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Cours Geo Diff.v3finbis

Le document présente des rappels de calcul différentiel et des notions fondamentales de géométrie différentielle, en se basant principalement sur le livre de J. Lafontaine. Il aborde des concepts tels que la différentiabilité, les applications de classe Ck, les difféomorphismes, ainsi que des résultats importants comme le lemme de Sard et le théorème d'inversion locale. Des exemples et des propriétés locales et globales des fonctions différentielles sont également discutés.

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Géométrie différentielle

Antoine Touzé

8 octobre 2024

1
TABLE DES MATIÈRES A. Touzé – automne 2024

Table des matières

Références
[Laf] J. Lafontaine, introduction aux variétés différentielles, EDP Sciences.

. Le livre de Lafontaine est la référence principale pour la majo-


rité du cours. D’autres références seront utilisées plus ponctuellement
(pour certaines parties du cours, pour les exercices. . .), la liste ci-
dessous sera complétée au fur et à mesure du cours.

[Bre] G. E. Bredon, Topology and geometry, Graduate text in mathematics


139, Springer
[FT] Y. Félix, D. Tanré, Topologie algébrique, Dunod.
Le livre de Félix Tanré en traite pas de géométrie différentielle, mais c’est
une excellente référence élémentaire pour mieux comprendre les espaces topo-
logiques sous-jacents (groupe fondamental, revêtements,. . .). On l’utilise no-
tamment dans la section ??.
[GT] S. Gonnord, N. Tosel, Calcul différentiel, Ellipses.
[H] M. W. Hirsch, Differential topology, Graduate text in mathematics 33,
Springer

2
1. Rappels de calcul différentiel A. Touzé – automne 2024

1 Rappels de calcul différentiel


Soit E et F deux R-espaces vectoriels normés de dimension finie, U un
ouvert de E et f : U → F une application.

A. Différentiabilité. L’application f est dite différentiable en a ∈ U


lorsqu’il existe une application R-lineaire L : E → F telle que l’on ait pour
tout h dans une boule ouverte B(0, r) ⊂ E assez petite

f (a + h) = f (a) + Lh + (h)

où  : B(0, r) → F vérifie (h)/||h|| −−−→ 0. L’application f est dite diffé-


h→0
rentiable sur U si elle est différentiable en tout a ∈ U.
Si f est différentiable, l’application linéaire L est unique. On l’appelle la
différentielle de f en a et on la notera Da f , ou parfois dfa si F = R.

Remarques 1.1. Comme toutes les normes sur un espace vectoriel de di-
mension finie sont équivalentes, la notion de différentiabilité et l’application
différentielle Da f ne dépendent pas du choix de la norme sur E et F .

Exemples 1.2. 1. Une application f : R → R est différentiable en a si


et seulement si elle est dérivable en a, et Da f (h) = f 0 (a)h.
2. Si f : E → F est linéaire, alors f est différentiable sur E, et Da f = f .
3. L’application f : Mn (R) → Mn (R), X 7→ X 2 est différentiable sur
Mn (R) et DA f (H) = AH + HA.
4. Si on a deux applications composables g : V ⊂ F → G et f : U ⊂ E →
F telles que f est différentiable en a et g différentiable en f (a), alors
g ◦ f est différentiable en a et Da (g ◦ f ) = Df (a) g ◦ Da f .

Lorsque E = Rn et F = Rp , on note (fi )1≤i≤p les composantes de f . Si


f est différentiable en a alors les dérivées partielles des fi en a existent, et
la matrice de Da f dans les bases canoniques est :
" #
∂fi
[Da f ]Bcan,Bcan = (a) .
∂xj

Lorsque E = Rn et F = R, on note dxi : Rn → R l’application linéaire


qui renvoie la i-ème coordonnée d’un vecteur. Si f est différentiable en a
alors les dérivées partielles de f en a existent et :
∂f
dfa = (a)dxi .
X

1≤i≤n
∂xi

3
1. Rappels de calcul différentiel A. Touzé – automne 2024

B. Applications de classe C k , k ∈ N∗ ∪ {∞}.


On suppose E = Rn et F = Rp .
L’application f est dite de classe C k sur U lorsque ses dérivées partielles
d’ordre ≤ k existent et sont continues sur U. Elle est dite de classe C ∞ ou
lisse lorsqu’elle est C k pour tout k.
La relation importante avec la différentiabilité est que si f est de classe
C k sur U pour k ≥ 1, alors f est différentiable.

Exemples 1.3. 1. Une application linéaire f : Rn → Rp est lisse.


2. Plus généralement, une application f : Rn1 × · · · × Rnk → Rp qui est
linéaire par rapport à chacune de ses k variables est lisse.
3. Si f : Rn → R est un polynôme à n variables, alors f est lisse.
4. Si f : Mn (R) → Mn (R) est un polynôme de matrices, c’est à dire si
f (X) = a0 I + a1 X + · · · + ap X p , alors f est lisse.
5. Plus généralement, si ai xi est une série entière convergente sur R,
P

alors f : Mn (R) → Mn (R) donnée par f (X) = ai X i est lisse.


P

6. La composée d’applications de classe C k est de classe C k .

Remarque 1.4. Notre définition d’application C k suppose que E = Rn et


F = Rp . Si E et F sont des espaces vectoriels de dimension finie quelconques,
alors il existe des isomorphismes linéaires φ : E ' Rn et ψ : F ' Rp , et on
dit que f est C k si ψ ◦ f ◦ φ−1 est C k . Cette définition ne dépend pas du
choix de φ et ψ à cause des points 1) et 6) de l’exemple ??.

C. Le lemme de Sard. On rappelle le phénomène des courbes de Peano.

Théorème 1.5 (Peano). Pour tout n ≥ 1, il existe une application continue


surjective γ : [0, 1] → [0, 1]n .

Le résultat suivant est un cas facile du lemme de Sard. Il montre que le


calcul différentiel permet de maintenir à distance les "monstres de Peano".

Proposition 1.6. Soit U un ouvert de Rn et f : U → Rn une application C 1 .


Si E est un sous-ensemble négligeable de U, alors f (E) est un sous-ensemble
négligeable de Rn .

Corollaire 1.7. Soit U un ouvert de Rn , p > n et f : U → Rp une applica-


tion C 1 . L’image de f est un sous-ensemble négligeable de Rp .

D. Difféomorphismes. On considère des ouverts U ⊂ E et V ⊂ F . Un


difféomorphisme de classe C n de U sur V est une application bijective φ :
U → V telle que φ est C k et φ−1 est C k .

4
1. Rappels de calcul différentiel A. Touzé – automne 2024

Remarque 1.8. Les difféomorphismes sont des "changements de variables".


Composer une application f de classe C k par des difféomorphismes C k n’al-
tère pas les propriétés de f : du point de vue du calcul différentiel théorique,
il n’y a pas de différence entre ψ ◦ f ◦ φ et f . Mais si on utilise des chan-
gements ψ et φ de variable bien choisis, l’application ψ ◦ f ◦ φ peut être en
pratique radicalement plus facile à étudier que f , notamment lorsqu’il s’agit
de faire des calculs explicites. Voir par exemple le paragraphe F.
Exemple 1.9. Soit B la boule unité ouverte de Rn pour la norme eucli-
dienne || · ||. L’application φ : Rn → B donnée par
x
φ(x) = p
1 + ||x||2

est un difféomorphisme lisse 1 . (En effet φ est lisse, elle est bijective d’inverse
φ (y) = y/ 1 − ||y|| lisse.)
−1
p
2

Remarques 1.10. 1. Si φ : U → V est un difféomorphisme alors Da φ est


inversible pour tout a ∈ U (d’inverse Dφ(a) φ−1 ). En particulier E et F
ont même dimension. On peut se servir de cette observation pour voir
qu’il n’existe pas de difféomorphisme φ : R → C∗ .
2. Si φ : U → V est un difféomorphisme, alors U et V sont homéo-
morphes, c’est-à-dire qu’ils sont ’identiques’ en tant qu’espaces topolo-
giques. Ceci implique qu’ils ont même nombre de composantes connexes,
mêmes groupes fondamentaux, etc. On peut se servir de cette observa-
tion pour voir qu’il n’existe pas de difféomorphisme φ : C → C∗ , ou de
difféomorphisme φ :] − 2, 0[∪]3, 4[→ R.
On dispose d’une variante locale de la notion de difféomorphisme. Soit
a ∈ U. On dit que φ : U → V est un C k -difféomorphisme local en a lorsqu’il
existe un voisinage ouvert Ua de a contenu dans U, et un voisinage ouvert
Vf (a) de f (a) tels que φ : Ua → Vf (a) est un difféomorphisme C k .
Le théorème fondamental suivant donne un critère algébrique simple et
pratique pour vérifier qu’une application est un difféomorphisme local.
Théorème 1.11 (Inversion locale). Soit φ : U → V une application C k ,
k ∈ N∗ ∪ {∞}. Alors φ est un C k -difféomorphisme local en a ⇔ Da φ est
inversible.
Corollaire 1.12 (Inversion globale). Soit φ : U → V une application C k ,
k ∈ N∗ ∪ {∞}. Alors φ est un C k -difféomorphisme si et seulement si les deux
conditions suivantes sont satisfaites :
1. On remarque que l’expression de φ n’est pas lisse si on remplace la norme euclidienne
par la norme infinie (par exemple). Il est possible de démontrer que pour n’importe quelle
norme, la boule unité ouverte est difféomorphe à Rn , mais la construction du difféomor-
phisme suit une autre stratégie, qui n’utilise pas la norme ! Voir [?, Chap. 2, Exercice 4,
page 60] pour la démonstration.

5
1. Rappels de calcul différentiel A. Touzé – automne 2024

1. φ est une bijection,


2. Da φ est inversible pour tout a ∈ U.

Exemple 1.13. L’application C∗ → C∗ , z 7→ z 2 est un C ∞ -difféomorphisme


local en tout point a ∈ C∗ (c’est facile à montrer avec le théorème d’inversion
locale), mais n’est pas un C ∞ -difféomorphisme, car ce n’est pas une bijec-
tion. Plus généralement, nous verrons que les revêtements C k non triviaux
fournissent des C k -difféomorphismes locaux qui ne sont pas des difféomor-
phismes.

