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Vies Des Pères, Des Martyrs Et Autres Principaux Saints Alban Butler

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HEEKGENT
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VIES
DËS PËRES,
DES MARTYRS,
ÊfDESAUtREi
PRINCIPAUX SAINTS

*

Tirées des ÀBes ûrïgindux 3 & des Monumenti


les plus authentiques ; avec des Nous
hijloriques & critiques.

Ouvrage traduit de l'Anglois*

A VILLEf RAtf CHE-DE-ItOUERÔUÈ,


Chci Pierre Vedeilhié, Iibraire-Imprurieur*

A PARIS,
Chez Barbou, nie Saint Jacques , âitx CîgogHes«

— I '
V
M. DCC. LXIV,
Ayu Approbation & Privilège du Roi,

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^!tV» v * v <• T' * i'e Z v C ^T r** : f v
;
* *
Hff !

•5>

VIES DES PERES,


DES MARTYRS*
ET DES AUTRES PRINCIPAUX SAINTS.

7. JOUR DE FÉVRIÈR.
SAINT IGNACE,
EVÊQUE D'ANTIOCHE,
Martyr*
Tiré de Jls Lettres , des Actes de fort Martyrij ,

£Eufcbe y
de Saint Chryfoflome \ Hom. in S. Ignat* ,

MarL T. x 9 pag. 592, , Edit. Ben. Foyt[ idU*


riont 9 T. 2 y p. /90 ; Cave , T*. 1 9 p. 100 ; D.
Cidiur 9 T. 1
y p. 620 ; D. Maréchal 9 Con'corde
"
des Pères Grecs & Latins , T. 1 > p# 58*

L'An 107

r*
s(a)AINT TGNACE, furnommé
étoit, félon les Aftes de fon martyre ,
Thlopho- février

( a ) Le mot grec $n*£#c me fyllabe , comme dans les


fignirie Porte - Dieu , lorfque Actes de notre Saint. Mai*
i accent eft fur la pénultiè- s'il a l'accent fur l'anté-pénuk

Aij
4 SAfNÏ I G fï \C E 3 E. M.
difciple de Saint Jean t'Évangélifte ( b ). Les '

Apôtres l'éleverent fur le Siège d'Antioche f


après la mort de Saint Évode ; nous appre-* &
nons de Saint Chryfoftome ( i J y qu'il fut un
rnodele de toutes les vertus épiicopales , pen-
dant quarante ans qu'il gouverna cette Eglife.
Il ne ceffa , durant la perlecution de Dorrritlen

de veiller à la garde de Ton troupeau , de &


le foutenir par les exhortations fes prières. &
I^a paix ayant été rendue à fÊglife par la mort
du perfécuteur , il s'en réjouit pour l'amour des
Fidèles ; mais il s'attrifta en même temps de


- ~

ticme, (a (ignification eft paf- Saint Pierre *, 8c dans fa Chro-


iive , &
il veut dir? pond de nique , il met rintroaifation
Dieu, du même Saint à l'an 43. de
(b) Saint Grégoire , /• 4 , Jefus-Chrift. Il ajoute qu'il

£p, 17. le fait difciple 4e Saint mourut en 68 , que Saint &


Pierre. L'Auteur des Confti- Ignace lui fuccéda. Baronius
tutions Apoftoliques prétend pour lever la difficulté , fup-
/. 7 , c, 46 , qu'il fut auflî dif- pofe qu'il y avoit à Antioche
ciple Saint deux Évêqucs , l'un pour les
de Saint Paul.
Chryfoftome , Hom, in S. Ig~ Juifs , & l'autre pour les Gen-
9et, & Théodoret, Viol, /. tils v 6c que S. Ignace, Évcque
donnent pour certain, qu'il des premiers , fut aui& changé
fut fait Évcquc par le choix & de la conduite des féconds
par rimpofition des nains de après la mort <fe Saint Êvode.
.Saint Pierre & de Saint Pau} Quelques critiques ont pré-
qui avoient conjointement tendu que le favant Cardinal
planté la Foi à Antioche. .Se- s'étoit trompé dans l'indica-
lon Saint Chryfoftome, Saint tion de l'année de la mort de
Pierre éleva Saint Ignace fin- Saint Évode ; &
ils la mettent

ie Siège d'Antioche , lorfqu'il avant le martyre de S. Pierre,


le quitta. Origene , Hom. 6 , qui lui donna S. Ignace pour
in Luc, Saint Àthanafe, de Syn. fuccefleur. (
Voyez Cotelicr,
ôcTillcmont, Kat.
p. oxt, Facundus, Ôcc. paroif-
fent avoir été du même fénti- 1, p. jjC). Saint Évode cft

ment. Mais l'autorité d'Eufe- nommé le 7. Septembre dans


be caufe un embarras* Cet les Ménées.
Auteur dit dans fou Hiftoire , ( I ) Hom, in S. Ignxt. T. 2.

xi. j6j que Saint Êvode


/. j, c. p. fps. Theodorct , t. p.
fut le fuccefleur immédiat de SU

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$ AI NT Jgn ACE 3 E.M. 5
n'avoir pas éfé jugé digne de fouffKr pour le "
"" -^
Seigneur. II concluoit de ce qu'il rfavoit pas février » .

eu le bonheur de fceller fa Foi par Feftufion de


fon fâng * ou'il n'étoit pas encoré parvenu à
cette charité parfaite qui caraôérife le vrai dif-
ciple de Jefus-Chrift.
La paix dont jouiflbient les Chrétiens , ne
rut point troublée durant les quinze mois que
régna Nerva. Mais la perfécution fe ralluma
dans quelques Provinces fous l'Empereur Tra-
fan , comme nous l'apprenons de la lettre écri-
te à ce Prince par Pline le Jeune , Gouverneur
de Bithynie. Ainfi quoiqu'il fut défendu de re-
chercher les Chrétiens , on ne laiffoit pas de
les condamner à mort , lorfqu'ils étoient dé-
noncés. Il faut convenir que Trajan avoit de
belles qualités &
plulieurs vertus morales :
mais il en ternit l'éclat par des vices honteux
& par les cruautés qu'il exerça contre les ado-
rateurs du vrai Dieu. 11 devint perfécuîeur par
une prétendue reconnoiffance envers fes Divi-
nités imaginaires , auxquelles il fe croyoit re-

devable des viôoires qu'il avoit remportées fur


les Daces &
les Scythes , dans les années 101
6 ioj. Perfuadé que rien ne pourroit plus ré-
tfter a l'effort de les armes , il réfolut de les
tourner contre les Parthes , qui avoient fou-
vent donné de l'inquiétude à l'Empire. Il par-
tit donc pour l'Orient, l'an 106 de Jefus-Chrift,
qui étoit le 9 e . de fon règne. Il vint à Antio-
die , l'année fuivante , eç y fit fon entrée fe
7 Janvier avec beaucoup de magnificence. Son
premier foin , en arrivant dans cette Ville , fut
de pourvoir à la glpire de fes Dieux ; ce qui
le porta à exiger des Chrétiens qu'ils les ado-
rafient , ÔC-à prononcer la peine de mort cou-
Aiij

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I
4 S A TNT lGNACE,E.M f

tre.ceux qui refuferoient de 1$ foire.


février j Ignace , gui ne craignoit que pour fon trou*
peau , fe laiifa généreufement conduire devant
i! cilap-été l'Empereur, qui lui dit çn le voyait: : » C'eft
fi <on4amne
H j onc vous ^ mauva is Démon , qui ofez enr
* ^ 9r
' r
>> freindre mes ordres , &
periuader aux autres
» de périr miférablement ? Ignace répondit :
» Perlbnnç n'appelle Théophore un mauvais
#> Démon. Trajan Et qui eft Théophore }
:

» Ignace Celui qui porte Jefus-Chnft dans


:

» fon coeur, Trajan : Vous croyez donc que


» nous n'avons pas dans nos cœurs les Dieux
» qui nous aident à vaincre nos ennemis i
» Ignace C'eft une erreur d'appeller Dieux
:

» Ips Démons que vous adorez ; car il n'y a


» qu'un feuî Dieu qui a fait le Ciel , la Terre %
» avec tout ce qu'ils contiennent , un Jefus- &
» Chrift , fon Fils unique, dans le Royaume
» duquel je défirç ardemment d'êtrç admis*
» Trajan ; Vous voulez fans doute parler de
» celui qui fut crucifié fous Ponce Pilate ? Ig-p
» nace : C'efl celuiJà même, qui par fa mort
f> à crucifié le péché avec l'auteur du péché , qui

>» a triQmphé de la malice des Démons , qui &


» les a affujettis fous les pieds de ceux qui le por-
>> tenf dans leur cqpur. Trajan : Vous portez
» donc le Chrift en vous ? Ignace Oui; car il :

» eft écrit fhabiurai & me repoferai en eipc. » Tra-


:

jan , irrité de la fermeté avec laquelle le fairrt

Évêque avoit prononça la Sen-


confefle fa Foi ,

tence fuiyante » Nous ordonnons qu'Ignace


:

# qui dit porter, jn lui le Crucifié, foit lié &


^ conduit à Rome, ppu* y êtrç dévoré par les
,*» bête$ , &y fçrvir de fpeûale au pçuple» » lf
Martyr ayant entendu l'Arrêt de fa mort , s'é-
çrj?j ç(ans un ^nfport de joie » Je. vous rçnds
:

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e

— - •

Saint Ign ac
» grâces , Seigneur ,

» donné un parfait amour pour vous >


,

de ce que Vous m'avez


de ce
M.

&
7

F £VR1ER
== tè
1
h que vous permettez que je fois lié de chaînes ,
» comme Paul , votre Apôtre, » En achevant
ces paroles , il mit lui-même fes chaînés : puis
il pria pour fon Églife , &
la recommanda à
Dieu avec larmes. Il fe livra enfuite aux Sol-
dats , chargés de le conduire à Rome.
Étant arrivé à Séleucie , il s'embarqua fur*
un Vaiffeau qui Revoit ranger les Cotes dé
l'Afie Mineure ; cependant on choifit une àû-
tre route, qui allongeoit de beaucoup le Voya-
ge , & l'on n'en fait pas bien la raifon : peut-être
vouloit-on montrer le Saint en plus de lieux ,
afin que la connoiffance du fupplicé qu'on lui
deftinoit , effrayât les Chrétiens , &
tous ceux
jui auroient envie de le devenir. Quoiqu'il en
oit , cette longue navigation fut permife par là
vidence , pour que la Viie d'Ignace fervît à
«unfoler &à édifier plufîeurs Eglifes. Notre
Saint fut accompagné depuisla Syrie jufqu'à
Rome , par Reus ,Philon Diacre , &C Agatho-
pode , que l'on croit être les Auteurs des Ac-
tes de ton martyre. Il y eut encore d'autres
Chrétiens d'Antioche qui le devancèrent , &
Y allèrent attendre à Rome. Ignace étoit gardé
mût 8c jour, fur terre , comme fur mer y par *

dix Soldats , auxquels il donna le titre de Léo-


pards, à caufe de leur cruauté , parce que &
ûl patience &C fa douceur ne faUbient que les
aigrir de plus en plus. .

Quoique le fhint Martyr fut obfervé de près


par fes Gardes , il ne laiffoit pas de trouver le
moyen de confirmer dans la Foi les Éelifes des
Villes par oii il paflbit. Dans les iiutruftions
qu'il leur donnoit , il infiftoit particulièrement

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$ Saint Ignace ,E. M,
fur la fuite des Schifmes & des Héréfies & fuf ,

fléceffitédç s'attacher inyiQlabîement à la


FÉVRIER i
tradition dés Aj>ôtres. S^int CHryfofïqme ajoû?
1
• • '

te mj'ij exhortait encore avec une onéjion tou-i


te cfivine , à méprifer la vie préfente , à ne fou-
pirer qu'après les biens futurs , à ne jamais &

x " f 1 1 . i — f i
—— — _
-< —
fervices qui dépendqient d'eux ,
efpérant par
là ferendre dignes de participer à la plénitude
de bénédifHon. Les Églifes d'Afie , non con-r
fp
tentes de députer vers lui, par honneur, des
ÎÊvêques &
de$ Prêtres , chargèrent encorç
plufieurs Fidèles de P^çcompagher \p refte du
voyage ce qui fa ifoit dire au Saint , qu'il avoit
:

avec Tous étoient remplis


Fui plufieyrs Églifes.
d'une grande çppfolation , en voyant Ignace
porter l'amour des foufïrances au plus haut de-
^ré ; car les fatigues d'un voyage auffi long que
pénible , ne faifoient cpi'aygmenter fa force &ç
4

fon courage.
Nptre J>airçt étant arrivé à Smyrjie , profita
f l yifitc S. de la liberté qu'on lui dpnna de descendre du
Polycarpe à Vaiffeau qui
, pour aller faluer S. Polycarpe ,

témoigna combien il fç tenoit honoré d'être


charge d.e chaînes pour le jiom de Jefus-Chrifh
Il reçut dans la même Ville les Députés de di-
verfes Églifes. Celle d'Êptiefe ^voit envoyé fon
£ yêque , nommé Ônéfime , avec Burrhus Dia*
cre , Crocus , Euplus èc Fronton celle de Ma- :

grjéfie étqit repréfent^e par Dafnas fon Évê.


j^ue, Baflus Apollon Prêtres, Sotion Dia &

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Saint Ignace,E.M. 9
fcre : Polybe ,
Évêque de Tralles , repréfentoit
fon Églile, Saint Ignacç écrivit de Smyrne rt vpr "
fy #|
Îuatre lettres , qui toutes portent l'empreinte ~
'un efprit vraiment Apoftolique. La prçrniere
çlt adreffée aux Éphefiens. JLe Saint , après
avoir fait réloge de l'Évêquç Qnéfime cjç &
ceux qui Pavoienf accompagné, exhorte les
Éphéfiens à glorifier Jefus-èhrift en joutes cho-
fes , &
à fe foumettre avec docilité à l'Évêque
& aux Prêtres. » Si je vous donne ççt avis ,
» continuç-t-il , ce n'eft pas que je m'eftime
» quelque çhofe : car je vou$ regarde tous corn-
>» me mes Maîtres. Auffi étoit-ce de vous quç

» je devois recevoir des inftru&ions. Mais la


» charité dont je brûlç pour vous ? ne m'a pas
» permis de garder le fifence. >> Il revient en-
core fur la fourmilion à PEyêque recom- &
mande fortement la fuite des Hérétiques. » J'ai
» fu , dit-il , qu'il a paffé chez vous des hom-
>» mes qui tiennent une mauvaife 4°&rine ;
» mais vou§ vous êtes bouché les oreilles, pour
m ne les pas entendre. Je me réjouis de ce que
» vous priez fans cpflp pour les autres hom-
fp mes. Vous pouvez aum les inftruire par vos
» aérions. Oppofez la douceur à leurs empor-
n tementt , nnimilité à lçur orgueil ^ la prière
» à leurs injures &
à leurç outrages, h II dit
enfuite en parlant dé Jefus-Chriil : » C'eft
,
» pour lui que je porte mes chaînes puifle-je :

» reffufeiter avec elles par la vertu de vos


» prières Je fais qui je fuis ,
! &
à qui j'écris, :
» Je fuis condamné , vpuç avez trouvé mifér
» ricorde ; je fuis dans le péril , vous êtes af-
» fermis dans la Grâce. » Il inlifte fur la nécef-
fité des bonnes œuvres , fans lefquelles la Foi
riç Içrt de rien pour le falut. Ççtoit une exhorr

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• _ -

^ 10 S AI NT IGN ACE y E. M.
* - tatîon indireôe aux Ephéfiens qu'il avoit loués
ffrvfclER i P' us ^ aut ^ e ce (
ï
ue > P ar *a P uret ^ ^e ^ eurs
tifs , rendoient faintes oc fpirituelles leurs
ils

a&ons même les plus indifférentes. Enfuite ,


,

parlant des erreurs de fon temps , il dit : que


Jefus-Chrift notre Dieu , conçu de Marie du
Sang de David , &
du Saint Efprit , eft né &ç
a voulu être baptifé pour purifier l'eau ; & que;
le Démon a ignoré la virginité dç Marie , fort
enfantement t Se la mort du Seigneur, Il en-
feigne plus bas que le pain facré de l'Eucha-
riftie eft un antidote aflliré contre la mort , &
un gage d'immortalité. » Je donnerois volon-
»> tiers ma vie pour vous , continue-t-il , &
» pour cçux que vous m'avez envoyés. Sou-
» venez- vous de moi. Priea pour l'Églife dé
%

» Syrie , d'où l'on m'emmene à Rome , chargé


» de fers , moi qui fuis le dernier de cette Égli-
,
» fe. Je vous falue ert Dieu le Pere , en Je- &
» fus-Chrift , notre commune efpérance. » Les
admirables inftruûions répandues dans la lettre
que nous venons d'analyfer , fe retrouvent en-
core dans celles que notre Saint écrivit aux
Églifes de Magnéfie &
de Tralles ; elles
y &
font préfentées toujours avec la même force &
. la même onôion. Un des points fur lefquels le
faint Martyr infifte le plus , eft l'horreur qu'un
vrai Chrétien doit avoir du Schifme & de l'Hé-
ïéfie. Rien n'eft plus tofachant que la manière
^vec demande de$ prières aux Fidè-
laquelle il

les , tant pour lui , que pour l'Églife dç Syrie


dont il fe juge indigne d'être membre.
Saint Ignace , qui connoiffoit tout le pou-
voir qu'ont les Saints auprès de Dieu , appre-
hendoit que l'on ne demandât que Ton n'ob-&
tint fa délivrance. Il C0iij\ira donc Saint Poly*

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Saint Ignace,E.M. ii
farpe & les autres Fidèles de réunir leurs priè-
res aux tiennes afin aue Dieu
, grâce février
lui fît la
i,9
d'être dévoré par tête?
les & , à
d'aller ainfi
Jefus-Chrift. Ce fat encore dans cette vue qu'il
écrivit de Smyrnç aux Chrétiens de Rome ,
qui y en cas que les bêtes l'épargnaffent mira-
culeulement , comme il étoit déjà arrivé à d'au-
tres Fidèles 9 auroient pu demander fa grâce
&: hii ravir la couronne du martyre. La lettre
dont nous parlons , qui eft peut-être unique en
fon genre , eft en même temps l'expreffiond'un
cœur embrafé de la plus ardente charité. Nous
la rapporterons prefqu'en entier pour l'édifié
cation du leâeur.
» Je crains , dit le faint Martyr aux Romains , Sa lettre au*
» que votre charité ne me nuife. Car il vous Romains-
» eft aifé de faire ce que vous voulez ; &il me

» fera difficile d'arriver à Dieu fi vous m'épar-


p> gnez.. ...... Non jamais je n'aurai une fi belle
,
» occafion d'aller à lui... Si vous ne parlez point
» de moi , je ferai réuni à Dieu ; mais fi vous
» m'aimez félon la chair , je retournerai à la
» courfe. Vous ne pouvez donc me donner une
» plus grande preuve de votre tendreffe , que
» de me laiffer immoler à Dieu , tandis que
* l'Autel eft préparé ; toute la grâce que je
» vous demande , c*eft que formant tous en-
> femble un chœur uni par la chanté 9 vous
» chantiez un Cantique d'à cl ions de grâces à
» Dieu le Pere , de ce que par les mérites de
» Jefus-Chrift , il a fait paflerJ'Évêque de Syrie
» d'Orient en Occident, afin de le tranfporter
tf de ce monde dans le fem dç fa gloire. Vous

» n'avez jamais été envieux de perfonne vous :

» avez inftruit les autres ; agiflez donc confor-


» mémçnt aux inftruâions que vous avez dor**
il Saint Ignace,E.M.
nées. Obtenez-moi par vos prières la fores
» dont befoin au dedans
j'ai &au dehors , afin
» que je rié dife pas feulement , mais que je
m veuille ; que Ton ne me nomme pas feule-
m ment Chrétien , mais que l'on me trouve tel
n Car ce qui fait le Chrétien , ce ne font
» pas les apparences , c'eft la folidité de la ver-
» tu, & la grandeur d'ame dans les épreuves.
» récris aux Églifes , & leur mande à toutes ,
» que je vais mourir pour Dieu, fi vous ne
» m'en empêchez. Ne vous laiffez done pas al-
» lçr à une ftufle compaffion pour moi. Souf-
» frez <pie je fois la pâture des bêtes , afin que
h je joiufle de Dieu. Je fuis le froment de Dieu \
m & il faut que je fois moulu par les dents des

» bêtes , pour devenir im pain tout pur de Je*


» fus-Chnft, Flattez plutôt les bêtes, afin qu'ek
» les foient mon tombeau , & qu'elles ne laif*
» fent rien de mon corps ; de peur qu'après jna
» mort je ne devienne à charge à quelqu'un,
» Je ferai véritablement difciple de Jefus-
» Chrift , lprfaue le monde ne verra plus mon
» çorps. Priez le Seigneur pour mol, pour que
» je fois une viûime digne de Dieu. Je ne vous
» ordonne pas comme Pierre & Paul c'étoieirt
:

> des Apôtres , & je ne fuis qu'un condamné :

» ils étoient libres , je fuis encore efclave. Mais


» fi je fouffre , je ferai l'affranchi de J. C. &
il

» me refTufcitera dans une parfaite liberté. Dès


» aujourd'hui j'apprends dans les chaînes que je
» porte pour lui , à nç rien défirer de tempo>-
» rel ou de vain.
» Dans mon voyage de Syrie à Rome , il
» me faut combattre nuit & jour contre les bê-:
» tes féroces , & fur terre & fur mer , étant
>> çnchaîné , avec dix Léopards , c'eft à dire x

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Saint Ignace,E.M. ij
» avec dix Soldats, que le bien que je tâche
h de leur faire , rend encore plus méchants, p*
» Mais teurs mauvais traitements m'inftruifent
U
» de plus en plus , &
je ne fuis pas pour cela
n jujbju ( i )• Je foupire après les bêtes qui
» me font préparées. Puiffent-elles me mettre
* en pièces fur le champ. Je les irriterai , afin
» qu'elles me dévorent promptement , qu'il &
» n'en (bit pas de moi comme cte quelques-uns
» qu'elles n'ont ofé toucher. Si elles ne le veu-
» lent pas , je les y forcerai ( c ). Pardonnez-
» le moi , je fais ce qui m'en utile. Je corn-
» mence maintenant a être difciple de Jefus-
» Chrift. Les chofes vifibles invifibles , tout &
n m'eft indifférent. Je ne défire crue le bonheur
» d'être réuni à Jefus-Chrift Oui , pourvu que
» je jouiffe de Jefus-Chrift, je ne crains ni le
» feu , ni la croix , ni les bêtes , ni la fépara*
» tion de mes os , ni la divifion de mes mem-
it bres , ni la deftruôion de mon corps , ni
» tous les tourments que la rage du Démon
» peut inventer. Tous les plaifirs du monde
» & tous les Royaumes de la terre ne me fer-<
» viroient de rien. Je foupire après celui qui
n eft mort &
refiufcité pour nous. Encore une
» fois , ne m'empêchez pas d'aller à la vie ,
ftpuifque Jefus-Chrift eft la vie des Fidèles.
» Ne me rendez pas au monde , quand je veux
h être à Dieu* Laiflez-moi parvenir à la pure
» lumière. Lorfque j'en jouirai , je ferai vérir

( 2 ) t. Cor. IV. 4. Les expre fllons dont il fc fert,


(c) U fout fuppofer dans le marquent la fermeté de fon
ic Martyr une infyiration courage & la vivacité du défir
particulière -, autrement il ne ini'il avoit d'être réuni è
pourroit irriter les bêtes con- JefusChrift,
tre lui pour s'en faire dévorer.

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î4 Saint Ignace, È. Aï.
» tablemeilt un hommedé Dieu. Permettes-
» moi d'être l'imitateur des fouffranfces de Jefus-*
lm
» Chrift 9 mon Dieu. Si qUel^un le pofledd
» en lui-même , il comprendra ce que je défi-
» re ; &C connoifïant ce que j'éprouve intérieu-
» rement , il aura pitié de moi.
» Le Prince de ce monde veut m
enlever Se
p corrompre ma volonté attachée à Dieu que :

» perfonne d'entre vous ne prenne fon parti ;


h prenez plutôt le mien , c'eft à dire, celui de
» Dieu. Gardez-vous de parler de Jefus-Chrift ,
» fi vous aimez le monde. BannhTez l'envie de
» vos cœurs. Si je vous priois d'autre chofe ,
» étant préfent , ne m'écoutez pas ; croyez plu-
» tôt ce que je vous écris. Je vous écris vivant
if mais je défire de mourir. Mon amour eft cru-

» cifié. Je n'ai point en moi un feu matériel &


m greffier , mais une eau vive qui me dit inté-
» rement. Allons au Pere. Je ne fuis fenfible
» ni à la nourriture corruptible i ni aux plai-
» lîrs de cette vie. Je défire le pain de Dieu
» qui eft la Chair de Jefus-Chrift : je défire
» pour breuvage le Sang du même Jefus-Chrift,
» qui eft la charité incorruptible. Je ne veux
» plus vivre parmi les hommes , &
mes vœux
» feront exaucés fi vous le permettez
» Joignez vos prières aux miennes , afin que
» j'arrive heureufement au terme de la carrie-
» re Si je fouflxe , je me croirai aimé de
f> vous ; mais fi je fijis rejetté
, je
me regarde*
» rai comme l'objet de votre haine. Souvenez-
n vous dans vos prières de l'Églife de Syrie ,
» qui a Dieu pour Pafteur à ma place. Pour
» moi , j'ai honte d'être compté parmi fes mem-
>> bres : je n'en fuis pas digne , étant le dernier
y) de tous & un avorton. Mais par la raiféri-

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Saint Jgjtace, E.M. 15
* corde de Dieu , je fuis quelque chofe $ fi je
» puis arriver à lui. »
Le faim Martyr
ces, comme
de fes fouffran-
fe glorifioit
du pliis grand honneur qui eût pu

FÉVRIER x
i

lui arriver ; &


il regardoit fes chaînes comme

des perles précieufes. Élevé par la grâce au-


deflus de toutes les chofes terreflres > il ne lui
en coutoit pas plus de quitter la vie \ dit Saint
Chryfoftome , qu'il n'en couteroit à un autre
homme de quitter fes vêtements. Il ne défiroit
que le moment où il feroit livré à la fureur
des bêtes ; &
cet horrible genre de fupplice ,
fi capable de déconcerter les ames les plus in-

trépides , ne faifoit pas fur lui la moindre im-


preffion. Il avoit fu mourir à lui-même de la
manière la plus parfaite , afin de ne plus vivre
que pour Dieu. Mon amour cjl crucifié ? difoit-
il paroles infiniment énergiques , dont le fens
:

eft qu'il étoit parvenu à cet heureux état oîi


l'on n'a plus que de l'indifférence &
du mépris
pour le monde , pour fes biens &
fes plaifirs.
Cependant notre Saint partit de Smyrne &
s'embarqua pour Troade* Il apprit dans cette
Ville que Dieu avoit rendu le paix à l'Églife
(FAntioche. Cette nouvelle calma fes inquié :
tudes , occafionnées par la crainte qu'il ne fe
trouvât quelques perfonnes foibles dans fon
troupeau. De Tfoade , il écrivit aux Églifes de
Phiiadelphie &
de Smyrne , &
à Saint Poly*
carpe ( d). On trouve dans ces trois lettres le

(&) Nous avons analyfé Ignace, à rexception de celle


à TÉglifc de Smyr-"
les lettres qui eft adreflee aux Romains ^
ne &
à fon ftint Évêque , portent le même titre : À
dans la Vie de Saint Poly car- PÉglifi bienheurtufe qui *fi
pe. Toute* les Épitres de Saint à Iphtfi tî *n if w«? , a

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i6 Saint Ign acê ,È.M.
imêmc efprit , que dans les précédentes. L'Àii-
txtnnxi teiir> s'aftreindre aux règles grammaticales y
WflilÉ *
fuit Pimpétuofité de l'amour divin dont la flam-
me le confume. Sa plumé ne fauroit trouver
d'expreffions aflez énergiques , pour rendre tou-
te la fublimité de fés jpemées. Chaque mot efl
im trait de feti qui éclairé Pëfprit , qui échauf- &
fe le cœur. Par tout le feint Martyr tait édater
une humilité profonde , un fouvôrain mé- &
pris de lui-même : par tout il fe ifiôntre brû-
lant de zèle polir l'Églife , plein d'horreur &
pour le Schifme &
lHéréfiéî : par tout il donne
les preuves les plus foulantes de fon amour
pour Dieu &
le prochain , de fa tendrefle &
pour fon troupeau. Il follicite les prières de
tous ceux auxquels il écrit , en faveur de l'É-
glife d'Antioche , &
les conjure dV envoyer
des Députés pour la confoler l'affermir dans &
la Foi.
11 eût bien voulu écrire auffi aux aùfres Égli-
fes d'Afie ; mais fes CÎàrdes'ne lui eft donnèrent

Marn/ju , à Trolles , &c. Mais dée en raifon , & il en tire une


il change de ftile t quand il preuve de la Suprématie uni-
écrit aux Romains , com- & verfeUe de l'Églife Romaine.
mence ainfi : à l'Églife bien-oi- Les fept Épicresde Saint Igna-
mée , qui efl éclairée ( par celui ce , telles que nous les avons
qui ordonne toutes chofes cçnfor* font citées par Saint Irenée
mènent À la charité de Jefus- Eufebc , Saint Athanaie, Saint
Chrifl notre Dieu ) , qui préfide Chryfoftome, Théodoret, &c
dans pays des Romains ,
le Nous en avons piuficurs Édi-
•*« «y«4âvrq irrévp P'«Htt » tions, dont les meilleures font
digne de Dieu , digne d'honneur t
celles dWérius , de Voflius &
qui mérite d'être heureufe , eVitre de Cotelier. Wake,. Arche-
louée , qui efl conduite gourer* & vêque de Cantorbéry, cq
nie avec fagejfe , qui efl chafle donna une traduâion Angloife
qui préfide arec charité ^ ÔCC. Le en 171 o. Elles ont auffi été
P. Orfi a obfervé que cette traduites en François par diffe -
différence de Aile otoit fon- rentes plumes,
pas

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Saint îc#àce s E-M. 17
. pas le temps. H pria Saint Poly carpe de le faire
pour lui. De Troade, il pafla à Naples en Ma-
j^vriek î
cédoine , & de à Philippes. On l'obligea de

traverfer à pied la Macédoine &C FÉpire. Il fe
rembarqua à Épidamne en Dalmatie , pafla au-
près de Reggio &
de Pouzzoles > arriva en- &
fin au Port de Rome (e). Il auroit pris terre
à Pouzzoles , afin d'imiter S. Paul , qui , de cette
Ville 9 alla à pied jufqu'à Rome ; mais un gros
vent qui furvint l'en empêcha. » Nous étions
» pénétrés de douleur , difent les Auteurs de
» fes Aûes , qui l'accompagnoient , en confl-
it dérant que nous allions êtïé féparés de notre

y> cher Maître. Lui au contraire , fe réjouiflbit

» de toucher à la fin de fa courfe. » Cependant


les Soldats le preflbient de fe hâter , parce que

les Jeux étoient près de finir. Le bruit s'étant


répandu qu'Ignace étoit fur le point d'arriver ,
les Chrétiens de Rome allèrent au devant de
lui. D'un côté ils étoient charmés d'avoir le

bonheur de s'entretenir avec Théophore ; &


de l'autre ils ne pouvoient penfer fans une ex-
trême douleur, que la mort alloit le leur en-
lever. Ils fouhaitoient que le peuple pût obte-
nir (a grâce. Le Martyr , qui , par une lumière
{urnaturelle , vit ce qui fe pâflbit dans leurs
coeurs , avec encore plus de force
les conjura
qu'il n'avoir feitdans fa lettre , de ne pas s'op-
pofer à la félicité. Il fe mit enfuite à genoux
avec les Frères , pour prier le Fils de Dieu d'a-
voir pitié de PÉglife , de mettre fin à la per-
fécution , &
de conferver la charité entre les

( e ) Situé près d'Oftie , à I fcizc milles de Rome.


I embouchure du Tibre . & à I .

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i8 Saint Ig n ac e ,E. M.
Fidèles. anîva à Rome le 10 4e Décembre 9
Ii ,

Février i S"
* toit
1 denûer jour des Jeu* publics ,
le &
fut conduit à l'Amphithéâtre dès que le Pr&-
"

ii arrive à fet eut lu 1* lettre que Les Soldas lui remirent

R mC
ii Jcvoré
^e ^ ^
1 ^in P^ reur-
,
W n'eut pas plutôt
Im les bL°cs! entendu les rugifTemems des Lions , qu'il s'é-
cria : » Je fuis le froment du Seigneur ; il faut
» que je fois moulu par les dents de ces ani-
» maux , pour que je devienne le pain pur de
» Jefus^Chrift. » A peine eut-il achevé ces pa-
: rôles , que deux Lions fe jetterent fur lui , le &
dévorèrent en un moment , ians rien Iaiflèr de
fon corps que les plus çros les plus durs de &
fes os. Aiafi fut exaucée la prière qu'il avoit
faite à Dieu. » A ce trifte fpeâacle , difent les
» Auteurs de fes A des , nous fondions tous en
» larmes. Nous paflames la nuit fuivante dan*
» la prière &
les veilles , conjurant le Seigneur
» de nous confoler de cette mort , en nous
» donnant quelque gage afluré de la gloire qui
l'avoit fui vie. Le Seigneur nous exauça; car
» quelques-uns d'entre nous s'étant endormis ,
» virent Ignace dans une gloire ineffable. Nous
» avons marqué le jour de fa mort , afin que
» tous les ans nous puifliôns nous afTembler
» pour honorer ion martyre (/). » Nous li-

(/} marqué au 17 de vers la fin de l'an 1 16 ; & cela


Il cft

Décembre dansle Martyro- pour quelques raifons , dédui-


loge de Bede : mais il cft mis tes dans une lettre de Loyde
20 du même mois , par les Évèque de ûint Afcph. Cette
MSS. d'une Homélie compo- date eft appuyée fur l'autorité
se dans le VI ficelé , laquelle de Jean Malalas d'Antioche.
fe trouve parmi les Œuvres do Scion cet Auteur, le grand
£aint Chry foftome. il arriva , tremblement de terre que la
ielon l'opinion commune, l'an Ville d'Antioche éprouva & ,

107 de Jcfus-ChriO. Le P. qui penfô coûter le vie à Tra-


Antoine Pagi le recuit j triques jao , «jmine nous l'apprenons

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Saint Ignace 3 E.M. 19
forts dans les mêmes Aftes , qu'on recueillit
ivec refpeâ les os du Saint -,
qui furent portés ^VRiER i.
à Antioche , & gardés comme un tréfor inef-
tïmable.
On
dans Saint Chryfoftome que les Re*
lit

liquesde Saint Ignace lurent rapportées cojn*


me en triomphe de Rome à Antioche , fur les
épaules des Chrétiens de toutes les Villes qui
k rencontrèrent filr le paflage. On les dépoia
d'abord dans le Cimetiçre qui étoit hors la
porte de Daphné ; mais fous le régné de Théo*
dofe le Jeune , on les porta folennellement dans
«ne Églife de la Ville , qui aroit été autrefois
un Temple de la Fortune , à qui cette tranf- &
lation fit depuis donner le nom de Saint Ignace

(3). Saint Chryfoftome exhortoit fortement


les Chrétiens d*Antioche à vifiter les Offements

du fiunt Martyr ; &


il donnoit une nouvelle

force à fes exhortations , en montrant les mer-


veilleux avantages que les Fidèles retireroient

te Dion Caffius , «riva lorf- préfère ce feritiment , comme


condamna Saint s'aoxordant mieux avec la
:

kmce a mort. ReAeàûvoir Chronologie des fucceûeurs


âYoo placera ce tremblement de Saint Ignace jufqu'à Théo-
de terre dans le premier ou philas. Mats ces raifons nt
dans \t fécond royage de pas pour faire rejetter
fuffifent
Trajan à Antioche , car il une date que les Aftes de S.
pa/2â deux kn par cette Ville Ignace confirment de la ma-
i°. an commencement de l'an* nière la plus exprefle. On y
née 107, a*, en 116. Of f Ht en effet qu'il confomma
félon cet Écrivain , on doit le fon martyre, pr*fiitntibus apud
placer dans le fécond. Ce fut Romanos Sura & Strucione f*cun~
donc en 116 (nie l'Empereur do i c'eft à dire , fous les Con-
condamna Saint Ignace qui ,
fuis Sura &
Senecîon , qui
ayant été conduit à Rome , y font ceux de Tan 107,
fouf&ii le martyre vers la fin
de la même année. Le P. le ( 3 ) Evagr. Hifi . I. /;
Quic»( Qn Ckr:ft% Ja<t . 7*0), ç % 4t. Ed. Valef.
Bij

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20 Saint Ign ace , E. M.
f— d e cette pour le corps que pour
vilîte , tant

FÉVRIER i.
l' ame ( )• ^
Reliques de notre Saint font
4 s
'
maintenant à Rome, dans l'Églife de Saint Clé-
ment , Pape &
Martyr. Elles y furent appor-
tées fous le règne d'Héraclius , vers le temps
oîi la Ville d'Antioche tomba entre les mains
des Sarrazins ( 5 ). U y a quelques parcelles
des Oflements de Saint Ignace chez les Cha-
noines Réguliers d'Arouaife , près Bapaume ;
en Artois ; chez les Bénédiûins de Lieffe , en
Haynaut ; &
dans quelques autres Églifes ( 6 ).
La fête de notre Saint eft d'obligation chez les
Grecs, qui la célèbrent le 20. Décembre : jour
auquel il fut martyrifé.

. Pour peu qu'on life attentivement les Êpî-


tres de Saint Ignace , on fe fentira comme trans-
porté hors de foi-même, en voyant jufqu'à
quel degré de perfeôion il porta la douceur
fhumilité , la patience , le détachement du
monde , l'amour de Dieu du prochain , le &
défir du martyre. Cette leâure deviendra en-
core p.our nous une fource d'inftruâions falu-
taires. Pourrons-nous en effet ne pas être pé*
nctrés de confufion , lorfque notre lâcheté fe-
ra mife en contralte avec la ferveur des Saints
de la primitive Êglife ? Mais écoutons Saint
Ignace lui-même , &
finiffons la Vie par l'ana-
lyfe de fon Épître aux Philadelphiens. Il la com-
mence par recommander fortement l'union avec
l'Evêque , les Prêtres &
les Diacres. » Votre

( 4 ) Or. in S. Ignat. T, t. ij Dcccmb.


p. c>jo. (6) Henfchenius Fùr. T.

( Baron. Annal, ad an.


5 ) t. p. j/.
, CjT.Grnot. ad Mon. Root, ad [

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Sa t nt Ignace, E. M n
* Évêque , dit-il ,eft folidement établi dans Phu- — '

» milité & dans l'amour de Jefus-Chrift. La février i.


» gravité de fes mœurs eft telle , que Ion lîlen-
» ce feul a plus de force pour perfuader , que
rfles vains difcours des autres. Son ame eft or-
» née de toutes fortes de vertus , &
poftede
» la douceur du Dieu vivant , qui la rend fti-
» périeure aux mouvements de la paflion de &
» la colère. » Il exhorte enfuite les Philadel-
phiens à fuir le Schifme &
PHéréfie. » Ce
» font , continue-t«il , des plantes pernicieu-
» fes que Jefus-Chrift ne cultive point , parce
» qu'elles n'ont pas été plantées de la main du
* rere..... Quiconque appartient véritable-
» ment à Dieu &
à Jefus-Chrift , demeure at-
» taché à l'Évêcjue... Si quelqu'un fe rend par-
» tifkn du SchÛme & de l'Erreur , il n'aura
» point de part à l'héritage de Dieu Ufez
a d'une feule Euchariftie ; car il n'y a qu'une
» feule Chair de Notre Seigneur Jefus-Chrift ,
» &
un feul Calice qui nous unit tous en fon
» Sang. Il n'y a qu'un Autel , comme il n'y a
qu'un Évêque avec le Collège des Prêtres
» &
des Diacres , qui partagent le miniftere avec
»

» nous. En agi (Tant ainfi , vous ferez tout con-


» formément à la volonté de Dieu. Ce que je
» dis , mes Frères , ne part que de l'ardent a-
* moût que je vous porte ; je cherche à vous
* précautionner contre les pièges qu'on pour-
» roit tendre à votre Foi. Ce n'eft pomt moi
» qui vous parle , mais Jefus-Chrift même ,
» dont je redoute les Jugements plus que ja-
* mais , quoique je fois chargé de fers pour
» fon Nom , parce que je me trouve encore
» très-imparfait. Mais j'efpere obtenir, par !e
» fecours de vos prières , tout ce qui manque
B iij

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il Saint Ignace 3 E. M.
1

h à mafoible vertu , afin que j'entre en pof-

FEYRIER i.
* ^ffi° n d& l'héritage que la miféricorde divi-
'
» ne me prépare.
Saint Ignace , après s'être élevé contre ceux
qui adoptaient les cérémonies judaïques , %c
qui femoient des divifions , continue ainfi ?
» Lorftpie j'étois parmi vous , je criois à hau-
» te,voix , & parle mouvement de l'Efprit de
> Dieu : Attachez-vcms à l'Évêque , aux Prè-
» très & aux Diacres. Vous vous imaginiez
» alors que je ne parlais ainfi qu'en vue de
» quelque diyifion ou'il m'étoit aifé de pré*
» voir. Mais je prends à témoin celui pour qui
» je fuis chargé de chaînes, qu'à cet égard mes
» connoiflances n'ont eu rien d'humain. C'eft
» l'Efprit qui vous a dit par ma bouche Ne :

» faites rien fans l'Évêque. Gardez vos corps


»> comme le Temple de Dieu aimez l'unité ;
:

j> fuyez les divifions , &


foyez les imitateurs
y de Jefus-Chrift , comme if l'a été lui-même
9f de fbn Pere. J'ai fait tout ce que fai pu, com*

» me un homme amateur de l'union & de la


» paix ; car Dieu n'habite point là où régnent
» la divifion &
la colère. Il pardonne pourtant
» à tous ceux qu'un repentir fincere ramené à
leur devoir. » Il finit en conjurant les Philadel*
phiens d'envoyer quelqu'un de leur Églife pour
féliciter celle d'Antioche fur la paix qui lui s
été rendue.

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Saixt Pioke s P. M. îy

LE MÊME JOUR. Eévrier i.

SAINT PI0NE,
Prêtre et Martyr.
CE feint Prêtre de PÊgKfe de Smfftte , «voit
n ente ae i eipnt ae ^aint roiy carpe , oc

«n grand nombre d'Idolâtres , en faifant fervir


à la gloire de Jefus-Chrift la profonde connoif*
fance qu'il avoit des vérités de la Religion, 6e
k talent de la parole qu'il poflfédoit dans un de-
fxé fupe rieur. Ses exemples avoient audi une
emeacité merveilleufe. La pâleur de fon vkage,
qui annonçoit l'auftérité de fa vie , faifoit fur
les cœurs Kmpreffion la plus vive la plus &
puiflante. D fut arrêté le 14 Février 250, forf-
<pfû célébroit la Fête de Saint Poîycarpe , avec
Alclépiade &
une femme Chrétienne . nom-
mée Sabine. Une vifion qu'il avoit eue 1a veil-
le , Tavoit averti cPkvanCç de ce qui déçoit lut

arriver. II venoit de prendre du pain (<*) &de


Teau après la prière folennelle , lorfque Polé-»
mon , Prêtre des Idoles , fe feifit de lui de &
fes compagnons. Polémon fit d'inutiles efforts
pour les porter tous à facrifier ; ils repondirent
généreufement qu'ils n'adoroient qu'un feul
Dieu , qu'ils étoient de PÉglife Catholique %
& qu'ils fouflriroient plutôt mille morts que

( m ) Ce pain eft appellé I Pionc ce qui a donne Heu de


-,

faim dans les Àdes de Siim |


croitequee étoitlEuchsriftic*

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14 S AZNT P TONE , P. M.
î de confentir à ce que Ton exiçeoit d'eux. Com-
me on demandait à Afclépiade ^uel Dieu il
*
adoroit : » Jefus-Chrift , répondit-iL Mais, re-
» prit Polémon, eft-ce un Dieu différent de
» celui dont vous avez parlé ? Non , dit Afclé-

» avons confeffé. Par là , il rendoît témoigna-


ge à du Verbe , qui depuis
la confubitantialité
Fut définie contre les Ariens dans le Concile de
Nicée. On menaça enluite les Soldats de Jefus-
Chrift de les faire brûler vifs. Sabine s'étant
mife à rire, les Païens irrités, lui dirent : » Quoi %
» vous riez Eh bien , on va vous expofer dans
!

» un lieu de profUtution. Dieu, répondit Sabi-


» ne , faura prendre ma défenfe. » Rien n'ayant
çté capable d'ébranler la confiance des Martyrs
on les çonduifit en prifon. Ils reflerent par
choix dans w cachot obfcur & retiré , afin
qu'étant fçuls , ils euffent plus de liberté pour
s'entrçtenir avec Dieu par la prière. On les en
tira quelque temps après pour les traîner au
Temple , &
les forcer de facrifier aux Idoles.
Déjà on avoit mis tuie couronne fur la tête de
Pione : mais il la jetta par terre , &
réfifta de
tout fon pouvoir aux violences dont on ufoit 9
pour le faire participer au moins extérieurement
aux cérémonies facrilegçs du Paganifme. C'étoit
^infi qye ces généreux Soldats de Jefus-Chrift
réparaient , autant qu'il étoit en eux , le fcan-
dale caufé parEudémon leur Évêque , qui avoit
lâchement apoftafié ; Pione fuMout déconcerta
la fureur des Juges par la fermeté de fes répon-
fes aux différents interrogatoires qu'il fubit.
Elles fkifoient bien voir qu'il avoit une ame in-
trépide , détachée du monde , ,& que rien ne
pourroit jamais féparçr de l'amour de Jefus-

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SaintSigebert. 15
Chrift. Le Proconful Qulntilien étant arrivé à 1

Smyrne fur ces entrefaites, on lui amena le p^ V n IF ^


lr
Saint. Ilordonna qu'on l'étendît fur le Cheva- *

let , &qu'on lui déchirât le corps avec les on-


des de fer ; après quoi , il le condamna à être
brûlé vif: ce qui fut exécuté.
Voyez dans D. Ruinait les Aûes de Sain*
Pione , écrits par des témoins oculaires. Eufé-
bc les a cités , Bijl. L 4. c. 1 j. Voyez auffi Til-
lemont, T. 3. p. 367, & Bollandus, Ftbr.
T. /. p. 37.

SAINT SIGEBERT,
Roi d'Austràsie.
S I GEBERT étoit fils de Dagobert I, Roi

de France. Ce dernier, oui depuis quelque


temps , menoit une vie allez déréglée , fut fi
touché de la grâce que Dieu lui faifoit de lui
donner un fils , que pour reconnoître cette ïa-
veur , il conçut le deffein de fe corriger entiè-
rement ( a ). Dans la réfolution où il étoit
qu'il fut baptifé par le plus faim Prélat de fon
Royaume , il jetta les yeux fur S. Amand , Éve-
que de Maftriô , qu'il avoit auparavant exilé ,
à caufede la généreufe liberté avec laquelle il
le reprenoit de fes défordres. L'ayant donc fait
venir à Clichi près de Paris , il fe profterna
à fes pieds , lui demanda pardon de l'injuftice

{ m ) Saint Sigebert eut Bag- ne de Dagobert, quoiqu'il


oetrude pour merc. Elle eft l'eût époufee publiquement, s

fcuUmem appelle* Concubi-

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îrf Saint Si g z b e rt.
— qu'il avolt commife à fon égard , le déter* &
FÉVRIER i.
mina, avec l'aide de Saint Ouen de Saint &
Éloy qui n'étaient encore que Laïques , à con-
férer à fon fils le Sacrement de la régénération»

La cérémonie du Baptême fe fit avec une grande


pompe à Orléans , où Charibert , Roi d'une
partie de l'Aquitaine , fc rendit pour être le
parrain de fon neveu. L'éducation du petit
Prince fut confiée au B. Pépin de Landen , Mai-
re du Palais , qui contraint de céder à l'envié
de la Noblefle , fe retira avec lui dans le* États
de Charibçrt , oîi il poffédoit plufieurs Terre?
du chef de la B. Itte fa femme. Dagobert rap-
pella Pépin au bout de trois ans , &
déclara fon
fils Sigebert Roi d'Auftrafie(£). Il lui donna en

même temps pour Miniftres Saint Cunibert


Archevêque de Cologne , & le Duc Adelgife
>
& confia l'adminiftration de tout le Royaume
à Pépin , cpi'il retint néanmoins toujours au-
près de lui. L'année fuivante , Dagobert eut
un fécond fils y connu fous le nom de Clovis II.
La crainte qu'il ne s'élevât des divifions entre
les deux frères , le porta à partager entre eux
fes États. confirma Sigebert dans le Royau-
Il

me (c) ,
d'Auftrafie &
donna à Clovis celui de
Neuftrie ou de la France Occidentale avec une

(h) Ceci arriva en 633 Picardie , f Archevêché de


Sigebert n'ayant encore que Trêves , fit plufieurs autrej
trois ans. aays qui s'étendoient juf-
(c) L'Àuftrafie compre- qu'aux frontières de la Frife ;
noit alors la Provence la& l'AIface , le Falaûiac , la Thu.
Suifle ( démembrées de l'an- ringe , la Franconie , la Ba-
cien Royaume de Bout- vière , la Souabe , & tout le
gogne ) ; l'Albigeois , l'Au- I pays qui eft entre le Ba$-Rhin

vergne, le Querey , te Rouer- 1 fit l'ancienne Saxe. Les Rois

gue tes Cevennev , la Cham-


, 1 d'Auftrafie faifoient leur réC-

pagne , la Lorraine , la Haute | dence à Mets en Lorraine.

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S A î N T S I G E S E RT. 2J
partie de celui de Bourgogne (J\
Après la mort de Dagobert , arrivée en 6\2 y£ypj£o -
f *) , les deux frères vécurent dans la plus par*
faite union. Sigebert, aidé des confeils du B.
Pépin , qui l'aimoit comme (on fils, 6c qui
continua d'exercer auprès de lui la Charge de
Maire du Palais , fit bientôt connoître qu'il
avoit parfaitement répondu aux foins que cet
habile maître avoit pris de le former à la prati-
que de toutes les vertus Chrétiennes Roya- &
les. La mort lui avant enlevé Pépin en 640
il choifit Grimoald pour être Maire du Palais à

la place de fon Pere. Sa piété , £1 prudence &


fa valeur, lui concilièrent l'amour lerefpeâ &
defes fujets, &rendirent fon nom redoutable
à fes ennemis. Les Thuringiens dirent les fêtais
qui prirent les armes contre lui ; mais il fut le*
faire rentrer dans le devoir ; &
cette guerre
la feule oit il (e foit trouvé engagé , n'eut point
d'autres fuites. Les difpofrtions pacifiques de
fon cœur , foutenues d'une prière continuelle

( d ) Quoique Charibert eût perpétuée jufqu'à Louis d'Ar-


obtenu de Dagobert fou frère magnac , Duc de Nemours , tué
de l'Aquitaine , à la Bataille de Cérignoles en
uneefpeccd'ap- ijo$. Il commandoit pour
,
que comme un ai- Louis XU , tandis que les Et
de ta Couronne, pagnols avoient pour Général
il ne Uifo pas de prendre le Gonzalez 4e Cordone , fiir-
tîme de Roi, 11 fit Touloufe nommé U Grand Capitaitu*
& Capitale. Ce Prince étant Cette Bataille coûta à la Fran-
mort en 630, Chilpéric fou ce la perte du Royaume de
fils aine , encore enfant , lui Naples. Voyez D. Vaiffette.
(accéda ; mais Dagobert fon
onde le fit empoisonner. Cha- Hénaut , Abr.Ckr. T.,. h3*.
ribert avoit laine un fécond
fils , nomme Boggis qui fut
, («) Dagobert (ut enterré
la tige d'une longue fuite de à l'Abbaye de Saint Denys f
Princes dont la pofterité s'eft dont il étoit le Foneateur.j

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28 SA i N t S 1 GEB ER T.
& de la pratique des pieux exercices de la Re-
frttVRiER i.
*
^P on 9 ne pouvoient manquer d'attirer fur lui
les grâces les plus abondantes. Il employa une
grande partie de fes revenus à foulager les mi-
feres des pauvres , à bâtir à doter des Hô- &
pitaux , des Églifes &
des Monaftçres (/). Ce
vertueux Prince ne vécut pas long temps , fi
toutefois on doit appeller courte une vie aufli
remplie de bonnes œuvres que la fienne. Il
mourut le i. Fév. 656 , à la 15e. année de fon
% {g )• On Penterra dans l'Abbaye de Saint
Martin près de Mets, Il eft honoré d'un culte
public dans la plus grande partie des pays fur

(/) Il fonda douze Mo- Ufurpateur ne régna que 7


nafteres , dont les quatre pria- jours. Ceft une faute , car il
eipaux turent Cougnon près régna 7 mois , comme le
de Bouillon ( ce n'eft plus prouve M. Schoëpflin par di*
aujourd'hui qu'un Prieuré)» verfes circonftances dont Fre%
Saint Martin près de Mets , degaire fait mention , fur- &
Stavelo &Malmedi. Ces deux tout par un témoignage exprès
derniers ne font qu'environ à du Chronicon brevijfimum. Le
une lieue l'un de l'autre, Saint peuple s'étant révolté contre
Rémacle ayant apporte de Grimoald &
fon fils, ils fui
Solignac la Règle de Saint rent tous deux dépofés mis &
Colomban , que Sigebert ap- en prifon , où ils moururent.
pelle la Règle des anciens Pères, L'Héritier légitime de la Cou-
dans fa Charte au Monaftere ronne ne s'étant pas retrouvé,
de Cougnon , il l'établit pre- Clovis II réunit le Royaume
mièrement à Cougnon , puis d'Auftrafieà fes autres États.
à Malmedi 8c à Starelo. Dagobert II, aidé de Saint
(g) Saint Sigebert laifla un Wilfrid , qui fut depuis Ar-
fils, nommé Dagobert, qui chevêque d'York , retourna
n'avoit que 7 ans à la mort de en France 18 ans après la mort
fon Pere. Il le mit fous la de fon Pere. Il recouvra l'Al-
conduite de Grimoald , Maire face & quelques autres Pro-
du Palais ; mais celui-ci en- vinces par la ceffion que lui
voya le jeune Prince en Irlan- en fit ou Childeric II , fils de
de , & plaça fur le Trône Cha- Thierri TU. , alors Roi de toute
ribert fon propre fils. Les Au- la France , ou fon frère Théo-
teurs de l'Art de vérifier les dorick III , qui lui fucceda
dates diftm , p. 481 , que cet |
avant le mois d'Avril de l'an

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Saint Sigeber t. 19
kfqueis régna , ainfi que dans les Églifes
il &
les Monafteres dont il avoit été le Fondateur.
-évrier lf*
Son corps ayant été trouvé (ans corruption en
106} , fut levé de terre, placé à côté du &
Grand-Autel. On le mit dans une Châtie d'ar-
gent en 1 170. François de Lorraine % Duc de

on doit mettre
674.; car le la France , conformément a
commencement du règne de la promefTe qu'il en avoit fai-
Dagobert II , ou à la tin de te , dans le deffein de vifiter
Tan 673 , arec M. le P. Hé- le Roi. U apprit avec la plus
rault , ou en 674 , avec M. grande douleur qu'il ne vivoit
Schoëpflin. plus. Il avoit été aûaûiné à
Dagobert U
(è diittngua Stenay fur Meufe, aujour-
toujours par cet efprit de reli- d'hui la plus forte Ville du
gion &
de piété 'qu'il avoit Duché de Bar en Lorraine*
puifé a l école des afniâions , Les Hiftoriens François attri-
& à celle des grands maîtres i
buent cet afiaflînat à l'impie
de vie fpirituelle, qui dans
la Ébroin , Maire du Palais fous
ces temps-la floriflbient en ThéodoriclU, Roi de Bour-
Écofie &
en Irlande. U fit (a gogne &de Neuftrie , préten-
principale réfidence en Alface dant qu'il vouloit par là fe
où il laifla plufieurs monu- rendre maître des États de
ments de fes pieufes libérali- Dagobert. Le peuple, pour
tés en tondant & en dotant un défendre fa liberté contre
grand nombre d* Eglifes & de &
Ébroin, établit Pépin Mar-
Monafteres. Quoique fon rè- tin , Ducs ou Gouverneurs
gne n'ait été que de 6 ans d'Auifrafie. Le fécond périt
M. Schoëpflin ne balance pas enfuite victime des intrigues
é"aiTurer,p. 740. qu'aucun Roi d'Ébroin , qui à fon tour fut
ii fait plus de bien que lui à affailiné par Ermenfrid. En
ï tarife de France , au moins 687, Pépin défit Théodoric
en ce qui concerne l' Alface. m
a Teftry , prit Paris le &
Samr Wilfrid, ayant été obli- Roi lui-même i après quoi »
gé de quitter l'Angleterre, il régna fouverainement en
Dagobert lui fit l'accueil le France fous le titre de Main 9
plus favorable , & voulut le La mort de Dagobert , ho-
donner pour Succefleur à Saint noré comme Martyr à Stenay
Arbogafte, Êvèque de Stras- fur Meufe , dans le Dioccfe de
bourg. Mais il refufa cette Verdun , depuis le VD3 fie-

dignité , & fe rendit à Rome ,


de, arriva le 23 Décembre
où il obtint une Sentence du 679. 11 eft nommé en ce jour
Pape Agathon en fa faveur. parmi les Saints dans le Mar-
A fon retour U repana pv tyrologe d'Adon 8c dans plu-
,
,

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>

jo Saint S i gebea t.
Guife, avant été obligé en 1*51, de démolir
(ÊVRiER z.
tous ^ cs Monafteres des FauxDoures de Mets
"
mie Charles-Quint affiégeoit , les Reliques de
àaint Sigebert furent dépofées dans FÉglife des
Jacobins de la même Ville , puis portées à la
Collégiale de Notre-Dame de Nancy.
Voyez Frédegaire &
Sigebert de Gemblou-s
ion continuateur dans la Vie de notre Saint,
avec les favantes remarques du P. Henfchenius ;
D. Gabnet, Hift.de Lorrain* , T. i.p. 41$ ; &C
M. Schoepflin , dans (on Alfatia illufirata , p.
742 ; 6c Géorge Von-Eckard, Hifior. Franci*
Or'untaUs , T. 1 ; &
principalement la Vie de
S, Sigebert , par le P. Frizon , à Nancy , 1716.

con-
fieurs autres, 11 enrichit tHifioiH de Lorraine par Dom
fidérablemem l'Êglife deStrat Calmât » T. t , /. ro , n. /tf »

foourg t comme on peut le f. 47*. datai. Édition. La plù-


voir dans V Alfatia illufirata de
M. Schoepflin. Cet Auteur n'ont point connu le règne de
donne, c. il. $.154, p. 736, Dagobert II , & Font confé-
de quelques-uns des
l'Hiftoire quemment omis. Cette oroif-
Monafteres , fondés par Da- iîon , que la meprife où
ainii
gobert & montre Set"t. 1. c.
, , Ton efttombé par rapport à
10. §* 146 , p. 699 , que le la date ou l'on a placé le
,

Palau où il réfidoit commu-


nément étoic à Ifembourg y
Dagobert a jetté beaucoup
,

en AMace. On peut confulter de confufion dans la Chrono-


fur ce faim Roi les Vies de S. logie & l'Hiftoire de la plupart
Wilfrid & de S. Salaberge , les des Rois Mérovingiens. On
Chartes de Dagobert lui-mê- (ait ce qu'il en a coûté de' tra-
me , YAlfacia illufirata de M. vail i M. Valois aux PP. ,

ScHocpHirt Frofeneur d'His-


, Henfchenius , le Cointc , &
toire ëi d'Eloquence a Stras- Pagi t a l'Abbé de Longuerue,
bourg ,
imprimée en 1751 , &c, pour porter quelque lu-
Seft. 1. c. 10- §. 144. p. 695.
c 11. J. 254. p. 736. Seâ.
a.c. i, h p. 74©.*4ji*

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S. Paul , Ste. Brigide. 3

SAINT PAUL, février i«

É V Ê Q U £

de Trois-Cbâteaux en Dauphiné*

N Ou s ne (avons rien de certain du


de
au
fa Vie. Il paroît être le Pau! qui fouferivit
dérail

premier Concile de Valence de Pan 374, Sa


Fête eft marquée au de Février, dans le$
Martyrologes <fAdon &
dUfuard. Son corps ,
qui étoit dans Cathédrale de Trois-Châteaux,
la
fut brûlé par les Huguenots en 1561. Il n'en
cû refté qu'un bras que Pon avoit renfermé dans
un Reliquaire à part. Quelques Martyrologiiles
ont, par méprife , fait de notre Saint un Évêqu*
de Troyes en Champagne.
Voyez BoUandus , T. /. Febr.p. ; & le
Gallia CkrijHana,

SAINTE BRIGIDE,
Vierge,
Abbefle , & Patrone d'Irlande.
Cette Sainte nâquk à Fochard en Ultonie.
Étant encore fort jeune , elle reçut le voile des
mains de Saint Meel , neveu &
difciple de Saint
Patrice. Elle fe bâtit fous un gros chêne une
Cellule t qui fut depuis appelle Kuil^dara
ou Cellule du. Chine. Mais plufieurs perfonnes

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32 Satxtè BkîGttoÉ, K
de fon fexe venant tous ranger fous
les jours fe
fa conduire , elle les réunit en corps de Com-
x
"
munauté. Ce fut comme une Pépinière fainte
qui donna naiflance à plufieurs autres Monafte-
res d'Irlande , lesquels reConnoiflbient tous
Sainte Brigide pour Mere &
pour Fondatrice.
Nous n'avons aucuns détails fur les vertus
de cette Sainte , les cinq Auteurs qui ont donné
fa Vie , n'ayantjgueres parlé que de fes mira-
cles. Elle floriffoit au commencement du fi-
xieme iiecle. On trouve fon nom dans le Mar-
tyrologe de Béde , &
dans tous les Martyrolo-
ges qui ont été compofés depuis. Il eft aufii
dans les plus anciens Manufcrits du Martyrolo-
ge de Saint Jérôme , tels que ceux d'Efternac ôc
de Corbie. Il y a plufieurs Églifes dédiées fous
fon invocation en Écofte , en Angleterre , en
Allemagne &en France. La Fête de Sainte
Brigide eft marquée dans les anciens Bréviaires
d'Allemagne , &
des Mes Britanniques , dans&
la plupart de ceux de France. On en a fait mé-
moire à Paris jufqu'en 1607. ^
n trouva fon
corps en 1 1 85 avec ceux de Saint Patrice &
de Saint Columba , dans une triple voûte de
la Ville de Down-Patrick. Ce précieux tréfor
jfi.it porté dans la Cathédrale de la même Ville

( 1 ). Le tombeau oh il étoit renfermé , a été


detruit fous le règne de Henri VIII ( 1 ). Le
Chef de Sainte Brigide eft aujourd'hui à Lisbon-
ne , dans l'Églife qui appartenoit aux Jéfuitçs.
(3 ) Voyez Boliandus , Ftbr. T. i. p. $3.

( x ) , Cambrenfis
Giraldus ( i ) Camden.
Topog. H-Urn. Dijt. c. 18. (3) Boliandus, Fâbr,T.t.
Caraden, &c. />•"*•

SAINTE

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\

Sainte K i n n i e } V. 33

SAINTE K I N NIE,
Vierge en Irlande.
Ous ne favons autre chofe de cette Sainte ;
finon qu elle fut baptifée par Saint Patrice , &
qu'elle reçut de fes mains le voile de Religieufe.
Sa mémoire a été long-temps en vénération en
Irlande. Ses Reliques étoient à Lovth , dans
la Partie Méridionale de l'Ultonie.
Voyez Jocelin , Vu. S. Pairie. Colgan , &c

Boliandus , au premier de Février p. 96.


,

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34 La P u ri Ft c at i o n.

IL JOUR DE FÉVRIER.
LA PURIFICATION
COMMUNÉMENT APPELLÊE
LA CHANDELEUR.
FÉVRIER 2.
33 I E U voulant faire
connoître aux hom-
mes qu'en d'Adam , ils étoient
qualité d'enfants
conçus &
naiffoient tous dans le péché , avoit

Loi de u
or donné dans l'ancienne Loi qu'une femme
Purification nouvellement accouchée feroit regardée com-
tbexksJiûfr. me impure , &
que durant le temps de fon im-
pureté elle ne paraîtrait point en public , &
ne toucherait a rien de confacré au Seigneur
( i ). Ce temps étoit de quarante jours pour
un garçon , &
de quatre-vingt pour une fille
en comptant du jour de la naiflance de l'un &
de l'autre. Lorlqu'il étoit expiré , la mere de-
voit porter à la porte du Tabernacle , & en-
fuitc à celle du Temple , un Agneau d'un an
que le Prêtre offrait en holocaurte , pour re-
cornoître le fouverain domaine de Dieu , &
pour le remercier de l'heureux accouchement
de la mere. Elle devoit auffi.préfenter un Pi-
geonneau ou une Tourterelle , qui étoient of-
ferts pour le péché. Après ce double facrifice ,
elle étoit purifiée de fon impureté légale , &

( i ) Lcvit. XII. 8r
0

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Là PvRIfîCATION. 3f
établie dans fes premiers droits. Les pauvres
qui n'étoient point en état de donner un
F £ VR1£R **
Agneau , y fuppléoient par un fécond Pigeon-
neau ou une féconde Tourterelle , qui fournit
foit la matière de l'holocaufte ( 2 ).
La Sainte Vierge , étant devenue mere par
Fopération du Saint Ëfprit , & fans perdre fa
virginité , il eft évident par les termes mêmes
de la Loi ( 3 ) , que la cérémonie de la Purifi- La Loi lo-
cation ne pouvoit l'obliger. Elle s'y affujettit bligeoitpoinc
néanmoins , &
s'en tint à la lettre de la Loi ,
Stc Vicr*
£
'

parce que les Juifs ignoroient qu'elle avoit con*


çu d'une manière miraculeuie. Elle vouloit
d'ailleurs cacher fon augufte qualité de Mere
de Dieu ; &
elle y réufliflbit en fe comportant
â l'extérieur comme les femmes ordinaires. On
voit ici la différence qu'il y a entre les orgueil-
leux &les humbles. Les premiers s'empreflent
de publier leurs avantages : les féconds au con-
traire font leurs délices d'être dans l'obfcurité ;
uniquement occupés de la baffefTe de leur néant,
ils fuient avec fom PefKme &
les diffinôions ;
s'illeur revient quelque gloire de la part des
hommes , ils la rapportent à Dieu , comme au
ieul principe de tous les dons de la nature &C
de la grâce.
Marie étant pauvre fe préfenta au Temple
avec deux Tourterelles , comme la Loi l'exi-

geoit en pareil cas (4) ; mais la pauvreté de


fon offrande fut fingulierement relevée par ces
fêntiments du cœur , que Dieu regarde com-
me l'ame des facrifices. Fixons un moment nos

( 2 ) Ibid. v. S, () Luc. U. M*
C 3 ) J»tf . v. x.

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^6 La Purification
que Sauveur
'

1
efprits fur la conduite tient le

FÉVRIER ». dans * e chobc de celle qu'il ^yoit deftinée à


être fa Mere. Il pouvoit naître fans doute d'u-
*

ne femme diftinguée aux yeux du monde.


Pourquoi ne l'a-t-il pas fait? Ceft qu'il vouloit
nous faire fentir les avantages de la pauvreté ,
& nous guérir de cet orgueil qui nous aveu-
gle , &
nous empêche de nous bien connoî-
tre.
Outre
la Loi dont nous venons de parler,

y
il en avoit une autre oui portoit que le
premier-né feroit offert au Seigneur ( 5 ) avec
des cérémonies particulières , qu'on le ra- &
cheteroit après cela ( 6 ), moyennant une fom-
La Saînrc me modique d'argent. Marie porta donc fon
au * em P'e 9 a ^ n ^ e l' om^r au Seigneur
^m^foiiTit
ar ' es n^ins du Prêtre. Elle donna enfuite les
a^Tempic! P
rina ficles pour le racheter , le reçut dans &
fes iras comme un dépôt qui étoit confié à
ies foins , jufqu'au moment où le Pere Éternel
le redemanderoit pour accomplir l'œuvre de
la Rédemption du genre humain. Il efl hors
de doute que Jefus-Chrift n'étoit pas compris
dans la loi. Car, dit Saint Hilaire ( 7 ) : » Si
» le Fils d'un Roi , &
l'héritier préfomptif de
h fa Couronne, eft exempt de toute iervitu-
» de , à combien plus forte raifon Jefus-
Chrift, qui étoit le Rédempteur de nos corps
6c de nos ames , étoit-il difpenfé de fe rache-
» 1er lui-même ? » Mais ce Divin Sauveur
vouloit nous donner un exemple d'humilité ,
d'obéiifance, &
de piété.; il vouloit renouveller
dans le Temple , d'une manière publique lo- &
( 5 ) Luc JhiJ. *f. .
I ( 7 ) In Matth. c. îj ,
«.*/# j

( 6 ) Lxod. X1U. 15. l?7«

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La PzrniFiCATiox. 37
JenneHe , Foblation qu'il avoit déjà faite à fon
Père dès le moment de fon Incarnation^ Qui ç£vrœr a.
pourrait exprimer tous les featiments dont cette
obhtion fut accompagnée } Oui , ce fat alors
que le Père Éternel reçut.un facrifice capable
«de défarmer fa colère allumée par nos crimes
& d'arracher nos ames à ce feu dévorant qui
ne s'éteindra jamais 1
Comment
Offrons-nous à Dieu en ce jour avec Jefus-
Chrift. Ayant un tel Médiateur, nous ne pou- tSSTk
~
vous craindre que notre facrifice fait rejette. Dieu.
Si jufqu'ici nous avons manqué à un devoir
auffi eâentiel , réparons notre faute par les laiv
mes de la pénitence. Mettons notre cœur dans
Ja cfifpofition où étok celui de Saint Auguftirï ,
& écrions-nous enfitite avec lui » Je vous ai
:

» connu trop tard r j'ai commencé trop tard à


» vous aimer , ô beauté plus ancienne que le .

inonde ! * Mais ne nous y trompons pas ; notre


facrifice ne peut être agréé du Seigneur , s'il eft
impartait. Ce ferait l'infulter que de lui offrir
en union avec h C. un cœur partagé entre fon
amour & celui des créatures , ou un cœur in-
fecté de quelque fouillure volontaire. Purifions
donc le nôtre de tout ce qui pourroit Méfier
\es yeux de fon infinie Majefté ; examinons s'il
n'y a point quelque réferve fecrete pour le
inonde &c pour fes faux biens ; faifons fuccé-
der â cet examen le repentir de nos infidélités
paffées , 6c une ferme réfolution de ne plus
vivre que pour Dieu , de nous confaçrer en-
tièrement à fon fervice , & de rapporter uni-
quement à fa gloire l'ufage de nos fens &
de toutes les facultés de notre ame. Si nous
fomraes dans de pareilles difpofitions x le facri-
fice que

noua ferons de nous-mêmes•••au Sei-
/•>
C îij

Digitized by
38 La Purification.
gncur ne pourra manquer d'être accepté • 4$
FÉVRIER %, d'attirer fur
nous les plus abondantes bénédic-
tions. Il eft encore une chofe que nous ne de-*
vons pas perdre de vue ; c*eft que Jefus-Chrift
voulut être préfenté au Temple par les mains
de fa Sainte Mere. Prions auffi Marie de fe char*
ger du foin de préfenter à Dieu notre offrande»
Elle eft le canal des grâces ; quoi de plus pro*
pre à excker en nous une entière confiance en
fa puiflante médiation !
La cérémonie de ce jour fut terminée par un
troifieme Myftere , par la rencontre qui fe fit
dans le Temple du Vieillard- Siméon de la &
Prophéteffe Anne avec Jefus &
fes Parents ( a)*
Siméon ayant pris dans fes bras le divin En~
fimt , l'objet de fes défirs les plus ardents , fe
livra aux tranfports de la plus vive reconnotft
fance , & bénit Dieu de lui avoir accordé la
Siméon & confolation de voir le Mefîie attendu depuis fi
0
no^reiu Je-
longtemps. Il prédit enfuite à Marie qu'elle
fus pou? lç feroit tranfpercee d\in glaive de douleur aux
Meflic, pieds de la Croix fur laquelle fon Fils expire*
roit , & qu'en même temps qu'il ferait une
taufe de falut &de réfurreôion pour ceux qui
croiraient en lui , il ferait une caufe de ruine
& de réprobation pour ceux qui refiifçroient
de le reconnoître , ou qui , l'ayant une fois
connu , ne vivroient pas d'une manière confor-
me à fes maximes. Marie écouta en filence
cette terrible prédi£tion ; &au lieu de s'aban-
donner au trouble &
à la crainte , elle fe fou-»
mit aux ordre? du Çiçl avec autant de réfigna^

( a ) Ceft pour cela que les |


ment cette Fête , fiypanu %
Grecs appelloient ancienne- 1 ç'eil-Wtrc ,
Rencontre..

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La Pu ni f ic at i on. 39
tîon que d'humilité. Aime , oui furvint dans le
même infiant , louoit auffi le Seigneur , par- &
p^yj^
loit de Jefus à tous ceux qui attendoient la ré*
demption. Cette Prophétefle était une fàinte
veuve qui 9 depuis la mort de fon mari , de-
meuroit (ans cefle dans le Temple * ferrant
Dieu nuit &
jour dans les jeûnes &
la prière*
De tous les Juifs , il n'y eut que Siméon &
Anne qui connuffent Jefus-Chrifi Ceci ne nous
étonnera point , fi nous nous rappelions que
ce divin Sauveur ne fe manifefte qu'à ceux qui
le cherchent avec de vifs fentiments de fer-
veur , d'humilité , de fimplicité , &
d'amour*
"Les avons-nous ces fentiments fans lefquels on
ne peut trouver Jefus-Chrift ? Ah ! qu il eft à
craindre que le témoignage de notre confiden-
ce ne nous foit contraire ! Il eft dit encore de
Siméon , qu'après avoir eu le bonheur de voir
Jefus-Chrift , il ne conferva plus aucune atta-
che pour le monde & les créatures vifibles«
Cette dUpofition eft-elle bien commune parmi
ceux qui le prétendent difciples du même Jefus-
Chrift ? Que l'on en juge par le foin qu'ils
prennent de fe procurer toutes leurs aifes , &
par la crainte qu'ils ont de quitter une vie , dont
çrefque tous les inilants font marqués par de
nouvelles infidélités. Les entend-on foupirer
après le jour oit l'ame des juftes, dégagée des
liens du corps , &
affranchie de la fervitude du
péché , ira s'abîmer éternellement dans le fein
de Dieu , pour l'aimer fans partage comme
fans interruption )

Sur la Béncdi&on des Cierges & la Proce/poni


qui fe font en ce jour.

La Proceflion que l'on fait en ce jour avec


C îij

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40 La PvRiFjt ATioirl
des Cierges allumés, eft fort ancienne dans P£-
gUfe (A). Le concours de peuple raflemblé par
" cette cérémonie, eft, félon Saint Bernard, le
fymbole de notre luiion & de notre charité »
& rend nos prières beaucoup plus agréables au
Seigneur. On bénit les Cierces gue Ton porte
à la Proceflion , parce que l'Églife a coutume
de lànftifier par la prière &
la bénédiâion tout
ce qui doit être employé au Service divin. On
porte des Cierges allumés , pour repréfenter le
feu de l'amour divin qui doit embrafer nos
cœurs , & en bannir tout mélange de feu etmn+
ger » tel que feroit celui des diverfes paffions
que produit la concupifcence. Par là , nous ho*
norons encore Jefus-Chrift , qui eft défigné dans
rÉcriture fous le titre de lumière ( 8 ) , qui &
eft venu fur la terrç pour diffiper nos ténèbres
fpirituelles. Nous nous rappelions aufli Pobli-

ron où. nous fommes de préparerfis voies par


bonnes œuvres qui doivent , nous rendre
la lumière du monde ( 9 )• Enfin cette cérémo*
nie a été inftituée pour honorer la Purification
de la Sainte Vierge , &
pour remercier Jefus*
Chrift de ce qu'il a bien voulu fe revêtir de
DOtre chair , &
fe préfenter à Dieu fon Perç
pour notre rédemption. Le moyen de nous la
rendre utile , eft d'entre* dans les fentiments de
Eiété
&
d amour que nous aurions éprouvés,
comme Siméon & Anne , ftous euflions été
les témoins oculaires des Myfteres qui s'opé*
«rem en çe jour (c )
(h) Le Pape ÇéUfe I , S, <ju'ils ont fait fur cette Fçrc,
ÏWefonfc, S. €loy % ( Serai. % ), 8 Joan. 1.9. Luc, Ut 3»
J
S, Sophrone <& JérufaJem « 9 ) Mann, v. 6,
$1 ÇyriHe d'Alexandrie , &c. ( c ) La coutume d'allumé?
d« çier$ç$ dan* l'Eglife peu-

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La Purification* 41

Sur la pratique obfirvie dans FÉglife de relever

Us femmes après leurs çouçhes. FEVRIER 2;

Le Seigneur , dans l'ancienne Loi avoit dé-


?
clarées impures certaines aâions, qui, quoique
innocentes en elles-mêmes , avoient cependant
un raDport éloigné au péché. De ce nombre
étoitfaccouchemenf. Dieu faifoit entendre par
là que l'origine de l'homme étoit impure , qu'il

la célébration des divins Apoftoliques parlent de l'hui-


Mylteres , la Jeaure de l'É- le deftinée i l'entretien des
vangile , &
l'adminift ration lampes qui brûloient dans l'Ê-
des Sacrements date des pre-
, glife ( can. t ). Plufieurs Chré-
miers hedes du Chriftianifme. tiens allumoient auffi des lam-
Elle rut introduite par le déflr pes devant les corps des Saints ;
de rendre aux choies faintes ce dernier fait eft atteflé par
l'honneur & le refpeâ qui leur Prudence , (
Hym. 2 ) , 6t par
font dus. Cétoit auffi pour S. Paulin , ( Nat. UI. v. 98 >.
cela que chex les Juifs on allu- Neft-il pas jufte en effet que
moit des lampes devant le les créatures corporelles que
Seigneur dans le Tabernacle Dieu a créées pour notre ufa-
6e dans le Temple ( Exod. ge ,fervent auffi à fon hon-
XXV m. 20 ), Anciennement neur &
à (à gloire } Elles con-
on recevoir lesGrands avec tribuent d'ailleurs à exciter la
4es flambeaux allumés , corn- dévotion dans nos ames ; car
ac nous l'apprenons du i. li- elles (ont à nos yeux ce que
vre des Machabées,c. 4. v. 22. les paroles font à nos oreilles v
oà nous voyons que le Roi Pimpreflion qu'elles font fur
Aaoochns fut reçu de la forte nos organes remue les affec-
à knrfalem. Les illumina- tions de nos coeurs. ( Voyez
rions font auffi le fymbole de leTraité des devoirs d'un Pa£
la joie. Delà vient qu'on en teur par feu M. Buller, Évêque
faiibit autrefois à l'arrivée des de Durham ). Nous avouons
Empereurs Romains , 8c dans que la piété eft quelque chofe
les événements oû Ton vou- d'intérieur & de fpiriruel , &
loit exprimer l'allégrcfle pu- qu'elle confine dans la ferveur
blique. Ceci fe pratique enco- de l'ame > mais on doit avouer
re aujourd'hui. Mais pour re- en même temps que les fignes
venir à rufage des lumières fenfibles contribuent beaucoup
dans l'Êglife , on ne peut dou- à la foutepir & à l'animer. Ce
ter qu'il ne foi: de la plus fcau- feroit donc erre bien témérai-
IC antiquité. ItCt Çanons re que de condamner certaines

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4% La Purification.
étoit conçu & né dans péché. Les le rits ju-

février 24
Caïques a ant
X ^
on
abrogés par la promulgation
ne doit plus craindre les im-
de l'Évangile ,

puretés légales , &


il y auroit une fuperftition

criminelle à recourir aux cérémonies ufitées


dans la Synagogue , fous prétexte de fe puri*
fier. Les mères chrétiennes ne vont donc point

à TÉglife avec l'intentiorr que fe propoioient


les femmes Juives en allant au Temple , c'eft-
à-dire ,
pour être purifiées de quelque tache
contraôee par leur accouchement ; mais elles
v vont pour s'acquitter d'un devoir commun
à tous les hommes , pour payer au Seigneur un
jjufte de louanges
tribut &
d'aÛions de grâces»
Voici commentle Pape Innocent III s'expri-
me fur ce fujet : » Si les femmes défirent entrer
» dans l'Églife immédiatement après leurs cou*
» ches , elles ne pèchent pas en y entrant , &
» on ne doit pas les en empêcher. Mais fi par
» refpeâ elles aiment mieux s'en éloigner pour
» quelque temps , nous ne penfons pas qu'on
» doive blâmer leur dévotion ( io). » Ce temps
eft limité dans quelques Diocefes à un certain
nombre de jours. Dans les lieux où la cou-
tume ni aucun Statut particulier n'ont rien
décidé fur cet article , une mere chrétienne

cérémonies que l'Églife a inf- .condamner en quelque (brte


ti ruées pour de très-bonnes Jefus-Chrift lui-même , qui fe
rations t c'eil -à - dire , pour iérvit de fignes fenfibles dans
donner de la décence & de la rinftitution des Sacrements ,
majcfté au culte extérieur , fit ainfi que dans plufieurs des
pour aider notre foibleiTe, qui guérifôns miraculeufes qu'H
a befoin de quelque choie de opéra parmi les Juifs ?
fcnfible , afin de s'élever jus-
qu'à Dieu. Condamner l'Égli- ( lo) Cap. tmicoy éc Puri-
fe en ceci » ne feroit-ce pas femt» fofipartu m.

