sur les individus (interdiction de vol, contrôle des poids, définition de
l’unité monétaire). Ces règles doivent être élaborées par les différentes institutions de l’Etat.
Le respect de ces règles garantit les libertés (dans les domaines des prix, de l’accès au marché
et dans la lutte contre les abus de puissance économique).
Si théoriquement l’économie de marché est fondée sur le système libéral, l’économie adoptée
par les pays développés à économie de marché se combine avec des restrictions et des règles
imposées par l’Etat pour garantir le bon déroulement du marché. Ainsi L’intervention de
l’Etat s’opère dans certains secteurs, notamment, ceux qui produisent les biens et services non
marchands tels que l’éducation, la santé et le transport en commun…
Chapitre II : La structure des marchés
Tout bien ou service qui ne peut être obtenu librement dans la nature, c'est-à-dire qui doit être
produit pour satisfaire un besoin, fait l’objet d’un échange sur le marché. Il y a donc autant de
marchés qu’il y a de biens et services disponibles dans une économie.
Les firmes qui fabriquent des biens ou services similaires cherchent à satisfaire le même be-
soin. De ce fait elles entrent en concurrence les unes avec les autres pour gagner le plus grand
nombre de clients.
Dans la pratique, les marchés ne se caractérisent pas tous par une structure de concurrence
pure et parfaite, il existe une diversité de situation selon l’organisation du marché
II-1/ Le modèle de la concurrence pure et parfaite
Le marché de la concurrence pure et parfaite est présenté par Walras4 en 1874 et reformulé
par Arrow et Debreu (1974). Walras a une vision idéale du marché qui est une source
d’efficacité. Malgré les limites et les critiques, la concurrence pure et parfaite tient encore une
place importante dans la pensée économique, d’où l’importance de l’étude de ce type de mar-
ché.
Un marché est en concurrence pure et parfaite s’il répond aux hypothèses suivantes :
- Atomicité des agents : elle se caractérise par la multitude d’acheteurs et de deman-
deurs de taille infinitésimale. Donc, aucun agent ne peut imposer sa loi et influencer le
comportement des concurrents.
- Homogénéité des produits : les biens échangés ne sont pas dissociables. Ils sont iden-
tiques pour l’acheteur et ne peuvent se différencier que par leur prix.
- Fluidité : libre entrée et sortie, c'est-à-dire absence de toute entrave à l’accès sur le
marché des acheteurs et des vendeurs.
4
Léon Walras, économiste libéral français (1834-1910)
- Parfaite mobilité des facteurs de production : les travailleurs et les capitaux se dé-
placent librement entre les différentes branches.
- Transparence : les offreurs comme les demandeurs disposent de la même information
concernant les conditions du marché (quantités offertes et demandées, prix des
échanges…)
Ce modèle de concurrence pure et parfaite définit une structure particulière de marché théo-
rique sans soubassements pratiques, qui est très éloignée des conditions réelles du marché.
C’est pourquoi l’analyse économique a déterminé d’autres types de marchés plus proches de
ce qui se pratique réellement.
II-2/ Le monopole
Il s’agit d’une structure de marché extrême par rapport à la concurrence pure et parfaite. Le
monopole est une entreprise qui se trouve seule à produire un bien ou service et doit donc
satisfaire la totalité de la demande exprimée sur le marché.
Le modèle du monopole repose sur les deux hypothèses suivantes :
- Le bien produit ne doit pas avoir de substituts proches, permettant ainsi au monopole
de maintenir son hégémonie.
- L’existence de barrière à l’entrée, empêchant ainsi les autres firmes de pénétrer le
marché.
Le monopole est une forme d’organisation susceptible d’être pratiquée dans la réalité, no-
tamment dans les situations suivantes :
1/ Le monopole naturel : il s’agit de la présence dans certains secteurs d’activité de rende-
ments croissants ayant pour effet la réduction de la rentabilité des petites entreprises. Ce type
de monopole est observé dans le secteur des télécommunications ou dans les sociétés de pro-
duction et de distribution.