E. Propriétés locales vs propriétés globales. On peut s’intéresser aux


propriétés locales d’une fonction (= qui ne dépendent que de la définition
de la fonction au voisinage d’un point) ou aux propriétés globales (= qui ne
peuvent pas se vérifier en faisant une étude au voisinage de chaque point).

exemples de props locales exemples de props globales


f est différentiable f est injective
f est C k f est surjective
f est un C k -difféo local en a f est un C k -difféo
f est une application ouverte l’image de f est connexe

L’étude des propriétés locales et celle des propriétés globales procèdent gé-
néralement de méthodes assez différentes.
Les énoncés relatifs aux propriétés locales sont parfois un peu lourds à
écrire (il faut spécifier des tas d’ouverts et de voisinages convenablement em-
boîtés les uns dans les autres. . .). Le résultat suivant permet parfois d’écrire
ces énoncés de manière un peu plus légère, en remplaçant une fonction f
définie sur U ⊂ Rn par une fonction g définie sur tout Rn .

Proposition 1.14. Soit f : U → Rp une application C k , et a ∈ U. Il existe


g : Rn → Rp de classe C k telle que f et g sont égales au voisinage de a.

La démonstration de cette proposition repose sur l’existence de "fonctions


plateau", qui nous seront utiles en bien d’autres occasions.

Lemme 1.15. Soit || · || la norme euclidienne sur Rn , et soit r1 < r2 deux


réels strictement positifs. Il existe une fonction χ : Rn → [0, 1] lisse telle que
1. χ(x) = 1 si et seulement si ||x|| ≤ r1 ,
2. χ(x) = 0 si et seulement si ||x|| ≥ r2 ,
3. pour tout x ∈ Rn , la fonction R+ → R est décroissante.
t 7→ χ(tx)

6
1. Rappels de calcul différentiel A. Touzé – automne 2024

F. Description locale des fonctions différentiables. A quoi ressemble


localement une fonction différentiable (à changement de variables près) ? Les
résultats suivants répondent très partiellement à cette question. Quitte à
faire une translation au départ et à l’arrivée, on peut se ramener à étudier
les fonctions différentiables f définies au voisinage de 0 ∈ Rn et telles que
f (0) = 0 ∈ Rn .
Dans la suite du paragraphe D, on considère donc un ouvert U de Rn
contenant 0, et f : U → Rp une application de classe C k , k ≥ 1, telle que
f (0) = 0.

Lemme 1.16 (Lemme d’immersion). On a équivalence entre :


(i) D0 f injective
(ii) Il existe un C k -difféomorphisme local en 0 : φ : (Rp , 0) → (Rp , 0) tel
que pour tout x ∈ Rn au voisinage de 0 on a

(φ ◦ f )(x) = (x, 0) ∈ Rp × Rn−p .

On dit que f : U → Rp est une immersion lorsque Da f est injective pour


tout a ∈ U.
Il est clair qu’une application linéaire injective est une immersion. Le
lemme d’immersion montre donc que f : U → Rp est une immersion au
voisinage de 0 si et seulement si D0 f est injective. (Comme dans le théorème
d’inversion locale, un information sur la différentielle de f en un seul point
donne une information sur f sur tout un voisinage de ce point !)

Lemme 1.17 (Lemme de submersion). On a équivalence entre :


(i) D0 f surjective
(ii) Il existe un C k -difféomorphisme local en 0 : φ : (U 0 , 0) → (U, 0) tel que
pour tout x = (x1 , . . . , xn ) ∈ Rn au voisinage de 0 on a

(f ◦ φ)(x1 , . . . , xn ) = (x1 , . . . , xp ) .

On dit que f : U → Rp est une submersion lorsque Da f est surjective


pour tout a ∈ U. Le lemme de submersion montre que f est une submersion
au voisinage de 0 et et seulement si D0 f est surjective.
On remarquera que D0 f injective (resp. surjective) implique que Da f
injective (resp. surjective) pour a au voisinage de 0. Les lemmes d’immer-
sion et de submersion décrivent donc des applications localement de rang
maximal. Le théorème suivant décrit plus généralement les applications qui
sont localement de rang constant.

Théorème 1.18 (Rang constant). Soit r ≥ 0. On a équivalence entre :


(i) rgDa f = r au voisinage de 0.

7
1. Rappels de calcul différentiel A. Touzé – automne 2024

(ii) Il existe un C k -difféomorphisme local en 0 : φ1 : (U 0 , 0) → (U, 0) et


un C k -difféomorphisme local φ2 : (Rp , 0) → (Rp , 0) tels que pour tout
x = (x1 , . . . , xn ) ∈ Rn au voisinage de 0 on a

(φ2 ◦ f ◦ φ1 )(x1 , . . . , xn ) = (x1 , . . . , xr , 0, . . . , 0) .

8
1. Rappels de calcul différentiel A. Touzé – automne 2024

Exercices du chapitre 1

Exercice 1. Montrez que l’application déterminant det : Mn (R) → R est


lisse. Calculez la différentielle DA det pour tout A ∈ Mn (R).

Exercice 2. Soit k≥0 ak xk une série entière réelle à coefficients ak ≥ 0,


P

de rayon de convergence ρ > 0.


1. Soit Ak ∈ Mn (R) une suite de matrices telle que ||Ak ||∞ ≤ ak pour
tout k. Montrez que

f : Mn (R) → M (R)
P n k
X 7→ k≥0 Ak X

est une fonction lisse sur l’ouvert {X ∈ Mn (R) , ||X||∞ < ρ/n}, et
calculez sa différentielle.
2. Montrez que l’exponentielle de matrices est une fonction lisse sur
Mn (R) et calculez sa différentielle.

Exercice 3. Un théorème de Whitney 2 . Soit F un fermé de Rn . Le


but de l’exercice est de montrer qu’il existe une fonction lisse f : Rn → R+
telle que F = f −1 {0} (c’est un théorème de Whitney).
1. Montrez l’existence de f lorsque F = Rn . Dans la suite de l’exercice
on suppose F 6= Rn .
2. Montrez qu’il existe une famille dénombrable de boules euclidiennes
ouvertes Bi telles que F = i≥0 Rn \ Bi .
T

3. Construire pour chaque Bi une application lisse φi : Rn → R+ telle


que φi s’annule exactement sur Rn \ Bi .
4. Construire f à partir des φi .
[Indication : on posera f = ai φi pour des ai bien choisis.]
P
i≥0

Exercice 4. Un lemme de Hadamard 3 . Soit U un ouvert de Rn étoilé


par rapport à 0, et f : U → R une application C k , k ≥ 1. Montrez qu’il existe
des applications hj : U → R de classe C k−1 telles que pour tout x ∈ U :

f (x) = f (0) + xj hj (x) .


X

1≤j≤n

R1
[Indication : on a f (x) − f (0) = d
0 dt
f (tx)dt, calculez ensuite dt f (tx)
d
à l’aide de
la règle de la chaîne.]

2. Voir [GT] Chap 1, Exercice 21 pour la correction.


3. Voir [Laf] chap. III, Lemme 14 pour la correction.

9
1. Rappels de calcul différentiel A. Touzé – automne 2024

Exercice 5. Construisez un difféomorphisme explicite entre le disque


ouvert {z ∈ C | |z| < 1} et le pavé ouvert ]0, 1[×]0, 1[.

Exercice 6. Montrez que l’exponentielle complexe exp : C → C∗ est


un C ∞ -difféo local en chaque point a ∈ C. Existe-t-il des difféomorphismes
φ : C → C∗ ?
[Indication : utilisez le groupe fondamental (cf le cours de topologie algébrique), ou
l’indice d’un lacet (cf. le cours d’analyse complexe).]

10
2. Sous-variétés de Rn A. Touzé – automne 2024

2 Sous-variétés de Rn
A partir de maintenant, toutes nos applications différentiables seront
lisses, sauf mention du contraire. En particulier, on dira simplement immer-
sion, submersion, difféomorphisme à la place de immersion lisse, submersion
lisse, difféomorphisme lisse.

2.1 Définition et exemples


Définition 2.1. Une partie M ⊂ Rn est une sous-variété de dimension p
de Rn si pour tout a ∈ M il existe un voisinage ouvert U de a, un voisinage
ouvert V de 0 et un difféomorphisme φ : U → V tel que

φ(U ∩ M ) = V ∩ (Rp × {0})

Remarque 2.2. L’ensemble vide n’est pas une sous-variété de Rn (et ne


sera pas non plus une variété abstraite au sens du chapitre suivant).

Exemples 2.3. Les sous-variétés de dimension 0 sont exactement les sous-


ensembles de points isolés de Rn , les sous-variétés de dimension n sont exac-
tement les ouverts de Rn .

Théorème 2.4. Soit M une partie non vide de Rn . Les conditions suivantes
sont équivalentes.
1. M est une sous-variété de Rn de dimension p.
2. Pour tout a ∈ M il existe un voisinage ouvert U de a et une submersion
g : U → Rn−p telle que

M ∩ U = g −1 (0) .

3. Pour tout a ∈ M il existe un voisinage ouvert U de x, un ouvert Ω de


Rp et une immersion h : Ω → Rn qui induit un homéomorphisme
'
h:Ω−
→ M ∩ U.

4. Pour tout a = (a1 , . . . , an ) ∈ M il existe un voisinage ouvert U de a, un


ouvert V de Rp contenant (a1 , . . . , ap ) et application lisse f : V → Rn−p
tel que, après permutation éventuelle des coordonnées :

M ∩ U = Graphe(f ).

Définition 2.5. Une application h comme dans la condition 3. du théorème


précédent s’appelle une paramétrisation de M autour de a, une application
g comme dans la condition 2. est une équation de M autour de a.