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La Purification. 43
doit remplir ce devoir aufli-tôt qu'elle peut 55=5
fortir de fa maifon fans courir aucun riique.
^tVK
D eft bien jufte en effet que fa première vifite
foit pour l*Églife. Là elle doit premièrement
remercier le Seigneur de fon heureufe délivran-
ce , & le prier de répandre fes bénédiôions
tant fur elle que fur fon enfant. La nature feule
nous dit qu'un bienfait exige de la reconnoif-
iance. Eft«ce que nous nous flatterions d'être
difpenfés de ce devoir à l'égard de Dieu ? La
Foi ne nous enfeigne-t-elle pas que l'ingratitu-
de tarit la fource des grâces ? Nous ne tommes
pas inoins obligés de remercier Dieu de fes
menfàks, oue de le louer &de l'aimer. De là
vienr que S. Paul recommandoit fi fortement aux
fidèles Faxbon de grâces , & que les Chrétiens
avoient fi fouvçnt à la bouche ces paroles : gra*
us à Diui* C'étoit même leur formule ordinai-
re de falutation , félon Saint AugufHn f qui s'é-
crie à ce fujet : » Que pouvons-nous penfer f
» dire 9 ou écrire de mieux que ceci : grâces à
* Dieu ( ii)?» En effet , remarque Saint Gré-
goire de Nyffe (12), Dieu nous ayant comblés
& bienfaits par le paffé nous en promettant
<,

d'ineftimables pour l'avenir , &nous donnant


à tous les moments de notre vie de nouvelles
preuves de fa bonté ; ne devrions-nous pas #
s'il étott pofliblç , l'en remercier à chaque inf-

tant?
U eû certain que les grâces fignalées méri-
tent de notre part une reconnoiffance toute
particulière. Or c^ft le cas où fe trouve une
mère chrétienne. Elle met fon heureufe dé-

( 11} £f. 4. Uim 77* tu) Mi. T, 1, j.


La Purification. •

livrance , ainfi que


de fon enfant** la naiflance

JFÉVRIER i.
au nombre des grâces fignalées. Il eft donc bien
*
jufte qu'elle aille fe profterner aux pieds du Sei-
gneur , pour lui protefter folennellement qu'el*
le n'oubliera jamais fes miféricordes. Ce feroit
peu , fi elle s'en tenoit là. Il faut encore qu'elle
demande les fecours dont elle a befoin pour
élever dans la vertu l'enfant Qu'elle a mis au
inonde , &
qu'elle prenne une ferme réfolution
de préferver fon ame des foiûilures du péchés
Car- eue lui ferviroit d'être devenue mère ,
fi le fruit de fes entrailles devoit tomber fous

la puiffance du Démon , être enfuite con- &


damne aux fupplices de l'Enfer ? Qu'elle ait
foin y la première fois qu'elle paroîtra dans P£*
glife après fes couchçs , de confacrer fon en-
iant au Seigneur. Son facrifice ne peut man-
quer d'être accepté, fi elle entre dans les dif-
pofitions où étoit la Sainte Vierge le jour de
fa. Purification , fi elle la prie de préfenter elle*

même à Dieu les aûes de reconnoiflance , de


demande &
d'offrande qu'elle doit produire
avec tous les fentiments de piété
: de ferveur &
doqt elle eft capable

• « #

* * -I "I
«... - • é •

<

» i
1 —

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S. L AU RENT ,ARCHEV. 4f

LE MÊME J O U A-. .
février »,

SAINT LAURENT,
Archevêque dê Cantorbéry.

E Saint fut un ceux qui accompagnè-


<ïè
rent Saint Àuguftin en Angleterre , lorfqu'if
pafla dam-cette Ifle en
597, pour y prêcher
rÉvangîle. Après la mort de ce faint Million-
naire , il fût jugé digne de lui fuccéder dans le
Sieee Épifcopal de Cantorbéry. Eadbaud , fils
&: iucceffèur du faint Roi Ethelberd , ayant
donné dans les fuperftitions de l'Idolâtrie , &c
ayant même épouié la veuve de fbn pere , Lan?
rent mit tout en ufage pour le retirer de Pabî-
me où il s'étoit précipité. Mais il eut la dou*
leur de voir tous fes efforts fans fuccès. Défef-
pérant donc de convertir un Prince qui étoit
tout à la fois Païen & inceftueux , il réfoiut
de pafler en France , comme quelques autres
Chrétiens l'avoient déjà feit. Il étoit même fur
le point d'exécuter fon deftein ; & il alloit par-
tir fans un événement extraordinaire qui lç re-
tint.Saint Pierre lui étant apparu en fqnge la
veille de fon départ , ïl lui reprocha la lâcheté
qui lui faifoit abandonner un troupeau racheté
de tout le Sàng de Jefus-Chrift , le fouetta &
fi rudement
, qu'il en eut le corps tout couvert
de plaies. Le Roi , qui vit de fes propres yeux
les plaies caufées par les coups que Laurent
avoit reçus , en fut fi vivement fiappé > -que
fes yeux s'ouvrirent à la lumière. U fe conveS
lit
9 embraflala Religion
chrétienne , 8c ne cher^

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46 Saint Flos cule,É.
"
cha plus que les moyens de faire connoître
fÉVRDËR a.' Jefus-Chrift à fes fujets. Notre Saint ne furvé-
eut pas de beaucoup à ce merveilleux change-
ment. Il mourut en 610 , après avoir gouver-
né onze ans (on Églife. On trouve fon nom
dans le Martyrologe Romain (<z ).
Voyez Bede, HiJLl. z, €.4, (f, y; Guil- &
laume de Malmesbury , L 1. Pontif. And.

SAINT FLOSCULE ou FUSCOLE


VULGAIREMENT
SAINT FLOU,
DIXIEME ÉVÊQUE D'ORLÉANS.
O Enom
fon
Saint vîvoit vers Tan 480. trouve
au 1 de Février dans le Martyrologe
On
dUfuard. En 1019, fes Reliques furent folen-
nellement transférées par Tordre du Roi Ro-
bert dans FÉglife de S. Anien. On les y garde
encore dans une Châfle. Notre Saint eft Patron
Titulaire d'une Églife d'Orléans , dite autrefois
de Sainte Marie , &
aujourd'hui de la Concep-
tion. Cette Églife eft Paroiffiale en même &
temps un Prieuré de l'Ordre de Saint Auguftin.
Voyez le GaUia Chrijl. nova 2 T*8 » col. 1413.

(4) On lit dans Bede rentn'étoit point Moine, mais


(L I. c- 27)«les paroles fui- Prêtre féculier. Il eft aifé de
irantes : Auguftin tm>oya à Rxnru fentir lepeu de folidité de cet
le Pritrt Laurent & U Moine argument* Voyez Collier »
Pierre. Quelques modernes DiS. fuppl. &le P, Hcnfche*
ont inféré delà que $, Lau* t P« *9°*

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Saint Blaise,E. 47

III. JOUR DE FÉVRIERS


SAINT BL AISE,
ÊVÊQUE DE SÉBASTE,
en Arménie,
Martyr.
Nous avons quatre fortes d'Actes difflrcnts de
Saint BLzife 9 tous écrits en Grec. Les Auteurs
nenfont pas fort anciens 9 &
méritent peu de crian*
et, Boliàndus , en publiant ces différents Ses , A y
a Joint de fuyantes remarques que mus ayons

i.«, ÎT o,« d« h r,.dece ûiM


bous eft Inconnue. Nous ne favons de
Ê^u,=
lui au-
tre chofe , ûnon qu'il étoit Évêque de Sébafte f
te qu'il fut martyrifé par les ordres d'Aerico-
bus y Gouverneur de Cappadoce de la pe- &
tite Arménie, vers Tan 316, durant la per-
sécution de Ldcinius. Nous liions encore dans
A&es de Saint Euftrate , qui fouflrit fous
les

DiocVctien , que Saint Blaife , Évêque de Sé-


ba/te , Reliques avec refpeô
recueillit fes
pour mettre avec celles de Saint Orefte,
les &
qu'il exécuta ponôuellement les dernières vo-
lontés du Bienheureux Euftrate(a). .La Fête
de notre Saint eft d'obligation chez les Grecs ,

(«) Ce Gmt Martyr «il honoré dans TÉgUfc , le 1} «c

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48 Saint B l a i s e 3 E.
& fe fait le de Février. On trouve aufîi
1 1 .

vu * fon nom dans les anciens Martyrologes d'Oc-


i*»
revRiEK 3.
cident ^
font âtoîbuéî à Saint Jérôme. Il
eft nommé le 1 5 de Février dans Adon ,
Ufuard , &
d autres Martyrologiftes , qui ortt
uné antiquité encore plus grande ( 1 ). Les Re-
liques de Saint Blaife ayant été difperfées en
Occident durant les Croifades , fon culte y de-
vint célèbre. Plufieurs gUérifonS irtiraculeufes,
opérées par fon interceffion, augmentèrent
encore la vénération des peuples pour ce faint
Martyr. Il eft le Patron titulaire de la Républi-
que de Ragufe ( 1 ).

Pourrions-nous réfléchir fur les totlrmeiits


que les Martyrs ont endurés pour l'amour de
Jefus - Chrift , fans nous confondre à la vue
de notre lâcheté ? Que d'inftabilité dans tou-
tes les belles réfolutions que nous prenons
i fans cefle de fervif un Dieu <Jui en a tant fait
pour nous ! La moindre difficulté nous décon-
certe ; & nous rentrons bientôt dans la voie
de nos premiers égarements. Quoi ! n'aurons-
nous jamais le courage de conformer notre
vie à nos lumières î Aurons-nous toujours la
foiblefle de céder au torrent du monde , de
fuivre fes exemples , d'adopter fes maximés-,
que nous réprouvons comme contraires à l'ef-
prit de l'Évangile , lorfque nous les confide-
rons dans le filence des pallions ? Ne cefle-
rons-nous point d'être les efclaves d'une ima-

( 1 ) Voyez Chailelain, au lain , loc. cit. p. joj » & M*


3 de Février. Jofeph Affcmani , in Calend.
( 1 ) Voyez Bollandus > le Unir, ad 11 f$br. T.é.p.tt}.
P. Pagi , ad an, }i6 > Chaftt-

gination

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Saint ZàifscnAiRz: 49
gination qui groffit les obftacles à nos yeux , M—
pour nous empêcher de mettre la main à Pœu- février
vre ? Nous îaiflerons-nous
continuellement
aveugler par l'amour propre , qui nous dégui-
fe notre lâcheté fous des apparences fpécieu-
fes ? Ah ! formons aujourd'hui! une nouvel-
le refolution de nous attacher au fervice de
Dieu ; mais une refolution qui foit efficace , SC
qui nous rende viâorieux de tous les efforts
que la chair 6c le monde pourroient faire pouf
nous rengager dans nos anciennes infidélités.

SAINT ANSCHAIRE,
Archevêque
rm & de Brème.

Tiré de fon excellente Vie , Icrite par Saint


Rtmbcrt fon SucceJJeur , que D. Mabillon a publiée
avec dtfavames remarques , Aô; Ben. T 4. p. 401 ;
& du difiours préliminaire du P. Henfchenius , p.
39 V°y<l Adam de Brime , Hift. Epifc. Hamb.
C Olof Dolin , Auteur d'une bonne Hiftoirc de
Suéde , fous les règnes de Lijicn, Bel, & Bagnar^
c. i€.

L'An 865.
» «

A Ns chaire,
en Picardie
Moine de la vieille Corbie
, pana dans la nouvelle ,
que Saint
Adélard avoit fondéç en Saxe. Il y fut chargé
d'enfei^ner les Lettres, d'inflruire le peuule^
te de prêcher publiquement dans FÉ* life : fonc-^

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5o Saint An se u aire.
tion dont il s'acquitta avec autant de piété que
#
defuccès. Harold ou Hériold, Prince de Dan-
*
nemarc , ayant reçu le Baptême i la Cour
de l'Empereur Louis le Débonnaire , chez Ie-
ouel il s étoit réfugié , demanda quelque Mif-
fionnaire zélé pour raccompagner dans fon
pays. On lui donna notre Saint qui ne foupi-
roit qu'après l'accroiflcment du règne de Jefus-
Chrift. Anfchaire prêcha la Foi premièrement
aux Danois , puis aux Suédois , enfin aux &
peuples qui habitaient le Nord de l'Allemagne.
Le Seigneur répandit tant de bénédiâions fur
fon miniftere , qu'un grand nombre ^Idolâ-
tres embraflerent le ChriiHanifme. Le Pape
Grégoire IV le nomma
en 83 1 , Légat du faint
Sie^e & Archevêque de Hambourg. Après la
ruine de cette Ville f qui fut pillée brûlée par
fit

les Normands en 84 k , il travailla de toutes fes


forces à confoler &
a foutenir dans la vraie Foi
fon troupeau difperfé par les Barbares. Le Siè-
ge de Brème étant devenu vacant en 849V le
Pape Nicolas le réunit à celui de Hambourg »
& confia à notre Saint le gouvernement des
deux Êglifes.
Anfchaire , en quittant le Dannemarc & la
Suéde , y lama des Millionnaires , tirés de la
nouvelle Corbie , pour cultiver le champ au'il
àvoit défriché. Mais tous les foins de ces; Ou-
vriers Évangéliques ne purent empêcher les
f>euples de ces deux Royaumes de retomber dans
'Idolâtrie. Le trifte état de cette Êglife nai fian-
te demandait le retour de fon Fondateur. Anf-
chaire reparut donc dans le Dannemarc , où ,
avec là proteôion du Roi Horick , il vint à
bout de faire refleurir la Religion chrétienne.
Son zele rencontra plus de difficultés en Suéde*

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OJas , Prince futferftitieux > Voulut que le fort
décidât , fi le libre exercice
du Chriftianifme ^
feroit permis dans fes États. Le ÉuntÉvêqiie FÈV*K*K
gui ne voyoit qu'arec peine la Caufe de Dieu
loumife aux caprices du hazard , recommanda
du moin* au Ciel l'iffue d'une décilion fi bizar-
re. Les chofes tournèrent comme ill'atoit dé*
firé, c/eft-àrdire
?
au défavantage duPaganifmeu
La lumière de l'Évangile n'eut pas plutôt brillé y
qu'il fe convertit une multitude prodîgieufe de
peuple. Anfchaire fit bâtir plufieurs Êglifes*
Qu'il pourvut d'excellents Pafteur$ avant que
de retourner à Brème.
Notre Saint , qui f comme S. fcnil tfaignoil
,
d être reprouvé après avoir prêché Jefus-Chrift
aux autres , réduifoit fon corps en fervitude
par la pénitence &
la mortification* U portoit
Je cil ice f &
ne fe nourriflbit communémertt 1
que d'eau & de pain*
Jamais il n'entreprend
tien fans avoir implore auparavant le fecourt
f
du Ciel. Quoiqtfil pofledât le talent de la pa«
rôle dans un degré fupériôUr , il n'attçndodt qua
de Dieu le fuccès de fes Prédications» Sa eha*
tité pouf le» pauvres ne connoiflbit point (fer

bornes ; & fpn plus grand plaifir étoit


de leu*
laver les pieds &c à table* U avoir
de lés fervir
toujours ardemment déliré le maîtyte ; il &
éfoit ntrfuadé que fes péchés feuls lui avoient
ravi h
gloire de ver&r fon fang pour Jefus*
Chrift. Pour s'exciter & \t componction , à &
l'amour de Dieu, il Vétôt.firit un recueil de
paflages fort touchant* , doftt il mit une partie
a la fin de chaque' Bfeaume (<z). Il mourut à

(
VOtt
« ) M. fléuty dit «ju'oni dans des fteatttiéts
cocert 4* çct pillages ÛYWt Fabrkius faifeil MA
MSI U

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fto Saint An sch aire.
Brème , en 86 y , à la 67e. année de fon âge,
FÉVRIER 3
^ a 34 e ^ e ^on Épifcopat ; il s'opéra plufieurs
^ *

'
miracles par fon interceflion. Son nom fut in-
féré dans les Martyrologes peu de temps après fa
mort. On l'appelle en Allemagne Saint Scharies;
ce qui a tait nommer la Collégiale de Brème
S ant-S chartes. Celle de Hambourg , qui portoit
le même nom , a été convertie par les Luthériens
en un Hôpital pour les Orphelins ( b ).

grand cas du recueil dont Saint Anfchaire nous a biffé


nous parlons. Voyez la Biblio- une Vie de Saint Willehad ,
thèque latine du moyen âge. premier Évêque de Brème ,
( * ) Il paroit par une Char- qui mourut en 789 ou 79 1-
,

te de Louis le Débonnaire que Ceft un Ouvrage écrit avec


le vrai nom de notre Saînt é t oi t beaucoup de fageffe & d'élé-
étnfgar. U eft auffi appelle de gance. U eft précédé d'une
in^me dans une de fes lettres. Préface que l'on regardera
II attribue dans cette lettre ,
comme un Chef-d'œuvre , fî
(jp. Bull. & Mabd. ) toute la l'on confidere fur tout le temps
gloire de converiion des où vivoit fon Auteur. Surius
la
peuples feptentrionaux , aux- donna un aûez mauvais Ex-
quels il avoit prêché la Foi trait de cette Vie , qui fut im-
au zelc de Louis le Débonnai- primée en entier à Cologne,
re & a celui d'Ebfou Ar- en 1642. Le P. Mabillon l'a
,

chevêque de Rheims , fans fai- publiée de nouveau. Fabricius


re aucune mention , ni de fa l'a fait auffi réimprimer dans
performe , ni de fes travaux. f<t H+floritiu 4ê Hambourg , T, 2 »

• » *

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.

Sainte fTéjtéBURCE.

SAINTE WÉRÉBURGE, FÉVRIER -

VULGAIREMENT ~ >

SAINTE VERBOURC;
Vierge, Abbesse et Patrons

de Chefter.

Tiré de Harsfield% de Bede, de Bompton " de


9
Florent de Worceftcr, de Hygden delà Chronique 9
de Langhorn , des Colleâanea de Lièand, de
rHifloire de Galles , par Powcll , delà Chroni-
que Saxone, deSiméon de Durham, & dune VU
fort curieufe de la Sainte , écrite en anciens Vers
anglois , par Henri Bradshaw Moine de
Ckejler 9
,
fui travailtoa d*après le Paffionnaire de fin Mo-
Tiafttrc* On peut confulter fur cet Ouvrage Wood,
Ath. Oxon. Vol. i. p. 9.11. 14; &Tannér, Bibl.
2 1 . Cette Pieu, qui étoit devenue très-rare ,fut
p. 1
imprimée en 1S2 1 , che^ Richard Pynfin , Impri-
meur de Henri VIIL Voyeç aufft ^ancienne Vie de
Sainu Wéréburge. Cambden en envoya une copie i
Rojweide , que le P. Hmfckenius a publiée avec des

VII. Siècle.

Sainte W£réburge eut pour pereWiif*


Roi de Mercie ;
fere , &
pour mere , Sainte .

Erménilde • fille d'Ercombert, Roi de Kent


**•

U uj
T"V

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54 Sainte WtRtBvRGt.
- & dç Sainte Sexburge ( a ) On ne pouvoit rient
,

m
ajouter à l'éclat de (a naiflance , puifqu'ello
'
étpi( iffue 4u (ang des principaux Rois Saxons,
XUe eut le bonheur de ne point s'enorgueillir
d'un avantage (pie le mande efKme tant, par-
ce qu'elle avoit appris dès fon enfance à mepri-
fer les grandeurs humaines. Elle avoit trois
frères f AVulfede &
Rufin , qui reçurent la cou-
ronne du martyre , fie Kenred , qui mourut à
Roaie en odeur de fainteté. Erménilde , leur
vertueufe mere , n'avoit rien négligé pour cul-
tiver ces jeunes plantes que ie Ciel lui avoit
confiées ; aufli eut elle la confolation de les voir
croître en grâce 8c en (ageffe devant Dieu de- &
vant les hommes, Weréburge fur tout avoit
répondu à fes foins d'une manière particulière.
Son humilité, ion obéiflance fa douceur &
avoient quelque diofe d'extraordinaire. Elle
flifitfoit régulièrement aux Offices de l'^fo

pec mere. La prière publique ne fuffiianc


point à la ferveur de fa dévotion , elle en fai-
lbit de particulières dans fa chambre , qui du-
roient iouvent plufieurs heures de fuite. Elle
nvoitune iàinte avidité pour les exhortations &
les difcQurs de piété. Dans un âge où l'on n'*
«Tardeur que pour les amufements les vani. &
tés du fieçle , on remarquoit en elle cette gravi*
té, ç«te déçence, Sç cet efpritde mortifiça-

{m) Wulfere faîfoit fa réfl- i mais il fe laifla rubju*


nifirne
dencç près de Stone dans le guer par des vues toutes mon-
Cqm té de S rafford . Peada , fon daines qui lui firent différer
frère aine , avoit commencé à l'exécution de fa promeff©,
planter la Foi dans ie Royaume La férocité de fon caractère
fieMer c e. Wulfere % qui fe fit
i donna beaucoup d'exercice à
Chrétien en fe m ar a n t p rom t
i
,
i la paûençe 4ç Si* Erménilde,
ftxtirpcf ki reftes du |>aga-

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Sainte Wérébi/rge. 55
faon qui caraôérrfent les âmes parfaites. ïoute
autre joie que celle qui vient du témoignage FÉVRIER
j.
y — »— g ——•
compon&km étoit fi vive ne ceflbit
, qu'elle
de déplorer fes miferes , &
la malheureufe né-
eeffité oîi elle étoit de vivre éloignée de fon
Dieu. Son amour pour la pureté s*allarmoit à
la vue du moindre danger; elle confervoit cet*
te vertu par une vigilance exafte fur tous fes
fens, par des jeûnes rigoureux, par une &
prière fervente & continuelle.
Une de grandes quali-
rare beauté, jointe à
tés, &â cFéminentes vertus , la fit rechercher
en mariage par les plus confidérables partis.
Maïs elle relia inébranlable dans la réfolutioa
qu'elle avoit prife de confacrer à Dieu fa virgi-
nité. Le Prince des Saxons Occidentaux ayant
employé de riches préfents pour la gagner , elle
les réfufa ainfi que fa main , en difant qu'elle
avoit choifi pour époux le Seigneur Jefus , Ré-
dempteur des hommes. Elle triompha avec en-
core plus de gloire des defleins de "Werbode f
un des plus puiffants Seigneurs de la Cour,
Wulfere , qui aimoit beaucoup ce Seigneur à
caufe des fervices importants qu'il en avoit re*
cis, lui promit fa fille en mariage, à condi-
tion toutesfois qu'elle y confentiroit. Cettç
promeffe affligea fenfiblement la Reine les &
deux Princes ulfàde w &
Ruffin, Ceux-ci , qui
venoient d'embrafler la Religion chrétienne f
prétextèrent une partie de chaffe, afin d'aller
rrouver Saint Chad , Évêque de Litchfield 9
qui habitoit un Hermitage , fitué dans ime fo-
ret. Ce Saint , après avoir achevé de les inf-
truire , les baptifa &
les renvoya enfuite.
Verbode , qui les favoit oppofés à fon maria-

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j6 Sainte Wérèbu rge.
ge , refolut leur perte. On dit même qu'il fe fît
donner 1111ordre favorable à fon deflein par le
Jévrjer 3
"
Roi , qu'il anima contre fes enfants , en lui
peignant fous de noires couleurs la vifite qu'ils
avoient rendue à Saint Chad , & en fubornant
de faux témoins oui les chargèrent de crimes
atroces. Ce Miniftre perfide pouvoit tout fur
Pefprit de Wulfere ; & c'étoit lui qui l'avoit en-
gagé à favorifer l'Idolâtrie. Mais il ne tarda pas
à lubir le châtiment que méritoient fes détefta-
Mes intrigues. Les Princes n'eurent pas plutôt
été mis à mort , que le Roi en conçut la plus
vive douleur. Allarmé par les reproches de fa
tonfcierice , il rentra en lui-même , fit péni-
tence de fon crime , & fe conforma en tout aux
tonfeils de la Reine & de Saint Chad. Il dé-
truifit toutes les Idoles , changea leurs Tem-
ples en autant d'Èglifes , fonda l'Abbaye de
Peterborougb & le Prieuré de Stone , où fes
deux enfants furent enterrés , &
étendit le cul-
te du vrai Dieu par fon zele &
par fes exemples*
Wéréburge , charmée d'une révolution fi peu
attendue , ne craignit plus de découvrir à fon
pere l'ardent défir qu'elle avoit d'embrafTer l'É-
tat monaftique. Le Roi refufa d'abord fon con-
tentement ; mais il fut enfin obligé de céder aux
înftances réitérées de fa fille. Il fe mit donc au
deflus des mouvements de la nature , & fit gé-

ïîéreufement à Dieu le facrifice qu'il exigeoit


de fa tendrefle. Il conduifit lui-même fa fille
à Ély , étant accompagné de toute fa Cour.
Sainte Audry , Abbefle du Monaftere , vint pro-
ceflionnellement avec toutes fçs Religieufes f
pour recevoir la PrincefTe à la porte. Wéré-
nurge demanda à genoux la grâce d'être reçue
dans la Communauté , en qualité de Pcniten-

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I

Sainte Wèrèbu rge. 57


le ; ce qui lui fut accordé. L'humilité & la pa- -
tience avec
lefquelles elle foutint les épreuves
ytWà
ordinaires prouvèrent évidemment que fa vo-
,
cation venoit de Dieu. Elle n'eut plus de volon-
té , ou plutôt elle n'agit plus que par l'impreffion
de celle de fa Supérieure. Son pere aflîfta à la cé-
rémonie de la rrofeflion avec plufieurs autres
Princes ( b ). Notre Sainte devint l'exemple de
(es Sœurs par fon exafHtude à obferver la Rè-
gle , par fon amour pour la prière , la contem-
plation &
la pénitence. Elle quitta enfuite le Mo-
naftere d'Èly , à la follicitation du Roi Éthelred
fon oncle, qui la chargea de rétablir la difcipli-
ne monarfique chez toutes les ReKgieufes de
fon Royaume ce Prince lui fournit encore des
;

t»jin1s (ufltfants pour bâtir trois Monafteres (c).

( b ) Quelques Auteurs ( ap. parmi les Saints , le 13 de


lulznâ.Collcft. ) placent cet Février.
événement après la mort de ( c ) Celui de Trentham ,
Wulrere ; mais nous avons Comté de StarTord
le -,

cru devoir fuivre l'autorité de celui de Hanbury , près de Tut-


Les Princes dont il bury , dans le même Comté »
:
, étoient les trots fre- Se celui de Wedon , dans
; du Roi avec Egbright ou
, le Comté de Northampton.
Eçbert y Roi de Kent , fit A- Éthelred fonda aum la Collé-
àulph , Roi des Eft - Angles. giale de Saint Jean-Baptifte %

"VuHcre mourut en 675 , & fut dans les Fauxbourgs de Weft-


entetté à Litchfield. Kcnred Cfcefter , &
donna à Saint
fils étant alors trop jeune Egvrin un emplacement pour,
fuccéder, la Cou-
lui bâtir la célèbre Abbaye d'É-
à Éthelred , frè- vesham. Ce Prince, après
re du feu Roi. La Reine Sainte avoir régné 39 ans , fe fit Re-
Erinénilde ne fut pas plutôt ligieux dans le Monaftere de
mai trèfle de fa liberté , quelle Bardney , dont il fut enfuite
renonça au monde. Elle prit Abbé. Ce Monaftere étoit
le voile dans le Monaftere bâti fur le Witham , près de
d'Èly , dont elle fut la troiiie- Liacoln. Éthelred remit la
me Abbefle, ayant fuccédé Couronne à Kenred , fon ne-
i Sainte Sexburge , fa mère. veu , qui n'en avoir d'abord
Oa l'honoroit eu Angleterre été exclus qu'a caufe de fon

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ç8 Sainte Wéréburùe.
===? Wéréburge ne négligeoit rien de tout ce qui
j
pouvoit contribuer à la fanéHfication des ames
confiées à fes foins. Sa conduite étoit une leçon?
'

continuelle de toutes les vertus. Indépendant


ment de l'Office Canonial , elle récitoit chaque
jour le Pfeautier à genoux. Après Matines , elle
reftoit à i'Églife , &
y prioit jufqu'au lever de
l'aurore , fe tenant ou à genoux , ou le vifage
profterné contre terre. Sa dévotion étoit fi ten-
dre , qu'on lui voyoit fbuvent les yeux baignés
de larmes. Elle trouvoit un plainr incroyable
à lire les Vies des Pères du Défert , s'excitoit &
de plus en plus à imiter leur zele pour la per-
feftion évaneélique. Delà , cet amour de la mor-
tification qivon remarquoit en elle. Sa nourri*
ture n'avoit rien que de très-commun ; encore
ne faifoit-elle quun feul repas chaque jour.
Dieu lui ayant fait connoître le moment de (a
mort , elle le prédit à fes Soeurs. Elle entreprit
enfuite la vifite de fes Monaftçres , pour y don<*
ner fes derniers ordres 9 & mourut à Trentham ,
du feptieme fiecle. Ont
le 3 Février, vers la fin
l'enterra àHanbury , comme elle Favoit défiré»
En 708 , fon Corps fut levé de terre , en pré-
fence du Roi Coëlred , de fes Minières , oc de
plufieurs Évêques. Comme on Favoit trouvé
entier &
(ans aucune marque de corruption
on le mit dans une Châffe tort riche , le x 1 de
Juin. Il refta deux cents ans en cet état ; mais

bas âge. Kenred régna avec gne f en faveur de Coelred, fou


autant de prudence que de pié- couftn-germain , fît un pèle-
té. Il s'appliqua fur tout à cor- rinage à Rome , y embraffa
riger les abus , &
à étendre monaftique en 708 , 6c
l'État
ta connoiiTance du vrai Dieu. vécut très-faintement jufqu'à
Il abdiqua , après 5 ans de rè- •
fa mon.

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Sainte Wèréburgê. 59
il tomba en pouffiere durant les incurfions des
Danois. En 875 , la Châfle de notre Sainte fut
t£-vrii< r *
portée à Weft-Chefter , dépofée dans une &
magnifique Églife , qui devint enfuite la Ca-
thédrale (</)• Nous liions dans Bradshaw le
détail de plusieurs miracles opérés par l'inter-

(d) Cette Églife fut bâtie fondèrent l'Abbaye de Léo-


par Étheired qui avoit épou-
. nence près d' Hérefor d , & cel-
<c Elflede, fille du Roi Al fr ed le de Covcntry , Ville que
& que fon Beau -pere créa pre- Léofrich affranchir de tout
mier Comte de Merci* * après impôt. Ils rebâtirent ou répa-
fexnnûioo de la Royauté rèrent planeurs Églifes, en*
dans ce pays. Il la fit def- tr' autres celle de Saint Jean do

fervir par des Chanoines fé< Chefter fit celle de Ste. Wéré-
ci:fn, La Comtefle Elâede burge envers laquelle ils a-
imita la piété de fon mari voient une dévotion finguhc-
en fondant plufieurs Églifes. re. En 1093 , on ôta l'Eglife
Elle fit auffi environner Chef- de Ste. Wéréburge aux Cha-
ter de bonnes murailles , le & noines féculiers pour la don-
fomri a d'un Château , pour le ner à des Moines qui turent
mettre à l' abri des inful tes des gouvernés par un Abbé venu
Gallois. Devenue veuve , elle de r Abbaye du Bec en Nor-
rebâtit les Églifes & les Villes mandie. Richard, fils & fuc-
de Srafford , Wanrich * Tam- ceneur de Hugues Lupus , que
vorth, Ôc Shrewsbury, Par- Guillaume le Conquérant a-
ni les Mona/teres dont elle voit fait Palatin du Comté de
fut la Fondatrice , on compte Chefter, allant en pélérinago
la célèbre Abbaye de Saint à l'Êglife de Saint Wénéfrid à
rHerre de Glocefter , dont Holyvell , attribua à la pro-
eue enrichit l' Églife des Reli- tection de Sainte Wéréburge
quat Saint Ofwald , Roi & qu'il avoit reclamée , le bon-
Martyr, Elle y fut enterrée heur qu'il eut d'échapper à
après /à mort. Voyez Brads- l'Armée des Gallois , qui a-
hiw , Dugdale 8c Cambden. voient defTein de fe faifir de fa
Les Rois Athelftan Edgar &
firent de riches préfents à nétable , pour perpétuer U
rÉglxfe de Sainte Wéréburge mémoire de rheureufe déli-
de Chefter, qu'ils vifiterent vrance de fon maître , donna
par dévotion. Sous le règne le Village de Newton à l'Êgli.
de Saint Édouard le Confef- fe de Sainte Wéréburge , fit
feur parut le pieux Léofrich,
,
fonda l'Abbaye de Norton fur
Comte de Mercie , qui épou- laDée , à l'endroit même où
UU vtrtueuif Çodithe, Ils fon Armée avoit patte mirât u-

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6o Ste. Marcvèrite 9 PL
ceflîon de Sainte Weréburge, Ces miracles font
FÉVRIER ) des guérifons fupérieures aux forces de la na*-
ture , la délivrance de Chefter afllégée en 1 1 80
par les Gallois , tes Danois , les Écoflbis 9 &
6c celle d'un horrible incendie , qui s'éteignit
tout à coup lorfau'on fut forti proceffionneile-
ment avec la Chaffe de ta Sainte (*).

M Ê ME JOUR.
L £
SAINTE MARGUERITE,
dite d'Angleterre,
Vierge.

^3 N garde fon corps chez les Cifterciennes


de Seauve-Benoite(tf ), au Diocefe duPuy en
Vélay. On vifite fa Cnâfle avec une grande dé-
votion , &
Ton aflîire qu'il s'y eft opéré plu-
fieurs miracles. On lit dans plufieurs Auteurs

léufement cette rivière à gué, ment de pierre , haut de ie


pour voler au fecours de Ri- pieds , &
chargé de trente fi-
chard. Ce lieu, ditBradshaw, gures antiques , qui repréfen-
fe nomme encore ConJlabU tent des Rois ôt des Princes de
Sondes , c'eft-à-dire , le gué du Mercie, ancêtres, ou du moins
Connétable. parents de Sainte Wéréburge.
Le« Reliques de Sainte Wé~ Voyez les remarques de Coo-
réburge furent diffipees Tous per fur chacune de fes figures*
Henri VIII. On rit alors de la ( c ) Bradsha w a tiré ce
Châfle de la Sainte un Trône qu'il rapporte , du 3 livre du
Épifcopal.queron voir encore Pajficnnaire du Monaftere de
aujourd'hui dans la Cathédra- Chefter.
le de Chefter. Ccftwirnonu- ( a ) Sylva htntdicLa»

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Ste> Marguerite, V. tfi

cette Sainte étoit d'Angleterre mais


ceci ne paroît pas s'accorder avec fon ancien*
^yai^ *.
ne Vie Il y eft dit qu'elle étoit d'une iiluf-

tre femïlle de Hongrie. Sa mère , qui étoit ori-


ginaire d'Angleterre , fit arec elle un pélérina-
ge à Jéru&lem. Elles vécurent toirtes deux fain-
tement dans cette Ville , puis à Bethléem. Mar-
guerite , après la mort de fa mere , entreprit
un pèlerinage à Mont-Serrat en Efpagne, aoîi
elle alla à Notre-Dame du Puy en Vélay. Elle
embrafla enfuite l'État monaftigue chez les
Cifterciennas de Seauve-Benoite ( <f) , où elle
mourut dans le douzième fiecle.
V oyez le GaWa Chriji. Nova , in Dictuf, Ani-
cunjifcu Podimfi, T. 2. p. yyy.

(b) C*eft la tradition du lé dans lesAnnales de cet Or-


pays qui a été adoptée par
,
dre par Henriquez , que d'une
MM. de Sainte Marthe . Gai. Sainte Marguerite d'Angleter-
Ch. *tt. T. +
p. S*$ , &
par re , dont le frère , nommé
D. Beaunier , Ruugil Hifl. its Thomas, fut exilé par le Roi
Abbayu de Franc*. Henri II , avec les parents &
(r) 11 yen a une copie MS. les amis de Saint Thomas de
au Collège des Jéfuiîes à Cantorbéry. Elle quitta le
Piris , avec des notes du P. ficelé par ravis de fon frère
Pierre-François ChifRet. & fe fit Léon ,
Ciftercienne à
(d) U ne paroi c pas très* où mourut en odeur de
elle
que notre Sainte foit fainteté en 1 192. Voyez Hca*
dans l'Ordre de Ci- riquçx fous cette année.
D* moins n'eft-il par-

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6* S. André Cors ini , Ë.

OJOOOJOiCfOtOlf?

JOUR DE FÊ PRIER..
SAINT ANDRÉ
CORSINI,
EVÊ QUE DE FIÊZOLI ;
ekToscake*
~
Tiré de fis deux différentes Vus 9 dont la pre~
mitre eâ touvrage £un de fis difiiples. La féconde
fut écrite cent ans après la mort du Saint , par un
Carme , nommé Pierre- André Cajfagna. Voyt^
auffi la Vie de Saint André Corfini , compofie en
latin par François Venturius > Êvéque de San*
Severo , & imprimée À Rome en 1G2.0 , in 4
0
. Le
P. Maffei , Jéfuite y en a donné un ton Abrégé*

L'An IJ75.

TtVRiKR 4. E Saint , Mu
d'une des plus illuftres fa-
milles de Florence ,
naquit en 1302 , le 30.
Novembre , jour de Saint André , dont il rc-
çut le nom à fon Baptême. Ses parents , qui le
regardoient comme le fruit de leurs prières ,
Tavoient confacré au Seigneur par un vœu ,
dès avant fa naiflance. Us prirent donc iui foin
particulier de l'élever dans les vraies maximes
de la piété chrétienne. >tai$ ils eurent la dou-
leur de voir que leur fils ne répondoit point à
leurs vues. Il pafla effefUvemçnt fes premières

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S. Anurà Corsjni 3 E. 63
années dans le défordre avec quelques liber-
tinsdont les mauvais exemples donnèrent une
février a
nouvelle tâivité au feu de fes paillons. Péré-
grina ùl ceffoit , comme une autre Mo-
mère ne
nique ,de pleurer fur les égarements de fon
fils , & de demander à Dieu la converfioiu Elle
lui dit un jour qu'elle étoit accablée de douleur:
» Je vois bien préfentement que vous êtes ce
» loup que j'ai vu en fonge. » Puis s'expliquant
plus clairement, elle continua ainfi : » Lorfque
» j'étois groffe de vous , je m'imaginai une nuit
» que je portois un loup dans mon fein ; je crus
1» enfuite le voir entrer dans une Églife où il fe

» transforma en agneau. Votre pere &moi


1» ajouta-î-elk , fîmes vceu, même avant votre
» naiflânce , de vous confacrer à Dieu fous la
» proteâion de la Sainte Vierge. Il fuit delà que
» vous n'êtes ni pour nous , m
pour le monde f
» mais pour le fervice du Seigneur. Penfez-»
* vous , mon fils , que votre conduite s'accor-
» de avec votre deftination ? » Ces paroles ,
entremêlées de fbupirs * eurent tant d'efficace ,
que le jeune Corfinife rendit auffi-tôt à FÉglife
des Carmes. Là , après avoir prié quelque temps

devant l'Autel de la Sainte Vierge , il fe fentit


û puiflamment touché de la grâce , qu'il forma Sa conv«*

&
le deffein de ne plus retourner chez fes parents ,
^
& £™
e c
de refter dam le Couvent de ces Pères. U les Carme*,
leur demanda donc l'habit religieux , en 1 3 1 8
fubit les épreuves ordinaires du Noviciat ,triom-
pha de tous les aflauts que lui livrèrent fes com-
pagnons de débauche , &C un de fes oncles qui
voulôit le rengager dam le fiecle , & fit fa Pro-

ieffion iblennelle un peu plus d'un an après ion


entrée dans le Monaftere.
Le jeun* Prçfts ne perdit jamais rien de f*

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64 S. André Cors îni 9 E.
} \ première ferveur. II vint à bout de dompter»
entîerement fes paifions par la pratique des
FÉVRIER 4.
vertus qui y étoient contraires. Il aimoit la
1>riere , le filence , les humiliations , portoit &
'obciflance jufques au plus haut degré. Ses Su-
périeurs ayant exigé, qu'il étudiât la Théologie
& l'Écriture Sainte , il y fit les plus grands pro-
grès , & fut ordonné Prêtre , en 1 3 28. Ses pa-
rents avoient déjà tout arrangé pour
la céré-
monie de fa première Méfie , avoient def-
qu'ils
fein de rendre très-augufte. Mais l'humble Re-
ligieux déconcerta tous leurs projets. Il fe re-
tira dans un petit Couvent qui étoit à fept
milles de Florence , où , fans être connu de
perfonne , il offrit à Dieu les prémices de fon
Sacerdoce avec un recueillement &
une dévo-
tion extraordinaires. Après avoir prêché quel-
que temps à Florence , il fut envoyé à Paris
où il étudia trois ans , & prit quelques degrés.
Il alla enfuite continuer les études à Avignon
. avec le Cardinal Corfini fon oncle. De retour
dans fa Patrie , il fut élu Prieur du Couvent de
Florence par un Chapitre Provincial. Ses exem-
f)les
& fes Sermons produifoient de fi merveil-
eux fruits , qu'il étoit regardé comme le fécond
*~ Apôtre du pays. Il guérit miraculeufement un
*
ulcère que Jean Corfini , fon coufin , avoit au
. cou , &
le retira des défordres dans lefquels il
vivoit depuis long -temps. Outre le don des-
miracles , il avoit encore celui de prophétie.
Pendant que notre Saint édifioit fes Frères
& les peuples de la Province par le fpe&acle
de toutes les vertus , la Ville Je Fiézoli , qui eft
à trois milles de Florence , perdit fon Évêque.-
Le Chapitre de la Cathédrale choifit, d'une voix
unanime, André Corfini pour lui fuccéden Mais
celui-ci

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Si Asdrè Cors ini ,E. tf*
celui-ci n'eût pas plutôt appris ce qui fe pàffoit ,
1
'
ir
|

qu'il fecacha pour éviter un fardeau ailffi re-


rtvaitR *
,
ëoutable* On fit long-temps d'inutiles recher-
ches pour le découvrir ; &
les Chanoines al-
louent procéder à une nouvelle éleéHon quand
,
Dieu permit qu'un enfant indiquât la retraite
de fon ferviteur. André donna fon confente- Il eft fafi
ment , dans la crainte de réfifter à la volonté du tyè<l M *'
Ciel, &
reçut l'Onâion Épifcopale, en 1360. ¥iézoiit
Son changement d'État n'en apporta point dans
femanière de vivre ; il redoubla même fes pre-
mières auftérités. Ce ne fut plus affez pour lui:
qu'un cilice ; il y ajouta encore une ceinture
de fer. Chaque jour il difoit les fept Pfeaumes
de la Pénitence , &
récitoit les Litanies des
Saints , en fe donnant une rude difcipline. Des
farments de vigne étendus fur la terre, lui fer-
voîent de lit. Tout fort temps étoit partagé
entre la prière & les fonSions de l'Épifcopat*
IIne fe délaflbit de fes travaux , qu'en méditant
& en lifant l'Écriture Sainte. Il ne parloit que
rarement aux femmes , 6c ne pouvoit fournir
ni les flatteurs , ni les médlfants. Sa charité
pour
les pauvres , &fur-tout pour les pauvres hon-
teux , étoit incroyable. Il recherchoit ces der-
niers avec le plus grand foin , & les afliftoit le
plus fecretement qu'il lui étoît poffible. Tous
les Jeudis , il avovt coutume de laVer les pieds
des pauvres , afin de pratiquer plus parfaite-
ment cette charité &
cette humilité fi recom-
mandées par Jefus - Chrifî. Un d'entr'eux ns
voulant point préfenter les viens , parce qu'ils
étoient tout couverts d'ulcères , le Saint fur^
monta fa réfiftance. Mais à peine les pieds do
ce malheureux eurent-ils été lavés , qu'ils fe
trouvèrent entièrement guéris. L'Éveqtfe 6a
E
,

66 S. André Co rs inï ,
Fiézoli , digne imitateur de Saint Grégoire îô
'

Février 4 Grand , avoit fur une lifte les noms de tous les
pauvres qu'il connoiflbit, afin d'être plus en
état de pourvoir à leurs befoins. Il n'en ren-
voyoit aucun fans lui avoir fait l'aumône ; Se
il arriva une fois qu'il multiplia le pain pour

avoir de quoi diftribuer aux indigents. Il avoit


un talent ungulier pour réunir les efprits divi-
les : auffi appaifa*t-il toutes les féditions qui
s'élevèrent de fon temps , foit à Fiézoli , foit à
Florence, Le Pape Urbain V
qui en fut infor-
,

mé , l'envoya en qualité de Légat , à Bologne


pour mettre fin aux fàftions qui animoient la
Noblefle &
le peuple l'un contre l'autre. Le
Saint rétablit la paix dans cette Ville , elle &
n'y fut plus troublée tant qu'il vécut.
Le faint Évêque de Fiézoli fe trouva mal
en 1 pendant qu'il chantoit la Méfie de la
371 ,
nuit de Noël. La fièvre le prit enfuite , &C
alla toujours en augmentant. On n'eut bien-
tôt plus aucune efpérance de fa euérifon. Le
malade feul ne fut point allarme ; il atten-
doit fon dernier moment avec tranquillité &
Sa morr. même avec une joie furprenante- Il mourut
le 6 Janvier 1373 , dans la foixante- douziè-
me année de fon âge , &
la vingtième de fon
Épifcopat. Dieu l'ayant honoré de plufieurs
miracles , la voix du peuple le canonifa im-
médiatement après fa mort. Le Pape Eugène
IV, informé que l'État de Florence avoit fou-
vent éprouvé les effets de fon interceflion ,
permit d'expofer fes Reliques à la vénéra-
tion des Fidèles ; &
le Pape Urbain VIII le
mit au nombre des Saints , en 1619. Sa fête a
été transférée au 4 de Février. Clément XII
qui étoit de la même famille , &
le Marquis de

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S. ÀKbRÈ Coà$tkî,È. 67
Corfîni fon neveu, ont orné magnifiquement ===as£
la Chapelle où Pon garde le corps de notre
février
Saint. Cette Chapelle eft dans l'Églife des Car-
mes de Florence. Le même Pape fit attfli bâtir
dans l'Églife de Saint Jean de Latran une Cha-
pelle magnifique &
digne de la première Êglife
du monde , qu'il dédia fous l'invocation de S«
André Corfini 9 &C ôh il voulut être enterré.

II faut , pour parvenir à la vraie feinteté j


dompter & mourir entièrement
fes paflions ,

à foi-même. Cette maxime avouée de tous ,

les Saints eft la bafe & le fondement de la


,

doftrine évarigélique. Auffi le grand Serviteur


de Dieu , dont nous venons de donner la Vie ,
en fit-il la règle de fa conduite. Delà cette ar-
deur à mortifier fés fens , à conferver fon ame
dans le recueillement, à déraciner le vice de
fon cœur , &
à épurer de plus en plus toutes
fes affeâions. C'eft faute de mettre la même
maxime en pratique , qu'on voit fi peu de vrais
Saints dans le monde , &
même dans le Cloî-
tre. Combien perdent lefruitde leurs travaux,

& cela parce qu'ils négligent la feience qui ap-


prend à moutir à foi-même ? Cette négligence
tavorife l'amour propré , qui n'étant point ré-*
primé , infeâe leurs bonnes oeuvres , 6c fouille
ieurs vertus de mille imperfeûions. Et voilà
pourquoi il n'eft pas rare de trouver des Re-
ligieux mêmes , qui , après avoir pafie plufieurs
années dans l'étroite obfervance de leur Règle
font encore arrêtés par la plus légère contra-
diction &
le plus petit obftacle. Ils ne fortiront
jamais de cet état d'imperfe&ion , à moins au'ils
n'attaquent le mal dans fa fource , c'eft à dire
à moins qu'ils ne travaillent à acquérir ce re-

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6$ S. André Cors ini 3 E.
noncement parfait qui immole à Dieu tout
FÉVRIER 4 l'homme terreftre. Les combats qu'il faudra li-
vrer , n'auront rien qui les effraye , s'ils penfent
à cette précieufe liberté des enfants de Dieu ,
qui fera la récompenfe de leurs vi&oires. C'é-
tait l'efpérance de fe procurer cet ineftimable
tréfor , qui foutenoit les anciens Solitaires. Sou-
mis à leurs Supérieurs , qu'ils regardoient'com-
me leur tenant la place de Dieu , ils ne fe
laifToient point décourager par les épreuves
auxquelles on mettoit leur fidélité ; ils s'ar-
moient de patience , & prenoicnt avec joie les
remèdes qu'on leur prel cri voit pour la guéri—
fon de leurs ames , fans s'arrêter à l'amertume
qui rebutoit la délicateffe de la nature.

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SS. Tjtiléas & Phïlor. MM. 69

SAINT PHILÈAS, rtvWE **

É V Ê QUE DE THMUIS,
& SAINT PHILOROME,
- *

Voyt^ Eufebt , L 8 , ç. $ ; Saint Jérôme , Cat.


in Phileam ; & les Actes de nos faims Martyrs ?
publies par le P. Combefis le P. Htnfchenius. 9
>
& D. Ruinait*

Entre les Années j 06 & 5 1 2.

PH 1 l É a S naquît à Thmuis en- Égypte ( a


)
d'une famille qui allioit la nobleffe à de grands
biens. Il reçut une excellente éducation
9 &
fe rendit eniuite fort recommandable par Ton
fcvoir &
par foa éiotjuence* S'étant conver-
ti à la Religion chrétienne , il fut élu Évê-
que de Thmuis même. Quelque temps après
on l'arrêta pour le conduire dans, les priions
d'Alexandrie. Ceci arriva fous les fuccefleurs
de l'Empereur Dioclétien. Ce bon Pafteur,

( a ) Thmuis étoît capitale 1.il, que cette Ville çtoit au-


du Nome ou du Diftrî£r de trefois une des plus riches &
Meadès. Scrabon lui donne le des plus grandes d'Egypte. Ce
nom de Mtndis , qui en Égyp- n'eft plus aujourd'hui qu'un
tien lignilie un Boite f parce petit Village , qu'on appelle
que Pan y étoit adoré fous la OU plutôt Themowia.
Themoî: ,
figure de cet animal. Nous ap- Voyez le P. le Quien , Or.
prenons d'Ammien Marcellin , Chr. T. fit.

E uj

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7© SS.Philèas &Philor.MM.
tout occupé du de fon troupeau , lui
foin-
écrivit de ia prifon pour le confoler &
l'exhorr
ter à la persévérance ( b ). Il décrivoit dans
cette lettre les tourments qu'on avoit fait fouf-t
frir aux Confefleurs qui étoient avec lui. » Cha-
» cun , difoit-il , pouvoit les iniuher &c les mal-
» traiter impunément. C'étoit à qui les frap-
» peroit avec des verges , des cordes , des cour-
» roies, ou même avec.de gros bâtons nouçux....
» Tantôt on en voypit un lié à un poteau ,
*> ayant aux pieds oc aux mains des côrdes 3
*> qui étant tirées avec violence par le moyen
# de quatre roues qu'on tournoit avec rapidi-
» té , l'ccarteloient miférablement. Tantôt on
» déchiroit à un autre le ventrç , Içs côtés , les
ï>bras , ies jambes £c les joues , avec des pei-
» gnei de fer. On pendoit celui-ci par un bras • . .

» On attachoit ceux - là à un pilier , en forte


» néanmoins que leurs pieds ne touchoient
» point à terre , afin que les cordes ferréçs par
» la pefanteur du corps , entraient bien avant
» dans la chair. Çes tourments duroient quel-
» qucfals tout un jour. On en mettoit plufieurs
» dans des ceps , les pieds écartés jufqu'au qua-
» trieme trou ; mais la- plupart étant ramenés
» en prifon , y tienjeirroiént couches fur le dos,
» parce qu'ils étoient incapables de toute autre
» fituation, à caufé de la multitude de leurs
>> cont\i(ions .& de leurs, plaies. Il„yj?n avoit
» qui expiroient entre les mains des Bourreaux,
» &c. h
»

» 0

(b) Nous trouvons une i fiaftique d'Eufcbc , I. 8. c. xo.


partie de la Ictcrc de Saint! p. 50*.
^iuléas dans l'Hirtoire
, Ecclé-. I

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SS. Philéas & Philo r. MM. 71
Le Gouverneur Culcien ( c ) dans un long
interrogatoire qu'il fit fubir a notre Saint , lui ^évrier 4j
demanda entr*autres chofes û Jefus-Chrift étoit
Dieu. Philéas répondit affirmativement , & s * confef-
fioiu
prouva la Divinité de Jefus-Chrift par les mi-
racles ou'il avoit opérés. Culcien lui ayant te-
moigne beaucoup d'eftirne , tant pour Ion mé*
rite , que pour (a qualité , ajouta : » Si vous
» étiez réduit à la dernière milere , &
que pour
» en être délivré , vous me demandafliez à mou*
» rir , je ne balancerais pas à vous l'accorder.
» Mais vous êtes riche , vous avez des revenus
» fuffifants pour votre fubfiftance, pour celle de
» votre famille ; vous pourriez même faire fiûV
m fifter prefque toute une Province. J'ai donc
» pitié de vous % Si je mets tout enufage pour
» vous Ciuver. » Ceux gui étaient avec le Gou-
verneur % voulant abfolument conferver la vie
à Philéas , dirent : » Il a déjà immolé dans le
» Phrontiftere ( </ ). Le Saint repondit nonjç :

1* n'ai point immolé : mais dites Amplement


» facrifié > &C vqus direz vrai. » Il don-
oue j'ai
noità entendre par-là qu'il n'avoit point im-
molé de viâimes 6c d'animaux , mais qu'il avoit
à Dieu un fecrifice plus fpirituel, com-
offert
me celui de la prière % ou même celui de l'Eu-
chariûie ( 1 )
Ses proches étaient préfents , ainfi que plu-
ficurs autres perfonnes de diftinÔion. Le Gou-

( c ) De
Gouverneur de la (</} Cétoit une Académie
Théba'tde il ctoit
, devenu deftince aux exercices de l'ef-
Gouverneur de toute l'Ègyp- prit.
tc , fous le Tyran Maximin ( 1 ) Voyez TUlcmont &
Licimus le condamna à per-| Ceillier.
dreUtçtccn 313,

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P

7i SS PhiljLas & Philor.


9 MM.
* verneur efpérant qu'il fe laifleroit attendrir
ar ^ es fent * ments de ^ a nature , lui dit :
f ÈViUÇR 4-
'
» Voyez le déplorable état où votre femme
» fe trouve rçduite. Le Martyr répondit : Je-
» fus-Chrift , le Sauveur des ames , qui m'ap-
» pelle à l'héritage de fa gloire , y peut aufli
» appeller ma femme , s'il le veut. » Les Avo-
cats touchés de compaffion , dirent à Culcien :
» Philéas demande un délai. Le Gouverneur
» en s'adreflant au Saint : je vous l'accorde ,
» afin que vous penfiez un peu à ce que vous
» avez à faire. J'y ai penfé répliqua Philéas ,
» &je perfifte toujours dans la réfolution de
» mourir pour Jefus - Chrift. » Alors les Juges 9
le Lieutenant de l'Empereur , qui étoit le pre-
mier Magifbat de la Ville , & tous les au-
tres Officiers de la Juftice , s'étant joints aux
proches de Philéas , ils fe jetterent tous à fes
pieds , &le conjurererent d'avoir pitié d'une
famille défolée , & de ne pas abandonner fes
enfants dans un âge oii ùl vie leur étoit fi né-
ceffaire. Mais le Saint , femblable à un rocher
que la fureur des vagues ne peut ébranler , éle**
va ion cœur à Pieu , & protefta qu'il ne re-
connoiflbit pour fes parents que les Apôtres &
les Martyrs. Il fe trouva parmi les affiliants un
Tribun qui étoit en même temps Tréforier Gé-
néral de l'Empereur à Alexandrie. Il avoit dans
la Ville un Tribunal particulier , oii il jugeoit
les procès avec plusieurs perfonnes de grande
eonfidcration. On le nommoit Philorome. Pé-
nétré d'admiratipn pour les réponfes de Phi-
jcas , &indigné de l'acharnement de les enner
ïnis à le perdre , il s'écria : » Pourquoi vous
„ opiniâtrer ainfi à vouloir vaincre la réfiftancc
v de ce brave homme } Pourquoi chercher A

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SS. Ruîle as & Philor. MM. 73
y le rendre infidèle à fon Dieu par une lâche I

» compiaifance ? Ne voyez- vous pas qu'il n'en- ^yj^ ^


» vifage que la gloire du Ciel , qu'il n'a que &
» du mépris pour toutes les chofes de la terre ? »

Ces reproches irritèrent l'affemblée, qui deman-


da la mort dePhiléas &
de Philorome. Ils furent
donc condamnés tous deux à perdre la tête. Sa motu
Comme on les conduifoit au fupplice , le
frère de Philéas , qui étoit du nombre des Ju-
ges , dit: » Philéas défire qu'on lui accorde fa

» grâce, * Culcien l'ayant fait rappeller , lui de-


manda fi répondit le
cela étoit vrai, »
, Moi
>- Saint , à Dieu nç
n'écoutez point ce
plaife 2

v> malheureux. Bien loin de fouhaiter la révo-

» cation de la Sentence qui me condamne à


» mon , je n'ai au contraire que des a&ions de
» grâces à rendre aux Empereurs à vous , & -

%% puifque je vais entrer aujourd'hui en poflef-

» fion d'un Royaume que Jefus-Chrift veut bien


» partager avec moi. » A peine eut-il achevé
ces parolçs , qu'on le reconduifit au lieu du
fupplice y où , après avoir exhorté les Fidèles
à la persévérance , il fut décapité avec Philo-

rome. Son martyre arriva entre les années 306


& 3 1 2. On trouve le nom de ces deux Saints
àans les anciens Martyrologes,

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j4 S. Isidore de Pèluse*

«• LE' MEME JOUR,


SAINT ISIDORE DE PÉLUSE,

£L fe fît Moine dans fa jeuneffe , & devin*


cnfuite Supérieur d'un Monaftere , fitué dans le
voifinage de ia Ville dont ii porte le nom. Nous,
apprenons de Facundus & de Suidas , qu'il fut

ques qui vivoient dans le même temps , Tho-


noroient comme Ayant choifi Saint
leur pere.
Chryfoftome pour modèle , il ne pouvoit man-*
<juer de foire de grands progrès dans la vie fpi-
rituelle. Il mourut vers, l'an 449. Nous avons
de lui deux mille &
douze lettres qui font for*
courtes , mais qui font remplies d'excellentes
inftruâions. Le ftile en eft naturel , élégant ,
plein de feu &
cfonâion ( a ). L'Auteur de-
voit être un homnte plein de prudence , de
zele &d'humilité , brûlant d'amour pour Dieu %
& orné de toutes les vertus.
Voyez Photius , Cod. 232 &
228 ; Tille*
mont , T. iS , p. $j ; Bollandus , 4, Fcbr. /%
468.

(a) Pofle*n dcfiroit qu'on! apprendre la langue Grecque


pour | aux jeunes gens.
s'enfervit dans les clafles

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Saint Rembert „Arch. 75
1 ssssaassssssgsa

SAINT REMBERT,
Archevêque de Brème,
S Aint Rembert
namiit près de Bruges ^
en Flandre , &
fe fit Moine à Turholt , qui n'&
toit pas éloigné de ûl patrie. Saint Anfchaire
t
qui l'avoit aflbcié à i<s travaux apoftoliques ,
le déiigna pour Ion fuccefleur dans (k dernier*
maladie, » Rembert , dit-il alors , eft plus digne
h d'êne Archevêqne , que je ne fuis digne oc-
» tre ion Diacre. » Après la mort de ce feint
homme , arrivée «n 865 , Rembert fut choifl
d'une voix unanime pour gouverner les Dior /

cefes de Brème & d'Hambourg qui avoîerît


,
été unis , comme nous l'avons dit dans la Vie
de S. Anfchaire ( a ©ri lui donna encore une
infpcftion générale fur les Églifes de Suéde, de
Dannemarc , &
de la Bafle - Allemagne , afia
qu'il mît la dernière perfeôion à l'ouvrage que
ion prédécefleur avoit fi heureufement com-
mencé. Son zele 9 toujours infatigable lorsqu'il
s'aguToit d'accroître le règne de J. C. lui infpira
le deflein d'aller prêcher l'Évangilç aux Eicla*
vons 8ç aux Vandales Sa charité pour les

(a) Le Siège d'Hambourg vêque fous regne de Charles


le
ayant été uni à celui de Brè- V. Ce Siège & celui de Fer-p
me , cette dernière Eglife den furent fécularifcs & cédés
ttoit devenue la Métropole à la Suéde par le Traité de
de toute l'Allemagne Septen- Weftphalie , en 1648.
trionale. La Ville de Brème (i) Aujourd'hui ceux de
après avoir embrafle le Luthe* Brandebourg.
raniûne , chafla fon Arche-
y6 Saint Gilbert.
malheureux étoit fi grande , qu'il vendit les Va^
FÉVRIER 4. ^es fecrés , afin d'avoir de quoi racheter les Cap-
tifs qui gémiffoient fous l'efclavage des Nor-
mands. Malgré occupa-
la multiplicité de fes
tions , il favoit trouver des moments pour va-»
quer à l'exercice de h prière. Il mourut le 1 r
Juin 888 ; mais le Martyrologe Romain en fait-
mémoire le 4 de Février , qui fut le jour de
fon éleâion à l'Éjttfcopat ( c\
Voyez fa Vie écrite peu de temps après fa
mort , laquelle a été publiée par Henfchenius ,

P* 555 > par Mabillon , AH. Ben. &c.

h ' l u t I
' . II. Il » —

SAINT GILBERT,
Fondateur des Gilbertins»
O E Saint naquît à Sempringham dans la Pro-
vince de Lincoln. Ayant été formé à la prati-
que de toutes les vertus cléricales , il fut éle-
vé aux faints Ordres , puis reçut la Prêtrife de
l'Évêque de Lincoln. Il ouvrit une École , oh
il enfeigna quelque temps à. la jeuneffe les
principes des feiences, encore plus les gran- &
des maximes de la piété. En 1 1 15 , il fut nom-
mé à la Cure de Sempringham à celle de &
Tirington. Ces deux Paroilies , dont fon père
étoit Seigneur , avoient été unies , pouvoient &

( c ) Nous avons de Saint Walburge % première Abbefle


Rembert i°. la Vie de Saint de Nienherfe. Ceftunecxkor.
Anfchairc , écrite avec beau- tation fort pathétique à l'hu*
coup de fidélité, d'élégance milité 8c à la virginité.
& d'onction a°. une lettre à
:

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Saint Gilbert. 77
Jar conféquent être deflervies par un même
Prêtre. Le Saint ne fe réferva du revenu de ces
février 4*
deux Bénéfices , que ce qui lui étoit abfolu-
ment néceflaxre pour vivre ; tout le refte fiit
difrribué aux pauvres. Il fe livra tout entier à
finirruÉtion de fes ParoiAien^ &
ce fut avec
un fuccès extraordinaire. Ils vivoient en effet
dans leurs maifons , comme des Religieux dans
leurs Cloîtres ; &il fuffifoit de les voir
, pour

connoître quel étoit leur Pafteur. Sept Vierges


s'étant conlacrées à Dieu dans ime maifon voi-
fine de FÉglife Paroiffiale de Sempringham ,
Gilbert en prit un foin particulier , &
leur don-
na une Règle qu'elles obfervoient exaftement
dans leur retraite* Il en donna une auflî à une
Communauté cFhommes qui demandèrent à vi-
vre fous fa conduite. Il avoit tiré la première
de ces Règles de celle de Saint Benoit , &la
féconde de celle des Chanoines-Réguliers; mais
il ajouta à Pune $t à l'autre quelques nouvelles

ConfKtutions. Telle fut l'origine de l'Ordre des


Gilbertins , que le Pape Eugène III approuva.
Notre Saint entra lui-même dans cet Ordre
& en prit gouvernement , dont il fe démit
le
toutefois quelque temp£ avant fa mort. Il ne fe
nourriffoit que de racines &
de légumes ; en-
core mangeoit-il fi peu , que Ton ne concevoit
pas comment il pouvoit lubfifter. Il avoit tou-
jours à table un plat qu'il appelloit le plat du
Seigneur Jtfus. Il y mettoit ce qu'on lui fervoit
de meilleur , puis le fàifoit donner aux pauvres*
Son amour pour les mortifications étoit infa-
tiable. Il portoit habituellement le cilice , ne

donnoit que fort peu &


affis , employant une

grande partie de la nuit à la prière. C'étoit dans


cç feint exercice que fon anie trouvoit çes ailes

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$ÀÎKT GlLÈkRt.
fpirituelles ,
par le moyen defquelles elle s'élé*

FÉVRIER
vo^ i^u'au thrône de la divine Majefté.
* Dieu voulut éprouver fon ferviteur > en per*
mettant aux hommes de le perfécuter. Saint
Thomaà de Cantorbéry ayant été exilé , Gil-
bert & les autres Supérieurs de fon Ordre fu-
rent accufés de lui avoir fait pafTer des fecours*
L'accufation étoit faufle ; mais le faint Abbé
aima mieux être mis en prifon , &
courir le
rifque de voir fupprimer fon Ordre , que de fe
jufufier , dans la crainte de paroître condamner
une aâion qui auroit été jufte &
bonne en elle-
même. Enfin , après avoir fourni une carrière
aufiï longue que fainte , il mourut le 4 Février
1 190. Il étoit âgé de 106 ans. Les miracles oui
s'opérèrent à fon tombeau , ayant été vérifiés
par Hubert > Archevêque de Cantorbéry , par &
les Commiflaires qu'Innocent III nomma en
1201 , il fut canonifé Tannée fuivante par ce
Pape. On attribue à ce faint Abbé les Statuts
des GUbertins , &
Us Exhortations à fis Frères.
Voyez fa Vie écrite par un Auteur contem-
porain , & publiée par Dugdale , Monajl. T.i,
P* 6963 & parle P. Henlchenius. On trouve
dans ce dernier une fecDnde Vie de S. Gilbert,
que Capgrave nous a donnée , &
qui eft du
même fiecle. Voyez auffi Harpsfield , HiJL
AneL Centiir. tz , c. 37; de Vifch 3 BibL Cijter,
Hclyot, &c.

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*

Saint Modàn 3 Âbèè.

rtvWER *
SAINT MODAN,
Abbé en É c o s s e. r
'

IL E Monaftere de Drybureh , qui étoît fitué


auprès de Mailros , &nui des plus célèbres de
FÉcofle , fut celui que Mo dan choifit pour fe
confacrer à Dieu vers Fan 522. Perfuadé que
l'exercice de la prière &
de la contemplation
étoit Tunique moyen de parvenir à la perfec-
tion Évangélique , il donnoit fix ou fept heu-
y
res par jour. Comme favoit encore que Fef*
il

prit de prière a pour fondement cette pureté de


cœur , qui eft le fruit de l'abnégation de foi-
même, de l'obéiflance &
de l'humilité , il fai-
fiffoit toutes les occafions de mortifier fa chair
par la pratique des plus grandes auftérités ; il
fe rabaiffoit au deflbus de toutes les créatures
par les fentiments qu'il avoit de fa propre per-
fonne , & fe foumettoit à la volonté de fes Su-
périeurs avec tant de promptitude &
de joie,
qu'ils difoient tous n'avoir jamais vu un hom-
me auiQ mort à lui-même. Les Religieux du
Monaftere l'ayant élu Abbé , il prouva par fa
conduite la vérité de cette maxime , que pour
{avoir bien gouverner, il faut avoir appris à
bien obéir. Son zele pour la manutention de la
difeipline, n'avoit rien de dur ; il fut toujours
tempéré par la douceur &
la charité. Ses dif-
cours avoient tant d'onftion , qu'on ne pouvoit
réfîfter à leur efficacité ; les reproches même
perdoient leur amertume en paflant par fa bou-
che. Il prêcha la Foi à Stirling, dans le voiû-

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%o S. APentin, Sont;
nage de Forth, &
fur tout à Falkirk. De temp4

FÉVRIER 4.
en tem P s ^ interrompoit (es travaux apoftoli*
ques, pour fe retirer fur les montagnes de
fhinbârton , où il paflbit trente à quarante
jours dans l'exercice de la contemplation. Il
mourut en paix dans le lieu de fa retraite (<i ) ,
au feptieme fiecle , quoique quelques Auteurs
mettent fa mort plus tard. Ses Reliques étoient
autrefois à Rofneith , dans une Églife de foi*
nom. Il eft encore premier Patron de la Grande
Églife de Sterling , &
honoré d'une manière
particulière à Dunbarton &c à Falkirk.
Voyez Heftor Boëtius, Lefley , Kong, dans
fon Calendrier , le Bréviaire d'Aberdeen , la
Chronique de Scone , Bollandus , p. 497* &

SAINT A VENTIN,
Solitaire, »

au Diocefe de Troyes*

\L naquit à Bourges , de parents peu favori*


fés des biens de La réputation de
la fortune.
Saint Loup Troyes , il y fut re-
l'ayant attiré à
çu parmi ceux que ce faint Évêque formoit aux
vertus cléricales.Il ftit fait Économe de FÉglife

de Troyes , fous Camélien ou Camillan , fuc-


ceffeur de Saint Loup. L'amour extraordinaire

( a ) Près d' AIcluid ,


qui eft Dunhriiton \ c'eft aujourd'hui
une fortcrcfle bâtie fur la Dunbarton,
Uuid. On Fa
qu'a

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S, AVENTIN 3 Sôltt* 9i
qirll fe fentoit pour la folitûde , le porta enfui-
te à s'éloigner tout-à-fait du commerce des hom-
mes. Il le retira dans une Me déferte , où il fer- FÉVRIER
vit Dieu dans la prière &
le jeûne. 11 ne man-
geoit que du pain d'Orge avec des herbes des &
racines, &ne
buvoit que de Peau. Quelque-
fois il paflbit trois jours fans prendre aucun*
nourriture. Il portoit un rude ci lice , par &
deflus , une tunique d'une étoffe vile pauvre, &
D ne put fe difpenlcr de recevoir ces cniciples;
qu'il réunit en corps de Communauté fa). Sa
mort arriva vers Tan 540. Vincent , Evèque'de
Troyes , ayant fait bâtir une Églife fous fon
nom , fon culte y devint très-céiefcre. Ses Re-
liques font dans la Collégiale de Saint Etienne
de Troyes. Il y en a des parcelles dans différen-
tes autres Églifes.
Voyez Grégoire de Tours , de glor. Confiffl
c.G8 ; la Vie de Saint Loup, ad z$ Jttf*
Bulteau, &c.
' " . . ...
On honore en ce jour utt autre Saint Aventîn l
dont corps efl dans l'Églife Paroiffiale de Saint
le
Médard à Giâteau-Dun, Diocefe de Chartres.
Il avoit été facré Evêque de Chartres, aj;r.s

que Saint Souleine , ordonné malgré lui , eût


pris la fuite pour éviter l'Epifcopat. Ce der-
nier ayant été découvert &
ramené à fon Égli-
fe , Aventin tut fait Cor-Éveque , ou Infpec-
teur des Dunois avec pouvoir d'exercer les
,

fondions épifcopales dans toute l'étendue de

! 1 i,,

( « ) Ce Monaftere , connu I qu'un Prieuré dépendait de*


autrefois fous le nom d'Abbaye 1 Moîcfmc,
dt , n'efl plu? aujourd'hui
- .V- : \ a.
J

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8t 5. Joseph de Léonïssa.
^
fon Territoire. On trouve dans les foufcrip-
février 4 rions des Conciles du temps fon nom avec la
qualité d'Evêque , tantôt de Chartres , tantôt
'

de Château-Dun. On ignore s'il prit la place de


Saint Souleine après fa mort. Saint Aventin du
Dunois mourut quelque temps avant Saint
Aventin de Troyes.
Voyez Baillet , &c.

*
SAINT JOSEPH DE LÉONISSA.

C E Saint naquit €01556, dans la petite Vil*


le de Léoniffa , près d'Otricoli , qui eft de l'E-
tat Eccléfiaftique. A
l'âge de dix*huit ans , il
fît profeffion dans le Couvent que les Capucins
avoient dans, le lieu dé fa naiffance , chan- &
?'èa fon nom SEufrànius en celui de Jofeph. U
ut toujours un modèle accompli de douceur,
d'humilité , de patience, de chafteté , d'obéif- &
fance. La vivacité de la ferveur rendoit très-
fnéritoires toutes fes aûions , même celles qui
paroiffent les plus indifférentes aux yeux du
monde. Trois jours de lafemaine, il ne pre-
noit que du pain & de pour toute nour-
l'eau
riture ; il paffa auffi plufieurs Carêmes de la
forte. couchoit fur des planches , n'ayant
Il

qu'iui tronc d'arbre pour chevet. Sa joie n'étoit


jamais plus grande , que lorfqu'il avoir l'occa-
fion de fournir des injures des mépris. Il fe&
regardoit comme le dernier des pécheurs , &
avoit coutume de^dire à ce fujet : » Il eft vrai
» que , par la miféricorde de Dieu , je ne fuis
>>pas tombé dans des crimes énormes ; mais
» j'ai û mal répondu à la ;
grâce ^quç j'aurois mc :
• • «

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S. Josspb de
Liants* A. sj-
iuité d'être abandonne plus qu'aucune
autre .

» créature. Son zele à Crucifier U vieil homme .


avec tous fis itfirs , avoit préparé fon FEVWBR *
ame k re.
cevoir les faveurs extraordinaires tpxe
, le Saint
Eipnt communiqué aux Saints dans
l'exercice
de la pnere &
de la contemplation. Il avoit
«né dévotion finguliere à Jefus crucifié
fouffrarjces de notre diviii Sauveur
; les &
étoient le
fiijet le plus ordinaire de fes
méditations. Il
prêchoit ordinairement un Crucifix à la
main:
& fes paroles , qui étoient toutes
de feu , em-
brafoient de l'amour fecré les cœurs
de fon
auditoire.
En 1587 i tes Supérieurs l'envoyèrent
dans
la Turquie , pour travailler en qualité de
Mif-
lionnaire , à rinftruftion des Chréti ens de
Pera.
qui eft un Fauxbourg de Coriftantinople.
U fe
dévoua avec une charité vraiment héroïque au
fervice des Galériens, fur-tout pendaitt
les ra-
vages d'une pefte horrible. Ayant été lui-mê-
me attaqué de cette cruelle maladie , Dieu lui
rendit la fànté pourle bien d'une grande mul-
titude d'ames. convertit pliifieurs Apaftats^
Il
dont un étoit Bâcha. Les Mahometans
, furieux
du fuccès de fes prédications , le firent met-
tre en prifon par deux fois , & le condamnè-
rent a mort. Ils le pehdirent à un gibet
par urt
pied & par une main, & le laifferent long-
temps en cet état. A la fin pourtant on le déta-
cha ; & le Sultan commua en exil la Sentence
de mort. Le P. Jbfeph s'étanr embarqué pour
l'Italie, prit terra à Venife, & arriva à fort
Couvent après une abfence de deux ans. De
retour dans fa patrie , il recommença fes tra-
vaux apoftolîques ; &
le Ciel continua de les
bénir, comme il avoit déjà fait. Notre Saint
Fij

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I

84 S. Joseph de Lèonissâ.
fut affligé vers la fin de & vie d'un horrible'can-
,

cer qui lui caufa les plus vives douleurs. Il foqf-


frit deux fois les opérations des Chirurgiens r
fans pouffer le moindre foupir. Il tenoit pen-
dant tout ce temps là un Crucifix dans fes mains,;
& ne faifoit entendre que ces paroles: » Sainte
» Marie , priez pour nous miferables pécheurs.
Quelqu'un des affiftants ayant propofe de le lier
durant l'opération , il dit en montrant le Cru-
çifix ; » Voilà le plus fort de tous les liens ; il
» me tiendra immobile beaucoup mieux que
» toutes les cordes. Sa maladie étant fans remè-
de, il mourut le 4. Février 161 1. Son nom Ce
trouve en ce jour dans le Martyrologe Romain
, que Benoit XIV a publié. Il fut béatifié par
Clément XII , en 1737 , &
canonifé en 1746 3
par Benoit XIV.
Voyez les AB& S SanSomm , videlicet Fide-
lis a Sigmaringd , M, CamïlLi de Lellis , Pari
Regaiaà 3 Jofephi à Leonijfa y &
Catharinœ d*
Riccis y à Bencdicto XIV ,
1746 , imprimés
an*
à Rome en 1749- Voyez auffi la Bulle de la
Canoaifation de notre Saint , &
le BuUarium 9
T. iS , p. t2j.

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Sainte Jeanne de Valois. 8

SAINTE JEANNE DE VALOIS, ÎÉVRŒ**


Reine de France*
& Fondatrice des Annonciades..

Je a ni*e étoît fille de Louis XI, 6c naquit


en 1464. La difformité de fon corps la rendit
Pobjet de l'averfion de fon pere , qui cependant
ta maria en 1476 y à Louis , Duc d'Orléans
^
fon coufin-germaiû. 0e
Prince s'étant révol-
té , étoit fur le point d'êtrecondamné à mort
par Charles VIII ; mais Jeanne fit tant par fes
prières &c fes larmes , qu'elte obtint du Roi fon
frère , la grâce de ion mari. Quoique le Duc
d'Orléans fot redevabte de la vie à hvertueu-
fe époufe , il n'en continua pas moins de lui
faire reflentïr les effets de l'antipathie qu'il avoit
conçue pour elle. L'infortunée Ducheffe n'op-
pofoit que la douceur 8c la patience à tous les
mauvais traitements quelle avoit à effuyer , &
ne trotfVOlt de confolation que dans les exer-
cices de la piété. Le Duc cPÔrléans étant par-
venu à la Couronne de France, fous, le nom de
Louis XII , ne chercha plus que les moyens de
faire carter fon mariage avec Jeanne de Valois.
La principale raîfoa qu'il alléguoît , étoît que
ce mariage devoit être regardé comme mil , at-
tendu qu'il avoit été contraûé fans liberté y &
uniquement par les ordres de Louis XI. Mais
il agtiîbit par d'autres motifs. Il avoit envie d'é-

poufer Anne , héritière de Bretagne , &


veuve
du feu Roi. L'aflàire fut portée au Pape Alexan-
dre VI , auquel on demanda des CommifTaire*
F««*
uj

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8S Sainte Jeanne be Valois,
qui puffent la juger conformément aux Loi**?
ïfcVRiER l-2 Sentence prononcée par ces CommhTaires

fut déclaré nul.