2/ Dans certains cas, une seule firme détient le contrôle d’une ressource rare. On peut citer
l’exemple de l’entreprise sud-africaine De Beers qui dirige 80% de la production de diamants.
3/ L’exclusivité sur les brevets de fabrication. Pour protéger la recherche, la législation sur
les brevets donne droit à l’entreprise qui invente un nouveau produit ou un nouveau procédé
le privilège d’en être le seul producteur pendant un certain nombre d’années.
4/ Le monopole peut réviser sa stratégie commerciale lorsqu’il se sent menacé par l’arrivée
de nouvelles firmes concurrentes. Il choisit de vendre à un prix inférieur au coût moyen de
façon à décourager les producteurs potentiels qui vont vouloir investir dans la même activité.
II-3/ la concurrence imparfaite
Si le monopole est une situation relativement exceptionnelle, peu de marchés connaissent les
règles de la concurrence pure et parfaite car toute violation de ces cinq règles : atomicité, ho-
mogénéité des produits, libre entrée, transparence du marché, mobilité des facteurs, entraine
des niveaux d’imperfection différents. Il y’a concurrence imparfaite si une seule de ces cinq
règles n’est pas vérifiée.
La situation la plus fréquente est la présence d’un nombre réduit d’entreprises sur un marché.
Chacune d’entre elles doit tenir compte de la politique commerciale de ses concurrentes. Pour
se rapprocher de la situation du monopole, qui permet de réaliser le profit le plus élevé, les
firmes vont tenter de se regrouper afin de dominer le marché
II-3-1/ Le cartel : Dans certains cas les entreprises, sans remettre en cause leur indépendance
juridique, s’entendent pour limiter les effets de la concurrence, ces ententes portent sur le par-
tage du marché, le niveau des prix, la fixation des quotas de production par firme.
L’objectif du cartel c’est de réduire la production et élever le prix par rapport à l’équilibre
concurrentiel pour atteindre l’équilibre du monopole. Pour que le cartel puisse fonctionner
d’une manière efficace, les membres sont amenés à supporter certains coûts. On en distingue
les coûts de négociation et les coûts de surveillance.
Les coûts de négociation croissent avec l’effectif de producteurs (difficulté de s’entendre sur
la répartition des quotas, la fixation du prix…)
Les coûts de surveillance sont observés lorsque l’un des membres du cartel se trouve tenté de
pratiquer un prix légèrement inferieur à celui de l’équilibre du cartel. Dans ce cas l’entreprise
détourne une partie de la demande qui aurait dû s’adresser aux autres membres du cartel.
Ce comportement de tricheur peut prendre une autre forme quand l’entreprise ne respecte pas
les termes de l’accord du cartel. Sans agir sur le prix, elle procède à des ventes qui dépassent
le quota fixé. D’une manière générale, dans le cadre d’un cartel à effectif assez élevé de
firmes, il est difficile de perpétuer dans le temps l’entente entre elles car le risque de la dérè-
glementation est important, d’où la surveillance de la part des autres membres s’avère indis-
pensable.
II-3-2/ la concurrence monopolistique : C’est une situation où les entreprises concurrentes
sur le marché pratiquent une stratégie de différenciation de produit de manière à se créer une
clientèle particulière. Si la politique de différenciation de produit réussit, l’entreprise acquiert
une sorte de monopole sur son produit. La combinaison concurrence et monopole a amené
Chamberlin5 à décrire cette situation de « concurrence monopolistique »
Ce modèle s’écarte de la concurrence pure et parfaite par l’abandon de l’hypothèse de
l’homogénéité du produit, qui n’existe pas dans la réalité. Comme il s’éloigne aussi du mono-
pole par la diminution du pouvoir économique du monopole sur le marché. Théoriquement le
modèle de concurrence monopolistique maintient toutes les hypothèses de la concurrence pure
et parfaite sauf l’homogénéité du produit qui fait état de la principale caractéristique distinc-
tive de la concurrence monopolistique. La différenciation est, soit tangible (processus de pro-
duction et facteurs de production), soit fictive (l’emballage, la marque, la publicité…)
Dans la réalité économique contemporaine, souvent les entreprises tiennent à garder leurs
clients en leur proposant des biens ou des services légèrement différents et écoulés sous leur
propre label.
