Classer Les Hommes Pol 1998
Classer Les Hommes Pol 1998
«Ne pourrait-on rêver d’une démocratie scientifique, où le Parlement serait formé d’un
échantillonnage de citoyens reproduisant à l’échelle réduite, la structure exacte de la
nation ?»
Maurice Duverger, Les partis politiques, Paris, Seuil, coll. Points, 1976, p. 234.
(1ère éd. 1951).
«It is said to be necessary, that all classes of citizens should have some of their own number in
the representative body, in order that their feelings and interests may be the better understood
and attented to. But we have seen that this will never happen under any arrangement that
leaves the votes of the people free. Where this is the case, the representative body, with too few
exceptions to have any influence on the spirit of the government, will be composed of
landholders, merchants, and men of the learned professions. But where is the danger that the
interests and feelings of the different classes of citizens will not be understood or attended to
by there three descriptions of men ?»
Alexander Hamilton, The Federalist, n°35, 1787.
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Frédéric Sawicki, « Classer les hommes politiques », in Offerlé (Michel), dir., La profession politique, XIXe-XXe siècle, Paris,
Belin, coll. «Socio-histoires», 1999, p. 135-170.
Le «retard» français
Les enquêtes sur les propriétés sociales des hommes politiques qui font
aujourd’hui partie du paysage scientifique mais aussi administratif, ont connu en
France un développement tardif et de faible ampleur par comparaison avec les
principaux pays occidentaux. L’administration, mais aussi les partis politiques, ont
même précédé les chercheurs sur ce terrain. Alors que le ministère de l’Intérieur
publie depuis 1946 des statistiques sur l’âge et la profession des candidats aux
élections, ce n’est en effet qu’en 1955 que paraît la première analyse quantitative
portant sur les propriétés sociales d’hommes politiques français, en grande partie
d’ailleurs grâce aux données collectées par l’administration. L’étude des candidats et
des élus à l’élection législative de 1951 que réalise Mattéi Dogan (1955)1 n’est
pourtant pas au sens strict la première. Une enquête sur les ministres français de la
période 1871-1930 a été publiée avant-guerre (Heinberg, 1931) ; menée par un
chercheur américain et publiée uniquement en anglais, elle restera cependant ignorée
en France2. Le décalage de vingt ans entre l’étude de M. Dogan et ce dernier article
n’est pas le fruit du hasard, car si l’étude quantitative de John J. Heinberg sur des
hommes politiques français fait exception, elle reflète une préoccupation déjà très
répandue avant-guerre chez les politistes et historiens anglo-saxons3.
Les premières études sociographiques sur les parlementaires et les ministres
britanniques sont entreprises dès la fin des années 20 (Laski, 1928 ; Greaves, 1929 ;
Thomas, 1937 ; Ross, 1943). En outre, à la différence des premières recherches
américaines sur les membres du Congrès, lancées pour leur part au cours des années
30 (Anderson, 1935 ; Hyneman, 1940 ; Smith et Brockway, 1940 ; McKinney, 1942)
et qui sont essentiellement descriptives et synchroniques, les études britanniques se
situent d’emblée dans une perspective historique visant à comprendre les
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Frédéric Sawicki, « Classer les hommes politiques », in Offerlé (Michel), dir., La profession politique, XIXe-XXe siècle, Paris,
Belin, coll. «Socio-histoires», 1999, p. 135-170.
4. Il est inutile de revenir en détail sur cette histoire qui commence désormais à être bien connue grâce
aux contributions de P. Favre (1985) et de L. Blondiaux (1994)
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Frédéric Sawicki, « Classer les hommes politiques », in Offerlé (Michel), dir., La profession politique, XIXe-XXe siècle, Paris,
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Annales pour la longue durée, l’histoire matérielle puis l’histoire des mentalités
collectives, et leur référence plus ou moins appuyée et affichée au marxisme, n’ont
pendant longtemps guère encouragé l’étude des dirigeants et des institutions
politiques5. Le livre de Jean Lhomme, La grande bourgeoisie au pouvoir (1830-
1880), paru en 1960, qui a longtemps fait figure d’ouvrage de référence sur les élites
du XIXe siècle, par la très faible place qu’il accorde aux dirigeants politiques, illustre
bien les effets de ce paradigme, tout comme le développement très récent et encore
très lacunaire de l’étude prosopographique du personnel politique de la IIIe
République6 et des dirigeants du mouvement ouvrier.
Mais les activités politiques n’ont pas été délaissées par tous les historiens de
l’après-guerre. Dans les années 60, les premières grandes monographies régionales
sur le XIXe siècle et le début du XXe siècle, telles que celles de Georges Dupeux
(1962), Philippe Vigier (1963) ou encore Pierre Barral (1962), même si elles visent
avant tout à appréhender de façon globale la société, abordent les élections, les
campagnes électorales, la presse politique, les rapports entre les élus et
l’administration et la gestion des affaires locales. Aucun de ces historiens
n’entreprend pourtant de classer, fût-ce grossièrement, les professions des maires,
conseillers généraux ou députés du territoire étudié7. Ce travail leur a
vraisemblablement paru superflu. À lire ces ouvrages, la France rurale apparaît
finalement, au moins jusqu’à l’avènement de la République, comme dominée par des
5. Signalons toutefois, pour la période qui précède le développement de l’«École des Annales»,
l’existence d’un article d’A. Chaboseau sur «Les constituants de 1848», paru en trois fois dans les
Annales de la Révolution de 1848 en 1910 et 1911. M. Agulhon (1975, p. 28) souligne l’aspect peu
satisfaisant de cet article sans lendemain (voir cependant Bouillon, 1956) qui ne distingue pas «entre
les qualités professionnelles strictes telles que “professeur” ou “médecin”, et les qualités non
professionnelles telles que “poète” ou “savant”, le niveau de fortune n’est pas indiqué, ce qui ne
permet pas de séparer dans chaque branche économique le grand patron de l’artisan...»