Jeannç apprit tçtte nouvelle fcvecréfigna-;
tion ; elle témoigna même beaucoup de joie de

fe voir en liberté , &


en état de fervir Dieu,
d'une manière plus parfaite. Le Roi , charmé do
fa foumiffion , lui «tfligna pour fôn -entretien le
Duché de Berri , Pontoife avec Tes dépendan-
ces, &
plufieurs autres Places. Notre Sainte,
libre déformais de tout engagement , le retira à
Bourges , qù elle ne parut plus vçtuç que d'uui
habit fort pauvre , &
n'eut plus de coût que
pour les pratiques de la pénitence &ïes exer-
cices de piété. Ses revenus, qui étoient cohfi-
dérables 9 furent totalement confacrés aux bon-
nes ouvres que lui fuggéroit une charité tou-
jours aôive. Elle fonda en 1 500 , de l'avis de
(on Confefleur ( a , l'Ordre des Religieufes de.
^
f^mqnciadan de la Sainte Fiergi ( b
) -
,
lequel a
« 1 «

( « ) Lc P. Gilbert Nicolas !
d'Anitonciadcs , portent un
Çordclier plus connu fous Voile noir, un. .Manteau
le nom de Çàbricl-Marîa. C'é- blanc > un Scapulaire rouge; v
tait ainli qu'il fignoit lui-mê- un Habit brun , une Croix ,
me. Il mourut eii odeur de 0c une Corde qui leur iert de
, le 17 Août 1531 , ceinture. Là Supérieure s'ap-
dans le Couvent des Annon- pelle par humilité la Mere
çiades de tyodez » l'un des Ancdlt\ ce mot vient tiAncil-
plus anciens de l'Ordre fir la /Servante. L'imitation des
y tut enterré. Le P. Artus fiix principales vertus dont la
du Mou4ier f Rccqllet > s'eft Sainte Vierge a été un parfait
rtompe en lui donnant dans modèle dans les différents
fou. Martyrologe Francifcain myfteres que l'Églife honore
Je nom de Gabriel <U FAve* chaque année , fut la fin que
Maria* Sainte Jeanne fe propofa en
(b) Les Religieufes de cet inftituant le nouvel Ordre. Il
t connues fous wro a pris le nom du premier corn*

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Sainte Jeanne deValo is .
£7
été approuve par les Papes Alexandre VI , Jules =55=»
n , Léon , Paul X, V &
Grégoire XV. Elle y
FÉyRl£R
prit elle-même l'habit en 1 504; mais elle n'y fut
pas long-temps car elle mourut en odeur de
:

/ainteté le 4 Février de l'année fuivante. Les


Huguenots brûlèrent fes Reliques en 1 562 ( 1 ).
Le Pape Clément XII làcanonila en 1738 ; niais
elle érbît honorée à Bourges depuis fa mort.
Voyez le Bref de Benoit XIV fur l'ancienne-
té du culte rendu à Sainte Jeanne , T. 2. de Ca-
nonif. I. 2 , c. 24 >p. 2$ G , &t BuUar. T. iù\ p.
#04 ; Hvlot , Hifl. des Ord. Rel. T. y , p. 33^ ;
Henfchenius , p. 5yS ; Chaftelain , Not. fur U
Mort. Romain. Voyez auffi les différentes Vies
de /a même Saintç,données par André Frémiot
Archevêque de Bourges, par Hilarion de Cofte,
Minime ( dans fes Daines tiluftres ) , par le P. &
de Bony , Jéfuite. Il en parut encore une autre
en 1656, par l'ordre de Doni d'Attichi , Eve-
que d* Autun , qui avoit été Minime , & qui eft
Auteur des Annales de cet Ordre , ainli qi\ç
d'une Hiftoirc des Cardinaux françois.

me du plus grand des myrte du monde. Elles ne peuvent


tt joyeux de la Merede Dieu.
> parler a leurs proches que fix
Il y a d'autres Religieuses fpjs,Vannée encore faut-il
,

connues fous le nom à'An- que les hommes foient parents


Mortciodes cèlefie s % Annwvciat*, au premier degré * & les fem*
CotUJLnx. Elles furent fondées mes au moins au fécond.
«a 1 404 par une, îlluftre Veu- Voyei UVit de U vénérable
ve de Gènes nommée Marie- Mcrù
, MUrU-Vicloirc Fornaro ,
Victoire Fornaro. Elles ont par le P, Ambroife Spinola , Jc-
un Habit blanc Se un Manteau fuite ; êc VHiftoire des 'Ordres
bleu , pour repréfenter l'azur Religieux , par Hclyot , T. ^
du Firmament. .Elles vivent
dans là plus grande pauvreté ( 1 ) Voyet HenfaUnitts , j %
6c dans une entière réparation 1

* . .. « • • . • mi >

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,

88 Sainte Agathe , K M*

F. JOUR DZ JANVIER,
.... i ' r
•mit > •

SAINTE AGATHE
VIERGE ET MARTYRE. * * • I
*
I

Tiré de fis deux Panégyriques 9 écrits , turt


.

'dans le fcptieme Jiecttr, par Saint Aldelme <F An-


gleterre ; & rautre r dans neuvième fiecle ,par
le
Saint Méthodiu* , Patriarche de Confantinoplc z
(f de deux Hymnes composées en fon honneur*
On en trouve une parmi les Poêjies du Pape Dar
mafe. Vautre , qui ejl de Saint IJidore de Séville ,
a été publiée par Éôllàndus , p. J9 6. Les clés A
grecs de Sainte Agathe ont été corrompus. Ceux
que nous avons en latin font moins défectueux 9
ô* font ailleurs d'uni très-haute Tille-
mont en a donné tabrégé , T. 3. p. 409 , & fui—
. vantes. Voye^ Roui Pyrrho , dans fa Sicilia
fccra , fous Pakrmc , Catane , & Malthe.

r '
L'An 2 K 1 •
' I

> ft vkjer 5".


JLl E S Villes de Palerme & de Catane , en

Sicile , fe difputent l'honneur d'avoir donné


, au monde une Sainte aufïï célèbre ; mais cette
. difpute n'intéreffe gueres ceux qui , en imi-

tant Tes vertus , & en implorant faproteftion,


'travaillent à devenir, un jour fes concitoyens
dans le Ciel. Tout le monde s'accorde à dire

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Sainte Agath ,V. M. 89
iju'elle reçut couronne du martyre à Cata-
la
ne, en 151 , durant la perfécution de Dece , février -

s
ce Prince étant Conful pour la troifieme fois. *

Snoiq u'iffue d'une Maifon noble &


illuftre ,
e s étoit confacrée à Dieu dès fes tendres
années , Se avoit généreufement triomphé de
tous les aflauts qui furent livrés à fa çfcafteté.
Quintien, homme confulaire , inftruit de la
beauté &des immenfes richeflçs d'Agathe ,
fe flatta qu'il pourroit fatisfaire fon jmpu-
dicité &fon avarice , par le moyen des
Edits que l'Empereur avoit portés contre les
Chrétiens. Il ordonna donc qu'on fe faisît de
la perfbnne, &
qu'on la conduisît devant fon
Tribunal à Catane. La jeune Vierge fe voyant
livrée aux perfécuteurs , fit cette prière. » Jefus-
» Chriil , fouverain Seigneur de toutes cho-
» fes , vous voyez mon cœur ; vous favez
» miel eft mon déûr ; foyez le feul poflefTeur
* de tout ce que je fuis. Vous êtes mon Paf-
» teur , ô mon Dieu , & je fuis votre brebis :
» rendez-moi digne de vaincre le Démon. »
Elle ne ceffa le long du chemin , de deman-
der avec la plus vive inftance , le courage
dont elle avoit befoin pour confefler fa Foi.
Lorsqu'elle fut arrivée , Quintien la fit remet-
tre entre les mains d'une méchante femme ,
nommée Aphrodifie , qui vivoit , ainfi que fes
Elles , dans un libertinage public. Il eft aifé de
juger des épreuves que la vertu de notre Sainte
eut à foufFrir ; mille morts lui auroient paru
plus fupportables que la fituation terrrible où
elle fe trouvoit. Cependant elle ne perdoit
point courage ; elle le confioit en la bonté de
Dieu , qu'eue imploroit continuellement avec
des torrents de larmes. Sa prière fut exaucée; ;

>

Digitized by Google
ço Sainte Ag AT lté , V. M.
fa chafteté ne reçut aucune atteinte durant
le mois qu'elle pafla dans la maifon d'Aphro* '
FÉVRIER 5. aifie.
Quintien , informé de la conftance d'À'-
gathe, la fit amener devant lui. Toute la ré*
pohfe qu'il put tirer d'elle dànS le premier
interrogatoire , fut que la vraie noblefle &
la vraie liberté cormftoieht à fervir Jefus:-
ChrifL Le Juge , irrité de fa fermeté, ordonna
qu'on la reconduisît en prifbn , après qu'on
lui eût meurtri le vifage de fôufflets. Elle y
• entra avec joie , en recommandant à Dieti
le fuccès du combat qu'élle étoit fur le point
de foutenir pour fa gloire. On la ramena lé
lendemain devant le Juge , qui trouvant en
elle le même courage 9 la fit étendre fur le che^
valet , où elle fouflfht la plus horrible queftfoft.
Quintien , furieux de fe voir vaincu par la pa-
tience héroïque de la Sainte , commanda; qijoft
la tourmentât long-temps aux manimellés , &:
puis qu'on les lui coupât. Une cruauté àuffi
mouie lui attira ce juftç reproché de la part
d'Agathe : » Cruel Tyran , ne devrois-tu pas
» rougir de me taire cette injure , toi qvti
» as mcé les mammelles de ta mere ? Le Juge
la renvoya enfuite en prîfori , avec défenfe de
panfer fes plaies , &
de lui donner aucune
nourriture» Mais le Seigneur fe joue des pen-
fées des hommes ; il daigna lui - même être
fon Médecin. Saint Pierre lui étant apparu
dans une vifion la confola , guérit fes plaie* ^
& remplit le cachot d'une lumière éclatants.
Quatre jours après , Quintien l'envoya cher-
cher , &
fans être touché d'une giterifon fi
miraculeufe , il la fit rouler toute nue fur des
morceaux de pots rafles , mêlés avec dest:har-

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•Sainte Agathx, V. M.
bons ardents. Quând elfe eut fôuffért çiè^p^ 555
plice , il ordonna çpi'çlle

Agathe y étant arrivée , adrefla cette prière


fut Temifeenprifofl.
^
au Dieu des Martyrs , U
àPÊpoii* dies Vier-
ges n Seigneur , mon Dieu j Vous m'avez tôu-
:

» jours protégée dès le bercéau. Ceft Vous qui


» avez déraciné de mon cœur l'amour du -mon-
» de , &
qui m'avez donne la patiencé nécef-
» {aire pour fouffrir. Rçcevez maintenant -mon
h efprit. » 5a prière fut exaucée ; car elle ex-
pira en la fimflant. Son nom , quia été inféré
dans le Canon de la Méfie , fe trouve dans le
Calendrier de Carthage^ qui eft de Tan 530,
&: dans tous les Martyrologes des Grecs , &
des Latins, Vers Pan 500 , le Pape Symmaque
fit bâtir une Églife de fon nom , fur la voie

Aurélienne ( a , près de Rome. Saint Grégoire


J
le <3tand , enrichit de fes Reliques ( 1 )' une
Églife de Rome qu'il avoit purgée de Pim-
piété Arienne. Cette Églife fut rebâtie en 460,
par Ricimer , Général de l'Empire d'Occident.
En 726 , Grégoire II en fît élever une nouvelle
fousPinvocation de la même Stç. Clément VIII
la donna à la Congrégation de la Do&rine
Chrétienne. Saint Grégoire le Grand mit des
Reliques de Sainte Agathe dans l'Églife du
Monaftere de Saint Etienne (£). Mais la plus
grande partie de ce précieux tréfor refta à
Catane , jufques vers l'an 1040 , qifil fut
transféré à Çpnftantinople. On l'a depuis rap-
• - -

( m ) On n'en voit plus que /•.


f.
e. je.
quelques ruines. Front. Ca- (b) Situé dans rifle de Ci-
Und. p. 2f. prée ,
aujourd'hui' Carpi.
( I } Sanû. Grcg. M. DiaJ.i Voyez S. Greg. 1. 1 . Ep. 5 z,
92 Sainte àcatjie, V. M.
porté à Catane , comme nous l'apprenons?
fÉVJUER* de Maurice, Évêque de cette Ville, lequel
*'
a écrit lliiftoire de cette tranflation , arri-
vée de fon temps ( c ). Les éruptions du
Mont Etna, qui irçenaf oient Catane d'une rui-
ne prochaine, ont été plusieurs fois arrêtées
.par le voile de Sainte. Agathe , que l'on por-
tait en proceflion ( d ). Les Makois , qui ho-
norent la même Sainte comme leur Patrone »
furent redevables de leur falut à foa iflterce£
ilon , lorfque les Turcs les attaquèrent ea

Sainte Agathe fanâifia fes fouffi-ances , &


rendit fon lacrifice complet , par une parfaite
Îiureté d'intention qui avoit détruit en elle
'amour des créatures , pour y ftfbftituer celui
du Créateur. C'cfl par le moyen de cette
vertu que nous ferons de toutes nos croix, &
même de toutes nos aôions , autant de facri-
fices agréables au Seigneur. Je dis nos croix ,
parce qu'il n'y a point d'État qui n'ait les
îiennes. Eft-il un homme çn effet qui n'ait
fouvent à fouffrir dans fon ame ou dans fon
corps , qui ne foit expofé à des contretemps
fâcheux , à des reproches , à des humiliations ?
Si nous n'aimons à fouffrir que quand nous
avons des témoins de notre patience; ou fi
après avoir foutenu couragcufement de rudes
épreuves , nous nous laiflbns déconcçrter par
la plus légère contradiâion , c'eft une preuve

[c) Cette Hifloire a été' du tombeau de Sainte Agathe.


publiécp*r Bollandus Se par Voyez Eollandus & Rocct
Kocci PyrrKo, Pyrrho.
k. (<0 Oa avoit tire ce voile

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Sainte Agathe > V.M. #
évidente que nous ne fommes point encore
morts à nous-mêmes , &que nous ne pofle- j^ym^ '

dons point encore la véritable pureté d'inten*


tion , dont le propre eft d'anéantir en nous
tour ce qui n'eft pas de Dieu. Au lieu de chercher
à difparoître entièrement aux yeux des hom-
mes , nous mettons notre complaifance dans
ce qu'ils eftiment grand. Rien de plus beau en
apparence que les proteftations de fidélité que
nous faîfons à Jefus-Chrift. A nous entendre ,
nous ferions prêts , s'il le falloit , à mourir pour
lui. Mais que penfer de toutes ces protefta-
tions 9 quand nous les comparons avec cette
exceffive feniibilité qui fe révolte à la vue de
la phis petite épreuve î Trouve-t-on beaucoup
dames qui dans leurs peines ne veuillent avoir
que Dieu pour témoin & pour confolateur ;
qui fayent avec foin les & les diftinc-
dignités
7

lions pour vivre totalement inconnues au mon-


de ; qui fupportent patiemment les humilia-
tions , dans vue de plaire à Dieu ? Ce
la feule
n'eft qu'à de telles ames qu'il appartient de s'é-
crier avec Sainte Agathe : » Soyez , ô mon
» Dieu , le feul poffeffeur de tout ce que je
» fuis J »

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,,

$4 Lus MAÂtrRS du Jâpos^

ÉÉVWER
»- LES SAINTS MARTYRS
• » m
DU J A O N.

Voyt^ te Triomphe des Martyrs dû Japon


par te P. Trigault , depuis $ iGizjufqiïcn 1&20 j
fHiftoire du Japon, par le P. CraJJit i jufqu à
%

tan i€58 ; &


celle du fàvant P. Charlevoix
( 9. Voliunes ). V<*ye\ aujp la Vie dti P. Spi-
nola, &c.
«

'Empiré du japon, aîné âppfellé d'une des


Ifles qui en fait découvert par des
partie , fut
Marchands Portugais , vers Pan 1 5 4 1 . On le di-
vine ordinairement en plufieurs petits Royau-
mes , qui font aujourd'hui réunis fous la do*
minatioii d'un feul Empereur. Méaco & Jedo
en font Les Japonois ont
les principales Villes.
des mœursqui différent des nôtres en divers
points. Ils iont naturellement orgueilleux &
paflionnés pour les honneurs. Us adorent , fous
les figures les plus grotefques , quelques-uns de
leurs ancêtres , parmi lefqtiels Xacha &c Amida
tiennent le premier rang; Tous leurs Prêtres
nommés Bonzes , font fubôf donnés à un Grand-
Prêtre qu'ils appellent Jaco. L'Empire du Japon
étoit plongé dans les ténèbres du Paganifme
lorfque Saint François Xavier y arriva en 1 549.
Cet homme Apoftolique , que Dieuavoit fufci-
té dans fa miféricorde , y prêcha l'Évangile
avec tant de fuccès , qu'on vit des Provinces
entières fe convertir. Le fruit de fes prédica-
tions fut auffi durable ,
qu'il avoit été mer-
veilleux , puifqu'en 1 j 8 z a les Rois d'Ariina , de

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Les Martyrs du Japox. 97
& d'Omura, envoyèrent une ambafla- =====
Bungo ,
de folennelle au Pape Grégoire XIII. Sept ans FÉVRIER
après on comptoit dans le Japon deux cent
mille Chrétiens , parmi lefquels il y avoit des
Bonzes , des Princes , &
des Rois. Malheu*
reufement lesprogrès du Chriftianifme , qui
s*étendoient de jour en jour , furent arrêtés en
1588. Voici quelle en fut l'occafion.
L'Empereur Cambacundono , qui par un
orgueil facrilege , fe fàifoit Rendre les hon«
neurs divins , ordonna à tous les Millionnaires
Jéfuites de fortir de fes États dans l'efpace de
£x mois. Plufieurs d'entr'eux ne laiflerent pas 9
malgré cet ordre , de refter dans le Japon ;
mais ils fe déguiferent , afin de pouvoir exer-
cer plus librement leur minUtere. La persécu-
tion s'étant rallumée en 1591 , un grand nom-
bre de Japonois convertis reçurent la couron-
ne du martyre. L'Empereur Tagcofama , Pria*
ce aufli corrompu , qu'orgueilleux , ayant
ajouté foi aux calomnies de quelques Mar-
chands Européens , entra dans un excès de
fureur qui eut les fuites les plus terribles. Ces
Marchands , qui vouloient avoir le privilège
exclufif de faire le commerce au Japon , per-
fuaderent à l'Empereur que les Millionnaires
qui prêchoient dans fon Empire , n'avoient
d'autre deflein que celui d'en faciliter la con-
quête aux Efpagnols & aux Portugais. Il n'en
fallut pas davantage pour animer ce Prince
contre des hommes qu'on lui avoit dépeints
fous les plus noires couleurs. Il en fit crucifier
neuf en 1^97* fur une montagne voifine de
Nangafaqui. Six étoient Francifcains , &
a voient à leur tête le P. Pierre Baptifte, Corn-
miflaire de fon Ordrç , &C natif d'Avila , en

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$6 Les MAUrrus t>u Japox:
*
Efpagne. Les trois autres étoient Jéfuites. L'uri
FÉVRIER j.* d'entr'eux , nommé Paul-Michi , & né d'une
femille diftinguée du Japon , avoit de rares
talents pour la prédication, quoiqu'il n'eût
encore que trente-trois ans. Plufieurs Japonnois
convertis fouffrirent aufli avec eux* Il y en eut
en tout vingt-fix de martyrifés. Il fe trouva
parmi eux trois enfants qtii avoient coutume
de réjpondre la Mcffe aux Prêtres. Les deux
plus âgés avoient quinze ans , & le troifieme
n'en avoit que douze. Mais leur grande jeu-
neffe ne les empêcha pas d'endurer les tour-
ments avec courage , & même avec joie.
Vingt-quatre de ces généreux Athlètes furent
menés à Méaco pour y avoir le nez & les deux
oreilles coupées. Mais on adoucit la rigueur
de leur Sentence , & Ton fe contenta de leur
couper une partie de l'oreille gauche. On les
conduifit eniuite de Ville en Ville , ayant les
joues toutes couvertes de fang , afin d'intimi-
der les autres Chrétiens. Quand ils furent arri-
vés au lieu du fupplice, on leur permit de fe
confefler à deux Jefuites de Nangafaqui : après
quoi , on les attacha à des croix , en leur liant
les bras & les jambes avec des cordes &des
chaînes. On leur mit aufli un collier de fer au
cou. Lorsqu'ils eurent été bien liés , on les éle-
va en l'air, & on planta les croix environ à
quatre pieds l'une de l'autre. Chaque Martyr
avoit un Bourreau pour lui percer le côté
avec une lance ; car c'eft ainfi que» l'on cruci-
fie au Japon. Dèsqu'on eut achevé de plan-
ter les croix , les Bourreaux reçurent le fignal
& donnèrent en même temps le coup mortel
aux Soldats de Jeius-Chrift. Les Chrétiens re-
cueillirent leur fang & leurs vêtements -*

dont

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Xes MartTrs du Japon. 97
iiont le feul attouchement opéra des miracles.
Urbain VIII mit ces Martyrs au nombre des
^vrier
Saints , & rÉglife honore en ce jour , qui
les
fat celui de leur triomphe. On fit embarquer
tous les autres Miflionnaires , afin qu'ils ne
prèchaffent plus la Religion Chrétienne dans
le Japon. Il v eut pourtant vingt -huit Prê-

tres qui y rérferent , mais après s'être déguifés.


Cependant l'Empereur Tagcoiama mourut.
Mais il défendit avant de mourir que l'on brû-
lât fon corps , comme cela fe pratiquoit au
ïapon , &
ordonna qu'on l'enchâfsât au Palais
de Fuximi , afin qu'il y fut adoré fous le titre
de Nouveau Dieu de la Guerre. On bâtit donc un
Temple magnifique où fon corps fut dépofé
pour recevoir les hommages du peuple. Les Jé-
fuites ne furent pas plutôt inftruits de la mort
de Tagcofama > qu'ils reparurent dans le Japon.
Ils convertirent quarante mille ames en 1 599/
y
& plus de trente mille l'année fuivante , quoi-
qu'ils ne fuflent pas plus de cent. Us firent éle-
ver en même temps cinquante Églifes , où s'af-
fembloient les Fidèles , tandis que les Idolâtres
alloient rendre les honneurs divins à un Prince
dont la vie avoit été fouillée par les plus grands
crimes. Mais la paix qui avoit merveilleulement
facuité les progrès de l'Évangile , fut troublée
en 1601 par Cubofama. Ce Prince renouvella
les Édits qui avoient été précédemment portés
contre les Chrétiens. Plufielirs Japonois con-
vertis eurent la tête tranchée d'autres furent
:

crucifiés ou brûlés. La perfécution devint en-


core plus fanglante en 16 14. On employa les
plus horribles tortures pour forcer les Dilciples
de Jefus-Chrift à renoncer à leur Foi. On leur
éçrafoit 4es pieds entre deux pièces de bois que
G

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98 Les Martyrs du Japon:
l'on fcrroit Tune contre l'autre : on appliquoit
fur leurs corps des lames de fer toutes rouges r
*
on leur coupoit les membres les uns après les
autres : on leur écorchoit les doigts , & on
leur mettoit des charbons allumés fur les mains :
on leur arrachoit des morceaux de chair avec
des tenailles , &
on leur enfonçoit des rofeaux
pointus dans les différentes parties de leurs
corps. Tous ces tourments compliqués ne pro-
duifirent point l'effet que en atten-
les Idolâtres
doient. Il y eut une multitude innombrable de
Chrétiens , & même plufieurs enfants
, qui con-
feflerent J. mort. Xogun ayant fuc-
C. jufqu'à la
cédé en 1 6 1 6 , à Cubofama , fon pere , le furpaf-
la encore en cruauté. Il n'y eut point de genre
de barbarie qu'il n'exerçât contre les Chré-
tiens , &
fur-tout contre les Millionnaires.
Le plus illuftre de ces derniers étoit le P.
Charles Spinola , noble Génois > qui s'étoit
fait Jéfuite à Noie , dans le temps que le Car-
dinal Spinola , fon oncle , étoit Evêque de
cette Ville. Le défir qu'il avoit de vener fon
fang pour la Foi , le porta à demander d'être
aflbcié aux travaux des Millionnaires du Japon ;
ce qui lui fut accordé. Il partit donc , ar- &
riva en 1601. U travailla au falut des. ames
avec une ardeur infatigable , convertit un &
grand nombre dTnfideles , fur-tout par fa dou-
ceur. Les fatigues qu'il avoit à effuyer ne
L'empêchoient pas de mener une vie très-*,
auftere. U ne prenoit pour toute nourriture, 9
qu'un peu de ris &
d'herbes. Les Japonois
l'enfermèrent dans une prifon , où il eut beau-,
coup à fouffrir de l'inhumanité de fes Gardes ,
qui lui refufoient jufqu'à un verre d'e^u pour
^tancherfefoif^gçcaûonnée par une fie vr^.

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Les Martyrs du /apox. 99
brûlante. Mais Dieu , qui n'abandonne jamais
les fiens , adouciflbit les maux de fon fervi-
vrier
teur par Fonôion de fa grâce , lui fkifoit&
trouver des confolations ineffables au milieu
des fers. Voici cdmment il s'explique à ce fu-
jet, dans Une lettre qu'il écrivit de fa prifon.

» Qu'il m'eft doux de foufFrir pour Jefus-


» Chrift ! Je ne peux trouver de paroles affez
» énergiques pour rendre tout ce que je fens %
» fur-tout depuis que nous fommes dans ces
* cachots , où nous vivons dans un jeûné con-
» tinuel. Les forces de mon corps m'abandon-
» nent ; mais ma joie augmente à mefure que
» je vois approcher la mort. Quel bonheur pour
» moi , s'il m'étoit permis à Pâques prochain
» de chanter dans le Ciel avec les Bienheureux
» le Cantique d'allégrefle ! Si vous aviez goû-
» té , dit-il dans \ine lettre à Maximilien Spi-
» nola , fon coufin , les ineffables délices que
» Dieu verfe dans les ames de fes ferviteurs t
» vous n'auriez plus que du mépris pour toutes
» les chofes de ce monde. Je commence à être
» Difciple de Jefus-Chrift , depuis que je fouf-
» fre en prifon pour fon amour. Je me fuis
» trouvé amplement dédommagé des rigueurs
» de la faim par la douceur des confolations
» dont mon cœur a été comme inondé. Et
» quand je ferois plufieurs années en prifon
» ce temps me paroîtroit court , tant je défire
h fouffrir pour celui qui me récompenfe fi li-
» béralement de mes peines. Entr'autres ma-
» ladies , j'ai eu une fièvre qui a duré cent
» jours , fans qu'il me fut pôflible d'avoir au-^
y> cun remède convenable a mà fituation. Du-
» rant tout ce temps-là j'ai reflenti une joie
n dont je tâcherais inutilement de vous douf
Gij

)igitized by Google
,

iao Les Martyrs du Japon.


- » ner une idée. Je ne me pofledois plus , &
FÉVRIER
w meCTO y°* s déjà dans Paradis. ^
Le P. Spinola ayant été condamné à être
brûlé ^ il en apprit la nouvelle avec les fenti-
ments de la joie la plus vive. Dès ce moment
il ne cefla plus de remercier Dieu d'une fi
grande grâce, dont il fejugeoit indigne. le On
conduint d'Omura où il étoit en prifon , à
Nangafaqui. Il fut exécuté fur une montagne
yoifine de cette Ville , avec guarante-neuf
autres Chrétiens , dont neuf étoient Jéfuites ,
quatre Francifcains , &
fix Dominicains. Tous
les autres étoient laïques. On en brîila vingt-
çinq , &
Ton décapita le refte. Ceux que Ton
brûla furent liés , chacun à un poteau ; après
quoi on mit le feu à. un des bouts du bûcher
qui étoit éloigné d'eux de vingt-cinq pieds ;
en forte que les flammes , qui ne s'appro-
çhoient que par degrés , ne les confirmèrent
que deux heures après. Le P. Spinola demeu-
ra immobile , &
eut toujours les yeux levés
vers le Ciel , jufqu à ce que les cordes qui le
lioient brûlées. Il tomba alors
euflent été
$ans le feu, où
expira le 1. Septemb. 1622.
il

Il étoit âgé de cinquante-huit ans. Il y eut en-

core plufieurs autres Chrétiens , dont la plû-part


étoient Jéfuites ,
qui terminèrent glorieufement
leurs vies par divers genres de lupplices. Les
uns furent brûlés à petit feu , & les autres ,
crucifiés ; ceux-ci furent décapités ; & ceux-là
jettés dans les gouffres d'un Volcan ; d'autres
forent fufpendus par les pieds dans des citer-
nes , oîi ils ne moururent qu'au bout de trois
Ou quatre jours.
L Empereur du Japon défendit en 1639 ,
Rentrée de fes États aux Portugais &
aux au-

Digitized by Google
Les Martyrs du Japon. îoi
trèsEuropéens , même fous prétexte de Com-
merce. Il n'y eut que les Hollandois qui nep£ypj£j> r-
furent point compris dans cette défenfe. On
trancha même la tête aux Ambafladeurs en T
royés par les Portugais. Cinq Jéfuites , que
le zele du falut des ames dévoroit , ne laiffe-
rent pas de débarquer en 1642 , dans un Port
du Japon. La précaution qu'ils avoient prife
de fe déguifer , ne leur réuffit pas long-temps.
On les découvrit , &
on les condamna à une
mort cruelle. Ce fut ainfi que le Japon rem-
plit le Ciel d'un grand nombre de Martyrs. II

n'y a encore que les ving-fix premiers qui


foienr honorés aun culte public. Benoit XIV
a inféré leur nom dans l'Édition du Marty-*
rologe Romain qu'il donna en 1745t.

Notice fur les Martyrs de la Chine *

Ceft ici le lieu de <Krc quelque chofe des Martyrs de 1*


Chine. Commençons par donner une idée de ce vafte Empi-
re. Sa fondation eft de la plus haute antiquité , comme nou4
Tapprenons de PHiftoire qu'en a donnée le P. du Halde d'après
les Annales Chinoises. M. Shuckford , 1. i. 2. 6 , penfe que
Fo-hi , premier Roi des Chinois , étoit Noé lui-même f 6c
^u'il s'établit dans la Chine peu de temps après le déluge,
M. Swinton rejette avec raifon cette conjecture dans le 1 1.
Tome de THiftoire Univerfelle. Il ne fait pas plus de grâce à
la première Dynaftie des Chinois ; mais en ce dernier point
tous les Auteurs ne font pas de fon avis. Cette Dynaftïé-
eft défendue dans la Chronologie de Jackfon , &
dans plu-
£eurs autres Ouvrages. Effectivement fon exiftence eft atref-
tée par les Annales Chinoifes » &
Ton peut d'ailleurs conci-
1 er fon antiquité avec la Chronologie des Septante fie du
Texte Samaritain , que quelques fevans du premier ordre
font arTcz portés à embraffer. On a voulu prouver depuis
f>eu que les Chinois ctoient une Colonie Égyptienne. L'Au*
de ce fyftêmc a beaucoup d'cfprit mais il n'a donné
-,

G nj

Digitized by Google
-,

loi Les Martyrs de la Chine.


im—-mm* core que des conjectures , tirées de la reflêmblance des Lan-
T 1
gués & des coutumes. Il travaille actuellement à un Ouvra
ge ou il donncra * foa °P ilwoa le te&é de certitude qu'on
FÉVRIER
•* VIUt >• peut défircr en pareille matière. U compte même citer des
faits qui feront a l'abri de la plus févere critique. Ce fera aux
favants à prononcer.
Fo-hi , Fondateur de l'Empire de la Chine , pouvait être
$em lui-même , ou du moins quelqu'un des descendants de
ffoé , qui vivoit peu de temps après le déluge. Confuçius ,
que les Chinois révèrent comme leur grand Philofophe %
ilrefla le plan de leurs loix &
de leur Religion. On croit
qu'il floriffoit vers le règne de Salomon > ou du moins peu
de temps après. Ce fameux Légiflatcur , ifiu du Sang
Royal , avoir une morale très -pure. On trouve dans fes
Écrits plufieurs vérités précieufes qu'on chercheroit en-
vain dans les Philofophes de la Grèce ; \\ dit , par exem-
ple , que les hommes font obliges d'obéir au Seigneur du Ciel ,
de l'honorer , de le craindre, d'aimer leur prochain comme
eux-mêmes , de dompter leurs mauvais penchants & de fe ,

conduire toujours par les lumières de la raifon que Dieu eft -,

le principe &
la fin de tous les Êtres cju'il a produits & qu'il
conferve » qu'il eft éternel , infini , immuable , invifible ,
fouverainement faint fit intelligent. Il parle plufieurs rois du
tyeflîc futur , qu'il appelle Itfmt hwmf, hf*vtt pfrfomafc
qui Von attend fur la terre, C'eft une Tradition à la Chine , que
Confuçius avoit coutume de dire , que ce faim paraîtrai: dans
TOceiftnt. Il s'explique avec autant de clarté fur les efprits
céleftes , qu'il représente comme les Miniftres de Dieu ; mais
il preferit en même temps Jcs cérémonies religieufes par les-
quelles on devoit les honorer , conformément à l'Idolâtrie
qui régnoit de fon temps. On
ne doit pas au refte s'étonner
de la iupériorité de Confuçius fur les autres Philofophes. U
a mieux penfé qu'eux , parce qu*i| étoit plus voifin du temps
cù vi voient les Patriarches , &
par conséquent plus à por-
tée de puifer dans la Tradition primordiale.
La mort empêcha Saint François Xavier d'accomplir le dé-
sir qu'il avoit de prêcher la Foi à la Chine ce ne fut que
-, &
long-temps après que les Millionnaires trouvèrent le moyen
n'entrer dans cet Empire, Ils fe mêlèrent avec les Marchands
Portugais » établis à Macao, Me voifine de la Chine , lefquels
avoient obtenu la perraifiîon d'aller deux fois par an aux
foires de Canton. De ce nombre fut le P. Matthieu Ricci
Jcfiùte Romain t très-bon Mathématicien, Après plufieur%
voyages à Canton , il obtint enfin du Gouverneur la pernuf»
don de en 1583 avec deux autres Jéfuites. Il pu-
s'y fixer
une Mappe-ÎVIoode , où il avoit placé le premier
blia auffi-tot
méridien dans la Chine , pour fe conformer au fentiment des
Aitronomes Chinois, Ces petits Ouvrages lui firent des. amis

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Les Martyrs de la Chine. 103
k des admirateurs. Deux ans après, il fit un fécond éta- 1

blitfcment pour les Jéfuites à Nanquin , où le nombre de


fes admirateurs s'accrut confidérablement par la manière FÉVRIER $•
dont il expliqua, la figure de la Terre , la caufe des Édipfes
bec. Il bâtit un Obfervatoire dans le même lieu , s'infinua
- dans la confiance de quelques Chinois , & vint à bout de les
convertir. En 1600 il Te rendit à Pékin. Ayant été conduit
devant l'Empereur , il lui offrit une Horloge , une Montre t
& quelques autres chofes curieufes. Le Prince , enchanté de
ces préfents , permit au P. Ricci de réfider dans la Capitale*
Ce zélé Millionnaire fe fervit de la protection que l'Empe-
reur lui accardoit , pour répandre la lumière de l'Évangile»
Eiie ouvrit les yeux à un grand nombre de Chinois , même
à plu heurs Officiers de la Cour * qui tous embrasèrent lè
Crunftianifme. Parmi ces Officiers étoit Paul Siu f qui fut en-
fui te premier Miniftre. Il favoriia tellement la Religion chré-
tienne, qu'a Xankai fa patrie, ( dans la Province de Nanquin )
il y avoir quarante mille perfonnes qui la profefloient au.

commencement de la dernière perfécution. Le P. François


Maronez, Jéfuite Chinois * ayant converti un fameux Doc-
teur , rut battu cruellement à diverfes rcprlfes , & expira
enfin au milieu des tourments.. Quant au P. Ricci il mou-
,

rut en 1617 , après avoir joui conftarament des bonnes grâ-


ces de l'Empereur Vanlie..
Le P. Adam Schall , Jéfuite de Cologne , fis fit connoître
& eftimer de l'Empereur Zonchi. Mais ce Prince fe donna
loi-même la mort en 1636 v de peur de tomber entre les
mains de deux rebelles qui s'étoient emparés de Pékin. Les
Chinois appellerent à leur fecours Xunte , Roi des Tartarcs
qui , après avoir défait les Ulurpateurs v 8c repris Pékin , de-
manda l'Empire pour prix de fa victoire ; 8t fon fils Chunchi
en fut paifible poffefleur en 1650. Depuis ce temps-là, la
Chine a été gouvernée par des Princes Tartares , qui y ont
introduit leurs Loix Se leur Religion. Ils vifitent fouvenc
le pays dont ils font originaires ; mais ils le traitent comme
un pays conquis. Chunchi eut la plus grande eflime pour lo
P. Schall ; il l'appelloit fon pere » & fàvorifoit les Chrétiens,
en fà coniidération. Apres la mort de ce Prince , les quatre
Régents qui gouvernèrent l'Empire durant la Minorité de
fon SuccefTeur , condamnèrent à mort cinq Mandarins , fur
le refus qu'ils firent d'abjurer le Chriftianifmc. Le P. Schall
Ait aufli condamné à perdre la vie mais il mourut pendant
*,

le délai qu'on lui avoit accordé. Le jeune Camhi n'eut pas


plutôt pris les rênes de l'Empire , qu'il arrêta la perfécution v
ii chargea même le P. Vcrbieft , Jéfuite , de publier tous les

ans le Calendrier Chinois , &


le déclara Président des Mathé-
matiques dans fon Palais ce qui emportoit le titre de Man-
*,

darin, Des difpofitions auifi favorables de la part de l'Em-

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104 Les Martyrs de la
produifirent de nombreufes conversons: en forte*
pereur,
que Camhi ayant permis en 1671 , que Ton ouvrît les Églifes
pÊVWERj. des Chrétiens, il y eut plus de vingt mille perfonnes dû
baptifées. L'année fuivante , un oncle de l'Empereur , qui
étoir un des huit Généraux perpétuels des Troupes Tarta—
ces reçut aufli le Sacrement de la régénération avec plu-
,

sieurs autres perfonnes de la première diftinâion. Les Suc—


cefleurs de Camhi ne furent pas moins favorables aux
Chrétiens. On permit même à ce» derniers de faire bâtir
dans l'enceinte du Palais , une magnifique Égiife cet édifi- -,

ce , qui furpaïïbit en beauté tous les édifices de l'Empire 9


fut achevé en 1701.
Les Dominicains , félon le P. Touron ( Hom. illufi. T. $. y.
^toient aufli entrés dans la Chine en 15 56. Us y prêchèrent
l'Evangile avec fruit , & jetterenten 1631, les fondements
de la grande Egiife de Fokieu , après avoir converti une
grande partie des habitants de cette Province. Quatre Prêtres
de cet Ordre furent martyrifés en 1647. Un cinquième fut
décapité le 1 5 Janvier de l'année fuivante c'étoit le P. Fran-
-,

çois de Capillas , du Couvent de Valladolid , qui avoit été


l'Apôtre de la Ville de Fogan. Son fupplice avoit été précé-
dé de tortures cruelles ; fa Sentence portoit qu'il feroit dé-
capité pour avoir méprifé les Dieux du pays. La Relation
du rnanyre de ces zélés Millionnaires fut envoyée à la
Congrégation de la Propagande , fous le Pontificat d'Urbain
yiii.
Cependant la Religion chrétienne faifoit tous les jours de
nouveaux profélytes. On compta bientôt plus de cent mille
perfonnes qui avoient cru en Jefus-Chrift , & Ton vit plus
de deux cens Eglifes à la Chine. Mais il s'éleva maiheu-
reufement une difpute qui divifa les Ouvriers Evangéliques.
U s'agifToit de favoir s'il y avoit de la fuperflition & de
l'Idolâtrie dans les honneurs que les Chinois rendoient à
Çonfuçius &
à leurs Ancêtres ; honneurs accompagnés de
Certaines oblations faites , ou folennellement par les Manda-
rins & les D odeurs , aux Equinoxcs , à la nouvelle & à U
pleine Lune ou en particulier dans les maifons & les Tem-
,

ples. Clément XI , au Tribunal duquel l'affaire fut portée ,


condamna en 1704 les Rits Chinois comme fuperftiticux ,
,

& chargea Patriarche d'Antioche , depuis le Cardinal de


le
Tournon , d'aller faire exécuter fon Décret à la Chine.
Çcnoit XIV confirma ce Décret par fa Bulle Ex quo fingulan ,
donnée en 1741. Il y ordonne d'exprimer en Chinois le
nom de Dieu par Thicn Chu , qui veut dire Seigneur du Ciel ,
& défend l'ufage des mots Thien % le Ciel , Xang Ti , le fu- &
preme Modérateur , lefquels fignirlent le Dieu fuprème des
Idolâtres , qui eft une forte de cinquième eflence , ou de
wture iûtelligcnte ,
répandue dan* le Ciel mvéùej, 11 prof.

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I

Les Martyrs de la Chine, iof


encore l'infcrrption King
crit Tien,
que nous rendrions par ces ^SSSSOsSf
mots : Adores le Ciel. Après la promulgation de ce Décret ,
ceux qui avoient pris la défenfe des Ri» 'Chinois , en foute- FÉVRIER $<
niât qu'ils n'étoienr autre chofe que des honneurs civils &
politiques , fe fournirent avec docilité au jugement du faint
Siège ôc depuis ce temps-là , il ne leur eft rien échappe qui'
-,

ait pu faire foupçonner la fincérité de leur foumiifion.


Les Chrétiens continuèrent d'être ouvertement favorifés
fous le règne de Kang-hi. Mais Yong-tching Ton fucceffeur
,

bannit les Millionnaires des principales Villes il laiûa ce-


*,

pendant dans fon Palais, avec le titre de Mandarins, ceux


qui (avoient la Peinture , les Mathématiques , &
les autres
Arts libéraux. L'Empereur fuivant , nommé Kien-long , ex-
cita la plus violente perfécution , &
traita les Chrétiens
avec la dernière cruauté , à l'inftigation du Vice-Roi de
Fokieu. Il y eut un nombre prodigieux de Fidèles , de tout
âge , de tout iexe , de toute condition , qui fouffrirent di-
vers genres de fupplices. Us aimèrent mieux endurer les
plus horribles tourments , que de découvrir la retraite des
Mif&onnaires , que de livrer les Croix, les Reliques, les
Livres Saints , que de faire en un mot quelque chofe qui fût
contraire à la Loi de Dieu. Plufîeurs moururent de leurs
tourments , ou des rigueurs qu'ils éprouvèrent dans la prifon.
lia Evèque & ûx Prêtres reçurent la couronne du martyre.
Le P. Sanz , Dominicain Efpagnol , étant arrivé à la
Chine en 1715 » y travailla avéc tant de zele pendant 1%
ans , que la Congrégation de la Propagande le nomma
Evèque de Mauricaftre. 11 fut facré par l' Evèque de Nanquin*
afîirte des Evèques de Pékin & de Macao , puis élu Vicaire
Apoftohque pour la Province de Fokieu. L'Empereur ayant
banni les Mifâotinaires en 1731 » le P- Sanz fe retira à Ma-,
cao; mais il revint dans la Province de Fokieu en 1738 ,
y fonda plufieurs Eglifes , & y reçut les vœux d'un grand
nombre de Vierges qui fe confacrerent à Dieu. Le Viceroi ,
outré des heureux effets que produifoit fon it\c , le fit arrêter
avec quatre autres Dominicains. Ils furent frappés avec une
cruauté inouïe , & condamnés à perdre la tète. L'Évêque fut
exécute le jour même , qui étoit le 16 Mai 1747. Les Chi-
nois , qui ont coutume de s'enfuir lorfqu'on donne le co ; t>
martel a quelqu'un , dans la folle pcrfuafion où its font que
l ame d'une perfonne exécutée fe faint du premier qu'elle

rencontre , ne prirent point la fuite cette fois. Ils refterent


auprès du Bienheureux Ma tyr , ne pouvant fe laffer de
voir la tranquillité avec laquelle il mouroit. C'étoit même 4
à qui feroit le plus près de lui , pour toucher fon fang ;
ce qu'ils fiifbicnt aufll rcfpeâueufement que les Chrétiens
Fauroient pu faire. Benoit XIV fît un Difcours aux Car-
dinaux fur la mort préueufe de ce faint Évèque , le IC Sep-

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io6 Les Martyrs de la Chine.
tSSSSSSSS tembre 1748. ( Voyes le P. Touron , T. 6 , p. 729 ).
Les quatre autres Dominicains furent étrangles le 28
FÉVRIER f.
Oâobre 1748 1 dans la prifon , où Us avoient eu beaucoup-
à fouffrir. Voici leurs noms François Serran
: qui a voit
,

travaillé 19 ans aux Millions de la Chine , & qui durant


ion emprifonncment avoit été nommé Evêque de Tipaf»
par Benoit XTV. Il étoit âgé de % 2 ans : Joachim Roio , âgé
de 56 ans, dont il en avoit paffé 53 à la Chine : Jean
Alcober , âgé de 42 ans , fit Millionnaire depuis dix-huit z
François Diaz , âgé de 3 3 ans , dont neuf avoient été con-
iàcrés aux fondions Apoftoliques. Ces généreux Soldats de
Jefus-Chrift ayant appris en prifon qu'on leur laiûeroit la
vie » en furent pénétrés de douleur , ce qui frappa les Infi-
dèles d'admiration » comme nous l'apprenons du difcours que
Benoit XIV fit aux Cardinaux fur leur mort en 1752. Le P«
Jofeph d'Attemis , Jéfuite Italien, fit le P. Antoine-Jofepk
Uenriquea , Jéfuite Portugais , furent auut arrêtés, dans le
mois de Décembre de l'an 1747. On eut beau les tourmen-
ter à diverfes réprifes , jamais ils ne voulurent renoncer â>
leur Foi. Les Mandarins , furieux de leur confiance , les,
condamnèrent à mort. La Sentence ayant été confirmée
par l'Empereur , les deux Religieux furent étranglés. en pri-
fpn le 12 Septembre 1748, ( Ltttrts édifiantes & curïeufes des
hdiffionn titres , Vol. zjb s£). Voyez fur les Martyrs de la
Chine, le P. Touron , Nom, illujl. de VOrd. de 5. Domin. T. 6+
& le* Lettres des Mijfioimaires Ufuites* Si l'on veut s'inftrui-
re à fonds de I'Hiftoire de la Chine , on peut lire U
Défi
eription Hifloriquc que le P. du Halde a donnée de cet Empi-
re en 4 Vol, in Fol. ainfi que Mullerus de Chataia , Nava-
rette, Tratados Hifioricos de la China % an* 167* % U
Chrono-
logie de Jackfon , &c.
Le feu de la perfécution s'alluma auffi dans le Royaume
du Tonquin , qui eft au Sud-Oueft de la Chine. On y dé-
molit 150 Eghfcs & l'on fit fouffrir divers fupplices aux
,

nouveaux convertis. Le P. François Gil de Fédéric , fit le


P. Matthieu Alfonfe Leziniana , Dominicains , reçurent la
couronne du martyre. Le premier , en arrivant au Ton-
quin, en 1739 1 trouva plus de vingt-mille Chrétiens dans
la partie Occidentale de ce Royaume , lefquels avoient
été baptifés par les Millionnaires de fon Ordre. D fe mit
auffi-tôt à cultiver cette nouvelle vigne avec le plus grand
foin. Mais en 1737» il fut arrêté par un Bonze du voisina-
ge , & condamné à mort l'année fuivante^ Son fupplice fut
long-temps différé , parce que les Tonquinois remettent les
exécutions au dernier mois de l'année , fie que les réjouif-
fances publiques ou quelqu'autre événement femblable mul-
tiplient fouvent les délais. Quoique le P. Gil fut en prifon ,
on lui permettoit quelquefois de dire la Meffe. On le trai-

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Les Martyrs pm ia Chine. \oy
bit avec toutes fora* d'égards , fie on s'engageoit 4 lui MB
lauïer la vie , pourvu qu'U déclarât feulement qu'U n'étoit
veau au Tonquiu qu'en aualité de Marchand. Mai* comme FÉVRIER u
cette déclaration eût été un raenfonge y il ne voulut pas
même qu'un autre la fît en (on nom. Le P. Matthieu Alfonfe
Leziniana , qui travailloit aux Millions de Toaquiq depuis
duc ans , tut arrêté en difant la Mené. Sur le refus qu'il fit
de fouler aux pieds un Crue i fût , on le condamna à mort en
1743 * & au mois de Mai de l'année fuivanxe , on le coudui-
fit dans la même prifon que le P, Gil. Les Idolâtres, éton-

nés de l'ardeur que les deux Millionnaires marquPHmt pour


le martyre , fie du chagrin que téjupiçnoit le dernier lui ce
qu'on lui propofoit de lui laifter la vie , ne purent s'empê-
cher de s'écrier » Les autres hommes défirent de vivre , fie
:

» ceux-ci ne foupirent qu'après la mort Enfin « rien n'étant


1

capable d'ébranler la çonitance 4 e nos deux Millionnaires


ils furent décapités le 22 Janvier 1744» ( Voyez Us. Bornai*
illu/L ct du P. Touron , T. C, & les lettres édifiantes & curitufts )•
Dieu fufeita aufii dans le feizieme fiecle des hojnmes
Apoâoliqucs ,
qui portèrent la lumière de l'Évangile dans
d autres pays Infidèles , firués à rOrient fit à l'Occident.
On compte , entre ces Miflionnaires zélés , le P. Jofeph
Ançhieta, qui convertit les Sauvages du Bréiil en Améri-
que, dont les Portugais s'emparèrent en 1500. U était natif
des Canaries, avoit pris l'habit chez les Jéfuites de Conim-
bre, ce mourut au Bréfil le 9 juin 1 i 97 « à l'âge de 64 ans
dont il avoit parle une grande partie dans tes travaux des
Millions. Il fut toute (à vie un modèle accompli d'humilité,
de patience , de douceur & de charité. ( Voyez fa Vie par
le P. Pierre Roterigius , fit par le P. Sebafticn Bérétarius ).

La (âinteté du P. Pierre Claver , qui travailla à cultiver 1a


même vigne , a été fi célèbre , qu'on a déjà commencé le
procès de fa Çanonifation. Il étçit d'une des meilleures mai-
tons de la Catalogne , fie entra chez les Jéfuites de Tarrago-
ne en 1602 , étant pour lors âgé d'environ 20 ans. Son
huratrvté , fa douceur , fon obéi fia nçe , fon attention à mar-
cher {ans ceffe en la préjence de Dieu , fie à lui rapporter
fês plus petites actions % fon mépris du monde , fon zele
pour fa propre fanûiftcation fie pour le falut des ames , fi-
rent juger a fes Supérieurs , qu'il étoit deftiné à quelque cho-
ie de grand. Ayant été envoyé à Majorque pour y étudier
la Philofophie , il y contracta une amitié particulière avec le
Frère Alphonfe Rodriguez, qui étoit alors Portier du Collè-
ge, fie qui pofledoit l'efprit de contemplation dans le degré
le plus éminent. U avança a grands pas dans les voies de la
perfection (bus la conduite de cet habife maître. Il obtint en
16 10, d'être envoyé en Amérique avec quelques autres
Muûonnaires , pour prêcher la Foi à Caxthagcne & dans les

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io8 Plusieurs SS. MartTrs:
fag '
" 1

S Provinces voifines. A peine fut-il arrivé , qu'il fe fentit émà


des plus vifs fentiments de compaflion 8c de charité pour
FÉVRIER J. les pauvres Nègres qui gémiffoient tout à la fois fous l'ef-
c lavage du Démon & des hommes. Occupé nuit & jour des
moyens de foulager leurs mifercs fpirituelles & corporelles »
on l'eût pris pour l'efclave des efclaves. Il vifitoit les Pri-
ions& les Hôpitaux , &s'appliquoit avec une ardeur infa-
tigable à la converfion des Infidèles & des mauvais Chré-
1
tiens. Il eft aifé de juger de quelles énédiâions furent com-
blés les travaux d'un tel miniftre. Dieu favorifa auffi fon.
ferviteur du don des miracles. Le P. Clavcr mourut le $
Septembre 1674» âgé d'environ 71 ans. Benoit XIV con-
firma en Î747 , le Décret de la Congrégation des Rits , qui
déclare compétentes & fuffifantes les preuves du degré d'Hé-
roifmc dans lequel ce vénérable Millionnaire a pofiedé &
pratiqué toutes les vertus chrétiennes. Voyez la Vie du
Claver , par le P. Fleuriau,

= -A
LE MÊME JOUR.
PLUSIEURS SAINTS MARTYRS
dans le Pont ,

fous Dioctétien.

y
Su E s uns eurent les doigts percés avec des
rofeaux pointus ; les autres eurent les cuifles
& différentes parties du corps brûlées avec du
plomb fondu ; d'autres confommerent leurs fa-
crifices par divers genres de tourments qu'ia-
venta la cruauté la plus rafinée.
Voyez Eufebe , 1. 8. c. 12,

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S. Ab raamiu s 3 E. M. 109

SAINT ABRAAMIU S,
TÉVRlER,î

ÉVÊQUE D'ARBELLE,
Martyr.
T
JL A Ville d'ArbelIe , connue aujourd'hui fous
le nom d'Irbil , a été long-temps Capitale de
TAbiadene , après la deftruôion de Ninivc. Elle
eflcélèbre dans l'Hiftoire profane par la viâoire
d'Alexandre le Grand ; mais elle Fcft encore
plusdans l'Hiftoire Eccléfiaftique par le mar-
tyre de Saint Abraamius , fon Évêquc. Ce digne
Pafteur fcella fa Foi de fon fang dans la cinquiè-
me année de la perfécution du Roi Sapor , qui
répond à Tan 348 de Jefus-Chrift.
Voyez Sozomene , 1. 2. c. 12; les Ménée$
& le Synaxaire des Grecs.

SAINT A V I T,
Archevêque de Vienne.
CE Saint ( a ) naquit en Auvergne , d'une
famille Sénatorienne de Rome. En 490 , il
fiiccéda à Ifychius , fon pere qu'on avoit éle-
,
vé fur le Siège Epifcopal de Vienne après la
mort de Saint Mammert. Nous lifons dans la
Vie de Saint Épiphane de Pavie par Ennodius
,
Qu'A vit étoit un tréfor de fcience de piété &
oc qu'il racheta un grand nombre de Prifon-

( a) Nomme par les Latins , AUimus Ecditius Avitus*

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i lo Saint à vit /Àrcèèv.
— _
«
"

"

niers Bourguignons avoient emmenés?


que les

FÉVRIER j. ^ e a Ligurie. Son éminente vertu le fit reC-


'

peôer par Clovis , Roi de France , par &


Gondebaud ,,Roi de Bourgogne, quoique le
premier fut encore Idolâtre , que le fécond &
tîit infeôc de l'Héréfie Arienne. Notre Saint

ayant eu une conférence à Lyon , avec les


Evêques Ariens , il les confondit , les ré- &
. duifit au filerice. Le Roi de Bourgogne, qui
étoit préfent , fut fi frappé du triomphe de la
Foi Catholique , qu'il 1 auroit embrafîee , s'il
ii*eût Craint de choquer fe$ Sujets. Sigifmond 9
fils &
fuccefleur de Gondebaud , fut plus
Courageux que fon pere ; il fe rendit aux fol-
licitations de Saint Avit , qiii le preffoit d'ab-
jurer TAriânifme. Lorfque ce Prince eut trem-
pé fes mains dans le fang de Sieeric fon fils ,
que fa belle-mere avoit aceufé a un crime fup-
pofé , notre Saint lui fit fentir toute Tindigni-
té de fa conduite , &
lui infpira de vrais ien-
timents de pénitence. Il rebâtit P Abbaye d'A-
gaune , autrement dite, de Saint Maurice, em-
brafTa PÉtat monaftique , mourut en odeur &
de fainteté. Saint Avit préfldaen 517, au cé-
lèbre Concile d'Éoaone (£) , où Pon fit qua-
rante canons de difeipline , mourut en 5 2 5 &
(c). Il eft nommé en ce jour dans le Martyro-

(b) On croit que c'eft la louange de la Virginité


Tenue fur le Rhône dans le adreiTe à Fufcine , feeur du
docefe de Bellay. Saint qui ctoit Rcligieufe , &
( c ) Saint A vit avoit corn- à plufieurs autres Vierges
pofj plufieurs Ouvrages dont aufli Religieufes: i°. plufieurs
0
il ne nous refte plus qu'u- Lettres : 3 . deux Homélies
ne partie. Voici la lilic de ; D. Marten*
fur les Rogations
ceux qui font parvenus juf- ne en a publié une trotâeme
qua nous. i°. Un Pocmç à fur le rowme fu;et , Thcfàur.

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!oge
Saint Sertou
Romain. On
fhonore le 10 d'Août
; 'Abbé, m
dans lTÈglife Collégiale de Notre-Dame dei^ym^^
Vienne , où il fût enterré.
Voyez Grégoire de Tours , Hift. I. % ; les
Ouvrages du Saint , & fa
Vie publiée par
Henfchénius ; le Galiia Ckri/l. Nova , T.z , p.
142, &c.

SAINT BERTULPHE,
VULGAIREMENT
SAINT BERTOU;
Abbé de Rentt (a),

en Artois,

ï L naquit en Allemagne ; de parents pett


aifés du côté de la fortune , & encore Païens.
La crainte de fe laifler corrompre par les dé-
fordresqui régnoient dans fon pays , le porta à
fe retirer dans le Diocefe de Terouenne , oîi
après avoir été de la Religion Chré-
inftruit

Antcdot. T. f. p. 49 : 4 0 . des avec laquelle Saint Avit prefle


fragments de huit autres Ho- les Ariens dans quelques-unes
me h es : la Conférence con- de Tes lettres doit nous faire
,

tre lesAriens, imprimée dans regretter les autres Ouvrages


2e Tome 5 du Spicilege. Les qu'il avoit compofés contre
duvres de Saint Avit fe trou- ces Hérétiques.
vent dans la Bibliothèque des
Pères. Le (avant P. Sirmond (a ) L'Abbaye de Renty ne
ks publia en 1643 in 4 0 . avec fubfifte plus fousce titre ; ce
des notes courtes , mais judi- qui en refte n'eft plus qu'un
cieufes. La manière ferrée petit Prieuré»

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ii2 Sâixt B eut ou y Abbé.
? tienne , il reçut le Baptême. Le pieux Comté
FEVRIER y.
Lambert luiayant confié l'adminiftration de
fes biens , il s'acquitta de cet emploi avec
autant de probité que de fageffe. Le même
Seigneur conçut pour lui les lentiments de la
plus haute eftime , &
le regarda bientôt , non
plus fon Domeftique , mais comme
comme
Ion ami &
fon propre fils. Il lui donna fa Ter-
re de Renty , par un Afte folenncl. Le Saint
ne l'accepta, que pour y mettre des Religieux
dont il eut la conduite , tout laïque qu'il étoit.
Il avoir pour eux la tendrefie d'un pere , &
cherchoit toutes les occafions de leur en don-
ner des preuves effeâivcs. Son amour po iu-
les pauvres étoit extraordinaire. Il poffedoit
dans un éminent degré , l'efprit de prière &
de mortification. Il mourut le 5. Février, vers
l'an 705. Il s'eft fait plufieurs tranflations de
fes Reliques. On y en a une partie
croit qu'il
dans l'Eglilc de l'Abbaye de Saint Pierre à
Gand.
Voyez la Vie de notre Saint dans Bollan-
dus , les Acla SanUorum Bmtd. ; Bulteau &
1. 2. p. 608.

SAINT

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Saint Vo ê t. 113

FÉVRIER {.

SAINT VOEL ,

Solitaire
à Soiffons,

S Aint Vodoal , autrement Saint Vod i


ou Voi , furnommé Benoit , Solitaire à Soif-
fons , étoit du pays des Piûes en Écofle. Il
quitta fa patrie , rïn de fervir Dieu plus li*

brement, &
parcourut pluileurs Provinces de
France , employant à Pinftru&ion des Peuples
le talent qu il avoit pouf la parole. Arrivé à
Soiflbns , il y fixa fa demeure dans une pe-
tite mailbn qui lui fut donnée par TAbbeflc
du Monaftere de Notre-Dame. Il y vécut en
Reclus , ne fortant jamais que pour célébrer
la Mefle , ou pour rendre fervice au ptochain.

Il fe fît un devoir de garder un filence rigou-

reux , & d'obferver toutes les pratiques ufi-


tées chez les vrais Solitaires. UAbbefle de
Notre-Dame qui pourvoyoit à fa fubfiftan-
,

ce , s'étant laiffe prévenir contre lui , il réfo-


lùt de retourner en Écofle. Mais Dieu ne per-
mit pas que fon voyage eût lieu. Il revint
donc â Soiflbns, où il continua fon prernier
genre de vie. Il mourut le j. Février, vers
Fan 710 , &fut enterré dans î'Eglife de Sainte j

Croix , qui étoit le Cimetière des Religieu-


fes. Il s'opéra plufieurs miracles à fon tom-
beau. On Fînvoquoit dans les Litanies du hui-
tième fiecle. Il eft nommé dans la plupart des
Martyrologes modernes , au 4 , ou au j Fé-

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ii4 Sainte Adélaïde.
* vrier. Son corps cft à Notre-Dame de Soi£-
F£VRiElu.ft,ns# Il y a quelques parties de fes Reliaues
'
chez les Religieufes du Pont-aux-Dames , aans
le Diocefe de Meaux , &
chez celles du Val-
de-Grace , à Paris.
Voyez fa Vie par un anonyme , dans Bol-
landus \ &
dans Mabillon , Sec. 4. part. z. p.
646.

SAINTE ADÉLAÏDE ,

Vierge, et Abbesse.
C Ette
Comte de Gueldres
Sainte étoit fille de Mégendofe
$£ Fondateur des Mo-
,

,
na Aères de Bellich(<* ) &
de Notre-Dame de
Cologne. Elle fut d'abord chargée du Gouver-
nement du premier, où elle introduifit la Règle
de Saint Benoît. Elle mourut en 1015 , étant
Abbefle de Notre-Dame de Cologne. On fait
ià fête avec Oâave , à Bellich ou Vilich.
Voyez fa Vie dans Surius Bollandus , & &
les Fajti Sclgia de le Mire.

( a ) Sur le Rhin % près de 1 Chtpittr de Chanoine/Te».


G'eft aujourd'hui ua|

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,

Do rothÈê KJIf. tif


Sainte ,

ô* * ti a a * *a a * * a * a a *

VLJOUR DE FÉVRIER.
S* DOROTHÉE,
VIERGE ET MARTYRE. I
i

ttgrç 5*i/if Adhdmt , , Vfuard % &


BolUndus , />. 77/.

Vo I C I cë que Saint Adhelnte( 1 ) nous février


apprend de cette Sainte , d'après les Aôes de
ô.

fon martyre. Fabritius , Gouverneur de Cé-


ûrée , en Cappadoce , lui fit fouffrir les plus
horribles tourments , pour l'obliger k fe marier,
ou à adorer les Idoles. Dorothée perfifta géné-
reufemertt dans fa première réfolution , con- &
vertit même deux femmes A portâtes, qu'on
avoit chargées de la léduire. Rien n'étant capa-
ble d'ébranler fa confiance , le Juge la condamna
à perdre la tête. Comme onmenoit au fup-
la
phce , un jeune homme , nômmé Théophile 9
oui lui entendoit dire quelle alloit trouver fon
orvin Épouk , lui demanda en raillant , des fruits
& des fleurs du jardin de cet Époux. La Sainte
par un effet de la Toute-Puiflance Divine , lui
envova réellement des fruits &
des fleurs. Cè
prodige frappa tellement Théophile * qu'il fe
convertit iur le champ. On croit que le mar-
tyrede notre Sainte arrivà fous Dioctétien,
fon corps eft dans la c élèbre Égltfe qui porte

H ji

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\i6 Sainte Dorothée , KM.
fon nom à Rome & qui eft au-delà du Tibreï
,

É\ RIER 6 ^ e e^ nommée en
ce jour dans l'ancien Mar>
"
tyrologe 5 attribué à Saint Jérôme.
Rufin ( 2 ) parle d'une autre Sainte du mê-
me nom , qui etoit d'une des plus riches des &
plus illuftres familles d'Alexandrie. Celle-ci
pour avoir constamment réfufé de fatisfaire la
paffion brutale de Maximin , fi.it dépouillée par
cet Empereur de tous fes biens , & condam-
née à l'exil , en 308 (a).

Le fang des Martyrs a été , félon St. Juftin ,


'
une femence féconde de Chrétiens. » On nous
» maflacre , difoit autrefois ce célèbre Apolo-
» gifle de notre Religion ( 3 ) ; mais nous nous
» multiplions à mefure que notre fang coule,
» Plus on s'acharne à nous çerfécuter &c à
» nous détruire , plus nous fàifons de profély-
» tes. Il en' eft de nous comme d'une vigne %
» qui , après avoir été taillée , pouffe de nou-
» veaux rejettons , &
produit une plus grande
» abondance de fruits. » Ceci s'eft vérifié dans
les fiecles de perfécution, dans tous les pays &
oii il y a eu de persécuteurs. La raifon en eft
bue le divin Auteur de notre Religion fe joue
des projets infenfés des hommes. On ne doit
donc pas écouter un Écrivain moderne . qui n'a
que trop d'admirateurs. » Il n'eft prefque pas
» poflible , dit-il , que le Chriftianifme s'eta-
» blifle jamais à la Chine. Les vœux de virgi-
» nité 9 les affemblées des femmes dans les
h Églifes , leur communication néceflaire avec
/
1 m
• ( a ) I. 9 . c. 17. Cathérine d'Alexandrie , que)
-
{a) Ceft «le cette -Sainte, parle Enfiche , A. 8. c. lj 4e
& noa, comme quelques-uns Ton Hijl. Eccléf.
font pcofé ; de la célèbre Stc. ( 3 ) 4pol* 1. #,

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Sainte Dorothée, V. M. 117
vfcs Miniftres de la Religion , leur participa-
» tion aux Sacrements , la confeflîon auricu-
»Iaire, rExtrêmc-Onfcon , leMariage d'une
rtVRŒR *
» feule femme ; tout cela renverfe les mœurs Se
» les manières du Pays , &
frappe encore du
» même coup fur la Religion &
fur les Loix. »
(4) Depuis quand le bras dé Dieu éft-il ra-
courci ? L'Évaneile ne peut-il plus , comme au-
trefois , triompher des préjugés les plus invé-
térés , &
renverfer tous les obftacles qu'une
politique mondaine , &
une feience frivole
voudraient lui oppofer ? Il s'eft établi au mw
lieu des plus grandes contradiôions ; mal- &
gré la fureur avec laquelle les Princes exter-
minoient ceux qui en fàifoient profeffion , il
peut encore s'établit de. la môme manière
quand il plaira à la divine Providence. Juge-
ra-t'on toujours des oeuvres de Dieu
, par les
œuvres dos hommes ? Encore une fois ne bor-
nons point la Puiffance de Dieu , n'en me-. &
furons point l'étendue, fur les foibies luoûe-*
res de notre intelligence

(4) L'E/prit tU$ Loix, /. tin follicira inutilement l'Em-


pereur Galien de rebâtir une
U n'en eft pas de notre
(*) Ville ruinée dan&la Campa nie,
Religion comme delà Philofo- afin qu'ilpûtavec fesdifciples
humaine. La première y République de
réalifer ra
s'eit établie par les moyens Platon. Nous avouons qu'un*
«êraes qui paroirToienr de- fyuêrae de Philofophic ou de*
voir empêcher fbn établifte- Religion prendra quelquefois
ment. La féconde ne pourroit, parmi les hommes ; mais ce ne
malgré route la protefHon des fera qu'à proportion qu'il fa-»
Princes , introduire (es maxi- vorifera les préjuges & le*,
mes dans une feule Ville. On pa fiions.
fcttque le Pbilofophe Plo-

Hiij

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ti8 S A tnt Va a s t t E.

SAINT VA A S T
É V t Q V E D' AR R A S.

Tiré defis deux différentes Vh$. La première qui e/f


piu de temps apris fa mort. La
fort courte, fut écrite
féconde , qui eft plus longue , a été corrigée par AU
coin. Henfchenius a publie tune & l'autre , avec
des remarques , T. i. Febr. p. 781. Foyerauffi
dans le P. Martenne, ( Ampl. Colleôio , T. 1 ,
p. 50 ). La Lettre d'Alcuin aux Moines
de S,
Vaaft, Callia Chrifl Nova, T. 3 , p. 3.

L'An $39«
Saint Vaast, cpuparoît être né <fcmâ
quelque Province Occidentale de la France ,
quitta fa Patrie , & fe retira dans le Diocefil
de Toul , où il véçtjt quelque temps caché *
& uniquemçnt occupé des exercices de la pc*
Iiitçnce* Maisla réputation de fa vertu l'ayant
feit connoître à FÊvêque du lieu , il rattacha
à fon Églife, &
réleva à la dignité du Sac*i>
doce. On s'apperçut bientôt que Dieu avoit
<ur lui des vues particulières. Clovîs I , reve»
fiant de Tolbiaç f oii 11 avoit remporté une viç*
foire complète fur les Allemands > pafla par
Toul , & demanda un Prêtre qui pfit Rnftrui-
rc de la Religion Chrétienne , &le préparer au
Baptême qinl alloit recevoir à Rheiim , con-
formément au vœu qu'il en avoit feit, Vaaft
fut chargé de cette importante fonâion. Tan-*
dis qu'il paflbit la Riviçre d'Aifne avec le Roi,
un aveugle qui étoit fur te Pont , le pria à
,

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S À i yr Va a s t , E. \i$
grands cris de fui rendre la vue. H étoît bien
éloigné de fe croire Thaumaturge ; mais une
février 6 t

inspiration fubite qui venoit du Ciel , le porta


à prier , & à former le fijjne de la Croix fur
les yeux de l'aveugle qui recouvra la vue k
,
finAant. Ce miracle contribua beaucoup à
fortifier le Roi dans fa réfolution , &di£
po(â pluûeurs de fes Courtifans à embraffer
la Foi,

Saint Remi , que l'expérience avoit inftruit


de tout le mérite de Vaaft , le facra Évêque
d'Arras , afin qu'il pût travailler à rétablir la Foi
dans un Pays où elle étok prefque totalement
éteinte. Ce fut en 499 , que notre Saint arriva
dans la Ville d'Arras. En y entrant , il guérit
un aveugle &un boiteux ; ce mit prépara les
eforks & les coeurs à recevoir favorablement
l'Évangile. Les Peuples de cette Contrée avoient
été éclairés des lumières de la Foi , lorfqu'ils
étoient encore fous la domination des Ro-
mains ; mais les ravages des Alains & des Van-
dales , avoient ou difperfé , ou exterminé ce
qu'il pouvoir y avoir de difciples de Jefus-

Chriff. Le Paganifme s*étok peu à peu ré-


tabli ;& le faint Évêque ne put découvrir au-
cune trace de Chriftianifme , que dans la mé-
moire de quelques anciens habitants du Pays 4
qui lui montrèrent hors de la Ville , les dé-
bris d'une Églife , ofr les Fidèles s'aflembloient*
Il gémit en voyant l'ancienne maifon du Sei-

gneur, hériffée de bluffons, & devenue la retrai-


te desbetesferouches ; il s'adrefla par une prière
fervente , au Pere des miféricordes , &
le con-
jura de rétablir fon culte dans un Pays où il
avoit été autrefois adoré. Il ne fut pas long-
temps à s'appercevoir qu'il avoit à inflruirç

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I lO SA T N T Va AS T j E.
un Peuple greffier > & opiniâtrement attaché
FÉVWEE 6. ^ ^es fuperftitions. Cependant il ne perdit point
'
courage & vint à bout par fa patience fa
; il ,

douceur & fa charité de faire goûter les ma-


,

ximes de Jefus-Chrift. Saint Remi , pour don-


ner encore plus d'étendue aux travaux aposto-
liques de Vaaft , le chargea en 510, du foin
de gouverner le Diocefe de Cambrai , qui étoit
alors fort vafte (a ). Nous ne favons plus rien
de notre Saint , finon qu'il rendit fon Églife
très-floriflante , &
qu'il rempUt dignement tous
les devoirs d'un bon Pafteur , jufqu'à fa mort
•qui arriva le 6 Février 5 3 9, 11 fut enterré dans
la Cathédrale d'Arras , dédiée fous l'invocation
de la Sainte Vierge. Son corps y refta jufqu'au
temps de Saint Aubert , qui hit le feptieme
Évêque d'Arras &. dç Cambrai après lui. Ce
Saint Prélat le tranfporta folennellement en
667 , dans une petite Chapelle que Saint Vaaft
avoit bâtie en l'honneur de Saint Pierre. Il
changea cette Chapelle en une Églife qui prit
le nom de notre Saint , &
y jetta les fonde*
ments d'un célèbre Monaftere , qui fut achevé
par Vindiciçn, fon fucçefieur. Lorfque Saint
Aubert fit la Tranflation des Reliques çie S,
Vaaft 9 il en laiiTa une partie dans la Cathé-
drale (£). Les Anglois avoient anciennement
une grande dévotion à Saint Vaaft 5 l'hono-* &
roiçnt fous le nom 4e Saint Fçftçr ( ç). Le cé-

-< —
(a) L'union des Sièges richie par lçs libéralités du
d'Arras& de Cambrai dura Roi Thierri, qui y eft entewé
longtemps même apr^s la
, avec fa femme Doda t
mort de notre Saint, ( c ) Cambden prétend quç
(h) L'Abbaye de Saint c'eft de ce Saint que la famille

Vasfl futçonfi4erabl«ment en- de Foftcx tire fon noni,

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Saint A m an j> 3 E.
un monument au*
m
Icbre Alcuin nous a laifle
thentique de fa dévotion pqur le môme Saint , fêvr^ ^
en écrivant fa Vie , &
en compofant un Office
particulier, une Meffç en fon honneur*
Il l'appelle fon Proteûeur , dans la Lettre

qu'U écrivit en 769 , aux Moines de Saint,


Vaaftd'Arras,

1
——- 11 — *
1 1

'

LE M £ M E JOUR*
SAINT AM AND ,

ÊVÊQUE DE MASTRICHT.
(2 E Saint naquit aux environs de Nantes ,
de parents recommandables par leur piété, &
qui étaient Seigneurs du pays. Il quitta le mon*
de à l'âge de vinet ans , &
choiût pour (a de-
meure un Monauere de la petite lile d'Oye
voiûne de, celle deRhé. Il y avoità peine un
an qu'il y eoutoit les douceurs de la retrai-
te, larfqu'ii fe vit expofé à une tentation fort
délicate. Son pere l'ayant découvert r l'aila
voir , & employa les raifons les plus préfixan-
tes pour le porter à ibrtir du Monaftere j 11 le

menaça même de le. déshériter , ne repre-


s'il

noit l'habit fécuiier. Mais le Saint lut répon-


dit refpeûueufement qu'il n'avoit d'autre pré-
tention que celle de Yivre pour Jefus-Chriit f
quii avoit çhoifi pour fon unique partage. H
alla quelque temps après , vifiter le tombeau
de Saint Martin a Tours. L'année fuivante il
fe retira à Bourges , oii il vécut près de quinze
ans dans une petits çellulç voifine dç la Cathé-

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in Saint A m and & 3
— — drale fous la direâion du faint Evêque Auf^*
,

FÉVRIER 6.* tregîfile. II y pratiquoit tout ce que la péni-


tence a de plus auftere , portant continuelle-
ment le cilice f &
ne prenant pour nourriture
que du pain d'orge &
de l'eau. Il fit enfuite
un pèlerinage à Rome , puis revint en Fran-
ce , où il fût facrë Évêque en 628. On ne l'at-
tacha à aucun Siège particulier ; &c fa fondioa
devoit être de prêcher la Foi aux Infidèles*
Le nouvel Évêque a& s'occupa plus que des
moyens de correfpondre à la grâce de fa vo-
cation. Il alla porter la lumière de l'Évangile
dans la Flandre , l'Efclavonie , la Carinthie , &
dan» lesProvinces voiiines du Danube ( 1 ).
Ayant été enfuite banni par le Roi Dagobcrt 3
cu'il avoit généreufement averti de fes défor-
dres , il employa le temps de Ton exii i inftruire
les Gafcons &
les Navarrois des myfteres de
notre fainte Religion. Sa difgrace ne fut pas
de longue durée' ; Dagobert le rappella peu
de temps après. Ce Pnnce fe jetta même aux
pieds du Saint pour lui demander pardon , 6c
le pria de baptifer le fils que Dieu venoit de lui
donner. Ce fils étoit Saint Sigebert qui mou**
rut Roi d'Auftrafie. Amand y toujours dévoré
de zelepour le fàlut des ames, fe chargea d'une
Miffion dans le Territoire de GamL Les PetN
plas qui l'habitoient étoient fi barbares , qu'on
-
ne trouvoit point d'ouvriers évangéliques qui
ofaffent aller chez eux. Ce fut un motif de plus
pour engager notre Saint à travailler à leur în£
truftion. 11 ne rencontra d'abord que des cœurs
endurcis , &des efprics livrés à la plus groffiere

( 1 )iVoyez Hmilktnius , p. Si&*

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'Sjf l XT AMA If 2> , £. Il)
dipcrftî tion. On en vint même jufqu'à le battre
& à le jetter dans Peau. Mais rien ne fat capa- jévwïK *,
Me de déconcerter fon zele. Il continua Tes pré-

dications ,
quoiqu'elles ne produisent aucun
fruit, efpérant toujours q\ie le moment des
miférico rdes arriveroit. Il ne fe trompa point ;
& Dieu pour accélérer ce moment fi attendu
par le Saint , le fevorifa du don des miracles.
Le bruit s'étant répandu qu'il avoit reflufeité
un mort , les Barbares renoncèrent à leurs fu-
perftitions, abbatirent les Temples de leurs
Idoles , &
accoururent en foule pour recevoir
le Baptême. Notre Saint bâtit plufieurs Êglifes
en 6jj , Se fonda deux grands Moriafteres à
Gand , l'un &
l'autre fous l'invocation de Saint
Pierre ( Quelques années après , il en bâtit
encore un autre à trois lieues de Tournai , fur
la petite rivière (TElnon, dont il prit le nom f

& que l'on appelle aujourd'hui


x
Am&îuL , Smm
avec la ViU* qui s'y eft formée.
Notre Saint fut élu Evêque dç Mailricht en
649 ; mais il ne refta pas long-temps fur un
Siège où il avoit été élevé malgré lui. La vue
de fa première vocation , jointe à rëfpérance
de faire plus de fruit hors de fon Diocefe , le
détermina à donner fa démiffion de l'Évêché
de Maftricht , après Favoir gouverné trois
ans. Il défigna lui-même fon tucceffeur , qui
ftr Saint Remacle , Abbé dç Cougnoru libre

*m i " m 1

(«) L'un fur appelle Blan- celui qui avoit donné dot
du mont Blandm . fonds pour le bâtir. La ViH©
fur lequel il étoit {itué i ( c'eft de Gand ayant été érigée en
aujourd'hui l'Abbaye de Sai nt Érêché , l'EgMe ce dernier
Pierre); l'autre prit depuis Monaftere en devint la Ca-
Jç nom 4c Saint Bavpn , de thédrale «»lf**«

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,,

124 'Saint B a» s an u 9 Ht.


déformais , il reprit fçs travaux apostoliques A
& confacra le refte de fes jours à la conver—
fion des Païens. Enfin, cafle de vieilleffe &c
de fatigues , il le retira à l'Abbaye d'Elnon ^
qu'il gouverna -en qualité d'Abbé, un peu plus
de quatre ans, &
mourut en 675 , âge de-
quatre-vingt-dix ans. Il fut enterre dans l'Ab-
baye de Saint Pierre d'Elnon. Son culte étoit
autrefois fort célèbre en Angleterre , puisqu'il
a un Office à neuf leçons dans le Bréviairç
de Sarum- Ses Reliques font dans l'Eelife dq»
l'Abbaye de fon nom. U eft nomme en ce
jour dans, le Martyrologe Romain.
Voyez la GaUo-FLtniriq. de Buzelin , Se les
cinq différentes Vies du Saint r données pa*
H en^chcnius* •
» *•« ,

SAINT BARSANUPHE %
f I
*

Anachorète,
• * • *

\. L pafla quelques années dans le Monaftero


de Saint Seridon , fitué près de Gaze, en Pa-
leftine f où vécurent en même temps que lui
Jean le Prophète , le Bienheureux Dorothée ,
& Saint Dofithée. L'amour de la contempla-
tion le porta, en 540 , à fe. renfermer dans
une cellule écartée , afin de n'avoir plus de
commerce qu'avec Dieu. Ce fut-là qu'il écrivit
un Traité contre les Moines qui étoient tom-
bés dans l'Origçnifme (a). Les Grecs avoien*
*

' . *

( a ) Voye* le P. Momfoucpn , <* BtHiot. Coiflitu

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S aint Bars anuph e. nf
tant de vénération pour fa mémoire , qu'ils ==
mirent Ion image dans la grande Eglife de Conf- p^yR
tantinoj)le , près de celles de §. Antoine &
de Saint Ephrem ( b ), Saint Barfanuphe eft
honoré le 7 de février , avec la qualité de
premier Patron , à Oria près de Siponto , en
Italie
, où les Reliques furent transférées dans
leneuvième fiecle. Son Office fe trouve au
même jour dans les Synaxaires des Grecs. Le
Cardinal Baronius a inféré fon nom dans le
Martyrologe Romain , fous le 1 1 d'AvriL
Voyez Evagre , 1. 4 , c. 3 3 ; le P. Pagi
fous l'an 548 , n. 10 ; Bulteau, Hijl. Mon.

(é) Noos apprenons ceci Ces inftructions ont été tra-


du Moine Srudite , Auteur de duites en françois par le célè-
la Préface qui eft à la tête des bre Abbé de Rancé , R e for-
h^nâions de Saint VorotMt. formateur de k Trapc.
,\

ti6 S. ko Mi/ aljû , A b è à.

VIL JOUR DE FÉVRIER.