11
2.2 Espace tangent A. Touzé – automne 2024

Exemple 2.6. Si U est un ouvert de Rn , et f : U → R une application lisse


telle que pour tout a ∈ U le vecteur gradient
∂f ∂f
 
gradfa := (a), . . . , (a)
∂x1 ∂xn
est non nul, alors pour tout b ∈ Imf , l’ensemble de niveau f −1 (b) est une
sous-variété de dimension n − 1 de Rn .
En particulier, la sphère euclidienne unité S n−1 = {x ∈ Rn , ||x|| = 1}
est une sous-variété de dimension n − 1 de Rn .
Exemple 2.7. Si N est une sous-variété de dimension p de Rm et M est
une sous-variété de dimension q de Rm alors N × M est une sous-variété de
dimension p + q de Rn × Rm .
En particulier, le tore T n = {(z1 , . . . , zn ) ∈ Cn , |z1 | = · · · = |zn | = 1}
est une sous-variété de dimension n de Cn .
Exemple 2.8. Le groupe orthogonal On (R) est une sous-variété de dimen-
sion 21 n(n − 1) de Mn (R).
Exemple 2.9. L’image de l’application lisse

γ : ]0, +∞[ → C
t 7→ 2
π arctan(t) exp(it)

est une sous-variété de Rn de dimension 1. (Cette sous-variété est une "spirale


qui s’enroule le long du cercle unité", et on remarquera en particulier que ce
n’est pas un fermé de Rn ).

2.2 Espace tangent


Définition 2.10. Soit M une sous-variété de dimension p de Rn . Une courbe
lisse de M est une application lisse γ :]a, b[→ Rn dont l’image est contenue
dans M . Un vecteur v de Rn est dit tangent à M en a s’il existe une courbe
lisse γ :] − , [→ M telle que γ(0) = a et γ 0 (0) = v.
Proposition 2.11. L’ensemble des vecteurs tangents en a à M forment un
sous-espace vectoriel de Rn de dimension p, noté Ta M .
Proposition 2.12. Soit M une sous-variété de dimension p de Rn , a ∈ M ,
et U un voisinage ouvert de a.
(1) Si g : U → Rn−p est une submersion telle que M ∩ U = g −1 (0), alors

Ta M = Ker Da g.

(2) Si h : Ω → Rn est une immersion qui induit un homéomorphisme Ω '


M ∩ U, alors
Ta M = Im Dh−1 (a) h.

12
2.3 Fonctions différentiables entre sous-variétés A. Touzé – automne 2024

Exemple 2.13. Soit U est un ouvert de Rn , et f : U → R dont le gradient


ne s’annule pas sur U, et soit M la sous-variété de niveau de f passant
par a (c’est-à-dire M = f −1 (f (a))). Alors Ta M est l’ensemble des vecteurs
orthogonaux à gradfa (pour le produit scalaire canonique).
Exemple 2.14. Si M est une sous-variété de Rm et N est une sous-variété
de Rn , alors
T(a1 ,a2 ) M × N = Ta1 M × Ta2 N.
Exemple 2.15. Pour toute matrice orthogonale A on a

TA On (R) = {M ∈ Mn (R) , t AM + t M A = 0}.

2.3 Fonctions différentiables entre sous-variétés


Définition 2.16. Soit M une sous-variété de Rm et N une sous-variété de
Rn . Une application f : M → N est dite lisse sur M lorsque pour tout
a ∈ M il existe un ouvert Ua de Rm contenant a, et une application lisse 4
ffa : Ua → Rn telle que
ffa (x) = f (x)
pour tout x ∈ Ua ∩ M . L’application f : M → N est un difféomorphisme si
c’est une bijection lisse d’inverse lisse.
Remarques 2.17. 1. Si M = U est un ouvert de Rm et N = V est un
ouvert de Rn alors f : U → V est lisse au sens de la définition précédente
si et seulement si elle est lisse au sens du calcul différentiel usuel (section
??).
2. Si M = U est un ouvert de Rm alors f : U → N est lisse au sens de la
définition précédente si et seulement si l’application U → Rn , x 7→ f (x)
est lisse. En particulier la définition précédente est en accord avec la
définition de courbe lisse (voir la définition ??.)
3. Si M est une sous-variété de dimension 0, alors toute fonction f : M → N
est lisse. En particulier, les difféomorphismes entre entre sous-variétés de
dimension 0 sont exactement les bijections.
Proposition 2.18. Si f : M → N est lisse, alors pour toute courbe lisse
γ :] − , [→ M , l’application f ◦ γ est une courbe lisse de N . L’application
suivante est bien définie et linéaire :

Ta f : Ta M → Tf (a) N
.
γ (0) 7→ (f ◦ γ)0 (0)
0

Exemple 2.19. Si f : M → N est la restriction d’une application lisse


f : Rn → Rp , alors f est lisse et pour tout a ∈ M , Da f se restreint en une
application Da f : Ta M → Tf (a) N qui n’est autre que Ta f .
4. au sens du calcul différentiel usuel !

13
2.4 Cartes d’une sous-variété A. Touzé – automne 2024

Proposition 2.20. La composée d’applications lisses est lisse, et

Ta (g ◦ f ) = Tf (a) g ◦ Ta f .

Le théorème d’inversion globale s’étend aux sous-variétés de Rn .

Théorème 2.21. Soit M une sous-variété de Rm et N une sous-variété de


Rn . Une application f : M → N est un difféomorphisme si et seulement si
c’est une bijection lisse, telle que Ta f inversible pour tout a ∈ M .

Exemple 2.22. Si M est une sous-variété de Rn . Alors h : Ω → Rn est une


paramétrisation de M si et seulement si h : Ω → U ∩ M est un difféomor-
phisme.

2.4 Cartes d’une sous-variété


Si M est une sous-variété de dimension n, une carte de M de domaine U
est un difféomorphisme φ : U → Ω d’un ouvert U de M sur un ouvert Ω de
Rn . Les inverses des paramétrisations de M sont des cartes de M , dont les
domaines recouvrent M . Cet ensemble de cartes est appelé l’atlas canonique
de M . On peut utiliser les cartes de l’atlas canonique pour caractériser les
applications lisses entre variétés en termes d’applications lisses entre sous-
variétés de Rn :

Proposition 2.23. Soit f : M → N une fonction entre sous-variétés. La


fonction f est lisse si et seulement si pour tout a ∈ M on peut trouver une
carte φ1 de M dont le domaine U contient a, et une carte φ2 de N dont le
domaine V contient f (a) telles que f (U) ⊂ V et telles que φ2 ◦ f ◦ φ−1
1 soit
lisse.

14
2.4 Cartes d’une sous-variété A. Touzé – automne 2024

Exercices du chapitre 2

Exercice 7. Courbes.
1. Soit γ : [a, b] → Rn une application continue injective. On suppose que
γ est lisse de dérivée non nulle sur ]a, b[. Montrez que γ(]a, b[) est une
sous-variété de Rn .
2. Soit γ :] − 1, 2[→ R2 l’application telle que γ(t) = (t2 , t − t3 ). Montrez
que γ est injective, lisse de dérivée non nulle, mais que γ(] − 1, 2[) n’est
pas une sous-variété de R2 .

Exercice 8. Intersection de sous-variétés.


1. Montrez que la demi-droite ] − ∞, 0] × {0} n’est pas une sous-variété
de R × Rn−1 = Rn pour n ≥ 2.
2. En déduire que pour n ≥ 2 l’intersection de deux sous-variétés de Rn
n’est pas forcément une sous-variété de Rn .
[Indication : considérer les sous-variétés M1 = Graphe(f ) et M2 =
Graphe(−f ) où f est une application lisse bien choisie.]
3. Que se passe-t-il pour l’intersection de deux sous-variétés de R1 ?

Exercice 9. Transversalité. Soit M et N deux sous-variétés de Rn de


dimensions respectives p et q. On suppose que M ∩ N 6= ∅, et que pour tout
a ∈ M ∩N on a 5 Ta M +Ta N = Rn . Montrez que M ∩N est une sous-variété
de Rn de dimension p + q − n.
[Indication : montrez que si gM : U → Rn−p est une équation de M autour de a,
et gN : V → Rn−q est une équation de N autour de a, alors (gM , gN ) : U ∩ V →
Rn−p × Rn−q est une equation de M ∩ N autour de a.]

Exercice 10. Groupe unitaire. Vérifiez que le groupe unitaire Un (R) =


{A ∈ Mn (C) | t AA = 1} est une sous-variété de Mn (C). Précisez sa dimen-
sion et l’espace tangent en I.

Exercice 11. Fibré tangent. Soit M une sous-variété de Rn .


1. Montrez que l’ensemble T M des couples (x, v) où x ∈ M et v est un
vecteur tangent à x forme une sous-variété de Rn ×Rn , dont on donnera
la dimension. Montrez que l’application p : T M → M , (x, v) 7→ x est
une submersion lisse.
5. Si deux variétés satisfont cette condition sur les espaces tangents, on dit qu’elles
sont en "position transverse".

15
2.4 Cartes d’une sous-variété A. Touzé – automne 2024

2. Montrez que l’ensemble T U M des couples (x, v) où x ∈ M et v est un


vecteur tangent à x et de norme 1 forme une sous-variété de Rn × Rn ,
dont on donnera la dimension. Montrez que l’application pu : T U M →
M , (x, v) 7→ x est une submersion lisse.
3. Montrez que si M est compacte alors T U M est compacte, mais que
T M n’est jamais compacte.
(L’application p : T M → M s’appelle le "fibré tangent" de M , et l’application
pu : T U M → M s’appelle "fibré tangent unitaire".)

Exercice 12. Solutions d’équations de rang constant. Soit U un


ouvert de Rn et g : U → Rp une fonction lisse telle que le rang de Dx g ne
dépend pas de x ∈ U.
Montrez que si S := g −1 (b) 6= ∅, alors S est une sous-variété de Rn .
Donnez la dimension de S et décrivez l’espace tangent Ta S pour a ∈ S en
fonction de g.
[Indication : utilisez le théorème du rang constant !]