6. Ce développement peut être daté du milieu des années 70. Outre l’étude coordonnée par L. Girard
sur la Chambre des députés de 1837 déjà citée (1976), les thèses de J. Estèbe (1982) sur les ministres
de la période 1871-1914 et de C. Charle (1980 et 1987) sur les élites économiques, intellectuelles et
administratives, marquent un tournant. Depuis, M. Agulhon (1986) a coordonné une grande étude sur
les maires du Consulat à nos jours, et J.-M. Mayeur et A. Corbin (1995) ont étudié les «immortels» du
Sénat.
7. L’attitude des historiens de la Révolution française est au même moment sensiblement différente,
car la question de l’origine sociale des révolutionnaires est au cœur des débats sur le caractère
bourgeois ou non de la Révolution et sur le caractère populaire ou non de la sans-culotterie. Sur ce
dernier point on lira avec profit la prudente mais rigoureuse analyse sociographique des sans-culottes
parisiens menée par A. Soboul (1968, chap. 1, 1ère éd. 1958).
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8. Tout récemment É. Phélippeau (1995) a montré combien pouvait être lourde de contresens la notion
de notable appliquée aux entrepreneurs politiques de la période républicaine issus de la noblesse. On
trouvera dans le récent ouvrage de l’historien allemand H.-G. Haupt (1993, chap. 2), une intéressante
mise au point sur les élites au XIXe siècle et sur l’évolution de leur recrutement.
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9. Les problèmes rencontrés de ce point de vue par les historiens du mouvement ouvrier sont encore
plus aigus. L’éclatement du mouvement ouvrier français et la faible structuration des partis et des
syndicats le composant ont sans doute privé les historiens d’un matériel archivistique aisément
quantifiable. Dès lors ce n’est pas totalement un hasard si c’est C. Willard, historien du guesdisme, qui
est un des tout premiers à entreprendre une étude sociographique de militants de quelques sections ou
fédérations du POF (1965). Mais même dans le cas du POF beaucoup des chiffres fournis par C.
Willard, faute de listes de référence, ne sont souvent qu’indicatifs. On comprend ainsi mieux pourquoi
les historiens du mouvement ouvrier réunis par J. Maitron, parallèlement à un souci «militant», ont
d’abord concentré leur effort sur le recensement de ces «élites obscures». Malgré la grande
hétérogénéité des informations recueillies, les 110 000 notices du Dictionnaire biographique du
mouvement ouvrier représentent aujourd’hui une véritable mine pour l’analyse quantifiée de telle ou
telle sous-population, aujourd’hui en plein développement.
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10. Le tournant des années 1830 est également confirmé par les travaux récents de Y. Le Marec
(1996).
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deux cas, un même regard fonctionnaliste est posé sur l’État et les institutions
politiques (Badie et Birnbaum, 1979). Quelles que soient leurs propriétés sociales,
les hommes politiques et les fonctionnaires apparaissent condamnés à favoriser le
maintien de l’harmonie sociale ou celui de l’hégémonie capitaliste. Dans le
marxisme français des années 60, dominée par la vulgate althussérienne, même une
bonne dose d’autonomie du politique est considérée comme fonctionnelle, la classe
capitaliste ayant intérêt à rester dans l’ombre et à peser en coulisses sur les
gouvernants. Les «appareils idéologiques d’État» (Althusser), le «capitalisme
monopoliste d’État» (Boccara) et l’«école capitaliste» (Baudelot et Establet)
remplissent ainsi leur fonction d’entretien de l’ordre établi et de modernisation de la
domination capitaliste, indépendamment des propriétés sociales des agents chargés
de mettre en œuvre ces politiques12. Tout au plus une certaine autonomie est-elle
reconnue par les sociologues urbains aux «scènes politiques» locales, mais comme
formes de résistance aux tendances profondes du capitalisme monopoliste (Castells
et Godard, 1974). Quant aux partis politiques, il ne font qu’exprimer les
antagonismes entre les classes ou les fractions de classe. Il faudra ainsi attendre que
le déclin du PCF ébranle cette évidence pour que les historiens et les sociologues de
tradition marxiste en viennent à s’intéresser à la diversité des usages sociaux du
communisme. À l’influence larvée du durkheimisme qui, malgré sa perte d’audience
après la guerre, a contribué à faire de l’éducation et de la religion — plutôt que du
politique — les terrains de prédilection de la sociologie française, et à l’influence
plus directe du marxisme, il faut bien sûr ajouter celle du structuralisme foucaldien et
du systémisme croziérien qui aboutissent, chacun à leur manière, à faire «dépérir
l’État» (Jobert et Leca, 1980) et à diluer la spécificité du pouvoir politique, rendant
parfaitement secondaire l’étude des propriétés sociales des gouvernants.
