Corrigé d’analyse fonctionnelle
TD no 10
Théorie spectrale — Transformée de Fourier
Séance du 18 avril 2017
Solution 1. Échauffement
1. Comme A est de mesure finie, 1A ∈ L2 donc 1 ” 2
A ∈ L par Plancherel. Par contre, si
1”A ∈ L1 , comme on a aussi 1A ∈ L1 , la formule d’inversion de Fourier s’appliquerait, et
on aurait Z
1A (x) = 1”A (ξ)e2iπx·ξ dξ, ∀x ∈ Rd .
Rd
En particulier, d’après le théorème de convergence dominée, 1A ∈ C 0 (Rd ), ce qui est
absurde.
2. En prenant la transformée de Fourier de l’égalité f ∗ g = 0, on trouve fˆĝ = 0. Il suffit
donc de prendre f0 , g0 ∈ C ∞ (Rd ) à support compact, avec supp(f0 ) et supp(g0 ) disjoints,
et de poser f = F −1 f0 , g = F −1 g0 . Ce sont bien des éléments de S(Rd ), puisque F réalise
un isomorphisme sur l’espace de Schwartz.
Si on suppose de plus que les supports de f et g sont compacts, alors fˆ et ĝ sont des
fonctions analytiques (sur Cd ). En effet,
Z
fˆ(z) = f (x)e−2iπx·z dx
Rd
est bien défini quel que soit z ∈ Cd , et différentiable (d’après les théorèmes usuels). Comme
les zéros de fˆ et de ĝ sont alors isolés, ceux de fˆĝ le sont également. Ainsi fˆĝ n’est pas
identiquement nul. Par l’inversion de Fourier, on voit que f ∗ g 6= 0.
Solution 2. Rayon spectral
1. C’est un exercice classique. Posons ` := inf n ann , et supposons ` > −∞ pour simplifier.
Soit ε > 0 et N ∈ N tel que aNN ≤ `+ε. Si n N , on peut faire la division euclidienne de n
par N , et l’on trouve n = qN + r, avec q ≥ 1, et 0 ≤ r < N . En particulier, an ≤ qaN + ar .
On a donc
an qaN + ar aN ar
≤ ≤ + ≤ 2ε,
n qN + r N qN
si q est assez grand (i.e. si n ≥ ε−1 maxj=0,...,N −1 |aj |). Cela prouve que an
n → `.
2. On suppose que T n’est pas nilpotent (i.e. Tj
6= 0 pour tout j), sans quoi le résultat
est évident. Posons bn := kT k. Pour tout n, m ≥ 0, bn+m = kT n+m k ≤ kT n kkT m k =
n
bn bm . On pose alors an = log bn , qui est bien définie, et forme une suite sous-additive.
1/n
Notons ` = limn→+∞ ann . Alors exp( ann ) = bn = kT n k1/n converge vers e` .
3. Si X est un Hilbert, et si T est hilbertien (c’est-à-dire T ∗ = T ), alors
kT k2 = sup kT xk2 = sup hT ∗ T x, xi ≤ kT ∗ T k = kT 2 k.
x∈X x∈X
kxk=1 kxk=1
Joseph Thirouin 1 DMA 2016/2017
Par ailleurs, on a bien sûr kT 2 k ≤ kT k2 , puisque k · k est une norme d’algèbre, donc
lorsque T est hermitien, kT 2 k = kT k2 . Dès lors, si on considère la sous-suite {b2n } (avec
les notations de la question précédente), on voit que celle-ci est constante, égale à kT k.
Cela implique donc que r(T ) = kT k.
4. Supposons que la série donnée par Rz (T ) converge absolument. Alors Rz (T ) définit
un élément de L(X). De plus, ( z1 I − T )Rz (T ) = I et Rz (T )( z1 I − T ) = I, ce qui prouve
que 1/z ∈/ Sp(T ). Or la formule qui définit Rz (T ) est une série entière, donc son rayon de
convergence R est donné par la formule de d’Alembert, et vérifie
1 1
= lim sup kT k k k−1 = r(T ).
R k→+∞
Cela prouve que maxλ∈Sp(T ) |λ| ≤ r(T ), et si l’inégalité était stricte, par la propriété
d’unique continuation holomorphe, la formule donnant Rz (T ) resterait valable au-delà de
|z| = 1/r(T ), ce qui contredit la définition du rayon de convergence. On a donc r(T ) =
maxλ∈Sp(T ) |λ|.