SAINT ROMUALD
ABBÉ,
FONDATEUR DE L'ORDIlï
DES CAMALDULES.
Tiré de fa VU, icrilt quinze ans aprlsfa mûri ;
par Saint Pierre Damien. Voye[ tes Vies des
Saints de l'Ordre des Camaldules , données en
Italien par Rditfi » *n 1C00 ; & en Latin y par le
P. Thomas de Minis , en 1&0S & 1C06 y 2. Voi.
0
in-4 Voye{ duffi Us Ouvrages fuivants Mug-
. :

notii, Eremi Camaldulenfis Defcriptio, Romae t


an. 1570 Hiftoriarum Camaldulenfium Libri
:

très , Auâore Aug. Florentino , Florentin ,


1 575 : Earumdem Pars pofterior , Venetiis f
0
an. i/j-4 . : Differtationes Camaldulen-
1J79,
fes , de inftitutions Ordinis 9
in quibus agitur
setate Sanôi Romualdi t &c. iu£tore Guido-
ne Grando , ejufdem Ordinis , Lucae , anno
1707 Annales Cataaldulenfes Ordinis San£H
:

Benediâi , Auâoribus /oanne-Denediâo Mitta-


relli , Abbate , &
Anf. Coftadoni , Presbyter.
& Monachis è Congregatione Camald. Vene-
tiis , 4. VoL in Fol. Le quatrième Volume de et
grand Ouvrage a été dédié au Pape Clément XIII
en tj€o.

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S.Romuald, Abbé, h?
L'An 1027.
"
OMUALD, Famille Ducale
iffu de la
des HonefH , naquit à Ravenne 9 vers Tan FÉVRIER 7.

956. Ses parents , beaucoup plus remplis des


maximes du monde que de
celles ae Jefus-
,
Chrift , dans la molefle ,
le firent élever lui &
inipirerent de bonne heure le gout des plaifirs.
Une pareille éducation ne pouvoit manquer
d'avoir de très-mauvaifes fuites ; aufll le jeune
Romuald fe laifla-r*il entraîner par la fougue
impérieufe de fes paflions. Mais la grâce rom- Sa Mitait
pit peu à peu le charme qui le féduiloit. La vue cc*
de Fétat de Ton ame l'inquiétoit ; de temps en &
temps il fermoir la réfolution de faire quelque
choie d'éclatant pour la eloire de Dieu. Si lorf-
qu'il étoit à la chafle , il fe trouvoit au milieu
d'un bois fo lit aire , fon cœur fe fentoit tou-
ché &c attendri. Il s'arrêtoit auffi-tôt pour prier,
& s'écriait avec tranfport : » Heureux les an-
» ciens Hermites , d'avoir choifi de telles habi-
*f tarions ! Avec quelle tranquillité ne devoient-

» ils pas fervir le Seigneur , étant ainfi éloi-


» gnés du tumulte du monde ! » L'événement
malheureux que nous allons raconter , fut le
moyen dont Dieu fe fervit pour brifer entiè-
rement fes chaînes , & pour achever fa con-
Verfion.
Serge fon père , homme qui fàifoit peu de
cas de la Religion , avoit eu difpute avec un
de fes proches , pour quelque mtérêt tem-
porel. Ù réfolut de terminer la querelle , en
appellant fon parent en duel , il exigea de & ^
S* conveW

£ua fils (ju'il fut de moitié dans l'exécution

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ïi8 S. R omu àLd , AbbL
\
—j e fon affreux deffein. Celw-ci , effrayé d'une
te ^ e propofi^ 011 > rejetta ; fnaîs fur la me-
Février 7 *
nace que lui fît fon pere de le deshériter , il
confentit à affilier au combat , feulement ti\
qualité de fpeftateur. Serge eut 1 avantage , &
mit à mort fon adverf^ire. Romuald , alors
âgé de vingt âns , fut faifi d'horreur à la vue
de ce qui venoit de fe pafler. Il fe regarda lui-
même comme coupable de l'homicide qui avoit
été commis , &
alla l'expier par une rigoureufe
pénitence de quarante jours dans le Monafterc
de Clafle , finie à quatre mille de Ravenhe (a ).
L'efprit de ferveur &
de componftion dont il
étoit animé , lui fit goiiter des douceurs ineffa-
bles dans les plus pénibles exercices de là mor-
tification. Chaque jour il le feiitoit de plus en
plus pénétré de la Crainte &
de l'amour de Dieu.
Les bons exemples qu'il avoit fous les yeux ,
joints aux infrruftions qu'un Frère convers ,
chargé de le fervir , lui donna fur l'éternité &
& fur le mépris du monde , le détachèrent en-
tièrement du fiecle ; il y renonça donc pour tou-
jours , &demanda en plein Chapitre à être reçu
dans l'Ordre, en qualité de pénitent. On délibé-
ra quelque temps fi l'on auroit égard à cette de-
mande, parce qu'on craignoit le refTentiment
d'un pere , que la retraite de fon fils ne man-
queroit pas de rendre furieux. Mais onfe rendit
à la fin aux défirs de Romuald , &
on le revêtit
'il fc fait de l'habit monaftique. Il vécut lept années dans
Moine à ciaf- cette maifon de la manière la plus édifiante. La
,

haine que quelques-uns de les Frères conçu-


rent contre lui fait fon éloge , puilqu elle n'é-

( a ) Ce Monaftcre, qui por- re , Apôtre de R avenne , fur-


tait le nom de Saint Apollinai- voit la Règle de Saint Benoît.*

toit

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S* Rù MUA LD A B , B É. î
'

toit fondée que fur le dépit qu*ils avoient de


le voir meilleur qu'eux» Notre Saint ayant
j^y^^
par charité , donne quelques avis à ceux qui
s'écartaient de leur Re^le , ceux*ci furent vi-
veinent piques de trouver un cenleur de leur
conduite dans la perfonne d'un jeune Reli-
gieux. Il y en eut même quelques-uns d'en-

tr'eux qui formèrent un projet de vengeance


inouïe ; ils résolurent d'attenter à la vie de
Romuald. Heureufement le Saint fut averti à
temps ; &
il épargna un crime à fes ennemis
»
en demandant à l'on Abbé la permiffion de,
quitter le Monaftere de Clafle. Il fe retira
dans le voifinage de Venife 5 où il prit pour
Direôeur un (aint Hermite , nomme Marin i
fous la conduite duquel il fe perfectionna dans
la pratique de toutes les vertus monaiti-
ques.
La République de Venife avoit alors pour
Doge , Pierre Urféolo , qui avoit été élevé
a cette dignité par la faoion de ceux qui
avoient afiaflmé Pierre Candiano , fon Pré-
déceffeur. Quelques Auteurs ont prétendu
«quUrféolo lui-même avoit trempé dans la con-
juration ( b ). Quoiqu'il en loit , il n'étoit

( k ) Les meilleurs Hifto- inftruites.Ayant été élu Do


riens de Venife foutiennent le ge de Venife , il refufa long-
coîirraire. Nous apprenons de temps d'accepter cette digni-
Sanuri , qu' Urféolo vécut tou- té v mais il fallut à la fin qu'il

jours Fort faintement dès fa cedàt aux inftances réitérées


plus tendre jeuneffe. Il fit bâ- de fes concitoyens. U ne vou-
tirdans l'É^life de Saint Marc lut être Doge que deux ans 6c
une Chapelle , où le corp* de huit mois. Voyez Santlti VU ,

ce faint Évangélifte tut dépo- tt de Duchi ii Vene\in , c. f)fC>\

te fccr„tcawnc en fortô que


, & Mura ton , Rerum Ital. Scrip*
peu de pexibnncs en étoient t0T, 7*. 22 , 9,

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1)0 S. RûMVALD, AbÉÉ.
parvenu à la Souveraineté , que par un meur-
tre * Les réflexions qu'il fit fur cette circonf-
ï£Vfti£R 7.
'
tance ,cauferent de vives inquiétudes. Ré-
lui
folu de s'en délivrer , à quelque prix que cè
fut , il confulta Saint Guerin , Abbé en Cata-
logne, qui étoit alors à Venife, furies moyens
qu-il devoit prendre pour aflurer fon falut. Il

demanda aulii l'avis de Saint Marin & de S,


Romuald. Les trois ferviteurs de Dieu lui
confeillerent d'embrafier l'Etat monaftique ,
comme étant le plus propre à un homme qui
vouloit fe dévouer aux pratiques laborieuses
de la pénitence. Urféolo les regarda comme
les interprètes du Ciel , &
penfa férieufement
à fa retraite. Il prétexta donc un voyage à
la campagne , &
partit fecretement pour la
Catalogne , avec Saint Guérin , Saint Marin ,
'
11 fc mi-
S a * nt Romuald , Jean Gradenigo , Jean &
re en Cataio- Morefini , fon gendre. Urféolo , Gradeni- &
gne. Sa ma- 0 prirçnt l'habit Religieux dans le Monaftere
mère de vi-
g
j e $^1$% Michel de Cufan ( c ) , dont Saint
Guérin étoit Abbé. Pour Marin Romuald &
ils fe retirèrent dans un Défert du voifinage ,
oii ils vécurent en Hermites. Plufieurs per-
forées , attirées par l'éclat de leurs vertus
vinrent les trouver dans leur Solitude , & de*
mandèrent à y vivre fous leur conduite. Il fe
forma peu à peu une Communauté dont Ro-
muald fut créé Supérieur. Ce faint homme
pratiquoit le premier ce qu'il recommandoit
à fes difciples. Il joignoit au travail des mains
le plus pénible , des jeûnes rigoureux , un

(<) Situé dans cette partie] alors de la France,


de la Catalogne, qui étoit |

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4 t

S. ROMVALV + AÈBÈ. tî
parfait recueillement , & line prière conti-
nua lie. Il avoit fur-toutune ardeur incroya- février 1
ble pour ce dernier exercice ; aufli n'y en
avoitnl point dont il inculquât plus fortement
la néceflité. Il étoit vivement affligé j lorf-
qu'il voyoit quelqu'un prier avec tiédeur. » Il
» vaudroit mieux , difoit-il alors , ne réciter
» qu'un Pfeaume avec ferveur , que d'en réci-
ter cent avec nonchalance. » La lévérité avec
laquelle il traitoit fon propre corps , rie l'em-*
pêchoit pas d'être fort indulgent envers les au-
tres , & fur*tout envers Urféolo , qui avoit
quitté le Monaftere de Cufan , pour venir fd
mettre au nombre de fes difciples ( d ). Mo-
téfîni fe retira aufli dans la Communauté de
notre Saint.
Romuald avoit éprouvé de rudes tentations
après ùl fortiedu monde. Elles venoient de l'ef-
prit de ténèbres , qui vouloit déconcerter fes s& tenu*
pieux projets* Tantôt il le follicitoit direôe- tiooti
ment au crime ; tantôt il repréfentdit a fon ima-
gination les grands biens qu'il eût pofledés dans
k ûecle , &
que fa retraite feroit paffer à des
parents ingrats. Quelquefois il l'attaquoit par
le décourageirient , en lui fuggérant qu'il ne
pourrait jamais plaire à Dieu ; d'autrefois il
lui exageroit les difficultés qu'il rencontreroit
dans fon nouveau genre dé vie , les lui pei-* &
gnoir comme infurmontables à la foiblefle nu-*
maine. Mais le Saint triompha de toutes ces
tentations , par ks veilles i la prière aux* & -,

i
-
w mm*

{d) Urféolo c& honoré îo du même mois dans le Maiw


comme Saint , à Venife , le 1 ryrologe Romain publié pa^
ée Janvier. U cft nommé le Benoit XIV.

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f 3 i 5. Romuald, Abbé.
S5 quelles il confacroit fbuvent les nuits entières*
Il méprifa les nifes du Sédu&eur ,
qui, pour
7*
le dirtraire de ce faint exercice , ébranloit tou-
te fa cellule , & le menaçoit de I'enfevelir
fous'fcs mines. Ces épreuves , qui durèrent
cinq ans , produifirent en lui une parfaite pu-
reté de cœur , &
le préparèrent aux plus in-
times communications du Ciel. La joie inté-
'

rieure dont il jouiffoit , fut encore augmen-


tée par la converfion du Comte Oliver , ou

Oliban Seigneur du pays. Ce Comte , qui
,

jufqu'alors avoit tenu une conduite entière-


ment oppofée aux maximes de l'Évangile , ren-
tra férieufement en lui-même , devint un vé-
ritable pénitent , &
alla prendre l'habit Reli-
gieux au Mont-Caffin.
Serge , touché de l'exemple de Romuald , fon
fils , ouvrit les yeux fur fes défordres. Il en con-

çut la plus amere douleur , &


fe renferma pour
les expier , dans le Monaftere de S. Sévère , près
de Ravenne. Mais le Démon le tenta quelque
temps après avec tant de violence , qu'il fut fur
le point d'abandonner fa cellule , de fe renga- &
ger dans les embarras du fiecle. Romuald , in-
formé de cette nouvelle , ne penfa plus qu'à re-
pafler en Italie , afin de foutenir fon pere dans
la première réfolution , &
de l'affermir contre
les aflauts de l'ennemi du falut. Les habitants du
pays oîi il dçmeuroit , pénétrés de vénération
pour fa perfonne, n'eurent pas plutôt appris
qu'il fongeoit à les quitter, qu'ils mirent tout en
oeuvre pour le retenir chez eux. Défefpérant de
réuflir , ils formèrent le projet de le tuer , afin
d'avoir au moins foh corps , qu'ils imaginoient
devoir être un préfervatif contre tous les mavut
qui pourvoient menacer leur pays. Une entre-

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S. RôMirALDi Abbé. 135
prife auffi brutale & auffi extravagante fut dé- Œ
couverte par Romuald. Il eut recours au ftra- FfevKlER
7,
tagême dont David; s'étoit fervi dans unp fem-
blable circonftance; H contrefit rinfenfé. Cet
innocent artifice, eut. un heureux fucççs. Lfe
peuple avant perdu hautç idée qu'il avoît de
la
la fainteté de Romuald 9
jne chercha plus à le
retenir. Ainfi le Serviteur de Dieu , libre de :

toute crainte , prit la routç *te Jlavennç , où il


arriva en 994. Son premier (oip, fut deyifiter
ion père. Il fit tant par les exhortations ,
prières &Tes larmes, qu'il le détermina à reft-
ter dans (on Monaftere. Serge y vécut enfuit*
dans une piété fort exemplaire , y moun* &
en odeur de fainteté. • • -
>

Le Saint après ^vouv rendu à fon pçre tes


devoirs que la piété &t 1m charité lui preferi-
voient , le retira dans les Marais de Claflë , Sç
iè renferma dans une cellule écartée. Le Dé-
mon l'y fuivit , &
lui livra, de nouveaux afr
iâuts. Il eflayade le vaincre par la triftçfle'xle
la mélancolie y &
il le battit même un jour

cruellement. Romuald , .plein de confiance ei*


celui qui nous a tous fauvéfr, s'écria au fort
de fes peines : » O
mon doux Jefus , pourquoi
» m'avez-vous abandonné } MVvez-vous dont:
» entièrement livré à la piriflance de mes enna-
» mis ? » A peine eut-il prononcé ces paroles,',
que le Démon prit la fuite. Non feulement le
Saint recouvra fa première tranquillité , mai?
il goûta encore des délices des confortions &
qui le ravirent hors de lui-même* Uni à Dieu
par les liens de l'amour le plus tendre le &
plus fort ; il ofoit braver Tés ennemis de foh
falur. » Quoi , leur difoit-il ; eft-ce que toutes
» vos forces font épuifées ? N'avez-vous plus
1 iij
Îj4 S. RûMVAtB, ^ÀBBi,
h d'armes à eflayer contre un pauvre fçrviteuF
FÉVRIER * ^ e Dieu. »
7.?
Quelque tpmps après , les Moines de Claflb
H cft élu élurent notre Saint pour Abbé ; mais il ne vou-
AM^Ciaf- lut point accepter cétte Charge. L'Empereur
*^ Othon III , qui étoit alors à Ravenne , l'alla trou-r
ver dans fa cellule où il pafla la nuit pour obte-
nir fon confentçment, Ses follicitations n'ayant
produit aucun effet , il $*adreffa aux Éyêques t
gflemblés pour lc>rs à Ravenne , lefquels or-
donnèrent à Romuald , fous peine d'excommu-
nication , de fe charger de ta conduite du Mo-
îiaftere de ClalTe. Les Moines fe repentirent
bientôt d'avoir mis à leur tête un homme qui
étoit inflexible par rapport à l'obfervation de
la Règle. Us fe foulçVerçnt contre lui , le &
traiteront avec la dernière indignité. Le feint
Abbé, qui étoit d'un caraftere fort doux , fout
frit d'abord avec patience les mauvais procédés
4e fes Religieux , dans l'efpérance cjuç les cou-
pables rougiroient de leur conduite , renr &
treroient aeux- mêmes dans la voie dont ils
s'étoient écartés. Mais quand il vit que le mal
plloit toujours en croiffant , &
qu'il ne pou*
voit y remédier , il prit la réfohition de quitter
Je Monaftere. Il alla rendrç compte de la forr
•$iç à l'Empereur , qui feifoit alors le Siège de

Tivoli ; jx comme ce Prince ne vpulpit point


Tecevpir fa démiffidn , il dépofa fa crofle à fes
pieds en préfpice de l'Archevêque dç Raven?

Le Voyage q\ie fit notre Saint à Tiyoli , fau-

( e ) C'étoit Gerbert qui a- puis fut Pape fpus le nom


vpit été auparavant Arçho Sylveftre U.
TÉOHÇ dçRhcbns,

fc quitte-

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S. Ko MVALD AbbL , ^jj
va cette malheufèufë Ville * qui aVoit été coh-
damnée au pillage pour s'êrrè révoltée -, 6t
pour avoir tué le Duc Matholiri , Ton GouveN février 7.
neur. L'Empereur lui pardonna en faveur dë
Romuald , qui avôit vivement follicité fa grâ-
ce.Le Chef des rebelles étoit un Sénateur Ro* n obtient
main f nommé Crefcence. 11 rie fut point ex- Ia %™ c * .

Tlvolu
cepté de Pamniftie générale ; 8c l'Empereuf
s'engagea même par ferment à lui laiffef la vièt
Othon cependant , au mépris de fon ferment ^
le fit tuer enfuite , &
enleva encore fa femnrto
Le Saint , qu'il avoit choifi pour fon Confeflfeûrj
lui repréfenta toute l'énormité de ce doublé
crime , &
lui impofa une pénitence févete 8c
publique. Il lui confeilla auffi d'abdicjuer là
couronne , pour aller pleurer fes iniquités dans
un Monaftere, Le Prince fe fournit à la périls
tence canonique , 8c promit de renoncer ail
Thrône ; çe eut fans doute exécuté > fl
qu'il
la mort ne prévenu. Les remontrances
l'eût-
de Romuald firent encore la plus Vive ifaprèft
fion fur Tham , favori de l'Empereur , lequel
avoit trempé dans l'aflafflhat de Crefcence. Il
confacra le refte de fes jours à la pénitence 4
& reçut l'habit monaftique des mains dé notrtf
Saint. Sa converfion fat fuivie de celles dé n porte plu
plufieurs autres Seigneurs de la Cour ,
qui fi «jj^ S"-
tous embrafferent le même genre de vie foitè cTJr'de Em* l

la conduite de Romuald, C'étoit fans doute pereur o-


un fpeftecle bien édifiant de voir de jeunes thon.èfc fai.
Seigneurs 8c de jeunes Princes fe dépouiller
w Momcs '

du fafte de la grandeur , pour fe confterer à


Dieu dans l'oblcurité de la Retraite. Ils y goiw
toient une joie pure dans la pratique de tout
ce que la pénitence a de plus rigoureux. Tout
leur temps était partagé entre la prière , le

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Ï3<5 S RbMUALja 3 Abbé:
chant des Pfeaumes , &
le travail des mains*

ft
Chacun avoit fon emploi particulier. Les uns
cultivoient la terre ; les autres s'appliquoient
à différents métiers , gagnant ainfi à la fueur
de leur front , de quoi fournir à leur fubfiftan-
ce. Quoique tous ces Solitaires fuffent très^
fervents , on diflinguoit pourtant Bonifkce 9
au-deflus des autres. Ce Boniface étoit pro-
che parent de l'Empereur Othon , qui l'avoît :

toujours tendrement aimé. Il avoit des talents


fopérieurs pour la Muûque &
les autres beaux

fûts. Ilvécut long-tërhp$ fous la conduite de


,

notre Saint , ordonné Évêque ,


fut enfuite &
çnvoyé par le Pape en Rufïie , pour y prêcher
l'Évangile. Dieu donna une bénédi&ion éton-
nante à fçs travaux. Le Roi de Ruflie , frappe
de de fes miracles , fe convertit lulr
l'éclat
même 8c cette converfiou en auroit procu-
;

ré beaucoup d'autres , fi ce faint Millionnaire


n'eût été décapité par l'ordre des Frères du
Roi, Mais le fang dé ce bienheureux Martyr
Hé coula pas en vain. Les Prinçes qui l'avoient
répandu , ne purent réfifter à la force dçs pro^
diges qui accompagnèrent mort de Boni^
la
face. Ils abjurèrent l'infidélité , demandè- &
rent le Baptême. Plufieurs autres, difciples de
Saint Romuald furent aufli martyrifés en Ef.
davoniç , où le Pape les avoit chargés de
.

porter lumière de l'Evangile.


la
Romuald , qui ne favoit plus où loger fes dif-
ciples , bâtit d'autres Monafleres f dont un étoit
près dcParenw>. Il paflà un an dans ce dernier
pour y établir le bon ordre &
la difeipline rcli-
gieufe ; après quoi , il fè retira dans une cellulq
voifine, où il vécut pendant deux ans. Il y
éprouva une teUe féchereffe 7 cjiul ng pouvoit

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S.-ROMUAIB A 3 B Si. 137
pas répandre une feule larme. Il ne quitta pas
pour cela fes exercices de piété; il s'en acquita
p^y^j^
au contraire avec une nouvelle ferveur, efpé-
rant que Dieu récompenfçroit à la fin (a perfé-
vérance. Son çfpérance ne fut point confondue ;
un jour qu'il recitoit çes paroles du Pfalmiile :
/< vous donnerai rimdligmcc , &
vous infiruirai ,
il tout à coup rempli d'un efprit de lumière
fut
& de componction, qu'il pofleda jufqu'à la
mort. Il reçut du Ciel l'intelligence des Saintes
Écritures, &
il expliquoit les Pfeaumes avec une

onction admirable» Il parut en plufieurs occa-


fions doué de l'efprit de prophétie. Il donnoit
des avis diôçs par une fagefle toute divine , à
ceux qui venoient le confulter 5 &
fur-tout à
fes diiciples , qui s'adrçffoient à lui dans leurs
doutes &
dans leurs peines. Jamais ils ne for T
toient d'auprès de lui, fans pénétrés
fe fentir
de joie & de confolation. Corpme il
avoit Ait
périeurement le don des larmes , il penfoit que
les autres l'avoient aufli ; c'étoit ce qui lui lai-

fbit fouvent dire à fes Moines :« Ne pleurez


» pas trop ; çar cela affaiblit -la vue &
la tête. »
U évitoit autant qu'il le pouvoit , 4e célébrer
en public, parce au'il n'étoit point maître d'arr
reter le courts de les larmes en offrant le faint
Sacrifice. Souvent dans la ferveur de la contem-
plation, luiarrivqit d'être ravi en extafe-, ôç
il
de s'écrier dans im viftranfport d'amour : » Doux
» Jefus | Mon doux Jefus Mon ineffable défir!
!

» Ma joie Joie des Anges ! Délices des Saints ! »


!

Et ces paroles enflammées , il les prononçoit i • 1 >

avec une eflufion de coeur infiniment au-deffus


de toute expreflion,
Zélé à faifir tous les moyens de contribuer à
la gloire de Dieu , il quitta Ion Défert pour fe re-

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!}8 S. Romuald, A bbê.
1

tirer dans un autre où îl y auroit plus de bîeïfc


FÉVRIER 7 à *à* re * D aeiffoit en cela par l'avis de plufieurs
1>erfonnes de pieté , du nombre defquels étoit
'Évêque de Pola. UÉvêque de Parenzo , qui
vouloit abfolument le retenir dans fon Diocefe
,
s'oppofa à fon départ , en défendant à tous les
Faflagers de le recevoir dans leurs barques mais :

Évêaue de Pola lui en envoya une qui le con*


duifit à Capréola. Dans le trajet , il calma mi-
raculeufement une violente tempête qui s'étoit
élevée. Arrivé à Bifurcum , il trouva que les
cellules des Moines de ce Heu étoient trop ma-
gnifiques , &
il ne voulut loger que dans celle

d'un Religieux , nommé Pierre. Ce Religieux


qui pratiquoit des auftérités extraordinaires
,
n'avoitpour demeure qu'une cellule de quatre
coudées en largeur. U ne pouvoit fe lafler d'ad-
mirer Tefprit de componôion dont Romuald
étoit pénétré , & il rapporta dans la fuite que
quand ils récitoient alternativement les Pfeau-<
mes pendant la nuit , ce faint homme avoit cou*
tume de fortir plufieurs foi$ de fa cellule , fous
prétexte de quelque befoin j mai$ qu'il avoit re-
marqué que l'unique but qu'il fe propofoit dans
ces fréquentes forties , étoit de s'abandonne*
quelques moments à l'impreffion de la joie in*
térieure qu'il reffentoit , &
de donner un libre
cours à fes larmes , qu'il ne lui étqit pas poflî-
ble de retenir, • ,; '

Il fonda Romuald ayant fait demander aux Comteô


de Ia ? rovince de Marino , un petit terretn pour
rc" ^^fâ
Provint de y b ^ ri f urt Monaftere , ceux-ci , lui laiflèrent la
Marino. liberté de choifir tel emplacement qu'il jugeroit
à propos. U fe détermina pour la Vallée dp
Caftro , comme étant le lieu le plus propre à
l'exécution de fon deflein. Il çft incroyablo

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JL R OM VA ID ] AS B É. 159
combien de convenions dans la Province
il fit

de Marino. Les plus grands pécheurs le ve- février %


f
noient trouver en foule , pour apprendre de
lui les moyens de rentrer en grâce avec Dieu.
Il y en eut un grand nombre , qui , touché*

des inftmttions qu'il leur avoir données , dis-


tribuèrent aux pauvres la meilleure partie de
leurs biens , &
paflerent le refte de leurs jours
dans les travaux de pénitence. Romuald
parohToit parmi eux comme un Séraphin ,
revêtu d'un corps mortel , tant étoit vive l'ar-
deur du divin amour qui enflammoit fon cœur.
Ses difciples ne pouvoient l'entendre parler , 1

fans fe fentir euxrmêmes embrafés du feu fa-


cré qui confumoit leur Maître. Lorfqu'il étoit
en voyage , ou à la promenade avec fes Frè-
res , il reftoit toujours derrière , afin 4e réci-
ter des Pfeaumes ?
§ç de laiffer couler libre-
ment fes larmes.
Notre Saint avoit toujours ardemment dé- 5°» défit
umutyn*
firé de verfer fon fang pour Jefus - Chrift

mais ce défir avoit acquis une nouvelle viva-


cité depuis le martyre de S. Boiriface , 6c celui
de quelques-uns de fes Confrères. 11 ne put
enfin à l'ardeur qui
féfifter le preffoit de
mourir pqur fon Sauveur , &
il s'adrefla aa

Pape , pour demander la permiffion d'aller


lui
prêcher la Fqi en Hongrie ; ce qui lui fut ao D veut al_
cordé, II partit donc avec quelques-uns de fes 1er prêcher u
difciples , <lQnt deux fqrçnt facrés Archevê- **•
ques , n'ayant pas vauju luirinême être élevé
à cette Dignité, Mai$ lorfqu'il étoit fur le
point d'entrer en Hongrie, il fut attaqué d'une
maladie violente , qui recommençoit toutes
les fois qu'il fe remettoit en route. H ne lui
pas difficile de reconnoître que la volont4

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\40 S. Romvald ,'Aëbê:
de Dieu n'étoit pas qu'il exécutât fon defleirtî

JÉVRIER7. Ainfi il retourna à ion Monaftere avec fept


de fes difciples. Les autres fuivirent les deux
Archevêques dans la Hongrie , qui avoit alors
Saint Étienne pour Roi. Ces hommes apofto-
liques eurent beaucoup à fouifrir durant le
cours de leur Million ; ils ne remportèrent
pourtant pas la couronne du martyre , qui
étoit l'objet de tous leurs voeux,

pourîe, bot
R°nuiald de retour, fonda piufieurs^Monafte-
»w Règles. re$ en Allemagne ; il entreprit auili d établir la
réforme dans quelques autres : ce qui lui attira
diverfes persécutions de la part de ceux qui n'ai-
moient ni l'ordre , ni la diicipline. Mais fa ver-
tu lui donnoit tant d'autorité , que les coupa-
bles redoutaient fa préfence. Il n'y avoit pas
jufqu'aux perfonnes les plus qualifiées félon
le monde, qui ne tremblaffent devant lui. line
voulut rien recevoir gratuitement de Rayner 9
Marquis de Tofcane , parce qu'il avoit épou-
- n '

fé la veuve d'un de fes parents auquel il


avoit ôté la vie. Son but, en tenant une pa-
reille conduite, étoit défaire fentirà Rayner
toute l'enormité de fes crimes. Ce Seigneur >
tout fouverain tju'il étoit, craignoit^jufqu'à
l'approche du Saint; & il avoit coutume de

dire cjue rien au monde ne l'intimidoit tant axit


fa prefence. Telle étoit l'impreffion que failoit
t .
fur les plus grands pécheurs l'Efprit Saint dont
Romtiald étoit anifhé. Ayant appris quelque
temps après > qu'un Vénitien avoit obtenu
l'Abbaye de Claffe par des voies fimoniaques
il l^lla trouver aufli-tôt» -L'Intrus , qui ne
voulait point réparer fa faute , & qui d'ail-
leurs cherchoit à s'épargner _ une entrevue
dont les fîmes tpurnçrçi^à fa conftifioa ,

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-

S. Ko MU ALD A B B È. 9 141
rcfolut fe défaire de notre Saint par un
de
Mais Dieu conferva la vie à fon FÉVRIER
aiTaflinat.
7;*
Serviteur par une proteftion dont il lui avoit
déjà donne plufieurs fois des marques fenfi-

bles.
Le Pape ayant mandé notre Saint à Rome,
il fe rendit dans cette Ville , où Dieu releva
Ùl fainteté par plufieurs miracles qu'il lui don-
na la vertu d'opérer. Il y convertit , comme
dans tous les lieux où il avoit paffé , un
grand nombre de pécheurs endurcis dans le
crime. 11 bâtit auffi quelques Monafteres dans B bâtit
le voifinage de Rome , un entr'autres , fur la Monafteres à
^
montagne de Sitrie , où il fit un affez long 001* & .

J
trouva parmi fes difciples un jeu- nage de cctt0
féjour. Il fe
ne Seigneur qui fe Hvroit effrontément aux yuic.
défordres de l'impureté. Le Saint en eut l'a-
me percée de douleur , &
mit tout en œuvre
pour ramener le coupable à fon devoir. Celui-
ci , loin de fe corriger , n'en devint que
plus méchant. Il ofa même
aceufer Romuald
de s'être fouillé par des infamies contraires à
la chafteté. Cétoit une pure calomnie ; mais

elle trouva créance dans l'efprit des Moines »

qui fans autres preuves , condamnèrent le


,

Saint une pénitence rigoureufe , lui inter-


à
dirent la célébration des divins imrfteres, &
l'excommunièrent. Romuald fouffrit cet in-
digne traitement avec patience ; il fe compor-
ta , comme s'il eût été réellement coupable , &
s'abftînt de monter à l'Autel pendant îix mois
conformément à la défenfe qui lui en avoit été
Élite. Mais Dieu ne voulut pas que fon Ser-
viteur reftât plus long-temps dans une humi-
liation qu'il n'âvoit point méritée. Il 1 avertit
dans une révélation , qu'tf ne devoit plus obéir

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141 £ RO MUALD ÀB BÉ; j,

à urië iitjùfte Sentence , & qu'il poûvoit faris


FÉVRIER Pe * ne 'StoUnièr à l'Autel , dont on l'avoit ex-
7.
clus contre toutes les Règles. Le Saint recom-
mença donc à offrir le faint Sacrifice , & il le
fit avec tant dé ferveur la premier^ fois * qu'il
fut long-temps ravi en extafe. Il pafla fept ans fur
la montagne de Sitrie 4 toujours renfermé dans
fa cellule ; & gardant un filencé continuel. Il
portoit Un rude cilice , &
mortifipit fes fens #
en leur refiifant tout ce quipouvoit les flatter.
Il n'admettoit aucun aflaifonnement dans les
herbes dont il fe nourriffoit ; quand on lui &
apportoit quelque chofe de mieux préparé
que ce qu'il avoit coutume de manger i il
1 approchoit du nez pour le fentir , puis di-

foit : » Gourmandife , gourmandife , tù ne ton-


# cheras poirit à ceci : je le déclare une guerre
* perpétuelle* * Il n'eft pas étonnant que les
dilciples d'un tel Maître menaflent la vie la
plus auftere. Ils alloient toujours nu-pieds 9
& montroient par la pâleur de leurs vifages,
. quelle étoit la rigueur de leurs jeûnes. Ils ne
buvoient jamais que de l'eau , à moins qu'ils
ne fuffent malades. Le Saint fit phuleurs gué-
rifons miraculeufes fur la montagne de Sitrie 9
qu'il quitta enfin pour retourner à Bifiircum.
L'Empereur Saint Henri II f qui avoit fuc-
eédé à Othon III ^ ne fut pas plutôt arrivé en
VEmp^axt Ita** e 9 voulut voir Romuald. Il lui en-
Saint Henri, voya donc des perfdhnes dillinguées * pour le
prier de venir à la Coun Ceux-ci eurent
beaucoup de peine à le déterminer à ce voya-
'
ge ; &
peut-être n'en feroiem-ils pas venus à
bout , s'ils n'euflent mis les Moines dans leurs
intérêts. L'Empereur donna au Saint toutes les
marques poffibles d'eftimç & de refpeft. Il 4*«

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S. Rom va ld AèèL 9 14$
leva même ,
lorfqu'il le vit entrer , & lui 1

dit:» Que je voudrais bien que mon ame^y^^^


fit femblable à la vôtre ! » Romiiald ne re-
pondit rien à un compliment fi flatteur » &
garda un profond filence pendant tout le temps
que dura l'entrevue , ce qui jetta toute la Coût
dans un grand étonnement. Le Prince , qui
voyoit bien que ce filence avoit l'humilité pour
principe , n'en conçut que plus de vénération
pour le Saint. Il le fit venir le lendemain dans
un appartement féparé , afin d'avoir la liberté
de s'entretenir tête à tête avec lui , &
de le
consulter fur plufieurs points effentiels. Les
Courtilâns lui témoignoient le plus profond
refpeâ lorfqu'il paffoit devant eux , &
arra-
choient les poils de fon vêtement , afin de
ks conferver prétieufement comme des Reli-
ques. Tant de marques de vénération affligè-
rent fenfiblement Romuald ; &
il feroit repar-

ti fur le champ , s'il n'en eût été empêché.


'

L'Empereur , avant de le congédier , lui fit


préfent du Monaftere du Mont-Amiate , &
k pria d'y mettre des Religieux formés par
ks foins.
De tous les Monafteres fondés par notre du ndaa
Saint, le plus célèbre eft celui de Camaldoli , deCamaidoU.
^^
fitué près d'Arezzo , en Tofcane 9 fur les fron-
tières de l'État Eccléfiaitique , à l'Orient à &
trente mille de Florence , dans une vallée de
l'Apennin. Les fondements en furent jettés en
iooo. Cette vallée fut donnée à Romuald par
un Seigneur, appellé Maldoli ; &
c'eft delà que
le Monaftere a pris le nom de Camaldoli (/).

(/) Caajaldoli eft UAt abréviation de Campe MddoU.

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1 44 S. Ro Ml/ALD Ab Ê è.
,

Le Saint adopta la Règle de Saint Benoît ;


mais il y ajouta de nouvelles obfervances *
*
& voulut que fes difciples fùflent tout à la
fois Hermites &Cénobites. Telle eft l'origi-
ne de l'Ordre , dit des Camaldults. A quelque
diftance du Monaftere , eft l'Hermitage que
fit bâtir le Saint. Il eft fur une montagne toiw

te couverte de fapins, &arroféepar plufieurs


fontaines. La vue feule de ce lieu folitaire
porte Famé au recueillement &à l'exercice
de la contemplation. A l'entrée de cet Her^
mitage , on trouve une Chapelle dédiée à S,
Antoine ; le but que Ton s'eft propofé en la
bâtiflànt i a été que les Étrangers y fiflenf
leur prière , avant d'aller plus loin. On trou-
ve enfuite les cellules des portiers ; on voit à
quelques pas de là une grande Éelife, qui eft
magnifiquement décorée. Au-deflus de la por-
te de cette Églife , eft une cloche dont le fon
fe fait entendre par tout le défert. La cellule
où vivoit S. Romuald pendant qu'il formoit
fon Hermitage , eft au côté gauche de PÉgli-
fc Toutes les cellules font bâties de pierre
&ont chacune un petit jardin , environné d'un
mur , &
une Chapelle où les Hermites peu-
vent dire la Méfie , s'ils le veulent. Il leur eft
permis d'avoir toujours du feu chez eux , à
caufe du froid qui règne continuellement fui*
la montagne. Tous ces Solitaires font gouver-
nés par un Supérieur , qu'ils appellent Majeur.
L'Hermitage eft prélentement environné de
murs , hors defquels ne peuvent fortir ceux
oui l'habitent ; ils ont feulement la liberté de
fe promener dans le Bois de leur Enclos. On
leur envoie du Monaftere fitué dans la vallée ,
tout ce qui peut leur être néceffairç , afin que
rien

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S. Ro MVA'LD ABBÉ. , 145
rien ne de
foit capable ,les diftraire
qu'ils &
ne foient point interrompus dans la continuité
de leur contemplation. Tous leurs moments
font partagés entre divers exercices , ils fe &
rendent à l'Églife pour y réciter l'Office divin
fans que la pluie du la neige puifle les en em-
pêcher. Ils ne parlent jamais dans les lieux
réguliers; ils gardent auffi un filence abfolu en
&
Carême , les Dimanches les Fêtes , les ven-
dredis & les autres jours d'abftinence* Il leuf
eft encore défendu de parler en tout temps
depuis Complies jufqu'à Prime du lendemain.
Saint Romuald établit encore un autre gen-
re de vie parmi fes difciples: je veux dire, ce-
lui des Reclus ; mais on ne pouvoit l'embra^
fer de fon propre mouvement. Il fàlloit en
demander la permiflion ait Supérieur ; ce- &
lui-ci ne Taccôrdoit qu'à ceux qui avoient long-
temps vécu dans l'Hermitage , qui paroif- &
foient appellés de Dieu à une plus grande
perfe&on. Les Hermites qui ootenoient ce
qu'ils avoient demandé » fe renfermoient dan?
leurs cellules pour n'en plus fortir. Ils ne par-
vient jamais qu'au Supérieur , lorfqu'il alloit
les voir , &
au Frère qui étoit chargé de leur
porter toutes les chofes néceiTaires à la vie.
Ils rcdoubloient leurs prières &
leurs auftéri-
tés pratiquoîent des jeûnes beaucoup plus
,
Ircquents &
plus rigoureux , que le commun
des Hermites. Notre Saint vécut de la forte
pendant pluficurs années ; Se depuis fa mort
, on a toujours vu dans le
jufqu'à notre iiecle
Délert de Camaldoli , pluficurs Reclus d'une
ferveur véritablement angélique (g).

{g) L'Ordre des Camaldu- \ les eft aujourd'hui^, divift en


K
146 S. Romvald, Abbé.
Enfin , après tant de travaux &
d'auftérités ;
le Saint alla dans le Ciel recevoir fa récom-
FÉVRIER 7.
penfe. Il mourut dans le Monaftere du Val-
Mort du de-Caftro , qui eft du Marquifat d'Ancone , le
Saint.
,ç vers Fan 1017. Il étoit âgé de 70 ans
& quelques mois ( h ). Sa fête a été fixée par
Clément VIII au7. de Février, jour auquel
fe fit la tranflation de fes Reliques. Son corps
étoit encore entier &
fans corruptions 1466.
Mais des mains facrileges l'ayant dérobé en
1480 , il tomba en pouffiere. On le porta en
cet état dans la grande Eglife de Fabriano. On
tranfporta depuis un os du bras du Saint au
Mqnaltere de Camaldqli. Dieu a honoré les
Reliques de fon ferviteur d'un grand nombre
<le miracles.

Si nous ne fommes point appellés à ta prati-


que de ces auftérités extraordinaires que nous
liions dans l'Hiftoire de tant de Saints , nous
devons au moins mener une vie pénitente &
mortifiée ; & cette obligation eft fondée fur
celle où nous fommes d'expier nos péchés
& dé veiller à la garde de notre cœur. IÎ
riy a qu'une cxaâe tempérance qui puiffe
reprimer les révoltes de la chair , comme il

n'y a qu'une attention continuelle à prévenir
les furprifes des fens
,
qui puiffe les contenir

cinq Congrégations qui ont


, ce avec les Bénédictins. Le P.
chacune leur Général. La vie Hclyotcft porté à croire qu'Us
que mènent les Hcrmites de ne furent pas directement inf-
cet Ordre eft encore fort auf- titucs par Saint Romuald.
terc , quoiqu'elle le foit moins ( h ) Non point de 1 10 ans
que du temps de S.iint Ro- comme le portent les copies
muald. Les Cénobite?, Caraal- de la Vie du Saint que nous
i^ulcs ont plus de refllniMan- .avons aujourd'hui.

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S. ROMUAIH AsÈÈk
> \4fl
dans les règles du
devoir. Ntrtré imagination T
erre d'objets en objets , &
produit en nous féVRIEH
une foiile de cUitraÉtionS ^ui empêchent no-
tre efprit de s'appliquer aux choies de Dieu.
Or , quel autre moyen de la fixer , que la
pratique du recueillement intérieur, dont la
continuité demande des efforts foutenus ? Que
dire de notre volonté , qui; nous entraîne fans
ceffe vers lé mal , &
qui nous fait} éprouver
tant de répugnances poitf la vertu ? Reâifie^
rons-nous fes inclinations perverfes, fi nous
ne luttons contr^elles , &
fi leur impétuofité

n'eft arrêtée par l'exercice habituel du renon-


cement &
dés privations. Ayons foin d'empô-
Cher que tous ces germes de corruption ne fe
développent. 11 en fortiroit un poifon qui
troiibleroit notre tranquillité, & qui auroit
bientôt les fuites les plus fachéufes. On com-
mence par céder fans fcrupule à qiielqiles ten-
tations qui pafoiffent peu importantes : mai*
qu'il eil ordinaire de voir lés petites fautes
préparer la voie au crime Et fi Fon n'en vient
I

pas jufqu'aux derniers excès , n'eft-il pas au-^

moins à craindre que l'ame ne refte enehaînéé


& comme engourdie , dans ùn cercle d'imper-
feciions & de défauts ?

vr
Jv ij

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148 Saint Théodore , M»

LE MÊME JOUR.
S. THÉODORE D'HÉRACLÉE,
SURNOMMÉ
STRATELATE, *

Martyr. »

IL E S Grecs l'honorent parmi ceux auxquels


ils ont donné le titre de Grands Martyrs , tels
que font Saint George , Saint Pantaleon , &c.
Ils ont une vénération particulière pour Saint

Théodore le Straulate{ a). Saint Démétrius


Saint Procope , &
Saint Théodore d'Amafée,
furnommé Tyron. Le Martyr dont nous par-
lons ici , étoit Général des Troupes de LicLnius
& Gouverneur du Pays des Mariandins
qui avoit alors pour Capitale Héraclée du
Pont, Il fàifoit fa réfidence ordinaire dans cette
Ville. Ce fut-là qu'il eut la tête tranchée pour
la Foi
,
par Tordre de Licinius. Son martyre
arriva le 7 Février 319 , félon les Ménées &
les Ménologes des Grecs ( c). Sa fête étoit an-
ciennement d'obligation jufqu'à midi dans TÉ-

( .1 ) C'eft-à-dire , Général lonie de Mégarécns.


d'Armée. (c) On ne doit nullement
(b) contenoit une partie
II compter fur les Aûes grecs de
delà Bithynic, du Pont , & r ocre Saint
,
publiés fous le
de la Paphlagonie. Héraclée % nom d'un certain Augare. Ils
qui en étoit Capitale, étoit font trop vifiblement apocry-
une Ville grecque d'origine , phes , pour avoir quelque au?

ayant été fondée par une Co- torité.

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Saint Théodore, M. 149
glife ( i ) ; on Py honorait le 7 de Fé-
Grecque
vrier qui eft le jour de fon martyre ,
, le 8
février & *
4
de Juin , qui eft celui de la tranflation qui s'é-
toit feite de fes Reliques , peu de temps après fa
mort (*). Le Saint ayant demandé à être en- ,

terré dans le tombeau de Tes Pères , on porta


fon corps à Euchaïtes , qui étoit à une jour-
née d'Amafée , Métropole du Pont. La Ville
dliuchaites devint fi célèbre par les miracles
qui s'opérèrent devant la Châfle de notre faint
Martyr , qu'on changea fon nom en celui de
Tkioàoropolis. La dévotion y attirait un grand
nombre de Pèlerins de toutes les Contrées de
TOrient (/"). Nous lifons dans Zonare dans &
Cédrénus , que l'Empereur Jean I , furnommé
Zémifcès , fe croyant redevable à l'interceffion
de Saint Théodore, d'une viôoke complette
qu'il remporta fut les. Sarrazins , l'an 970, fit
rebâtir avec beaucoup de magnificence l'Églife
«TEuchaïtes , où l'on avoit dépofé fes Reliques
(g). La République de Veniie a une vénéra-
tion finguliere pour la mémoire de cet illuftre

[d) Nous apprenons ceci main ( ad 9. Nov. ) , critique


d'une Novelle de l'Empereur avec raifon ceux qui ont con-
Alexis Comnene , & des Sco- fondu notre Saint avec Saint
lies de Balfamon fur le Nomo- Théodore , furnommé Tyron »
canoa ic Photius , tit. 7. / i Ceci n'a pourtant pas empê-
Thomaflin , 1. 1. c. 7. n. 3. che Fabricius de tomber dans
(*) Les Grecs modernes cette faute ( Bibliot. Graic. T.
ont mis ia fête au 8 de Fé- ?* p* '47 )• Baroniusfe trompe
vrier. toutefois en plaçant à Euchaï-
(/) Nous lifons ces parti- tes les Reliques de S. Théo-
cularités dans le Prcfpiritud ,
dore , furnommé Tyron , en &
€. tSodansZonire, 3. part.
» lui attribuant les miracles qui
Annal. ôx dans Cédrénus , in ont été furement opérés par
/o tc- Zcmifcc Imper. l'interccflion de Saint Théo*
(g) Baronius , dans fes no- dore d'Héraclée.
tes fur le Martyrologe Ro- • ••

K HJ

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ï^o Saint Théo d o re 3 M.
Martyr & étoit le premier Patron de PÉW
; il

février 7
FfcYwmi 8 nTe ^ e $* mt Mate t avant que le corps du
.
Saint É van gélifte y eût été tranfporté (A). On
voit aiuTi à Vçniie la Statue de Saint Théo^
dore fur une des magnifiques colonnes qui
font dans la Place de Saint Marc. Ses Reliaues
font dans PÉglife de Saint Sauveur de la même
yille. Les Hiftoriens de Venifç affurent qu'ek
les y furent apportées de Conftantinople en
1 %6o f par Marc Dandolo. Celui-ci les tçnoit

de Jaçques Dandolo , Général des Galères de


la République, qui Içs avoit trouvées en
1 1 56 , à Mefembne , Ville Archiépifcopale de
}a Romanie.
Voyez Falconius , No*, in Tabulas Cappon,
& M, Jofeph Affemani , in Caltnd, Univerf. ad
8 & 17 Febr. &
8 Jun, Voyez auffi Lubin , Not.
fa Martyr. Rom, p. 283 ; 8f le Synaxaire grec.

(h) Ctttc tranflation ne fe |


Venife. Voyez Bernard
Çt gu« $un autre endroit de | niani , de rtbus Venait , /, ^

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Saint Richard* 151

SAINT RICHARD ,

CE
parmi
Saint régnoit vers le huitième ficelé
Saxons Occidentaux qui s'étoicnt
les
établis en Angleterre. Il fut pere de Wine-
baud , de Guilbaud , & de Walburge , qui
font tous trois honorés comme Saints. Mais ,
foit qu*il eût été privé de fes États par quel-
que révolution ; eût abdiqué volon-
loit qu'il
tairement la Couronne un pèlerinage à
, il fit

Rome , avec fes fils w


inebaud 6c Guilbaud.
S'étant donc embaroué à Hamble-haven , il
aborda fur les côtes de la Neuftrie , d'où il fe
rendit à Rouen. Après avoir fait un affez long
féjour dans cette Ville , ^1 continua là route >
donnant par-tout les plus grandes marques de
piété. Il ne put aller jufqu'à Rome ; il &
mourut fubitement à Lucques , en Italie , vers
Fan 722. On l'enterra dans l*Eglife de Saîrtt
Fridien. Les miracles que Dieu avoit accordes
iU piété de ce Prince avant fa mort r fit ceux
dont il a depuis honoré fes Reliques , lui ont 7

mérité une place parmi les Saints. Le culte


de Saint Richard eft fort célèbre dans la Ville
de Lucques , qui fait fa fete le 7. Février. H
cft suffi nommé en ce jour , dans le Martyro-
loge Romain. ,

Voyez Vie de Saint Guilbaud, écrite


la
par une Religieuse d'Hamdenheim , dans les
Lc3ionts antiqwz de Caniiius , de l'édition de
Bafhage j &
le P. Henfchénius , Fcbr. T.z.p.jo.
• *
iji S. Au G Vi e 3 E. M.-

FÉVRIER 7 .

SAINT AUGULE,
VULGAIREMENT S. Au LE , j

Èvêque & Martyr,


•m

ç
l) Ajnt Augule eft peut-être lé même
que celui que Ton nomme Saint Ouil dans un
carjton de Normandie. Quoiqu'il en foit , on
trouvé fon nom dans tous les Manufcrits du
Martyrolpge attribué à Saint Jérôme. Celui
d'Efternach , qui eft fort ancien ,Uui donne , ain-
fi que plufieurs autres , le titre de Martyr. H
paroît ^voir été martyrifé peu de tçmps après S,
Alban. Il louffrità Londres, anciennement ap-
pelléç Augufla ( a ) , &
non point à York ( b ).
Il eft nommé Augufte &
Augure par quelques
anciens Martyrologiftes. Voyez Chaftelain , p.

(a) C'cfl Aminien-Marcel- Ville ainfi nommée


lin qui nous apprend ( 1. 27 & la Capitale d'Angleterre. Or ,
jl8 ) que Londres portoit an- dit?il , l'Angleterre avoit York
ciennement le nom d'AuguJla. pour Capitale , du temps de
( b ) Hcniçhcnius a placé la domination des. Romains,
mal à propos à York le mar- Mais ce rationnement eû dé-*
tyre de notre Saint. C'cfl le truitpar l'autorité d'Ammien-
mot Aupifia qui Ta induit en Marcellin, cité dans la ootQ
frreur, H s'eft perfuade que U précédente, t.'ît

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S. Tre s ai n , Prêtre 153

FÉVRIER
SAINT TRESAIN,
PR Ê T R F.,

Saint, qui étoit Irlandois J quitta fe


Patrie , &
vint prêcher l'Évangile en France.
Il fut fait Curé de Mareuil-fur-Marne , & mou-
rut dans le lixieme fiecle. On garde fes Reli-
ques avec beaucoup de vénération à Avenay
en Champagne. Voyez fa Vie dans Colgan
& Bollandus.

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,

tj4 S. J s An de -Ma.tM.-jC

if^y^y^y^-^y^y -^y^y^y^Çy^y^y^
VI IL iOUK DE ttvAfER.
SAINT JEAN
DE MATH A
FONDATEUR DE L'ORDRE
DES TRINITAIRES.
Tiré des Balles du Papé Innocent III 9 Jes
Auteurs qui ont écrit la Vu du S'oint y &
princi"
paiement du favant Robert Gaguin , qui fut élu
Général des Trinitaires en 1490. Voycr^ l'Hiftoi*
re des Ordres Religieux par le P. Helyot ; les
Annales Ordinis SS. Trinitatis , Auâore Bon.
Earo 9 Ordinis Minorum , Romae , 1684; la
Règle & les Statuts des Trinitaires , imprimés
en iSjq.

L'An 1315.-
... *

FÉVRIER 8.
g
Saint naquît à Faucon, fur les fron-
tières dela Provence fm le 24. Juin 1169* &
reçut le nom de Jean 4 fon Baptême. Les pa-
rents qui lui donnèrent le jour étoient diftin-
gués par leur noblefle & par leur piété. Sa
mere le confacra au Seigneur dès fa naiflance
par un vœu. Son pere , nommé Euphémius ,
prit un foin particulier de fon éducation 9 &
l'envoya à Aix , afin qu'il y fit fes études , &
qu'il
y apprît tout ce que doit favoir un jeune
homme de qualité. Jean s'appliquoit à profiter

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, .

S. Jean de Matha. 155


des leçons de Maîtres ^mais il
fes différents
avoit une 'toute autre ardeur pour fe perfec-
pêvrieh. $
donner dans la pratique des vertus chrétien-
nes. Il avoit une charité extraordinaire pour
les pauvres ; & il employoit au foulagement
de leurs miferes une partie confidérable de
l'argent qu'il rçcevoit de (a famille , pour four-
nir à des plaifirs innocents. Il alloit réguliè-
rement tous les vendredis à l'Hôpital, Là , il
fervoit lesmalades , panfoit leurs plaies , &
leur procurait tous tes fecours qui étoiçnt en
fon pouvoir*
De retour dam la maifon de fon pere , il
lui demanda la permiffion de continuer fes
pieux exercices ; &
après l'avoir obtenue , il
iê Ktmdans un petit Hermitage qui n'étoit
pas éloigné de Faucon. Son deflein étoit d'y
vivre féqueftré du commerce du monde , pour
ne converfer plus qu'avec Dieu. Il n'y trouva
pas cette folitude entière après laquelle il fou-

piroit. Les fréquentes viutes de fes amis lut


donnant des diftra&ons continuelles , il crut
devoir quitter fa çellulet II alla donc trouver
fon pere f &
le pria de l'çnvoyer à Paris
pour y étudier la Théologie. Euphémius ap-
prouva le deflein <fe fon fils , &
lui permit vo-
lontiers dçrendre dans la Capitale. Jean fit 11 eft reçu

fon cours avec le plus grand fuccès , prit les Do # cur-
degrés ordinaires 9 &
enfin le Bonnet de Doc-
leur f quoique fa modeftie lui infpirât de la
répugnance pour cette forte d'honneur. Ayant
été ordonné Prêtre quelque temps après , il
célébra fa première Méfie dans la Chapelle de
rÉvêché de Paris. Maurice de Sully , qui oc-
cupoit alors le Siège de la Capitale , les Ab-
de Saiqt Viûor &c de Sainte Geneviève ,

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i5<5 S. Jean de Mat h a!
& le Reâeur
<Je PUniverfité, voulurent y
Février» * ^ft^» D leur fut facile de juger, à la fer-
veur angélique avec laquelle le Saint célébrait
l'augufte Sacrifice , que rEfprit de Dieu réfi-
doit en lui avec la plénitude de fes grâces.
Ce même qu'il dit fa première
fut le jour
Meffe que notre Saint , par une rofpiratioit
,

particulière du Ciel , forma la généreufe ré-


solution de travailler à racheter ces Chré-
tiens infortuné* <jui gémiffoient dans Tefclava-
ge chez les Nations Infidèles. Il envifageoit
deux chofes dans cette bonne œuvre ; la déli-
vrance des corps , & lç falut des ames , qui
courent les plu* grands rifques parmi des Peu-
ples barbares. Il ne voulut cependant rien en-
treprendre , avant d'avoir conftilté le Seigneur
d'une manière fpéciale. Ce fut ce qui le déter-
mina à fe retirer dans un lieu folitaire , afin
d'attirer fur lui les lumières de l'Efprit Saint
par une prière fervente &
continuelle , par &
» fe retire
tous ^ exerc î ces de la pénitence. H entendit
^uprisdeFé- parler d'un faint Hermite, nommé Félix de
iix de Valois. Valois, qui vivoit dans ime forêt, proche du

Bourg de Gandelu , au Diocefe de Meaux. Il


l'alla trouver auffi-tôt , &
le pria de le rece-
voir dans fon Hermitage , &
de l'inftruire des
voies de la perfe£Kon. Félix -découvrit aifé-
ment qu'il n'avoit point à faire à un homme
novice dans la vie fpirituelle. Auffi le regarda*
t-il moins comme fon difciple , que comme

un compagnon que Dieu lui avoit envoyé. If


feroit impoflible d'exprimer jufqu'oà nos deux
Hermites portèrent l'efprit d'oraifon , avec &
quel zele embrafferent les plus rigoureufes
ils

auftérités. Leurs veilles étoicnt longues ; &


leurs jeûnes prefque continuels. Leur occu-

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S. J E AN DE M AT n A. I
57
p2tion la plus ordinaire étoit la contempla-
tion ; &
ils n'avoient d'autre but dans tous
février ^
leurs entretiens , que d'allumer de plus en
plus dans leur cœur le feu facré de l'amour
divin.
Un jour qu'ils s'entretenoient enfemble un-
ie bord d'une fontaine , Jean s'ouvrit à Félix
fur la penfée qui lui étoit venue le jour de fa
première Méfie, de fe confacrerà la délivrance
des Chrétiens captifs chez les Mahométans. Il
parla de la fin &
de l'utilité de cette entreprife
d'une manière û vive & fi touchante
, que Félix
ne douta point <p'un tel projet ne vînt de Dieu ;
il en loua l'exécution , & s'offrit même pour
^aMffement
y concourir , autant qu'il feroit en lui. Les des Trùiitai-
deux Saints n'étoient plus embarraffés que fur rc$ -

le choix des moyens qu'il falloit prendre pour


effe&uer le noble défir qui leur avoit été inf-
piré par la charité. Ils fe recommandèrent à
Dieu , &redoublèrent leurs mortifications &
leurs prières , afin d'obtenir de nouvelles lu-
mières fur la conduite qu'ils avoient à tenir.
Quelques jours après , ils fe mirent en chemin
pour Rome. Us partirent vers la fin de l'an
1197 , fans pouvoir être retenus par les in-
commodités d'une faifon rigoureufe. En arri-
vant à Rome , ils trouvèrent Innocent III fur
la Chaire de Saint Pierre. Ce Souverain Pon-
tiïc , ayant été inftruit de leur fainteté & de
leur pieux deftein , par des lettres de recom-
mandation qui lui furent préfentées de la part
de FÉvêque de Paris , les reçut comme deux
Anges envoyés du Ciel , les fit loger dans fon
Palais , &
leur accorda plufieurs audiences
Earticulieres , afin qu'ils lui expliquaient dans
î plus grand détail
9
les rapports. & la nature

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1 5 S S. Jean bE MÀf h à*
f
1

dé leur affembla enfuite les Cafcli-*


projet. Il

l g
naux , & quelques Évêques, dans le Palais de*
'
Saint Jean de Latran , pour prendre leurs avis
fur une affaire de cette importance. Après leurs
délibérations , il indiqua un jeûne des priè- &
res particulières , pour obtenir de Dieu qu'il
manifeftât fa volonté. Enfin ne pouvant dou-^
ter que les deux Hermites François ne fu£*
fent conduits par Fefprit de Dieu , confia &
dérant Futilité cjue FÉglife retireroit de Flrtf-
titut qu'ils avoient projette , il Iç reçut en &
forma un nouvel Ordre Religieux , dont Jean
fut déclaré lé premier Miniflre Général. L'É-
vôquc de Paris , &
F Abbé de Saint Viâor ,
flirent chargés d'en dreflef la Rcrie ; le &
Pape l'approuva par une Bulle donnée en
1198. Le Souverain Pontife voulut que les
nouveaux Religieux portaflent l'habit blanc ,
avec une croix rouge &
bleue fur la poitrine ,
&qu'ils priffent le nom de Frères de f Ordre
de la Sainte Trinité. Il confirma le même InfH-
tut quelque temps après , lui accorda de &
nouveaux privilèges , par une Bulle en date
de Fannée 1109.
Lorfque les deux Saints eurent obtenu ce
qu'ils défiroient , ils prirent cofigé de Sa Sain-
teté , &
retournèrent en France. Le Roi Phi-
lippe Augufïe, devant lequel ils fe préfente-
rent , &
qu'ils informèrent de tout ce qui
s'étoit paffe,
agréa FétablifTemcnt de leur Or-
dre dans fon Royaume , le fàvorifa même&
par fes libéralités. Gaucher III ( a ) , Seigneur

( a ) Aycul de Gaucher V , 1 qui fut Connétable fous Phi-


au:H Seigneur de Châtillon , f
lippe le Bel,

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S. Jean ne Math a. 159
éc Châtillon y leur donna un lieu dans fes
Terres , pour y bâtir un Couvent. Mais cette ^_ rRIER
M a ifon fut bientôt trop petite pour contenir F
tous ceux qui vouloient entrer dans le nouvel
Ordre. Ce fat ce qui engagea le Seigneur de
Châtillon , féconde en cela par le Roi , à
donnera notre Saint le lieu appelle Ctrfroid $
qui étoit précifement celui oîi il avoit concer-
té avec Félix de Valois , le premier plan de fon
Inititut. Il y jetta les fondements d'un Monafte-
re qui a toujours paffé pour le chef «lieu de
FOrdre des Trinitaires ( b ). Jean Félix bâti- Progrès te&
rent encore pluiieurs autres Monafteres en épuration du
vd ° r~
France : tant on avoit d'ardeur pour étendre
une Religion fondée fur la plus pure charité.
^
Us envoyèrent quelques-uns de leurs difciples
aux Comtes de Flandres de Blois , &
à &
d'autres Seigneurs croifés , qui alloient s'em-
barquer pour la Paleftine. L'occupation de ces
Religieux devoit être d'inftruire les Soldats
de prendre foin des malades , de travailler &
à racheter les Captifs. Le Pape écrivit à Mira-
molin y Roi de Maroc , pour les lui recom-
mander. Cette lettre produifit un heureux
effet ; car le Saint ayant envoyé deux de fes
difciples dans le Royaume de ce Prince , en
izoï , ils rachetèrent cent quatre-vingt f\x
Efciaves Chrétiens. L'année fuivante , il alla
lui-même à Tunis, où il en délivra plus de
cent dix. Il fe rendit enfuite en Provence , &
y ramaffa des fommes confidérablcs , qui lui
lervircnt à procurer la liberté à un grand nom-

( b ) Le Monaftere de Cer- 1 gido , cft dans la Bric , fur les


froid , an latin dt Cktyo frï-
, I confins dû Val ais.

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\6o S. Je a if de Math Ai
bre de malheureux oui gémiflbient fous Ici
fers des Maures dTiipagne. Tant de bonnes
FÉVRIER S.
œuvres , opérées par le Saint & par fes dif-
ciples i attirèrent beaucoup de réputation au
nouvel Ordre , & infoirerent depuis à Saint
Pierre Nolafque le délir d'en fonder lui fécond
à peu près fur le même plan.
Notre Saint fit un fécond voyage à Tunis j
en mo. Il «ut beaucoup à fouffnr de la part

des Mahométans , irrités de l'ardeur avec la-


quelle il exhortoit les Captifs à fupporter leurs
maux avec patience , & a mourir plutôt que
de renoncer à leur Foi. Le trait fuivant donne-
ra une idée de la barbarie de ces Infidèles. Lorf-
qu'ils virent le Saint s'embarquer avec les 1 10
Efclaves qu'il avoit rachetés , ils ôterent le
gouvernail du Vaiffeau , & en déchirèrent les
voiles , afin qu'il périt au milieu des flots. Jean
plein de confiance en Dieu , ne perdit point
courage. Il pria le Ciel de prendre la conduite
du Vaiffeau , puis ayant tendu les manteaux
de fes compagnons en forme de voiles , il fe
mit à genoux fur le Tillac , le Crucifix à la
main , chantant des Pfeaumes durant tout le
trajet. L'événement prouva qu'une foi vive
n'eft jamais fans récompense- La navigation fut
très-heureufe , & le Vaiffeau aborda en fort peu
de jours au Port d'Oftie en Italie.* Comme la
fanté de notre Saint dépériffoit fenfiblcment , &
eue fes forces Tabandonnoient chaque jour , il
fut obligé de paffer à Rome le peu de temps
qui lui reftoit à vivre.
Quant au B. Félix de Valois , fon Collè-
gue , il étoit toujours en France , où il travail-
lent avec un merveilleux fuccès à la propaga-
tion de fon Ordre. Ce fut Yffî çe temps-là qu'il
lui

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S. jÊAti DE M AT H À. \6\
lui procura un établiffement à Paris. Le Mo-
naltere fut bâti à Pendroif oii étoit une Cha-
pelle dédiée fous l'invocation de Saint Mathu- iœvrier 8*
rin ; & c'eft de là qu'eft venu le nom de Ma*
thurins aux Trinitaires de France.
Jean de Matha vécut encore deiix ailhées à >j orl ëu
Rome , uniquement occupé à exercer les œu- au"'
vres de miféricorde &
à prêcher la néceffité
de la pénitence. Dieu donnoit urte telle effi-
cacité à fes difcours , que les pécheurs les plu9
endurcis rentroient en eux-mêmes , pre- &
noient une ûncere réfolution de fatisfeire à la
juftîce divine pour leurs iniquités* Il iuccomba
enfin fous le poids de fes travaux de fes auf-* &
tentés , &mourut le 11 Décembre 5 à
mi
J'âge de 6 1 ans. Il fut enterré dans TÉglife do
S. Thomas , où Ton voit encore Ion tombeau*
Pour fon corps , on l'a tratllporté en Efpagne*
Le Pape Innocent XI a fixe la fête de Saint
Jean de Matha , au 8 de Février (c ).

(c) La Règle des Trinitai- leur Règle & leur permit d0


,

res étoit fort dure dans Ton voyager a cheval , de mana-


Institution primitive. Ces Re- ger de la viande & du poif-
ligieux ne dévoient jamais fon , &c ( Voye* l'Hilloire
manger niviande ni poiflon » des Prieurs de Grandmont
ils ne vivoient que de pain t dans V amplijfima CplU&io d*
eTaeurs , de lait , de fromage , O. Marteune
T. 6. p< 138 )«
,

de fruits , d'herbes & de lé- L'Ordre des Trinitaires a en-


gumes, qu'ils afiaifonnoient viron 2$0 Maifons , qui font
feulement avec de l'huile. Si partagées en treize Provin-
cependant quelqu'un leur ap- ces tant en France & en Es-
,

portoit de la viande , ils en pagne , qu'en Portugal & eif


pouvoient manger les jours de Italie. Uy en a voit autrefois
grandes Fêtes. 11 leur étoit dé- 43 en Angleterre , 9 en Écof-
]

fendu de fe fervir de cheval fe , î


&
5 1 en Irlande. Le Gé-

en voyage. Le Pape Clément néral eit élu a Certroid pa*


IV approuva en 1 267 , les mi- le Chapitre de tout f Ordre.
iigauon# qui furent faites a Chaque Maifoncft gouverna*

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i6i S. Jean de Math a*
Saint Chryfoftome relevé ( i ) avec fon élo-
<î uenc1B ordinaire , la
charité de la Veuve de
ilvri'^ R 8
'
Sarepta , que ni la pauvreté , ni fes enfants
ni la faim
y ni la crainte
de la mort même r
ne purent empêcher de fecourir le Prophète
Élie. Il exhorte enfuite tous les Fidèles a riié-

diter les paroles de cette généreufe femme , &


à fe reffouvenirfans celle de l'exemple qu'elte
a donné. » Nous ne pourrons , difoit-il , n'en-
.

» être pas touchés , quelque durs quel*-' &


» qu'inlenfibles que nous loyons. Frappés de
» la conduite de cette charitable veuve 5 il ne
» nous fera pas poflible de refufer <mx fimres
> le foulagement dont ils ont befoin. Vous ma
yp direz peut-être que fi vous trouviez un Pro-
*> phete dans Pindigence , vous lui procureriez

par un Supérieur que Ton la plus grande partie des Mal-»


nomme Minîftre. Ceux des ions , & fur-tout par ce-lie de
Provinces de Champagne , de Cerrroid. Ceux qui la furvent,
Normandie & de Picardie ne portent point dé linge , di-
font perpétuels ; mais ailleurs fent Matines à minuit > & ne
ils font triennaux» La Règle font gras que le Dirnanctte.
que furvent les Trinitaires ,
En 1 594 , le P. Jean-Baptifte
eik celle des Gharioines-Régu- de la Conception introduifît
Kers de Saint Auguitin. Ils parmi les Trinitaires <f £fpa«?
font obligés « chanter r Office ene une r\ étonne encore plus
,

Canonial , dans l'intention fcvere que celle dont ttotu


d'honorer la Très-Sainte Tri' venons de parler. Ùcû cette
nité. La principale fin de leur que fui Vent les Trinitaires Ré-
lhflitut cft de ramaûer les au- chauffés. Ce fervent Religieux
mônes des Fidèles , pour aller effiiya de grandes contradic-
enfuite racheter les Chrétiens tions , pendant qu'il étoit oc-'
captifs chez les Barbares. Cha- cupé à l'exécution de fa pieu-
que Maifon confacre tous les fe entreprife. Il mourui en
ans un tiers de fon revenu à odeur" dé rainteté, en t6tf.
cette bonne œuvre. On éta- On a commencé â travailler
blit une Réforme parmi les au procès de fa Béatification,
Trinitaires en 1573 & rp6.
, ( 1 ) Hem, de Ëliâ&ïîduà
Cette Réforme a été reçue par Sarcyt; T. 3.
f. ;f# f Ei Bm; %

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S. Jean uè Mat HA. i6%
» tous les fecours qui dépendraient de Vous* £&**à*** G

» Mais guoi ? Ert-ce aiie vous ne. voudriez rflvRiER


tf 4

» pas faire pour Jéfus*Chrift , qui eft le Mai-


» tre des Prophètes , ce que vous feriez pour
» un de fes Serviteurs ? Avez * vous oublié
» qu*il regarde comme fait i lui-même , ce qu*
h nous Éufons aux pauvres ? » Ah de quelld
!

confufion ne devons-nous pas être pénétrés


,
iorfque nous comparons notre conduite à celte
des Shunts , c'eft-à-dire , lorfque nous mettons
notre infenfibilité pour les pauvres en con-
traire avec ce zele ardent qui les porta à fe
facrifier pour le foulagement fpirituel &cor-
porel de leurs Fferes malheureux Quitterions*
!

mus les œuvres de charité pour un mot ,


pour une bagatelle , û nous nous rappellions
que les Saints comptaient pour rien les tra-
vaux , les injures , les tourments $ la mort mê-
me 9 loriqu'ii s'aguTçit de rendre iôrvice au

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164 S. ÈtiennedeGrandMont.

FÉVRIER 8.
SAINT ÉTIENNE ,

Fondateur de l'Ordre -

Dp GRAND MONT.
Étienne de Liciaco , quatrième Prieur Je Grand-
mont , écrivit la Vie de ce Saint , en 1/4/, Mais
il paroîtque cet Ouvrage ejl perdu. Girard Ithier 9
feptieme Prieur du , en a fait un
même monaflere
abrégé que nous avons9 dont le &
P. Martennc
a donné une bonne édition ( Vet. Script, am-
pliff. colleâ. T. 6. p. 1043 )• L*$ Remarques

du favant Bénédictin ferviront a corriger les ana-


r
ckronifmes , & les fautes dans le/quelles CAbrl-
viateur eft tombé. Le P. Martenne a publié aufji
-( Ibid. ) plufuurs autres Pièces concernant tHïf
toire de la Vie de Saint Ê
tienne de Grandmons*
Voyc{ encore D. Rivet , Hiftoire Littér. de la
France , T. 10, p. 410 , & le Gallia Chrift.
Nova , T. 2 , p. 646.

L'An 1 1 24.

«Saint Êtien^e étoit fils dupîeux Vi-


comte de Thiers , premier Gentilhomme d'Au-
vergne. Il montra dès fon enfance beaucoup
d'inclination pour la vertu , &
laifla entrevoir le
germe de cette éminente fainteté à laquelle il
parvint dans la fuite. Un vertueux Prêtre , nom-
mé Milon ,
qui étoit alors Doyen de PÉglife
de Paris , fut chargé du foin de fon éducation.
Ayant été élu Évêque de Béaév^nt, ça 1074 %

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& Êtienne deGrandmont. 165
il retint le jeune Êtienne auprès de lui , <&

continua de Finftruire dans la connoiilance de p^VRiFR


s
rÉcriture Sainte , &
dans les voies fublimes
de la perfeâion. Touché du rare mérite de
fon dilciple , il réfolut de l'attacher au fer-
vice des Autels , &
l'ordonna Diacre. Après
la mort de Milon , arrivée en 1076 , le Saint
alla finir fes Études à Rome , où il demeura

Siatre ans. Il lui fembla durant tout ce temps*


,
qu'une voix intérieure lui difoit de quitter
le monde. Les réflexions qu'il fit fur les dan-
gers qui accompagnent la conduite des ames ,
fur la néceffité de mener une vie pénitente

C Y
[•m 1.1
drefla donc au Pape Grégoire VU , & lui de-
manda la permiffion de Hermite > 6c
le faire
de fuivre la Règle d'une Congrégation fort auf-
tere qu'il avoit vue dans la Calabre.
Le Pape lui ayant accordé ce qu'il fouhai-
toit , il revint au Château de Thiers , pour
retraite,
mettre ordre à fes affaires. Il eut de rudes
combats à foutenir de la part de fes amis , qui
s'oppofoient fortement à fon deflein. Ses pa-
rents , qui i'avoient toujours regardé comme
un enfant de bériédiâion que Dieu avoit ac-
cordé à leurs prières, &
qui bien loin de met-
tre obftacle à fes défirs , euflent concouru à
leur accomplifTement % ne vivoient plus depuis
quelque temps. Les afTauts qu'on lui livra , fu-
rent inutiles. Il s'enfuit fecretement , après &
avoir erré de déferts en déferts , il fe retira
fur la montagne de Muret , dans le voifinage
de Limoges. Il y régnoit un froid exceffif , &
elle n'étoit habitée que par les bêtes féroces*
Ce fut en ce lieu que le Saint réfolut de fixer
L i)i

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0

\66 S. ÈtiennedbGrandM.
fa demeure , Se de fe dévouer au fervicc dit
££V{U£R 8f Seigneur , par un vœu {péàaL II exprima ainfi
la confécration qu'il fàifoit de fa perfonne i
» Moi Étienne, je renonce au Démon à fes &
h pompes , je m'offre & me con&cre fans ré*
n fervç au Pere , au Fils & au Saint Efprit ,
,

» qui font un feul Dieu en trois Personnes. »


11 écrivit de Gl propre main PAfte de fon en-*

gageaient Sç le garda toujours avec l'Aaneâu


,

dont il pour fccilçr ia confécration ,


s'étoit fervi
Jl fe fit une efpece de cabane avec des bran»
cries d'arbres entrelacées , pour fe mettre à.
l'abri des injures de l'air , &
y parla quarante-
fix ans dans l'exercice de la prière &
de la pé-
nitence. Les anftérités qu'il y pratiquoiî étoient
extraordinaires , &
pour laplâpart au*teffus de
la foibleffe humaine abandonnée à elle-même*
Il ne fe nourriflbit d'abord que d'herbes de&
racines: mais des Bergers l'ayant découvert
la féconde année de fa retraite , ils eurent la
charité de lui apporter du pain de temps en
temps. Des Paytans du voifinagç prirent en*
fuite la place des Bergers, &C continuèrent de
rendre le même fervice au Saint tant qu'il vé-
cut. Non content de matterfon corps par une
pbftinence très-rieoureufe , il portqit fur la
Chair une haire de mailles de fer , n'ayant
par dèflîis qu'un habit (Tune étofe fort vile ,
qui étoit toujours le même , en Ryver &c en
fué, Lorfqu*il étoit forcé de prendre un peu
f)e repos , il fe couchoit fur des planches ar-
rangées en forme de cercueil. Le temps <ju'il
p'employoit point au travail des mains i il le
paflbit profterné contre terre , &t dans la plus
profonde adoration de ia Majefté divine. Les
ftëliçœ qn'U goutpit 4w Tçxçrçiçç dç la çon»

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S. Érin&yx m GrandM. 167
templation , abforboient tellement toutes les
puiiuuices de (on ame', qu'il étoit fouvent février 8.
deux ou trois jours de fuite fans fonger à
gr. Ce ne fut qu'à Pâge de foixante ans
confeaftit 9 k caufe de Fextrême foibleffe
de fqn eftomac , à mettre quelques goûtes
de vin dans l'eau qui lui fervoit de boiiTon.
Le bruit de fa fainteté ayant attiré plufieurs
perfonnes dans fon Défert , il fut bientôt obli-
**** des
gé de recevoir des difciples. Il les aimoit corn-
me fes enfants, & les gouvemoit avec une
,p

fageffe admirable , qui proportionnoit toujours


les mortiii cations à la force du tempérament.
Dur à lui-même , il n'avoit que de la dou-
ceur pour les autres. Il étoit cependant ferme
iur I'accompliffement des devoirs effentiels à
la vie folitaire , tels que le filence , la pauvre-
té ,& le renoncement à foi-même. Les exhor-
tations qu'il faifoit à :ies difciples , rouloient
principalement fur la néceflité de dégager fon
de toute *ffeâion aux chofes crées. If
avoit coutume de dire à ceux atd fe préfen*
toie*t pour vivre fous fa conduite : » C'eft
»» ici uïie prifon oit il n'y a ni porte , ni ou*
» verture ; & vous ne pourrez en fortir pour
m retourner dans le monde , qu'en y fàifant
» une brèche* Si ce malheur vous arrivok, il
» ne me ferait pas pofTible d'envoyer quel*
» qu'un après tous , n'y ayant ici penonne qui
» nefoit aufll étranger que moi a l'égard du
» monde. Étienne fe regardait comme le deiv
nier,de fa Communauté , fie prenoit toujours
la dernière place. Il étoit ennemi de toutes
ces marques d'honneur qui font attachées à
la Supériorité. Pendant que fes Religieux
étoient â table, il s'affeyoit par terre au milieu

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Ï<Ç8 S. Ètïekne deGrandû.
s d'eux , & leur lifoit les Vies des Saints. Dfeit
récompenfa cette humilité du don dé pfophé-*
1ER
F*"
^ ?
&
de celui des miracles. Mais Jparmi tous
tie
les prodiges qu'il opéra , il n'en point de m
plus furprenant que la converfion d'un gttnd
nombre de pécheurs endurcis. On eût dit qu'il
étoit impoliible de réfifter à la grâce qui' ao-
çompagnoit toutes fes paroles.
Cependant la renommée publioit de plus
en plus l'éminente fainteté d'Étienne. Deux
Cardinaux envoyés en France en qualité do
iuftvîfitcLécats ( a) . fe rendirent à fon Défert pour

JJL
*" "
Jui faire une vifite. Ils lui demandèrent dans
* '
l'entretien quHls eurent avec lui, quel étoit
fon genre de vie ? Êtes-vous , lui dirent-ils ,
Chanoine , Moine , ou Hermite ? Je ne fuis
rien de tout cela , répondit le Saint. Et com»
fne on le preffoit de s'expliquer clairement , il
parla ainfi:» Nous fommes de pauvres pé-
}> cheursf que la miférieorde de Dieu a coiît
» duits dans ce Défert pour y faire pénitence.
» C'eft le Souverain Pontife qui , conformée
» ment à la prière que nous lui en avions fai~
h te f nous a lui-même impofé , pour l'expia*
» tion de nos péchés, les divers exercices <jue
^ nous pratiquons ici. Nous fommes trop 4m»
» parfaits &
trop fragiles pour avoir le couw
h rage d'imiter la ferveur de ces faints Her~
» mites que la contemplation unifiait à Dieu
# d'une manière fi intime fi continue
,
qu'ils &
p oublioient les befoins de leurs corps. Vous
p voyez d'ailleurs aue nous ne portons ni
'
- - >
.