5
Edward Hastings Chamberlin (1899-1967) était un économiste américain né à La Conner, Washington.
La différenciation peut prendre deux types de formes : horizontale ou verticale.
La différenciation est dite horizontale quand les producteurs offrent des biens ou services de
qualité identique mais avec des caractéristiques différentes, ce qui leur permet d’augmenter le
prix. Ce type de différenciation a été abordé par H.Hotelling6 en 1929, qui explique à partir
de l’exemple de vendeurs de glace sur une plage l’impact de leur installation sur la fixation du
prix.
La différenciation verticale, étudiée en 1933 par E.Chamberlin, correspond à une situation où
les producteurs proposent des biens et services de qualité différente mais répondant au même
besoin. En différenciant leurs produits, les firmes se livrent à une concurrence pour partie hors
prix (rapidité des services de livraison, qualité du service après vente et du produit, innova-
tion…). Enfin il faut préciser qu’en situation de concurrence monopolistique, l’entreprise
ignore souvent les conséquences de sa stratégie sur les autres entreprises, notamment quand
elles sont nombreuses. En effet, chaque firme est confrontée à une demande qui décroît
comme si elle était en situation de monopole. Ainsi, si elle élève son prix alors que celui de
ses concurrentes est maintenu constant, elle va perdre une partie de sa clientèle. Par contre si
elle décide de réduire son prix alors que celui des autres producteurs ne bouge pas, elle va
détourner une partie de la clientèle à son profit.
Si en situation de concurrence pure et parfaite, le prix est considéré comme une donnée pour
la firme, en concurrence monopolistique celle-ci dispose d’un pouvoir de fixation simultané
du prix et de la quantité. Elle vend moins et plus cher car les consommateurs sont prêts à
payer plus pour se procurer un produit différentié.
II-3-3 L’oligopole : C’est une forme de marché caractérisée par un nombre réduit
d’entreprises qui contrôlent la totalité de l’offre. Aucun producteur ne peut décider du volume
de production réalisé par sa firme sans tenir compte de la réaction que sa décision entraîne
chez ses concurrents. Les entreprises doivent donc adopter un comportement de type straté-
gique qui peut se traduire par un oligopole d’entente ou un oligopole de combat. Dans le cas
de l’oligopole d’entente, les entreprises fixent ensemble le prix de vente ou les quantités
échangées et forment un cartel. Comme elles peuvent se livrer à une guerre des prix pour ac-
6
Harold Hotelling (1895 -1973) statisticien et économiste théoricien
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quérir des parts de marché : c’est l’oligopole de combat. Dans ce cas les décisions prises per-
mettent rarement d’atteindre une situation optimale, c’est l’intérêt de l’apport de la théorie des
jeux.
La théorie des jeux est une approche mathématique de problèmes de stratégie tels qu’on en
trouve en économie. Elle examine les états où les choix de deux protagonistes ont des consé-
quences pour l’un comme pour l’autre. Cette théorie montre comment des individus rationnels
maximisent leur satisfaction dans le cadre de stratégies et comment cette maximisation indi-
viduelle ne conduit pas toujours à l’optimum collectif.
L’exemple le plus célèbre de la théorie des jeux est celui du ″dilemme du prisonnier″ proposé
par A.W.Tucker7 en 1950.
Le dilemme du prisonnier de A.W.Tucker : il caractérise les situations où deux firmes au-
raient intérêt à coopérer, mais où les incitations à trahir sont si fortes que la coopération n’est
jamais adoptée par un joueur rationnel lorsque le jeu n’est joué qu’une fois.