Il faudra attendre les années 70 pour que la diffusion de l’œuvre de Max
Weber (Pollack, 1986) et l’importation notamment des travaux de Charles Wright
12. S’opposant en cela violemment à C. Wright Mills (1969) et R. Miliband (1973), N. Poulantzas
écrit que «la bureaucratie d’État, en tant que catégorie sociale relativement “unifiée”, est le “serviteur”
de la classe dominante, non pas en raison de ses origines de classe, d’ailleurs divergentes, ni en raison
de ses relations personnelles avec la classe dominante, mais en raison d’une unité interne qui lui vient
de sa fonction d’actualisation du rôle objectif de l’État : rôle qui, dans l’ensemble, répond aux intérêts
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Martin sur «les stratégies de reconversion» (1971) a également inspiré P. Birnbaum (1978, p. 20).
15. Une enquête semble également avoir été financée par l’Institut Hoover sur la France si l’on en
croit M. Clifford-Vaughan (1960, p. 321) sans que nous en ayons malheureusement trouvé trace.
16. Dès la fin des années 30, H. Gerth (1940) avait tenté une sociographie des membres et des
dirigeants du parti nazi qui constitue encore aujourd’hui l’une des principales références sur cette
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nombreuses études sur les élites démocratiques dont le pluralisme est alors souvent
présenté comme la caractéristique discriminante.
Mais les recherches sur le «social background» des hommes politiques
semblent également avoir été encouragées par des conjonctures politiques
caractérisées par la revendication par des acteurs politiques du monopole de la
représentation de certains groupes sociaux ou par la dénonciation de l’exclusion de
certaines catégories. Ainsi, on ne peut manquer d’être frappé par le fait qu’aucune
des études américaines de l’entre-deux-guerres ne comptabilise la présence des
femmes ou des Noirs aux postes politiques ; celles-ci se concentrent sur le poids des
différentes religions et nationalités. La question de l’intégration politique de
l’immigration européenne, alors au cœur des débats politiques, se retrouve dans les
préoccupations scientifiques des années 30-40 (McKinney, 1942), tandis que la
présence des Noirs ne commence à être mesurée qu’à partir des années 50
(Matthews, 1954) et celle des femmes qu’au cours des années 60. L’émergence de
ces études coïncidera avec le développement du mouvement des droits civiques
d’une part, et avec les revendications féministes d’autre part. Par comparaison, on
peut se demander si le caractère tardif de l’intégration politique des femmes en
France et l’absence de minorités nationales ou religieuses politiquement structurées
en tant que telles, ajoutés à l’existence du parti communiste encadrant non seulement
les ouvriers français mais aussi ceux d’origine étrangère, n’ont pas empêché que la
question de la représentation des minorités n’y devienne un enjeu politique majeur
(Manin, 1995) et qu’y soit remise en cause la conception classique de la
représentation17, freinant en cela l’incitation à dénoncer ses effets inégalitaires par le
biais des statistiques.
question.
17. Celle-ci a néanmoins fait l’objet de contestation au cours de la seconde moitié du XIXe siècle et
jusqu’à la disparition de l’anarcho-syndicalisme. Sur la dénonciation du suffrage universel par les
partis ouvriers et leur acceptation à partir de la fin du XIXe siècle (Rosanvallon, 1990, p. 382-390).
C’est d’ailleurs chez le géographe anarchiste Elisée Reclus (1902), qu’on a pu trouver pour la
première fois «un curieux diagramme» — lui-même emprunté à l’ouvrage d’un certain M. Demolins
sur la Supériorité des Anglo-saxons dont nous n’avons malheureusement pas pu trouver la référence
dans le catalogue de la Bibliothèque nationale — qui compare la structure de la population de la
France et du Royaume-Uni à celle de leur parlement respectif. Ce diagramme permet à Reclus de
dénoncer «combien la représentation dite “nationale” de la France correspond peu à la constitution
même de la société» (p. 201). Je remercie Jérôme Heurtaux pour m’avoir signalé ce texte.
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18. Elle s’est en effet déjà posée dans la seconde moitié du XIXe avant l’unification du mouvement
ouvrier comme l’a montré M. Offerlé (1984).
19. D’après M. Sadoun (1993, p. 106), une seule étude, restée confidentielle, a été réalisée dans
l’entre-deux guerres par les dirigeants de la SFIO sur leur «base». Elle a été menée auprès des lecteurs
du Populaire en 1928.
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montré depuis Bernard Pudal (1989), dans le PCF des années 30, c’est l’affichage
des qualités et des origines ouvrières des dirigeants qui atteste de la représentativité
sociale du parti.