( * J
yn de ces Cardinaux |
nom 4'Jnnocent H,
fut Pape jlans la fuite fous le]

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S. ÉtiennedeGrandm. 169
Phabit de Moines , ni celui de Chanoines.
* Nous fommes encore bien plus éloignés d'en février 9
» prendre les noms , puifque nous n'avons ,
» 9 ni le caraâere des xuis , ni la fainteté des
«* autres. Encore une fois nous ne fommes que

» de pauvres pécheurs , .qui , effrayés de la ri-


>* gueur de la juftice divine , travaillons avec
n crainte & tremblement à nous rendre Jefus-
y> Chrift propice au grand jour de fes vengean-
» ces. » Les Légats quittèrent le Saint , péné-
trés de vénération pour fa perfonne , & fort
édifiés de tout ce qu'Us avoient vu & en-
tendu.
Huit jours après leur départ , Êtienne fut aver-
tipar le Ciel qu'il touchoit à la fin de fa courfe. *

$ a ^ortj
Ce fût pour lui un motif de redoubler de fer-
veur dans tous fes exercices. Étant tombé quel-
que temps après dans la maladie dont il ne
devoit point relever , il employa le peu de
moments qui lui reftoient à fortifier fes difci-
ples dans leur vocation , &
à leur infpirer une
tendre confiance en Dieu. Il leur parla d'une

manière fi vive & fi touchante , qu'il les déli-

vra de l'inquiétude oit ils étoient de ne favoir


4que devenir après fa mort. Il fe fit enfuite
porter à PÉglife , où il entendit la Mefle , &
reçut les Sacrements de l'Extrême^Ohffion &
de FEuchariftie. U mourut le 8 de Février, j
j j 24 , en répétant ces paroles : Seigneur 'c remets
mon ami entre vas mains. Il étoit âgé de près
de 80 ans (£). Ses difciples l'enterrejent fe-

( b ) D mourut dans la qua- 1 laume Dandina , Écrivain


rwate-fixieme année après fa exaft qui a donné une Vie
,

retraite , au rapport de Guil- 1 de Huçues 4e Lacerta . cèle*

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ijp . S. ÈTitNNB m Grande.
ereteœent, pour éviter la trop grande ^Buen*
ce du peuple* Mais Ja nouvelle de fa mort ne
fe fut pas plutôt répandue 9 qu'on accourut en
foule à foa tppifceau , ou il s'opéra beaucoup
de awactes* Quatre mois après &
mort , les
Moines d'Amba*aç , Prieuré dépendant de l'Ab-
baye de Saint Augultin de limoges , de l'Or-
dre de Saint Benoit , prétendirent que Muret
leur appartenait , &
le réclamèrent. Le$ difci-
pie* d'&ienoe , oui avoient hérité de l'efprit
êc des maximes de leur bienheureux Maître ^
awperent ?ûmw céder le lieu de leur réfidence,
que de s'en faire affurer la poffeffion par les
voies de la Juftice.' Ils fe retirèrent donc dans
le Détvrt de Grandmont , qui eft à une lieue
de celui deMuret , emportant ayec eux les
précieufes Relique de leur (aint Fondateur.
C'eft de-là que leur eft vew le nom de Grand-
mom'ms. Sajnt Étienne fut jeanonifé par le Pape
Clément Ifl en j 1 89 , è i* feUicitation d'Henri
II % Roi d'Angleterre ( 1 ),
JU ferveur des premiers difciples de Saint
ttieroie de Grandmont faifoit l'admiration de
tous ceu* qui les coiwoiflbient. Pierre de
~ " îUoit des Anges , &
difok qu'il
1

1 mm i. m i m ~ i m

Ire parmi les premiers difei- diftnt que notre Saint n'avoie
ples do notre Saint. On peut que douze ans lorfqu'il alla à
voir cette Vie dans le P. Mar- Bcnévent. U aurait du dire
tenne , Vtt. Script, amplijpma qu'il avoit cet àee en arrivant
Colltcl. T. C. p. a*)]. Ceci a Paris , d'où Une forrit que
pofé , il faudroic placer la re- pour accompagner Mi Ion ,
traite de Saint Étienne au plu- nommé à r&vicbé de Béné-
tôt en 1078 , & reculer la vent. Voyez D. Martenne »
fondation de fan Ordre, que lec. cit. p. #0/
cuelquas-uns mettent en 1076.
Gérard Ithier fe tromne en 2. p.

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S. Êtienne de Gr andm. 171
evoit une entière confiance à leurs prières (2).
Jean de Salisbiiry , Auteur contemporain , les
j£vrier 8«
représente comme des hommes extraordinai-
*

res , qui , s'étant élevés au-defllis des chofes


lenfibles f avoient dompté leurs partions &
lanaturç elle-même ( 3 ), Êtienne , Êvêque de
Tournay , leur donne aiuTi les plus magnifi-
ques éloges ( 4 )• Il nous feroit aifé de multi-
plier ici les glorieux témoi
ngnages qui ont
*
isàleur vçrtu(c).

(l) P«r. CtlUnf. Ep.S. : compilation qui aura


Jo«, Sarisb. Poly, U 7. été rédigée par quelqu'un de
fes fuccefleurs. S'ils euffent

( 4) Stepk. Tornac, Ep. z. un peu plus approfondi cette


MTrirheme, Yepcz,* matière , ils ne fe feroient pas
leMire , ont prétendu que S. Û facilement déterminés à cm-
tueane avoit compofe fa Re- brafTcr cette opinion ils -, &
gis fur celle de Saint Benoit. auraient vu que les paflages
Le P. Ma bi lionavoit aufii mêmes qu'ils citoient pour
adopté d'abord ce fentiment eux , leur étoient tout-à-fait
contraires, P'ailleurs Saint
( riii Prmfu. in part, s* cc - f
<• Bcud. ). Mais il le quitta Étienne fe donne pour l'Au-
«fiûute , & prouva ( Annal. teur de la Règle qui porte fon
&*ti. I. €4. m. 17. & ttz. ) nom ; fie cela en plufieurs en-
*K It fi'mt Fondateur de Or- 1" droits ( Pnl. c. 9. tt. 14 ). On
dre 4e Grandmont n'avoir fui- peut voir fur ce fujet l'addi-
vi ni la Règle de Saint fie* tion faite par le P. Martennc
soit , de Saint Au,
ni celle aux Annales de l'Ordre de S.
guftia. Ce point 4e critique Benoît , T. 6. 1. 74. n. 91.
tû fort bien traité dans la n La Règle de S. Êtienne de
Préface que D. Marteane a Grandmont efl divifée en foi -
mue a la tête de fâ Collection xante-quinze Chapitres. Elle
4« anciens Écrivains ( vid. T. çû précédée d'un Prologue
&cf ), H*lyot,Bail- ou d'une Préface , dans laquel-
kt &c. ont foute n u fans fon-
, le le Saint rappelle à fes difei-
dément que Saint Etienne n'a- ples que l'Évangile cft la Rè-
«oit jamais rien éçrit , Ôç que gle des Règles ,
l'origine de
U Règle qui porte fon nom toutes celles qui s'obfcrvent
a'ttojt autre chofe qu'une dans les Monafleres, fie la

compilation des maximes qu'il vraie fource où l'on doit pui-


modquptt , 8c des di ver fes ob- fer les moyens d'arriver à la
servances qu'il faifoit prati- perfection, 11 leur

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17* Saint Paul , E.

LE MÊME JOUR,
SAINT PAUL,
Évéq'ue de Verdun.
SÀ i NT P au L naquît dans cette partie de
la France , que l'Auteur de fa Vie appelle infé-
rieure Il vécut d'abord dans le monde , d'une
manière très-édifiante , travaillant à fe fan£ti-

de la pauvreté fit l'obcifTance crples après ta mort. On les


iqu'il dit être le fondement de imprima à Paris en 1 704, avec
la vie religieufe il leur dé-
*, une traduction françoife. Bail-
fend de recevoir de rétribu- let en publia une nouvelle tra-
tions pour leurs Méfies , 8c duction en 1707. On admire
d'ouvrir aux féculiers la porte dans ces Inftruftions la beau-
de leur Oratoire les jours de té & la fécondité du génie.
&
Fêtes de Dimanches,dc peur Elles contiennent aufli d'ex-
qu'ils ne prennent de là occa- cellentes chofes fur divers
fion de manquer aux Offices points de Morale , comme
de leur ParouTe. U leur dé- fur les tentations , kl vaine
fend aufli, toutes fortes de pro- gloire , l'ambition , la dou-
cès ( c. 15. V. Chaitelain , ceur du (ervice de Dieu, lai
tfot. fur U Martyrol, p, ff9 ) ,
néceflîté de tendre à la per-
& l'ufage du gras même en, fection , &c. U pourroit ar-
temps de maladie. Il leur pref- river que quelqu'un des difei-
crit des jeûnes rigoureux pour ples de notre Saint eût fait
la plus grande partie de l'an- des additions au Recueil édi-
née &c. Urbain IU approu-
y On
fiant dont nous parlons.
va cette Règle en 1186. Elle trouve encore quelques Maxi-
fut mitigée pâr Innocent IV mes de Saint Étienne dans la
en 1 247 , Ce par Clément V plus ancienne de fes Vies ,
en 1 309. Elle a été imprimée intitulée : 5. Suphani dïcîa 6*
à Rouen en 1672. fa£U* Cette compilation a
Outre cette Règle, on a pour Auteur Étienne de Li-
encore plufieurs Inftructions ciaco. Voyez le P. Martennc,
de Saint Étienne , lesquelles loc. cit. F. tf. p • .

ont été recueillies par fes dif-

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Saint P a u l, E. 173
par
fier jeûne le , la prière , la douceur , la cha- -'

me & pratique de
, la toutes les autres vertus févriers.
chrétiennes. Il le retira enfuite parmi les Her-
mites des Vôges , du côté de Trêves. Après
avoir demeure quelque temps autour du Mont
Gebenne , qui depuis a été appellé , de fon nom,
Paulberg , ou Posbtrg , il embraffa la vie monafti-
Îie dans l'Abbaye de Tholey , au Diocefe de
rêves ; mais on le tira de fa Solitude pour l'é-
lever fur le Siège Épifcopal de Verdun. Il re-
nouvella toute la face de ion Dioçefe , que plu-
lieurs abus avoient défiguré. Les Rois Dago-
bert , &
Sigebert fon fils , avoient pour lui une
eftime finguliere. Il étoit lié d'amitié avec tout
ce que la France comptoit alors d'Évêques cé-
lèbres par leur fainteté. Il mourut en 63 1 , &
fut enterré dans FEglife de Saint Saturnin , qu'il
avoit fait bâtir à Verdun , & qui depuis a pris
fon nom.
Voyez dans Henfchénius , la Vu de S. Paul f

écrite avec beaucoup de par un Ano-


fidélité

nyme , & rHifloirc de Lorraine far ff ê Calmée p


T. 1 l. 9* n. y , p. 4Wt

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174 SÀ I NT C V t H M ANè

SAINT CUTHMÀN ,

CÈuit
Saint , iflu du Sang des Àrtglo^Sajtorts , ftà*
dans la Partie méridionale de TAngleterre
a ). Ses parents le formèrent de bonne heure
la piété ; &c il fe fit dès FenfaAce un devoir
de leur obéir avec la plus parfaite ponâualité.
Sa première occupation fut de garder les trou-
peaux de fort pere ; &
il la fanâifia par une

prière continuelle. L'habitude cjirtl avoir con-


traâée d'être toujours uni à Ûieu, purifia tel-
lement toutes fes affeôions , qu'il ne tenort
plus à h terre. Sa prière étoit d'autant plus et»
ficacc, qu'elle avoit pour fondement l'eforit de
fimplicité, d'abnégation, de douceur, dTiumi-
Uté &d'obéiflànce. Aprèsla mort de fon pere , il
pourvut par le travail de* fes mains , à la fub-
fiftance de fa mere qui étoit fort âgée ; il rie rou-
Î;it pas même de mandier pour avoir de quoi

'affifter ; ce qui l'obligea 3é changer fowVerit de


demeure. U fouffrit en efprit de pénitence , tout
ce que fon état avoit de pénible &
d'humiliant.
Étant à Staninges , il y bâtit une petite cabane
pour s'y loger avec fa mere. La vie qu'il y mena
étoit plus angélique qu'humaine. A peine eut-il
achevé fa cabane , qu'il tj-aça le plan d'une
Églife , à laquelle il fe mit aufli-tôt à travailler.
Lés habitants du pays, touchés de fa piété 6c
de fon zele , lui fournirent de quoi exécuter

(a) Bollandus conjeflure du pays de Galles ou de La


mai? fans fondement, que no- Province de CornouaiUe.
tre Saiat fortoit cfes Bretons

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Saint Cut m m an. 175
fon projet. Le faim homme
travaSloit tout 1©
jour , 6c donnoit à la prière un* partie confxlé-
jtvftilRf;
rabie de la nuit. » Seigneur , di oit-il , cVit ia te 1

» lien de mon repos , cet t ici que je viendrai


» chaque jour vous rendre mes hommages. >
Dieu glorifia fon Serviteur p-? un grand nombre
de miracles , tant de fon vivant , qu'après fil mon.
Les Reliques de Saint Cuthman étoient au-
trefois honorées à Staninges. On en tranfporta
une partie à FAbbaye de Fécamp , en Norman-
die. Saint Édouard le Confeffeur , donna Sta-
ninges à cette même Abbaye ( b ). Saint Cuth-
man anciennement premier Patron de
étoit
Staninges Eftaninges. On trouve fon nom
ou
dans fan ci en Miffel dont fe fervoient les An-
glo-Saxons , avant la conquête de rAngleterre
par les Normands ( c ). tfîckes compte la châfle
de Saint Cuthman parmi çeiles que les Anglois
vénéroient avant leur féparation de l'Églife
Romaine. Notre Saint tii honoré en ce jour
à Fécamp , &
dans la plupart des Abbayes

(rCette donation, ainfi


) parlant de celles de Staninges
que celle de Ryc , de Be r i- oc de Rye , qu'elles font firuées

m unfter &
de pl ui îeurs autres
, en Angleterre. Il ne faut pas v
lieux voi uns , faite à l'Abbaye comme font quelques Auteurs,
de Fécamp, tut confirmée par prendre Haftings , fameux
Guillaume le Conquérant , fie Port de mer dans la Province
par Henri I& Henri II Rois , de Sufîex , pour le Staninges
d'Angleterre. On voit encore de Fccamp , qui n'eft autre
les Chartes de ces Princes dans chofe que le Bourg de Ste-
les Archives de l'Abbaye. Les ning , fitué dans la même Pro-
ParonTes de Staninges & de vinec.
Rye étoient de l'exemption ( c ) On garde ce Miffel à
ée Fécamp ; fie loifque les Bul- l'Abbaye de Jumieges. On y
les des Papes font le dénombre- trouve au 8 de Février une
ment des Paroiffes qui jouif- Meffe propre pour la tète de
foient du privilège de cette Saint Cuthman.
, elles difent
* •
, en
^
A *# * *

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176 Saint CVth maS\
de Bénédiôins qui font en Normandie.
FÉVRIER 8 *
*fi,Yiu*A
Voyez & Sanciis qm inAngliA
mm^atm , que Hickes a publiée dans fon
'Thtfaums Linguarum vcttrum Scptentr. 7*. /, in
Dijfert. Epift. p. 121* Voyez auffi dans Bollandus
deux différentes Vies de Saint Cuthman , 6c les
Leçons du Bréviaire de Fécamp , qui font fort
exaftes.

IX 10 VK

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'
Ste. Apollo nie 3 V. 177

/AT. /0£^A DE FÉVRIER.


Ste. APOLLONIE,
VIERGE ,

& piufieurs autres Saints Martyrs.


F&yt[ la Lettre de Saint Denys £Alexandrie ;
rapportée par Eufebe y l. 6. c. 4/ 6» 42 ,p. 2j<f,
Exiit. Valef. Les ASes que nous avons de Sainte
Apolio nie méritent peu de créance. On y lit qu'elle
fut martyrifee a Rome ; ce qui ejl faux y puifquelle
foufrit à Alexandrie Voye{ TUlemont y T. 3. p.

L'An 24p.
"
J^l OUS lifons dans la lettre de S. Denys
'
d'Alexandrie à Fabius , Evêque d'Antioche ,
le détailde ce que les Chrétiens de la premie- FÉVRIER 9.
re Eglife fouflhrent à la fin du règne de Phi-
lippe. Voici comment le feu de la persécution
s'alluma. Un Poète d'Alexandrie , qui fe van-
toit de prédire l'avenir , fe fervit du prétexte
de la Religion pour animer le peuple contre
les Chrétiens. Les Idolâtres fe faifirent d'abord
d'un vénérable vieillard , nommé Métras , ou
Métrius , qu'ils voulurent obliger à blafphê-
mer contre le vrai Dieu. Mais fur le refus
qu'il fit d'obéir , ils le battirent à coups de M-
ton y lui piquèrent les yeux avec des rofeaux
M

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178 . Ste. Apollon je 3 K
pointus , &le lapidèrent dans un des Faux-
bourgs où ils Favoient traîné. Us menèrent
cnfuiteune femme chrétienne , nommée Quin-
'"

ta , dans un de leurs Temples , & la preflerent


d'adorer l'Idole. Voyant qu'elle le refufoit avec
horreur , ils la lièrent par les pieds , la traî-
nèrent fur les pierres , la meurtrirent de
coups , &lui firent fouffrir le même genre de
mort qu'à Métras* Toute la Ville étoit dans la
confufion. On couroit avec fureur chez les
Chrétiens , que l'on arrachoit avec violence
de leurs maifons. On les dépouilloit de leurs
biens , dont la perte les touchoit peu., par-
ce qu'ils n'y étoient point attachés. Leur conf-
iance dans les tourments égaloit leur définté-
reflement , & il n'y en eut pas un feul qui

renonçât Jefus-Chrift.
Parmi les Fidèles qui furent arrêtés , étoit
une Vierge , nommée Apollonie , que fon grand
âge & fa vertu rendoient également refpe&a-
ble. On lui caffa les dents par la violence des
coups qu'on lui déchargea fur le vifage. On
alluma enfuite un grand feu hors de la Ville f
& on la menaça de la jeter dedans , fî elle
refufoit de proférer certaines paroles impies. La
Sainte demanda quelque temps , comme pour
délibérer fur le parti gu'elle avoit à prendre ;
ce qui lui fiit accorde. Mais on ne l'eut pas
plutôt laifTée en liberté, que , pour convaincre
les persécuteurs que fon facrince étoit pleine-
ment volontaire , elle fe jeta elle-même au
milieu des flammes , où elle rendit fon ame
au Seigneur. Les Païens s'étant auffi faifis d'un
faint nomme , nommé Sérapion , lui firent
d'abord fouffrir dans fa maifon les plus horri-
bles tourments. Enfin après lui avoir brifé les
*es & dHlodlié les 0s ê ih le précipitè-
rent du haut de la màifon-fur le pavé de la février*.
nie , où il confomma fon martyre. Ùne guerre
civile cpi s'éleva parmi les Païens , mit fin à
la pérfecution ; maU jeUeJ&r rtdluma en 150,
par Tordre de Decç* r .

Onvoit à Rome une Églife fort ancienne


qui porte le nom de Sainte Apollonie 4 qu &
la dévotion attire un grand concours de Fi-
,,

dèles. Il y a aûfli dans piûfieufs endroits de


l'Occident des Églifes &
des Autek dédiéi
fous l'invocation dé la même Sainte,

Nous n'avons garde de propofer k Pimfc


tarion des Fidèles , la iriaraêre dont notte Sainte
termina fa vie. Rien ne fera jamais difparoî-»
tre l'énonnité du Suicide volontaire* Si lej
Pères ont loué le courage dé Sainte Apollo*
nie, c?éû qu'ils, préfumoient avec Saint Au*
guflin, qu'elle avoit agi par une infpdratioo

adion étoit l'effet d'une pieufe fimplicité qui


avoit pour principe la ferveur du zele de la &
charité. Encore une fois , c'eft un crime hor-
riblede concourir à fa propre deftruftion. Nous
pouvons cependant voir arriver avec plaifii: le
moment de notre mort , Ibrfque Dieu nous
éprouve par la pérfecution. Ce fut ainfi <jue
les Martyrs , embrafés du feu de l'amour divin
fc réjouirent de verfer leur fang , afin d'être

unis pour toujours au fouverain bien. Que


Fon apprécie d'après ces maximes, le prêtent
duheroîfme des PaïenrGrecs Romains, qui &
fe donnoient la mort , pour s'affranchir des

miferes temporelles ; &


l'on comprendra qu'un
grand cœur fe déshonore en ne l ant rc
?y
&
jj^

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i8o Ste. 'Apollon ie , V.
face aux revers , & que ïïiéroïfme du cou-
rage confifte , non à de l'état de
fe tirer
t
fouffrance ou d'humiliation , mais à y mon-
*

trer une ame intrépide &


fupérieure à tous
les coups de l'adverfité. D'ailleurs la vie eft
un bien dont Dieu nous a faits les dépo-
fitaires , & gu'il veut que nous gardions
jufqu'à ce qu'il nous le redemande. La quit-
ter fans fon ordre , c'eft un attentat con-
tre fes droits les plus facrés. Ajoutons à cela
que l'homme, en qualité de membre d'une fa-
mille & de la fociété , doit par fes fervices
contribuer au bien être de l'une &
de l'autre.
Il viole donc , en fe donnant la mort , les loix
de la juftice & de la charité. Il y a plus en-
core ; c'eft que l'homme qui fe rend coupable
de Suicide, commet un crime énorme contre
la charité qu'il doit effentiellement avoir pour
lui-même, puifqu'en portant une main auda-
cieufe fur fon corps , il précipite fon ame dans

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S.' Ni cép MO re ;M. ifri

FÉVRIER
SAINT NICÊPHORE, 9.

Martyr.
Tiré dé fis A3es finarts. Voyt[ D. Rmnartf
p. 244 ; & Tdltmom, T. 4. p. i-j.

L'An 260.

L y avoît à A mioche en Syrie un Prêtre ;


nommé Saprice, & un Laïque, nommé Ni-*
céphore , qui depuis plufieurs années , étoient
,

unis par les liens de Pamitié la plus tendre.


Mais l'ennemi des hommes ayant mis la difcor-
de •entr'eux , la haine fucceda à l'amitié,. âu<
point qu'ils évitoient l'un &
l'autre de fe reH-<
contrer dans les rues. Ceci dura un temps con- ;

fidérable. A
la fin cependant , Nicéphore ren-
tra en lui-même ; il featit toute l'énormité de
fon péché , &
réfolut de prendre Jes moyens <

de fe réconcilier avec Saprice. Pour cet effet


il pria quelques perfonnes de confiance d'aller:
le trouver ae fa part , pour l'aflurer de la fin--
cérité de fon repentir , &
du deffein oit il étoit
de lui feire toutes fartes de fatisfaâions. Mais
ces démarches furent inutiles. Saprice ne vou-
lut point entendre parier de reconciliation.
Nicéphore ne fe rebuta point; il fit une fécon-
de, puis une troifieme tentative , mais tou-
jours fans fuccès. Saprice ferma opiniâtrement :

l'oreille , non feulement aux follicitations des


hommes, ma^s à la voix même du Sauveur
qui lui crioit : Pardonner , 6» on vous pardon,"
Miij

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f8i S. Ni ci fi #6 n e^M^
' 1
ntnu Enfin Nicéphore voyant —qu'il n'avoît
FÉVRIER 9 P
u r* en obtenir par l'entremife d'autrui , alla
'
lui-pêmettouverSaprice.- Ilfe jeta à.fts.pieds,
lui avoua fa faute avec humilité , &
le pria au
nom de J. C. de lui .pardonner. Cette dernière
démarche ne réuflît pas plus que les précédentes.
.Cependant, la persécution s'alluma en 260 ,
par les ordres, de Valérien &
de Gallîen. Sa-*
price fut arrêté &c conduit devant le Gouver-
neur > qui d'abord lui d^a^anda fon nom. » Je
tf m'appelle SapricëYrépondit*il. Le Gouver-

» neur ; Dç quelle profeffion êtes-vous ? Sa-


H price : Je mis Chrétien. Lé Gouverneur :
» Êtes-vous Eçcléfiaitique ? Saprice: TaiHion-
nneur d'être Prêtre. Nous autres Chrétiens,.
h ajoutait-il , nous jrecdnnoiflbnspour Seigneur
h &pour Maître Jefus-Chrift , qui eft Dieu >
M&Je feul véritable Dieu , qui a créé* le
^Ciçl &
la terre. A l'égard des Dieux destNa-
étions, ce ne font quç des Démons. » Le Gou-
verneur irrité de cette réponfe, ordonna qu'on
le mît dans une machine faite en forme de vis
de preffoir, que les Tyrans avoient inven-
té* poiu* tourmenter les Fidèles. Saprice fouf-
frit cette horrible queiKon avec beaucoup de
confiance. Il difoit au Juge : » Mon corps eft
» çn votre pui (Tance ; mais vous n'en avez au-
»<çunç fur moh ame. Il n'y a que JefusXhrift
* mon Seigneur qui ën foît te Maître. Le Gou-
».verneur voyant qu'il nç gagnoit rien , pro-
»nonça cette Sentence: » Sapricç , Prêtre Jes
» Chrétiens, 6c ridiculement entêté de Pçfpé-
» rance de reffufriter, fera livré à l'Éxéçuteur
»<de la Juftçe, pour avoir la tête tranchée, en
» punition du mépris qu'il a fait paroître pour
h l^dit des Empereurs
-

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. S. i\T/ cèph6re 9 M. 183 j
S ap rice entendit prononcer fa Sentence avec »

joie , & fe hâta de fe rendre au lieu où eUe février 6.


devoit s'exécuter , dans l'efpérance de rece-
voir la couronne du martyre. Nicéphore l'ayarçt
iii , courut au-devant de lui , &
vint fe jetej
à fes pieds , en lui difant : » Martyr de Jefus-
» Chrift, pardonnez-moi la faute que j'aicom-
» mife contre vous. » Mais Saprice ne lui rç-
Kndit rien. Nicéphore s'étant relevé , alla
Rendre dans une autre rue par ou il devoit
pafler. tx>rfqu'il le vit approcher , il fendit Ja
preffe, & le jettant une féconde fois à fçs
pieds, il le pria encore de lui pardonner la
faute qull avoit commife, plutôt par fragilité,
que par un deffein formé de l'offenfer. » le
» vous en conjure , difoit-il , par cette glorieu-
* £e confeffion que vous venez de faire de la
» divinité de Jefus-Chriit. » Saprice , dont le
cœur s'endurciflbit de plus en plus , ne vou-
lut pas feulement le regarder. Les Soldats , laf-
.

£és d'entendre toujours Nicéphore répéter la


même chofe , lui dirent: >i Nous n'avons jamais
» vu un homme plus infenfé que toi ; il va
» mourir , & tu lui demandes pardon. Quand
on fut arrivé heu du (upplice Nicéphore
g>u ,

revint à la charge, & redoubla fes prières


avec une ardeur toute nouvelle. Mais Saprice
n'écouta rien, &
perfifta dans le refus qu'il
avoit fait jufqu* alors de pardonner. Il e^fut
bientôt puni de la manière la plus terrible;
car Dieu le priva de la Foi & de la gloire du
martyre. En eiflfét , les Bourreaux lui ayant dit
de fe mettre à genoux pour recevoir le coup
de la mort, il leur répondit : » Et pourquoi
» nie couper la tête } Ç'eft , repartirent les
» Bourreaux , parce que tu ne veux pas facri-
i9a S. Xjcéphore,M.
» fier aux Dieux , & que tu refufes d'obéir
* aux ordres des Empereurs pour Pamour de
FÉVRIER 9. ,

» cet homme que l'on appelle Chrîft. » L'infoN


*

» tuné Saprice leur dit : » Arrêtez , mès amis j


» ne me donnez pas la mort; je ferai ce que
fp vous voudrez ; je fuis prêt à facrifier. »
'
Ni céphore, qui étok préfent , reflentit la plus
vive douleur de fon apoftafie. » Mon frère 9
» $*éeria-t-il , que faites-vous } Âh gardez-vous
» bien de renoncer J. C. notre bon Maître. »
Mais Saprice ne fit aucune attention à cft que lui
difoit fon ancien ami : alors le Bienheureux Ni-
céphore , pleurant amèrement fa chute , dit aux
Bourreaux » Je fuis Chrétien ,
: & je crois en J.
»C. que ce malheureux vient de renoncer. Me
» voila prêt à mourir à fa place. » Cette décla-
ration fi peu attendue , furprit tous les fpeôa-
teurs. Un des Officiers fe détacha pour courir
au Palais du Gouverneur. » Seigneur , dit-il ,
m Saprice promet de facrifier aux Dieux ; maïs
il y a un autfe homme qui veut mourir pour

» le même Chrift. Il ne éefle de répéter qu'il


'

» eft Chrétien , qu'il ne facrifiera jamais à nos


» Eneux , &
qu'il n'obéira point aux Édits des
*t Empereurs. » Le Gouverneur ayant 6uï ce

rapport , rendit ce Jugement : » Si cet homme


» perfifte à refufer de facrifier aux Dieux im-
» mortels , cju'il meure par le glaive. Nicé-
phoré étant inébranlable dans fa première ré-
îblution , eut la tête tranchée. Ainfi il reçut
•avec la palme du martyre , trois couronne^
immortelles , celle de la Foi ,. celle de l'humi-
lité , &celle de la charité ; couronnes dont
Saprice s'étoit rendu indigne, par Pînflexible
dureté de fort cœur. Les Grecs , ainfi que les
Latins , en font mémoire en ce jour.

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SaintAnsbert. i8j

< . • 4 FÉVRIER

MÊME JOUR.
LE » •

SAINT ANSBERT,
Evêque de Rouen.
Ce Saint naquit à Chauffi , Village du
Vex'n , dTpte. Son pere
fitué fur la Rivière
nommé Siwin , qui étoit un homme de qua-
lité , le fit élever avec foin dans la connoif-

fance des Lettres divines humaines. Ses&


progrès furent rapides %
doué
parce qu'il étoit
«Tune grande vivacité d\îfprit. Dieu qui avoit
des vues fur lui , le dégoûta de bonne heure
de toutes les chofes de la terre. Son pere , al-
larmé des fuites que pourroit avoir fa piété f
mit tout en œuvre pour aimer le
lui faire
monde , & penfa à l'y fixer irrévocablement
par les liens du mariage. Mais l'alliance ou'il
projetoit ne put avoir lien par un de ces évé-
nements, où les yeux de la Foi découvrent une
difpofition particulière de la Providence. An-
gadrême , fille 'de Robert , Chancelier de Clo-
taire III , qu'il devoit époufer , fe trouva tout-à-
coup frappée de la lèpre ; elle fe fit depuis Re-
ligieufe à Rouen , &
fut enfuite chargée de la
conduite du Monaftere d'Oroer , près de Beau-
vais. Pour Ansbert , il fut conduit à la Cour
de Clotaire , oii fon mérite le fit bientôt uni-
verfellement eftimer, &fubftituer à Robert,
dans la dignité de Chancelier. Il connoiflbit
trop le néant dès grandeurs humaines pour s'y
i 8<S Saint An s b e rt.
attacher. Les maximes de l'Évangile étoient ht
feule règle de toute fa conduite. Il allioit aux
devoirs de fon état l'exercice d'une prière fer-
vente , &
la méditation des choies divines. II
trouvoit des motifs de s'élever à Dieu dans
les objets mêmes
qui paroifïent n'être propres
qu'à difliper l'efprit &
à flatter les fens.
Cependant le défi r qu'il avoh pour la vie fo-
litaire , augmentoit de jour en jour. Il craignoit
qu'à fpree de différer , J)ieu ne lui retirât fôs
grâces. Ilréfolut donc dé quitter fecretement la
Cour ,
pour dans l'Abbaye de
aller s'enfermer
Tontenelle. Après les épreuves ordinaires , :

Saint Vandrille le reçut au nombre de fes Re-


ligieux. Il devint bientôt un modelé accompli
de toutes les vertus. On rernarquoit fur-tout
en lui une humilité profonde, une obéiffance
fans réferve, &
une patience admirable. Son
Abbé lui ayant ordonné de fe préparer à la
réception du Sacerdoce , il fe rendit à Rouen ,
où il fut ordonné Prêtre par Saint Ouen. Il
s'appliqua enfuite avec ardeur à l'étude des
Livres Sacrés , fans fe difpenfer toutefois du
travail des mains. *Un jour qu'il travailloit à
une vigne , plantée à quelque diftance dû
Monaftere , le Prince Thierri . qui prenoit de
ce côté là , le divertiflement de la chaffe , s'a^
vança pour avoir la fatisfa£tion de le voir, Le
Saint lui donna quelques avis , lui prédit qu'il
régneroit , mais après avoir eu beaucoup à
fouffrir de la part de fes ennemis. .
(/
Ayant été élu Abbé de' Fontenelle , il çiar-
cha (lu* les traces de Saint Vandrille de &
Saint Lambert , fes prédécefleurs. Pomr s'ex-
citer à remplir fes devoirs , il en confidéroit
fans cefle l'étendue & la diificulté. Ses exem-

gitized by GoogI
Saint A n s b e Rt. \%j
pies ajoutaient une nouvelle force aux inftruc-
Bons qu'il donnoit à fes difciples. Il avoh
pour les pauvres une charité fiunguliere : il

bâtit troisHôpitaux^ où il en nourriflbit un


grand nombre. Son exaâitude à maintenir
la Règle n'avoit rien d'auftere ni de dur , &
& grande maxime étoit qu'un Supérieur doit
moins chercher à fe faire craindre , qu'à fe
faire aimer. Les Fidèles des environs venoient
en foule le confulter fur l'affaire de leur falut ;
il cntendoit laçonfe/Hon de leurs péchés , leur &
prefcrivoit de fages règlements pour la condui-
re de leur vie.
Après la mort de Saint Ouen , arrivée en
683^ il, fut élevé fur le Siège Êpifcopal de
Rouen , & facré par Saint Lambert à Clichi
oîi Thierri avoit convoqué les États du Royau-
Àe. Son éleâion fut fort agréable au Roi , qui
l'eftimoit fingulierement à caufe de fon émi-
nente faintete , &
qui Pavoit choifi pour fon
Confefleur. Le nouvel Évêque s'appliqua tout?
entier à la prédication de la parole de Dieu,
au foulagement des pauvres , •& à la répara-
tion des Églifes. Il faifoit fbuvent la vifite de
fon Diocelt. Il transfér* le corps de S. Ouen,
qui avoit été enterré dans l'Égliie Abbatiale de
Saint Pierre , &
le plaça dans un lieu plus ho-
norable. La cérémonie de cette tranfîation fe
fit avec beaucoup de magnifieence^l permit

aux Religieux de Fontenelle d'élire un d'en-


eux pour Abbé ; & ce privilège fut confir-
mé dans un Concile de plufieurs Evêques , qui
fetint àRouenen689 ( a ). Saint Ansbert fut

( a ) Les principaux Évê- I cile, étoient S. Radbett > Ar-

ques qui affilièrent à ce Cou- |


chevêque de Tours i S. JUeiuV
i8S Saint Thèliau. V
arraché de ion Églife quelque temps après. Pé«*
FÉVRIER 9. P m 9 aux yeux duquel la
Maire du Palais ,
calofrinie l'avoit noirci le relégua dans le
,
Monaftere de Haumont , en Hainault. Le Saint
Evêque édifia les Religieux de cette maifon
par rauftérité de fes jeunes , par ùl ferveur &
ion affiduité à la prière. Sa mort, arrivée en
é98,rempêcha de profiter de la permiffion qu'on
lui avoit accordée de retourner dans fonJDio-
cefe. Son corps fut tranfporté à l'Abbaye de
Fontenelle , où il avoit choifi fa fépulture.
1

Voyez Henfchénius , Febr. T. 2. p. 342 ; D.


Mabillon , Sec. B. 2 , &
Annal. LiS; D. Ri-
vet , Hift. Liaér. T. 3. p. 646 y T. 4. /v^J. &

SAINT THÉLIAU , ou TÉLIOU ,

1
ÉVÊQUEDE LANDAFF. »

T HÉLIAU
dans
naquit près de
pays des Galles.
le d'Anau-
Il
Monmouth
étoit frère
;

mede , qui époufa en 490 , Budic , Roi des Bre-

tons Armoricains. Il fut élevé fous la conduite


de Saint Dubrice , Évêque de LandafF. Quel-
que temps ttprès Tannée j 00 , il fit un pèleri-
nage à Jérufalem , avec Saint David Saint &
Patern , fjeux de fes condifciples. Il refufà
l'Évêché ae Dol , que le Cierge de cette Ville
& le Roi Budic vouioient abfolument lui don-
ner. De retour en Angleterre , on Péleva malgré

1 »

Archevêque de Reims ; Saint Aifoald , Évêque de Poittett»


Salve Évêque d'Amiens « S. &c.
,

A qui Un, Éveque d'Éyrcuxi -

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,

Saint T h è l î au. 189


lui fur le Siège Épifcopal de Landaff , après la
tranflation de Saint Dubrice à celui de Caër-
jévrier ç
léon. Il fit fleurir fon Êglife
par fa fcience , fa
piété , fon zele &
ion attention à ne recevoir
dans le Clergé que des perfonnes éclairées &c
vertueufes. Son autorité feule fuffifoit pour
décider fans appel tous les différends. Il donna
des preuves de la charité la plus généreufe, du-
rant une maladie contagieufe qui défola le
pays de Galles. Il mourut vers l an 580 , dans

une Solitude , où il s*étoit retiré pour fe pré*


parer au paffage de l'éternité. Les Archives de
Landaff comptent parmi fes plus célèbres dif-
ciples Saint Oudocée , fon neveu &
fon fuc-
cefleur, Saint Ifinaël qu'il lacraÉvêque , Saint
Tyftei, Martyr, &c.
Voyez Capgrave ,
Harpsfield , Vharthon ;
Brovn-Willis , Bollandus , Fetr. T. 2. p. 303 ;
& D. Morice Bm. T.i,p. aa,
& 8ti

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190 Saint E r m a r d.

* SAINT ËRHARD,
Abbé.
Saint Erhard, nonuné par les Alle-
mands Saint Ebérhard , né e» Écofle. Il
étgit
fut élevé dans la connoiflance des feintes Let-
tres ; & pafla en Allemagne avec fes dçux frè-
res ,
pour y prêcher l'Évangile, Il fit de& leçons
d'Écriture Sainte à Trevcç * £ow fiÇpifcopat
de Saint Hydulfe, que quelque* Auteurs pen?
fent avoir été untefes^r^, Saiii? Hydulfe
demis de fon Êv&Jié en 773 , pour
s'étant
aller vivre dans la Solitude , notre Saint le re-
tira à Ratisbonne , &
y fonda un Monaftere;
Il mourut dans cène Ville
voù l'oa dit qu'il
fut honore de la grâce des miracles ayant S*
après fa mort. Les Ecoffois font fa fête en ce
jour ; &
les Allemands , le 8 de Janvier.
Voyez Merflaeus 5
Cotai. Architp. Trcvinnf.
Welfer ,/. J. Rerum Boiocar. ad an. j5$ p. igi.
9
Pantaléon , Prqfographi* £arL /.

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, ,

Ste. Scolastique. 191

X. JOUR DE FÉVRIER.
S»- SCOLASTIQUE
VIERGE.
Voyez Saint Grégoire U Grand , Dial. L 2. C.

Î3 & 34-
Vers l'an 543.

S AINTE SCOLASTIQUE , fœur


de Saint Benoit à Dieu dès fa FÉv.
, fe confiera 10.

plus tendre jeunefle. On ignore en quel en-


droit étoit le premier Monaftere où elle fe re-
tira ; mais on fait qu'elle demeura aux envi-

rons du Mont-Caflin , après que fon frère s'y


fut fixé , &
qu'elle fonda un Couvent de Re-
iigieufes à Plombariola , qui étoit au Sud &
à cinq milles du Monartere de Saint Benoit
( a ). Nous lifons dans Saint Berthaire , qui

(a) Le M on a ft ère de Sainte terc. La Reine Tafie , fa fenv


Scolaftique rut ruiné par les me , &
Ratrude , fa fille > fi-
Lombards , ainfi que celui du rent rebâtir le Monaftere de
Mont-Canin. Le fécond fut Plombariola , le comblèrent
enfui te rebâti par Rachîs Roi , de biens t &
y vécurent ju£
de ces mêmes Lombards que qu'à leur mort , dans les exer-
t

Je Pape Zacharie avoir con- cices de la pieté. ( Voyez les


verti à la Foi. Catholique. Ce Chroniques du Mont-Canin
Prince fe fit Religieux , & par Léon d'Ortie , fous l'an
dans le même Monaf- 7 J ô ). Le Monailcre de Plom-

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192 Ste. S C 0 L AST I q V E.
fut Abbé du Mont-Caffin , trois cent ans après

10 Saint Benoit , que notre Sainte inftruifit plu-


FÉV
fieurs perfonnes de fon fexe dans les voies de
la perfeâion. Et comme , au
rapport de Saint
Grégoire , Saint Benoit gouvernoit des Reli-
gieufes auffi bien que des Moines , il eft tout
naturel de penfer que cela regardoit fa fœur,
& celles qui vivoient avec elle. Scolaftique
alloit vifiter fon frère une fois par an ; S. &
Benoit , qui ne fouffroit pas qu'elle vînt juf-
qu'à fon Monaftere , la recevoit avec quel-
ques-uns de fes Religieux , dans une Maifon
qui étoit à une petite diftance du Mont Caflln.
Le temps qu'ils paflbient enfemble , étoit em-
ployé à louer Dieu , &
à parler de chofes
m ipirituelles. La dernière de ces vifites fut ac-
compagnée d'une circonftance bien remarqua-
ble. La voici , telle que Saint Grégoire la rap-
porte.
La Sainte étoit allée vifiter fon frère félon fa
coutume ; le jour s'étant paflé à chanter des
Pfeaumes , &
à conférer iur divers fujets de
piété ,prirent leur réfeôion enfemble fur le
ils

îbir. Scolaftique , qui pré voyoit peut-être qu'el-


le ne reverroit plus fon frère, le pria de diffé-
rer fon départ jufqu'au lendemain matin , &c
de lui accorder le temps de la nuit , afin de le
confacrer à un entretien fur le bonheur du Ciel.
Saint Benoit , fidèle obfervateur de fa Règle

bariola fut encore détruit dans Benoit , p. 412 » Chaftelain ,


la fuite ; & l'endroit où il e- p. 605 i & Muraton Anti- ,

toit , n'eft plus aujourd'hui chita , &c. T. 3. p. 400. DhT.


qu'une Ferme , appartenante 66. De i Mona/îcri ddlc Mo-
à l'Abbave du Mont - Caflki. nachc.
*
Voyez D. Mege , Vie de S. - '

dit

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Stè. ScôtÀstiQtfÊ. iç}
~~

dît qu'il nepoint en paflant la nuit


la violeroit '' ''

hors du Mônaftere. La Sainte , affligée de ce re*


fus , mains jointes fur la table ,
mit fes appuya &
^ 04

fa tête deflus ; puis , fondant en larmes pria le


,
Ciel de s'intéréfler en fa faveur. Sa pridre étoit
à peine finie , qu'il furvint une pluié d'orage
,
accompagnée d'éclairs &
de grands coups de
tonnerre ; en forte qtte ni Saint Benoît , ni fe$
Religieux, ne purent foftir de la maifon.
L'homme de Dieu s'en plâignit à fa fœur , ert
lui dilàflt : » Que Dieu vous le pardonne qu'a-»
,
» vez-vous fait ? Je vous ai demandé une gra-*
» ce , répondit-elle , &
vous me l'avez refu-*
» fée. J'ai eu recours au Seigneur, il m'a &
» exaucée. Saint Benoit fut donc obligé de refter
avec fâ fœur.
Ils veillèrent durant toute la nuit
*
* uniquement occupés à s'entretenir de la félici-
té des Saints, après laquelle ilsfoupiroient
tous deux avec tant d'ardeur , &C dont Sco-
taftiqUe étoit fur le point d'aller prendre pof-
feffion. Ils fe féparerent le lendemain matin ;
& trois jours après notre Sainte mourût dan*
,

fa Solitude. Saint Benoit


, qui étoit alors en
contemplation dans fa cellule , leva les yeux
en haut , &
vit monter au Ciel l'ame de fa
fœur. Cette vifion le remplit de joie. Il ren-
dit grâces à Dieu , &
apprit à fes difciples la
nouvelle d'une fi heureule mort- Il en envoya
quelques-uns d'entr'eux au Monaftere de fa
fœur, afin qu'ils lui apportaffent fon corps;
quand il tut arrivé , il le fit enterrer dans ld
tombeau qu'il avoit préparé pour lui-même*
Sainte Scolaflique mourut vers l'an 54}. On
croit d'après la relation du Moine Adrevald ( 1 )

( 1 ) Voy« D. Mcge, & S. Binon , p. 4 S.

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I94 STE. SCÛLASTJQUEé
ïque fes Reliques furent apportées en France
dans le feptieme fiecle , avec celles de Saint
FLV. io.
Benoit , &
qu'elles furent déposées dans TÉgli-
fe Collégiale de Saint Pierre du Mans. On
voit encore dans cette Églife une belle Châf»
fe d'argent , gu'on prétend les renfermer \
Sainte Scolamque eft honorée au Mans , fe
11 Juillet, qui fut le jour de la tranflation de
fes Reliques. Elle avoit autrefois un Office à
trois leçons , comme on le voit par le Calen-
drier de Longchamp , écrit fous le règne de
Saint Louis.
»

Le miracle opéré par Sainte ScolafHque


tenferme un grand fonds d'inftruâions pour
nous. Il montre la fecilité avec laquelle

(è) Mabillon, Mcnard.fc Benoit &de Saint* ScolafH-


Boiche prétendent que le Moi- que. D'ailleurs , Léon d'Or-

ne Aiguif apporta les Reliques tie, & Paul Diacre , les virent
de Saint Benoit à Fleuri-fur- auffitoutes entières , en 1071,
Loire , en 660 , après que le comme nous l'apprenons de
Monaftcre du Mont-Canin la Bulle que publia Alexandre
eut été ruiné par les Lom- II , nou-
lorsqu'il confacra la
bards & que celles de Sainte
, velle Églifedu Mont-Canin.
ScolaÂique furent transpor- Ce fentiment fe confirme en-
tées au Mans par des perfon- core par les vifites juridiques
nes pieufes de cette Ville. qui ont été faites des mêmes
Mais Loretus , de Nuce , & Reliques, en i486 en 154c. &
Marchiarelli , favant Camal- Que conclure de tout ceci ?
dule , foutiennent que les Re- Ceft que l'on n'a tranfporté
liques des deux Saints font en France que quelques peti-
encore au Mont-Caflin. Be- tes parties desprécieux ref-
noit XI V ( d* Canonif. part, 2 . tes de S. Benoit de Sainte &
c.24. T. 4. p. 2.41 ) regarde ScolafHque. De Nuce ne doure
ce dernier fentiment comme point de la vérité de cette
certain. En effet, le Pape Za- tranflation. Voyez Mura ton t
charie fa d ans une de fes Bul- Antichita % ôcc. Diff. 58. T. 3.
le-. qu'en 746 il avoit vifité
, p. 144 i & Benoit XIV , lot.
au Mont'Caflîn avec beaucoup cit.
de dévotion les Reliques de S.

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Ste. ScàtA&ftÇ&i. iâi
Dieu écoute les prières du Jufte , avec & &" Sjgjjjjj
combien de promptitude il lui accorde ce
È
qu'il demande. Il eft un gagfe afftiré de l'exé*
cution de ces promefles fi fouvent réitérées
dans l'Ecriture Demande^ & vous réccvrc{. Qui*
:

conque demandera , recevra. Si vous obftrve[ mes


Commandements , tout ce que vous demanderez
vous fera accorde. Quoi de plus confolant pouf
le Julie ! Dieu lui laifle la liberté de de-
mander toilt ce qu'il lui plaît ; & il engagé

fa parole à ne lui rien refiifer. La bonté de


notre Dieu va plus loin èncore. Non feule-
ment U fait avec promptitude là volonté de ceux
qui le craignent &
qui l'aiment ; mais il entend
même les defirs de leurs cœurs , avant que leur
bouche les lui ait découverts. U feudroit être bien
aveugle 6c bien endurci ,
pour n'être pas tou-
ché de l'exceflive bonté que Dieu témoigne à
ceux qui fe donnent à lui. Il faudroit être bien
infenfible pour ne pas embrafler toutes fortes
,
de travaux , &
pour expofer même fa vie ^
afin d'être du nombre de ceux qu'il compté

parmi fes fidèles ferviteurs.

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i$6 Ste. S o t ère , V. M.

SAINTE SOTERE ,

Vierge êt Martyre,
Voyt[ Saint Ambroïfi , Exhort. Virginit. c.
12 , 6* 1. 3. de Virginit. c. 6 ; &
TUUmont ,
T. S. p. zSg*

I V. Siècle.

S AlNT Ambroise ,
qui étoit fon parent ,
felicitoit fa famille d'avoir produit cette illuflre
Martyre, & l'en regardoit comme le plus bel or*
nement. Sotere comptoit parmi fes aïeux une
longue fuite de Confuls , de Préfets , &
de Gou-
verneurs de Provinces. Mais fa véritable gloire
confifte à avoir méprifé pour l'amour de J. G.
la noblefle de fa naiflance , l'éclat de fa beau-
té, les avantages de la fortune , enfin tous ces
biens qui excitent les déûrs des partifans du
monde. Elle à Dieu le facrifice de fa vir-
fit

ginité ; & comme fa rare beauté l'expofoit à


de grands dangers , elle en négligea le foin 9 &
s'interdit l'ufage de toutes les parures inven-
tées par l'envie de plaire. C'étoit ainfi qu'elle
fe préparait à rendre un glorieux témoignage
à la divinité de Jefus-Chrift. L'occafion s'en
présenta immédiatement après la publication
des Edits barbares que Dioctétien &
Maximien
donnèrent contre les Fidèles. Sotere ayant été
arrêtée , fut conduite devant le Magiftrat , qui
la fit frapper rudement au vifage. Elle fe ré-
jouiflQit d'être traitée comme Ion Sauveur , &

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5. Guillaume de Maleval. 197
tccevoit avec une patience admirable les coups
dont on meurtriflbit cruellement fes joues. Le p^v. ï0 .
Juge voyant que ce fupplice ne produifoit au-
cun effet , en ordonna de nouveaux , qui ne fu-
rent pas plus efficaces. La Sainte les fouffrit
fans poufler le moindre foupir , &
fans Iaifler
couler une feule larme. Une confiance au/fi
héroïque dans une foible Vierge , couvrit le
Magiftrat de confiifion ; &
pour fe dérober la
vue de Sotere , que la honte &
la rage l'em-
pêchoientde pouvoir foutenir plus long-temps,
il la condamna à être décapitée. Cette illuftre

Martyre cft nommée dans les anciens Martyr


rologes.

S. GUILLAUME DE MALEVAL,
Hermite,
& Inftituteur de l'Ordre des Guillelmim
*
ou Guillelmites.

Voyt^ Hilyot , Hift. des Ordres Relig. T. 6%

L'An 1157*

CE Saint, dont
le, paroit être
on ne connoit point la famil-
né en France ; &
c'eft pour cela,
qu'il eft honoré dans le nouveau Bréviaire de
Pans, On croit qu'il prit le parti des armes
dans fa jeuneffe , &qu'il vécut d'abord d'une
manière fort licentieuic , comme cela n'arrive
que trop fouvent à un grand nombre de Mili-
N iij

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198 S. Guillaume de Mâle
talres.Les premiers traits que nous fâchions
?

I0#
furement de fa vie , nous le repréfentent corn-
f
me un pénitent pénétré de la plus vive com-
ponction , qui fît un pèlerinage à Rome pour
tombeaux des Apôtres. Ayant prié
vifiter les
Je Pape Eugène III de lui impofer une péni-
tence pour l'expiation de fes péchés , ce Sou-
verain Pontife lui ordonna d'aller à Jérufalem>
C'étoit ainfi qu'on en ufoit alors à l'égard de$
rnds pécheurs. Guillaume partit en j 145 ,
paffa huit ans dans les lieux où fe font ac-
complis les Myfteres de la Rédemption. Il re-
vint enfuite en Europe , &
fe retira en 1 1 53,
flan$ un péftrt fitué en Tofcane. Quelque
fsmp$aprè$,on le força de prendre le gouver-
nement d'un Monaftere de l'Ifle de Lupocavio ?
flans le Territoire de Pife. Mais la tiédeur &C
Je peu de régularité de fes Moines l'affligèrent
fi vivement qu'il réfolut de s'éloigner d'eux.
,
Il les donc pour aller demeurer fur lç
quitta
janpnt Pruno , 011 il trouva des Religieux aufli
pnnemis de la Règle, que les premiers. Cela le
détermina à mener leul un genre de vie qu'il
gypit tâché inutilement de faire embraffer aux
filtres. Pour cet effet , il fe retira dans une
Vallée déferte , dont la feule vue étoit capa~
J)le de glacer d'horreur les hommes même le$
Çlus intrépides. Cette Vallée , fituée dans le
'çrritoire de Sienne , au Diocefe de Grofleto
^
jfappelloit alors XÉtabli -de Rhodes , nom qui
flepuis a &ç changé en celui de Malavalk qi*
flaleyal
f
N
)trç Saint entra dans cette affreufe Solitu?

fieau mois de Septembre de l'an 1 1 ç 5. Il n'eut


fTabord d'autre demeure , qu'une caverne four
tfTOWr MiH§ J
Ç Seigneur dç Buriano l'ayant

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S. Guillaume deMaleval. 199
découvert au bout de quelque temps , lui fit ==
conftruire une cellule» Il fut quatre mois fans
autre compagnie que celle des bêtes , vivant
des herbes qu'il leur voyoit manger. Le jour
de FÉpiphanie de Tannée fuivante , il lui vint
un difciple , nommé Albert ,
qui vécut trêize
mois avec lui , c'eft-à-dire ,mort , &C
jufqu'à fa
qui écrivit enfuite les dernières circonftances dè
la Vie de fon maître , dont il avoit été le témoin
oculaire. Guillaume ne parloit jamais de lui-
même , que comme du plus miféraole de tous les
hommes , que comme d'un infâme pécheur qui
méritoitlaplus cruelle de toutes les morts. Delà
ce zele qui le portoit à exercer fur fon corps les
plus grandes rigueurs de lapénitence. Il couchoh
fur la terre nue , &
ne prenoit pour toute nour-
riture, qu'un peu d'eau &
de mauvais pain. En-
core fe renfermoit-il dans les bornes les plus
étroites du befoin par rapport au boire aù &
manger , difant que la lenfualité potrvoit fe
gliffer jufques dans la nourriture la plus com-
mune, La prière contemplation
, la le tn** &
vail des mains , abforboient tout fon temps.
Cétoit en travaillant qu'il inftruifoit fon difci-
ple dans les plus fublimes maximes de la per-
fe&ion. Mais il l'inftruifoit bien plus efficace-
ment encore par fes exemples. Il flit honoré du •

don des miracles, &


de celui de Prophétie. Sen-
tant approcher fa fin , il demanda les Sacre-
jnents, qui lui furent apportés par un Prêtre de
la Ville de Châtillon , &C moumt entre les
bras de fon cher difciple , le io Février 1 1 57.
Il eft nommé en ce jour dans le Martyrologe
Romain , &
dans les autres.
UnMédecin , nommé Renaud , s'étoit joint
à Albert , un peu avant la mort du Saint, Ils

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îoo S, Guillaume de Maleval,
cnterrcrçnt enfemble Je corps de leur Bienf
heureux maître , dans fon petit jardin , s'ap* &
pliquçrent à conformer leur conduite aux ma^
ximes &
aux exemples qu'il leuravoit laiffés.
Ilseurent la confolation de voir plufieurs per-
sonnes pieufes venir embrafler le même genrç
de vie. Ces Solitaires , dont le nombrç aug^-
mentoit de jour en jour , bâtirçnt un Her-
mitage avçc une Chapelle , fur le tombeau de
potre Saint. Telle fut l'origine de l'Ordre des
Guillclmitcs 9 ou Hermites de S. Guillaume ,
lequel fe répandit bientôt en Italie, en France,
ten Allemagne , &
dans les Pays-Bas. Ces Her-
jnites alloient nu-pieds , &
jeûnaient prefquç
continuellement ; mais le Pape Grégoire Y%.
mitigça l'auftçrité de leur Règle , les mit &
fous celle de Saint Benoit , qu'ils fuivent en-
core, Cette Congrégation a été unie à celle
des Hermites de Saint Auguftin , à l'exception
fie douze Maifons dans les PaySrBas , gui fui-
vent encore l'ancienne Règle des Guillelmir
tes , c'enS£-dire , celle de Saint Benoit. Ces
Religieux portent un Habit blanc comme les
Çiftçrçiçns (a). On fait la fête de S. GuiUaif-

mm
'
m 11
1

( a ) Villcfore confond Moine de Gellone. Ce Guil-


mal -a-propos Saint Guillau- laume ctoit un habile Gene-
me de Malcval avec S. Guil- ral qui vainquit plufieurs fois
laume , Fondateur des Her- les Sarrazins dans le Langue-
fnitçs Je Momc
Virpmt , dans doc , d»nt ils s'étoient empa-
|Ç Royaume de
Naplcs , ce res.Ses fervices ayant été ré-
fjemier joui/Toit d'une grande compenfés par Charlemagne ,
considération auprès du Roi du Duché ou Gouvernement
Roger , &nomrné le if
cft {l'Aquitain^ , il fit fa réfidençe
Ki n dans le Martyrologe Ro?
1 à Toujoufe. Mais Dieu l'ayant
main, Ç'autres oju confondu éclairé fur le néant des choies,
Je mfme Saint avec S. Gui!- de ce monde, il fe fit Religieux
14WÇ SWÇ d'Aquitaine
,
ça 806 , du confentemem te

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S. Guillaume de Maleval. 201
à Paris dans TEglifc des Blancs-Manteaux
FÉV. io.

fa femme, & de Charlemagne. de partir ; &


fa fille aînée les
Il choLût pour fa retraite le apporta depuis en mariage à
Monaftere qu'il avoit fondé Louis le Jeune , Roi de Fran-
dans la Vallée de Gellone , ce. Il mourut en Com-
allant à
au Piocefe de Lodeve & à ,
poûelle,en 1137» Voyez Ode-
une lieue d'Aniane. Il reçut ricus Vitalis , Hift. Nam. Ai*
rhabit,des mains de S. Benoit noul de Bonneval , in Vit. S,
d'Aniane , qui lui fçrvit de Bernardi , avec les Dijftrta-
guide dans TÉtat qu'il venoit tions Hiftor. du P. Henfché-
d'embrafier. Le refte de (à nius , fous le 10 de Février ;
ne fut plus qu'un tiflii de & P Abrégé Chronologique je*
œuvres. Il n'y avoir grands Fiefs* p.
point de Moine dans la Com- ( b )Ce Couvent a été aifl-
munauté qui fut plus humble fi appelle des Religieux pour
plus obéiflant, plus intérieur, lefquels il fut primitivement
& plus mortifié. Il mourut le fondé. Ils étoient habillés de
28 Mai 811 , jour auquel il blanc , &
avoient été tirés
efthonoré à Gellone & dans d'un Ordre mendiant , dit des
les Églifes voifines. Ce Afo- Marie ,
Serviteurs de la Vierge
naftereeft connu aujourd'hui ap-
inftitué à Marfeille , &
fous le nom de Saint GuilUlm prouvé par Alexandre IV en
in Dé/en. Voyez Mabillon 1x57. Cet Ordre fut éteint
Sec. Ben. 4. p. 88 \ Hcnfché- en vertu du Décret porté en
nius , Dijf. p. 44S i Bulteau , 1 174 % par le fécond Concile

p. 367 *, &
VHijtoire générale de Lyon : Décret qui ordon-
du Languedoc , par deux Bc- noit la fuppreflion de tous les
nédj&ins , \ t 9, Religieux mendiants , à l*ex-
Quelques. Auteurs ont pris ception des Dominicains > des
auffi notre Saint pour Guil- Francifcains , des Carmes , âe
laume, dernier Duc de Guyen- des Auguftins. La Maifon des
ne , qui y après avoir paffé fa Blancs-Manteaux fut donnée
jeunefie dans le défordre , & aux GuiUelmites, qui en 1 197»
avoir favorifé le Schifme de s'y rranfporterw de Mont-
l'Antipape Anadet , fut mer- Rouge près de Paris , où ils
,

veilleufcment converti par S. s'étoient d'abord établis. I|s


Bernard , que le Pape Inno- i
l'ont occupée jufq'nà l'an 161
cent II lui envoya en 1 1 3 5 .
donnée aux Béné-
qu'elle fut
L'année fuivante , ce Prince Congrégation de
dictins de la
touché du repentir de fes fau- Saint Vannes de Verdun. Elle
tes , fit , en habit de pénitent pana enfuite à la Congrégation
un pèlerinage à Compoftelle. de S. Maur,dont elle eft la cin-
|1 avoit abdiqué fes, États avant quième Maifon. Elle embrafla

.s

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lOi Ste. Austreberte , V.

LE MÊME JOUR,
SAINTE AUSTREBERTE ,

VIERGE,
ET PREMIERE ABBESSE DePaVILLY,
-

au Diocefe de Rouen,

jAlUstreberte naquît vers Tan 630 ,


dans de la Ville de Térouenne ,qui
le territoire
étoit anciennement Capitale d'une partie de
l'Artois. Elle étoit fille de Badefroi , Comte
Palatin , c'eft^à-dire , Seigneur de la Cour
& un des premiers Officiers de la Maifon
du Roi Dagobert I. Sa mere , nommée Fra^
mechilde ou Frameufe , étoit de la famille
des Rois Allemands. L'Eglife a rendu témoi-
gnage à fa faxntçté , en l'honorant d'un culte
public ( a ).
Notre Sainte n'eut de coût dès fa jeuneffe, que
pour les pratiques de pieté. Elle montroit fur-

laRéforme avant les Abbayes levé de terre en 1030, par


de Saine Denys & de S. Ger- Baudouin , vingt • cinquième
main-des-Prez. Évêque de Térouenne. Ses
( a ) Ste. Framechilde mou- Reliques font préfentement
rut le 17 Mai , peu après Fan dans l'Abbaye de Montreuil-
^80. Elle fut enterrée dans fur-Mer à l'exception d'une
,

TÉgliTe de Marconne qu'elle partie que l'on garde dans l'Ê«»


avoit bâtie ( c'eft aujourd'hui glife Collégiale ôr Paroifïîale
Sainte Àuftreberte , Village d'Hefdin. Cette Sainte eft ho-
près d'Hefdin ). Son corps tut norée le 17 de Mai,
Ste. Austreberte s V. xo$
tout une ferveur incroyable dans la prière &
l'exercice 4e la méditation. Son amour pour la
virginité la porta à refufer un établiffement
conforme à Ton illuftre naiffance. Elle n'eut pas
plutôt (a qup fon pere pçnfoit efficacement à
lamarier , qu'elle alla trouver Saint Orner ,
Evêque de Térouenne , pour lui communiquer
fon deflein. Le faint Prélat , après s'être aliuré
de la vocation de la jeune Auftreberte , lui
donna le voile , &
reçut le vœu de virginité
perpétuelle qu'elle fit entre fes mains. II la re*
mit enfuite à Tes parents ,
qui lui laiflerent la
liberté de mener chez eux le genre de vie
qu'éxigeoit l'état (içs Vierges çonfaçréç$ au
Seigneur.
Quelque temps après , Auftreberte voulut
rendre Ion facnfice complet , en fe retirant
dans un Monaftere , &
en joignant les vœux
de pauvreté & d'obéiffance à celui de chak
tete. C'eft ce qu'elle fit , du confentement de
fes parents
?
dans l'Abbaye de Port , bâtie fur
la Somme , im peu au-deflbus d'Abbeville. Là
elle donna l'exemple de toutes vertus mo- les
naftiques. Il n'y avoit point de Sœur qui por-
tât plus loin qu'elle , l'amour de la mortifica-
tion. Son humilité fur-tout étoit extraordi-
paire. Elle s'abaiffoit non feulement devant la
Supérieure , mais même devant la dernière
perfonne de la Communauté. Cette humilité
ne fouffrit aucuqe atteinte , lorfqu'elle eut été
élue Prieure.
Vers ce temps-là , Saint Philebert , Abbé de
Jumieges , fonda un Monaftere de Filles à Pa-
villy , dans le pays de Caux. L'emplacement &
les fonds néceflaires lui avoient été donnés
par Am^lbert , Seigneur du lieu. Ce Seigneur
104 Ste. Austreberte 3 V.
====fi offrit au
Fondateur fa 'fille Aurée , qu?
faint

TtV. 10. reçut le voile dans le nouveau Monaftere. Les


Religieufes de Pavilly , gui étoient au nombre
de vingt-cinq, avoient iefoin d'une Abbeffe
qui réunit une prudence confommée à une
vertu éminente. Saint Philebert jeta les yeux
fur Auftreberte , Prieure de Port. Les deux
Moines qu'il avoit envoyés , n'ayant pu la dé-
terminer à fortir de fa Communauté , il l'alla
trouver lui-même , &
vint à bout de vain-
cre fa réfiftance. Il l'emmena donc à Pavilly
avec deux autres Religieufes de Port. Ce fat
Saint Ouen qui la bénit , &
qui rétablit pre-
mière Abbefle du Monaftere nouvellement
fondé.
Auftreberte s'appliqua entièrement à fa fanc-
tification , ainfi qu'à celle de fes Sœurs.
Quel-
ques contradictions qu'elle eut à efluyer ne
,
iervirent qu'à mettre fa vertu dans un plus
grand jour. Elle allioit dans le gouvernement
la douceur à la fermeté. Dure à
elle-même
elle étoit pleine de bonté pour fes
Religieu-
fes. Ses difcours avoient un charme
fecret qui
portoitdans les cœurs, la paix , la componôion,
& la ferveur. Elle n'exigeoit rien , qu'elle
ne le fît la première ; elle alloit même beau-
coup au-delà de ce qu'elle prefcrivoit aux au-
tres. La qualité d'Abbefle ne Pempêchoit
pas
de faifir toutes les occafions de pratiquer l'o-
béiflance. Le trait fuivant montrera combien
elle chériflbit cette vertu. Une nuit
que les
Religieufes s'étoient recouchées après Mati-
nes , Auftreberte vifita le Dortoir pour exa-
,
miner fi tout étoit dans Tordre. Le bruit qu'elle
fit , éveilla la Prieure. Celle-ci qui crut que
,
c'était une fimple Religieufç , la reprit de man-

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Ste. Avstreberte 3 K 205
quer à Règle ,
la &
lui ordonna d'aller par
pénitence, prier devant la Croix plantée dans
le Cloître. Auftreberte obéit fans répliquer ,
& demeura le refte de la nuit au pied de la
Croix. Mais la Prieure reconnut fa méprife en
Je rendant le matin à l'Églife avec les autres
Sœurs. Elle s*approcha de fon Abbefle , lui &
demanda un pardon qui lui fut aifément ac-
cordé.
Cependant le Monaftere de Pavilly répan-
doit de toutes pans la bonne odeur de Jefus-
Chrift. On s'empreflbit
d'y accourir de tous
côtés. On voyoit des pères &
des mères offrir
àl'envi leurs enfants à la fainte Abbefle. D'au-
tres perfonnes, touchées defes exemples, em-
brafloient la pratique des confeils évangéliques.
Enfin la Sainte fut attaquée d'une fièvre ,
qui
lui annonçoit une mort prochaine. Elle fe fit por-
ter aufli-tôt dans le lieu où s'affembloit la Com-
munauté , &
y parla avec beaucoup d'onÔion
des principales vérités du falut. Les jours fui-
vants elle ne s'entretint qu'avec Dieu, excep-
té que de temps en temps elle donnoit encore
à fes Soeurs les inftruftions qu'elle leur croyoit
néceflaires. Sentant à la fin que fa dernière
heure approchoit , elle reçut le Saint Viatique ;
puis , après s'être munie du figne dé la croix
elle rendit tranquillement l'elprit. Sa bienheu-
reufe mort arriva le 10 Février 703 , félon la
tradition du Monaftere de Montreuil-fur-mer
en Picardie (£).
r

(*) Nous ne conrioiffons 3°. Dilotée, Religicufe dumê-


que Abbefles de Pavilly.
fix me Monaftere. Elles avoient
1°. Sainte Auitrcberte 2°.: toutes deux fuivi Sainte Auf-
0
Philothcc , Religiemc de Port: treberte à Pavilly. 4 . Aurée,
±o6 $TÈ. ÀUSTREBE&TE y V.
Son corps dans PÉglife dù Mo-*
fut enterré
iiaftere de Pavilly , où Ton voit encore foh
tombeau 9 &
fut honoré de plufieurs mira-
cles. Trente ans après , on le leva de terre i
pour l'expofer à fa vénération publique. La
plus grande partie des Relioiies de Sainte Auf-
treberte eft préfentement à F Abbaye de Mon-
treuil. Il y en a aufli quelques parcelles à Pa-
villy , &
dans d'autres Paroiiles voifmes; Le
nom de notre Sainte fe trouve en ce jour dans
le Martyrologe Romain (c)i
Voyez dans Surius la Vie de Sainte Auflre-
berte , écrite par un Auteur ancien , pres- &
que contemporain. Bollandus en a donné uikî
édition plus correfte , à laquelle il a joint de
favantes notes. Le P< Mabillon a publié aufli

Àure ou Àvoye , rille du Com- baye que Ton garde les Reli-
te Amalbert , Fondateur du ques de Sainte Julienne. Cette
Monaftere de Pavilly. Quel- Note a été principalement ti-
ques Auteurs anciens lui don- rée des mémoires drefles à
nent le titre de Sainte ; mais Montreuil,que M. l'Évéque
on ne voit pas qu'elle ait ja- d'Amiens a eu la bonté de nous
mais été honorée d'un culte communiquer par le moyen
public. H poufroit arriver d'un Magiftrat refpeclable.
qu'on Veti confondue avec ( c ) Depuis long-temps , il

Sainte Aure , que Saint Eloy n*y a plus de Monaftere à Pa-


fit Abbeffe du Monaftere de viJly f qui eft un gros Bourg
Saint Martial à Paris. f°. du pays de Caux , à quatre
Bénédicte , dont il eft parlé lieues fie dans le DioceVe de
dans la Vie de Sainte Julienne. Rouen. U n'en refte plus que
6°. Sainte Julienne. Il eft vrai l'Églife , qui eft à côté de celle
que fa Légende ne dit point de la ParoifTe. Elle porte le
qu'elle ait été Abbcffe de Pa- nom de Sainte Auftreberte
villy v mais on lit dans la Vie &a le titre de Prieuré. Les
de Sainte Auftreberte , que Religieuses de Montreuil, di-
fa Crofle eft confetvée dans tes de Sainte Auftrtberte , font
la Chàffe où font fes SS. Re- des Bénédictines Réformées.
liques. On célèbre fa fête le Leurs Conftitutions reflfem-
1 1 d'Oûobre à Montreuil-fur- blent affez a celles qu'on luit
nicr. C'cft aufli dans cette Ab- au Val-de-Gracc à Paris.
I

Saint E riu lp h , M* loj


la même Vie, Sec. 3. Ben. Voyez encore la
Vie de Saint Ouen ; Ufuard , Ménard , Mo-
lan , &
Bulteau , Hijl* de S. Ben* T. t. p. Joz.

SAINT ER L ÙLPH,
DIXIEME ÉVÊQUE DE VERDEN ,

Martyr,

Plusieurs Miffionnaires Êcoflbis étant allés


prêcher l'Évangile à l'Oueft de l'Allemagne ,
après la conquête de la Saxe par Charlemagne,
notre Saint, brûlant du défir de les imiter , quitta
'
fa patrie, pour aller cultiver le champ où ils

avoient planté la Foi. Les fuccès de la Miflion


furent proportionnés au zele de celui qui l'a-
voit entreprife. Ayant été enfuite élevé fur
le Siège de Verden l il remplit tous les devoirs
de FÉpifcopat en digne fuccefleur de ces hom-
mes apoftoliques , qué Dieu avoit fufcités pour
la converfion des Infidèles, Ceux d'entre les

Barbares qui ne vouloient point ouvrir les yeux


à la lumière , furent outrés de rage à la vue
de Paccroiflement merveilleux du règne de
Jefus-Chrift. Ils réfolurent donc de défaire leur
pays d'un homme qui décréditoit de jour en
/our leurs anciennes fuperftitions , &qui me-
naçoit les Temples de leurs feux Dieux d'une
défertion générale. Ils le maflacrerent en 830 ,
dans un lieu nommé EppoKftorp ( a ).
Voyez Krantz , /. /. Metrop. c. 3/. Democh.
CataL Epifcop. Verdmf. Pantaléon , &c.

(a) Notre Saint ne doit I lande , lequel floriffoit en 890.


point être confondu avec un
[
Voyez fur ce dernier , Jonas,
aarre S. Erlulph , Apdtrc d'If- 1 Hifi. Ijlandi*.
io8 SS. Saturnin , bAtiF, &c*

XL JOUR DÊ FÉVRIER.
SAINT SATURNIN ,
SAINT DATIF,
ET PLUSIEURS AUTRES
SAINTS MARTYRS
d'Afrique*

Tiré de leurs Actes , écrits par des Auteurs con*


temporains. Saint Augujlin les a reconnus pour
authentiques Brev. Coll. die 3. c. 17 ; Balu\e
,

les avoit publiés , avec une Préface &


des notes
de la jaçon des Donatifies ; mais Bollandus &
D. Ruinart > nous en ont donné une édition ,
de laquelle ils ont fait difparoître tout ce qui
nétoit point dans POriginaL

L'An 204.

3L£ EMPEREUR Dioctétien avoit ordon-


né à tous les Fidèles , fous peine de mort , de
livrer nos Saintes Écritures ,
pour être brûlées.
La réfiftance qu'éprouva l'exécution de cet
Édit , alluma le feu d'une cruelle perfécution
,
qui pendant une année entière , inonda l'Afri-
que du fang des Chrétiens. Il eft vrai qu'il
s?en trouva d'affez lâches pour obéir. Mais le

plus grand nombre aima mieux mourir, que


de

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SS. Saturnin , Datif 3 &c. 109
de contribuer à deftruôion des Livres Saints.
la
Abitine, Ville de la Province Proconfulaire F £y t Ilè
d'Afrique , devint un des principaux Théâtres
de cette guerre déclarée au nom chrétien.
Saturnin , Prêtre de cette Ville , célébroit un
Dimanche les divins myfteres dans la maifon
d'Oâavius Félix. Les Magiftrats en ayant été c ôn *wâw
. r * • , 101
Saturnin *«
informes , y vinrent avec une troupe de Sol- vec qu an n- i

dats j qui arrêtèrent quarante-neuf Chrétiens te-neuf chré*


de l'un ce de l'autre fexe. Les principaux étoient *****
le Prêtre Saturnin avec fes quatre enfants , fa-
voir, le jeune Saturnin &
Félix, tous deux
Le&eurs , Marie , Vierge &
Religieufe , Hi* &
larien , oui n'étoit point encore iorti de l'enfan*
ce ; Datif, Sénateur , Ampélius , Rogatien 8C
Viâoire. Datif, l'ornement du Sénat d' Abitine,
& que Dieu defHnoit à être un jour un des prin-
cipaux Sénateurs du Ciel , marchoit à la tête
de ce facré Bataillon. Saturnin , environné
d'une illuftre famille , étoit à côté de lui; tous
les autres fuivoient en filence.

On les conduifit devant les Magiftrats , oii


ils confefferent Jefus-Chrift fi génereufement

que les Juges niêmes rendirent juilice à leuf


courage. Ils réparaient en quelque forte le cri-'
me de Fujidan leur Evêque , qui dans le même
lieu avoit eu la lâcheté de livrer les Saints Li-
vres. Mais le Ciel s'étoit déclaré hautement
pour nos divins oracles. Car comme Fundan
alloit les jeter au feu , il furvint , quoique l'air
fat fort fèrein , une groffe pluie qui l'éteignit f
& qui lut fuiyie d'une grêle fi horrible, qu'elle
ravagea toute la campagne voifine, Cepert*
dant les Juges d'Abitine mirent les Confêfleurt
aux fers, & les envoyèrent à Carthage, oîi
le Proconfui faifoit fa réûde|ce. Ils partirent
O

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no SS. Saturnin, Datif s &c.
pleins de joie de fe voir enchaînés pour le
nom de Jefus-Chrift ; ils lui en rendirent grâ-
ces par des Hymnes &
des Cantiques qu'ils
ne de chanter durant tout le chemin.-
ceflerent
Quand ils furent arrivés , on les mena de-
vant le Proconful Anulin , qui ayant commen-
cé l'Interrogatoire par Datit, lui demanda de
quelle condition il étoit , & s'il avoit aflifté
à la Colleôe, ou Aflemblée des Chrétiens*
» Je fuis Chrétien , dit Datif, & j'ai aflifté à
» la Colleâe. Anulin demanda enfuite les
noms de celui oui préfidoit à l'AiTemblée , &
de celui chez lequel elle s'étoit tenue. Mais
il n'attendit point la réponfe du Saint ; il or-
donna qu'on l'étendît fur le chevalet & qu'on
le déchirât avec les ongles de fer , pour le
forcer à déclarer la viriu.Lâflupaxt des autres
ConfefTeurs furent auffi appliqués à cette dou-
loureufe queftion , qu'ils fournirent avec une
patience invincible. La différence du fexe n'en
mit aucune dans leur courage. On vit fur-tout
éclater celui de Viûoire. Elle avoit eu le
bonheur de connoître la vérité dès fa j eunefTe
& fon amour pour la virginité l'avoit fait re-
noncer à une alliance très-confidérable. Le
jour marqué pour fon mariage , elle fe jeta
par une fenêtre, efpérant que celui qu'elle
avoit choifi pour époux , lui conferveroit
la vie. Son efpérance ne fut point vaine
%
car il ne lui arriva aucun mal. Elle s'étoit
enfuite fauvée dans une Églife , où elle avoit
fait à Dieu le facrifîce de fa virginité ( a
).

. (* ) Avec les cérémonies |


dans les Gaules &dans tout
tifuées à Cartbage, e.» Italie , |
l'Occident. Les Vierges met*
*
SS. Saturnin Datif 9 9 &c. ut
Tout fon défir étoit d'allier la couronne du
martyre à la pureté des Vierges* Comme elle
étoit d'une nai fiance diftinguée , & fœur de
Fortunatien » zélé défenfeur du Paganifine , le
Proconiul mit tout en œuvre pour la réduire»
Il commença par lui demander quelle étoit fa

Religion, h Je fuis Chrétienne, répondit-elle.»


Fortunatien voulut la juftifîer en l'accufant
de folie. Viâoire , qui ne craignoit rien tant
de perdre Poccafion de verfer fon fang
pour Jems-Chrift , fit voir par la fagefle de
fes difcours , qu'elle jouiflbit de l'ufage de

raifon, &qu elle avoit embraflfé le ChrifKa-


nifme librement &
avec connoifTance de eau*
fe. Le Proconful lui demanda enfuite fi elle

vouloit retourner avec fon frère : » Je ne le


» peux , dit-elle, parce que je fuis Chrétienne,
» & que je ne reconnois d'autres frères que
» ceux qui gardent la loi de Dieu. » Le Pro-
conful , oubliant alors fa qualité de Juge , pour
prendre celle de fuppliant , la conjura d'avoir
pitié d'elle, &
de conferver fa vie ; mais il
n'en put tirer gue ces mots : » Je vous ai déjà
» dit que je fuis Chrétienne , &
que j'ai aflifté
» à la Colleâe. Anulin , outré de fe voir
vaincu , la renvoya en prUbn avec les autres
en attendant la Sentence de mort qu'il pronon-
ça contre tous peu de temps après.

t oient leur tète fur l'Autel S En Êgypte & en Syrie


).

pour Tofirirà Dieu, Ce por- les Vierges Te confieraient à


roient toute leur vie des che- Dieu , en faifant couper leurs
veux longs , comme faifoient cheveux en préfence d'un Prê-
anciennement les Nazaréens tre. ( Bultcau , Hifi. Monafi,

( AZL fine. p. 4/7. S. Optât. p. 170).


1. 6. S. Ambrof, ad vifj* <•
Oij
1 1 1 SS. Saturnin 3 Datif \ &c. %

Le Proconful eflaya encore de vaincre Hî-


larien, le plus jeune des enfants de Saturnin,
fe flattant que de fon âçe lui faci-
la foiblefle
literoit cette mais il fut bientôt dé-
viâoire ;

trompé. Le faint enfant fupérieur à la crain-


te , lui répondit avec fermeté : » Je fuis Chré-
» tien , j'ai aflifté à la Colleâe ; cela , de ma &
» pleine volonté , &
fans aucune contrainte.
Le Proconful , qui ne favoit pas que Dieu lui-
même combat dans fes Martyrs , le menaça de
ces petites punitions dont on a coutume de
châtier les enfants. Mais celui-ci ne fit qu'en
rire. » Je vous ferai couper le nez les oreil- &
» les , ajouta le Proconful » Vous le pouvez , :

» répondit Hilarien : mais je fuis Chrétien. »


Le Proconful , diflimulant fon dépit fa hon- &
te , l'envoya en prifon. L'enfant dit en y al-
lant , » Seigneur , je vous rends grâces. »
Tous ces généreux Soldats de J. C. moururent
en prifon des tourments qu'ils y endurèrent.
Ils font nommés le n. de Février dans l'an-
cien Calendrier de Carthage dans le Mar- &
tyrologe Romain , quoique les deux Félix fiif-
lent morts le jour même de la quefKon.