Solution 3. Le calcul fonctionnel définit une application isométrique
1. Soit µ ∈ Sp(P (A)). Décomposons le polynôme P − µ en produit de facteurs irréduc-
tibles, soit P (X) − µ = j (X − αj ). En évaluant cette égalité en A, on voit que nécessai-
Q
rement, l’un des αj est dans Sp(A), sinon le produit de droite est inversible. Notons-le αj0 .
On a donc P (αj0 ) − µ = 0, c’est-à-dire µ ∈ P (Sp(A)).
Réciproquement, si λ ∈ Sp(A), alors écrivons P (X) − P (λ) = (X − äλ) · j (X − κj ),
Q
ÄQ
de sorte que P (A) − P (λ)I = (A − λI) j (A − κj I) = j (A − κj I) (A − λI). Cela
Q
prouve que P (A) − P (λ)I ne peut pas être inversible, i.e. que P (λ) ∈ Sp(P (A)). Ainsi
Sp(P (A)) = P (Sp(A)).
2. On sait que A est hermitien, donc pour tout polynôme P , on a (P (A))∗ = P̄ (A).
Ainsi
kP (A)k2L(H) = k(P (A))∗ P (A)kL(H) = k(P P̄ )(A)kL(H) ,
où la dernière égalité provient de ce que P 7→ P (A) est un morphisme d’algèbres. Or
d’après l’exercice précédent,
k(P P̄ )(A)kL(H) = r((P P̄ )(A))
= max |µ|
µ∈Sp((P P̄ )(A))
= max |(P P̄ )(λ)|
λ∈Sp(A)
= k|P |2 kL∞ (Sp(A)) = kP k2L∞ (Sp(A)) ,
ce qu’il fallait démontrer. Or Sp(A) est compact. Donc d’après le théorème de Weierstrass,
l’ensemble des polynômes sur Sp(A) est dense dans l’ensemble des fonctions continues sur
Sp(A), pour la norme uniforme. L’isométrie P 7→ P (A) se prolonge ainsi de manière unique
en une application ( 0
C (Sp(A)) −→ L(H)
f 7−→ f (A)
également isométrique.
Joseph Thirouin 2 DMA 2016/2017
Solution 4. Translations
1. Si g ∈ V ⊥ , alors pour tout a ∈ R fixé,
R
R g(t)τa f (t)dt = 0, où τa f : t 7→ f (t − a). Or
Z
τd
a f (ξ) = f (x − a)e−ixξ dx = e−iaξ fˆ(ξ),
R
car cela est vrai pour les fonctions de S(R), puis pour toute fonction de L2 en utilisant la
continuité de τa et de la transformée de Fourier. À présent, par Plancherel,
Z Z Z
0= g(t)τa f (t)dt = ĝ(ξ)τd
a f (ξ)dξ = ĝ(ξ)fˆ(ξ)eiaξ dξ,
R R R
ce qui est vrai pour tout a. De la sorte, si l’on pose F := ĝ fˆ, on a F ∈ L1 (R) et F̂ ≡ 0.
Donc la formule d’inversion s’applique, et donc F ≡ 0. Pour prouver la réciproque, il suffit
de remonter les calculs.
2. V est dense dans L2 si et seulement si on ne peut trouver une fonction ĝ ∈ L2 non
nulle satisfaisant la condition de la question précédente. Si l’ensemble des zéros de fˆ est
de mesure non nulle, on peut trouver R > 0 tel que la mesure de [−R, R] ∩ {fˆ = 0} =: ZR
soit strictement positive. Alors on peut poser g = F −1 (1ZR ) ∈ L2 (R), de sorte que g 6= 0
et g ∈ V ⊥ . Réciproquement, si fˆ est non nulle en dehors d’un ensemble de mesure nulle,
g ∈ V ⊥ implique nécessairement ĝ ≡ 0, soit g ≡ 0.
Solution 5. Théorème de Bochner
1. Il est facile de vérifier que f (0) = µ(Rd ), que f est continue, et que f (−ξ) = f (ξ),
puisque µ est réelle et positive. On calcule ensuite
n n Z
eix·(ξj −ξk ) zj zk µ(dx)
X X
f (ξj − ξk )zj zk =
d
j,k=1 j,k=1 R
Ñ é
n n
Z !