Ce dilemme décrit la situation de deux suspects complices d’un délit. Faute de preuve, le juge
va les interroger séparément en leur proposant les règles suivantes :
- Si les deux nient, la peine sera minimale, faute d’éléments au dossier (1 an de prison)
- S’ils avouent tous les deux, ils seront jugés mais bénéficient d’une peine plus légère
car ils ont avoué (8 ans au lieu de 10 ans)
- Si l’un des deux prisonniers se dénonce et l’autre nie, celui qui aura avoué bénéficie de
la clémence du tribunal et sera remis en liberté alors que l’autre sera condamné à la
peine maximale (10 ans).
7
Albert William Tucker (1905-1995), mathématicien Canadien qui a fait d'importantes contributions à la
topologie , la théorie des jeux et la programmation non linéaire
Suspect N°1
Avoue Nie
Avoue (8,8) (0,10)
Suspect N°2 Nie (10,0) (1,1)
En fait, chacun des prisonniers adopte une stratégie dominante qui conduit, inélucta-
blement, à la solution qui est la pire pour les deux. Le prisonnier n°2 ne sait pas ce
que ″l’autre″ va faire, mais compte tenu de la matrice du jeu, il a toujours intérêt à
choisir la stratégie consistant à ″avouer″ (8 années de prison sont préférables à 10 et
0 à 1). Il en va de même pour le prisonnier n°1, ce qui fait que les deux prisonniers
sont conduits, automatiquement (sous les hypothèses retenues) à la solution qui est
la pire pour tous les deux, puisqu’elle totalise 16 ans de prison. La recherche de
l’intérêt individuel ne permet pas toujours d’atteindre l’optimum collectif.
Le dilemme du prisonnier peut être appliqué à l’économie et permet de comprendre
pourquoi certaines décisions semblent contraires à l’intérêt général.
Application du dilemme du prisonnier au cas de l’oligopole : soient deux entre-
prises A et B qui se partagent le marché. Les prix et les profits dépendent du niveau
de la production sur le marché. Pour vendre une plus grande quantité de produits, les
entreprises doivent baisser les prix, ce qui érode les profits. Considérons que chaque
entreprise doit choisir entre un niveau élevé et un niveau faible de production et que
chacune d’entre elles prend sa décision sans coopération avec l’autre.
Dans la matrice des gains du dilemme de l’oligopole qui suit, le chiffre de gauche
concerne le profit attendu de l’entreprise A, et le nombre de droite, celui de
l’entreprise B
Entreprise B
Production faible Production forte
Production faible (10,10) (2,12)
Entreprise A Production forte (12,2) (5,5)
La stratégie ″production forte″ est une stratégie dominante, car quel que soit le choix de
l’entreprise B (production forte ou production faible), l’entreprise A fait un profit plus élevé
(12 vaut mieux que 10 et 5 est préférable à 2), et il en va de même pour B. Les deux firmes
choisissant une production forte, leur profit respectif est de 5, ce qui est une solution sous-
optimale. Une entente leur aurait permis d’opter toutes les deux pour un faible niveau de pro-
duction et de réaliser chacune un profit de 10.
Conclusion
L’activité économique contemporaine est marquée par la présence de marchés de plus en plus
oligopolistiques. Cette orientation est le résultat du phénomène de concentration des firmes.
Avec l’ouverture des marchés et l’internationalisation de la production, la concurrence de-
vient ardue. En effet, seules quelques firmes parviennent à résister et à dominer le marché
mondial. Il s’agit de firmes de grande taille. Ainsi, on assiste à un développement du phéno-
mène de concentration de marché qui a tendance à se rapprocher progressivement de la struc-
ture de marché oligopolistique.
Il en découle que plus le niveau de concentration d’un marché est élevé plus les risques
d’entente sont forts et la concurrence entre les offreurs s’affaiblit.