Des données agrégées sont certes diffusées par le PCF en 1929 et en 1932
dans les rapports préparatoires aux Ve et VIe congrès du parti. Fondées sur des
calculs non exhaustifs ne respectant pas les règles minimiales de l’échantillonnage
(Kriegel, 1970, p. 269), elles semblent n’avoir qu’une fonction secondaire de
mobilisation et de contrôle interne. Elles n’occupent, dans la stratégie extérieure du
parti, qu’une place résiduelle au profit des chiffres concernant le nombre des cellules
d’entreprise et leurs effectifs qui, compte tenu de la difficulté à s’implanter dans les
usines, sont présentés comme les meilleurs indicateurs du dynamisme et des progrès
à venir du parti en milieu ouvrier. Il faudra attendre 1954 pour que le PCF recoure à
des sondages systématiques pour connaître et dénombrer les caractéristiques
sociologiques de ses adhérents (Plissonnier, 1954), précisément au moment où son
hégémonie sur la classe ouvrière, conquise entre 1936 et 1947, commence à être
contestée. Le succès grandissant des organisations ouvrières chrétiennes (JOC et
CFTC), la scission de la CGT, la difficulté à contrôler les grèves de 1948 et de 1953,
l’affirmation d’un gaullisme populaire et un certain repli électoral incitent les
dirigeants communistes à mobiliser toutes les ressources leur permettant de
démontrer qu’ils restent les meilleurs représentants de la classe ouvrière20. C’est
également dans ce contexte particulier de l’après-guerre que la SFIO engage trois
enquêtes auprès de ses adhérents et de ses cadres fédéraux en 1951, 1954 et 1963
(Rimbert, 1952 et 1955). Comme l’a montré M. Sadoun (1988), il s’agit pour le parti
d’attester un ancrage populaire que les résultats électoraux et l’affaiblissement des
liens avec le syndicalisme ouvrier n’autorisent plus. Un judicieux découpage des
20. Deux autres sondages seront réalisés en 1959 et 1966 auprès des militants, destinés à démontrer
que le parti est à l’écoute des jeunes, des femmes et qu’il reste un vrai parti ouvrier. Afin de masquer
la forte croissance des ouvriers de la fonction publique, l’enquête de 1966 fait disparaître les
fonctionnaires et les ouvriers des services publics en tant que tels pour les répartir dans deux grandes
catégories : les ouvriers et les employés. Les permanents n’apparaissent évidemment pas. La technique
du sondage auprès des adhérents ne sera plus utilisée par la suite au profit de l’étude des délégués de
congrès, population plus facile à constituer — dans tous les sens du terme — qui permet au PCF de
contrôler la production de son image sociale. Cf. le numéro spécial des Cahiers du communisme de
février-mars 1967, ainsi que Courtois (1986).
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reflètent-ils dans la composition des décideurs ? Les groupes sociaux les plus élevés
dans la hiérarchie sociale contrôlent-ils les rôles politiques ?»
Cette liste, qui n’épuise pas le sujet, aide à repérer les principales questions
qui ont dominé la sociologie politique française depuis les années 50. Les trois
premières, à savoir celles des effets du social background sur les politiques mises en
œuvre et du rapport entre la sous ou la sur-représentation de certains groupes sociaux
et leurs capacités à faire entendre leurs intérêts sur la scène politique, apparaissent
délaissées, comme si la réponse était évidente. La plupart des travaux tournent autour
des questions de : qui s’engage en politique ? les chances de réussite sont-elles
égales ? de quelle(s) classe(s) sont issus les hommes politiques ? en fonction de
quels principes se stratifie cette catégorie ?, même s’ils se distinguent par ailleurs en
fonction de la finesse et de l’étendue des facteurs de «réussite» pris en considération
(position sociale, niveau et type d’études, origine sociale, socialisation politique
familiale, mais aussi engagements collectifs préalables) et de leur volonté ou non
d’interpréter les différences dans les chances d’accès aux responsabilités politiques
comme l’expression de rapports de domination entre classes sociales. Autrement dit,
la question de la représentation politique des classes sociales est de manière plus ou
moins explicite au cœur de la plupart des études quantitatives françaises sur le
personnel politique, alors que les travaux américains privilégient davantage, comme
on va le voir, une approche en termes de sociologie des rôles professionnels.
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21. M. Dogan a publié en 1953 un premier article sur la stabilité du personnel parlementaire où il se
contentait d’étudier la durée des mandats et le taux de renouvellement des députés sans référence à
leur position sociale.