Exercice 13. Le théorème des extremas liés. Soit U un ouvert de


Rn et soient f : U → R et g : U → Rp des applications lisses. On suppose
Z := g −1 (0) 6= ∅, et on cherche les extremas locaux de f sur l’ensemble Z.
On suppose que Dz g est de rang p pour tout z ∈ Z.
1. Montrez que Z est une sous-variété de Rn .
2. Soit a un point de Z en lequel f présente un extremum local.
(a) Soit γ :] − , [→ X une courbe lisse de Z telle que γ(0) = a.
Montrez que (f ◦ γ)0 (0) = 0.
(b) En déduire que Da f s’annule sur Ta Z.
(c) En déduire que ker Da g ⊂ ker Da f .
Remarques :
1) Si on note (g1 , . . . , gp ) les fonctions coordonnées de g la dernière question
est équivalente à montrer que la forme linéaire Da f est combinaison linéaire des
formes linéaires Da gi . Les coefficients de cette combinaison linéaire s’appellent les
"multiplicateurs de Lagrange".
2) En utilisant l’exercice sur le rang constant, on voit qu’on peut remplacer
l’hypothèse sur les Dz g par l’hypothèse plus faible : "on suppose qu’il existe p ≥
r ≥ 0 tel que Dz g est de rang r pour tout z sur un voisinage de Z".

Exercice 14. Projections stéréographiques. Soit S n la sphère unité


de Rn+1 pour la norme euclidienne. Notons N = (1, 0, . . . , 0) son pôle nord,
S = (−1, 0, . . . , 0) son pôle sud. La projection stéréographique de pôle nord

16
2.4 Cartes d’une sous-variété A. Touzé – automne 2024

pN et la projection stéréographique de pôle sud pS sont les applications


(prendre X = N ou S, et X = −1 si X = N et +1 si X = S) :

pX : S n \ {X} → Rn \ {0}
1 .
(x0 , . . . , xn ) 7→ (x1 , . . . , xn )
1 + X x0
Montrez que ces projections stéréographiques sont des cartes de S n .

17
3. Variétés différentielles "abstraites" A. Touzé – automne 2024

3 Variétés différentielles "abstraites"


3.1 Variétés topologiques
Définition 3.1. Soit n ∈ N. Une variété topologique de dimension n est un
espace topologique séparé et σ-compact 6 , localement homéomorphe à Rn .
Remarques 3.2. 1. La séparation évite les aberrations du type "droite à
deux origines".
En détail, la droite à deux origines est l’espace topologique D2 obtenu
comme quotient de la réunion disjointe R t R de deux copies de R par
la relation d’équivalence qui identifie un élément non nul x ∈ R∗ dans
la première copie de R au même élément x ∈ R∗ , dans la seconde copie.
Ensemblistement, D2 = R∗ ∪ {0} ∪ {0}. Par définition de la topologie
quotient, les sous-ensembles D2 \ {0} et D2 \ {0} sont des ouverts de D2
et la projection quotient : p : R t R → D2 induit des homéomorphismes :
' '
R− → D2 \ {0} et R − → D2 \ {0}. Ainsi D2 est localement homéomorphe
à R, mais n’est pas séparée (tout voisinage ouvert de 0 rencontre un
voisinage ouvert de 0).
2. La σ-compacité éviter les aberrations du type "longue droite".
En détail, on peut munir le produit [0, +∞[×[0, +∞[ de l’ordre lexicogra-
phique et de la topologie associée 7 . Alors L = [0, +∞[×[0, +∞[ \ {(0, 0)}
est un espace topologique séparé, localement homéomorphe à R, mais il
n’est pas σ-compact. Il faut l’imaginer comme une mise bout-à-bout d’un
ensemble non dénombrable de copies de ]0, +∞[. Il n’existe pas d’appli-
cation continue surjective f : R → L.
Exemples 3.3. 1. Les variétés topologiques de dimension 0 sont exac-
tement les ensembles finis ou dénombrables, munis de la topologie
discrète.
2. Une sous-variété de Rp est une variété topologique.
3. Le graphe d’une fonction continue : R → R est une variété topologique
(par exemple le graphe de x 7→ |x|. . .)
Les variétés topologiques possèdent des propriétés topologiques remar-
quables, par exemple des propriétés de connexité sympathiques.
Proposition 3.4. Soit M une variété topologique de dimension n.
1. U est un ouvert connexe de M ⇔ U est un ouvert connexe par arcs.
2. Si n ≥ 2 et x ∈ M alors M connexe ⇔ M \ {x} connexe.
3. Les composantes connexes de M sont ouvertes et fermées dans M .
4. Si M est compacte, elle a un nombre fini de composantes connexes.
6. Un espace σ-compact est un espace qui est réunion dénombrable de compacts.
7. La topologie associée à un ensemble ordonné est celle dont les ouverts sont des
réunions d’intervalles.

18
3.2 Variétés différentielles et fonctions lisses A. Touzé – automne 2024

3.2 Variétés différentielles et fonctions lisses


Définition 3.5. Soit M une variété topologique de dimension n. Une carte
de M est un homéomorphisme φ d’un ouvert U de M vers un ouvert φ(U)
de Rn . L’ouvert U est le domaine de la carte, et la carte est souvent notée
(U, φ). Un atlas de M est un ensemble de cartes dont les domaines recouvrent
M . Un atlas lisse est un atlas de M tel que pour toutes cartes (U1 , φ1 ) et
(U2 , φ2 ) dont les domaines sont d’intersection non vide, la composée :
φ−1 φ2
φ1 (U1 ∩ U2 ) −−
1
→ U1 ∩ U2 −→ φ2 (U1 ∩ U2 )
' '

est un difféomorphisme lisse entre ouverts de Rn .


Définition 3.6. Si A est un atlas lisse de M , une carte φ de M est dite
compatible avec l’atlas A lorsque A ∪ {φ} est encore un atlas lisse. Un atlas
lisse est dit maximal lorsque pour toute carte φ compatible avec A, on a
φ ∈ A.
Remarque 3.7. Soit A un atlas lisse, et φ : U → Ω une carte de A.
Alors, pour tout ouvert V ⊂ U, la restriction φ : V → φ(V) est une carte
compatible avec A, et pour tout difféomorphisme ψ : Ω → Ω0 entre ouverts
de Rn la composée ψ ◦ φ est une carte compatible de A. En particulier,
les atlas maximaux son stable par restriction de domaine de carte ou par
composition des cartes au but par un difféomorphismes de Rn .
Proposition 3.8. Soit M une variété topologique de dimension n. Tout
atlas lisse A de M est contenu dans un unique atlas lisse maximal Amax .
Définition 3.9. Soit n ∈ N. Une variété différentielle de dimension n est
une variété topologique M de dimension n, munie d’un atlas lisse maximal
A.
Exemple 3.10. Une sous-variété de RN , munie de son atlas canonique
(l’ensemble des homéomorphismes obtenus comme les inverses de paramé-
trisations lisses de la sous-variété M – c’est un atlas lisse maximal) est une
variété différentielle.
Exemple 3.11. On note P n (R) l’espace topologique quotient de Rn+1 \ {0}
par la relation d’équivalence x ∼ y ssi il existe λ ∈ R∗ tel que x = λy. Cet
espace topologique est séparé et compact. Notons [x0 : · · · : xn ] ∈ P n (R) la
classe de (x0 , . . . , xn ) ∈ Rn+1 \ {0}. Alors les sous-ensembles
Ui = {[x0 : · · · : xn ] , xi 6= 0}
pour 0 ≤ i ≤ n sont des ouverts de P n (R) qui recouvrent P n (R). L’ensemble
des applications
φi : Ui → Rn
1
[x0 : · · · : xn ] 7→ (x0 , · · · , xi−1 , xi+1 , · · · , xn )
xi

19
3.2 Variétés différentielles et fonctions lisses A. Touzé – automne 2024

forme un atlas lisse A de P n (R). La variété différentielle (P n (R), Amax )


s’appelle l’espace projectif réel de dimension n.

Exemple 3.12. Une variété topologique de dimension 0 possède un unique


atlas. On convient que l’unique application R0 → R0 est un difféomorphisme
(c’est en accord avec le dernier point de la remarque ??), de sorte que cet
atlas est un atlas lisse. Vu que c’est le seul atlas disponible, il est automati-
quement maximal. Ainsi, toute variété topologique de dimension 0 peut être
vue (d’une unique manière) comme une variété différentielle.

Exemple 3.13. Si (M, A) est une variété différentielle de dimension n alors


on considère les ouverts U de M comme des variétés différentielles de dimen-
sion n en les munissant de l’atlas lisse maximal AU constitué des cartes de
A dont le domaine est contenu dans U.

Exemple 3.14. Si (M1 , A1 ) est une variété différentielle de dimension n1


et (M2 , A2 ) est une variété différentielle de dimension n2 , alors on consi-
dère M1 × M2 comme une variété différentielle de dimension n1 + n2 en la
munissant de l’atlas lisse maximal contenant toutes les cartes de la forme

φ1 × φ2 : U1 × U2 → φ1 (U1 ) × φ2 (U2 ) ,

où φ1 ∈ A1 et φ2 ∈ A2 .

En pratique, pour définir une variété différentielle, on procédera comme


dans l’exemple ?? : on spécifiera une variété topologique M et un atlas lisse
A, et la variété différentielle sera le couple (M, Amax ).
L’atlas A sera généralement omis quand on fera référence à une variété
différentielle. Ainsi on dira "soit M une variété différentielle, et soit (U, φ)
une carte de M " plutôt que "soit (M, A) une variété différentielle et soit
(U, φ) une carte de l’atlas A".

Définition 3.15. Soient M et N deux variétés différentielles. Une applica-


tion f : M → N est lisse si pour tout a ∈ M on peut trouver une carte φ1
de M dont le domaine U contient a, et une carte φ2 de N dont le domaine
V contient f (a) telles que f (U) ⊂ V et telles que la composée suivante soit
lisse 8 :
φ2 ◦ f ◦ φ−1
1 : φ1 (U) → φ2 (V) .