L'exemple de ces Martyrs eft la condamna-


tion de la négligence avec laquelle la plu-
part des Chrétiens célèbrent le jour du Sei-
gneur ( b ). Quand le Juge leur demande
pourquoi , malgré la défenle de l'Empereur

(b) Voyez Thomaflin , les Dimanches &


les Fêtes ,
Traité des Fêtes , T. 2. L 1. c. publiée par le P. des Molets ,
1. p. 160 , & une Lettre fur dans les Memoim de Uttérû-
l'ancienne manière de garder turt , T.i.p.i»

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SS. Saturnin 3 Datif 3 &c 113
*

ils ofent tenir des Affemblées ; » c'eft


y> fini - Us , même fur le chevalet , que le Di-
» manche eft parmi nous d'une obligation in-
» difpenfable. Manquer de le célébrer , feroit
» pour nous un crime. Nous remplirons ce
» devoir le mieux qu'il nous eft poflible. Ja-
» mais nous ne manquons à l'AlTemblée. En-
» fin, nous gardons les Commandements de
h Dieu , notre fidélité dût-elle nous coûter la
» vie. » Les dangers , les fupplices , la mort
même , rien n'étoit capable de leur faire tranf-
grefler un précepte aufli formel que celui de
la célébration du Dimanche, Chercherons-
nous encore mille prétextes frivoles pour nous
en difpenfer ? Le Dimanche eft pour le Chré-
tien, ce que le Sabbat étoitpour le Juif. Mais
autant que l'Évangile l'emporte fur une loi tou-
te charnelle , autant devons-nous nous diftin-
au-deffus des Juifs par la manière de cé-
Sçr
>rer le jour du Seigneur, Rappelions-nous
la ferveur avec laquelle les Chrétiens de la
primitive Eglife le célébroient. Quelle afliT
duité à la prière publique , quoique fouvent
on rut obligé de s'affembler dans des lieux ca*
chés &
ténébreux Ils iavoient , dit un ancien
!

Pere , que fans la lanélificatiori du Dimanche ,

il impoflible d'êtrV Chrétien. Si nos Pères


eft
dans la Foi revenoient au monde , nous recon-
noîtroient-ils pour leurs enfants !
ÎT4 S AINt SàVE RI Né
FÉV. il.
SAINT SÊVERIN, -

Abbé d'Agaune.
Tiré de fa Vit écrite par un Auteurfort ancien *

( ap. Mabil. append. Sec. i. Ben. ) ; Us additions


que ron trouvt dans Surius &
Bollandus 9 font
[ouvrage de quelque moderne. Voyt^ ChaJleLain ±
p. 6)8.

L'An 507.

s Ê verîn fortoît d'une illuftr© famille de


Bourgogne. Il naquit dans un temps où FAria-
nifme régnoit dans fa patrie ; mais il eut le
bonheur d'être inftruit dans les principes de la
Foi Catholique- Il ne fut pas plutôt en âge de
connoître les dangers du monde, qu'il alla fe
confacrer à Dieu dans le Monaftere d'Agaune
ou de S. Maurice , en Valais (<z). Devenu
Abbé de ce Monaftere , il le gouverna plu-
fieurs années avec autant de faeefle , que de
vertu. Le Roi Clovis , informe qu'un çrand
nombre de malades recouvroient tous les jours
la fanté par la vertu des prières de Séverin ,
fenvoya chercher en 504, afin d'obtenir la

(a) Quelques cellules A*- baud , fon prédéceffeur ,


Y*i
parées Tune de l'autre , conv> voit été pour I'Arianifrae ,
pofoient alors ce Monaftere. rit bâtir à la même place la

Sigjfmoad , Roi de Bour- célèbre Abbaye de Saint


gogne , au/fi lélé pour la Maurice.
Foi Catholique, qucGonde-

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Saint S à ver i at. hç
guérifort d'une fièvre opiniâtre , dont F Art des
plus habiles Médecins n'avoit pu le délivrer.
Le Saint partit après avoir pris congé de fes
Moines , auxquels il annonça qu'ils ne le re~
erroient plus ; étant arrivé à Nevers , îl gué-
rit Eulalius , Evêque de cette Ville , leauel
étoit devenu lourd &
muet. Il rendit aufu la
tante à un Lépreux qu'il rencontra aux portes
de Paris. Lonqu'il fut arrivé chez le Roi , il
le couvrit de ton habit f &
la fièvre le quitta
auffi-tôt. Le Prince , pour témoigner à Dieu
£a reconnoiflance , fit diftribuer aux pauvres
d'abondantes aumônes, mit tous les pri-&
fonniers en liberté.
Séverin, jugeant que fa préfence n'étoït
plus néceflaire à Paris . reprit le chemin d'A-
gaune. à Chateau-Landon , en Gati-
Il s'arrêta
nois , au Diocefe de Sens , oh deux faints Prê-
tres fervoient Dieu dans un petit Oratoire
qu'ils s'étoient bâti à l'écart. II les pria de le
recevoir avec eux ; &
après les avoir édifié?
quelque temps par Féclat de fes vertus, il mou-
rut en 507. On fonda dans la fuite en cet en-
droit une Abbaye qui eft occupée, depuis le
XH fiecle par des Chanoines Réguliers de S.
,
Auguftin (b). Quand les Huguenots en pille-,
rent l'Eglife , ils difperferent une partie des Re-

(h) V
Abbaye de Saint Sé- neviève. On trouve dans E»
verin de Château - Landon Bibliothèque de cetteAbbaye
reçut vers Tan 1480 , la Ré- un Manufcrit , contenant Içs
forme des Chanoines -Régu- Lettres de Rusbroch , célèbre
de Vindes-Heim , en
liers contemplatif ,
qui y avoît
Gueldres. Elle appartient pré- mis une Réforme , fit qui mou-
sentement à la Congrégation rut Prieur de Val-vcrt , près
de France , dite de Stc. Ge- de Bnuxelles , en 1381.
itS Ste. Théodore 3 IMpèrat.
E .
i liquçs de notre Saint. 'On trouve fon no*
rÉVt u dans le Martyrploge Romain. Il y a à Paris
une Eglife Paroiffiale , dédiée fous l'invoca-
tion ds Saint Séverin (<:);

141 < -

Z £ MÊME JOUR.
SAINTE THÉODORE,
Impératrice
E s Grecs comptent parmi les Saints de ce
jour l'Impératrice Théodore. Cettç Princeffe
fbrçime de l'Empereur Théophile, eut beaucoup
è fouffrir du caraâere brutal de Ion mari ; mais
par la douceur fa patience , elle vint à bout &
ife le rendre plus traitablç. Les défendeurs des
.-ftîlWB Images trouvèrent toujours en elle une
proteûriçe très-zélée. Devenue , par la mort de
Théophile , Régente de l'Empire , elle le gou*
yçrna avçc la plus grande fageffe durant la mi-
norité de fon fils Michel III. Elle eut la gloire
tf terminer Wieremçrjt l'Héréfie des Içonor

m -> 1
-
1

'
1
!
" ! .
1

(c)Cçtoit autrefois un tres Curés anx Synodes t &


Jtfonaftere qui portoit auiH à M. l'Archevêque à
affilier
Je nom de Saint Séverin. U la b^ncdiôiondes faunes Hui-
Jfribfiftpit encore fous le règne les.
fl'Henri Ï/Èglife avoït été
I.
JV. D ne faut pas con-
érigée en Paroifle des l'an fondre notre Saint avec un
Jiio. Le Curé ,qui a le titre autrç Saint Séverin , Soli-
il'Archipretre , avoit ancien- taire &
Prêtre de Saint Cloud
f
nement J'iafpeâion fur piu- Voyiez le Boeuf, Uifi. du Dioc+
fieurs autres ParoifTes ; mais
aujourd'hui tout fon droit
de Paris , T. /. p. tjt , & le
nvTîÇalfnd.&Jf, dc ?*ris
\
fç feorne à précéder les au-

xJ by Google
Ste. Théodore , Impêrât. i1
fcbftes qui déchiroit le fein de PÉgiife depuis
,

110 ans. Ce fut un premier Dimanche de Carê-


me 9 que le faim Patriarche Méthode , fbutenu
de l'autorité de l'Impératrice , rétablit folenne}-
lement tes Images dan^ FÊglife de Ste, Sophie
à Coriftantinople (* Les Grecs , en mémoire
de ce rétabliffemeht , inftituerent une fête , cjue
Ton célébra fous le nom d'Orthodoxie. Théo-
dore ayant été enfui te exilée par Ton propre
fils , &par l'impie Bardas fon ôncle , entra
dans un Monaftere , où elle mourut en 867,
après y avoir donné l'exemple de toutes le$
yertus 9 pendant les huit dernières années de fa
vie. JLlle eft nommée comme
Sainte , dans le
Ménologe de l'Empereur Bafile , dans les Me-
nées , &
dans les autres Calendriers Grecs.
Voyez ce que dit Bollandus d'après les Auteurs
de YHlftoirt By^antin^

(«) Ceux qui voudront Sagefc inertie , n'ont qu'à con-


les Eglifes de Copf- fulterDucange, Grillius, &
& fur-tout celle Chailclain t Martyr. Uuiv.f.
ée Sainte Sophie , ou de U
ii 8 S. Bemôit d'Aniane.

XII. JOUR DE FÉVRIER.


SAINT BENOIT
ANIANE ,
D*
Abbé, en Languedoc.
Tiré de fa Vu, écriée par un de fis iifiiples
;
eTun ftile grave 9 clair , &
plein fonction. Ctfl
Ardon , furnommé Smaragde , que le Saint char*
'
gea du gouvernement du Monajkre a*Anianc
9
quand CEmpereur Louis le Débonnaire le fit ve-
nir à fa Cour. Il mourut U y Mars
£43 , & cfi
A
honoré comme Joint à niant. Il ne faut pas le con-
fondre avec Smaragdt, Abbé de S. Michel\ dans
le Diocefi deVerdun , &
Auteur d'un Commentai-
refur la Régit de S. Benoit. Cette Vie de Saint
9
Benùie d Aniane a été publiée par Dom Menord,
fui fa mife à la tête défit Concordia Regularum
;
par HenfchénùiSy fous le 12 de Février; & par
D. Mabillon, Aô. SS. Ben. Vol. 5. p. 191
#
«

217. Voyei Hélyot % Hift. des Ord. Relig. T. ç;


p. i}9 ; Bulteau , Hift. de FOrd. de S. Benoit,
I. 5. c. 2.
p. 342 , &
Géorge Eckhart 9 De ré-
bus Franciae Orientalis, T. 2. p. 117. 163.

L'An 821.

Ai nt Benoit, fils d'Aïgulf , Comte dé


FÉV. xi. Maguelone ,
naquît en Languedoc. Ilfut fuo
ceffivement Échanfon du Roi Pépin , & de
Charlemagne , qui tous deux le comblèrent
S. Benoit iïAniane. 219
de richefles &
d'honneurs. Éclairé par la gra- \

ce fur la vanité des biens fenfibles , il réfolut


F£V iz *
à l'âge de vinçt ans de tourner toutes fes vues
vers la conquête du Royaume céltefte. Il refta
cependant encore trois ans à la Cour ; mais
il y menoit vie la plus ;mortifiée
la la plus &
pénitente. Enfin, une occafion où ilpenfk pé-
rir en voulant fauver fon frère qui le noyoif
dans le Téfin , près de Pavie , acheva de le déta-
cher du fiecle. De retour en Languedoc , il ou-
fon cœur à un vertueux Solitaire , nommé
vrit
Widmar ou Guimer , qui le confirma dans la
réfolution qu'il avoit prifc de renoncer entiè-
rement au monde. Il partit donc de chez lui Sa retraite,

comme pour aller à Aix-la-Chapelle , oîi étoit


la Cour ; mais il s'arrêta en chemin à l'Abbaye
de S. Seine (a ) , oh il prit l'habit monaftique
en 774. Il y vécut deux ans &
demi dans la pra-
tique d'une rigoureufe abftinence de la mor-&
tification la plus parfaite. Il traitoit fon corps
comme un efclave rebelle , ne lui accordant
eue ce qui étoit abfolument nécefiaire pour le
ioutenir ; du pain &
de l'eau étoient (a nour-
riture : il dormoit peu , Se fouvent fur la terre
nue : quelquefois il paffoit toute la nuit en
prières , nu - pieds fur le pavé , même au plus
fon de l'hyver : il embrailoit avec ardeur tout
ce que la pénitence a de plus humiliant ; il &
étoit fi mort à lui-même , qu'il fàifoit toute fa
joie des mépris &
des infultes. Non content
«Fobferver fa Règle avec la ponftualité d'un
fidèle difciple de Saint Benoit , il pratiquoit
encore les auftérités que preferivent celles de

(«)Acmq lieues de Dijon.

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no S. Benoit d'Aniane:
Saint Pacôme &
de Saint Bafile. Il poffédoît
FÊV. ii. dans im degré émincnt , cet efprit de com-
ponftion , çe don des larmes , cette intelli*
gence dans les voies de Dieu , qui font le
partage des ames confommées dans la perfec-
tion.
Devenu Cellérier, il s'acquitta de cet em-
ploi d'une manière qui donna la plus haute
,

idée de fes vertus , &de fa capacité pour le


gouvernement. C'eft ce qui fit qu'après la mort
de l'Abbé , les Moines le choifirent pour lui
fuccéder. Mais comme il connoiffoit leuraver-
$e retîtc en ^ on P011* ' a Réforme , il ne voulut point ac-
Languedoc. cepter cette charge. Il quitta même ce Mo-
. naftere en 780 , & retourna en Languedoc
où il bâtit un petit Hermitage dans une Terre
de fa famille , près d'une Chapelle de Saint
Saturnin j & fur les bords d'un ruifleau , nom-
mé Aniane. Il y vécut quelques années dans
une grande pauvreté , priant continuellement
le Seigneur de lui découvrir fa volonté , &
de lui foire la grâce de correfpondre fidèle-
ment à fa vocation. Il lui vint des difciples ,
cu'il refula d'abord par humilité ; mais à la
nn il en reçut cjuelcjues-uns , du nombre def-
ouels étoit le famt vieillard Guimer. Tous ces
Solitaires n'avoient revenu , que le
d'autre
produit de leur travail ; ne vivoient ordi-
ils

nairement que de pain &


d'eau ; ils y ajou-
taient , les jours de Dimanches & de grandes
fêtes , un peu de vin &
de lait , qu'on leur
apportait par charité. Le Supérieur n'était
distingué des autres , que par fa vertu; il s'af-
fujettiflbit comme eux , aux plus pénibles tra-
vaux. Benoit voyant le nombre de fes difci-
ples s'accroître de jour en jour, bâtit dans le

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5. Benoit d'^niane. 221
voifînage un Monaftere plus grand plus &
foacieux. Son amour pour la pauvreté alloit ^ts 12.
h loin , qu'il ne fe fervoit à FAutel , que de
Calices de bois , de verre , ou d'étain. Quand
on lui fàifoit préfent d'ornements précieux , il
les donnort à d'autres Eglifes Outre la
conduite de fes Religieux , dont le nombre
monta bientôt jufqu'à trois cents , il avoit en-
core une infpeâion générale fur tous les Mo*
nafteres de Provence , de Languedoc , de &
Çafcogne, qui tous le regardoient comme leur
maître & leur pere. Il établit partout la plus
févere Réforme ; mais à la fin il y apporta
quelque adouciflement , par condefcendance
pour la foiblefle humaine.
Notre Saint , perfuadé que toutes les bonnes
oeuvres ne font point méritoires fans la Foi
conferva ce précieux dépôt avec la plus par-
faite fidélité. Attaché inviolablement à l'Egli-
<è , il s'éleva fortement contre fes ennemis , Il combat

fur-tout contre Félix d'Urgei , qui attaquoit la


Filiation divine de J. C. Il affilia au Concile
F
*€
dVtm
^
de Francfort , où cet Héréfiarque fut condam-
né , en 794. 11 compofa même quatre Traités
pour défendre la Doûrine catholique ( c ).
Benoit étoit regardé comme l'oracle de la
France , & y jouilioit de la plus haute confidé-
ration ; ce qui lui facilita les moyens d'intro-
duire la Réforme dans un très-grand nombre

(£) Il changea depuis de d'argent 3c d'ornements pré-


conduite par rapport à l'Egli- cieux. Il forma a uni dans
fc du Monaftere i car il en fon Monaftere une nombreu-
fit bâtir une magnifique,
qu'il fc Bibliothèque.
orna de pilliers de marbre, (c) M. Baluze a publié ces
qu'il pourvut de Calice* Traites dans fes Mijc*lUnta.

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ni S. Benoit d'àniane.
i
de Monafteres ( </).U envoya de fervents Rc-
Ugi eux dans celui de Gellone, appelle depuis *
fév ia
Saine Guillem du Difert , parce qu'il avoit été
11 réforme fondé en 804 , par Guillaume , Duc d'Aqui-
Monafte-
taine j^^s le Débonnaire , frappé du renou-
îcs

rd'AUcma!vellement des Cloîtres , établit le Saint, Inf-


gne. peôeur de toutes les Abbayes de fon Royau-
me ; &
le fit venir à Marmunfter , ou Mar-
mouftder , en Alface , pour l'approcher davan-
tage de fa Perfonne. Mais comme ce lieu eft
éloigné d'Aix-la-Chapelle, qui étoit laréfidenr
ce ordinaire de l'Empereur , il fonda pour lui
le Monaftere d'Inde , qui n'en eft qu'à deux
lieues. Le Saint préfida en 817 , à une Affem-
blce d'Abbés , tenue pour le rétabliffement de
la Difcipline monaftique , fiit le principal &
Auteur des Canons que le Concile d'Aix-la-
Chapelle fit la même année pour la réforma-
tion des Bénéficiers &
des Moines. On adopta
les Statuts qu'il avoit dreffés , («) & on les

(<0 Les Conciles tenus câ Holfienio , &e a°. Un Li-


fous Charlemagne en 813 , vre à*Homélies pour l'ulàge des
& les Capitulaires que ce Moines , tirées des Ouvrages
Prince publia la même année, des SS. PP. félon la coutume
etdonnoient aux Chanoines de ce temps-là. 3 0 . Un Péni-
de fe conformer aux loix de t imprimé
tentiel dans les Sup-
&
aux Moines de Q
l'Eglife v pléments aux Capitulaires.4 .
fuivre la Règle de S. Benoit. Une Concorde des Règles monap*
Ce Règlement établit l'uni- tiques. On y trouve le Texte
formité dans les Monafteres de Règle de S. Benoit , avec
la
d'Occident. celui des Règles des autres Pa-
(t ) Nous avons encore de triarches de la Vie monafti-
S. Benoit 1°. Un
Code de Rè- que. Le but^de l'Auteur étoit
gles étant fim-
qu'il écrivit démontrer l'uniformité de ces
ple Moine à S. Seine; ce grands hommes dans les exer-
Code a été imprimé à Rome cices qu'ils preferivent. Dom
en 1661 , Tous ce titre : Co- Ménard a fait imprimer cet-
dex Regularum , eolleSus à 5. te Çoncorde à Paris en 163 S.
Bcnedifto Anianx , aitHus à Lté

Goo
S. Benoit d'Aniane. 213
Joignità la Règle du Patriarche S. Benoit ; l'un .

ayant été en Fiance 8c en Allemagne , ce que


pjy lu
Fautre avoit été en Italie.
Cependant la lànté de notre Saint dépériffoit
de jour en jour. Ses dernières années ne furent
qu'une maladie continuelle. U mourut au Mo-
naftere dinde , le 1 1 Février 8zi , âgé d'envi- Sa mort*
ron 7 1 ans. On l'enterra dans ce Monaftere, de-
puis appellé de S. CorntUU y parce que PÉglife
eft dédiée au S. Pape de ce nom. On fait h
fête à Aniane le 1 1 de Février ; mais la plu-
part des Martyrologes n'en font mémoire que

le ix du même mois, qui fut le jour de fa

fépulture. Ses Reliques, célèbres par plufieurs


miracles , font à l'Abbaye d'Inde ou de Saint
Corneille , dans le Duché de Cleve$.

L'application avec laquelle Saint Benoit cPA-


niane étudia l'efprit de fa Règle , prenoit fa
fource dans un défir ardent de parvenir à la
perfeâion évangélique. U favoit que le but de
toutes les InfKtutions monafliques eft de fai-
re mourir l'homme à lui-même , pour l'unir
à Dieu de la manière la plus intime. Or cet-
te tendance à la perfeâion , &
par conféquent
la néceffité de mourir à toutes les inclinations
de la nature corrompue , à toutes les cupidi-
tés de l'amour propre , obligent indiftinûement
tous les difciples de Jefus-Chrift Les Chré-
tiens qui vivent dans le mqnde ne différent de»
Moines , qu'en ce qu'ils marchent par une rou-
te différente. Les uns &
les autres doivent f#
propofer le même terme. Heureux celui qui
comprer^nt ces fublimes maximes , y confor-
me fa conduite Le Démon feroit d'inutile?
!

efforts pour lui nuire. Ses aflwQ as lui réuf-

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a 14 S. Mèlzce 3 Patr. d'AnT.
fiffent qu'autant qu'il entretient des intelligen-
ces fecrçtes avec nous-mêmes. Il ne pourra , fi
nous fommes zélés pour notre perfeâion , nous
empêcher d'atteindre le fommet de cette mon-
tagne myftique , oii Dieu laiffe contempler fes
perfe&ions infinies par les ames entièrement
détachées du monde &
d'elles-mêmes.

.
-
1
*
1. *
1

SAINT MÉLECE ,

Patriarche d'Antioc he,


Tiré defis deux Panégyriques ; Pun , par Saint
Grégoire de Nyjfif &
Foutre , par Saint Chry*
fojlome ; de Socrate , /. S. c. 5. p. 2C1 ; de So-
ipmeru , /. 4. c. 28. p. 586 ; de Théodoret, L 3*
c. 5. p. 128. Ibid. 634. Voye^ Af. Jofeph
Affimani in Calend. Univ. T. 6. p. 125.

. L'An $ 81.

d'une des premières famil-


iffu
les de Mélitine dans la petite Arménie (a )
,

montra dès fa jeuneffe . un grand fonds de pié-


té , &d'amour pour 1 étude. Une conduite ir-
réprochable , un çaraôere plein de douceur &
d'affabilité , un cœur vrai ami de la paix &
le firent eftimer des Ariens , comme des Ca-
tholiques. Il fat élu Evêque de Sébafte , pour

{a) Strabon &


Pline met-
]
Géographes poftcrieurs.lapla-
tcRt cette Ville dans la Cappa- I cent dans la petite Arménie ,

doce:maisProWmce& tous les | dont elle devint Capitale.

fuccéder

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S. MÊLECE PaTR.
, D'ÂKf. 2 2J
fuccéder à Euftathe ( , dépofé par les A- — 'sa 1

riens dans un Concile tenu à Conftantinopie , _jl


v I2%
en 360. Mais n'ayant trouvé qu'une réfiftance "

bpiniâtre dans le peuple conhé à fes foins , il


l'abandonna pour aller vivre dans la Solitude.
11 fe retira depuis à Bérée en Syrie ( c ).

UEglife d'Antioche étoit alors dans l'état le


plus déplorable. Depuis l'exil de Saint Eufta-
, arrivé en
the 3 3 1 , elle n*avoit eit pour Evê-
ôues , cjue des Intrus ou des Ariens. Après la
déposition d*Eudoxe ( d ) , l'un d'entr'eux , îi eft élu

les Catholiques &les Ariens fe réunirent dans


$J^™^
le choix de ion fuccefleur, qui tomba fur Me-
lece. L'Empereur n'en fut pas plutôt informé ,
qu'il envoya des ordres pour l'inftallatiori dit
nouveau Patriarche. Quelques Catholiques (c)
refuferent cependant de recônnoître Mélece *
fous prétexte que les Ariens ayant eu part à
fon éleûion , elle devoit être cenfée irrégu-

*
Les Hérétiques , qui s'étoient flattés d'atti-
rer Mélece dans leur parti , reconnurent leur
erreur pendant le féjour de Confiance à An*
tioche. Ce Prince ordonna aux Evêques qui
avoient de la réputation , d'expliquer en
fa préfence ces paroles , qui doivent s'en-

(*) Cet Euftate étoit Se- [


ne voulant pas fe foumettro
mi-Arien, aux Ëvèques Ariens, conti-
( c ) S oc rate avance que S. j
nuoient de tenir leurs Affem-
Mclcce fat Evêquc de livrée \ . biées à part , depuis la mort
mais ceci eft contraire aux de Saint Euftathe. On les
meilleurs Auteurs. appelloit tujlathuns. On
(i) L'ambition porta de- donna le nom de Méf^Utu
puis cet tuaoxe
Eudoxe lur le Sv2&
fur ie aux vrtnoaoxcs
Orthodoxes qui fe fourni*
<

de ConfTantinoplc. i ent à $. Mélece

(O Cctoicnt ceux qui,f _

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xi6 S. Mèlece , Patr. d'Ant.
r tendre de Sageffe éternelle : Le Seigneur
la

FÉV. 12. ma commencement de fis voies


cr** )•
George de Laodicée , qui pajïa le premier ,
donna une explication Arienne. Celle d'A-r
cace renfermoit aufli le venin de l'Héréfie,
mais d'une manière plus couverte. Quand le
tour de Mélece fut verni , il établit la con-
fubftantialité du Verbe, & prouva qu'il s'agif^
foit dans ce paflaçe , non d une création pro->
prement dite , mais de ce nouvel être que li
Sageffe éternelle a pris dans fon Incarnation (2).
Ce témoignage éclatant rendu à la vérité, con-
fondit les Ariens , &
les pénétra de doulçùr.
Il cft exilé. Ils s'en vengèrent en engageant l'Empereur à

exiler le Saint dans la petite Arménie , un mois


après fon inftallation. Un mit fur fon Siège l'im-
pie Euzoïus , qui , n'étant encore que Diacre ,
âvbit été dépofé &
chaffé d'Alexandrie avec
Arius. Ce fut cet Euzoïus qui baptifa i'Empe-
reur Confiance à fon retour de la guerre àç
Perfe (/*). Les Orthodoxes de la Communion
çle Mélece ne voulurent point communiquer
avec les Ariens. Ils s'affemblerent donc aveç
leurs Prêtres dans une Églife des Fauxbourgs,
,

dédiée fous l'invocation des Apôtres. Ils tâche^


rent de s'unir avec les Euflathiens ; mais ceux-
ci le refuferent , prétextant toujours qu'ils ne
reconnoîtroient jamais pour Évêque légitime
un homme à Péleâion duquel les Ariens avoient
Concouru. Ainfi ils continuèrent de s'affembler

( 1 ) Prov. vin. aa. Mopfucrçne en Cilicie t peu


(a) S. Kpiph. h*r. 73. de temps après, ce (là-dire #
n. aç. le 3. Novembre 364,
(/) Ce Priaçç mourut à

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S. Mèlece , Patr. d'Ant. 117
à pan , comme ils l'avoient fait depuis l'exil
de Saint Euftathe
(g).
La permiffion que l'Empereur Julien avoit rtV "
,a *

accordée aux Évêques exilés de retourner


à
SïïLT?; "h^ à
noche. il tut accable de douleur en
An-
voyant le Antioche,
'

Schrfme qui divifoit fon troupeau. £n


effet , les
Euitathiens perfifterent à ne pas vouloir
le re-
croître : &
élurent même Paulin pour leur
Evêque. II fut fccré par Lucifer de
Cagliari
qui paffa par Antioche en revenant
du lieu de
ion exil. Cette Ordination
précipitée ne fit
qu'aigrir les efprits
de plus en plus. Peu de
temps après , Mélece eut un nouveau
fuiet de
douleur dans le rétabliffement du
Paganifme
par Julien FApoftat. Il s'y oppofa avec
une vi-
gueur vraiment épifcopale ; ce qui le fit exiler
une féconde fois. Mais il fut rappelle
en 363
par l'Empereur Jovien. Les
Ariens rabattirent
beaucoup de leur infolence, fous un
Prince at^
tache à fa Foi de Nicée plein
, d'eftime pour S.
Melece , &
qui dans les affaires eccléfiaftiques
le conduifoit par les avis de S. Athanafe.
Les
plus modérés d'entr'eux,
ayant à leur tête
Acaçc de Céfarée en Paleftine vinrent
, à An-
tiocheoù notre Saint avoit affemblé un Con-
ciJe de vingt-fept Évêques , & y fouferivirent
une confeffion de Foi orthodoxe.
Malheureufe-
ment l'Empereur
, qui avoit les meilleures in-
rentions pour le rétabliffement
de la paix dans
We , mourut après un règne de huit mois.
11 eut pour fucceffeur Valens , d'abord Ca-

r
*P°q«e fo- vift long-temp*
J[* 1
tocux Schifme des
1 fi l'Eglifo
Euftathi-ns d' Antioche.
& des Mcléciens ,
lequel di-

Pij

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118 S. Mélece , Patr. d'Anx.
tholique, puis Arien ^clarf
proteâioa U
Hérétiques ne fut
ouverte qii-il accorda aux
F!ÏV. 12. le zele de notre Saint.
noint capable de ralentir
toujours de défendre la faute doc-
Il continua
l'attaquoient.
trine contre ceux qui
Valens étant venu à Antiocheen 371, mit
œuvre pour attirer Meiece dans le
tout en
il eut la honte de
voir
parti des Ariens ; mais
U s'en vengea en
tous fes efforts inutiles.
Ue C0 '
le faint Patriarche à un troifieme
condamnant
" ' J[r
" furieux de voir qu'on lui en-
exil. Le peuple ,
s'affembla en tumulte , 6c
fcvoit fon Pafteur ,
fit pleuvoir une grêle de traits fur 1 Officier
char &. cet Officier
qui l'emmenoit dans fon ;

auroit infailliblement
perdu la vie, fi Meiece
couvert de fon manteau. U montroit
ne l'eut
, de quelle
par-là, dit Saint Chrvfoftome ( 3 )
cfe Jefus-Chrift doivent fe
Manière les difciples
l'injuilice des hommes (A). On le
venger de
conduifit dans la petite
Arménie, ou il nxa la
Nicopolis dans une Terre de
demeure près de
nommée Gétafe. La perfecution
fa famille,
point à
borna l'exil du Patnarche; es
ne fe
Fidèles furent chaffés
d'Antioche & de tous les
lieux oii ils tenoient leurs Affemblces. Il
y en
tourments d autres
eut qui périrent dans
les ;

l'Oronte. Il falloit être


furent précipités dans
pour plaire à l'Empereur. Sa haine con-
Arien
fi loin, qu il permit
tre les Catholiques alla
mômes de
célébrer leurs fêtes im-
aux Païens
pics , &
d'offrir des facrifiecs à
leurs Idoles (4).
« • , *
, - - 111

( , ) Hem. in S. McUt. T. 2. pour fo»^»^


4
«f-4.C.2},
) Thcodorct ,
(A)Mrs.Hermant&Fleurt (
1

S°">*. 1. c. 17.
prétendent que ce tumulte ar- 24 »

riva lorf^uc S. Mclecc parut

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I

S. MÊLE CE , TATR. 219


-
Cette perfécution dura jufqu'à la mort du per
fécuteur(i). FÉV . lla
Gratien publia aum-tot pluneurs Edits , tant
Itour le rappel des Evêques exilés , que pour
e rétabliflement de la Foi Catholique en Orient.
Notre Saint revint donc à Antioche ; mais il
trouva, en y arrivant, que le Schifme, au Son amour
}xs Ia paix
lieu de diminuer , avoit fait de nouveaux pro- ^°
*

grès. Pluiieurs Evêques d'Occident tenoient


pour Paulin ; Saint Athanafe même commit*
niquoit avec lui , quoique d'abord il eût désap-
prouvé fon Ordination précipitée. Quant à
Mélece, il comptoit parmi ceux de fon parti,
S. Bafile , S. Cnryfoltome y les deux SS. Gré-
goires , &
plufieurs autres Evêques qui étoicnt
alors regaixlés comme les plus brillantes lu-
mières de L'Empereur Thiodofc
rEdife.
ayant envoyé le Général Sapor à Antioche
pour prefTer l'exécution d'une de fes loix , qui
portoit que les Eglifes tenues par les Héreti-
eues feroient remifes entre les mains des Ca-
tholiques, notre Saint prouva de la manière
, qu'il n'avoit que des vues
la plus évidente

pacifiques* En effet , il dit à Paulin dans une


Àflemblée qui fe tint en préfence de Sapor :
» Puifque nos brebis ont la même Religion
» & profcffentla même Foi , raffemWons-Ies
» dans une feule Bergerie , terminons en- &
» fin toutes les difputes. Je fuis prêt à parta-
» ger avec vous le gouvernement de l'Eglife
» d' Antioche ; promettez-moi feulement que
» celui des deux qui furvivra à l'autre , fera

( i ) Valcns ayant été battu |


fe fauva dans une cabane , où
auprès d'Àndrinople en 378 A il fut brûlé par les Goto;.
T% • • •

PllJ

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2J0 5. MÊLE CE y PâTR. D'An?.
» feul Pafteur de tout le troupeau. » Cette ph>
FÉV. il.
pofition foufrrit d'abord de grandes difficultés ;
mais à la acceptée ,
fin elle fat Sapor rnit &
notre Saint en poflefîîon des Êglifes qui le re*
connoiflbient pour Evêque avant fon exil
ainfi que de celles dont les Ariens s'étoient
emparés. Pour Paulin , il continua de gou-
verner les Euftathiens.
Saint Mélece ne s'occupa plus que dés mo-
}rens de corriger les défordres introduits par
e Schifme &
par PHéréfie ; comme le choix &
des Miniftres eft d'iiné extrême conféquence
il n'en donna que de très-bons à fon Églife.
U préfida en 379 , au Concile d'Antiache ,
qui
condamna les erreurs d'Apollinaire , fans nom-
mer toutefois cet Héréfiarque. Il préfida aufli

au fécond Concile Général de Conftantino-»


pie ( k ) aui fe tint par Tordre de Théodofe
mort. efl 381. Il mourut dans cette Ville pendant

(k) Saint Mélece préfida mati/erent l'Héréfie des Macé-


au Concile n'y ayant aucun
,
doniens, fit rirent quelques
Evêque qui pût lui difputer ce additions au Symbole de Ni-
rang par la dignité de fon Siè- cée , pour mettre la doctrine
ge. Il n'y eut que les Evêques de la Foi dans un plus grand
d'Orient qui affifterent à ce jour. Ils approuvèrent aufti
Concile ; &il n'eft parlé nul* l'élection de S. Grégoire de
le part des Légats du Pape Nazianze pour le Siège de
Damafe, Cela n'empêche pas Conftantmople. Ce grand
qu'il ne foit regardé comme homme néanmoins fe démit
œcuménique , parce qu'il a dans la crainte de choquer
«té reçu par l'Eglife Univer- quelques perfonnes peu ins-
selle. Il étoit compofé de 1 jo truites, qui le regardoient
Evêques Catholiques , 6c de comme violateur d'un Canon
56 de la Secte des Macédo- du Concile de Kicée , par le*
niens. Ces derniers aimèrent quel la Tranflation d'un Evô-
mieux Te rettrcr,que de rétrac- ché à un autre étoit def^-
ter leurs erreurs en confeflant Mais S. Grégoire de
la divinité du Saint Efprit. ze «e pouvoit être 4 a
Les Pcres du CoacUe anathç- puifqu'U n'avq||^i

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S. Melece 9 Patr. d'Ant. 13
la tenue même du Concile. II fut extrême-
ment regretté de tous les Prélats , de l'Em- &
pereur , dont il s'étoit fait aimer par fes vertus
& fur-tout par cette douceur inaltérable qui lui
gagnoit tous les cœurs. Tous les Fidèles cTAn-
doche avoient autrefois fa mémoire en gran-
de vénération ; ils ne prononçoient fon noni
qu'avec refpeô , &
le faifoient porter à leurs
enfants. Us gravoient auffi fon image dans leurs
maifons , fur leurs cachets &
fur leur vaiflel-
le. C'eft de S. Chryfoflome que nous apprç-»
nons ces différentes particularités.
Tous les Pères du Concile affifterent aux fu-
nérailles de S. Mélece , qu'on célébra avec la
plus grande magnificence. L'un d'entr'eux pro-
nonça fon Panégyrique en plein Concile (/ ) %
& Saint Grégoire de Nyffe fit fon Oraifon fa*
nebre dans TEglife de Sainte Sophie , en pré-
fence de l'Empereur. Le corps du Saint Pa-
triarche fut depofé dans PEglife des Apôtres ,
d'où on le tranfporta à Antioche par l'ordre
de Théodofe , avant la fin de la même année.
On l'enterra dans l'Eglife qu'il avoit fondée
fous l'invocation de Saint Babylas , auprès &
des Reliques de ce faint Martyr. Cinq ans
après. Saint Chryfoilome, qu'il avoit ordon-

poueflîon de fon premier Siè- auparavant fournis au Métro-


ge, Onfit encore dans ce Con- politain d'Héradée enThrace.
cile fept Canons dé difciptine. Voilà le fondement de la cti-ç
Le le. reconnoifloit pour gnité Patriarchale à laquelle
ratnarcnes les r-veques a a- le Siège de Conftantinople fut
lexandrie fie d" Antioche. Le depuis élevé par le Concile
3è. accordoit la prérogative de Calcédoine.
d'honneur à l'Evêque de Conf- (/) Il eft probable que ce
tancinople f après celui de fut S. Àmphiloque d'Icône.
Rome » le premier ayant été
23 * S. Axtoinx ; P. de Coffsr.
"'

i né Diacre , prononça fon Panégyrique le 1 2f


FÉV. u.
^ e février : jour auquel il çft nommé dans les
Menées , &dans le Martyrologe Romain de-r
puis Baronius, Il feroit difficile de décider fi
çe jour fut celui de fa mort , ou de la transac-
tion de fon corps à Antioche. Saint Jean Da-
jnafcenç lui donne le titre de Martyr , à caufe
de fon triple banniflement , &
de tout ce
quil eut à fouffrir pour la Foi ( 5 ).

MÊME JOUR.
LE
SAINT ANTOINE,
SURNOMMÉ C A U L È E >

Patriarche de Canftantinaple,

CE
de
Saint naquit dans
cette Ville ,
un Château voifin
oii (es parents originaires de
,

Phrygie , vivoient retirés durant la perfécu-


tion des Iconoclaftes. Il fiit élevé par fon pere
dans de grands fentiments de piété ; dès &
Tâge de douze ans il fc confaora au fervice de
Dieu dans un Monaftere de Conftantinople. It
en devint Abbé dans la fuite. On le donna
pour fucceffeur au Patriarche Étienne
frère dç l'Empereur Léon VI , f\imommé £5
fage ou k Philojbpht. Il travailla avec zelc au
rétabliffement de l'unité , &
préfida au Con-
% ile où (\\t condamné tout ce qu'avoit fait le

(5) Orat.z. dt Imag. là Photius , banni en 886,


ta ) Eticnw avoit fuccédé
J

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Sai*tte Eulalie y 'V. M: 23$
Schifmatique Photius ( b ). Il fut toujours iur

le Trône Pa marchai ce qu'il avoit été dans la F£y # lJm


Solitude , c'eft-à-dire , un homme de prière ,
de mortification &
de pénitence.. Dieu le re-
tira de ce monde le 12 Février 896 , à l'âge
dè 67 ans, Son nom fe trouve en cëjour 4ans
les Ménées & le Martyrologe Romain. ^
Voyez ( ap. BolL ) ion Panégyrique , par
Nicéphore ; & le P. le Quien , Or. Çhr. T. 3 .
itaq T. i.j>. ï5o. .
l

SAINTE EULALIE
de Bar ce l o ne,
Vierge & Martyre,

c
^Ette
&
Sainte étoit de la Ville de Barce»
lonne , y fouffrit durant la perfécu-
elle
tion de Dioctétien. Ses Religues font à Bar-r
çelone , dont elle eft la principale Patrone. Il
y a plufieurs Églifes & plufieurs Villages de fon
hom dans la Guienne, le Languedoc &c (c),' ,

Voyez Tillemont , T. 5.

» (i) Les A£tes de ce Con- vais Ta prife pour Ste. EulaKè


cile fontperdus. On pourroit de Mérida dont parle Pru-
peut-être en attribuer fa perte dence. Ce fentimenteà con-
à la malice des Grecs , qui ont traire à la Tradition des Egli-
renouvelle le Schtfme. fes d'Efpagne. D'ailleurs ces
(c) Cette Sainte a deux Saintes font diftinguées
diffé- .

rents noms , Tune de l'autre dans le Minci


félon la diverfité
des pays. On l'appelle Ste. Mozarabique
_
& dans les , *

Çufalie , Ste. Olaire ou Au- Martyrologes de S. Jérôme ,


laire , Ste. Olacte , Ste. Oc» d'Adon, d'Ufuard, &o. Les
.cille , Ste. Olaille , Ste. Àu- Actes que nous avons de Ste.
lazie, &c. Ceft fans fonde- Eulalie de Barcelone , ne font
ment que Vincent de Boau» point authentiques, ^ '

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*34 $te. Catherine de Ricci.

XIII. JOUR DE FÉVRIER.


Sm CATHERINE
DE RICCI,
Religieuse de i/Ordre
de Saint Dominique.

Tiré defa Vie 9 écrite parle P. Séraphin Raz^l 1


Dominicain , qui Pavoit connue , &
qui étoït agi
de 58 ans lorsqu'elle mourut. Les Rcligicufes dit
Monajlcrt Vont trouvée conforme & à ce qu'elles
fivoient de la Sainte, & aux Mémoires buffet
par fin Conftfjcur. Le P. Èchard dit 9 en par-
lant de cette Vie , quelle efi exacte & qu'elle mé-
rite d'être lue. Elle a été imprimée à Luques en
1 6g 4 9 m 0
4 Nous en avons une féconde , écrite
.

far le P. Philippe Guidi 9 Confeffeur de la Sainte %


& imprimée a Florence en iGzz, 2. V. in 4°.
Vqye{ encore les Abrégés de la même Vie par les
PP. Michel Pio & Jean Lopc[; & Benoit XIV\
de Canonif. ferv. Dei. T. c. inter Afta Can<H
Xiifat. j. Sanûorum. Append.

L'An 1589.
if**
13. ETTE Sainte naquit à Florence erl
tfii. Pierre de Ricci fon pere, Catherine & 1

de Bonza fa mere , étoient de familles très-


diftinguées dans la Tofcane. Elle fut nommée

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,

Ste. Catherine de Ricci. 23 j


Àlexandrine au Baptême ; mais elle prit le
nom de Catherine, lorfqu'elle fe confacra à rtv t ., 34
Dieu par la Profeflîon Religieufë. Au dëfàtit
de fa mere , qu'elle avoit perdue eri Bas âgé -,

fa marraine , dame pleine de piété, fé char*


eca du foin de fon éducation. On ne fut pa§
long-temps à s'appercevoir des heurëufes dif-
politions que Dieu avoit mifes dans fën ame*
Lorfqu'elle eut atteint l'âge de fix à fëpt ans i
fon pere la mit en penfion dans le Coiîvént dé
Monticelli à Florence , où Louife dé Ricci fà
tante 9
étoit Religieufë. La folitude , qui d'or-
dinaire n'offre rien que de trifte à Un enfant
devint pour elle un lieu de délices. Eloignéé
du bruit & du tumulte du monde , ellè te 1h
vra toute entière à l'attrait qu'elle fe fentoit
pour les exercices de Religion.
Son pere Tarant rappellée dans le mondé
quelques années après , elle fuivit , autant
ou'il fui fot poffible , le plan de vie qu'elle s'éfoit
formée dans le Monaftere. Mais le danger de là
dilBpation, inféparable de l'état dés perfonnés
de fon rang , lui infpira bientôt le mépris dti
fiecle. Elle réfolut de le quitter , afin â'âllér
s*enfévelir pour toujours dans la rettalle. Elle
s'en ouvrit qui tfpfréfc Vkh des
à fon pere ,

difficultés, donna fon ébnferïtèmenf.


enfin
Catherine ne différa plus l'exécution de fon
deflein , &
fon choix fut bientôt feit par rap-
port au Monaftere. Elle fe retira chéz les Do- EUcfc fait
RcliS ieufc*
minicaines de la Ville du Prat en Tôfcane ,
dont le P. Timothée de Ricci fon oncle étoit
four lors Direâeur , & elle y prit le voile à
âge de quatorze ans.
Dieu , qui vouloit faire de Catherine une
époufe digne de fon Fils crucifié , mit fa pa-

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Ste. Catherine de Ri cet.
•l
tienee aux plus rigoureufes épreuves. Il l'afflL-

ïÉV. ii. êea pendant deux ans de plufieurs maladies


compliquées , qui lui caufoient des douleurs
très-vives , &
que les remèdes ne fkifoient
qu'aigrir. La Sainte 9 loin de murmurer , fç
rejouiflbit d'être aflbciée aux fouflfrances de
Jefus-Chrift , dont elle faifoit le fujet conti-
nuel de Tes méditations. La fanté lui fut enfin
rendue commfc par miracle ; mais elle ne s'en
fervit que pour fe dévouer à tout ce que la
pénitence a de plus pénible. Ses aurférités
Ses vertus, avoient quelque chofe d'extraordinaire ; elle
jeûnoit au pain &
à l'eau deux ou trois >ours
de la femaine : quelquefois elle paflbit les jours
entiers fans prendre aucune nourriture : elle
châtioit fon corps par de rigoureufes difei-
plines , & fe meurtriffait les reins par une
girofle chaîne de fer. A cet amour de la mor-
tification , elle joignoit une obéiffance par-
faite, ime douceur inaltérable, fur-tout&
une humilité profonde. De-là ce mépris d'el-
le-même, cette horreur des louanges & des
diilinûions , ce défir d'être totalement incon-
nue aux hommes. à
Elle travailloit fans ce(Te
crucifier les penchants natu-
corrompus de la
re , afin que fon cœur étant purifié de toute
ardeur terreftre , elle pût s'unir à Dieu par
les liens facrés de l'amour le plus intime. Son
empreffement à rechercher ce qui étoit le plus
agréable à Dieu , lui fourniflbit des occafions
fréquentes de pratiquer les plus héroïques ver-
tus. Elle puifa dans la ferveur de Poraifon ce

d by Google
S te. Catherine de Ricci. 237
Catherine ftit élue , étant encore fort jeune,

Maîtrefle des Novices , puis Sous-prieure ;


enfin , on la fît Prieure perpétuelle à l'âge de
vnigt-cinq ans, La haute réputation de (àinteté
&: de prudence dont elle jouiflbit , attira à fon
Monaftere un grand nombre de Princes , d'Évê-
ques & de Cardinaux. Elle étoit en relation
de lettres avec Saint Philippe de Néri, il &
arriva à l'un & à l'autre quelque chofe de-
femblable à ce que Saint Augiulin rapporte
de Saint Jean d'Egypte. Comme ils avoient
tous deux un extrême défir de fe voir , Dieu
leur accorda cette fatisfàôion , par le moyen
d\inevifion oîi ils s'entretinrent long -temps
enfemble. Saint Philippe de Néri , qu'on n'ac-
cufera pas d'une exceflîve crédulité en matiè-
re de vifions , attefta depuis la réalité de cel-
le-là ( a ). Il n'y a que Dieu qui connoifle tous
les raviifements dont il favorifa fa fervante
fur-tout lorfqu'elle méditoit fur la Paiîion de
Jefus-Chrift ,
qu'elle avoit coutume d'hono-
rer fpécialement certains jours de la femaine.
Enfin, Sainte Catherine mourut après une
longue maladie, le 2. Février 1589, à l'âge
de 67 ans. Elle fut béatifiée par Clément XII
en 1732, &
canonifée en 1746, par Benoît
XIV, qui a fixé fa Tète au 13 de Février.

(a) Voyez la Vie de Saint comme indubitable, par Bacd;


Philippe de Néri , par Galloni Auteur dune autre Vie de
fon difciple , ( apud Bolland. Saint Philippe de Néri , &
AH. SS. Mai/ t T. 6. p. jof , dans la Bulle de la canoni-
toi. z. n.146 ). Les BollandiA fation du même Saint , don-
tes ajoutent {ibid. p. joa. col. née par le Pape Grégoire
2 ) que ce tait tut attefté XV. ( In Bullar. Chcrubiru , T.
par cinq témoins dignes de 4> p» S.
loi. Il cil encore rapporte

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138 Ste. Catherine de Ricci.
I
L'exemple des plus grands Saints nous ap*
FÊV. 13. P rend que la contemplation ne doit jamais êtie
leparée de l'aûion. Il eft ordonné dans les Ins-
tituts monaftiques d'allier toujours l'un à l'au-
tre. C'eft eue l'efprit a befoin de relâche , &
l'exercice au corps,
Si'il faut neccflairement de
ous avons d'ailleurs certains devoirs à rem-
plir par rapport au prochain , & par rapport
a nous-mêmes. Y manquer , fous prétexte de
vaquer à la prière , ce feroit une illufion. Il
eft vr^i que nous fommes citoyens du Ciel
j
mais cette qualité n'exclut pas les devoirs dont
je viens de parler. L'ordre établi de Dieu^ veut
donc que la contemplation §C Fanion foient
unies enfçmble par des liens indiflblubles. Ainfi
la vraie, la folide dévotion cprçfifte dans une*

fainte habitude de vaquer à tputes les occupa-


tions extérieures en la préfence dp Dieu , de

ne jamais perdre de vue ,


le & de s'en rappro-
cher fouvent par des afpirations fecretes. Sainte
Catherine de Ricci pofledoit ce grand art dans
le degré le plus éminent. Cela ne l'empêchait
pas d'avoir des heures réglées pour l'exercice
de la contemplation, qui jfoifoit toujours fes
plus chères délices. Elle s'élevoit alors au defc
lus des fens , pour appliquer tout fon eiprit à
la confidération des grandeurs & de la bonté
de Dieu ; &par là elle s'excitoit de plus en

F
lus à le louer , à l'adorer ,& à l'aimer de toute
étendue de fon cœur.

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Saint L é z j n 3 E. 239

SAINT LÊZIN,
Êvêque d* Angers*
Tire de fis deux différentes Vies publiées par
Bollandus* Uunc fut écrite fur Us relations de fes
dlfdples , peu de temps après fa mort. Vautre a
pour Auteur Marbodius > Archidiacre d'Angers %
puis Èvique de Rennes.

Vers l'An 61S.

JL É ziNnaquît en 540 ; fut élevé dans* &


toutes les feiencesque devoit apprendre un
jeune Seigneur de la plus haute qualité. On
Tenvoya , à Pâge de vingt ans , à la Cour de
Clotaire I , dont il étoit proche parent. Sa pru-
dence & fa valeur le firent fingulierement ef-
timer du Roi, qui lui donna la Charge de Grand-
Écuyer. Il ne le laiffa point éblouir , comme
les âmes vulgaires , par hon-
le faux éclat des
neurs ; il fut même les une exaûe
fanâifier par
fidélité à remplir tous les devoirs du Chrif-
tianifme. Bien éloigné de Terreur des Grands ,
oui ne trouvent point de crime dans une vie
fenfuelle &
diffipee 9 il châtioit fon corps par
la pratique du jeûne , &
rappelloit fouvent
fon cœur vers Dieu par l'exercice d'une priè-
re fervente. Lorfqu'il fut devenu Comte ou
Gouverneur d'Anjou , il céda aux follicita-
tions de les amis qui le preflbient de fe ma-,
rier. Mais celle qu'il devoit époufer, fe trou-

va frappée de la lèpre , la veille du jour mar-


qué pour la célébration du mariage, Notre
±46 S Ai Nf Le z t n, Ê.
Saint , qui reconnut la main de Dieu dans cc£
fèv. accident, réfolut d'exécuter la réfolution qu'il
avoit prife depuis long-temps de renoncer en-
tièrement au monde. Il entra donc dans la Clé-
riorture en 580 , & alla vivre dans une Com-
munauté de pieux Eccléfiaftiques , dont il de-
vint bientôt le modèle par fa piété , par l'auf*
térité de fa pénitence , par fon zele a lire 6c
à méditer l'Écriture Sainte*
r
, 14c. Évêque d'An-
* Après la mort d Audouin

gers , arrivée vers l'an 600 , le peuple , qui n*a-


voit point oublié lajufticè & la douceur du gou-
vernement de Lczin , le demanda pour Pafteur ;
& ce choix fut confirmé, tant par la Cour, que
par le Clergé. 11 n'y eut' cfufc le Saint qui rcfufa
fort confentement , parce qu'il ne fe vtfyoit
qu'avec les yeux de fon humilité. Il fut pour-
tant obligé de céder à la fin , & de recevoir
Fimpofition des mains. Dès-lors il fe regarda
comme un homme qui n-étoït plus à lui-même,
6c qui étoit comptable de tout fon temps à Fu-
tilité de fon troupeau. Sa follicitude embraf-
foit tout à la fois les befoins des corps & ceux
des ames. Ferme quand il s'agiflbit de la ma-
nutention de la difeipline , il favoit aufli compa-
tir à la foibleffe des pécheurs. Les cœurs les plus
endurcis ne pou voient rclifler à la force réunie
de fes difeours & de fes exemples , que Dieu
appuyoit encore du don des miracles. Comme
les fondions extérieures du miniftere ne laifle-
roient pas , toutes faintes qu'elles f ont , de je-
ter dans la diflipation & la féchereffe une ame
qui négligeroit la pratique du recueillement
notre Saint faifoit de fréquentes retraites , pour
s'entretenir dans cet efpnt de piété & de com-
ponÔion qui doit caraftérifer les vrais Pafteurs.

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$ AI NT POLVEITCTE ,M< ±41
Son amour pour la folitiide lui fit même pren-
dre la réfolution de quitter fon Siège , ahri dé
j^y,* i%
n'être plus occupé que du foin de fon prôpre
Mais il ne put l'exécuter * parce que le*
falut.
Évêques de la Province auxquels il s'en étoit
ouvert , n'y voulurent jamais confentin 11 con-
tinua donc de fe dévouer avec zele au fervile du
troupeau que la providence lui avoir confié*
Ses dernières années ne furent qu'une fuite
continuelle d'infirmités qu'il fuppoita ave<! Un*
patience inaltérable- ïl mourut vers Pan 6 1 8
f
à foixante-^inquieme année de fort âge , &C
la
tat enterré dans rÉglife de Saint Jean-BaptLIle^
appartenante au Monafteré qu'il avoit fondé
^
dans le deffein de s'y retirer. Cette Églife ,
aujourd'hui Collégiale , poflede encore les pré-
cieufes dépouilles de fon faint Fondateur-
On rendoit un culte public à S. Lézin dis ld
VII fiecle , & Ton célébfoit fa fête le premier
de Novembre ; mais présentement il n'efl nom-»
mé dans le Martyrologe Romain, quë le i) d*
Février. L'Églife d'Angers en fait mémoire la
8 de Juin > qui paroît avoir été le jour de fod
Sacre ; & le 21 du même mois , â calife de
la tranflation de fes Reliques, qui le fit en
Jl6 9-

LE MÊME JOUR.
SAINT POLYEUCTE,
Martyr-
d E Saint étoit Officier dans les Troupes de
l'Empire oui avoient leurs quartier» à Mélî*
Âne dan* la petite Arménie. Il étoit , quoique

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24 i Saint Polyevcte ,M.
Païefi, uni d'une amitié fort étroite avec Néar-

que Chrétien très-zélé. Le feu de la persécu-


,

tion s'étant allumé , celui-ci fe prépara à don-


ner fa vie pour la Foi. Mais il refTentoit une
vive douleur , en penfant qu'il laiffoit fon ami
plongé dans les ténèbres de l'Idolâtrie. H lui
parla donc de la Religion Chrétienne , le fit &
avec tant de force , qu'il lui ouvrit à la fin les
yeux. Dès-que Polyeuftc eut connu la vérité ,
il ne défira plus que I'occafion de lui rendre

témoignage par Peffufion de fon fang ; il ne tar-


da pas à voir fes défirs accomplis. En effet ,
ayant déclaré publiquement qu'il étoit Chré-
tien , il lut arrêté & condamné à fouffrir 1»
queftion la plus cruelle. Les Bourreaux , las de
le tourmenter , effayerent de le féduire par des
raifonnements fpécieux ; mais leurs efforts fu-
rent inutiles. Le Martyr ne fut pas plus ébranlé
par les prières & les larmes de fa femme Pau-

line , de fes enfants &


de fon beau-pere. Ces
épreuves même ne fervirent qu'à fortifier fa
Foi de plus en plus ; &
il écouta la Sentence

du Juge avec autant de joie, que de tranquil-


lité.
Pendant qu'on le conduifoit au fupplice , il

exhortoit les Infidèles , de la manière la plus


touchante , à quitter leurs fuperftitions , pour
adorer J. C. & il eut la confolation d'en
convertir plufieurs. Les Bourreaux lui ayant
tranché la tête , les Chrétiens enterrèrent fon
corps à Mélitine. Néarque recueillit fon fang
dans un linge , & écrivit enluite les Aâes de
fon martyre , qui arriva durant la perfécutîon
de Dece ou de Valérien , c'eft-à-dire , vers
Tan 250 ou 257. Les Grecs font fa fête avec
beaucoup de folennité le 9 de Janvier. Le Ma^

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SltNf PoLïkvctk,M. itf
&
tyrologc attribué à Saint Jérôme , un an-
cien Calendrier Aftfiértien la marquent au 7 dil fi^. j j;
même mois , qui fut probablement le jour de
fon martyre. Mais l'ancien Martyrologe ^ en-
voyé de Rome à Àquilée , dans le VIII fiecle ^
& qui fut copié par Adon Ufuard , ne fait &
mémoire de Saint Polyeuûe que le 1 3 de Fé-
vrier. U eft nommé le même jour dans le Mar*
tyrologe Romain;
Il y avoir à Mélitinë, dans lé IV fieclé^ ùné

Églife de Saint Polyeuûe , oii Saint Euthyme


àffoitfouvent prier. Il y en avoit aùfli une
magnifique à Conftantinople fous l'Empereur
Jumnien ; &
les hommes , comme nous l'ap*
prenons de Saint Grégoire de Tours ( 1 ) , y
fàifoient leurs ferments les plus folennels. Le
même Auteur dit encore ( % ) que nos Rois de
la première race confirmoient leurs Traités
par le nom, Martyr Polyeuâej
du faint
Voyez de Saint Polyeuâe^ tirés
les Aftes
de ceux que Néarque fon ami , avoit écrits j
TiUemont , T. 3. p. 414 ; Jof; Affémani , ià
Caltnd, ad $i Januarii , 7V 6 (.«).- ;

I ) Dt Glcr. Mart. c.103. re ,de corrompre lés vertui


» ) Hifl. Franc. L 7. <« 6. chrétiennes , & de mêler la
' a Le Grand Corneille ,
tendreffe de l'amour humain
)
â lait du martyre de Saint à rhéroïfme de l'amour dV
Polyeuac,le fujet d'une de Tes vin. Qu'on juge de«là com-
Tragédies «C fon peut dire
-,
bien il eft difficile de rendit
la Tragédie , innocente ) ÔC
que c'efl un chef-d'œuvre dans
c'eft fans rai fon que le*
le genre dramatique. Mais Ce-
fi

la n'a pas empêché les per- Maîtres de la morale évan«


fonnes picufes d'être choquées géUque ont prononcé que ld
Tfiéàtre le plus épuré au*
de la liberté que le Poète s'eil
donnée de faire monter les yeux du monde , fera* ton»
Saints fur le Théâtre , d'al- jours incompatible avec U
térer la vérité de vraie piété , & ne fcnrir-l

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I

144 Saint Grégoire II, P.

*êv. ij.
SAINT GRÉGOIRE II,

Pape.
O RÉGOIRE II naquit à
gnit une éminente fainteté à
une profonde
Rome , & joi-
connoiffance de l'Écriture Sainte , de tou- &
tes matières eccléfiaftiques. Il fut ordon-
les
Pai-
né Sous-diacre par le Pape Serge I , qui
Son rare, mérite le fit élever
moit beaucoup.
aux places de Sacellaire &
de Bibliothécaire,
étoient alors trcs-confidérables. Il fut
char-
qui
importantes, dont
gé de plufieurs commiffions
s'acquitta avec une capacité fupéneure. Il
il
Conftantin ,
fuivit à Conftantinople le Pape
& fatisfit à toutes les queilions des Grecs , par
Après la
les réponfes les plus folides (* )•

mort de ce Pape , il fut élu pour lui fuccé-


Il fignala l'entrée de fon
Pontificat par
der.
la dépofition de Jean ,
faux Patriarche de
Conftantinople, quifàvorifoit FHéréfie des Mo T
nothélites. Il fonda deux Monafteres à
Rome ,
& fit rebâtir celui du
Mont-Cailin, détruit par
les Lombards. Il travailloit fans relâche à ex-

pour objet Concile in Trui-


le
jamais qu'à réveiller des paf-
te parce qu'il
ainli appelle,
iions d'autant plus dangéreu- ,

fês , que nous en portons le


sétoit tenu dans une Salle
germe dans la corruption de du Palais Impérial » nommé
notre cœur. Voyez Boffuec Tnllus. Les Papes avoient
retufe de le contirmer a caufe
le Prince de Conti , Nicole ,
&
parmi les anciens , de certains Canons qui al-
&c i
loient a détruire T uniformi-
Tertullien , 2>aint Cypnerf ,

té de la difeipline entre l'É-


Saint Chryfoftomc , Salvien
«ce. glife Grecque &
la Latine.

. (a) Ces Queftions avoient

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Saint Gréçoire , P. 245
tirper toutes les erreurs qui corrompoîent la *5HB
pureté de la Foi, Comme plufieurs peuples F
£y
de la Germaniè^vivoient encore dans les im-
piétés du Pa^anifme , il leur envoya des Mif-
îionnaires zélés, pour les inftruire &
les ame-
ner à la connoiuance de la vérité. Il facra S.
Corbinien & S. Bonifàce , Évêques , l'un de
Frifingen ; & l'autre , de Mayence.
L'Empereur Léon l'Ifaurien, ayant déclaré
une guerre facrilege aux faintes Images en 716 ,
les Evêques Orthodoxes d'Orient refuferent
d'obéir à fes Édits , & s'adrefferent au Pape
Grégoire. Le faint Pontife tâcha de fléchir le
perfëcuteur , par fes larmes &par fes prières ;
mais il ne put rien gagner. Perfuadé toutefois
qu'on ne peut en aucun cas être difpenfé de
la fidélité que l'on doit à fon Prince , il fut re-
tenir dans le devoir les peuples d'Italie , qui
vouloient fe révolter à caufe des perfécutions
qu'éprouvoient les Catholiques. Il écrivit en
même-temps aux Évêques de s'oppofer géné-
reufement aux progrès de THéréfie que l'Em-
pereur tâchoit d'établir. Léon , aux yeux du-
quel l'attachement à la faine doftrine étoit un
crime , donna plufieurs fois des ordres pour
faire aflafliner notre Saint ; &
fans la vigilant
ce des Romains & des Lombards, il auroit
infailliblement péri. Il mourut le 10 Février
73 1 , après avoir fiégé 1 5 ans , 8 mois &
23 jours. Le Martyrologe Romain en fait mé-
moire le 1 3 de Février ; c'eft peut-être le joua
où il fut enterré dans l'Églife du Vatican,

-

Q fij

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1+6 S. ^ARTllflEN , HERMITE,

SAINT MARTINIEN,
H E II M I T Et

IL. E Saint naquit à Céfarée tn Paleftine , ù>u$


l'Empire de Confiance. Dès l'âge de 18 an$
il (ç retira dans une Solitude voifme, où i!
«'exerça à la pratique de toutes les vertus. Il
parvint bientôt à la fainteté la plus éminente ;
opéroit, rendit
fie toutes parts fon nom très-célebre. Il y
iivoit vingt-cinq ans qu'il vivoit dans cette So-
litude, lorfque Dieu permit qu'il fut éprouvé
Îar la plus délicate de toutes les tentations,
/efprit de ténèbres entreprit de le pervertir
par Ips déteflables rufes d'une Courtifane de
Céfarée , nommée Zoé. Cette méchante fem-
inç «'étant couverte de haillons , fe rendit
Vers le fbir à la cellule du Saint, fe don-
nant pour une perfonne pauvre qui s'étoit éga-»
frée dans le Defert , &
qui couroit rifque de
périr, fi qt\ lui refufoit l'hofpitalité. Marti-
flien attendri la reçut dans fa cellule.
Le lendemain matin , Zoé quitte fes haillons j
fé revêt d'habits magnifiques qu'elle avoit ei|
foin d'apporter avec elle , fe préfente ^infi pa?
fjç devant le faint Hermite , & lui dit qu'elle
^toit venue de Céfarée dans le deffein dç lui

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S. MARTINIEN 3 ffERMITE. 147
H moi , que les Saints de l'ancien Teftament ont
> été riches & engagés dans l'état du Mariage. »
Martinien devoit fans doute , à l'exemple du
chafte Jofeph, chercher fon falut dans une
prompte fuite. Mais Dieu ^ pour le punir peut-
être de quelque préforaption fecrete , permit
qu'il écoutât cette langue enchanterefle, &c
«ra'ilconfentît dans fon cœur , à la proportion
de Zoé. Comme il touchoit au moment oît
pluiieurs perfonnes vénoient recevoir fes avis
& fabénédi&on, il s'avança au-devant d'eux
^
dans l'intention de les congédier. A peine fut-il
feul , que des remords falutaires diffiperent le
preftige. Il rougit de fa foiblelTe , &
retourna
promptement à fa cellule. La première chofe
ou'il fit en y entrant, fut d'allumer un grand
feu dans lequel il mit fes pieds. La Çourrj*-
fane accourut au bruit des cris que la dou-
leur lui arrachok. Quelle fut fa furprife , quand
elle le vit étendu par terre baigné de larmes 9
& les pieds à moitié brûlés !» Ah ! difoit
h Martinien , comment fupporterai-je le feu
» de l'Enfer , fi je ne peux iupporter celui-ci
w qui n'en eft que l'ombre ? Zoé ne put tenir
contre un tel fpeâade. La grâce ayant amolli
la dureté de fon cceur elle devint pénitent
?
te , de péchereffe qu'elle étoit , &
pria le Saint
de la mettre dans la voie du falut. Martiniea
l'envoya au Monaftere de Sainte Paule à
Bethléem , où elle paflà lç refte de fa vie dans
les auflérités de la plus rigoureufe pénitence;
Notre Saint s'étoit tellement brûlé, qu'il
fie put de long-temps fe fervir de fes pieds.
Lorfqu'il fut en état de marcher , il fc retira
fur un rocher efcarpé que la mer environnoif
de toutes parts , ann d'écarter de lui jufqu à

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,

1+9 S, Martinjen 3 HerMite.


l'ombre rpême du danger. Là , il vivoit expofé
ytym aux injures de l'air, fans jamais voir aucun
? *f
homme, excepté un Marinier qui deux fois
an , lui apportoit du pain , de Peau des &
ppanches de palmier pour fon travail. Six an-
nées fe paflerent de fa forte. Mais un événe-
ment imprévu vint fnçorç troubler le faint
Hçrmite. Un vai fléau, battu par la tempête , fe
Jmfa contre lç rocher ; tout Péguipage périt ,
è l'exception d'une fille qui fe fauva à la fa-
vçiir d'une planche qu'elle avoit faifie : elle ap-
ÎerçQit Martinien oc l'appelle à fon fecours.
,

e laint Hermite fe crut obligé de fauver la


vie à Une perfonne qui étoit en danger de pé^
tir ; mais il replut en même-temps de quitter
fa Solitude, dans la crainte d'être tenté une
féconde fois. Comme il lui reftoit encore des
provifions jufqu'au retour du Marinier, il les
Jaiflk & çettë fille qui devint lui modèle de
pénitence, 6ç mourut depuis fur le rocher.
Aprè$ toutes ces précautions , il faute dans la
îî]Çr, plein de confiance en Dieu , gagne &
la terre ferme à la nage. Ayant erré de
Péferts en Péférts , il arriva enfin à Athènes
f>ù il mourut vers commencement du V
le
ffecle, à l'âgç d'environ 50 ans. Son nom ne
fe trouve point dajis le MartyrQloge Romain ,
fnais il çft dans les Ménées aes Grecs. Il étoit
Spécialement honoré dans l'Orient, fur-tout &
è Conftantinople , dans une Églifç vpifinç de
de Jainte Sophie.
ççlle
Voye^fçs A&e$ dans Bollandus ; JoC &
Atën\m 9 M
Çtàn* Univ. ad #3. Fd>r. T. &.

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S. Fulcran , Évêque. 149

SAINT FULCRAN, ^ ,3<

ÉVÊQUE DE LODEVE,
en Languedoc,

Fulcran fortoit de rilluftre famille des


Comtes de Soufbncion , & fut élevé avec foin
dans la piété & dans les fciences. On remar-
qua toujours en lui , même dès fes plus ten-
dres années , un amour fingulier pour la ver-
tu de chafteté. Après la mort de Thierri , Êvê-
que de Lodeve , il fat élu d'une voix unani-
me , pour lui fuccéder. Il eut beau prendre la
faite &
fe cacher ; il fat découvert conduit &
à Narbonne , oîi Émery le facra le 4 Février
049. Le nouvel Évêque fe dévoua tout entier
a la fanâification de fon Diocefe. Il réprima
le vice , corrigea les abus , & rétablit par-tout
le regnç de la piété. Son immenfe charité lui
trouver les moyens de fournir à tous les
feifoit

befoins des malades &


des pauvres de fon
Diocefe. Par une fuite de l'amour qu'il avoit
pour les perfonnes confacrées à Dieu , il fon-
da le Monaftere de S. Sauveur, en répara
quelques autres , &
remit la difeipline daos
toutes les Maifons Religieufes. Il fit auffi de
grands biens aux Églifes &
aux Hôpitaux. La
crainte qu'il eut d'avoir contribué à la mort
d'un Évêque Apoftat,par des paroles que la
vivacité de fon zele lui avoit arrachées , le je-
ta dans les plus grands fcrupules. Il s'impolk
une très-rude pénitence, &
alla même à Ro-
me demander l'abfolution de la faute dont il

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îçô S. Êtienne y Abbé.
a===== fe croyoît coupable ; îl mourut le 13 Février
JÉVH. 13. 1006, après 57 ans d'Epifcopat, &fiit enter-
ré dans la Cathédrale dédiée fous l'invocation
de Saint Gêniez. Dieu confirma l'opinion qu'on
avoit de fa fainteté, par les miracles dont il ho-
nora fon tombeau. On leva ion corps de terre
vers l'an 11 27 , &
il eft demeuré fans cor-

ruption jufqu'en 1571 , que les Huguenots le


jetèrent au feu. Il y a encore quelques par-

celles de
Reliques à Lôdeve , dont U eft
fes
fécond Patron,
Voyez dans Bollandus fa Vie écrite par Ber*
nard Guidants , Jacobin , qui fut fait Evêque de
Lodeve en 1 3 24. Cet Auteur dit qu'il a fui vi
les anciens A&es du Saint , & qu'il n'a retran*
ché que ce qui lui a femblé fuperflu. Voyez
auffi Gatel , 1. 4. de fes Commentaires fur CHiJ*
taire de Languedoc.

SAINT ÉTIENNE,
Abbé d'un Monastère,
près de Riéti , en Italie.

E Saint méprifa toutes les chofes terref*


très ,
pour ne s'attacher qu'aux biens invifii
bles. Le défir de fe livrer tout entier au fkint
exercice de la prière le porta à fe féqueftrer
entièrement du commerce des hommes. Il fe
rendit fur-tout recommandable par fa patience
dans les injures , & par fon amour extraordi-i
naire pour la pauvreté. Nous apprenons dç
Saint Ôrégoire le Grand % que des Anges l'affif*

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Saint Modonno c. 151
terent dans fon agonie , & conduifirent fon
pme bienheureufe dans le Ciel. Ce faint hom-
lh
me vivoit dans le VI fiecle. Il eft nommé çn ce
jour dans le Martyrologe Romain,
Voyez Sîjdnt Grégoire le Grand , Hom. ji.
in Evang. T. i p. iGiG. & l. 4* Dial. c. 13,
r

SAINT MODONNOC
p' O $ s o a y,

Îl élevé dans la pratique de toutes les


fut
vertus chrétiennes , fous la conduite de Saint
Pavid. On croit qu'il occupa le Siège d'Oft
fory en Irlande , vers le milieu du VI fiecle
Voyez Ware, /. de A naquit. Hibcrn, & /,

$5.Epifcop. Hibcr.

(a) Dans le XI fiecle , le ce petit Comté , à Àghavoa ;


Siège d'Oflbry fut transféré & dans le XU , à Kill-Kenny,
ic ScirK&an t
Capitalç de
J
Voyez Ware , kh cU<

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i5 * Le Bienheureux Roger.

févr,i3.
LE BIENHEUREUX ROGER.
R Oger
Loroy en Berry
entra dans l'Ordre de Cîteaux à
, devint cnfuite Abbé d'Élan ,

près de Retel en Champagne , &


mourut vers
ran 1 175. Il y a dans PÉglife de l'Abbaye d*fr

lan , unç Chapelle qui porte fon nom , 8c où


Ton garde fes Reliques dans une Châfle. On
l'honore dans cette Abbaye le* 13 de Février,
mais fans en faire l'Office ; on en dit feulement
la Mefle. S^l Vie a été écrite par un Moine
d'Élan.
, Voyez Chaftelain au 4. de Janvier , jour oîi
le nom du B. Roger fe trouve dans le Calen-
drier de Cîteaux , imprimé à Dijon.

-
«

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,

S. Valent in , Pr.M. i
+

XIV. JOUR DE FÉVRIER.


SAINT VALENTIN
PRÊTRE ET MARTTR.
Voye^ TUUmont , T. 4, p. €j8,

II L Siècle.

S AINT VALENTIN, Prêtre de rÉglife


nvK
Romaine , avec Saint Marius
fe confacra & "
,

toute fa famille , au fervice des Martyrs qui


fouffrirent fous l'Empereur Claude II. Les
Païens Tayaut arrêté , on le conduifit , par l'or-
dre du Prince, devant le Préfet de Rome. Ce-
employa les promeffes les plus féduifan-
lui-ci

tespour le aire renoncer à la Foi ; mais il ne


put ébranler fa confiance. Il ordonna donc
qu'on le battît rudement , &
qu'on lui tranchât

vers
bâtir une Églife
lenûn ,
auprès du Ponte-rfiole. La Porte , ap-
pelée aujourd'hui dtl Popolo , portoit ancien-
nement le nom de ce faint Martyr. On garde
la plus grande partie de fes Reliques dans l'É-
gli/e de Sainte Praxede. U eft nommé avec la
ualité d'illuftre Martyr , dans le Sacramentaire
1 e Saint Grégoire , dans le MifTel Romain de
Thomalius , dans les Calendriers du P. Fron-
teau , & d'Allatius ; dans les Martyrologes de
Bede, d'Ufuard, d'Adon, de Notker, &ç.

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îj4 S. Valentin 3 Pr.M,
Ni la vue des fupplices , ni la crainte dé ià
mort ne purent empêcher Saint Valentin de
fecourir les Chrétiens dans les fers * pairce que
rien n'étoit capable de féparer les Martyrs de
l'amour de Jelus-Chrift. Ce feu facré qui em-
brafoir leurs cœurs , les faifoit fôupirer fans
cefle après leur célefte patrie. Us défiroient
ardemment , comme Saint Paul , la diflblution
de leurs corps , afin de procurer à leurs ames
une union parfaite avec le divin Époux. Com-
me les Juifs captifs à Babylone , ils fondoient
en larmes au feul fouvenir de Jérùfalem ;
ils gémiflbient , comme le Prophète
&
, de la
longueur de leur exiL Àuffi $ avec quel em-
preffementne faififfoient-ils pas les occafionsde
verfer leur fangpour parvenir plutôt au ter-»
me de leurs défirs ! Noûs fervons le même
Dieu qu'eux , nous fommes les héritiers de
leur Foi , le fommes-nous de leur charité ?
Quel contrafte plus humiliant pour nous
y
que celui de leur amour , &
de notre uw
différence 1

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,

Saint Maron^Abbè. 255

FÉVR.
SAINT MARON 144

Abbé en Syrie.
Tiré de Theodont , Philoth. c- 16. il. 14.
30. yoye{ Tilltmont , T. 12. p. 41 z ; le Perc U
Quien , Or. Chrift T. 3 . p. 5 ; Jofcph Ajfcmani 4
Bibl. Orient. T. i.p. 497.

L'An 43 5.

Saint MAROKfe retira fur une mon-


tagne voifine de la Ville de Cyr, oh
il vivoit

prefque toujours expofé aux intempéries de


l'air. Il avoit à la vérité une Tente , faite de

peaux de chèvres , pour fe mettre à l'abri


dans les temps de pluie ; mais il s'en fervoit
très-rarement. Ayant trouvé dans fa Retraite
un Temple d'Idoles , il le confacra au vrai
Dieu , pour s'en faire une maifon de prières.
La réputation de iainteté qu'il s'étoit acquife,
le fit élever à la dignité du Sacerdoce , en

405. Saint Chiyfoftome , qui avoit conçu de


lui la plus grande idée , lui écrivit de Cucufe ,

011 il etoit exilé , pour fe recommander à fes


prières ( 1 ).

Notre Saint n'avoit pas de plus grand plai-


fir, que de s'entretenir avec Dieu dans Forai-
/on. Auffi étoit-il difciple de Saint Zébin ,

{ 1 ) S. Chryfoft. Epifl. 36,

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aj6 Saint Maron y AébL
5 qui furpaflbit tous les Solitaires de fon fiecte
dans l'ailiduité à la prière. Il cmployoit à ce
faint exercice les jours &
les nuits entières
f
fans jamais fe laffer ; fa ferveur même ne fài-
foit que s'accroître de plus en plus. Sa cou-
tume étoit de prier debout : il n'y eut que
dans fa vieilleffe , qu'il fe foulageoit un peu
,
en s'appuyant fur un bâton. Il difoit peu de
chofes à ceux qui le veitoient voir , de peur
d'interrompre l'exercice de la contemplation,
yai abforboit toutes fes penfées. Néanmoins
avec bonté ,
il les recevoit &
les exhortoit à
refter avec Mais il s'en trouvoit peu qui
lui.

vouluffent palier toute la nuit debout en priè-


res.
Dieu récompenfa les travaux de Saint Ma-^
ron par des grâces abondantes , &
par le pou*
voir de guérir les maladies des corps &c des
ames. Il avoit fur-tout un talent admirable
pour porter les autres à la Vertu* II lui vint
un grand nombre de difcipie* ; &
il fonda plu*

fieurs Monafteres dans la Syrie. Théodoret


regardoit cette multitude de Moines répandus
dans fon Diocefe , comme le fruit des infinie*
tions de notre Saint. Parmi les plus célèbres
difciples de Saint Maron , on compte Saint
Jacques de Cyr , qui fe glorifia d'avoir reçu
de les mains Ion premier cilice.
Enfin , le moment où le Saint devon âllet
recevoir fa récompenfe étant arrivé , Dieu le
retira de ce monde après une maladie de quel-
ques jours. Le défir d'avoir fon corps fit naî-
tre une pieufe conteftation entre les Provins
ces voilînes. Les habitants d'un Bourg fort
peuplé emportèrent ce riche tréfof chez eu* ,
6 bâtirent fur fon tombeau une gnude Egli*
te ,

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Saint Mâron } As bL ztf
par des Moines ( a )<
ie , qu'ils firent deffervir
Les Grecs honorent Saint Maron le 14. Fé-
vrier : mais les Maronites ( b ) en font la fête
le o du même mois.

