Cours d’Economie de la Santé
CHAPITRE IV – LE MARCHE DE LA SANTE.
Introduction
A – La mesure de l’efficience du système de santé
B – Les inégalités de santé ou la recherche de l’équité.
C – Quelle gouvernance pour un marché de la santé productif ?
Conclusion
Introduction
Le poids économique du secteur de la santé s’accroît considérablement. En cinquante ans, la
part du PIB consacrée aux dépenses de santé a presque triplé. Ce secteur, fortement créateur
d’emplois, représente actuellement un pourcentage assez élevé (environ 15%) de la
population active. Si ce poids économique justifie à lui seul l’intérêt des économistes, ce sont
sans doute (surtout) les spécificités de ce marché et les enjeux de politiques publiques qui ont
motivé l’émergence puis l’essor de l’économie de la santé.
Les économistes de la santé, abordent trois questions essentielles (centrales) pour le marché
de la santé :
- la mesure de son efficience,
- les inégalités et la recherche de l’équité,
- la gouvernance du système de soins.
Si l’impact de l’état de santé des populations sur la croissance économique n’est plus à
démontrer, l’efficacité relative des moyens d’action reste en revanche à interroger. C’est ce
que démontrent les économistes de la santé en soulignant les limites respectives des politiques
horizontales d’accès aux soins primaires pour tous et des politiques verticales ciblées sur les
principales maladies infectieuses (sida, malaria, tuberculose). Les économistes prônent en
conclusion de dépasser les faux débats en se fondant sur une évaluation rigoureuse des effets
de ces politiques. "Diagonaliser" les programmes verticaux ou cibler les politiques de santé
sur les populations les plus pauvres, serait ainsi la solution d’une plus grande efficacité des
programmes d’aide au développement.
L’interrogation du lien entre l’individuel et le collectif, entre les objectifs de santé publique et
les moyens de les atteindre, entre l’évaluation des politiques publiques et les mesures
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d’actions sur les comportements individuels, est l’objectif primordial à atteindre ; qu’il
s’agisse de la mesure de l’efficience du système de santé, de son équité ou de sa gouvernance.
Ainsi explore-t-on ici, sous un angle microéconomique, les grands enjeux du système de
santé.
A - Mesurer l’efficience du Système de Santé.
Caractérisé par une forte incertitude et un financement largement socialisé, le marché de la
santé doit en effet faire la preuve de son efficience, ce qui exige une mesure objectivée de son
produit final, à savoir :
– l’amélioration de l’état de santé,
– des outils d’aide à la décision,
- et des méthodes d’évaluation des bénéfices attendus.
Mesurer les bénéfices d’une action de santé exige aussi souvent de mesurer le prix de la vie
humaine, vie sauvée ou allongée grâce à l’intervention publique.
B - Les Inégalités de santé ou la Recherche de l’équité.
L’équité est une question traditionnelle pour les économistes de la santé, à la fois sur le plan
conceptuel que sur le plan méthodologique. Le concept d’équité relève en amont des
considérations éthiques mais renvoie aussi à des difficultés méthodologiques dans la mesure
des inégalités. La lutte contre les inégalités de santé ne peut donc se soustraire à la
compréhension intelligible des différentes étapes de construction de ces outils de mesure, en
particulier en termes d’inégalités des chances.
L’équité est étudiée sous un angle nouveau, celui des répercussions des inégalités de santé sur
les comportements et les trajectoires individuelles.
Trois aspects de cette question sont explorés : l’interdépendance entre état de santé et
parcours professionnel, l’identification des populations fragilisées et la compréhension des
comportements individuels de recours à l’assurance maladie.
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- La question du lien entre état de santé et travail constitue l’une des thématiques nouvelles
étudiées en économie de la santé. En effet, les inégalités de santé se traduisent par des
inégalités sur le marché du travail par le biais par exemple d’effets de sélection des emplois
(sur le marché du travail) et peuvent expliquer pour partie des trajectoires professionnelles et
des conditions de passage à la retraite différentes (pénibilité au travail).