Un difféomorphisme entre variétés différentielles est une bijection lisse dont


l’inverse est lisse.

Remarque 3.16. Les notions d’applications lisses et de difféomorphismes


données dans la définition précédente généralisent aux variétés différentielles
quelconques les notions d’applications lisses et de difféomorphismes entre
sous-variétés de Rn (voir la prop. ??).
8. au sens usuel du calcul différentiel entre ouverts de Rn !

20
3.3 Espace tangent et application tangente A. Touzé – automne 2024

Exemple 3.17. L’application quotient Rn+1 \{0} → P n (R), (x0 , . . . , xn ) 7→


[x0 : · · · : xn ] est lisse.
Exemple 3.18. Une application f : M → N1 × N2 est lisse si et seulement
si ses applications coordonnées sont lisses.
Exemple 3.19. Toute carte (U, φ) d’une variété différentielle M est un
difféomorphisme de l’ouvert U sur l’ouvert φ(U) de Rn .
Proposition 3.20. La composée d’applications lisses est lisse.

3.3 Espace tangent et application tangente


Soit M une variété différentielle et a ∈ M . On note Ca (M ) l’ensemble
des courbes lisses γ :] − , [→ M telles que γ(0) = a.
Définition 3.21. On dit que deux courbes γ et µ de Ca (M ) sont tangentes
en a s’il existe une carte φ de M dont le domaine contient a, telle que

(φ ◦ γ)0 (0) = (φ ◦ µ)0 (0) .

La règle de la chaîne assure que cette définition ne dépend pas du choix de


la carte φ. La relation de tangence en a est une relation d’équivalence sur
l’ensemble Ca (M ), et on note Ta M l’ensemble quotient.
On remarque que pour tout ouvert U de M contenant a on a une iden-
tification canonique Ta U = Ta M qui envoie la classe de γ ∈ Ca (U) sur la
classe de γ ∈ Ca (M ).
Proposition 3.22. L’ensemble Ta M possède une unique structure d’espace
vectoriel, telle que pour toute carte φ de domaine U, l’application

Ta M = Ta U → Rn
[γ] 7 → (φ ◦ γ)0 (0)

est un isomorphisme d’espaces vectoriels. L’espace vectoriel Ta M s’appelle


l’espace tangent de M en a.
Proposition 3.23. Si f : M → N est une application lisse, alors pour tout
a ∈ M , l’application
Ca (M ) → Cf (a) (N )
γ 7→ f ◦γ
passe au quotient en une application linéaire Ta f : Ta M → Ta N qui est
appelée l’application tangente de f en a.
Proposition 3.24. L’application tangente de la composée d’applications
lisses suit la règle de la chaîne :

Ta (g ◦ f ) = (Tf (a) g) ◦ (Ta f ) .

21
3.4 Actions de groupes et variétés quotients A. Touzé – automne 2024

Si M est une sous-variété de RN , alors l’application

Ca (M ) → RN
γ → γ 0 (0)

induit un isomorphisme canonique entre l’espace tangent au sens des variétés


différentielles et l’espace tangent au sens des sous-variétés. Si f : M → N est
une fonction lisse entre sous-variétés, l’application tangente Ta f au sens des
sous-variétés coïncide avec l’application tangente Ta f au sens des variétés
différentielles.
Les notions d’espace tangent et d’application tangente développées pour
les variétés différentielles généralisent donc les notions développées pour les
sous-variétés à la section ??. Toutefois, le cadre abstrait a un parfum un
peu différent. En effet, si M est une sous-variété de Rk , on peut "calculer
concrètement" Ta M , en donnant une base ou des équations qui l’identifient
en tant que sous-espace de RN . Dans le cadre abstrait, on ne peut pas
"calculer concrètement" Ta M (ce n’est pas naturellement un sous-espace
d’un Rk ).
Dans le cadre abstrait on peut toutefois "calculer concrètement" Ta f :
Ta M → Tf (a) N de la manière suivante. Si φ est une carte explicite de M
dont le domaine contient a et ψ une carte explicite de N dont le domaine
contient f (a), et si f : M → N est donnée par une formule explicite, alors
on peut calculer par une formule explicite ψ ◦ f ◦ φ−1 , qui est une fonction
entre ouverts de Rn et on peut donc calculer explicitement sa différentielle
en φ(a). On a un diagramme commutatif qui exprime comment la formule
explicite obtenue est reliée à l’application tangente abstraite Ta f .

Ta φ
Ta M ' Ta φ(U ) = Rn
Ta f Tφ(a) (ψ◦f ◦φ−1 )=Dφ(a) (ψ◦f ◦φ−1 )
Tf (a) ψ
Tf (a) N ' Ta ψ(U ) = Rn

Le théorème d’inversion globale du calcul différentiel se généralise sans


difficulté aux variétés différentielles abstraites.

Théorème 3.25. Soit f : M → N une bijection lisse entre variétés dif-


férentielles. L’application f est un difféomorphisme ⇔ pour tout a ∈ M ,
l’application tangente Ta f est inversible.

3.4 Actions de groupes et variétés quotients


Soit G un groupe agissant sur une variété M . Dans cette section nous al-
lons montrer que sous certaines hypothèses sur l’action, l’espace topologique
des orbites M/G possède une structure de variété canonique. La difficulté
de l’énoncé est essentiellement topologique.

22
3.4 Actions de groupes et variétés quotients A. Touzé – automne 2024

A. Préliminaires topologiques
Définition 3.26. On dit qu’un groupe G agit de façon continue sur un
espace topologique X si pour tout g ∈ G l’application g · − : X → X est
continue. On dit que G agit proprement s’il agit de façon continue et si pour
tous les compacts K, L de X, l’ensemble suivant est fini :
{g ∈ G , g(K) ∩ L 6= ∅} .
Exemples 3.27. 1. Les actions continues des groupes finis sont propres.
2. L’action de Z sur Rn par translations est propre.
n

3. L’action de Z sur R2 donnée par n · (x, y) = (2−n x, 2n y) n’est pas


propre.
Proposition 3.28. Si G agit proprement sur un espace X séparé et locale-
ment compact, alors le quotient X/G est séparé et localement compact, et la
projection p : X → X/G est ouverte.
Sous une hypothèse supplémentaire sur l’action, la projection quotient
X → X/G va se comporter encore plus joliment : ce sera un revêtement
topologique au sens de la définition suivante.
Définition 3.29. Un revêtement topologique est une application continue
p : X → B telle que pour tout b ∈ B il existe un voisinage ouvert Ub de b
tel que l’image réciproque de Ub est une réunion disjointe d’ouverts de X
p−1 (Ub ) =
G

α∈A

et telle que les restrictions p : Vα → Ub soient des homéomorphismes.


Exemples 3.30. 1. Si F est un espace topologique discret, la projection
F × B → B est un revêtement topologique, appelé revêtement trivial.
2. L’application exponentielle induit un revêtement R → S 1 , t 7→ e2iπt .
3. L’application exponentielle induit un revêtement C → C∗ , z 7→ ez .
4. L’application puissance n-ème induit un revêtement C∗ → C∗ , z 7→ z n .
5. Un produit fini de revêtements est un revêtements. Ainsi l’application
Rn → (S 1 )n , (t1 , . . . , tn ) 7→ (e2iπt1 , . . . , e2iπtn ) est un revêtement.
Définition 3.31. On dit qu’un groupe G agit librement sur X si tous les
stabilisateurs de l’action sont triviaux, c’est-à-dire si pour tout x ∈ X et
pour tout g ∈ G on a :
(gx = x) ⇒ (g = 1) .
La proposition suivante complémente la proposition ?? lorsque l’action
est libre.
Proposition 3.32. Soit G un groupe agissant proprement et librement sur
un espace X localement compact. Alors la projection p : X → X/G est un
revêtement.

23
3.4 Actions de groupes et variétés quotients A. Touzé – automne 2024

B. Actions de groupes lisses et quotients


Définition 3.33. Un groupe G agit de façon lisse sur une variété différen-
tielle M si pour tout g ∈ G l’application g · − : M → M est lisse.
Définition 3.34. Un revêtement lisse est une application lisse p : M → B
telle que pour tout b ∈ B il existe un voisinage ouvert Ub de b tel que l’image
réciproque de Ub est une réunion disjointe d’ouverts de M
p−1 (Ub ) =
G

α∈A

et telle que les restrictions p : Vα → Ub soient des difféomorphismes.


Exemples 3.35. Les exemples ?? sont en fait des exemples de revêtements
lisses (dans le premier il faut bien sûr supposer B une variété différentielle.
Remarque 3.36. Si p : M → B est un revêtement topologique entre varié-
tés lisses, et si p est lisse, alors p n’est pas nécessairement un revêtement lisse.
Le problème vient du fait qu’il existe des homéomorphismes lisses qui ne sont
pas des difféomorphismes (par exemple l’application R → R, x 7→ x3 ).
Le théorème suivant assure l’existence des variétés différentielles quo-
tient.
Théorème 3.37. Soit M une variété lisse, et soit G un groupe agissant de
façon lisse, propre et libre. Alors il existe un unique atlas lisse maximal sur
M/G tel que la projection p : M → M/G soit un revêtement lisse.
Corollaire 3.38. Une fonction f : M/G → N est lisse si et seulement si
la composée f ◦ p est lisse.
Les variétés quotient permettent de revisiter certains exemples de varié-
tés différentielles, et d’en donner de nouveaux.
Exemple 3.39 (Tores). Le groupe additif Zn agit sur Rn par translations.
Le quotient Rn /Zn possède une structure de variété différentielle, difféo-
morphe au tore T n = (S 1 )n .
Exemple 3.40 (Espaces projectifs). Le groupe cyclique C2 à deux éléments
agit sur S n par antipodie (c’est-à-dire que le générateur σ de C2 agit comme
l’application antipode x 7→ −x sur S n ). Le quotient S n /C2 possède une
structure de variété différentielle, difféomorphe à Pn (R).
Exemple 3.41 (Ruban de Moebius). Le groupe cyclique C2 à deux éléments
agit par antipodie sur la "bande équatoriale" BE de S 2 :
1
 
BE = x = (x1 , x2 , x3 ) ∈ S 2 , |x1 | < .
2
Le quotient a une structure de variété différentielle, on l’appelle le ruban
de Moebius. Le ruban de Moebius est difféomorphe à un ouvert du plan
projectif P2 (R).