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22. Il est intéressant de comparer la perspective de P. Birnbaum avec celle adoptée au même moment
par E. Suleiman (1979) qui mêle, pour sa part, un point de vue élitiste et une perspective en termes de
rôles. Selon le chercheur américain, l’origine sociale compte moins que la formation commune dans
les grandes écoles, les intérêts de corps et la capacité des élites à s’organiser et à défendre leurs
intérêts. Cela l’amène à faire l’hypothèse qu’un changement d’origine sociale des élites n’a que peu de
chances d’entraîner un changement politique et institutionnel. Cette hypothèse s’oppose radicalement
à celle défendue par A. Darbel et D. Schnapper (1969, p. 103 et s.) qui soulignent avec vigueur
l’influence déterminante de l’origine sociale sur la manière dont les hauts fonctionnaires assument
leurs rôles. De son côté, C. Charle (1980) fait également un parallèle entre l’origine sociale des hauts
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qui accordent une place proportionnelle dans leurs instances gouvernantes à tous
ceux qu’ils prétendent représenter et que leur nature sociale peut être déduite des
propriétés sociales de leurs représentants. La généralisation du recours à des indices
de représentation socio-professionnelle ou la simple comparaison graphique de la
représentation des différentes classes ou fractions de classe au sein de l’électorat, des
candidats, des élus, des cabinets ministériels et des ministres, ou de celle des
adhérents, militants et dirigeants — lorsqu’il s’agit des partis politiques —, ainsi que
le regroupement des catégories en grandes «classes» ou «couches»23, peuvent être
interprétés comme les indices les plus fiables de cette tendance qui consiste à se
demander si les partis et les hommes politiques — et/ou les hauts fonctionnaires —
représentent des classes sociales. La mise en équivalence de la représentation
politique et de la représentation sociale permet ainsi de dénoncer les «distorsions» et
les «inégalités» dans la représentation des différents groupes sociaux au sein des
institutions politiques (gouvernement, cabinets ministériels, parlement, collectivités
territoriales, instances dirigeantes des partis politiques...), au nom des principes
démocratiques proclamés ou, dans le cas des partis politiques, de l’identité sociale
revendiquée. Les enquêtes sociographiques s’inscrivent ainsi, de manière plus ou
moins accusée, dans le débat politique, comme on a pu le montrer par ailleurs à
propos des études sur le parti socialiste des années 70, qui cherchent pour la plupart à
le situer dans l’espace des classes sociales (Sawicki, 1997, p. 9-10)
Tous les travaux français sur le personnel politique n’ont certes pas épousé
cette perspective «classiste». Les ouvrages de Roland Cayrol, Jean-Luc Parodi et
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Colette Ysmal sur Le député français (1973) et de Jacques Lagroye, Guy Lord, Lise
Mounier-Chazel et Jacques Palard sur Les militants politiques dans trois partis
français (1976), par exemple, sont caractérisés par une attention centrale portée à la
socialisation politique primaire et secondaire. Mais là aussi la question des effets des
formes spécifiques de socialisation sur les comportements et la perception des rôles
politiques endossés et celle de l’influence du statut et des savoir-faire professionnels
sur la professionnalisation politique ne sont soulevées que très marginalement.
Autrement dit, les effets de la socialisation primaire et secondaire — notamment
professionnelle — sur les formes d’exercice concret du métier politique sont
supposés et très rarement démontrés. De ce point de vue, les usages des études
quantitatives du social background aux États-Unis sont très différents de ce qu’ils
ont été jusqu’à ces derniers temps en France. L’examen, nécessairement rapide, des
études américaines les plus représentatives permet de mieux dégager les angles morts
des recherches françaises.
dirigeants de société).
24. Comme nous l’a fait remarquer L. Blondiaux, il en va de même des inégalités de compétence
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politique qui ne sont quasiment jamais analysées par les politistes américains comme l’expression de
clivages de classe.
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Si cette foi dans le pluralisme de la société américaine n’a guère été partagée
par tous les chercheurs, il est important de rappeler que c’est autant — sinon
davantage — sur les mécanismes de décision et de pouvoir que sur l’analyse
sociographique des élites, qu’ont porté les polémiques déclenchées par les
pluralistes. Même un auteur comme Charles Wright Mills (1969, 1ère éd. 1956),
particulièrement enclin à dénoncer la cohésion et la concentration de l’élite du
pouvoir et la fiction de la démocratie américaine, rappelle qu’il n’est pas possible de
«déduire l’orientation de la politique en partant uniquement de l’origine sociale et de
la carrière de ceux qui la font […] : 1. Les hommes haut placés peuvent très bien être
les représentants idéologiques des pauvres et des humbles ; 2. les hommes d’humbles
origines, qui se sont faits eux-mêmes à force d’intelligence, peuvent très bien se faire
les serviteurs enthousiastes des intérêts les plus matériels et les plus héréditaires...»
(p. 288)25. C’est ce qui conduit finalement Wright Mills à accorder une moindre
attention aux propriétés sociales des membres de l’élite qu’à ses rituels de cooptation
et ses formes de sociabilité. C’est ainsi en effet que se dissolvent les différences
sociales initiales et que sont intériorisées les codes et les valeurs au principe des
connivences qui lient chefs militaires, hauts responsables politiques et gros
industriels. De plus, compte tenu de sa conception du pouvoir, Wright Mills
s’intéresse moins aux hommes politiques professionnels — hommes de parti et
législateurs — et aux hauts fonctionnaires qu’à ceux qu’il appelle les «intrus»26, qui
font le lien entre les différents cercles composant l’élite. La seule analyse
quantitative précise qu’il consacre aux gouvernants se concentre en conséquence sur
l’évolution des filières d’accès au «directoire politique» — laquelle lui permet de
mettre en évidence la montée des intrus en provenance du monde des affaires27 —,
25. C’est un point de vue analogue qu’adoptait Aron (1960, p. 264), lorsqu’il écrivait que «des
bourgeois au pouvoir sont des bourgeois. Des prolétaires au pouvoir ne sont plus des prolétaires.»
26. «L’intrus politique est un homme qui a passé la majeure partie de sa vie active en dehors des
organisations strictement politiques et qui, selon le cas, s’y introduit, y entre en force ou fait des allées
et venues entre la politique et son autre activité. Sa formation professionnelle lui vient d’une
expérience non politique, sa carrière et ses relations appartiennent à d’autres cercles que ceux de la
politique, et en tant que type psychologique il est enraciné dans d’autres domaines institutionnels»
(Wright Mills, 1969, p. 232).