( a ) Il y avoir trois célè- noiftent je Pape pour le bre^


bres Monafteres qui portoient mier Pafteur de l'Egaie. Plu*
le nom de Saint Maron \ l'un ueurs d'entr'eux tombèrent
dans le Diocefe d'Apaméc ; dans fe Keftorianifnie 8c l*Eu-
l'autre fur l'Oronte , entre rvchianifme * nVfe trouve*
Âp^m ce 5c ^^xnd^Cy le troificmc rent auffi engagés dans le
dans la Palmyrene. On ne Schifine des Grecs. Mais ils
fait pas au julte dans, lequel
. rentrèrent dans le fein dé
des trois étbît le* corps de notre l'Eglni fous les Êapfes Gré-
Saint. Il paroi t plus probable goire XIII , &
Clément VIII;
que c'étoit dans le fécond. Ce point d'Hinoire a été très*
Celui qui eft. Abbé de ce Mo- bien éclairci par M. Etienne*
naftere a le titre de Primat de Affémani. D réfute( AHi Marti
tous Monafteres de la fé-
les T. 2. p. 410. )Eutychiùs , Au-"
conde Syrie , dans les Actes du teur des Annales Arabiques ;
fécond Concile de Conitanti- dont le faux récit a induit Mi
nople , tenu en ç 36 , fous le Renaudot en erreur. Le Pa-.
Patriarche Merinas. Son nom marché des Maronites , die
fe trouve auffi le premier fAntiochc , tait fif téfidcnce
dans les fouferiptions ce la dans le Monaftere de Cano-
lettre commune que les Ma- , bine , au pied du Mont Li-
ronites au Pape
écrivirent ban. Il eft confirme par le
Hornùfdas , en 517. Pape , ce a (bus lui cinq Mé-
(i) Peuple ainfi appelle tropolitains , qui Jbnt les Ar-
dans le cinquième uccle f des chevêques de Tyr . de Da-
Moines qui reconnoiuent S. mas , dé Tripoli , <T Alep > &
Maron pour Patriarche. Les de tficofie en Chypre.( Voyexr
ODiûcs
»if déclareront £)OW* le P. le Quicn Or. Chn Ti 3. ,

les déeiûons du Concile de p. 46. ) Le Séminaire de*


Calcédoine contre les Eury- Maronites, fondé à Koine par*
chiens , te s'unirerit de com- le Pape Grégoire XUI , 6tf
munion avec les Melchites ou tenu par les Jéfurtes , a pro-"
Roy a liftes , qui fout en oient duit de favants hommes q*î ,

l'autorité du même Concile. ont jeté un grand jour fur


Ceux jlcs. Maronite? qui ha- la Littérature Orientale. Ç*ef¥
bitent le long des Côtes de de cette Ecole que font ferti*
$yrie , te aux environs du Abraham Ecchellenfis , MM.
Mont J-iban , ont un Patriar- Jofeph, Eticnne-Evode te
che Catholique , fie recon- Louis Aflemani. Les d^u^
R

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if 8 SS. CTRILLE , MÉTHODE,

FÊVR. 14.
L

S. CYRILLE et S. MÉTHODE.
i

Tire des deux Vies dct ces Saints 9 publiées par


7
Hinjchiniûs >Jbus le <). de Mars. Forci KôMus ,
ia Hiô. Codicis facn Sclavonici , 6» Introdud.
in HifL &
rem Litterar. S lavorum , Altonaviae,
1719 ; Strtdowski , Sacra Moravia Hiftoria ,
Kuk{intfd ; Spécimen Ecclefia Ruthenicae , an*
1733.
* * •
.

Dans le neuvième Siècle.

Ç Onstantin, qui fut depuis nommé


Cyrille , naquit àTheffalonique, d'une famille
Senatorienne. Ses parents Payant envoyé à
Gonftantinople pour y étudier les Lettres , il
fit dans cette étude des progrès fi rapides %
qu'on lui donna le furnom de Philofophc* Mais
il étoit encore plus diftingué par fa vertu , que
par la variété &
Fétendue de les connoiffances.
Les fervices importants qu'il rendit à l'Églife
forfqu'il eut été élevé au Sacerdoce , firent
concevoir de lui la plus haute idée. Voici une
çirconflance oii iï donna la preuve la moins
équivoque de pureté de fon zele. Photius dé-
la
çnoit S, Ignace , qu'on avoit placé fur le Siège
Patriarchal de Conflantinople , en 840 , en- &
feignoit qu'il y avoit deux ames dans chaque
homme, Cyrille ne craignit point de lui repro*

premiers ont donné d'excel- |


au troiiieme , de judicieux
lents Ouvrages fur r antiquité I Ecrits fur les cérémonies do
tcclcfiaAique. Nous devons rfcgWe.

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$$. €rniLLE 9 Méthode. 259
cher une erreur auffi fcandaleufe ; & comme
celui-ci répondoit qu'il n'avoit point eu inten*
rtyR, Ui
tion d'offenfer qui que ce fut , qu'il avoit &
feulement voulu mettre à l'épreuve la capacité
& la dialeâique du Patriarche : » Quoi , re-
» prit le Saint , vous avez lancé vos traits au
» milieu de la foule, &
vous prétendez que
* perfonne n'aura été bleffé } Vous avez beau
» vous prévaloir des lumières que vous donne
h votre fageffe ; elles font obfcurcies par les
» vapeurs qui s'élèvent de ce fonds d'avarice
^ &de jaloufie qui eft dans votre cœur. Vo*
» tre paflion contre Ignace vous aveugle Se
h vous plonge dans d'epaifles ténèbres {à ). »
Ce fut vers ce temps-là que les Chazares ré*
folurcnt cPembraffer la Religion Chrétienne.
Ces Chazares étoient une Tribu de Turcs , le
plus nombreux &
le plus puifîant Peuple d'en*
tre les Huns qui habitaient la Scythie Euro-
péenne ( b ). Ils s'étoient établis dans une Con*

'

( m ) Tout ceci eft rapporté Danube , fous le règne des


parAnaftafe le Bibliothécai- Empereurs Maurice Tibe* &
re. L'erreur des deux ames re ,
qui firent alliance aveo
fut condamnée dans le VIII eux , & leur envoyèrent deux
Concile Général , Can. u, magnifiques Ambaûades, dont
t. S. Conc. p. tl%i. on trouve la description dans
lb \ Dans le fixieme ficelé Confiant in Porphyrogenete.
les Turcs étoient divifés en ( Pandext*. Hift. de Lcgartvnl"
fept , & quelquefois en dix bus ) &
dans Théophylacte
Tribus , dont chacune avoit Simocatta. Ceft de ces an*
un Prince indépendant t nom- ciens Turcs que quelques Au*
mé Chagan. ( Voyez M. teurs font defeendre ceux"
Jofeph Affémani , Orig. EccL d'entre les Tartares Oygy-
SU*. T. a. f. p.
&
161 ). Ils ziens , qui habitent l'Ane y
châtièrent les Abares les & ainfi que les Tartares de Cri-
autres Nations des Huns de- mée. Conuantin Porphyro-
puis les bords de l'Ethel , ap- genete ( L. de regendo Imper,
pellé depuis Volga , jufqu'au ad Roman, jilium ) & les au-
Rij

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i6o SS. Cyrille 3 Méthodè.

{ FÉVR. 14.

une ambaflade folennelle à l'Empereur Michel


III , &à la pieufe Impératrice Théodore , fa
mere , pour leur demander des Prêtres qui
vouluffent bien fe charger du foin de les ins-
truire. Théodore fit venir Saint Ignace pour
en conférer avec lui. Le Patriarche , après avoir
tout examiné , conclut par propofer de mettre
Cyrille à la tête de cette importante Million ;
ce qui fut définitivement arrêté (d ). Comme
les la Langue Turque , ainfi
Chazares parloient
que Huns
les &
les Tartares , notre Saint fe
mit promptement à l'étudier. Il l'apprit en peu
de temps , parce que le zele du falut des ames
Panimoit à dévorer toutes les difficultés qui
accompagnent ordinairement un femblable tra-
vail. Il ne fut pas plutôt en état de fe (aire en-
tendre , qu'il commença à prêcher l'Évangile.
Tous les yeux s'ouvrirent à la lumière qui les
fi app ort. Le Kan reçut le Baptême ; fbn &
exemple de
Nation entière.
fut bientôt fuivi la
Cyrille fonda des Eglifes , qu'il pourvut d'ex-
cellents Minières , &
retourna à Con/tanti-
nople. Le Prince &
le Peuple voulurent lui
fcire de riches préfents ; mais il ne fut pas

très Écrivains Byzantins , nacites au Nord , la Mora-


donnenc aufli k nom de Turcs vie à l'Occident , le pays &
aux Hongrois , & aux Na- des Schrobates » au Midi.
tions qui font au Nord de ( dHenfchénius & Jofcph
)
l'Europe & de l Aiie. Atléroani , ont prouvé que
-
( c ) Du temps de Conftan» ceci arriva en 848 , te non
tin Porphyrogenete , cette en 843 , comme Koblius Ta
Contrée avoit la Bulgarie à prétendu,
iUrient ,1e pays des Parzi-

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SS. Cyrille 3 Méthode. 261
poflîble de le déterminer à rien accepter. Un
tel défintéreflement honotoit beaucoup la Re-
"
F £ VR# M
ligion , qui en étoit le principe.
Cyrille fut enfuite charge d'aller faire une
Miflion dans la Bulgarie. On lui aflbcia dans
cette bonne œuvre , fon frère Méthode , qui
ctoit un Moine d'une fainteté éminente. Mais
il faut reprendre les chofçs d'un peu plus haut.

Les Bulgares , Peuple Scythe , avoient une


origine commune avec les Slaves. Il paroît
qu'ils s'établirent d'abord dans le voifinage du
Volga , &au'ils en furent chafles , avec les
Abares , par les Turcs. Ils s'emparèrent de l'an-
cienne Myfie &
de la Dace, c'eft-à-dire, de
la Walachie , de la Moldavie , &
d'une partie
de la Hongrie ( e ). Les Grecs qu'ils firent

iurnommé U Macédonien 9
jetèrent parmi eux
quelques femences de Chriftianifme ; mais ils
ne fe convertirent que long - temps après.
Voici comment la chofe arriva. Bogoris , Roi
des Bulgares , avoit une fœur qui s'étoit faite
Chrétienne à Conftantinople , oîi elle avoit
été prifbnniere. Ce fut l'Impératrice Théo-r
dore qui lui procura le bonheur de connoître
la venté. La Princefle étant enfuite retournée
auprès de fon frère , continua de fuivre avec
ferveur les maximes de la Religioh dans la-
quelle on l'avoit inftruite. Elle tâcha même

( t ) Ce fut fous le règne fifté jufqu'en 1018 , que


de l'Empereur' Anaftafe , que Jean, le dernier de leurs Rois,
les Bulgares quittèrent l'éta- fut aflafliné. Bafile II ajou-
Hiffement qu'Us avoient au- ta la Bulgarie à l'Empire Ro-
près du Volga. Le nouvel main.
État qu'ils fondèrent , a fui*

Riij

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161 SS. Cyrille , Méthode.
d'infpirer à Bogorisles fentiments dont elle ,

étoit pénétrée. Malheureufement des mbtifs


humains empêchèrent ce Prince de fe ren-?
dre aux follicitations de fa fœur. A la fin t

cependant , le moment des miféricordes ar-


riva. Le Roi des Bulgares ayant demandé
un habile Peintre à PEmpereur de Confiant**
nople , celui-ci lui envoya le faint Moine Mé-
thode , qui excelloit dans cet Art. ( On trour
voit alors plufieurs Moines qui réufliffoient
parfaitement dans les tableaux de dévotion )•
A peine Méthode fe fut-il rendu au lieu de Ùl
destination , que Bogoris lui demanda quel-
ques Pièces , capables de contribuer à la dé*
coration du Palais qu'il venoit de faire bâtir,
U lui recommanda entr^autres chofes , d'imagi-
neç.un fujet dont la repréfentation pût glacer
d'effroi les fpeâateurs. Le Saint réfolut de
mettre à profit les difpofitions du Roi. Il en-
treprit de peindre le Jugement dernier. On
voyoit Jefiis-Chrift environné d'Anges , à droit
& à gauche , affis fur un trône éclatant de
gloire , & revêtu de l'appareil formidable
d'un Juge irrité. Tous les hommes , fans au-
cune diuin&ion de rang , étoient afiemblés
devant fon Tribunal , où ils attendoient en
tremblant , la Sentence qui alloit décider de
leur fort éternel. Il y avoir d'ailleurs dans les
différentes parties du Tableau , une force ,
une énergie , une vivacité , &
une chaleur
d'expreffion , qui ajoûtoient encore au terrfc-
ble du fujet, L'Ouvrage achevé , on le mon-
tra au Roi , qui en fut fingulierement ému.
Mais fon émotion s'accrut de beaucoup , lorf-
que le Peintre vint à expliquer chacune des
parties dont l'enfemble compofoit fon tableau.

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SS. Cyrille > Méthode. 263
II n'y put tenir , & correfpondant dès-lors à la
grâce qui lui parloit par un objet fenfible , il
^t\K. 14.
demanda à être inftruit des myfteres de la Re- ^

ligion Chrétienne. Méthode dé- travailla fans


lai à éclaircir fes doutes , à lui donner tou- &
tes les lumières dont il pouvoit avoir befoin.
Le Prince n'eut pas plutôt connu la doârine
de l'Évangile , qu'il reçut le Sacrement de la
régénération , Se prit le nom de Michel (/).
Les Bulgares , irrités d'apprendre que leur
Roi s'étoit fait Chrétien, prirent les armes
contre lui dès le lendemain de fon Baptême , &
marchèrent droit à fon Palais. Bogoris , plein
de confiance en Dieu , ne fe découragea point ;
il fe mit à la tête de fes Gardes , dirfipa fa- &
cilement les rebelles. La fermentation ne dura
pas long-temps ; les efprits fe calmèrent ; le
peuple le défit peu à peu de fes préjugés , il
écouta les Prédicateurs de l'Évangile , reçut &
le Baptême , à l'exemple de fon Roi. Bogoris
envoya des Ambaffadeurs à Rome avec ordre
de remettre de la oart des lettres &c des oré-
fents au Pape Nicolas I , de le corifulter fur&
ce qu'il avoit à faire pour perfeôionner l'ou-
vrage de fa converfion ( i ). Le Pape , de fon
côte y écrivit à ce Prince pour le féliciter fur le
bonheur qu'il avoit eu d'entrer dans le feiû
de la véritable Églife. Sa lettre fut portée par

(/) D fut baptifé par des me quelques Auteurs l'ont


Prêtres Baronius
Grecs. & prétendu. La révolte des Bul-
Henfchérùus , mettent fon gares en eft une preuve évi-
Baptême en 845 le P. Pagi*, dente.
le met en 861 m
9 & M, Jof. ( 1 ) Anaft. Bibl. in Kicol.
Aiïemani,en 865. U n'eft pas 1 » & ipie Nicolaus ,
fy. 70»
vrai que Bogoris ait été bap- ad Uuicmar.
tûc a ConOantinople , corn-

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<

164 SS. Cyrille , Méthode.


=»les Légats qu'il envoya en Bulgarie , en
_ Comme ces Légats étoient Évêques , ils doa-
perent le Sacrement de Confirmation aux Bul-
gares baptifés par les Prêtres Grecs ils leur
;
prefcrivirent auffi de jeûner tous les famedis
:
ce qui fut hautement défapprouvé par Photius
,
Patriarche Schifmatique de Conftantinople.
Quelques-uns des nouveaux convertis ayant
,
çté baptifés dans des cas preflants par la main
,
,
des Laïques &
même des Infidèles , s'adreffe-
rem au Pape , pour favoir à quoi ils dévoient
* en tenir fur ce fujet. Nicolas I répondit que
leur Baptême étoit valide , qu'il ne fklloit &
point le réitérer. Il réfolut encore d'autres
dif-
fcçultés qui lui avoient été propofées (%\
Après la converfion des Bulgares qui avoit
,
été le fruit principal du zele de
Méthode ,
Cyrille- de &
ces deux hommes Apoftoliques par-
firent pour aller prêcher l'Évangile dans la Mo-
ravie ( g ). Ils avoient été attirés en ce pays

—T «
1
1

m
, ( 1Refpemfi ad Confult.
) fendant avec courage çontrf
fulga. T. 7 . Cime. p. ij4i. les Avares ou les Huns de
(g) 11 éft parlé des Mo- Pannonie. Quoique la Mo-
TOYes pour la première fois ravie eût été conquife par
^ ans une du Pape
lettre Çharjemagne , ayec la Ba-
jugene II écrite en 827. vière Çc Pannonie ( du-
la
t Voyez Hanuzius in Germon. moins Eginhard le dit expre&
Sacra , T. t. p. 71.) Les Mo- fément ) , elle étoit néan-
Tà ves , ainfique les Carin- moins gouvernée en 850 , p«r
thjens !
étoient du fang des deux Ducs , qui fe difputoient
jfclavpns.' Ceux - ci étoient la Souveraineté. Leurs noms
gouvernés par des Ducs ; & étoient , Moymar & Priwina.
peux-là par des Rois , dont on Prinnina. Le premier
jf ojemier fyt Samon , né ayant été aflaflîné , Rafticès y
aux environs de Bruxelles. Ton neveu , fut fait Roi do
£©$ Moravés le récompen- Moravie en 856 par Louis ,,

sèrent par-la des fervices qu'il Roi de Germanie. Heniché-


l?Hf «Y?** FWdus en les dé- rçius appelle ce Prince Sua T

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SS. Cyrille 3 Méthode. 265
par pieux Roi RaiKcès , qui reçut le Baptê-
le
de leurs mains , ainfi que la plus grande févr. 14.
"e de fes fujets. Les Moravfcs eurent d*au-
moins de peine à quitter leurs fuperfti-
tions , qu'ils penfoient affez favorablement du
ChrifHanifme , fur -tout depuis la converfion
des Bavarois , par Saint Roben , Évêque de
Worms , &
Fondateur du Siège Archiipifco-
pal de Saltzbourg. Nous lifons dans quelques
Auteurs , que Saint Cyrille fut ordonné Ar-
chevêque des Moraves ( h ). Le titre d'Evêque
des Moraves eft conjointement donné à Saint
Cyrille &
à Saint Méthode , dans les Calen-
driers Mofcovites , &
dans le Martyrologe
Romain ( i )
1 . . 1 j 1 i . . "

; mais c'eft une fau- qui ne vivoit plus lorfqu'ib y


te , comme M. Jof. Affémani arrivèrent que Cyrille fe fit
-,

la prouvé d'après les Anna- Moine dans cette Ville ; fie


les de Fulde. Suadopluch qu'il y mourut avant que
étotc neveu de Rafticès ; il d'avoir été facré Evèque. S,
lui(accéda , fie perfécuta les Méthode a le titre d'Arche-
Chrétiens. vêque des Moraves , dans
(A) On peut voir là-defïus une lettre du Pape Jean
Dubravius , Hifi. Bohtm. /. 4 ; VIU , en date de l'année 879-%
fie le Catalogue des Evêques Dans une lettre du même
d Olmurz par Auguftin. ( In-,
, Pape à Sfentopulk , Duc do
ter renan Bohcmic. Scnptorcs. ) Moravie , Saint Cyrille eft
(i) Ceci ne s'accorde , ni Amplement qualifié Philofophe.
avec le Bréviaire Polonois , » Nous approuvons , dit - il
ni avec d'autres anciens Mo- n ( Ep. t<)4 ) , les lettres Scia-
numents. Il y eft dit en effet it yonnes inventées par le
,

que Saint Cyrille mourut >» PhilofopheConftantin ( Cy-


Moine , fil que Saint Mé- »* rille ) , fie ordonnons que
thode ne fut facré Achevè- m l'on chante les louanges de
que , qu'après la mort de fon » Dieu , en Langue Sclavon-
frère. Il eft dit encore dans >»ne. » Ce partage ne laine
la féconde Vie de nos deux aucun doute fur le véritable
Saints , publiée par Henfché- Inventeur de l'Alphabet Scia-
nius , qu'Us furent mandés à von. Les anciennes Vies de
Rome par le Pape Nicolas Saint Cyrille yj font confor-

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i66 SS. Cyrille s Méthode.
Borivay ou Borivorius , Duc de Bohême^'
fÉYR.14. 311 * avo ^ entendu prêcher Saint Cyrille &
oaint Méthode , £Ut fi vivement touche de leurs
Difcours , qu'il crut en Jefiis-Chrift. U engagea
Méthode , de qui il avoit reçu le Baptême , à
pafler en Bohême, pour y annoncer l'Evangile.
Le Saint fe rendit facilement à une invitation
dont la gloire de Dieu étoit l'objet. U baptifa
la femme &
les enfants du Duc , avec un très-
grand nombre de Bohémiens ( k )• Il fonda à
Prague l'Églife de Notre-Dame, celle de Saint
Pierre & de Saint Paul , & plufieurs autres
dans les différentes parties de la Bohême.
Nos deux Saints traduifirent la liturgie ai
Sclavon , & firent célébrer la Meffe en la Lan-
gue que parloient les Peuples qu'ils avoient
convertis ( / ). Les Archevêques de Saltz-

mes. On trouve la même '

Venedes , &c. Ils s'établirent


chofe dans un Auteur qui dans la Poméranie , fie dans
écrivoit en 878. Son Ouvra- les contrées voifines. Un au-
ge a été publié par Frcher tre effain de Slaves s'empara
dans fon Recueil des Scripto- de miyrie , & fournit les
fts rerumBohtmUarum. Goths & les Huns
vers le ,

(A) La Chronique de Cô- règne de l'Empereur Jufti-


«ie de Prague place cet évé* ni en , comme nous l'appre-
Bernent en 894. Voyez Du- nons de Conftantin Porphy-
bravius f loe. cit. rogenete , de Procope * &c.
( / ) Kohlius , Kulcinius , ( Voyez Jo£ Aflemani t T*
Hofraan & M. Jof. Affcmani 3. p. 309 ; Budrius v dans
penfent que le nom de Slaves l'Hiftoire de Ragufe & Jean -,

ou Sclayons vient de Slava 9 Lucius , dans fon Livre de


qui ûgnifioit Gloire dans Regno Balmati* & Croatie. ).
la langue de ces Peuples. Les Les Slaves acquirent enfutte
Slaves , Scythes d'origi- de nouveaux établhTements
ne , étoient foras des envi- dans la Pologne & dans U
rons des Palus Méotides , & Bohême. L'affinité des Lan-
étoient tombés fur le Nord gues qu'on parle dans ces
de la Germante , d'où ils deux Pays , en eft la preuve.
changèrent les Vandales , les Voici ce qu'on lit dans ie

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55. Cyrille , Méthode. 167
bourg &C de Mayence s'élevèrent avec leurs
Sufïragants , contre cette nouveauté , en &
portèrent leurs plaintes au Pape Jean VIII. Ce
Souverain Pontife , qui vouloh éclaircir cette
affaire , en écrivit , en 878 , à Tuventare ,
Comte de Moravie , &
à Méthode , auquel
il donnoit le titre d'Archevêque de Pannonie.

Pour Saint Cyrille , on ne lait plus rien dè


ce qui le concerne. Jean VIII manda Méthode
à Rome , &
lui défendit en même temps , de
dire la Méfie en une Langue Barbare. Le Saint

MlllUute , &
des motifs qui Pavoient déter-
miné. Le Pape fatisfait , confirma les privilè-
ges dont jouiflbit le Siège Archiépifcopal de
Moravie , le déclara indépendant de celui de
Saltzbourg , &
permit aux Sclavons de faire
l'Office divin en leur Langue ; ce qui fe pra-

chap. 1. du Chronicon Pologne » la Bohême , la Pan-


SUyo-
: » Les Danois nonie , la Dalmatie , & rllly-
& les Sue-
» dois habitent la Côte Sep- rie. Le Royaume de Bohême
» tentrionale de la Mer ( Bal- fut fondé vers Tan 6*j o , par
m tique ) , mais la Côte Méri- Zechus 8c Checus , qui étoient
n dionale de la même Mer Sclavons , & même frères,
»eft habitée par les Slaves. félon quelques Auteurs. Les
» On comprend fous cette dé- Patzinacites , qui étaient auflt
h nomination les Runes qui de Scythie , fe

» font à FEU ; les Polonois,qui jetèrent fur les front


» ont les PrtuTes au Nord , & de l'Empire Romain , s'em-
» au Midi , les Bohémiens » parèrent de l'ancienne Dace,
«les Moraves &
les Carin- & donnèrent beaucoup d'occu-
n thîens. »t M. Jof. AlTémani pation aux Grecs, Mais à la
a démontré dans fes Origi- fin ils furent vaincus & fou-
nes Slavorum , T. z & j * que rnis par Jean Comnene. Les
ks Sclavons hahitoient ori- Grecs leur donnoient le nom
ginairement une partielle la de Ulahts. Ce font aujour-
Scythie & de la Sarmatie , & d'hui les Valaches. Voyez Jean
qu'ils en fortirent pour fe ré- Lucius , Uic. cit. I. Cé c,
pandre dans, la Germanie , la

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268 SS. Cyrille y Méthode.
tique encore dans les Eglifes de ces Peuples ^

ItVR, m. m ^ me ^ Aquilée , dans plulieurs autres&


lieux d'Italie ( ). m
Saint Méthode , après fon retour de Rome ,
eut beaucoup à fournir de la part de quelques
Evêques voifins , qui fe plaignoient des at-

( m ) On peut voir la Let- de Dalmatie ,


la de lltfy- &
tre du Pape Jean VIU
au , rie qui fuivent le Rit Latin ;
,

Comte Sfendopulk Hanzius ,-, & dans celles des Runes , des
T. ». Germon. Sacr.p. 16$ \ M. Mofcovites Çc des Bulgares,qui
Jof. Affémani, Orig. Eccl. Slav. drivent le Rit Grec. L'ufage
T. t'P' '7J« H paroit par les où font les Sclavons de faire
lettres de Jean VIH , 6c par en leur Langue, a été
l'Office
les deux Vies du Saint , que approuvé par le Synodo de
l'affaire dont il s'agit ici n'a- Zamofci 1 en 1720 , con- &
vojt point été examinée par firmé par Innocent XIII , Se par
les Papes Nicolas , &
Adrien Benoit XIV , inter plum Conf-
comme le Cardinal Bona & lit, 0.8. an. 1744. Bullar% T. u
quelques autres Auteurs , Font p. Conflit. $6. Etfi du-
prétendu. Le Miflel Sclavon bitare non poffumus , an. tjjz.
fut révifé en 1631 , par ibid. p. a/ 7. Conflit. Ex Pafi>
l'ordre d'Urbain VIO. On voit torali muntrt , 17 54* U avoit
le Bref d'approbation de ce été précédemment approu-
Pape , i la tête du même Mif« vé par Jean VIII, Ur-»
fel imprimé à Rome en 1 745
, bain Innocent X«
VHI , &
aux dépens de la Congréga- Dans lesde Mora-
Églifes
tion de la Propagande. Cette vie, de Dalmatie, d'Uly- &
Congrégation fit aufli impri- rie où Ton dit la Meffc en
,

mer le Bréviaire Sclavon à latin , on n'a pas plutôt lu


Rome en 1688 , par l'or- l'Évangile en cette Langue t
dre du Pape Innocent XI. On qu'on le relit au Peuple en
trouve à II tête le Bref par Sclavon. Voyez M. Jof. Affé-
lequel Innocent X approuve mani , Pretf. in T. 4. Comment-
ce Bréviaire , & en -ordonne ai Caltnd. Univ. pan. 2. c. 4*
la récitation aux Sclavons. p.
Le LeÛeur ne fera peut-être Un Synode tenu à Spalatro,
pas fâché que nous traitions & un Légat du Pape , or*
avec une certaine étendue ce donnèrent vers l'an 1070 ,
qui concerne l'ufage de la qu'on ne fe ferviroit point
de it Langue Selavonne dans
1
Langue Selavonne dans l'Offi-
ce Eccléfiaftique. l'Office divin. Ce Décret fut
On célèbre la Liturgie confirmé par Alexandre II i
en Sclavon dans les Eglifes mais il iaut ou convenir qu'ij

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SS. Cyrille , Méthode. 16$
feintes portées à la Jurifdiâion de leurs Siè-
ges. Mais le Pape Jean VIII fut maintenir Tin-
F£vr J4
dépendance qu'il avoit accordée à celui de
Moravie* Il n'eut pas plutôt appris les perfé-
cutions qu'on avoit lufcitées à notre Saint ,
qu'il lui écrivit une lettre dans laquelle il le

•e regardent que les Églifes I II n'eft donc pas étonnant


tltuées vers la Pologne & la I qu'on fe (bit oppofé a ceux qui
Moravie , ou dire qu'il n'a I vouloient l'introduire dans les
jamais été exécuté. 11 y a Eglifes de ces deux Royau-
même dans le Diocefe de mes.
Spalatro , dix Chapitres & Le Cardinal Borw fe trom-
piufieurs Paroifles , qui célè- pe en confondant ( Liturg. L
brent la Liturgie en Scia- i. f. p. § 4 ). la Langue Scia*

von. Nous apprenons ceci vonne avec rillytiennc. Cette


d'Orbinus , cité par le favant dernière eft un dialecte par-
Caraman , Archevêque de ticulier qui s'eft introduit
Jadra , dans fa DiiTertation parmi les Sclavons d'illyrie.
d* ûr.guJ. Slavicâ littcrali im Le Sclavon dont on fe fert
divùtir ccUbrandis , n. j*. La dans la Liturgie , eft l'an-
même choie eft atteftée par cien , celui d'où font sortis
Robert Sala , dans fes Obfcr- les dialedes modernes , ce
fêtions fur U* Livru Litur- qu'on appelle le Sclavon des
fjtm du Cardinal Bona , L Écoles ou des Savants : Idio*
#. c.
$ 4. p. ijz. Ce der-
9. ma quod nunc Sclavum line
nier Auteur ajoute qu'il n'y ralt apptllant , dit Benoit
a dans le Diocefe de Spalatro XIV , d'après Urbain VIII
que huit Paroifles où I on Innocent X , &c. Lorfque Ca-
fane ufage de la Langue La- raman revifa le Bréviaire &
tine. le Miffel des Sclavons , un*
Le Pape Grégoire VD , ( /. primé à Rome en 174J , il

7. £/>.*. ad Uratifiaum Bohc- fui vit les Règles de l'ancien-


miét Ductm ) , défendit de dire ne Langue Sclavonne , dont
la Méfie en Sclavon ; mais il y a un Dictionnaire pour

cette derenfc ne regardoit que l'utàge du Clergé. On rap-


ceux de Bohême. 11 elt d'ail- pelle A[buquidarium , OU Abec<-
leurs fort aifé d'en pénétrer darium. Il y a aufli une Gram-
la raifon. La permiflion que maire de la me me Longue ,

Jean V1Uaccorda à Saint compofee par Smotriski, Moi-


Méthode , d'employer dans ne Rufte de Saint Baûic. fclle
rÉglife la Langue Sclavonne fut imprimée à Wiina en
ne s'étoit jamais étendue à 1619 *c a Mofcov , en 1 721.
*>

U Pologne & a la Bohême. Si l'oa veut favpir combien

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xyo SS. Cyrille , Méthode.
félicitait fur la pureté de fa Foi , fur le &
fÉVR. 14.
^ucc ^ s de fes travaux apoftoliques. Il Pexhor-
toit tendrement à la patience , à furmonter le &
mal par le bien. Il lui marquoit encore qu'if
veilleroit au foutien de fa Dignité , qu'il &
le feconderoit dans toutes les entreprifes qu'il

il y a de différence entre Tan* naiflance aux Idiomes que l'on


cien Sclavon ôc tous les dia- parle .dans la Ruflie , laMof-
le&es modernes qui en font covie f
la Pologne , la Vanda-
dérivés ; on peut confulter lie , la Bohême
la Croatie ,

le P. le Long , Bibl. Sacr. T. 1. la Dalmatie Valachie de , la ,

art» 6. SeB. 1 , s. $ ,
, 4 & la Bulgarie. On penfe qu'il

; i «c Réland à la lin de la tient le milieu entre l'Hébreu


troifieme partie de fes Dif- & les autres Langues , tant
fertationes Mifccllane*. La de l'Orient , que de l'Occi-
Langue Scia vonne eft en ufage dent , &
qu'il convient à tous
dans la Bohême , la Moravie, les Climats. Quelques - uns
la Pologne , la Mofcovie , la ajoutent qu'il paroit avoir
Rutile , la Bofnie , la Servie tout ce qu'il faut pour deve-
la Croatie , la Dalmatie , la nir une Langue uniTcrfelle.
Bulgarie , &c. Mais les dia- U s'eft trouvé des Auteurs
lectes de tous ces Pays diffé- qui ont attribué à Samt Jé-
rent tellement entr'eux , qu'un rôme l'invention de l'Alpha-
PoIonOis par exemple , n'en-
,
bet Sclavon ; &la rraduclion
tend point unDalmate. Cette de la Bible en cette Langue.
obfervation eft du Cardinal Mais leur opinion eft certai-
Staniflas Hofius , Évêque de nement faufle. Saint Jérôme
Warmie , en Pologne ( Dial. nous dit lui - même qu'il a
de facro Vtrnaculo Ugendo. ) Le traduit la Bible en fa Langue.
même Auteur penfc qu'il n'y Or , la Langue de Saint Jé-
a point de Langue fi étendue rôme , étoit la Latine. Voyez
que la Sclavonne. Il faut Banduri , Animai, in Confiant
toutefois en excepter l'Ara- tin. Porphyrog. dé adminijir. Im-
be qui eft en ufage chez les per, p. hj.
Chrétiens de l'Arabie , de la Les lettres Sclavones n'ont
Syrie &
de l'Égypte Ce chez aucune affcmté avec les Go-
les Mahométans qui habitent thiques. Elles furent inven-
l'Afie, l'Afrique une partie & tées par Saint Cyrille ôt Saint
considérable de l'Europe. Méthode qui les formèrent
,

Herbinius ( de Rcligiofis d'après* l'AlphabetGrec. Les


Kiovienfibus Chrypxis ) , pré» Sdavons ont deux autres Al-
tend que Sclavon eft une
le phabets pour l'ufagc ordinai-
Langue-mere , qui a donné re i l'un qui eft d'un carac"te-

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SS. Cyrille 3 Méthode. 171
formerait pour de Dieu ( 3 ). Rien 3
la gloire

n'étoit plus édifiant que la conduite que te- ityR.i^


noient les Peuples convertis par Saint Métho-
de. On
vit Bogoris ou Michel , premier Roi
Chrétien de Bulgarie , abdiquer la Couronne
en 880 , .pour aller finir fes jours dans un Mo-
naftere.
Saint Méthode parvint à lui âge fort avan-
cé ; mais on ignore l'année précife de fa
moçt. Les Grecs les Mofcovites l'hono- &
rent le 1 1 de Mai. Pour Saint Cyrille , ils
en font la fête le 14 de Février. Ces deux
Saints font nommés conjointement le 9 de
Mars dans le Martyrologe Romain. On leur
,

attribue plufieurs miracles ( n ). Leurs Reli-


ques , au rapport de Dubravius , ont été dé-
couvertes fous l'Autçl d'une ancienne Chapelle
de FEelife de Saint Clément à Rome , où on

refin , a cours principalement article de \ ainfi on ne doit


dans la Dalmatie , Car-
la pas dire U Cornu de Jablonski ,
idole & riitrie. L'autre , qui mais U Cornu Jablonski , ou
n'a prefque aucune reflera- le Comte de Jablon.
blance avec le premier , pa- ( 3 ) Ep. x68. ad Method.
roi t avoir été emprunté des (*) Voyez Dubravius,
Croates &
des Serviens. ( loc. cit, & les
Notes de Ba-
Voyez Kohlius v lniroduft. ronius , Martyrologe
(ur le
md Hifi. Sclavor. &
JoC Affé- Romain. Stredowski , dans fa
mani , t 4 ). De tous les Satra Moravia Htfloria t appel-
Dialectes de la Langue Scia- le Saint Méthode ôc Saint
Yonne , il n'y en a point qui Cyrille , Apôtres de la Mo-
ait été auffi cultivé , que le< ravie , de la Haute Bohê-
Polonois. Les Lithuaniens me , de la Siléûe , de la Ca-
n'ont point une origine com- zarie , de la Croatie , He la
mune avec les Sclavons. Ceci Circaûie , de la Bulgarie , de
(ê prouve par la diverîité de lafiofnie, de la Ruflie , de

leur langage , qui eft un Dia- Dalmatie , de la Pannonie
la
lecte du Sarmate. de la Dace , delà Carinthie,
B. La Particule Ski , par de la Carniole , ce de la plus
laqueUe finirent les Noms grande partie des Peuples
Polonois t répond Và. nonre Slcavons,

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272 Saint Ab rah aM , E.
les garde précicufement. La même chofe eff

14-
atteftée par Oâave Panciroli ( 4 ) i par &
Henfchénius. Le dernier montre qu'on a tranf-
féré en Moravie une partie des Reliques de
nos deux Saints , 6c qu'on les voit enchâlTées
dans la Collégiale de Brune*

MÊMÊ JÙUR*
LE
SAINT ABRAHAM,
Évêque de Carres,
en Méfopotamie,

C 'É t ô î t un faînt Solitaire


de zele pour l'accroiflement de l'empire de
, qui ,
pleitt

Jefus-Chrift prêcher l'Évangile dans ui>


, alla
Village du Mont Liban
, encore plongé dam
les ténèbres de l'Idolâtrie. Les habitants de ce
Village ne l'eurent pas plutôt entendu parler
contre leurs Dieux , qu ils résolurent fa mort.
Mais ils furent fi touchés de fa douceur, Se
de la patience avec laquelle il fouffrit les plus
rudes traitements , qu'ils lui laifferent la vie.
Les Officiers chargés de lever les derfiëfs pu-
blics, étant arrives peu de temps après , trou*
verent oue la plupart des habitants du Village
étoient hors d état de payer. Déjà ils fe pré-
paraient à les traîner en priion. Le Saint , at-
tendri fur le fort de ces malheureux f fit un

( 4 In Tfufauris rifeonditis */m« fttir.'

emprunt

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S: ÀuxÉïtcE) Hermïte; 173
émprunt y & paya pour eux; Une conduite a*" r" S
aufli généreufe gagna les coeurs cfe tous ces
rÉvRai;
pauVres gens: Ils Rattachèrent à ledr bienfai-
teur, qui profita de leur confiance pour les
.

inftruire de la Religion Chrétienne. Abraham


refta trois ans srvec eux ; puis retourna dans;
la SoHtude , après avoir confié là foin de leur
ame à un Prêtre vertueux* Maïs il .fie jouit pas
long-temps du repos qu'il étOit allé chercher
;

dans la retraite ; car ont Péleva fur 1q Siégé


Épifcopal de la Ville de Carres $ en Méfopo-
tamie. Pour avoir changé d'état , il rferi vé-
cut pas moins darfs le recueillement &c les(
auftéritéS de la pénitence. It travailla avçç Une
ardeur infatigable à la ruiné de l'Idolâtrie
& à la deftruftion des vices qui en fortt ht
fuite. Il mourut en 412 à Conftaritinople {
7
Où l'Empereur Théodofe le jeune l'avoit fait
venir. Le Prince garda un des vâteirfents dir
Saint , il le portoit à certains jours' par réfpeâ
pour Ùl mémoire;
Voyez Théodoret , Philoth. c. ip T. 3*$; 847;

SÀlttT ÂÙXENGE ,

Hermite

I

èn Bithynie;

Aù x en c k entra d'abord dans les Gardes de


l'Empereur Théodofe \ë jeuneé Cet %xàt dix la
vertu rencontre ordinairement tant cfédueils ^
ne l'empêcha point de fervir Dieu avec \in$
grande fidélité. Il étoit auffi bon* Chrétien 4 opé
S

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174 S. Auxence y Hermite*
brave Officier. Tous les moments dont il pou-
voit difpofer , étoiçnt confacrés aux exercices
de la piété. Souvent de pieux Soli-
il vifitoit
taires , &c paffoit les nuits avec eux
, dans les

veilles &
la prière. La crainte de fuccomber
aux tentations de la vaine gloire , s'il reftoit
dans le monde , le fit renoncer pour toujours
au commerce des hommes. U fe retira fur une
roche de la montagne d'Oxée , à trois lieues
& demie de Conftantinople. Il aflifta au Con-
cile de Calcédoine , par Tordre de FEmpereur
Marcien après quoi il alla fixer fa demeure
:

fur le mont Siope , près de la Ville de Calcé-


doine. Il y fut vifité par un grand nombre
de perfonnes de bien , qui venoient lui deman-
der fes confeils. U mourut vers Tan 470. Sozo-
mene donne de magnifiques éloges à Saint
Auxence , qui vivoit encore lorfqu'il écrivoit
( 1 ). Saint Étienne le jeune dédia l'Eglife de
ion Monaftefe , fous l'invocation du même
Saint. Le mont Siope porte encore aujour-
d'hui fon nom.
Voyez Ja Vie de Saint Auxence , écrite d'a-
près la Relation de Vendimien ion difciple ,
6c publiée avec des remarques , par les Bol-
landiftes.

( 1 ) Sozom.l. 7. c. 21.

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£ ÀitfQNtti ÀÉàit ,

SAINT ANTONIN ,
rtv

àbbé de Saint AGfttppttf*

4 Surreme , ou Sorrento , dans le RoyaiP


toe de Naple$<
*

CE
retira
Saint naquit darfs le Vlrf fieffé
dans un Mônaftére qui fùivoit ia Réglé
, & tê

du Mont-Caffin. Les fureurs de la guerre*


Payant obligé de fe réfugier à Stabies , il ren-
dit de grands fervices à Saint Câtel , qui ert
étoit Evêquei II revint eftftfite à Surrente y
où il fuccéda à Boniface , dans lé gouverne-
ment de l'Abbaye de Saint Agrippin. Il rrlou*
hit le i J. Février , vers l'an 830 , apfès avoir
conduit fes Moines avec autant de zelt , qué
de prudence & de fainteté; On bâtit depuis
une Églifé fur Ton tombeau. Elle appartiertf
aujourd'hui aux Théatins. La Viltë dé Sirrren-
te , qui a foarvent éprouvé les effets de la pfo-
te&on de Saint Arrtonin , l'honore comme un
de fes Patrons. On fait ià fête le 14 Février ,
qui fat le jour de fa fépulture.
Voyez dans Bollandus fa Vie , donné* par
Caracciole.
i7 6 Saijît Conran , E<

FÉVR, 14,
SAINT C Ô N R A N,
ÉVÊQUÊ D'OrKNEY^
ou des Mes Orcades ( a )*

CE
l'innocence
Saint fe rendit auffi
& Pauftérité de fa vie
recommandable paf
,
que par \%
grandeur de fon zele. Il vîvoit dans le VU
liecle. Avant la prétendue Reforme , fon nom
n'étoit pas moins célèbre que celui de Saint
Pallade & de Saint Kentigerne.
Voyez Lefley , Hift. Scot. L 4 ; Wîon , in
addit. c. 3. Ligni vit* ; King, m Cakni.

(a) Les Mes d'OrknÉy oû Saint Magne Roi de Nonré-


,

Orcades , font au Nord de ge. 11 avoit anciennement


y
l'Écoûe. Il y en a 18 d'habi- dans ces Ifles pluûeurs Mo*
rées , les autres ne fervent nafteres. Le plus célèbre de
qu'aux pâturages. L'Églife tous étoit celui de Kirlcwall,
des Orcades avoit été fon- où les Évèques faifoient leur
dée par Saint Pallade , qui réndence. U
Ville de Kirk-
en donna la conduite à Saint wall eft aujourd'hui la feule
Sylveftre, un des compagnons des Orcades qui mérite
de fes travaux apoftoliques, quelque attention. Elle eft
Se qui y étoit autrefois ho- dans la plus grande des Ifles ,
noré de Février. La
le j autrefois appellée Pomani* ,
Cathédrale des Orcades étoit 8c aujourd'hui Mainland.
dediee fous l'invocation de

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i 4

SS. Faustin , Jovite,M. 177

m
XV. JOUR DE FÉVRIER.
SAINT FAUSTIN
ET SAINT JOVITE,
MARTYRS.
L'An

E S 4*ux Saintsquî étoient frères , & qui févr. ij .


fortoient d'une famille diftinguée , prêchèrent
généreufexqent la Foi dans la Ville de Brefle,
enLombardie ,dont PÉvêque s'étoit cachç du-
rant la persécution. Tout ce que nous favons de
certain touchant lçur Vie ( car on ne peut gueres
compter fur leurs Aâes ) , c'eft que leur zele
excita la fureur des Païens ; qu'un Seigneur ,
nommé Julien , les arrêta ; &c que , fur le refus
qu'ils de renonçer J. C. l'Empereur
firent
Adrien qui fe trouvait pour lors à Brefle , les
,

condamna à avoir la tête tranchée , ce qui fut


exécuté. Il paroît qu'ils fouffrirent vers l'an
iii ( 1 )• Leurs Reliques font dans la Ville
de Brefle , qui les honore comme fes premiers
Patrons. Il y a dans la même Ville une Églife
fort ancienne qui eft dfidiée fous leur invoca*
tion. On trouve leurs noms dans tous les Mar-
tyrologes,

( 1 ) Voyez Tillcmoat , T. 1. p. 249 » leP^Pagi » &c,


Suj

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%j% $S Faustiv, Jovite
t , M,
Tous Chrétiens font appelles à une forte
les

FÉVRr m. m
artyre, ç'eft-à-dire, à une vie mortifiée
& pénitente. Cç n'eft que par le crucifiement
des inclinations du vieil nomme , que Yot\
peut fe revêtir des fentiments du nouveau. En
fnortifiant la chair avec fes convoitifes
, en te-
fiarit le corps ç}ans unde contrainte ,
état de &
foiblçfle ? on étend les forces de Tâmç, &t on pu-
rifie les affeftions du eqeur. Par-là on attire en
foil'amour divin , dont le propre eft de produire
l'abnégation de foi-même , l'humiUté , la par &
tience dan$ les différentes épreuves de la vie.
Alors le fardeau de la Croix ne paroît plus ac-
cablant ; on le porte avec facilité , même &
pyf c joie. On compte pour rien les peines , en
Éomparaifon du bonheur de participer aux fout
frances de J. C&
de$ confolations intérieures
dont ce divin Sauveur remplit ceux qui le fuir
yent au Calvaire. Eft-il une fituation pareille
à celle d'un? ame , qui eft ainfi morte à elle-
mêrnp , &à toutes les chofes de la terre }
Elle trouve dans la conformité qu'elle a
avec
Jefus fouffrant , un gage affuré de la réfurreç-
îton glorieufe. Il y a plus : elle jouit
dis ici-
bas par fijuiçipation, de l'éternelle béatitude.

mm
mm
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S. SlGEFRIDE , E. 279

SAINT SlGEFRIDE,
VULGAIREMENT
SAINT SIFROY,
ÊVÊQUE ETAPÔTRB
de Suéde,

Tire de Jean Magnus ( HilL Goth. 1. 17. £


xo ) , cité par BoUandus.

SaintAnschaire avoit prêché l'Évan-


gile aux Suédois en 830 ; mais ces peuples
etoient en lui te retombes dans l'Idolâtrie. Olas
Scobcong leur Roi , <p*i vouloit rétablir la
Religion Chrétienne dans fes États , s'âdrefla
à l'Angleterre poiifr avoir des Miffionnaires , &
pria le Roi Eldred de lui en procurer. Ce Prin-
ce jeta les yeux fur un feint Prêtre d'York
&
nommé Sigefride ; le fuccès juftifia la bonté
du choix. Sigefride ne fut pas plutôt arrivé
en Suéde , qiril fe mit à combattre le Paganis-
me avec un zèle merveilleux. Il prêcha d'abord
k V e aieu , il fonda-ui^ Siège Épifcopal : il

parcôurut enfuîte le Sud-Gothland , le Weftro-


gothland , &
plufieurs autres Provinces qu'il
gagna toutes $ jQÛiSrÇhrift. Jamais Millionnaire
ne fe montra plus fidèle imitateur des Apôtres;
Notre Saint etoit d'une, charité &
d'un défin-
téreflement qui faifoient honorer fon miniftere
des Païens mêmes. Voici un trait qui prouvera

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*8q S. Sigefride, E.
jufqu'oîi il portoit ces deux vertus. Trois de

^es neveus S u'^ avo ^ kiffés A Vexieu , pen-


™ft u
FÉVR **
d^int qu'il annbnçoit'l'Êvangile dans* d'autres
iProvinces , furent inhumainement aflaffinés par
des Idolâtres ( a ). Le Roi , indigné d'une ac-
tion auffi noire , &
qui pouvoit avoir de dan-
gereuse s luîtes \ fi elle reftoit impunie , réfolut
fle condamner les meurtriers à mort. Le Saint ,
informé de ce qui fe paffoit , intercéda pour
eux , & le fit avec tant d'initance ,
qu'il ob-
tint qu'on leur Le Prince les
l^ifleroit 1^ vie.

f ondamna toutefois à une grofle amende , au


prQfit de Sigefride. Mai$ il ne ftit p^§ poffible
pe déterminer ce àernier à rien reçevoir , quoi-
qu'il fut dans une extrême pauvreté', qu'il &
pût un très-preffant befoin d'argent , pour affu-
fer la fondation de la nouvelle Eglift.
Notre Saint mourut vers l'an 1002 ,&fut
enterré dans la Cathédrale de Vexieu , où fon
tombeau devint célèbre par un grand nombre
ïde miracles. Le Pape Adrien IV , qui avoit
|ui-même travaillé avec beaucoup de zele à la
converfion de la Norvège L de plufieurs au- &
très Contrées du Nord , le canorufa vers
l'an 1158(1 ). Les Suédois l'ont honoré com-
me leur Apôtre , tant qu'ils ont été Catholi»
ijuep.
1

T '
J
T%
1
- .
1

J , - .,
* , »... 1

(a) Leurs noms croient Martyrs.


Sunaman Unaman & Wia-
, ( 1 ) Voyez Vaftove , dan$
in an. lis font Ignorés comme fa Vm<a Aquilçnis.

4
,,,

Saint Q vin j d e , E. z%\

LE MÊME JOUR, 1

S A I NT QUJNIDE,
VULGAIREMENT JPPELLÉ
SAINT O Ut NI 2,
ÉVÊQUE DE VAISOK.
CE
formé à
Saint naquit à Vaifon même i -6c fut
la vertu par de pieux Ecçléfialtiques
auxquels fa mere l'avoit confié. Saint Théodo-
ie fon Evêque, l'ordonna Diacre, & l'envoya
çn qualité 4e fon Député , au V Concile d'Ar-
les, tenu en 551. Il le choifit çnfuite pour fon
poadjuteur , & fe déchargea fur lui du fardeau
^e Padminiftration de fon Diocefe , que fon
grand âge ne lui permettait plus de porter. S.
Théodofe étant mort quelque temps après
Quinide gouverna feul l'Eglife de Vaifon , &
le fit avec toute la vigilance d'un Pafteur éga-
lement charitable & zéFé. Mommol , Comte
tfAuxerre , Général de l'Armée Françoife ,
l'ayant maltraite de la manière la plus indigne T
fous prétexte qu'il ne lui avqif pas rendu tous
les honneurs qu'il fe croyoit dus, pour la vic-
toire qu'il avoit remportée en Dauphiné fuc
ks Lombards , il fouffrit tous ces mauvais
traitements avec une patience héroïque; mais
Mommol ne fut pas plutôt forti de Vaifon
qu'il fe fentit attaque d'un mai violent. Ses
gens qui le voyoient condamné parles Mé-
,

decins , eurent recours au faint Evêqùe , &


Rapportèrent tout mourant à fes pieds. Qui-
i%% Saint Quinide 9 E.
nide pria pour fa guérifon & Pobtint fur l'heu-
,

re. peu de temps après au IV Con-


Il aflifta

cile de Paris , qui fe tint en 571 , dans TÉ-


glife des Apôtrçs Saint Pierre & Saint Paul ,
dite aujourd'hui , & mou-
de Sainte Geneviève ,
rut le 15 de Février 578 ou 579. Sa fête eft
marquée en ce jour dans les Martyrologes
d'Adon &
d'Ufuard , ainfi que dans le Romain,
La Ville de Vaifon Ta choili pour fon fécond
Patron,
Voyez la Vie de Saint Quiniz , dans Bol-
landus.

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Saint O n ési me. 183

XVI JOUR PE FÉVRIER.


SAINT ONÉSIME,
PISÇJPIE DE SAINT PAUL.

O NÉ S IM E
Phrygien de naiflance , étoit
,
efclave d'un citoyen de Colofles , nommé
FÉVR, f 6,

Philèmon , qui avoit été converti à la Foi par


Saint Paul ; après avoir donné plufieurs fujets
de plaintes à Ton Maître , il finit par le voler
& prendre la fuite. Dieu permit , pour le fa-
lot de ion ame ,
qu'il dirigeât fa route vers
la Ville de Rome , oi\ Saint Paul étoit alors
enchaîné pour la Foi. Cet Apôtre l'ayant renr
contré , lui fit fentir toute Pénormité de fa
faute , le convertit &
le baptifa. Il le renvoya
enfuite à fon Maître, auquel il écrivit en même
temps , pour lui demander la grâce de fon ef*
clave. Pnilémon , non content de lui pardon-
ner , le mit en liberté , le renvoya à Rome &
pour être auprès de Saint Paul , qu'il fervit
toujours depuis avec l'attachement le plus fi-
dèle &
le plus tendre. L'Apôtre le fit porteur,
pvec Saint Tychique , de la lettre qu'il écrivit
aux Coloffiçns ( i ) , l'employa dans le minif-
tere de l'Évangile, &
l'ordonna Évêque dans
Ja fuite. ( a), fi fut martyrifé fous Domitien ,

( 1 ) Colof. IV. I Saint Jérôme , Ep. 61. e. a ;

t
« ) Ccçi cft rappçrté par | par pilleurs autres Pères.

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184 Saint Onési me:
•-
es en 95 , félon les Grecs , qui Phonoreot le \<

FÉVR. 16 ^ e Février. M eft nommé le 16 du même mote


dans le Martyrologe Romain , dans ceux &
de Bede , d'Adon , d'Ufuàrd , &c. ( 1 )•
Il ne faut pas confondre notre Saint avçc

Çaint Onéfime , troifieme Éyêque d'Éphefç


( b ) , qui donna les plus grandes marques de
refpeft &de charité à Saint Ignace , lorfque
ce dernier alloit à Rome. On trouve fon éloge
dans la Içtfre crue le faint Évêque d'Antiochc
écrivit aux Épnéfiens.

Un pécheur converti , que lagrace a rappellé


.des portes de PEnfer , ne de s anéantir a la
cefle
vue de crimes ,
fes &
des tréfors infinis de la
• miféricorde divine. Il mefure fon amour pour
Dieu, fur la grandeur des dettes qui lui ont '
t

<été remifes, &


en manifefte la vivacité , non
par ces transports momentanés , par ces dé«* &
firs ftériles qui coûtent fi peu à l'amour pro*
pre ; mais par ces aâes généreux qui mon-r
trent un homme nouveau , 6c totalement mort
au péché. Delà , cette attention à veiller fur
fon cœur &
fur fes fens ; ce zele à punir fes
iniquités, par les pratiques laborieuies de la
pénitence ; cette ardeur pour Pacquifition des
vertus contraires à fes premiers penchants;
cette ferveur dans tous les exercices propres à
Tacheter un temps perdu pour l'éternité. Er
Gue Pan ne s'imagine pas que Pétat d'un pé-
cheur pénitent foit fans confolation. IXcu fe

( 2 ) Tillem. T. i. p. 294 » autres , font tombés dans cet'


& Note lo Yur Saint Pau!. te faute.
( h ) Baronius , U quelque

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Saint ONÉsimÊè 285
à verfer dans font ame les grâces les pltis
jtfaît

abondantes* Souvent il le vifite par les com- fêvr# x $# .

muni cations les plus intimes , afin de lui faire


aimer fon joug , &
de fortifier fa foiblefle con-
tre tes difficultés qui fe rencontrent , fur-tout
dans les commencements de la converfion. D'au-
trefois , il lé conduit par la route des épreu-
ves mais c'eft afin de perfectionner fes ver-
;

nis , &
de multiplier fes vittôires , en mufti-
pliant fes combats. Ah ! qu'il eft peu de
finceres convenions aujourd'hui Y-a-rïl beau- !

coup de pécheurs qui fe reconnuflent au por-


trait du véritable pénitent que nous venons de
tracer ? La voie de l'Évangile eft - elle donc
élargie ? Et nous en coutera-fil moins qu'aux
Saints pour expier nos iniquités ? Scroit - il
poffible que nous ne reconnuflîons notre er-
reur qu'en ce jour terrible où la miféricord»
n'aura phis lieu ?

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i%6 Si Êlie , Et ses CôMP. MMi

S. ELÏ E , S. JEREMIE,
$< ISAIË , S. SAMUEL,
SA1NÎ DANIEL,
ET AUTRES SAINTS MARTYRS *

à Céfarée , en Paleftine.

Tiré de VHijloirt des Martyrs de là Pâltfiine f


donnée par Eufibe y à la fin du VIII Livre de fort
Hiftoirt Ecclijiajlique 3 c. u , iz.p.tfGé

L'An 5 op.

JL'Àn 309 de Jefus-Chrift , foti$ l'Empiré éé


Maximien-Galere &
de Maximin , qiu conti*
nuoient la perfécution allumée par Dioctétien
cinq Chrétiens d'Egypte , qui revenoient de
vifiter les Confeffeurs condamnés à travailler
aux mines de Cilicie , furent arrêtés aux portes
de Céfarée , en Paleftine. Hs répondirent fans
détour aux queftions qu'on leur fit fur leur
patrie , &fur lès motifs de leur voyage en Ci-
licie. Le lendemain on lesr conduifit devant Fir-
milien , Gouverneur de la Province , avec S.
Pamphile &
fes compagnons, qui depuis deux
ans ,étoient emprifonnes pour la Foi. Le Juge,
avant de commencer • 1 interrogatoire . fit
étendre les cinq Égyptiens fur le chevalet. Lorf-
qu'ils eurent été long-temps tourmentés, il s'a-
drefla à celui qui paroiflbit être le premier, &C
lui demanda ion nom. Les Martyrs , depuis

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S. Élie , et ses Comp. MM. 287
leur baptême ne portoient plus leurs noms
,

propres , qui étoient probablement ceux de


fÇy^ 1$
Quelques Divinités païennes , comme on les
donnoit en Égvpte. Celui oui fut interrogé , ré-
pondit qu'il s'appelloit Élie , &
que fes corn*
pagnons fe nommoient Jérémie , Ifaïe , Sa-
muel &
Daniel. Firmilien lui ayant enfuite
demandé fon pays , il dit que lui fes corn- &
ions étoient de Jérufalem , entendant la
érufalem célefte dont tous les Fidèles font
citoyens. Comme cette réponfe ne fatisfeifoit
pas toute la curiofité du Gouverneur , il or-
donna qu'on appliquât le Martyr à une nou-
velle torture , pour l'obliger à déclarer dans
quelle partie du monde cette Jérufalem étoit
Muée. Les Bourreaux fe faifirent de lui auffi*
tôt , lui lièrent les mains derrière le dos , lui
mirent les pieds dans les Ceps , &
lui déchirè-
rent le corps à coups de fouets. Mais cette
queftion n'ayant pas produit l'effet que Firmi-
lien en attendoit , il condamna le Martyr &
fes quatre compagnons à perdre la tête ; ce qui
fut exécuté fur le champ.
Pamphile &ceux qui étoient emprifonnés
avec lui , furent auffi condamnés à mort. Por-
phire , domeftique de Pamphile , qui entendit
prononcer la Sentence , demanda qu'il fut au-
moins permis de rendre aux Martyrs les hon-
neurs de la fépulture. Firmilien , irrité d'une
telle hardiefle , le fît arrêter ; 6c il ne l'eut
pas plutôt entendu confeffer qu'il étolt Chré-
tien , qu'il le livra à la fureur des Bourreaux,
Ceux - ci lui déchirèrent les côtés d'une ma-
nicre fi horrible , qu'on lui voyoit les os &
les entrailles. Le Tyran, laffé par la confiance
du Martyr , qui ne pouflbit pas un foupir , le .

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Î88 S. G RÉGCft RÈ PAPki i

fit au milieu d'un grand feu , où il con-


jeter
fomma fort facrifice , en louant Dieu en in- &
Toquant le nom de Jefus-Chrift;
Comme Seleucu£, autre Chrétien , applau*
diffoit à la fermeté de Porphire , les Soldats
qui l'entendirent , le menèrent au Gouverneur^
qui le condamna aufli à perdre la tête;

^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^
j

MÊME JOUR.
LE
SAINT GRÉGOIRE X;
Pape.
G RegoireX
&
Plaifance ,
étoit d'une illuftre
reçut au Baptême le nom
baifon dé
de Thi-
bault. On remarqua en lui dès fa jeunefle une
vertu peu commune , & tme application ex-
traordinaire à l'étude. Ù acquit fur-tout une
connoiflknce parfaite du Droit Canonique,qu'il
étudia d'abord en Italie , puis à Paris à Lie-^ &
ge. Il étoit Archidiacre de MÉglife de cette der-
nière Ville , quand le Pape , qui cpnnoiflbit
fon rare mérite , le chargea de prêcher une
Croifade , pour la délivrance de la Terre Sain*
te. 11 s'acquitta de cette commiffion au gré du
Souverain Pontife ; mais il hii en coûta des
peines infinies , parce qu'il fallut étouffer le
feu de M difcorde qui divifoit les Prûrces Chré-
tiens.
La mort dô Saint Louis , arrivée en 1 170 i
avoit eu des fuites très-funeftes pour les Chré-
tiens d'Orient. Leur ardeur s'étoît rallentie f
& les avantages remportés par le Prince de

Galles j

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S. G RÉ C O I RE 9 P AP É. 189
Galles , &
par Édouard I , Roi d'Angleterre i
n'avoient pu rétablir leurs affaires. Grégoire ,
p^yn, t9%
touché du malheur où ils fe troùvoieht ré-
duits , réfolut d'entreprendre le voyage de la
Terre Sainte , pour les confoler, & pour fâtis-
faire fa dévotion
qui le preflbit de vifiter des
,
lieux confacrés par 1 accômpÙfleijient des My Aè-
res de notre Religion. Ce tut én Palëftine qu'il
apprit qu'on l'avoit élufuccefleur dii F*ape Clé-
ment IV. Il y avoit près de trois ans que lé fairif
Siège étoit vacant , les Cardinaux aflemblés à
Viterbé $ noyant pu s'accorder dans le choix
d'un Pape* Ennuyés à la fin Je ne pouvoir rien
terminer, ils eurent recours à un comprctaiis ;
& les fix Cardinaux auxquels tous les autres
avoient remis leurs pouvoirs , élurent unanime-*
ment notre Saint le i Septembre 1 27 1 Le noiu* .

veau Pape partit pour l'Italie f après avoir fait


l'adieu le plus touchant aux Chrétiens dé la Pa-
lëftine , &
leur avoir promis au'il fé fouvien- ,
droit toujours d'eux. Il arriva à Rome en Mars
& fut initallé le 17 du même mois, en 1 171. Il
prit le nom de Grégoire X ( a ).
La première choie à laquelle il périfa 9 fuf
de corivoguer un Concile général. Trois rai*
ions principales l'y déterminoieht : lé Schifmé
des Grecs ; le mauvais état où étôient les
affaires des Chrétieiis d'Orient ; lès vices le£ &
erreurs qui défiguraient la face de l'Églile. Le

(a) Ceit lui qui ordonna Souverain Pontife , afin de


le premier , qu'après mort ne pas laiifcr le Siège auffi
la
du Pape , les Cardinaux fe- long-temps vacant , qu'il l'a-
voit été après la mort de (bu
OmcUvt , &
n'en fortiroienr prçdéceflcur.
point -qu'ils neufleat élu un

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290 S. Grégoir e,Pape.
Concile s'ouvrit à Lyon ( b ) au mois de Mai
de Tan 1274 ; il s'y trouva 500 Évêques , &c
70 Abbés. On laifla entrer à la quatrième Set-
fion les Députés de la Cour de Conftantino-
ple ; & l'un d'eux abjura publiquement le
Schifme , au nom de l'Empereur Michel Paléo-
logue. Il fe tint encore une cinquième Seffion ,
& ce Concile , le fécond général de Lyon , finit
le 7 de Juillet.
Quoique ce faintPape fut accablé cPaflaires,
iln'en étoit pas moins exaô à remplir les diffé-
rents devoirs de la piété chrétienne. Il partait
peu , &
s'entretenoit continuellement avec
Dieu dans le fonds de fon cœur : il menoit
une vie dure & auftere & nourriffoit fon ame
,

par laméditation de la parole divine dont U


îaifoit fes délices. Épuifé de fatigues , il tomba
malade en repayant les Alpes , mourut à Ar- &
rczo le 10 Janvier 1 276 , trois ans dix mois &
après fon exaltation* Il eft nommé le 1 6 de
février dans le Martyrologe Romain publié
par Benoit XIV.
Voyez Platine , Ciacconius , Saint Antonin ^
Hijl. part. 3. ///. 20. c. 2 ; Benoit XIV , de Ca-
nonifi l. a. T. 2* Apptnd. 8. p. 6J3. Ibid. p.
709. Ibid. c. 24. §.37. &
42 ; Muratori 9
Script, liai J. 3. p. 5<)y , 5$$ , 604.
- -
m

( b ) La Ville de Lyon n'a* facilité <le s'aboucher avec

voit alors d'autre Souverain les Princes donc on attendoit


que fon Archevêque. Sa fi- du Cecouxs pour la Terre Sa»n*
tuation procurait d'ailleurs la te.

- •

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StÈi Ji/LIÈltÈi V.Mi l9<

FÊVfc 16:

MAINTE JULIENE,
Vierge et Martyre.

Hlle fut décapitée fous l'Empire de Ôaferë-


Maximien , après avoir fouffert les plus cruel*
tourments. Nous apprenons de Saint Grégoiré
le Grand , que fes Reliques furent tranférées £
Rome. Ilyen a une partie à Bruxelles * dans*
fÉglife de Notre-Dame du Sablon, Sainte Ju-
iiene ëft fingulierement honorée dans les
.Pays-Bas. L'Auteur du Martyrologe attribué à
Saint Jérôme , Béde & tous les autres Màrty*
rologiftes , mettent fa mort en ce jour. L'an-
cien Martyrologe manufcrit qiri eft à Gorbie j
dit qu'elle fouffrit à Nicômédie. Les Aâes dé
cette Sainte , dctoiés par Boilandus , méritent
peu de croyance.
Voyez Chaftelain , Notes fut U Monyï* pi
€G6 9 G6j.

SAINT TANCON,
Eveque et Martyr.
A a NCON fat Sabord Moine d'Amabaric èrî
Ècoffe , &C mérita , encore plus par fa piété •
que par fa fcience , d'être élevé à la dignité
d'Abbé. Mais le défir ardent qu'il aroit dç ver-
fer fon fane pour J. C< lui impira la réfofution
d'aller prêcher l'Évangile en Allemagne , k
Pexemple de Panton fon prédéceffeur. Devenir
Évêque de Verden , il ne s'attendoit pas <ju? iî
T ij

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içi Sa/nt Tancon ,E. M.
— feroit élupour lui fuccéder dans le Siège Épif-
copal de cette Ville (a). Son zele reçut par
6
Pimpofition des mains une nouvelle aôivité.
Il ne s'occupa plus que de l'accroiflement de

l'Empire de J. C. Pénétré de douleur à la vue


des défordres des mauvais Chrétiens , il les
peignoit avec les couleurs les plus fortes les &
plus capables d'en infpirer de l'horreur. Quel*
ques fcélérats , endurcis .dans le crime , ne
purent fouflrir que le faim Pafteur condamnât fi
hautement leur conduite ; ils fe jetèrent fur lui
avec fureur, &
l'un d'entr'eux lui porta un coup
de lance , dont il mourut vers l'an 81 j.
Voyez Krantz , Mctropolis , /. /• c. 22 ; Leflejr,
Rifi.LS; Wion, l. 3. Ugnivaœ.

{a) II lut le Bt Évêque de Vtrdeit*

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S. Fiâv iev Arc. , 293

JIT^//. /Of* Z>£ FÉVRIER.


SAINT FLAVIEN,
ARCHEVÊQUE
DE CONSTANTINOPLI»
Tiré des Conciles &MHifioires de Cédrenusî
et Évagrt , de Théophanes , /. 8. c. 8. f*38^ 9 &c.

V oyeç Baronius 9 les BollandiJles f T. 3 , /VrK. p»


7/ ; Fleuri, L 27. 6» 2# ; Quefnel 9 Jur les Œuvres de
S. Léon f T. 2. Diffi i ; le P. Cacciari , fur les Œu-
vresdu n\émt Pere , réimprimées à Rome en iyS5 9
T. 3. Dljf. 4. de Eutychianâ Haeref. 1. i. c. 2.

p. 312 , c. 8. p. 385 , c. 9. p. 393 , c. 11. p.


43*-

L'An 44^,

F L AVIEN,
jlife
Prêtre &
Tréforier de fE-FÉVIL
de Conflantinople , en fut élu Archevê-
17.

que en 447 , après h mort de Saint Prode.


Cette élection déplut à: l'Eunuque Chryfa-
phius , Chambellan de l'Empereur Théo do le le
jeune. Ce Miniftre , prévenu contre Flavien ,
conçut dèilors le deflein de le perdre. Il engagea
le foible Empereur , de l'efprit duquel il srétoit
abfolument rendu maître , k lui demander quel-
que préfent pour Ton Ordination. Le faint Paf»
teur, conformément à ce qui fe pratiquoit alors
dans i'Églife , envoya au Priace des Eulogies
Tiij

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194 . & Plavie* 3 Arc,
pu P»n$ bénis, en figne d« paix de Çpmmur
nion. Chiyfaphiu$ ,qui avoit fes vues , lui fît
dire qu'il dçvoh envoyer un prélçnt d'une au?
tre e/pece. Flavien , ennemi déclaré de tout ce
qui ayoit même Fapparence de fimonie, répoa?
fiit avec fermeté , que les revenu^ de TÉglifc

ptqient deftinés à d'autres ufages , &ç qu'ils de-?


voient être uniquement employés à la gloi-r
re de Dieu & au foulagement dç$ pauvres,
pEtmuque ? irrité d'une réponfç aijfli généneur
(ç , réfolut de ne plus garder de mefilres , &
fde remuer tous les rqflorts imaginables pour
faire dépofer Flavien. Mais comme il le favoh
protégé de Pidchérie , fœur de l'Empereur ,
cui avoit toutç l'autorité , il travailla d'abord
f.
éloigner cette Princefle des affaire, U per^
fiiada enfuite à Théodofe , par le moyeq de l'Intr
pératrice Eudoxie 9 d'exiger de l'Archevêque
qu'il ordonnât Pulcfcérie Diaconefle. Le refus
que fit Flayipn de fe prêter à leurs intrigues f
parut un crime aux ennemis qu'il avoir à la.
tour ; & ils ne manquèrent pas de le peip-

, flre avec les plus noires couleur^. Notre Saint


ayant pnluite condamné les erreurs d'Eùty-
f nés , parent de CHryfaphius , ce dernier de-
yint furieux, &t fe. porta à tous. les excès qîi
peut tomber un homme qui fuit les mpuve?
jnents de la haine la plus implacable. »

Eutychès étoit Prêtre fit Abbé de trois cent»


Moines près de Conftantinople. Il s'étoit fiât
pne forte de réputation par une vie réglée}
jîrçis dans le fonds ce n'étoit qu'un ignorant &
un grgueilleux , fort entêté de les propres idées;
\Jn zple outré contre Neftorius , qvu nioit tfu*
nité dp perfonne en Jçfus-Chrift , le jeta dang

¥?m\r .9pf9%i vint jufqtfà çnfeigner

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& Flavien Arc. ,

S'il n*y avoit en Dîeu qu'une feule nature. Eu-


>e de Dorilée , autrefois fon ami , l'accufa
295
=
F £ VR
*

dans un Concile aflemblé par Flavien , en


448. Les Pères de ce Concile firent à Paccufé
plufieurs citations auxquelles il ne répondit
point. U comparut cependant à la fin ; mais il
entra fuivi de deux Officiers de la Cour; &
d'une troupe de Soldats. Les Évêques lui
ayant demandé compte de fa Foi fur le point
dont il étoit queftion , il déclara qu'il ne re-
connoiffoit qu une nature en Jefus-Chrift ; &
comme on youloit lui montrer l'impiété de fa
doûrine , il répondit qu'il n'étoit point venu
pour difputer , mais feulement pour rendre
compte de fa Foi. Le Concile lui dit aufli-tôt
anatnême & le dépofa. Flavien prononça fà
Sentence , qui fut foufcrite par trente - trois
Évêques 3 & par vingt-trois Abbés , dont dix-
huit étoient Prêtres. Eutychès fe voyant con-
damné , dit tout bas à (es Gardes cju'il en ap-
pelloit aux Évêques de Rome , de Jerufalem &
d'Egypte. Il écrivit en même temps une lettre
capueufe au Pape Saint Léon , pour le préve-
nir contre le Concile de Conftantinople ; mais
cette lettre ne produifit pas l'effet qu'il en at-
tendoit. Saint Léon ne donna point dans ta
piège. Il fut inftruit du véritable état des cho-
ies par Flavien , qui lui envoya une relation
exacte de tout ce qui s'étoit pafTé. Il écrivit
enfuite à notre Saint une fort belle lettre oîi
il expliquent avec autant de clarté , que de fo-
lidite , le dogme combattu par le nouvel
Héréfiarque. Cette lettre fut inférée depuis
dans les Aftes du Concile de Calcédoine y qui
proferivit folenaellemcnt les erreurs d'Euty-
chès.

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»9* S. Flavien 3 Ane.
Cependant l'Empereur , follicité par Chryî
faphius , ordonna la révifion des Aôes du Con-

?7f çiie affemblé par Flavien à Çonfbntlnople 5


& il fe tint pour cet effet un Synode au mois

cPAvril de Tannée fuivante. Il fut compofé


Intrigue* de
d e t rente Évêques f dont dix avoient affifté
Chryfaphius au Concile de Çonftantinople. Thalaffius de
perdre Céfarée y préfida , attendu que Flavien auroit
ru-
rw été regarde comme juge Se parue. L examen
que Ton fittourna à la confufiQn dlîutychès 9
& ne fervit qu'à mettre dans un plus grand
jour la juftice des procédés de l'Archevêque
de Çonuantinople. Ce dernier ayant été en-
fuite aceufé par fes ennemis , de favorifer le
Neftorianifme , fe juftifia pleinement , en pré-
sentant à l'Empereur une profefiion de Foi ,
çii il condamnpit la doftrine impie de Nefto-
rius & d'Eutychès. Chryfaphius, dont les pro-
jets avoient été déconcertés , ne fe rebuta
point ; i| fit jouer d'autres refforts pour narve-f
pir à fes fins. 11 écrivit à Diofcore , Patriarche
d'Alexandrie , homme d'un caraftere impétueux
& violent , pour lui promettre fon amitié 6c
fa prpteftion , s'il vouloit prendre la défen/fc
^•Çutichès, &fe liguer avec lui, contre Fla-
vien & Eufebe de Dorilée. Lorfqu'H fe fut
fcfluré du Patriarche , il travailla à gagner l'Im-r
pératripe Eudoxje ; & il y réuflit d'autant plu$

^ifément , que cette Princeflfe étoit charmée


4'aVQir line oeçafion de mortifier Pulchérie,
'
qu'elle favoit attachée au Saint Archevêaue,
k'iRtrigue étant bien nouée , on perfuada k
l'empereur de faire afferrçbler un Concile à
Èphefe, afin , difoit-on, de terminer toutes
les difputes. Théodofe féduit , ne penfa plus

ÇH'è k ÇonYPÇation 4ç çç Concile , dont oi\

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S. Flavien s Arc. 297
lui avoît exagéré la prétendue néceffité. Il
manda à Diofcore de venir y préfider , &
d'à-
p^y^ * 7,
mener avec lui dix Métropolitains de fa dé-
pendance , dix autres Évêques , &
l'Archiman-
drite Barfumas , oui étoit entièrement dévoué
aux ennemis de Flavien. Les autres Patriarches
& le Pape Saint Léon , furent auffi invités au
Concile ; mais ce dernier ne reçut que fort
tard la lettre de l'Empereur. Il envoya toute-
"
fois quatre Légats pour le repréfenter. Ces Lé-
gats étoient Jules,
Évêque de Pouzzoles ,
René Prêtre , oui mourut en chemin , Hilaire
Diacre , &
Dulcitius Notaire. Ils étoient por*
teurs d'une lettre à Flavien , dans laquelle S.
Léon démontroit l'ignorance d'Euticnès 9 &
établiflbit la doârine catholique , de la ma*
niere la plus folide &
la plus lumineufe.
Ce d'Août de l'année 449 , que
fut le huit
fe fit Touverturô du Concile d'Ephefe, connu
dans PHiftoire Eccléfîaftique , fous le nom de
^SS^
Brigandage , à caufe des violences qui s'y com-
mirent. Il s'y trouva cent trente Évêques cTÉ-

gypte &
d'Orient. Eutychès vint aufli à Éphefe
avec deux Officiers de l'Empereur , &une trou* .

pe de Soldats. Il fut aifé de voir dès le com-


mencement du Concile , que tout s'y feroit par
cabale , &
qu'Eutychès y avoit un parti pui£>
faut. Les Légats du Pape n'eurent pas même la
liberté de lire les lettres dont ils étoient por-
teurs. Enfin , après de longues conteftations f
Diofcore prononça une Sentence de dépofition
çontre Flavien &Eufebe de Dorilée. Les Lé-
gats de S: Léon protefterent contre cette Sen-
tence ; &
le Diacre Hilaire entr'aijitres , dit à
Jiaute voix : Contradicitur , on fait oppofition. Ce
jnot latin fut inféré dans les A des du Concile,

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298 S. F lâvien Arc h. y
s=^= Lorfque Diofcore commença à Senten* lire là

WÉVR. 17.
ce » Pleurs Évêaues fe jetèrent à fes pieds ,
&C le conjurèrent aans les termes les plus preA
fants , de ne point paffer outre. Mais loin de
fe laifler fléchir , il fe leva de fon Siège f 6c -

appella les Commiflaires de l'Empereur. Les


portes ayant été auffi-tôt ouvertes , Procle
Proconful d'Afie , entra avec une Compagnie
de Soldats qui tenoient des chaînes , des bâ-
tons &
des épéçs. La plupart des Êvêques
effrayés à la vue d'un tel fpeôacle , foufcrivU
rent tout ce que Diofcore ceux dç fou &
parti voulurent. Il a'y eut que les Légats du
Pape , qui y toujours inébranlables , protçfte»
rent jufqu'à la fin contre ces violences inouies»
Un d'entr'eux fut niis en prifon : le Diacre Hi^
Jaire après s'être fauve avec beaucoup dç
,
peine , prit la route dç l'Occident , arriva &
enfin à Rome. Pour Flavien , il appçlla au Saint
Siège de la Sentence prononcée contre lui , 8c
remit l'Aôe de fon appel aux Légats du Pape.
Piofcore en fut fi irrité ( 1 ) , qu'il fe jeta fur
, avec Barfumas
le Saint &
plufiçurs autres per-»

Mort du
^onnes ^e ^on P 31** ( 1 "s k renverfçrent
Saint, par terre , le &
maltraitèrent fi rudement à

coups de pieds , qu'il en mourut peu dç temps


*près à Épipe , où il avoit été exilé ( a \
L'impie Diofcore ne s'en tint pas la ; il eut
encore Pinfolence , de concçrt avec deux Evê*
ques d'Égypte , d'excommunier le Pape S Léon* .

Mais Diçu ne pendit pas que le triomphe dç

<
1
j

( I ) Evagr. t. XI. c. u % Sardes , en Lydie , comme t

( 2 ) Conc. Calced. Acl. 4. nous l'apprenons de la Chro*


(«) Épipe étoic près de nique de Marcellin,

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0

S. Flavien ^ Arc- 199


finjuftice durât long-temps. L'Empereur ayant
enfin ouvert le$ yeux , Chryfaphius , Tau- f£vr.
t£ur de tant de maux , fut difgracié , puis condam-
né à mort. Eudoxiç fut elle-même obligée de fe
retirer à Jérufalem. Le rappel de Pulchérie à la
Çour, produiftf qptte heureufe révolution. L'an-
née fuivante , cette Princefle étant montée *

fur le Trône r après la mort de Théodofe ( b


) f
ordonna que le corps de notre Saint fut folen*
nellement transféré à Conftantinople , &C en-
terré avec les Archevêques fes prédécefleurs,,
Saint Léon, informé de tout ce qui s'étoit
paffé à Éphefe , avoit écrit à Flavien pour le
confolçr ; rrjai$ il étoit mort quand la lettre
arriva. avpit ai^Ii écrit en fa faveur à Théo?-
Il

dofe , à Pulchériç , &


au Clergé de Conflantir
nople. Le Concile Général , tenu à Calcédoine
çn 4 $ 1 , mit Flavien au nombre des Saints &
des Martyrs , &
rendit de grands honneurs à
fa mémoire. Il rétablit auffi Eufebe de Doriiée
fur fon Siège ( c ). Le Pape Hilaire , qi|i avoit
été Légat de Saint Léon , à Éphefe , avoit
une telle vénération pour le faint Archevêque
fie Conftantinople , qu'il fit repréfenter fon mar-

tyre dans l'Êgiife qu'il fonda en l>QiVîpyr fa


fa Croix du Sauveur, n - t.