- Les enjeux de santé publique concernent aujourd’hui très largement les populations en
situation précaire. Améliorer leur état de santé exige alors de mieux en connaître les
déterminants. Les disparités d’état de santé déclaré semblent à long terme relever des
conditions de vie difficile mais aussi des caractéristiques économiques et sanitaires propres à
ces populations.
- Les problèmes d’équité se posent également en termes de couverture complémentaire
(assurance maladie complémentaire), celle-ci prenant une place désormais considérable dans
le système de protection sociale. L’accès aux soins pourrait ainsi être fortement limité pour les
populations les plus modestes si le montant de cette couverture augmentait.
C - Quelle Gouvernance pour un marché de la santé productif ?
Si la lutte contre les inégalités de santé est un objectif de politique publique (stratégie), elle
peut aussi conduire à des gains d’efficacité du système de santé. Encore faut-il que la
gouvernance du système soit elle-même efficace.
Les outils de cette gouvernance ont été profondément renouvelés au cours des deux dernières
décennies. Ils s’inscrivent largement dans une logique d’incitations à l’hôpital, avec la
généralisation du paiement prospectif et, en médecine libérale avec l’introduction de
paiements incitatifs pour influencer les comportements et les pratiques de soins.
Au niveau mondial, la question de la gouvernance des systèmes de santé se pose plus sur le
plan organisationnel. Des études montrent que l’ampleur des inégalités de recours aux soins
varie de manière attendue en fonction du partage des coûts entre la sphère publique et la
sphère privée, mais aussi de façon plus surprenante en fonction du rôle conféré au médecin
(généraliste, spécialiste) et à l’organisation des soins primaires.
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Il n’appartient pas à l’économiste de la santé de qualifier l’aspect social d’inefficient sans
raisons. Les arguments éthiques ou politiques et les autres arguments non économiques sont
complémentaires aux arguments économiques. Ils doivent être apportés et évalués non par les
économistes mais par des experts, notamment en éthique, en politique, en stratégie, etc.
En Conclusion,
L’orientation stratégique des groupes pharmaceutiques est déterminée par le marché. Il
faut remarquer que ces groupes profitent de l’accroissement des dépenses de santé et
notamment du vieillissement de la population. Si les groupes pharmaceutiques doivent
s’adapter à la montée en puissance des génériques, ils jouent (surfent) sur la vague de
l’automédication, en croissance dans tous les pays.
En ce qui concerne l’intégration de nouveaux médicaments arrivant sur le marché, il
faut se pencher sur la façon dont les médecins (prescripteurs) s’adaptent à l’évolution
pharmaceutique. On notera ici l’affrontement de deux logiques : celle recherchant l’efficience
coût/qualité par la diffusion des « bonnes pratiques » tant au niveau national qu’international,
et celle du marketing pharmaceutique (visiteurs médicaux ou délégués médicaux), utilisant de
nombreuses stratégies (pas toutes très honnêtes) pour conquérir le cœur des médecins, quelle
que soit l’efficacité du médicament, eu égard à ses coûts pour la collectivité dans un système
de santé national.
En réalité, ce sont les prescripteurs (médecins) qui sont les vrais détenteurs de la
responsabilité de freiner le coût de leurs prescriptions et l’Etat qui doit les contrôler. Les
groupes pharmaceutiques à travers leurs visiteurs médicaux ont donc intérêt à convaincre les
prescripteurs (médecins) lorsqu’ils découvrent de nouveaux produits moins coûteux.
Références Bibliographiques.
Le marché de la santé : efficience, équité et gouvernance de Thomas Barney & Sophie
Bejan, avril 2010.
Le marché des soins médicaux, Arrow, 1963.
Preston (1975), Wilkinson (1992) et Crozet (1997) cité dans introduction à l’économie
de la santé par Valérie Fargeon, 2ème édition, 2014.
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