27. P. Birnbaum (1973) a montré combien l’hypothèse d’une invasion des fonctions administratives
par le secteur privé était fortement liée à la spécificité de l’administration Eisenhower. La tendance sur
une longue période semble au contraire se caractériser par un recrutement de plus en plus important
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Frédéric Sawicki, « Classer les hommes politiques », in Offerlé (Michel), dir., La profession politique, XIXe-XXe siècle, Paris,
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plutôt que sur les propriétés sociales des membres de l’élite politique signalées
simplement dans une (longue) note de bas de page (p. 233-235).
Compte tenu de la faible importance prise par la question du social
background des hommes politiques dans les grands débats des années 50-60 sur la
nature de la démocratie américaine, l’étude statistique du personnel politique va
surtout se focaliser sur les procédures proprement politiques de sélection, sur les
conceptions différentielles que les législateurs ont de leur rôle politique, et sur les
causes de l’affinité entre profession juridique et profession politique. L’étude de
Donald Matthews (1960) sur les sénateurs américains des années 50, est
emblématique de la place généralement occupée dans l’analyse par les variables
d’origine et de position sociales aux États-Unis. L’auteur ne s’y interroge que très
peu sur les différences de statut socio-professionnel entre démocrates et républicains.
S’il s’attarde en revanche davantage sur les inégalités d’accès au Sénat en fonction
du sexe, de la race, de la religion, de la nationalité et de la classe d’origine, en
calculant à chaque fois les indices de représentation correspondants, ces différences
sociales ne lui paraissent finalement pas plus importantes que celles qui tiennent au
mode d’accès et à la manière d’envisager la profession politique. C’est pourquoi il
s’emploie à lier les deux.
Quatre types d’hommes politiques sont ainsi distingués en fonction de la
combinaison de caractéristiques sociales assez grossières — qui rappellent
l’opposition que faisait déjà Thibaudet entre héritiers et boursiers — et des modalités
d’accès au poste. Il s’agit des «patriciens» qui possèdent à la fois un statut social
élevé hérité et un parcours politique accompli avant leur entrée au Sénat (7% du
total) ; des «amateurs» (34% du total, 43% des républicains, 25% des démocrates)
qui ont un parcours politique antérieur moins accompli et dont la grande prospérité a
été acquise par une grande réussite professionnelle ; des «professionnels» (55%), très
impliqués et expérimentés en politique avant d’être élus sénateurs, ils ont une
extraction sociale plus modeste et ne disposent pas d’une grande fortune (les avocats
sont ici plus nombreux que les hommes d’affaires) ; et des «agitateurs» (4%), sans
des hauts fonctionnaires au sein de l’administration civile, à l’exception il est vrai des départements
commercial et militaire.
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Belin, coll. «Socio-histoires», 1999, p. 135-170.
capital social et grande expérience politique, ils ont été élus très tôt au Sénat en vertu
de leurs qualités charismatiques. Ces types sont les catégories de base de l’enquête et
la principale clef d’analyse utilisée par Matthews tout au long de son étude. Ils
servent notamment à mesurer les différences dans les représentations du monde des
sénateurs, et dans leur perception et leur exercice du rôle sénatorial. Cette
classification, qu’on retrouve en partie dans l’étude de la carrière des parlementaires
britanniques menée par Philip Buck (1963), n’est pas sans rappeler les figures du
notable, de l’apparatchik, de l’homme de cabinet et du militant utilisées récemment
par Annie Collovald (1985) dans son étude des députés élus en 1981. À la différence
de D. Matthews, et conformément à la tradition de recherche française, cette dernière
s’emploie néanmoins à mettre en relation très directement, au moyen de l’analyse des
correspondances, ces catégories avec l’appartenance partisane et les indicateurs de
ressources sociales.
En s’attachant à étudier les mécanismes d’apprentissage des normes de
comportement et la manière dont les sénateurs gèrent les contraintes de rôles, l’étude
de D. Matthews, malgré son point de départ, annonce ce qu’on appelle désormais en
France les analyses en termes de métier (Politix, 1994). Cette perspective a donné
naissance aux États-Unis à une véritable sous-discipline de la science politique,
l’étude du legislative behaviour, elle-même branche des legislative studies. Le
comportement des parlementaires y est appréhendé exclusivement au moyen du
concept de rôle (de législateur, d’intermédiaire, d’expert, de mandataire d’intérêts
particuliers, de représentant de parti...)28. Les attitudes adoptées par les
parlementaires lorsque les intérêts de leur circonscription ou les directives de leur
parti divergent avec l’opinion que leur dicte leur conscience font ainsi l’objet de
nombreux travaux (Miller et Stokes, 1963 ; Cayrol et al., 1971 ; Converse et Pierce,
1979). Mais les prédispositions sociales qui amènent un parlementaire donné à opter
de façon privilégiée pour tel ou tel rôle importent ici moins que le parti
28. Voir notamment Silverman (1954) et surtout Wahlke et al. (1962) et Barber (1965). On trouvera
une présentation des travaux sur l’apprentissage et l’endossement des rôles politiques dans Cayrol,
Parodi, Ysmal (1970), p. 789-811 ; ces mêmes auteurs ont également tenté une application de cette
grille d’analyse aux députés français (1975).