24
3.5 Complément : π1 des variétés quotients A. Touzé – automne 2024

Exemple 3.42 (Variétés lenticulaires). Soient p et q deux entiers premiers


entre eux, soit ζ = e2iπ/p , et soit Cp le groupe cyclique à p éléments et σ un
générateur. Alors Cp agit sur
S 3 = {(z1 , z 2 ) ∈ C2 , |z1 |2 + |z2 |2 = 1}
par la formule
σ · (z1 , z2 ) = (ζz1 , ζ q z2 )
Le quotient S 3 /Cp possède une structure de variété différentielle, cette va-
riété est notée L(p, q) et appelée la variété lenticulaire (de paramètres (p, q)).
Notons que L(p, q1 ) = L(p, q2 ) si q1 = q2 mod p, et que L(2, 1) = P3 (R).
Voir l’exercice ?? pour des identifications supplémentaires entre variétés len-
ticulaire.

3.5 Complément : π1 des variétés quotients


Nous rappelons maintenant quelques morceaux du cours de topologie
algébrique sur le groupe fondamental et les revêtements (module de M1).
Les résultats de cette section sont importants et permettent de mieux com-
prendre la topologie des variétés quotient. Toutefois, nous les donnons ici à
titre de "complément culturel" : nous en ferons une utilisation relativement
anecdotique. Ces résultats ne seront pas démontrés dans le cours, on renvoie
à [?, Chap 1, 3, 4] ou à [?, Chap III] pour les détails des démonstrations et
pour des informations complémentaires.

A. Définition du groupe fondamental. Soit X un espace topologique


et x ∈ X. Un lacet de X de point de base x est une application continue
γ : [0, 1] → X telle que γ(0) = γ(1) = x. On note Ωx (X) l’ensemble des
lacets de X de point de base x.
Deux lacets γ0 et γ1 dans Ωx (X) sont dits homotopes par une homotopie
pointée s’il existe une application continue H : [0, 1] × [0, 1] → X telle que
(i) H(0, t) = γ0 (t) pour tout t ∈ [0, 1],
(ii) H(1, t) = γ1 (t) pour tout t ∈ [0, 1],
(iii) H(s, 0) = H(s, 1) = x pour tout s ∈ [0, 1].
L’application H s’appelle une homotopie pointée 9 . En d’autres termes, H est
une déformation de paramètre s, qui permet de passer de manière continue
de γ0 à γ1 . La dernière condition assure que tout au long de la déformation,
l’application γs : [0, 1] → X, t 7→ H(s, t) reste bien un élément de Ωx (X).
La relation d’homotopie pointée est une relation d’équivalence sur
Ωx (X). On note π1 (X, x) l’ensemble quotient :
π1 (X, x) = Ωx (X)/ ∼
9. Le terme "pointée" est là pour rappeler la condition (iii) : le point de base ne bouge
pas au cours de la déformation.

25
3.5 Complément : π1 des variétés quotients A. Touzé – automne 2024

Notons [γ] ∈ π( X, x) la classe d’un lacet γ ∈ Ωx (X). L’ensemble π1 (X, x)


est muni d’une structure de groupe par l’opération [γ][µ] := [γµ], où γµ est
le lacet obtenu en parcourant à la suite les lacets γ et µ, plus précisément :

si 0 ≤ t ≤ 1/2,
(
γ(2t)
(γµ)(t) =
µ(2t − 1) si 1/2 ≤ t ≤ 1.

L’élément neutre est le lacet constant en x : x : [0, 1] → X, t 7→ x, l’inverse


γ −1 d’un lacet γ est le même lacet, mais parcouru à l’envers γ −1 (t) = γ(1−t).
L’ensemble π1 (X, x), muni de cette structure de groupe, s’ap-
pelle le groupe fondamental de X (au point x).

B. Propriétés de base du groupe fondamental.


1. (In)dépendance du point de base. [?, Prop 1.14] S’il existe un
chemin de X reliant x à y, c’est-à-dire une application continue γ :
[0, 1] → X telle que γ(0) = x et γ(1) = y, alors les groupes π1 (X, x)
et π1 (X, y) sont isomorphes.
En particulier, si X est connexe par arcs, le groupe fondamental ne
dépend pas du choix du point de base, à isomorphisme près. Dans ce
cas, on dit souvent "le groupe fondamental de X" sans préciser le point
de base.
2. Simple connexité. Un espace X est simplement connexe s’il est
connexe par arcs, et si son groupe fondamental est trivial (= si c’est
un groupe à un élément).
Ex n°1 : si X est un sous-ensemble de Rn étoilé par rapport à un point
x, alors X est simplement connexe. En effet, il est connexe par arcs, et
si γ est un lacet de X basé en x alors on obtient une homotopie pointée
H entre γ et le lacet constant en x en posant H(s, t) = sx+(1−s)γ(t).
Ex n°2 : les sphères S n , n ≥ 2, sont simplement connexes. Voir [?, Thm
1.36] pour une démonstration topologico-algébrique, ou l’exercice ??
pour une démonstration de géométrie différentielle.
3. Fonctorialité. Si f : X → Y est une application continue, elle induit
pour tout x ∈ X un morphisme de groupes :

f# : π1 (X, x) → π1 (Y, f (x))


.
[γ] 7→ [f ◦ γ]

En particulier, si f est un homéomorphisme 10 , alors f# est un isomor-


phisme d’inverse (f −1 )# .
10. Plus généralement, et un peu plus subtilement, si f est une équivalence d’homotopie
alors f# est un isomorphisme, [?, Thm 1.17].

26
3.5 Complément : π1 des variétés quotients A. Touzé – automne 2024

C. Groupe fondamental et variétés quotients. Rappelons le théo-


rème ?? : si G est un groupe agissant de façon lisse, propre et libre sur une
variété différentielle M , alors M/G est une variété et p : M → M/G est un
revêtement lisse.
La théorie des revêtements topologiques est intimement liée au groupe
fondamental. Nous énonçons ici deux résultats importants reliant ces no-
tions, que nous formulons dans le cadre des variétés différentielles. Le pre-
mier théorème suit de [?, Thm 4.29 et Prop 4.30].
Théorème 3.43. si G est un groupe agissant de façon lisse, propre et
libre sur une variété différentielle M simplement connexe, alors M/G
est connexe par arcs et son groupe fondamental est isomorphe à G.
Exemples 3.44. S 1 a pour groupe fondamental Z, Pn (R) a pour groupe
fondamental le groupe cyclique C2 à deux éléments, L(p, q) a pour groupe
fondamental le groupe cyclique Cp à p éléments . . .
Le deuxième théorème généralise la construction du logarithme com-
plexe 11 . Plus précisément, on suppose qu’on dispose d’un revêtement lisse
p : M → B et d’une application lisse f : N → B. On prend un point n ∈ N ,
et un point m ∈ M tel que p(m) = f (n) =: b, et on se demande s’il existe
une application lisse f : N → M telle que f (n) = m. La situation peut être
représentée par le diagramme suivant, et f est appelé un relèvement de f .

(M, m)
∃?f
p
f
(N, n) (B, b)

D’après l’exercice ?? si on trouve une application f continue répondant


à ce problème, alors elle est automatiquement lisse. Le théorème suivant
est donc une conséquence du théorème [?, Thm 4.10] sur les revêtements
topologiques.
Théorème 3.45. L’application lisse f existe si et seulement si l’image du
morphisme de groupes f] : π1 (N, n) → π1 (B, b) est contenue dans l’image
du morphisme de groupes p] : π1 (M, m) → π1 (B, b). De plus, si f existe,
elle est unique.
le revêtement lisse p : M → M/G associé à une action de groupe lisse,
propre et libre sur une variété simplement connexe M , alors il l’application
lisse f existe si et seulement si le morphisme de groupes f] : π1 (N, n) →
π1 (B, b) est trivial. Cette situation généralise
11. Si on considère le revêtement lisse p : C → C∗ donné par l’exponentielle, si U est un
ouvert de C∗ et f : U → C∗ est l’inclusion, alors l’application f est une détermination du
logarithme sur U.

27
3.6 Sous-variétés, plongements, submersions A. Touzé – automne 2024

3.6 Sous-variétés, plongements, submersions


La définition suivante étend la notion de sous-variété de Rn au cadre des
variétés différentielles abstraites.
Définition 3.46. Soit M une variété différentielle de dimension n, et N
un sous-ensemble non vide de M . On dit que N est une sous-variété de M
de dimension p lorsque pour tout x ∈ N , il existe une carte (U, φ) dont le
domaine contient x telle que

φ(N ∩ U) = φ(U) ∩ ({0} × Rp ) .