X X
ix·ξj
= zj e zk eix·ξk µ(dx)
Rd j=1 k=1
2
Z n
X
ix.ξj
= zj e µ(dx) ≥ 0.
Rd j=1
2. Soit y ∈ Rd . On applique la propriété selon laquelle f est semi-définie positive, avec
ξ1 = y, ξ2 = 0, z2 = 1 et z1 ∈ C tel que |z1 | = 1. On a
2f (0) + f (y)z1 + f (−y)z¯1 ≥ 0.
On choisit z1 tel que z1 f (y) = −|f (y)| pour obtenir l’inégalité souhaitée.
√
3. Si ψ ∈ S est strictement positive, ψ = θ2 avec θ = ψ ∈ S, donc
Z ZZ ZZ
`(ψ) = f (ξ)θc2 (ξ)dξ = f (ξ)θ̂(η)θ̂(ξ − η)dηdξ = f (ξ − η)θ̂(ξ)θ̂(η)dηdξ ≥ 0,
Rd Rd Rd
où l’on a utilisé que θ̂(ξ − η) = θ̂(η − ξ). La positivité découle de ce qu’on peut écrire
l’intégrale ci-dessus comme une limite de sommes de Riemann, toutes positives.
Joseph Thirouin 3 DMA 2016/2017
4. Soit φ ∈ S. Comme φ est à décroissance rapide, il existe R > 0 tel que pour |x| ≥ R,
on a |φ(x)| ≤ ε+kφk L∞
(1+|x|4 )d
. On peut ensuite trouver λ > 0 assez petit tel que
ε + kφkL∞
kφkL∞ ≤ .
(1 + λR4 )d
De la sorte, si x ∈ Rd ,
— ou bien ∀1 ≤ j ≤ d, |xj | ≤ R, et alors
d
ε + kφkL∞ Y 1
|φ(x)| ≤ kφkL∞ ≤ ≤ (ε + kφkL∞) = (ε + kφkL∞ )Kλ (x).
4
(1 + λR )d
j=1
1 + λx4j
— ou bien l’une des composantes de x est plus grande que R, et alors |x| ≥ R, d’où
d
ε + kφkL∞ Y 1
|φ(x)| ≤ ≤ (ε + kφk L∞ ) 4,
(1 + |x|4 )d j=1
1 + λx j
car pour chaque j, 1 + λx4j ≤ 1 + λ|x|4 ≤ 1 + |x|4 .
5. Commençons par remarquer que pour tout λ > 0, Kλ est une fonction C ∞ dont les
dérivées décroissent plus vite que Kλ , donc K̂λ décroit plus vite que tout polynôme. En
particulier, K̂λ ∈ L1 .
Ensuite, on veut appliquer la question 3 à ψε := (ε + kφkL∞ )Kλ − φ. C’est possible,
√ car
quitte à remplacer ε par 2ε, on peut supposer que ψε > 0. D’autre part, θε := ψε ∈ L1 ,
donc θ̂ε est une fonction continue, à décroissance rapide, ce qui fait que l’on peut appliquer
le même raisonnement de somme de Riemann à θε , et trouver que `(ψε ) ≥ 0.
Ainsi l’on trouve que
Z
`(φ) ≤ (ε + kφkL∞ )`(Kλ ) = (ε + kφkL∞ ) K̂λ (ξ)f (ξ)dξ.
Rd
6. On note que Kλ (x) = K1 (λ1/4 x). Donc pour tout ξ ∈ Rd ,
Ç å
1 ξ
K̂λ (ξ) = d K̂1 1 .
λ4 λ4
On a donc, quand λ tend vers 0,
Z Z
1
K̂λ (ξ)f (ξ)dξ = K̂1 (ξ)f (λ 4 ξ)dξ −→ f (0),
Rd Rd
d’après le théorème de convergence dominée. On trouve donc
|`(φ)| ≤ ε + kφkL∞ ,
et en faisant tendre ε vers 0, on obtient |`(φ)| ≤ kφkL∞ . D’après le théorème de Riesz, on
peut donc prolonger ` en une mesure de probabilité µ positive. Au sens des distributions,
on a fˆ = µ donc Z
f= eiξ·x µ(dx),
Rd
en prenant par exemple φ(x) = eix·ξ , qui satisfait φ̂ = δξ , dans l’égalité
Z Z
φ̂(ξ)f (ξ)dξ = φ(x)µ(dx).
Rd Rd
Joseph Thirouin 4 DMA 2016/2017