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Belin, coll. «Socio-histoires», 1999, p. 135-170.
29. Voir toutefois Kornberg (1967) et Debuyst (1967) qui insistent l’un et l’autre sur l’influence de la
socialisation primaire et secondaire dans la conception que les parlementaires ont de leur rôle.
30. C’est là une tradition bien ancrée aux États-Unis depuis H. Lasswell (1930 et 1948). Ce dernier
définit les hommes politiques par leur soif immodérée du pouvoir, tenant notamment à une
insatisfaction dans leur vie privée et à un besoin incompressible de reconnaissance. Le
surinvestissement dans la vie publique est dès lors une des manières de compenser la haine de soi. Les
facteurs psychologiques prédisposant aux différentes formes de leadership ont donné lieu depuis à une
abondante littérature. Voir notamment Schlesinger (1966).
31. Cette dernière variable recouvre, selon les auteurs, l’existence ou non d’aides particulières à la
participation politique (des aides financières, des protections professionnelles), les contraintes légales
pesant sur les candidatures, l’ancienneté moyenne des candidats sortants, etc. Cf. notamment Seligman
(1971) ainsi qu’Eulau et Czudnowski (1976).
32. Le terme «lawyer» pose de redoutables problèmes de traduction c’est pourquoi nous préférons
l’utiliser tel quel. Compte tenu de l’importance du recours au droit dans la société américaine, les
lawyers y sont beaucoup plus nombreux et y ont des tâches depuis longtemps beaucoup plus
diversifiées que dans la société française. Ainsi, à côté du rôle traditionnel de défenseur-plaideur, les
lawyers ont, aux États-Unis, rempli également les fonctions de négociateur chargé de défendre des
intérêts spéciaux par des moyens légaux ou non et de conseiller d’affaires. Le lawyer américain est
donc tantôt un avocat au sens que ce terme a eu en France jusqu’à la récente réforme des professions
juridiques, un lobbyiste, un conseiller juridique ou fiscal, voire un consultant d’entreprise ou un
expert-comptable. Selon certains sociologues des professions, la cohérence du groupe provient de leur
statut de professional, c’est-à-dire de leur formation supérieure commune dans des écoles spécialisées
et de leur statut d’indépendant, lesquels produisent une éthique propre. Sur la spécificité de la
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ont focalisé l’essentiel de l’attention. La question avait certes déjà été posée par
Tocqueville dans La démocratie en Amérique qui invoquait en guise de réponse le
prestige social élevé des juristes aux États-Unis en raison de l’absence d’aristocratie
foncière, puis par Weber dans Le savant et le politique qui insistait d’une part sur
l’indépendance des avocats dans la société capitaliste et la disponibilité qu’elle leur
conférait et d’autre part sur leur capacité professionnelle à «défendre des intérêts».
Mais l’étude quantitative a permis aux politistes américains de tester et d’aller au-
delà de ces idées très générales. Diverses études ont ainsi cherché soit à spécifier les
caractéristiques des lawyers-politicians en cernant leurs propriétés sociales et de
carrière (Matthews, 1960 ; Eulau et Sprague, 1964), soit à s’interroger sur la
convergence des dispositions entre les deux professions, politique et juridique
(Miller, 1951 ; Wardwell et Wood, 1956 ; Derge, 1959 ; Gold, 1961). Leur lecture
montre un même refus du déterminisme professionnel. Nombreux sont les auteurs à
avoir ainsi mis en évidence que la profession d’avocat est investie de façon
privilégiée par ceux qui ont une ambition politique précoce, notamment du fait d’une
socialisation politique familiale. De même, les chercheurs s’interrogeant sur la
convergence des rôles entre juristes et hommes politiques ont fait preuve de prudence
dans leurs conclusions. Dans leur étude comparée de la conception du rôle
parlementaire des lawyers et des non-lawyers, Eulau et Sprague, s’ils reconnaissent
que les fonctions d’intermédiaire et de négociateur remplies par les lawyers
américains sont un facteur favorable à leur réussite, en arrivent au résultat que rien
ne les séparent sous cet angle : les juristes n’apparaissent pas particulièrement actifs
dans les tâches d’élaboration des lois ou dans les commissions juridiques.
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Belin, coll. «Socio-histoires», 1999, p. 135-170.
demande «dans quelle mesure le personnel politique constitue sinon une “classe” au
sens strict, du moins un groupe social présentant une cohésion relative dans, par
exemple, ses mécanismes de constitution et de recrutement, des types et profits de
carrière, des pratiques et des stratégies communes, des intérêts statutaires identiques,
etc.» (p. 10). De manière plus précise, l’attention précoce portée aux États-Unis aux
mécanismes proprement politiques de sélection et à l’exercice de leurs rôles par les
élus découle d’une conception du pouvoir politique fort différente de celle qui
prévaut chez de nombreux chercheurs français et que résume bien cette citation de D.