Si N est une sous-variété de M , alors pour chaque carte (U, φ) comme


dans la définition, la restriction φ : N ∩ U → Rp est un homéomorphisme
de N ∩ U sur un ouvert de Rp . L’ensemble de ces restrictions forme un atlas
lisse sur N , qui fait de N une variété différentielle abstraite de dimension p.
Définition 3.47. Une application lisse f : N → M est une immersion si
pour tout a ∈ N , l’application tangente Ta f est surjective. Un plongement
est une immersion qui induit un homéomorphisme sur son image.
Exemple 3.48. Si N est une sous-variété de M , alors l’inclusion N ,→ M
est un plongement.
La proposition suivante montre que l’exemple ?? est, à difféomorphisme
près, l’unique exemple de plongement.
Proposition 3.49. Soit f : N → M un plongement. Alors l’image f (N )
est une sous-variété de M , et f induit un difféomorphisme de N sur f (N ).
Les submersions sont un moyen commode de produire des sous-variétés.
Définition 3.50. Une application lisse f : M → L est une submersion si
pour tout a ∈ M , l’application tangente Ta f est surjective (injective).
Proposition 3.51. Soit f : M → L une submersion. Alors pour tout b ∈ L,
l’ensemble de niveau Mb := f −1 (b) est une sous-variété de M de dimension
dim M −dim L, et pour tout a ∈ Mb l’espace tangent Ta Mb est égal au noyau
de Ta f .
Théorème 3.52 (Whitney). Toute variété différentielle se plonge dans un
espace vectoriel.
De manière équivalente, toute variété différentielle est isomorphe à une
sous-variété de Rn . Les variétés différentielles abstraites n’apportent fina-
lement pas de nouveaux exemples par rapport aux sous-variétés de Rn ,
mais remarquons que la théorie abstraite est plus souple d’utilisation : par
exemple il aurait été bien pénible d’exposer la construction des quotients
dans le cadre des sous-variétés de Rn !

28
3.7 Partitions de l’unité A. Touzé – automne 2024

3.7 Partitions de l’unité


Soit U = (Uα )α∈A un recouvrement ouvert de M . Un raffinement de U
est un recouvrement ouvert V = (Vβ )β∈B tel que pour tout β ∈ B il existe
α ∈ A tel que Vβ ⊂ Uα . Un recouvrement ouvert U est dit localement fini si
tout point x ∈ M possède un voisinage B qui n’intersecte non trivialement
Uα pour un nombre fini d’indices α seulement.
Rappelons que le support d’une fonction f : M → R est le sous ensemble
fermé supp(f ) := {x ∈ M , f (x) 6= 0}.

Théorème 3.53. Soit M une variété différentielle.


1. Tout recouvrement ouvert de M admet un raffinement qui est locale-
ment fini.
2. Si (Uα )α∈A est un recouvrement ouvert localement fini de M alors il
existe une famille de fonctions lisses gα : M → [0, 1] telle que :
(i) Pour tout α ∈ A, supp(gα ) ⊂ Uα ,
= 1.
P
(ii) α∈A gα

Remarque 3.54. Pour tout x ∈ M la finitude locale du recouvrement


ouvert (Uα )α∈A et la condition (i) impliquent que la somme α∈A gα (x) n’a
P

qu’un nombre fini de termes non nuls. C’est donc une somme "algébrique".

Les partitions de l’unité sont un outil puissant pour construire des objets
globaux à partir d’objets locaux. La proposition suivante est un exemple
type de ce genre de situation. Nous donnons la démonstration car c’est un
raisonnement standard.

Proposition 3.55. Soit N une sous-variété de M . Pour toute fonction lisse


f : N → R il existe une fonction lisse F : M → R dont la restriction à N
est égale à f .

Démonstration. 1. On démontre d’abord le résultat localement : pour


tout x ∈ N , il existe un ouvert Ux de M et une fonction lisse Fx :
Ux → R dont la restriction à N ∩ Ux coïncide avec f .
Pour montrer ce résultat local, on utilise une carte (Ux , φx ) autour de
x, qui redresse la sous-variété N : φx (N ∩ Ux ) = φx (Ux ) ∩ ({0} × Rp ).
Quitte à rétrécir Ux on peut supposer que φx (Ux ) est de la forme
V × W où V est un ouvert de Rn−p et W un ouvert de Rp . Trouver
une fonction lisse Fx qui étende f à Ux est alors équivalent à trouver
une fonction lisse qui étende f ◦ φ−1
x : {0} × W → R à V × W , ce qui
est facile à faire (on prend la fonction (x, y) 7→ f (φ−1
x (0, y)).

2. On utilise alors le théorème des partitions de l’unité pour "recoller les


fonctions définies localement".

29
3.8 Autour du lemme de Sard A. Touzé – automne 2024

Plus précisément, si x ∈ M \ N , on choisit un ouvert Ux contenant x et


ne rencontrant pas N , et on pose Fx := 0 : Ux → R. Avec les ouverts de
la première étape, on obtient donc un recouvrement ouvert (Ux )x∈M
de M , qui admet un raffinement (Vα )α∈A localement fini. Pour chaque
indice α, on choisit un x tel que Vα ⊂ Ux et on note Fα : Vα → R la
restriction de Fx à Vα .
Les Fα ont été définies indépendamment les unes des autres, elles n’ont
aucune raison de se recoller convenablement pour former une fonction
lisse F . Mais on contourne ce problème à l’aide d’une partition de
l’unité gα : Vα → [0, 1] associée au recouvrement (Vα )α∈A . On définit
d’abord des fonctions lisses :
Fα : M → R
gα (x)Fα (x) si x ∈ Vα ,
(
x 7→
0 si x ∈ M \ supp(gα ).

(Les F α sont bien lisses car définies comme la réunion de deux fonctions
lisses qui coïncident sur l’intersection de leurs ensembles de définition.)
On peut maintenant définir la fonction globale F comme la somme :

F :=
X
Fα .
α∈A

Cette somme est finie au voisinage de chaque x ∈ M (car le recouvre-


ment formé par les Vα est localement fini et supp(F α ) ⊂ Vα ) et elle
est lisse car localement une somme finie de fonctions lisses. De plus si
x ∈ N alors on a

F (x) = F α (x) = F α (x) = gα (x)Fα (x) .


X X X

α∈A α∈A , x∈Vα α∈A , x∈Vα

Comme x ∈ N ∩ Vα on a Fα (x) = f (x), et comme les gα sont une


partition de l’unité on a :

F (x) = gα (x)f (x) = gα (x)f (x) = f (x) .


X X

α∈A , x∈Vα α∈A

3.8 Autour du lemme de Sard


Une partie X d’une variété différentielle M est dite négligeable si pour
toute carte (U, φ) de M , la partie φ(U ∩ X) est négligeable dans Rdim M .
Les sous-ensembles d’une partie négligeable sont négligeables, et les parties
négligeables sont stables par réunion dénombrable.

30
3.8 Autour du lemme de Sard A. Touzé – automne 2024

Proposition 3.56. Soit f : N → M une fonction lisse. Si dim N < dim M ,


alors l’image de f est négligeable dans M .

La proposition précédente est un un point clé pour faire fonctionner des


arguments de position générale. L’exemple suivant est un modèle élémentaire
de ce genre d’argument.

Exemple 3.57. Soit M et N deux sous-variétés de Rn telles que dim M +


dim N < n. Alors pour tout réel  > 0, il existe un vecteur b ∈ Rn tel
que ||b|| <  et tel que la variété translatée b + M = {b + m , m ∈ M }
ne rencontre pas N . En effet la l’image de la fonction f : M × N → Rn ,
(m, n) 7→ m − n est de mesure nulle, et le complémentaire de l’image est
précisément l’ensemble des vecteurs b tels que (b + M ) ∩ N = ∅. Remarquons
que la condition sur les dimensions est absolument nécessaire : deux cercles
de R2 ayant une corde commune ne peuvent pas être séparés si on translate
l’un des deux par un vecteur trop petit.

Un raisonnement du même type, mais un peu plus sophistiqué, permet


de démontrer les deux propositions suivantes.

Proposition 3.58. Pour tout vecteur v ∈ S n−1 , on note pv : Rn → Rn la


projection orthogonale sur l’hyperplan v ⊥ . Si f : M → Rn est un plongement,
on note :

If = {v ∈ S n−1 , pv ◦ f est une immersion } ,


Pf = {v ∈ S n−1 , pv ◦ f est un plongement } ,

Alors If est dense dans S n−1 dès que 2 dim M < n, et Pf est dense dans
S n−1 dès que 2 dim M + 1 < n.

Corollaire 3.59. Toute variété différentielle de dimension n se plonge dans


R2n+1 et s’immerge dans R2n .

Proposition 3.60. Soit f : M → Rn un plongement. Soit pr : Rn → Rn−1


telle que pr(x1 , . . . , xn ) = (x1 , . . . , xn−1 ).
Si 2 dim M + 1 < n alors pour tout réel  > 0 il existe une application
linéaire a : Rn → Rn−1 telle que |||a − pr||| <  et a ◦ f est un plongement.
Si 2 dim M < n alors pour tout réel  > 0 il existe une application linéaire
a : Rn → Rn−1 telle que |||a − pr||| <  et a ◦ f est une immersion.

Corollaire 3.61. Soit M une variété compacte, et considérons l’espace vec-


toriel C ∞ (M, Rk ) muni de la norme infinie (norme de la convergence uni-
forme). Si 2 dim M ≤ k alors les immersions sont denses dans C ∞ (M, Rk ),
et si 2 dim M + 1 ≤ k alors les plongements sont denses dans C ∞ (M, Rk ).

31
3.9 Complément : classification des variétés A. Touzé – automne 2024

3.9 Complément : classification des variétés


Une question "naïve" est de classifier les variétés différentielles à difféo-
morphisme près. Ceci peut être réalisé en dimension 1, où l’on peut montrer
que toute variété de dimension 1 est difféomorphe au cercle S 1 ou à la droite
réelle R, voir par exemple [?, Chap III, thm 55].
Le monde des variétés de dimension 2 est plus riche, mais encore classi-
fiable (au moins en ce qui concerne les variétés compactes). On peut montrer
que les surfaces lisses compactes sont caractérisées à difféomorphisme près
par deux notions : leur orientabilité (une surface est orientable si et seule-
ment si elle ne contient pas de ruban de Moebius, nous reviendrons sur
cette notion un peu plus tard dans le cours), et leur genre g (le genre de
M est l’entier 12 dim H 1 (M ), nous y reviendrons également plus tard dans
le cours). Pour produire des modèles explicites des surfaces, on peut utili-
ser l’opération de somme connexe #, voir par exemple [?, Chap II, ex 28].
Plus précisément, toute surface orientable compacte est difféomorphe à une
surface :
Sg := S 2 # T 2 # · · · #T 2
| {z }
g copies de T 2

pour un unique g ≥ 0, et toute surface non orientable compacte est difféo-


morphe à la surface

Sg0 := P2 (R) #T 2 # · · · #T 2
| {z }
g copies de T 2

pour un unique g ≥ 0. Une démonstration classique de la classification passe


par la théorie de Morse, voir par exemple l’article d’exposition :
[CKK] A. Champanerkar, A. Kumar et S. Kumaresan, Classification of sur-
faces via Morse theory, Expositiones Mathemathicae, 18 (2000) no.
1, 37–73.
A partir de la dimension 3 la situation devient beaucoup plus compli-
quée, et la classification est hors de portée. Ainsi, le simple fait de montrer
qu’à difféomorphisme près, la seule variété compacte simplement connexe de
dimension 3 est la sphère S 3 , est l’objet de la célèbre conjecture de Poincaré
(résolue en 2002 par G. Perelman).