Matthews : «Il est faux d’affirmer qu’un groupe doit être littéralement représenté
parmi les gouvernants pour avoir de l’influence ou du pouvoir politique. La non-
représentativité sociale des gouvernants a sans aucun doute des conséquences, mais
cela ne les libèrent pas de leur responsabilité vis-à-vis de leurs électeurs. Dès lors, la
fréquence de la présence de certains groupes parmi les décideurs politiques ne doit
pas être considérée comme un indice infaillible de la distribution du pouvoir dans
une société» (1954, p. 32). L’importance du lobbying, le bipartisme et la structure
composite des partis américains, l’absence de discipline de vote dans les assemblées
d’État et fédérales, mais aussi, chez beaucoup de chercheurs, la foi inébranlable dans
la démocratie pluraliste qui empêche de concevoir que les représentants puissent être
mus essentiellement par leurs intérêts personnels, expliquent en grande partie la
façon dont y a été abordée l’étude quantitative du personnel politique.
La posture généralement critique adoptée par les politistes américains à
l’égard du Power Elite de Wright Mills (1969) ou la faible postérité de l’étude
pionnière de Charles Beard, An Economic Interpretation of the Constitution (1913),
attestent du rejet du paradigme «classiste». Rappelons en effet que Beard n’avait pas
hésité à briser un tabou en affirmant que l’attitude favorable des membres de la
Convention de 1787 à l’égard du fédéralisme s’expliquait par leurs intérêts
personnels, la plupart étant des «professional men», des marchands, des
manufacturiers et des planteurs qui spéculaient sur les crédits et la terre publics.
Selon lui, «The overwhelming majority of members, at least five-sixths, were
immediately, directly and personally interested in the outcome of their labor at
Philadelphia, and were to a greater or less extent economic beneficiairies from the
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Belin, coll. «Socio-histoires», 1999, p. 135-170.
adoption of the Constitution» (p. 149). L’étude des «transactions collusives» (M.
Dobry) entre hommes politiques et intérêts sociaux n’a certes pas disparu, mais elle
s’est concentrée aujourd’hui sur l’étude du financement de la vie politique par les
groupes d’intérêt et sur l’analyse de la production des politiques publiques. Mais ce
dernier courant, particulièrement prolifique depuis les années 70, en se partageant
entre les tenants d’une vision polyarchique continuant à assimiler l’espace politique
américain à un gigantesque marché où tous les intérêts ont une chance de se faire
entendre33 et les partisans d’une autonomisation croissante des élites
administratives34, continue de reproduire la vieille opposition entre pluralistes et
élitistes, les élites administratives ayant simplement remplacé le complexe militaro-
industriel de l’après-guerre à mesure que la critique de l’État passait de la gauche à la
droite.
Les historiens et les socio-politistes français ont eux été influencés par la
spécificité de leurs institutions politiques, caractérisée par la relativement forte
discipline et structuration partisane des groupes parlementaires, l’absence de
reconnaissance officielle des groupes d’intérêt, la stabilité de la haute-administration,
et l’importance de l’idiome de classe dans le langage et la symbolique politiques. La
supposée discipline partisane a, par exemple, empêché qu’on s’interroge sur les
différentes manières d’exercer un même rôle politique selon les ressources sociales,
sur les clivages transpartisans ainsi que sur les modalités de la division interne du
travail parlementaire. De son côté, l’attachement aux déterminations de classe, s’il a
amené les socio-politistes français à être beaucoup plus sensibles que les américains
aux procédures de stigmatisation sociale pesant sur les porte-parole des groupes
dominés et à leurs stratégies de légitimation (Gaxie, 1978 ; Bourdieu, 1979 ; Offerlé,
1984 ; Pudal, 1988 ; Collovald, 1989), a entraîné une très faible attention portée aux
déterminants proprement professionnels et psycho-sociologiques de l’entrée en
politique. La comparaison entre la sociologie politique française et américaine
conduit par conséquent au constat de l’existence de cécités croisées et devrait inviter
33. L’étude classique de la mise sur agenda des issues de R. W. Cobb et C. D. Elder (1983, 1ère ed.
1972) en constitue un bel exemple.
34. Certains pour la déplorer (les penseurs néo-conservateurs), d’autres pour plutôt s’en satisfaire (les
néo-institutionnalistes).
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Frédéric Sawicki, « Classer les hommes politiques », in Offerlé (Michel), dir., La profession politique, XIXe-XXe siècle, Paris,
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les politistes français à accorder une place plus importante qu’ils ne l’ont fait jusqu’à
présent aux arènes parlementaires, aux relations collusives entre hommes politiques
et groupes d’intérêt, à l’exercice concret du métier politique et à la sociologie des
milieux professionnels. Ce bilan comparé permet enfin de mesurer les effets
dommageables, en France comme aux États-Unis, de la division du travail
scientifique qu’a engendrée — pour des raisons différentes — la séparation des
recherches sur la sélection des hommes politiques et celles sur la mise en œuvre des
politiques publiques. Tout se passe en effet comme si ce partage des tâches avait
finalement occulté la question des effets des propriétés sociales des gouvernants —
professionnels de la politique et fonctionnaires — sur les mécanismes d’élaboration
des décisions publiques35.
35. Les lecteurs intéressés trouveront dans le texte de la communication dont est extrait cet article une
présentation des analyses récentes s’efforçant de dépasser les apories des deux paradigmes mis en
évidence, ainsi qu’une bibliographie plus substantielle.
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Frédéric Sawicki, « Classer les hommes politiques », in Offerlé (Michel), dir., La profession politique, XIXe-XXe siècle, Paris,
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