32
3.9 Complément : classification des variétés A. Touzé – automne 2024

Exercices du chapitre 3

Exercice 15. Propriétés des variétés topologiques. Soit M une va-


riété topologique de dimension n.
1. Montrez que U est un ouvert connexe de M si et seulement si U est
un ouvert connexe par arcs.
2. Montrez que si M est connexe et si n ≥ 2 alors pour tout x ∈ M
M \ {x} connexe.
3. Montrez que les composantes connexes de M sont ouvertes et fermées
dans M .
4. Montrez que si M est compacte, elle a un nombre fini de composantes
connexes.

Exercice 16. Atlas dénombrable. Soit M une variété différentielle.


Montrez que l’on peut trouver une famille dénombrable de cartes dont les
domaines recouvrent M .

Exercice 17. Cartes de l’atlas maximal engendré par A. Soit A un


atlas lisse sur une variété topologique M , et Amax l’atlas maximal associé.
Soit U un ouvert de M et φ : U → V un homéomorphisme sur un
ouvert de Rn . Montrez que φ ∈ Amax si et seulement si pour tout x ∈ U
on peut trouver une carte (U 0 , φ0 ) ∈ A dont le domaine contient x, et un
difféomorphisme ψ : φ0 (U ∩ U 0 ) → φ(U ∩ U 0 ) telles que les applications φ et
ψ ◦ φ0 sont égales sur U ∩ U 0 .

Exercice 18. Espaces projectifs complexes. Notons Pn (C) le quotient


de Cn+1 \ {0} par la relation d’équivalence x ∼ y ⇔ ∃λ ∈ C∗ x = λy.
On munit Pn (C) de la topologie quotient. On note [z0 : · · · : zn ] la classe
d’équivalence d’un point
1. Montrez que Pn (C) est égal au quotient de S 2n+1 =
{(z0 , . . . , zn ) , |z0 | + · · · + |zn | = 1} par la relation d’équiva-
2 2

lence x ∼ y ⇔ ∃λ ∈ S 1 x = λy.
En déduire que Pn (C) est séparé, puis que Pn (C) est compact.
2. Montrez que les sous-ensembles Ui = {[z0 : · · · : zn ] , zi 6= 0} sont des
ouverts de Pn (C), et que les fonctions

φi : Ui → Cn
1
[z0 : · · · : zn ] 7→ (z0 , . . . , zi−1 , zi+1 , . . . , zn )
zi
sont des homéomorphismes.

33
3.9 Complément : classification des variétés A. Touzé – automne 2024

3. Montrez que les φi , 0 ≤ i ≤ n, forment un atlas lisse de Pn (C).

Exercice 19. Droite projective P1 (C). On interprète S 2 comme la


sous-variété {(z, t) ∈ C × R , |z|2 + t2 = 1}.
1. Montrez que l’application h : S 3 → C × R telle que h(z1 , z2 ) =
(2z1 z2 , |z1 |2 − |z2 |2 ) a pour image S 2 .
2. Montrez que h induit une bijection continue h : P1 (C) → S 2 .
3. Montrez que h est un difféomorphisme.

Exercice 20. Revêtements vs difféomorphismes locaux.


1. Soit p : X → B un revêtement, de base B connexe. Montrez que le
cardinal de p−1 (b) est indépendant de b.
2. Soit p : X → B un difféomorphisme local, tel que pour tout b ∈ B, la
fibre p−1 (b) est de cardinal fini n indépendant de b. Montrez que p est
un revêtement lisse.
3. Trouvez un exemple de difféomorphisme local, dont toutes les fibres
sont de même cardinal infini dénombrable, et qui n’est pas un revête-
ment lisse.
[Indication : "poinçonnez" l’exponentielle.]

Exercice 21. Lissité et revêtements. Soit p : M → B un revêtement


lisse, et f : N → M une application continue. Montrez que f est lisse si et
seulement si p ◦ f est lisse.

Exercice 22. Quotients du cercle.


1. On identifie S 1 avec l’ensemble des nombres complexes de module 1.
On considère le groupe cyclique Cn = {eikπ/n , 0 ≤ k < n}, qui agit sur
S 1 par multiplication.
Montrez que l’on a un difféomorphisme S 1 /Cn ' S 1 .
2. En déduire que P1 (R) est difféomorphe à S 1 .

Exercice 23. Variétés lenticulaires. Soient p et q deux nombres premiers


entre eux, et L(p, q) la variété lenticulaire associée (voir l’exemple ??). On
voit S 3 comme la sphère unité de C2 .
1. Montrez que si L(p, q) et L(p0 , q 0 ) sont difféomorphes, alors p = p0 .
[Indication : utilisez le groupe fondamental.]
2. On suppose que q1 = −q2 mod p. Montrez que l’application S 3 → S 3 ,
(z1 , z2 ) 7→ (z1 , z2 ) induit un difféomorphisme entre L(p; q1 ) et L(p; q2 ).

34
3.9 Complément : classification des variétés A. Touzé – automne 2024

3. On suppose que q1 q2 = 1 mod p. Montrez que l’application S 3 → S 3 ,


(z1 , z2 ) 7→ (z2 , z1 ) induit un difféomorphisme entre L(p, q1 ) et L(p, q2 ).
4. En déduire que si q1 = ±q2±1 mod p, alors L(p, q1 ) et L(p, q2 ) sont
difféomorphes.
[Pour la culture : on peut en fait montrer que L(p, q1 ) et L(p, q2 ) sont difféomorphes
si et seulement si q1 = ±q2±1 mod p, mais les techniques utilisées pour démontrer
la partie "seulement si" dépassent le cadre de ce cours. Le lecteur intéressé pourra
consulter l’article "espaces lenticulaires" de wikipédia, et les références qui y sont
mentionnées.]

Exercice 24. Immersions, submersions. Soit M une variété diffé-


rentielle de dimension m, N une variété différentielle de dimension n et
f : M → N une application lisse.
1. On suppose que f est une submersion. Montrez que pour tout x ∈ M
il existe une carte (U, φ) de M dont le domaine contient x et une carte
(V, ψ) de N telles que f (U ) ⊂ V et telles que la composée

φ−1 f ψ
φ(U ) −−→ U − → ψ(V )
→V −

est égale à l’application (x1 , . . . , xn ) 7→ (x1 , . . . , xp ).


2. On suppose que f est une immersion. Montrez que pour tout x ∈ M il
existe une carte (U, φ) de M dont le domaine contient x et une carte
(V, ψ) de N telles que f (U ) ⊂ V et telles que la composée

φ−1 f ψ
φ(U ) −−→ U − → ψ(V )
→V −

est égale à l’application (x1 , . . . , xn ) 7→ (x1 , . . . , xn , 0, . . . , 0).

Exercice 25. Sous-variétés et applications de rang constant. Soit


f : M → N une application lisse telle que pour tout a ∈ M , Ta f est de
rang r, pour un entier r indépendant de a. Montrez que pour tout b ∈
N l’ensemble de niveau Mb = f −1 (b) est une sous-variété de M , dont on
précisera la dimension.

Exercice 26. Droite de Kronecker du tore. Soit α un nombre réel.


Soit γ : R → R2 /Z2 l’application telle que γ(t) = (t, αt).
1. Montrez que γ est une immersion lisse.
2. On suppose que α = pq avec p et q premiers entre eux. Notons R/qZ le
quotient de R par l’action par translation du sous-groupe discret qZ
des entiers multiples de q.

35
3.9 Complément : classification des variétés A. Touzé – automne 2024

(a) Montrez que R/qZ est une variété différentielle difféomorphe à


S 1 , et que l’application quotient q : R → R/qZ est un revêtement
lisse à q feuillets.
(b) Montrez qu’il existe un plongement γ : R/qZ → R2 /Z2 tel que
γ = γ ◦ q.
(c) Montrez que l’image de γ est un sous-variété du tore R2 /Z2 , dif-
féomorphe à S 1 .
3. On suppose maintenant α 6∈ Q. Dans ce cas, l’image de γ s’appelle
la droite de Kronecker du tore R2 /Z2 . Nous la noterons Dα dans cet
exercice.
(a) Montrez que Dα est dense dans le tore.
(b) Déduisez-en que Dα n’est pas une sous-variété du tore, et que γ
est une immersion injective lisse qui n’est pas un plongement.

Exercice 27. Connexité du complémentaire. Soit M une sous-variété


de Rn telle que dim M ≤ n − 2. Soit U = Rn \ M . Soient x et y deux points
distincts de U.
Soit λ : R → [0, 1] une fonction lisse telle que λ(t) = 0 pour t ≤ 0 et
λ(t) = 1 pour t ≥ 1. On considère la fonction fx,y : M × R → Rn telle que
fx,y (m, t) = m − x − λ(t)(y − x).
1. Justifier que l’image de fx,y est de mesure nulle.
2. Déduisez-en l’existence d’un chemin continu de U reliant x et y.
Généralisation : soit M une sous-variété de N telle que dim M ≤ dim N − 2.
Montrez que pour tout x, y dans N \ M , il existe un chemin continu de
N \ M reliant x à y.
[Indication : à l’aide de cartes bien choisies, ramenez la situation au cas précédent]

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