Qu*il eft glorieux à Saint Flavien d'être mort


pour de l'Incarnation du Verbe Il
la défenfe !

fa voit que ce Myftere eft le fondement de no-


tre Foi , &
que par çonféqueqt il doit nous
'

f b ) Cédrenus , dit que il ctoit exilé ; mais fans ayoir


Thcodofe mourut pénitent. retrace les erreurs d'Euty-
( < ) Le même Concile con-" chès ? & fans avoir expié fes
damna Diofcore qui mou T autres crimes pat la péni-
,

iw en 454, S Gangres , où

ble
300 S. Flavi en , Arc.
intérefler d'une manière toute fpéciale. Nous
* e croyons tous ce My Itère ; mais helas ! C'eft
FÉVR, 17.
d'une foi ftérile , gui ne remue point notre
cœur , & qui le laiffe dans fon infenlibilité.
Avons-nous jamais réfléchi , que c'eft fur-tout
dans PIncamation que Dieu fait éclater la gran-
deur ineflfable de fa puiffance , de fa fagefle , de
ùl miféricorde ? Ah ! fi nous avions foîn de
pénétrer notre efprit de ces grandes vérités ,
on nous verroit plus remplis d'amour de &
reconnoiflance pour Dieu , phis zélés pour la
gloire de Jefus-Chrift , plus fidèles à l'accom-
pliffement des maximes de PÉvangilé , en un
mot , meilleurs Chrétiens. Le Sauveur de nos
ames eft aujourd'hui plus que jamais , outra-
gé par les blafphêmes des impies des li- &
bertins. Il nous invite à l'en dédommager, au
moins par notre amour ; jufqu'à quand le lui
refuferons-nous ? Mais comme l'Incarnation
eft le myfterç d'un Dieu humilié , anéanti 9
nous ne pouvons l'honorer véritablement ,
mie nous ne guériflions «notre coeur de l'çn-
flure de l'orgueil. Ce vice corrompt les meil-
leures aôions , &
précipite ceux qui s'y li-
vrent dans les plus grands malheurs. Eutychès
ne fît naufrage dans la Foi , &
ne mourut dans
l'impénitence , que parce qu'il étoit omieilleux.
Quoi de plus propre que fon exemple, à nous
rirter à rhumilité , &
à nous entretenir dans
pratique de cettç vertu !

\ * »
*n . I

-m

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SS.Théodz/lê Julien à MM. 301

LÊ MÊME JOUR. rtVR.17. <

S. THÉODULE ET S. JULIEN,
M A R T Y R S.

î Ls fouf&irent à Céfarée , en Paleftine , dans le


même temps que les faints Martyrs dont il eft
parlé au jour précédent ; mais ils ne font nom-
més qu'en ce jour dans le Martyrologe Romain.
Théodule étoit un vénérable Vieillard , qui
avoit plufieurs enfants , &
qui occupoit un
porte honorable dans la maifon du Gouverneur
Firmilien. Son mérite étoit fi univerfellement
reconnu , qu'il n'y avoit perfonne qui n'eût
pour lui une eftime finguliere. Frappe du cou-
rage invincible &
de la patience héroïque avec
lelquels Saint Elie &
fes compagnons avoient
foufFert la mort pour Jefus-Chrift , il brûloit
du défir de partager leur couronne* Il tâchoit
d'infpirer ce même dcfir aux autres , en allant
dans les prifons exhorter tous les Confeffeurs
à refter inviolablement attachés à leur Foi. Fir-
milien , informé des fentiments de Théodule
& de la conduite qu'il tenoit , l'envoya cher-
cher , lui fit de fanglants reproches , or- &
donna qu'il fût crucifié fur le champ. Le Mar-
tyr .entendit prononcer fa Sentence avec joie
s'eftimant heureux de terminer fa vie par le
même genre de mort que fon divin maître.
Quant à Julien , il étoit de Cappadoce , &
nouvellement arrivé en Paleftine. Les Fidèles
l'eftimoient fingulierement pour fes rares ver-
tus , quoiqu'il ne fut encore ^ie Catéchumène.

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$01 £. SlLVtN ifÀucHY^ È.
Ilapprit en entrant à Céiaréé/qu'ori vènoît d*é-
xécuter plufieurs Chrétiens à caufe de leur Re-
ligion. Il courut aufli-tôt au lieu du fupplice ,
fe jeta fur leurs corps , & les baifa refpe£hieu- r

fement. Les Soldats témoins de ce fpeûacle


arrêtent Julien * & 1k fconduifent devant le
Gouverneur/ Firmilieri , fans s'amufer à lui
faire fubir un interrogatoire j dont il prévoyoit
apparemment l'inutilité , le condamna fur le
champ à être brûlé. Lé Saint remercia, jefus-
Chrift de Favoir jugé digne de fouffrir pour
fon nom , &
montra jufqu'au dernier foupir
une tranquillité &
un courage , aui remplirent
les Éourreaux d'étoimement de confiifion.&
Voyez Eufebe , fur les Martyrs de la Pa-
leftine, c. n.p. 537;

SAINT SILVIN D'AUCHY, w

ÉVEQUE RÉGIONAIRE,
0E
les du
Saint fortoit d*une des meilleures famil-
territoire deTouloufe (a). Après avoir
paffé fes premièresannées a la Cour des
Rois Childéric &
Thyerri III , il quitta
II ,

le monde pour aller vivre dans la fofitude. Sa


retraite fit d'autant plus de bruit , que tout
étoit difpofé pour fon mariage. II reçut les
Saints Ordres à Rome , où fa dévotion Pavoit
Conduit , &
fut facré Evêque pour prêcher

{a) Quelques Aupurs le |Bruges , en Flandres , cm à


fent naitjre à Doefi \ prfc de jDoesbourg , enBrabaat.

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,

S. Sitviit xïAuchy, £i $oj


aux Infidèles (b). LeDiocefe de Té-
rouanne , alors rempli de Paï ens y fut le prin*
y^yj^
cipal théâtre de fon zele apoftolique; & com-
me joignoit la force de l'efcemple à la foli-
il

dité des înftruftions , il gagna un grand nombre


d'ames à Jefus-Chrift. U mourut à Auchy, en
Artois , le 15 Février 718. Le Martyrologe
dUfuard , le komain , &
ceux» de Flandres ,
n'en font mémoire que le 17 du même mois ,
jour où il rut enterré. La plus grande parti*
de fes Reliques fut transférée en 95 1 à l'Abbaye
de Saint Bertin , de Saint Orner , à caufe aes
incurfions des Normands.
Là Vie de , attribuée à Anténor
Saint Silvin
fon difciple , eft perdue. Celle que nous avons
eft du IX fiecle.
Voyez Bollandus , T. }. Ftbu p. z$ ; le P. Ma*
billon , A3. Ben. Su. 3 .part. 1. p. i$8 ; Chaf- &
telain , Not.fwr U Martyr* Rom* p. £$9.

( * ) Ceft fans fondement c'eft-à-dire , qu'il n'étoit at-


que quelques Auteurs l'ont taché à aucun Diocefe par-
iair £vêque de Touloufe , ou ticulier , & qu'il avoit été
de Terouanne. Son nom ne facré pour faire des Mi fiions
Ce trouve point dans les Ar- chez les Infidèles. Ufuard eft
chives de ces deux Eglifes. le premier qui ait donné à S.
Les plus habiles Critiques con- Silvin le titre d'Evêque de
viennent aujourd'hui qu'il Terouanne.
«ou Evêque Rcgionairc

* #

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504 S. LomaNj S, Fin f AN.

FÉVR.I7* SAWT £ O M A N,
ENCORE APPELLÉ
LUMA N<

CE
Saint Patrice
neveu ou du moins difciple dd
Saint ,

fut le premier Evêque de Trim *


i
dans le Comté de Meath , en Irlande. Son culte
eft fort ancien dans la Ville de Port-Loman ,
qui a pris fon nom. Saint Forchern , qu'il avoit
baptife, lui fuccéda dans le Stegè Epifcopal
de Trim. I/Eglife d'Irlande honore Saint Lo-
man en ce jour, & le 11 d'Oûobre.
Voyez Colgan fous le 17 Février
, , & les
Antiquités d'U fférius , fous Tan 43 3

*
SAINT FINTAN,
Abbé d'Ednech,.
en Lagénie.

Sàint FiNtAN vivoit 'daris te fixiemé


eut pour difciple Saint Congal , Fon-
fiecle. Il
dateur de PAbbaye de Bencor , maître de &
Saint Colomban. Il y a un autre Saint du mfr-
me nom , qui eft honoré le 11 d'Oâobre. (<z ).
Voyez Colgan , Ufférius , Henfchénius. &

( a ) Colgan dit qu'il y a où le nôtre eft honoré , &


€n Irlande 24 Saints qui por- les* prend pour autant de
tent le nom de Fintan. D Saints.
compte apparemmept les lieux

xmi. JOUR

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S.iINTSlMÉON t E.M. JOJ

XVII JOUR DE FÉVRIER.


I.

SAINT SIMÉON,
ÊVÊQUE DE J ÉRUSALEM,
Martyr.
Pbyei Eufibe , £3. c. 3z ; TilUmônt , T. /;

& T. 2 ;U QuUn , Or. Chrift. T. 3. p. 140.


m -mi 4

L'An 10 5.

S* A INT SI É M ûN eut pouf pere Cleo- févr* is.


phas , autrement Alphit frère de Saint J6*
ieph , & ?
pour mere , Marie , fœur de la Sainte ce4
naiffafl4

Vierge. Les plus habiles Interprètes penfent


qu'il eft le même que ce Simon, frère de Saint
Jacques le Mineur , de Saint Jude &
de Jo-
seph , dont il eft parlé dans l'Evangile ( 1 ). Il
naquit huit ou neuf ans avant le Sauveur ; &C
Ton ne peut douter qu'il ne fe foit mis de bon-
ne heure à fa fiiite , avec fon pere , fa mere ,
& fes trois frères* Il ne paroit pas moins cer-
tain qu il reçut le Saint Efprit le jour de la
Pentecôte , avec la Sainte Vierge &
les Apô-
tres 9 &
qu'il étoit du nombre de ceux qui font
défignés fous le titre général de frères du Sei~<
gncur ( 2 ).

(1 ) Monh, jyZT. ff% ( a ) ASLI.

Digitized by
306 Saint Siméoù 3 E.M.
Lorfque eurent maflacré , en 6% ï
les Juifs

iÉVR 18 Saint Jacques le Mineur , premier Evêque de


'
Jérufalem, Saint Siméon eut le courage de leur
reprocher cette horrible cruauté ( 3 ). Il n'igrîo-
roit pas le danger auqueHl mais il s'expofoit :

étoit animé de cet efprit de force qui rend fu*-


périeur à tout fentiment de crainte. Quelque
temps après , les Apôtres les Difciples s'é- &
tant aflemblés à Jérufalem , pour donner un
fuccefleur à Saint Jacques , ils élurent Siméon

11 eft élu
tout d'une voix. On croit qu'il avoit aupara-
ÉvêqucdcJé- Vant aidé fon frère dans le gouvernement de
rufalera. foh Eglife.
Les Romains i fefTés des révoltes continuel-
les des Juifs , résolurent enfin de détruire Jéru-
falem. Ils fe mirent donc en marche pour exé-
cuter leur deflein. * Mais Dieu, qui vouloit fim-
ver fes ferviteurs , les avertit miraculeufement
4 ) de forrïr d'une Ville fur laquelle il alloit
léployer fes vengeances, de la manière la
plus formidable. Les Chrétiens , dociles à la
11 fe retire voix du Ciel , partirent avec leur Évêqtie, &t

^^^^&
à Peiia avec fe retirèrent dans la petite Ville de Pefla , fi-
fcntroupeau.

de Jefus-Chrift , avant que Vefpafien eût for-


ftft 66

mé le Siège de Jérufalem. Les Fidèles repafle-


tent le Jourdain après la ruine de cette malheu-
reufe Ville , &
vinrent habiter au milieu de
fes débris. On y vit bientôt refleurir l'Églife

( 5 ).
Dieu s'en déclara visiblement le protec-
teur , & il la glorifia par tant de prodiges , qu'un

( 3) S. Epiph. k*nf. 78. 30. c. z.


c. 14. (5) S. Epiph. /. di Pond. &
(4) Eufeb. /. j. c. /, S. Menfir. ç . 1 Eufcb. Dim, l. j .
Epiph. htref. 29. c. 7. hkref. c.

Digitized by Google
grand nombre de Juif* etnbcafferent le Chrif-
tianifme. Les chofes refterent en cet état juf-
l9 *
cpi'aux dernières années d'Adrien , qui fit en-
uerement rafer Jérufaiem,
La joie qu'avoit S. Siméon de voir fous les
jours multiplier les difciples de J. C. fut troublée
par la naiflance* de deux Héréûes ; celle des Na-
zaréens &
celle des Ébionites. Les Nazaréens fe
rapprochoient en plufieurs points des Juifs &C
des Chrétiens , quoique dans le fonds ils détef*
taflent les uns &
les autres. Ils r€gardoient à la
vérité J. C* comme le plus grand des Prophètes;
tnais iisnioienten même temps qu'ilfut Dieu» Ils
obfervoient les jours duSabbat 6c du Dimanche,
& fàifoient un alliage monltnieux des céré-
monies de l'ancienne &
de la nouvelle Loi (a ). Erreur! éa
A toutes ceserreurs y les Ébionites en joignoient Nazarccin &
d autres qui leur etoient particulières. Ils en- te$ ,

feignoient , par exemple ^ que le divorce étoit


licite , &
qu'on pouvoir fe livrer fans fcrupule
à des crimes infâmes. L'auteur de cette der-
nière Seâe dogmatifa d'abord dans le Village
de Cocabe au delà du Jourdain. Il paffa depuis
en Afie , &
vint jufqu'à Rome Les Héré-
tiques , jufqu'alors timides y n'oferent répandre
leurs erreurs en public durant l'Épiicopat de
Saint Siméon , qui vécut plus long-temps qu'au-
cun des Difciples du Seigneur. Mais Dieu ne
l'eut pas plutôt retiré de ce monde , qu'on vit;
fortirde l'Enfer une multitude effroyable de
doârines impies qui attaquèrent ouvertement
la pureté de la Foi ( 6 ).

( a) TL paroît par le récit fance à Pella.


*
dé Saint l?piphane , que THé* (6) Eufeb. /.
"
des Nazaréens prit dixfc

Vij

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308 Saint Siméon, E. M.
La Providence avoît permis que notre Saint
iïkXR. 18.
échappât aux recherches que Vefpafien Do- &
mitien firent faire de tous ceux qui étoient de
la race de David. Mais Trajan ayant ordonné
les mêmes recherches , les Hérétiques les Juifs &
le dénoncèrent au Gouverneur Atticus , com- &
me Chrétien , &
comme defcehdant de David.
Durant plufieurs jours , il foufirit les plus cruels
rtyrC dU tourments avec patience qui étonna fes
Sa^nt
perfécuteurs. Enfin il rut condamné au fupplice
de la croix , &
termina fa vie par le même genre
de mort que fon divin Maître. Son martyre
arriva en 106 ( b ). Il étoit âgé de 1 10 ans , 6c
en avoit paffé environ 44 dans l'Épifcopat*

Les premiers Difdples du Sauveur étoient fi


parfaitement morts au monde à eux-mêmes &
qu'ils menoient une vie angélique dans un corps
mortel. Ils avoient tellement crucifié le vieil
homme , que toutes leurs penfées, tous leurs dé-
firs , & toutes leurs a&ons , n'avoient d'autre
but que Paccompliffement de la volonté de
Dieu &
fa plus grande gloire. Toujours occu-
pés de l'abîme de leur néant , ils étoient in-
ïenfibles aux applaudiflemenrs des hommes 9 &
gardoient foigneufement leur cœur du fouffle
empefté de l'orgueil. Fermes &
immobiles dans
le fervice de Dieu , ils marchoient dans la voie
de fes Commandements avec une ferveur qui
ne connoifToit aucune viciffitude. Les mépris ,
les opprobres , les persécutions, les fupplices , la

( b ) Nous (uivons lt Chro* I Siméon cft mis un an plus


nologie de Dodwel , & du I tard <Ugs U Chronique d'Eu*
P. Pagi. Le martyre 4*, Saint febe.
J

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SS. tàoN 3 Parêgor. MM. 309.
"

mort même , rien ne pouvoit ébranler leur fi-


délité. Comment eft-il poffible qu'étant Chré- févr. i*.
tiens comme eux , nous gâtions nos meilleu-
re aôions par un orgueil fecret , que nous
foyons fi remplis de ramour du monde de &
nous-mêmes , fi impatients dans les épreuves ,
fi lâches dans l'accomplhTement de nos de-
voirs ? N'ouvrirons-nous jamais les yeux fur
la contradiétion qui fe trouve entre notre con-
duite &
notre créance ? Que l'exemple de nos
Pères dans la Foi nous apprenne enfin à quoi
nous engage le titre de difciples de Jefus-Chrift.

S. LÉON ET S. PARÈGORIUS,
Martyrs.
Tiré de Uurs j43cs Jinccrcs ,
publiés par D.
Ruinart & par Bollandus.

III. Siècle.

Saint P AREGORIUS venoit de répart- Martyre de


dre fon fang à Patare en Lycie pour la caufè Saint Parégo-
de Jefus-Chnft ; &
Saint Léon, qui avoit été le ™»«
témoin de fon combat, fe trouvoit partagé
entre la joie que lui caufoit le bonheur de fon
ami y &
la douleur de n'avoir* pu encore fe fi-
gnaler comme hiû Mais il ne tarda pas à trou-
ver Toccafion de faire éclater fa Foi. Pendant
rabfence du Proconful d'Afie qui étoit allé ren-
dre une aux Empereurs
vifite , le Gouver-
neur de Lycie , qui réfidoit à Patare , voulant

( « ) Il eft probable que I lérien & Gallien.


ce* Empereurs étoient Va-1
Viij

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3 1 o SS. Léon Parégox. MM.
,

marquer fon zele pouf le culte des feux Dieu* »


indiqua une fête folennelle en Fhonneur de Sé-
Ttvn i9
rapis , avec ordre à tous les habitants de Pa-

tare* de facrifîer à cette Idole. La crainte des


hommes porta pkifieurs Chrétiens à fe joindre
aux Infidèles. La lâcheté des uns , l'aveugle* &
nient des autres pénétrèrent Léon de la plus
vive douleur. Étant forti de fon logis pour al-
ler prier fur le tombeau de Saint Paregorius ,
il ne balança point de pafler devant le Temple
de Sérapis oii Ton offroit un facrifice. Les
Païens reconnurent à fon extérieur humble &c
modeftc , qu'il étoit Chrétien. Il s'étoit en effet
exercé dès fa jeunefle aux auftérités &aux prati-
ques de la vie folitairç ; 8c outre les autrçs vçrtus
cju'il avoit acquiies , il poffédoit dans un degré

eminent la chafteté &


la tempérance. Son ha-

bit étoit d'une étoffe grofliere, faite de poil de


chameau. De retour chez lui , il fe mit a re-
paffer dans fon efprit la fin glorieufe de fon
ami, Tout occupé, de ces penlées , il s'endor-
mit , &
eut une Vifion par laquelle Dieu lui
fit çonnoître qu'il foutiçndroit le même com-

bat que Saint Parégorius. Il en reffentit une


. joie qu'on ne peut exprimer. U continua de vi«
fitçr le. tombeau de ion ami ; loin de cher»&
cher des chemins détournés) , U paiToit au mi*»
Heu de la place publique.
Un jour cm'il avoit pris foa chemin par le
.

Tiçhée 3 ou Temple de la Fortune , il le vit


illuminé d'un graqd nombre de flambeaux. Tou-
ché de l'aveuglement des Païens, 6c brûlant de
pour h
gloirç du vraiDieu , il éteignit ces
flambeaux , 8ç les foula aux pieds en préfence
du peuple, » Si vos Dieux , lui dit-il , reflen-
» tent l'injure que je visa* <te kur feirç % Us

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SS. Zéon>Parêçor, MM. 3 1

n*ont cru'à m'en punir. » La populace , ani-


mée par les Prêtres de l'Idole , s écrie aufli-tôt : r tvu ,«
î I on ne venge cette impiété , la DeeiTe

» Fortune n'honorera plus notre Ville de fa


» proteôion. » Le Gouverneur informé de ce
qui fe paflbit, ordonna qu'on lui amenât le Saint Léo
Saint ; ce qui fut exécuté. » Méchant Vieil- eftarrr£ é \ ôc
i j i • m j i
confcfle la
» lard , lui dit-il , avec un ton de colère , vo- Foi.
» tre aétion facrilege prouve , ou que vous igao-
» rez la puiflance des Dieux, immortek , ou
» que vous méprifez les Édits des Empereurs f
» que nous regardons comme des Divinités &
» des Sauveurs du fécond ordre. "Vous êtes
» dans l'erreur ^ répond le Martyr , en ad-
» mettant la pluralité des Dieux ; il n'y a
>> qu'un Dieu du Ciel &de la Terre , qui n'a
» pas befoin du culte groffier que vous ren-
» dez à vos Idoles. Le plus agréable facrifice
» qu'on puiffe lui offrir , eft celui d'un cœur
» contrit & humilié. » Le Gouverneur Ré- :

» pondez à l'accufation intentée contre vous ,


» au lieu de nous prêcher votre Chriftianifme.
» Mais je rends grâces à nos Dieux de ce
* qu'ils ont permis que vous fufliez décou-
» vert après un tel attentat. Choififfez donc ,
» ou de leur facrifier avec ceux qui font ici
# préfents , ou de fouflfrir la peine que mérite
» votre impiété. Le Martyr La crainte des
:

» tourments ne me fera jamais manquer à


» mon devoir. Je fuis prêt à endurer tout ce
» que vous voudrez me faire fouffrir. Vos tor-
» tures itfe peuvent s'étendre au delà de cette
h vie mortelle ; il en eft une éternelle où Ton
» n'arrive que par les tribulations , conformé-
» ment à cette maxime 'de nos divines Écri-
» tures : La voie qui conduit à fa vie tfi étroite.

)y Google
312 SS.LEON yPARÈGOA. MM.
"
g » Le Gouverneur Eh : bien ,
puifqu'elle eft

FÉVR. x8.
» étroite, quittez-la pour fuivre la nôtre, qui
» eft large oc commode. Le Martyr Je : l'ai
» appellee étroite , parce que Ton trouve en y
» entrant , des affligions &
des perféçutions à
» fouffrir pour la juftice. Mais ceux qui y
» marchent généreufement , furmontent les
» difficultés par la Foi, qui fait pratiquer tou-
» tes les vertus. Cette voie même s applanit
» & devient aifée pour ceux qui la luivent
» conftamment ; pluiieurs en ont fait l'épreuve.
Comme Léon continuoit déparier des vérités
de la Religion Chrétienne , il fut interrompu
Î>ar les cris confus que pouffoient les Juifs &
es Païens. Qu'on impofe filence , difoient-
lui
ils. » Je lui permets au contraire , reprend le

» Gouverneur, de parler tant qu'il voudra ; je


» lui offre même mon amitié , s'il veut recon-
» noître nos Dieux. A quoi Léon répondit :
» Il paroît , Seigneur , que vous avez oublié
» çe que je viens de dire ; car comment voulez-
v vous que je rçconnoifle pour Dieux des
i> Êtres dont la nature n'a rien de divin, » Ces

dernières paroles mirent Je Gouverneur dans


Une fi grande colère , qu'il fit cruellement
fouetter le Saint, Il lui difoit pendant que les
ppurreaux le déchiroient impitoyablement :
» Ce n'eft-là qu'un effai des tourments que jç
» vous prépare. Si vous voulez que je m'en
tienne à l'effai , il faut que vous facrifiiez k
» nos Dieux. Le Martyr Je dois donc encorç
:

» répéter ce que j'ai déjà dit tant de fois. Je ne


>t reconnois point vos Dieux , &
jamais je ne
nme rçfoudraià leur facrifier. Le Gouver-
m ne y R Pitçs feulement que les Dieux font
;

» grands , &
je vous renverrai j car j'ai pitié

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,

SS. Léon , Parèg or. MM. 313


» de votre vieillefle. Le Martyr : Je le dirai
» volontiers , s'il s'agit du pouvoir qu'ils ont de fé vR. 1*.
» perdre leurs adorateurs. Le Gouverneur :
» Je vas vous faire traîner à travers les cail-
» loux y jufqu'à ce que tout votre corps foit
» en pièces. Le Martyr : Peu m'importe de
» quelle manière je meure , puifque la mort
» m'ouvrira les portes du Royaume célefte , &
v m'introduira dans la compagnie des Bienheu-
» reux. Le Gouverneur : Obéiflez , dites &
» les Dieux font les confervateurs du monde,
» ou vous allez mourir. Le Martyr : Vos me-
» naces font inutiles , que n'en venez-vous aux
yf effets ?
Comme le peuple commençoit à fe muti-
ner , Gouverneur prononça la Sentence.
le
Elle portoit que le Saint , attaché par un pied , 500 Mar-
tyre "
feroit traîné fur les pierres jufqu'au lieu du
fupplke. Léon voyant fes défirs accomplis,
leva les yeux au Ciel , &
fit cette prière: » Je

* vous rends grâces , ô Dieu , Pere de Notre;

/T
f 1
» ferviteur. Je me réjouis d'avoir trouvé , par
* votre grâce , le moyen d'expier mes ancien-
*# nés iniquités. Je remets mon ame entre les
* mains de vos Saints Anges , efpérant qu'ils
h la tranfporteront dans le lieu où l'on n'a
» plus rien à craindre des méchants. Seigneur ,
» qui ne voulez point la mort , mais la con-
» verfion des pécheurs , faites que les auteurs
» de ma mort vous connoiffent , obtiennent&
* le pardon de leurs crimes par les mérites de
* votre Fils unique Jefus-Chrift , Notre Sau-
* veur. Amtn » , & après avoir dit une féconde
fois Âmm , il expira.

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3 1 4 Saint An Gilbert ^ Abbe.
On jeta le corps du Saint dans une fondrière
qui étoit au bas d'un rocher ; mais il ne (\xt
point endommagé de cette chûte , ne reçut &
que quelques légères égratignures. Il y a
plus : ce lieu qui étoit auparavant un pré-
cipice affreux , dont la vue feule effrayoit les
voyageurs , devint entièrement pratiquable ;
le terrein s'affermit , Ton pouvoit y mar- &
cher fans courir le moindre danger. Les Fidè-
les retirèrent le corps du Soldat de Jefus-Chrift
pour l'enterrer. Ils remarquèrent fur fon vifage
une couleur vermeille , mêlée d'une certaine
majefté &
d'un doux fourire. Les Grecs font
en ce jour la fête de Saint Léon.

i =^^= 1

m
LE MÊME JOUR.
SAINT ANGILBERT,
septième Abbé de Saint Riquier,
*

en Ponthieu (a).
r

OE Saint fortoit d'une des plus illuftres famil-


les de France. Il futinftruit dans les Lettres par
le célèbre Alcuin. Charlemacne , à la Cour
duquel il avoit été élevé, Peftimoit beaucoup,
le donna pour premier Miniftre à fon nls
Pépin , Roi d'Italie , lui permit d'époufetf &

( a) II eft auffi appelle En- Gens de Lettres fe cacboient


gclben & IngUvcn. Il étoit en- Couvent fous des noms connus
core nommé Homère , fuivant de l'antiquité.
l'ufage de ce temps-la , où les

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5

Sawt Angilber t y Abbé. 3 1

la Princeffe Berte , fa fille ). Il quitta le


inonde enfuite ,du contentement de fa femme , féVR. 18,
pour fe faire Religieux dans le Monaftere de
S. Riquier , dont il fut élu Abbé. Il y rétablit
la Règle dans fa première vigueur en quoi il :

réuflit d'autant plus facilement , qu'il n'éxigeoit


rien des autres qu'il ne le pratiguât le«premier.
Charlemagne le tira plufieurs fois de fon Cloî-
tre , pour le confulter fur des affaires impor-
tantes , & pour le charger de commiffions re-
latives au bien de 1'Égwe &
de l'État. Il le fit
exécuteur de fon Teflament ; mais il mou-
auffi
rut peu de femaines après ce Prince , c'eft-à-
dire, le 18 Février 814.
Voyez Bollandus , fous le 18 de Février ,
les ASa du P. Mabillon , Su. 4. p. 9 , & fuiv*
Bulteau , Hijl. de U Ordre de Saint Benoit y T. z.
p. 474 &fuiv.

\b ) C« fut de ce mariage que fortit Hliftorien Nithard«


316 Saint B arb at ,E.

XI X JOUR DE FÉVRIER.
SAINT BARBAT,
*
ÉVÊQUE DE BÊNÊVENT. *

Tiré de deux Vus du Saint fort txattes , qui


ont été publiées par Bollandus T. 3.Febr. p.
,

139. Voyt^ Ughclli , Italie Sacre , T. 8. p. 13.

L'An 682.
FÉVR. 19.

A R B A T naquit dans le territoire de


Bénévent , en Italie , vers la fin du Pontificat de
S. Grégoire le Grand , c'eft-à-dire , au com-
mencement du feptiéme fiecle. Ses parents , qui
craignoient Dieu , mirent tout en oeuvre pour
lui procurer une éducation chrétienne ; ils &
eurent la confolation de voir que leurs foins
n'étoient point inutiles. Dès fes premières an-
nées. , jeune Barbat montrait des difpofitions
le
î! f? fait Ec- qui préfageoient Péminehte fainteté à laquelle

{\ parvint dans la fuite. A peine eut-il atteint


dciiaiiique.

l'âge preferit par les Canons , cpi'il fut initié


dans PÊtat Eccléfiaftique. II s'étoit rendu digne
de cet honneur par un grand amour pour l'é-
tude de PÊcriture Sainte , par la fimplicité &
l'innocence de fes mœurs , &
par le zele ex-
traordinaire avec lequel il avançoit continuel-
lement dans le fentier de la vertu. Comme il
avoit un rare talent pour la prédication , fon
Évêque le chargea du foin d'annoncer au Peuple
les vérités du lalut ; &c quelque-temps après *

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, *

Saint Barbat 3 E. 317


il le nomma Curé de la Paroifle
de Saint Bafile,
à Morcone , petite Ville fituée dans le voi- p^vr x 9*
finage de Bénévent. Le Saint s'apperçtit bien- "

tôt qu'il avoit à faire à un trpupeau in-


corrigible. En effet , îes Parroifliens étoient
intraitables & ennemis de
tout bien. Plongés
dans mille défordres , ils fermoient opiniâtré-
ment l'oreille aux inflruâions de leur Pafteur ,
qui vouloit les porter à la pénitence. Ils
raccufoient de troubler le repos public , 6c
prenoient de-là occaiion de le maltraiter. Fu-
rieux de n'avoir pu par ce moyen réuflir dans
leurs projets , &
de voir que le Saint n'op-
pofoit à leur malice qu'une humilité pro- *

fonde &
une patience inaltérable , ils eu-
rent recours à la calomnie. Enfin les chofes en
vinrent au point , que Barbat fut obligé de
quitter fon Eglife. Il remporta du moins de fa
Million , l'avantage d'avoir profité des épreu-
ves que Dieu avoit permifes pour purifier fon
cœur , en le détachant de plus en plus du
monde , &
de lui-même. Il revint a Béné-
vent , oîi il fut reçu avec joie de tous ceux
qui connoiffoient la faintete de fa vie.
L'Eglife de Bénévent ( a ) gémiffoit alors
fur des abus fort invétérés. Plufieurs de fes Son zcki.
enfants déshonbroient la faintete du Chriflianif-
me par des pratiques fuperftitieufes ( b ). Bar-

( a ) La Tradition de cette venus maîtres de l'Italie , fi-


I^life porte que Saint Potin rent rebâtir Bénévent , ruinée
envoyé par Saint Pierre , en par les Goths en 54 j. Vers
premier Evèque. Mais
fut le l'an 598 , cette Ville fut don-
on ne connoit point Tes fuc- née par Autaric , Roi des
cefleurs jufqu'à Saint Janvier, Lombards , au Général Zo-
marryrifé en 305. tion, qui prie le titre de Duc,
( b ) Ces fupcrftitions ve- & le tranfmit a Tes fuccefleurs
naient des Lombards , qui de- avec U Souveraineté de Bé-

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*

518 Sa t NT B ARS AT , E.
bat fe fentît embrafé de zele à la vue de ces dés-
ordres. Il les combattit vivement dans fes dif-
FÉVR. 19.
cours , oîi il s'appliquoit à prouver combien
Dieu les avoit en horreur. Le peu de fuccès
qu'il eut d'abord né le rebuta point. Il continua
toujours de prêcher fur la même matière ; &
"
comme il favoit que la converfion des cœurs eft
un effet de la grâce , il tâchoit en fon particu-
lier de fléchir la miféricorde divine > par des
prières ferventes &
par des jeûnes rigoureux*
Enfin , pour réveiller l'attention de fes Audi-
teurs , il leur prédit les maux que l'armée de
l'Empereur Confiant devoit feire à leur ViHe.
EfFeôivement ce Prince entra en Italie , mit &
le Siège devant Bénévent , qu'il réduîfit aux
dernières extrémités. Le habitants , faifis de
frayeur , devinrent dociles , rentrèrent en eux-
mêmes , & promirent d'abjurer les erreurs &
les fuperftitions auxquelles ils s'étoient livrés û
aveuglément. Le Saint profita de ces heureufes
difpofitions ; ranima les efprits abbattus , pâr
des paroles de confolation , les affura que &
l'Empereur leveroit le Siège de la Ville : pré-
didtion qui fut vérifiée par l'événement. Ces
diverfes circonftances produifirent une grande
révolution dans les mœurs. Barbat fut défor-
mais regardé comme un homme en faveur du-
quel le Ciel s'intéreflbit. On eut en lui une
confiance entière ; & par-là on lui facilita les
moyens de corriger tous les abus.

névent. Il y avoit alors par- lamort de Saint Grégoire le


mi les Lombards un grand Grand mais ils conferverefit
*,

nombre d'Ariens & d'Idolâ- toujours de l'attachement


tres. Plidieurs de ceux de Bé- pour quelques-unes de leurs
uevent fc convertirent avant premières fuperftitions.
*

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Saint Barbat, E. 319
ïïdebrand Êvêqiie de Bénévent , étoit
,

mort duranr le Siège de cette Ville, Le pre-


févr. 19.
xnier ùfage qu'on fit du retour de la Paix ,
fat de lui donner Barbat pour fuccefleur ( c ). u eft élu
Le nouvel Évêoue , qui fut facré le 10 Mars , B^vcn^*
663 , redoubla ae 2ele , afin de perfeôionner le
td ouvrage qu'il avoit fi heureufement com-
mencé ; &il vint à bout de détruire jufqu'aux

vefKges de tout ce qui avoit fervi à la fuperfti-


tion. II aflifta en 600 à un Concile de Rome,
& Tannée fuivante aiifixieme Concile Géné-
ral , aflemblé à Conftàntinople , pour la con-
damnation du Monothélifine. Il mourut le 19
Février 682 , âgé d'environ 70 ans. Il eft nom-
mé dans le Martyrologe Romain. l/Églife de
Bénévent l'honore comme pn de fes premiers
Patrons.

On a vu des péchetirs que la crainte des


maux de en eux-mêmes.
cette vie faifoit rentrer
Comment après cela arrive-t-il que la crainte
des maux de la vie future ne fefle point , ou
T
«vu vu vjuv» 1 ivy iu iiv ia vvnuuvi viio i^uv uaio iv
lointain , &
d'une vue fuperficielle. Or , il eft
impoflible que les vérités de la Foi , même les
plus effrayantes , agiffent efficacement fur notre
cœur , à moins que nou* n'y arrêtions fouvent
notre efprit , & que
nous ne nous les rendion$
comme préfentes par de férieufes réflexions.
Delà vient que toutes ces converfions qui fe font
dans la maladie , ne font prefque jamais fin-

( c ) Le Siège de Bénévent ] Tan 965 ,


par le pape Jean
fut érigé en Archevêché vers { XIII.

Digitized by
3 20 S AI NT B ARB AT , E.
ceres. Qu'on examine en effet la conduite de
ceux à qui Dieu a rendu Ne font-cela fanté.
pas toujours les mêmes défordres . les mêmes
habitudes ? S, Auguftin rapporte ( i ; un trait qui
trouve naturellement ici fa place. Onavoit vu
à Conftantinople un Météore extraordinaire ;
ce qui donna lieu à quelqu'un de prédire que
la Ville feroit confumée parle feu du Ciel. Les
habitants , faifis de frayeur , font pénitence, à
l'exemple des Ninivites : ils fortent de la Ville
avec l'Empereur , &
fe retirent dans un lieu
qui en étoit éloigné. Le jour marque pour l'ac-
compliflement de la prédiftion s'étant écoulé
on envoya voir ce qui s'étoit pafle. Dès qu'on
eut appris crue la Ville fubfiftoit encore, on y
retourna, oc Ton continua de vivre comme
auparavant. Voilà l'image des pécheurs dont
nous parlions plus haut. Leurs bonnes réfolu-
tions s'évanouiflent , lorfque le danger a dif-
paru.

( I ) S<rm. de Excid. Urbis , ç . C. T. C. p. 6zjf Ed. Ben*

XX. JOUR

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Sjunt-Ttaan2iton,E. &c. 3 XI
r" • .
<
, « ,• I » .

ils \î/ 4r ilr \i/ 4* 4* *U iî/ \|f ^Ir

XX. JOUR DE FÉVRIER.


S. TYRANNION,
- ÉVÊQUJE DË TYR,
ET PLUSIEURS AUTRES
S AI NT S 'M ARTYRS - ... -

~-
de différents Pays.

Foyèi Rtiftb* 9 Hifc 1. 8. . t. 7. & 13 > *


SVtw* Jérôme fur la Chronique JEufdx.

Années 5 04 & 310.


^¥ QIC I comment 'parle de cesfaints Mar-*
tyrs Eufebe , témoin ocubirè de ce qu'il en rap-
porte. » Un grand nombre: de Chrétiens d'E-
n gypte , qui demeuroisnte en Paleûiné à* &
» lyr , donnèrent les preuves les plus écla-
de leur imrôfoble~-attachement à la
* Foi. On les expota, après les avoir meurtris
6 de coups de fouet , $ îàTufëur des Léopards
» <fes*Ouw » des Sangliers , des Taureaux. ^
» Par vu moi-même lâcher conti^eux ces bêtes
» accbiiftrinées à.jfë nourrir de fang humain.
» Maïs loin de les dévorer , comme on devoit
». l'attendre de leur férocité naturelle, elles
fr^rrêtoiéht tout court, fembloient ref- &
» peâer leurs corps ce^ux prouve &

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31* Saint Ttrannion, E. &c.
» vifiblement la puiflànce de Jefus-Chrift , c'eft
» qu'elles fe jetoient fur les Païens qui fe
FÉVR. 20.
» trouvoient dans Farene ( a ). En vain les
» Martyrs les provoqùoient , félon l'or due
» qu'on leur en donnoit , elles fe retiroient
» fans les toucher. Quelquefois à là vérité
» elles couroieht fur eux avec impétuofité ;
» mais une vertu fecrete divine les arrêtait &
» tout-à-coup. Ceci arriva à différentes repri-
» fes ; & les fpeÛateurs çtoient dans un éton-
» nement extraordinaire. Les premières bêtes
» n'ayant rendu aucun combat , on en lâcha
» d'autres jufqu'à deux trois fois. La rage &
» des Païens n^
fut pas mieux fervie. Ce-
» pendant les Martyrs étoient inébranlables ,
» quoiqu'il y en eût de fort peu âgés parmi
» eux. Un jeune homme qui n'avoit pas eu-
» core vingt ans , fe fignala entre les autres*
» On le voyoit au milieu de Farene , les yeux
» levés au Ciel , &
les bras étendus en forme
» de Croix. Il reftoit immobile . quoiqu'un
» Ours &
un Léopard qui ne refpiroîent que
» le carnage , accouruflent pour le dévorer*
h Mais ces bêtes ne furent pas plutôt auprès
» de lui , qu'elles fe retirèrent lans l'avoir

- * •* » - T" f " • r j' î* r . v * 1 • • r -. C\ W<i +m

(a) Rufin tjoutc çue-cet (be dateurs qui étoient aflU


bètes nièrent plufieurs des dam rAmphithéâtre . S fépa-
ipcclatcurs du moins c'eft
-,
f* de l'arène par des bar-
ajnfi qve le font parler quel- reaux de ter. r l'on ado pt &
ques Auteurs d'après N ké- ce conune vjrai^^au-;
frit
fjhore ( Vbyw les nôtes de dra dire que les fpeÛateurs
AI: dt Valois fur l'Hiftoire qui furent tues
'

a voient eu ,

Ecclciîaftique d'Eufebe î, S. , l'imprudence d'entrer dans .

ç. 7. p. 165 ). Mais il ne (t pas l'arène avec ceux qui ftfccia


131
croyable que les bètes ayent t«icat Usâtes,
pu tuer gu «nèat blafîW -tes

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. Saint TrRAtwotr,E.&c. 323
» bleffé. On ea expofa d'autres à un Taureau
» furieux qui avoit déjà faifi quelques Païens
FÊVR
» avec fcs cornes, & qui les ayant élevés en
n l'air, les avoit enfuite laiffé tomber à demi-
» morts dans l'arène. Les Martyrs furent leâ
» feuls ^uli épargna* C'étoit en vain qu'on lui
» piquoit le flanc avec un fer chaud ; il frappoit
nia terre des pieds, feifoit voler le fable à droit
p & à gauche , &
refufoit d'avancer, comme
» s'il eût été retenu par une force invifible. On
» lâcha encore d'autres bêtes ; mais toujours
» avec auffi peu de fuCcès. Enfin on perça les
» Martyrs à coups d'épée ; &
l'on jeta leur»
* corps dans la Mer. Pluiiçurs furent condam-
t nés au feu &
à d'autres fupplices. » Tous
ces généreux Soldats de Jefus-Chrift fouffri-
rent fous Dioclétien , en 304.
UEglifc honore le même jour d'autres Saints
qui ne reçurent la couronne du martyre qu'en
310. Le principal d'eatr'eux fut Tyrannion,
Evêque oe Tyr. Il avoit été témoin du triom-
phe des Saints dont nous venons de parler; Se
il les avoit même encouragés à combattre gé-

néreufement pour leur Foi. Ayant été conduit


de Tyr à Antioche avec le Prêtre Zénobius ,
on lui fit fouffrir divers tourments , puis on le
jeta dans la Mer, ou plutôt dans l'Oronte. Pour
Zénobius , il expira fur le Chevalet , où le*
Bourreaux lui avoient déchiré les côtés aveç
les ongles de fer. Sylvain , Évêque d'Émefe
•-kl T • • f 1 / « / t 1 A . 1 r

Ville Êpifcopale, avec deux autres G t If

Pélée &
Nil , Prêtres cPÊgypte , airifi mie quel-
ques autres Chrétiens, périrent dans les flam-
mes à Céfarée, en Palelrine. Sylvain , Évêque
de Gaze • fut d'abord condamné aux Came-.

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Saint Ttrannion, E. &c.
res ; on le décapita enfuite , avec trente-neuf
autres Fidèles.
Le Martyrologe Romain nomme en ce jour
SaintTyrannion, avec ceux qui fouffrirent à
Tyr en 304. Les autres Martyrs ont des jours
particuliers , favoir, Saint Zénobius, Prêtre &
Médecin de Sidon , le iq d'Oâobre ; Saint Syl-
vain d*Émefe , auquel le Ménologe des Grecs
donne plufieurs compagnons , le 6 de Février 9
-& Saint Sylvain de Gaze, le 4 de Mai.
A. \

Le courage invincible que nos faints Martyrs


firent éclater fur les chevalets, fous les griffes

des bêtes &


au milieu des flammes , avoit pour
principe l'amour de Jefus-Chrift , qui tnom-
phoit dans leurs coeurs. Ce même amour , qui
varie fes opérations à l'infini , en a porté d'au-
tres à s'arracher aux honneurs, aux richefles ,

aux plaifirs , & à tout ce qu'ils avoient de plus


cher pour entrer dans la voie laborieufe de
,

la pénitence. Il n'y a perfonne d'entre nous

qui ne fe flatte d'aimer Jefus-Chrift : mais que


notre illufion eft groffiere ! En effet, l'amour
-fe prouve par les œuvres.
Or que fkifons-nous
pour Jefus-Chrift ? Nous fuyons avec foin tout
ce qui à notre efprit fous l'idée de gê-
s'offre

ne & de contrainte
; &
dès que la Religion
-exige des facrifices, nous quittons
lâchement
les armes. Concevons donc
enfin le danger

de notre état. Implorons le fccours de la


grâce par les mérites de Jefus-Chrift ; de-
,

mandons à ce divin Sauveur fon faint amour;


Hc prions-le d'en établir le règne dans nos
cœurs , afin qu'étant entièrement morts au
monde &à nos paûions , nous ne vivions
plus que pour lui.

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S. Sadotr et ïes Comp.' 315


SAINT SADOTH,
ÊV Ê QUE DE SÉLEUCIE
ET DE CTÉ SIPHON,
& fes cent vingt -huit
• • r <
Compagnons,
.
0

MARTY R si

Tu4 de leurs Acks Jîncerts , publiés par Bol*


landus &
Ruinart* Voye{ M. Affcmani qui a
donne r Original Cltaldaique des mêmes Actes avec
une Traductionlatine , T. /. p. 8$ , L G. de la
FuSUec. Cardinal Orfi y T. 5. 1. 13 ; le P. U
le
Quien, Or.Chrift. T. p. 1108.

L'An 3 42.

\J N E grande pureté de cœur, un zele ar-


dent pour la gloire de Dieu , une inviolable
fidélité dans la pratique de toutes les vertus
chrétiennes , préparèrent Sadoth (*t) à PÉpif-
copat &
à la couronne du martyre. Saint Si-
meon , Évêquc de Salec ou Séleucie ,
~" 1
de &
étant mort pour la Foi en

(«) Ceft atnfi que les Schiaêujks fîgnifie «m/ </«

Grecs & les Latins appellent


notre Saint. U eil nomme ( £ ) Ces deux Villes bâties
Schiadujîts par les Pedes. Ce fur le Tigre , étoient alors
mot eft compofé de Schiak , Capitales de la Perfe.
R , & de Dttf , ami. Ainfi
AJlj
$ i£ Si Sabôtx èt ses CompJ;
'

341 9 au commencement de la perfécution de

FÉvr. 20.
Sapor II , notre Saint fi.it élu trois mois après
pour lui fuccéder. Le Sie£e fur lequel on fé-
levoit , étoit tout à la fois , &
le plus confia
dérable de la Perfe , &C le élu$ expoCé à la fo-
reur de la perfécution. Elle devint dans ce
temps-là plus violente que jamais par le nou-
vel Édit que le Prince porta contre les Chré-
tiens. Sadoth fe cacha avec une partie de fon
Clergé , non par la crainte de la mort , mais
pour attendre que Dieu lui fît connoître fa
volonté d'une manière plus fpéciale. Il ne laifla
pâs de pourvoir fecretement aux befoins de
fon troupeau , &
d'exhorter lès Fidèles à con-
feffer genéreufement Jefus - Chrift. Avant eu

Saint Sa-
une vifion dans le lieu de fa retraiter, il aflem-
doth • une bla fes Prêtres &
fes Diacres pour leur faire
vifîon. part de ce qui lui étoit arrivé. » J'ai vu en fon-
» ge , leur dit-il , une échelle toute environ-
» née de lumière , dont le fommet touchoit
» au Ciel. Saint Siméon , brillant de gloire 9
» y étoit appuyé. M'ayant apperçu au bas de
» réchelle , il m'a appellé d'un air riant Mon-
» tçz , Sadoth , m'a-fil dit , montez , ne &
» craignez rien. Je montai hier , c'eft aujour-
>> d'hui votre tour à monter ; ce qui me pa*
b roît fignifier que comme mon faint prédé-
» cefleur endura la mort l'année dernière , je
» dois année, » II exhorta en-
la fouffrir cette
fuite fonClergé à pratiquer toute forte de
bonnes œuvres , &
à faire un faint ufage du
temps , afin que
fi la mort fe préfentoit , ils

puflent la recevoir en vrais difciples de Jefus*


Chrift , &
dans l'efpérance d'avoir part à Fhé-
ritaçç célçfte. » L'homme, ajouta-t'il , quife
» laifle conduire par l'çfprit ^ ne craint point

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*

S. SA0OTJ! èt ses Cômp. 3 27


* ta mort ; il aime Dieu , & va à lui avec la —
» plus vive ardeur. Mais pour celui qui vit févr. ao.
» félon les défirs de la chair, il tremble &
fe
» défefpere à l'approche de fon dernier
» ment. Comme il aime le monde , il ne le
» quitte qu'à regret.
Sapor étant venu à Séleucie 9 dans la fé-
conde 'année de la persécution , le faint Evo-
que fat arrêté, avec une grande partie de fon Ucft arrêté.

Clergé , quelques Eccléfiaftiques de fon voifi-


nage 9 les Moines , & les Religieufes de fon
Eglife ; ce oui faifott en tout cent vingt-huit
perfonnes. On les conduifit en prifon , oh ils
iouffrirent des maux incroyables , durant l'ef-

pace de dnq mois entiers. On lçs en tira trois


fois, pour les étendre fur le chevalet. On leur
lioit les jambes avec des cordes qu'on ferroit
fi fortement * qu'on entendoit craquer leurs

os. Les Bourreaux leur crioient au milieu de


ces tortures : » Adorez le Soleil , &
obéiflez
* au Roi , fi vous voulez fauver votre vie. Nous
» adorons , répondit Sadoth au nom de tous 9
&
» un feul Dieu , Créateur du Ciel de la Terre.
» Le Soleil eft fon ouvrage ; & il ne Ta créé

» que pour Futilité de l'homme. Comment donc


m voudriez-vous que nous en fiffions l'objet
» de notre culte ? D eft vrai que vous pouvez
» nous ôter k vie ; mais nous ne fommes pas
» jaloux de la conferver. Qu'attendez - vous ?
h Nous vous conjurons de ne pas nous épar>
» gner. Si vous n'obéiflfez pas 5 leur dit-on en-
» core , Gtchez qùe vous mourrez. Nous ne
» mourrons pas , s'écrièrent les Martys tout
» d'une voix < mais nous, vivrons , &
régne-
» rons éternellement avec Dieu &
avec Jclus-

» Chrift fon Fils. Nidifierez pas davantage

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3 18 5. Sadoth mt sxs Comp:
*h ngtre bonheur. Faut-il encore Vous répétât
févr. io« * nous n'a doreroh$ point le Soleil , que &
» nous n'obéirons point aux Édits du Roi ? y
Us obtinrent enfin ce qu'ils défiroient fi ar-
demment ; car ils furent tous condamnés à
mort. Lorfqu'ils eurent entendu prononcer
Jâ Sentence , ils rendirent grâces à Dieu , &
s'encouragèrent mutuellement à lui refter fi-
dèles jufqu'au dernier foupir.*
On les fit lier deux à deux , pour les con-
duire hors de la Villç.. Cette fainte troupe alloit
n
avec fes com" au Supplice , en. chantant des Hymnes Ôc des
danmé a mort Cantiques. Quand ils furent arrivés au lieu où
F*8w*w« devoît faire l'exécution , ils élevèrent leurs
voix encore plus haut > afin de louer de re- &
mercier Dieu ; ils lui demandèrent enfuite la
grâce de la persévérance , &
la couronne de
Cçs prières, ces
gloire deftinée aux Martyrs.
louanges, ces aâiôosde grâces, ne cefierent
qu'avec leur vie. Sadoth fut féparé des au-
tres y fmr l'ordre du Roi , &
conduit dans
(
la Province de Béthufa , où fl eut la tête tran-
.chée. Ainfi il ré joignit cette partie de fon
troupçaq qyi l'avoit précédé dans le Royau-
me du Ciel* Le Martyrologe Romain feit mé-
moire en ce jour de Saint Sadoth de fes &
Compagnons,
Les Écrivains Chàldaïques cités par WL
Affémani, difent que Schiaduftes, ou Sadoth,
étoit neveu de Saint Siméon Barfàboé, II ne
fut Evéque que neuf mois. Son martyre arriva
dans Tannée 342 , la 33 e - du recè de Sapor IL

- -

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S. Ele vtbere ,E. M. 319

FÉVR.
LE MÊME JOUR.
SAINT ELEUTHER-E,
ÉviQVE DE TOUR'NAY
& Martyr.
Eleuthbre vînt au monde à Tournay
même. Sa qui étoit chrétienne , avoit
famille ,
été convertie par Saint Piat , cent cinquante
ans auparavant» Les Chrétiens de Tournay
avoient beaucoup dégénéré depuis la mort de
leur faint Apôtre. Leur Foi s*éteignoitde jour
xn jour , foit par le commerce des Païens , foit
par les défordres des Rois de France , qui étoient
encore Idolâtres , &
qui faifoient alors leur ré-
£dence à Tournay. Tel étoit Tétat de FÉglife
de cette Ville , lorfque S. Eleuthere en fut fait
Êvêaue. Il fut facré en 486 , dix ans avant le
Baptême de Çlovis. Il arracha un grand nombre
de François aux fuperftitions du Paganiftne 6c
défendit le Myftere de l'Incarnation attaqué
par quelques Hérétiques. Mais fbn zele à main*-
tenir le dépôt de laFoi dans fa pureté , luixoûta
la vie. Les Hérétiques lui portèrent à la tête un
coup dont il mourut le premier Juillet 5 3 % ( a ).

(a) On trouve dans la Bi- Nainance de Jefus-Chrift ; &


bliothèque des Pères plufieurs le troifieme fur l'Annoncia-
Sermons attribués à S. Eleu- tion. Voyex D. Rivet » Hift.
there v mais il n'eft pas cer- 'Lotir, de la France , 7*. 3» p»
tain qu'ils foient de lui , fi if 4. & T. r. p. 4}o & 4» } le
en en excepte trois : l'un fur G allia Çhrifl. nov* 7** ?• P»
fin carnation » l'autre fur la fji ;Henkhénius , p. 1J0.

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J30 Saint Eu c m m r , E*
Voyez dans Bollandus , p. 187, une Vie de
^aint Eleuthere , écrite dans le neuvième fie*
févr.
cle ( b )„

—r- 1

SAINT EUCHER f

Ê vê que d'Orléans.

O E Saint murait dans cette Ville même i


d'une famille fort iiluftre. Sa mere , étant en-
ceinte de lui , offrait à Dieu tous les jours
l'enfant qu'elle portoit , le conjurant de répan-
dre fur lui fes plus abondantes bénédi&ions. Il
ne fut pas plutôt né , que fes parents le con»
lacrerent au Seigneur ; ils fe firent auffi un de-
voir de lui former Fefprit le cœur par une &
excellente éducation. Le jeune Eucher effàçoit
tous ceux de fon âge , par fes progrès dans les
fciences &
dans la vertu. Il trouvoit beaucoup
de plaifir à méditer l'Écriture , fur-tout les &
Épitres de Saint Paul : auffi remporta-t-il de
cette méditation un parfait détachement de

I I ^ 1

(b) Quoi qu'il en (bit de à la même Vie » 6c y ajouta


l'antiquité de l'Auteur de cet- l'Hiftoire de la translation
te Vie, il en certain qu'il n'a des Reliquesdu Saint , faite
écrit que long-temps après la en 897. Enfin un troifierae
mort de Saint Eleuthere. U /tuteur y a îmcrc arpuis i nn-
montre fon peu de jugement toire des miracles du Saint Se
en le falfant contemporain de de la tranAation de fes rteli-
Saint Médard , quoiqu'il pla- ques qui fe fît à Tonrnay en
ce fa naifTance fbus le règne 1 164. Tous ces Écrivains ne
«le Diodétien. Un Auteur J font gueres croyables t que
poflérieur de quelques an- quand ils parlent de faits arri-
nées , donna plus d'étendue vés de leur temps.

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Saint Bûcher / £. $3*
toutes du monde, qu'il nouniffoit LJ 1
les vanités —
en repaffant fans ceffe en lui-même l'endroit
j^yj^
où l'Apôtre dit qtk la fageffe de ceux qui ai-
ment les richeffes 6c les fatisfaâions d'ici-bas ,
eftune vraie folie aux yeux de Dieu (i).
Enfin 9 à force de bien pénétrer des faintes
fe
maximes de l'Évangile, il réfolut de quitter le

fiecle , pour s'enfermer dans la Solitude. L'Ab-


baye de Jumieges , en Normandie , lui ayant
paru propre à l'exécution de fon deffein , il s'y
retira vers l'an 714 , &
s'y livra à toutes les
pratiques de la vie religieuie.
U y avoit fix ou fept ans qu'il goutoit les
douceurs de la Retraite , lorfque FÉveque d'Or*
léans, fon oncle , mourut. Le Clergé & le Peu-
ple de cette Ville s'adrefferent à Charles Mar-
tel , Maire du Palais , afin d'avoir Eucher pour
Évêque ; ce qui leur fut accordé. On l'envoya
donc chercher à Jumieges. Il fut pénétré d'une
vive douleur , lorfqu'il vit les perfonnes char-
gées de le conduire a Orléans. Effrayé des dan-
gers qui environnent l'Épifcopat , il fbndoit en
larmes , &
conjuroit fes Frères de s'oppofer à
fon départ. Mais ceux-ci ne fervirent point fon
humilité ; &
quoiqu'ils lui fuffent tendrement
attachés , ils confentirent à s'en féparer pour
le bien de l'Églife. Eucher fut oblige de fe ren-
dre & de partir pour Orléans , où la cérémo-
nie dé fon Sacre fe fit en 72 1 . Comme la crainte
dont il avoit été faiii ne venoit point de pu-
fillanimité , mais d'une vive connoiffance des
devoirs de FÉpifcopat , il ne fe laiffa point
aller à l'abbattement ; i| mit au contraire toute
33* Saint Eu c her , E+
fa confiance dans le Souverain Pafteur , & le
FÉyR. 20. pria de foutehir par la grâce la réfolution où
il dévouer au fervice de l'Éelife. Bel
étoit de fe
exemple pour ceux qui font appelles légiti-
mement aux dignités Eccléfiaftiau*!
Eucher ne s'occupa plus que des moyens de
procurer la plus grande gloire de Dieu. il s'a p-
pliquoit avec un zele infatigable à inftruiire
Ion Peuple , &c à corriger les abus. On ne
pouvoit lui réfifter ; fa conduite étoit animée
d'un tel efprit de charité , qu'on l'aimoit , lors
même qu'il fàifoit des réprimandes. Mais Dieu
permit que la vertu de ion ferviteur fut mife
a l'épreuve. Voici quelle en fut Poccafion,
Charles Martel prenoit fans fcrupule les biens
de PÉglife pour fubvenir aux fiais de la guerre ,
& pour récompenfer les Officiers qui avoienr
fervi avec diftinâion. Le Saint ayant improu-
vé cette ufurpation , quelques Courtifans le
peignirent au Prince comme un homme qui lui
manquoit de refpeâ. Charles , féduit par les
difcours empoifonnés de l'envie , traita l'Évê-
que en rebelle , &
l'exila à Cologne , puis au
Château de Hafpengaw dans le Territoire de
Liège. Sa vertu le fit aimer &
eftimer fingu-
lierement par tout.' Robert , Gouverneur du
pays de Liège , le chargea du foin de diftribuer
fes aumônes , &
lui permit de fe retirer dans
le Monaftere de Saint Tron ( 1 ). NotrcSaint
y mourut le 20 Février 74$. Il eft nommé
dans le Martyrologe Romain, &
dans plufieurs.
autres.
. Voyez fa Vie , écrite par un Auteur contem-

( 1 ) En latin Sarckinium*

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Ste. Mi lbrede ,V.
porain , avec la Diflertation préliminaire de
Henfchénius , les remarques du P. Mabil-
^iy^L
A, 333
=
Ion , Sec. 3. Ben. La fable de la damnation
de Charles Martel a été ajoutée à cette Vie
après coup. On ne la trouve que dans Surius
& dans quelques modernes.

SAINTE MILDREDE,
Vierge et Abbesse.

C Ette
cond
Sainte eut pour pere
de Penda , Roi des Merciens ( a ).
fils
Menrald , fé-

Elle fiit élevée dans l'Abbaye de Chelles , en


France , oh depuis elle fit à Dieu le facrifice
de fa virginité. De retour en Angleterre , on
Télut Abbefle du Monafterfe de Minftrey dans
la petite Ifle de Thanet (*). Elle fîitbéniepar

(«) Le Prince Menrald qui fuccéda à foa pere ; Er-


é pou fa Ermexiburge , autre- menred , furnommé Clito t &
ment dite Domneve , dont une Princefie » nommée Eanf-
il eue un £ls nommé Mer- urithe,
qui fit à Dieu le facri-
vin , & -trois filles , favoir, ficede fa virginité v &
qu'on,
jViilburge , Mildrede , & honora d'un culte public
Mervia &/es trois
iVIilgithe. après fa mort. Ses Reliques
Sœurs consacrèrent à Dieu étoient en grande vénération
tous leurs biens , & crabraf- a Folkftone dans la
,

Sprent l'état monaiiique. Ils j


ce de Kent ; &
oh les y a
ibnt tous nommes dans l«s gardées jufqu'à la diiperfion
Calendriers des Saints d'An- ;
qui s'en fit fous le règne de
g lcterre. Henri VIII. Ercombert lauTi
( b ) Eadbald , Roi de Kent, j
quatre enfants de Sexburge
jivoit époufe Emme » rilic i fa femme , favoir % Egbert &
d'un Roi de France. De
ce I Lothaire , qui furent fuccef-
jjaarjage fox tireur £rç<?mbert , ' dvementBois àfi Kenr, Sainte,

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334 Ste. Mî ld&ed e , V. A.
SaintThéodore , Archevêque de Cantorbéiy
tévr 2
Soixante &
dix Vierges vinrent aufli-tôt le
' *
mettre fous fa conduite. Elle fe regar doit com-
me la dernière de toutes , les portoit encore &
plus par fes exemples que par fes difeours , à la
perfection de leur État. Ellecompta parmi fes
KeligieufeS Sainte Ermengithe fa tante , dont
le culte étoit autrefois très-célebre eh Angle-
terre. Elle mourut vers la fin du feptieme fîe-
cle , après une maladie longue douloureufe. &
Ses Reliques furent transférées en 1033 , au
Monaftere de Saint Auguflin à Cantorbéry.
Guillaume de Malmesbury rapporte ( 1 ) qu'on
les y gardoit avec beaucoup de vénération , &

Ennemi de & Sainte Ercon- payer aux parents des défunts


gote. Ermenred , furnommé l'amende preferite par les
Clito eut aufli quatre enfants
, Loix. Il donc venir de la
fit
d'Oflave fa femme t favoir , Mercie Ermenburge , fbeur
Saint Ethelred &
Saint Ethel- des Princes affaflinés , & lui
brîght , ce deux filles , nom- donna 48 familles de terre
mées Ermenburge , &
l'une dans de Thanet , c'eft-à-
rifle
îautre Ermengithe. La fécon- dire, la quantité de terre que
de cft honorée comme Sainte. 48 charrues peuvent labou-
Egberc étant devenu Roî,
, rer. La Princeue les employa
fit fecretement fes
aflafliner à fonder le Monaftere de
deux neveus Ethelred or Et- Minflrey f dont S te. Mildre-
helbrigbt , dans rifle de Tha* de rut féconde Abbefle dans
net. Le Conite Thunor , qui la fuite. Ermenburge étoit
étoit chargé de cette exé- furnommée Moldevc t comme
crable commiflîon , enterra nous l'apprenons d'un ancien
les corps des deux Princes , Écrit Saxon,publié par Hicks,
fous le Trône même du Roi Thefaur. Linguar. Sepunt. T. r.
dans le Palais qui étoit à in Difftrt. Epifi. p.nô. CapL
E iïrege , aujourd'hui nommé grave & quelques autres Au-
Eftrie. Mais Egbert croyant teurs ont donc eu tort d'en
voir une lumière fortir de faire deux femmes différen-
leur tombeau v rut faifi d'une tes.
crainte extraordinaire; il ren- ( I ) I. z % iç Rcfr Angl. cm
tra en lui-même » voulut &
4n répara,uça du meurtre ,

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Mildrede V. A.
Ste. ,

qu'il s'opéra plufieurs miracles par leur vertu.


La même chofe eft atteftée par d'autres Au-
33$

re
teurs, n y a à Londres deux Églifes du nom •

r
de Sainte Mildrede. .

Voyez la Chronique de Thorn , inurdcum


Scriptores, coL 1770,1783 , /^o^Harpsfield;
la Narraào <U Sanclis qui in Anglid quufcuni 9
publiée dans le Tréfor de Hicks , T. 1 . p. 1 6 ;
le Monajbcon Anglic. T. i. p. 84; Le Supplé-
ment de Stevens , 1. vol. p. 518; VApoftola-
tus Bcned. de Reyneri T. 1. p. 61 ; l'Hiftoire
de Flfle de Thenet , imprimée à Londres en
1713.
• » . 1 • i • % •
$$6 Saint Sériai en , E. M.
M!îfe' f2tet
,
• ^çfe* ^L, v&s* *5ifc*

'

. .. ... .
! .

-STJT/. JOUR DE FÉVRIER.


SAINT SÉVÉRIEN
ÊVÊQUE DE SCYTOPOLIS.
en Paleffine, — ''->
- -

*
1
Ma RT.rt - 1
-

Tiré dt la Vie de Saint Euthyme , écrite par le


Moine Cyrille ; d'une Lettre de l Empereur Mar-
tien ; rfEvagre, L 2. c. S ; de Niciphore Caltix*
te 9L i5. c. m Voye[ g Bollandus , p. 246*.

L'An 452 ou 455.


JJLâE faint Àbbé Euthyme &la plus grande
partie des Moines de Paleftine reçurent , fous
le règne de Marcien &
de Saiirte Pulchérie-,
les décifions dû "Çonâlét^ Calcédoine, qui
avoit condamné l'néfrSfîë 'des Eutychiens. Mais
Tatlachement à Perreù* ne laifla pas defùbfii*
ter dans phifieurs Monafteres pervertis par l'im-
pie Théodofe. Ce miférable Moine , auffi impé-
rieux qu'ignorant , marchoit tête levée , parce
qu'ilétoitprotégé par l'Impératrice Eudocie ,
veuve de Théodofe le jeune, laquelle vi voit alors
en Paleftine. Il pouffa les chofes fi loin , qu'il
ufurpa le Siège de Jérufalem 9 après en avoir
dépoffédé le Patriarche Juvenal. Il fit fouffrir
aux Catholiques la plus cruelle perfécution

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Sàiiït SèvérjeN y E.M. 337
& inonda Jémfalem de leur fang. Suivi d'une
troupe de Soldats furieux , il porta enfuite la
défblation dans tout le pays. Cependant il fe
trouva des Catholiques aflez généreux pour
réfifter au torrent» Tel fut entr'autres Sévé-
rien , Évêque de Scytopolis. Mais fon zele n'eut
d'autre effet que de lui mériter la couronne du
martyre. Les Soldats s'étant faifis de fa perfon-
«ê , le traînèrent hors de la Ville , &
le maf-
fecrerent inhumainement , à la fin de Tannée
452 , ou au commencement de Tannée fuiVan-
te. Saint Sévérien eft nommé ce jour dans
le Martyrologe Romain.

La Paleftine , ce pays choifî prétérablement


à tous les autres pour recevoir la lumière de
là vraie Religion , fanâifié par là haiflance , les
travaux , les humiliations & les fouffrances de
l'Homme-DieU , honoré du privilège d'avôif été
le berceau de TEglife Chrétienne , &
la patrie
d'une multitude innombrable de Saints ; la Pa*
leftine , dis-je , devint par la fuite des temps
le théâtre des pbis horribles fcandales , paffa &
enfin fous la domination tyranniqlie d'un peu-
ple qui profefle les dogmes les plus impies &
les plus extravagants. Le
de l'Orient a été
refte
aufu enveloppé dans le même malheur. On n'y
voit plus ces Églifes célèbres , fondées par les
Apôtres , arrofées du fang d'un million de
Martyrs , gouvernées par les Ignace , les Poly-
carpe , les Bafile, les Chiyfoftome , &c. L'in-
fidélité , avec tous les vices qui .l'accompa-
gnent , règne aujourd'hui dans ces lieux qui
donnèrent autrefois au Ciel un fi grand nom-
bre d'habitants. Une révolution aufli digne de
Lûmes eft bien capable d'inihwe notre piété %
538 Saint Çer man âbbé , , &c.
& de l'attendrir en feveur de tant de malheu-
reux, qui vivent plongés dans les ténèbres de
la mort. Tremblons à la vue des impénétra-
bles Jugements de Dieu. Que celui qui croit être
firme , prenne garde de tomber. Conferve^ ce que
vous nve[ , dit le Saint Efprit à chacun de nous ,
de peur quun autre n'enlevé votre couronne.

SAINT GERMA N,
Abbé de Granfei ,
ET SAINT RANDAUT ,

Martyrs.
, écrits par U Prctrt Babo-
Tiré Je leurs Actes
itn Auteur contemporain, Voytr^ Bollanius , U
t
Coinu, fous Panne* SSz ; &
Btdteau t Hift. Mon.
d'Ocdd. L 3. c 44. p. 661.

Vers l'An 666.

G
Trêves ,
E R M AN étoit fils d'un riche Sénateur de
& fut élevé fous les yeux de Modoald,
Évêque <fe la même Ville. A peine eut-il atteint
Fâge de dix-fept ans , qu'il diftribua aux pau-
vres tous les biens dont il pouvoit difpofer
pour aller yivre fous la conduite de Saint Ar-
noul de Metz , qui , après avoir quitté fon
Évêcbé , &
la Charge de Miniftre d'État qu'il
cxerçoit à la Cour de Dagobert , s'étoit fait
Hermite auprès de Romberg ou Remiremont^

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I

en Lorraine. Le Maître , charmé de l'innocence


& de H ferveur de fon
ticulierement à fa perfection. German qui goû-
difciple , s'intéreffa par- ^ *
'

toit de plus en plus combien le joug du Sei-


gneur eft doux , engagea Numérien fon frère r
à embrafler le même genre de vie que lui. Ils
fe retirèrent enfuite tous les deux dans lé
Monaftcre que Saint Romaric (a) venoit de
fonder par le confeil de Saint Arnoul fon
ami. La Règle qu'on y fuivoit, étoit celle de
Luxéuil ou de Saint Colomban ( b ). German
ie portoit avec une ardeur incroyable à la pra-
tique des auftérités , des humiliations , de &
tout ce qui étoit capable de l'unir à Dieu de la
manière le plus intime. Quelque temps après >
il pafla avec fon frefe dan$ le Monafftere de

Luxeuil , alors gouverné par Saint Walbert.


Ce fainf Abbé , connoiffant fon mérite , lui
donna la conduite des Frères qu'il envoya au
Monaftere de Granfel (r), fondé parle Duc
Gondon , l'un des principaux Seigneurs d'Al-
face. Notre Saint fut encore chargé de gouver-
ner deux autres Monafteres ; celui de Saint Ur*
ûts , &
celui de Saint Paul Zuvert , ou de Tlile.

Mi fli "
1 1 r

'
• • • • *

«.
t
' *'
• .
»• l iirfir
.. ..

a ) Voyci fur Saint Ro- prouver 200 ans de Noblefle


(
maric le S de Décembre. pour être reçues. Elles péu-
'( * ) Ce Monafterè r bâti vent fe marier en quittant ,

fur une montagne des Vofges, leurs..Prébendes , à Kexcep*


contenoit deux Maifons l'u- tion de rAbbcÛc qui fait lté
;
,

ne plus grande pour des fem- vœux folenncls de Religion.


mes & l'autre plus petite
-,
( c ) Ce Monaftere que l'on

pour des hommes. Il eu con- appelle aulfi GrtnivilUrs , eft


nu aujourd'hui fous le nom dans le Diocefe de Bâle. Il eft
de Remiremonr. U a été de- plus connu fous le nom d%
puis changé en un Chaphre Munjlcr^ihal,
de Chanoiocnts qui drivent

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-

Mais il feifoit fa GranfeU


réfidence ordinaire à .

Boniface , qiii fuccéda au Duc Gondon , tint


FÉV. ai
une conduite toute oppofée à celle de fon pré-
déceffeur. Comme il n'avoit aucun refpeâ pour-
la Religion, il ne fuivoît en tout d'autres règles,,
mie les faillies d'un caraftere dur &
emporté*
Tous lés jours il exerçoit mille violences con-
tre les Moines &
les pauvres de fon Duché.
Notre Saint fouffroit en filence les vexations
qui ne tomboient que fur fon Monaftere ; mais
U plaida fouvent la caufe des pauvres. Cepen-
dant Boniface continuoit de les opprimer, &
môme de leur ravir les moyens de fubfifter.
Vn jour qu'il ravageoit leurs terres , &
pilloit
leurs mailons , German l'alla trouver , afin de

lui demander grâce pour cette foule de mal-


heureux qu'il écrafoit. Boniface feignit d'être
touché des remontrances du Saint, & promit de.
changer de conduite. Mais lorfque German re-
tournoit à Granfel , il fiit aflailli par ime troupe
de Soldats , dévoués à Boniface , qui le tuèrent
à coups de lance avec le Bienheureux Ran-
doald ou Randaut , fon compagnon , vers l'an
666. On porta leurs corps à Granfel. On les
mit enfuite dans une Châfle qui a été expofée
à la vénération publique -jufqu'à la prétendue
Réforme. Les Chanoines de Granfel,qui avoient
pris la place des Moines , ont été auffi trans-
'

férés à Telsberg ouDehnont , à caufe du çhaa*


gement de Religion.

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Si Daniel: ^Prêtre , &c. 54

MÊME JOUR,
LE
« • -
SAINT DANIEL»
Prêtre,
ET SAINTE VERDA(^
Vierge,
MARTYRS.
î Ls furent arrêtés
, deux ans après le martyre

de Saint Milles , par Pordre du Gouverneur de


la Province des Razichéens, en Perfe. Ils fouf-
fiîrent pendant trois mois les toitures les plu*
, on
cruelles, Entr^autres fupplices leur perça
les pieds cinq jours de fuite dans
, qu'on tint
de l'eau gêlee. Rien n'étant capable d'ébranlef
leur confiance , le Gouverneur* les condamna
à perdre la tête; ce qui fiit exécuté le 21 Fé-
vrier de Tannée 344 , Ja 31e- du règne, de Sa-
Îor II. On ne trouve leur$ noms , ni dans les
(énées 9 ni dans les Martyrologes.
Voyez leurs Aôes finceres , écrits en Syria-
que par Saint Maruthas. M. Etienne Affémani
les a publiés dans fes ASa. Martyrum

Z. i.p. iOJ.

*
( a ) Vcrda eil ma mot qui fîgnifie Rofî en Ctaldaïquc,

Y iij
=
m'* BIENHEUREUX
LE
PEPIN DE tANDEN,
XjE Çienheumux Pftplrçfffijs $e C&rlornaç;
& Maire du Palais' ioûs Clot^irç I, époûfy
}a Bienheureufe Itt^ - d'tm&rdeç premières
Maifons d'Aquitaine , dont il eut un fils nomi
jné Grimoal^ , $He$ t favoir t Sain-*
te Gertrude , &
Sainte BegVte, La dernière
fut mariée à Anfegife , fils de Saint Arnoul;
Eveijue de Metz ; &
ce fut de cç mariage qu$
fortit Pépin de HérHtal , perë dé Charles*
Martel, &
aïeul dë Pépin le Bref , Roi dg
France , ferai fut h tige de la Race ÇMçvin*

Pépin de Landen (a) étoit Gouverneur d<£


'cette partie de PAuftrafie , connue aujourd'hui
fous le norn de Pays-Bas , lorfque Çlotaire I|
fémit enfaperfonne toute la Monarchie Fran*
çoifç, Gç Princç , qui connoiffoit tout le me-
fitç du Gouverneur , le fit Mpirç du Palstfi
fj'^ilftrafie, Pépin s'appliqua avçc tout le fçiii
>oflible h maintenir la p^ix d?ns PEtat. Rigi*
1

le observateur * dç lajuftiçe, il 1? prît toui


ipiirs 'pour règle çlç cpnduitç, Il étoit ça
• • • • • -

mm
(a) Ainfi appelle du Châ miers Princes de cette famil-
feau d e L^&4en ou Lundis le , croient fitués fur la Meu?
fltu$ fUT li Rivicre de Geftc ,
fe du coté de Liège. Voyez
,

dans le Brabant. Les Châ VAlfatia ilLuflrata de Schocpr


féaux de Hénftal de Jopfn ?
,
; p
\+i , 63; , fiçç,
t

}« f
&c. où habitaient les prc~ |

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JLe Bîenhevrëvx PÊprtf* 3 43
même temps &
le proteâeur de rinnocehce , e=
Se le fléau du crime. La Religion > tous
ceux qui la profeffoient , trouvoient en lui un K
& ^ %

défenfeur zélé ; &


l'on peut dire que les Peur
pies le regardoient comme leur pere commua.
Lorfque Clotaire eut mis la Couronne d'Auflra-
fie fur la tête de fon fils Dagobert , ce fut à
Pépin qu'il confia l'éducation du jeune Prin*
ce , & le nom.
foin de gouverner en fon
Dagobert , mort de fon pe^
devenu , par la

re , maître de tout le Royàume de France , à


l'exception d'une partie de l'Auftrafie , qui fut
cédée à Charibert , oublia les excellentes le-
çons qu'il avoit reçues dans fa jeunefle , fe &
livra ians fcrupule , aux plus honteufes pat
fions. Pépin ofa le reprendre de fes défor-
dres , &
lui reprocher fon ingratitude en-
vers un Dieu qui l'avoit comblé de tant d$
bienfaits. Le Prince fut Sabord offenfé de cet-
te généreufe liberté ; mais à la fin il ouvrit
les yeux , &
rentra férieufement en lui-même.
Il donna même à fon Minifïre une nouvelle

preuve de fon eflime en le déclarant Tu-


teur de fon Fils Sigebert ,
puis Maire dit
Palais de ce Prince , quand il le fit Roi d'Auf-
trafie, en 633. Après la mort de Dagobert ?
Pépin fe retira à Metz avec Sigebert^ , qui
Fhonoroit comme fon pere &
fon maître. Il
mourut au Château de Landen, le 11 Février
640. On tranfporta depuis fon corps à Nivel-
le , 011 il eft aujourd'hui renferme
dans une
de Bienheureufe Itte ,
ChâfTe , avec ceux la

& de Sainte Gertrude. On trouve fon nom


dans les Martyrologes de Flandres , &
dans
les Litanies publiées fous l'autorité de l'Arche-

vêque de Makœs ; makit ota iamak été ho-

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344 £ £ Bienheureux Pepïit;
noré dans l'Office public de TEglife , quoiquH
Ton porteYa Châtte dans les Procédions.
Voyez Boit and us, T. 3. p. 150, & le Re~
ctuil des Hijloruns <U Franc*, par D, Bouquet %

T« 2. p. 60 x

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Là Chaire de S. Pierre. 345

XX IL JOUR DE FÉVRIER.

LA CHAIRE
DE SAINT PIERRE;
A ANTIOCHE.
Voyc{ les notes de Baronius fur le Martyrolo-
ge Romain ,fous le 18 Je Janvier ; les Bollan-
dîjics fous le même jour , T. 2. p. t8z. § S. &

6 ; & fur-tout la Differtation de Romanâ Ca-


thedrâ ,
que Bianchini a inférée dans fes notes
fur Anafiafe U Bibliothécaire, T. 4. p. /3o«
* * >

o
ji'ait
N
ne peut douter que Saint Pierre
fondé le Siège Epifcopal d'Antioche,
^V. 214

avant d'aller à Rome. Ceft un fait attefté par


les plus graves Auteurs de l'antiquité Ecclé-
fiailiouef 1 \ II étoit bien jufie que la Capi-
tale de TOrient , où les Fidèles , qui fe mul-
liplioient de jour en jour , prirent d'abord le
nom de Chrétiens , eût pour premier Evê<jue
le Prince des Apôtres. On ne fait pas précisé-
ment combien de temps Saint Pierre gouver-
na HEglife de cette Ville (*).
La Fête de la. Chaire de Saint Pierre en gé*

( 1 ) Voyez Eufebe. Chron. tt6o > le Pape Gélafe » Conc.

& HiJÎ. I. j. c. jo *, Origene T. 4. p. ti6t » Saint ChryfoC-


Hom. tf. in Lue i Saint Jérô- tome , &c.
me Catal. c. 1 y Saint Inno- ( a ) Selon Saint Chryfof-
Cent , £/>, 1$. T. z, Conc. f. tome , Saint Pierre fit un long

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3 4<S La Chaire de S. Pierre. .

néral eft très-ancienne , comme nous l'avons


1 v xi. P rouv ^ fQUS le 1 8 de Janvier ( b }. Elle eft de plus
marquée en ce jour dans le Calendrier qui fut
drefle fous le Pape Libère , vers Tan 354 (c).
Ori la trouve .a ufïr dans le Sactfimeataire de S.
Grégoirè , &
dans tous les Martyrologes. On
voit par le Canon 21 e - d'un Concile de Tours
rue nous avons cité ailleurs ,
qu'elle étoit
3t'obligatiou en France >darçs [e 6«- fiede. Voi-
ci ce qui donna oceafion à fetaHiflement de
cette Fête , dont nous avons déjà dit quelque
chofe fous le 18 de Janvier.
Dans la primitive Églife % tes Chrétiens , &

fé jour à Antîoche. Saint Gré- Calendrier de Caxthage. Mais


goire le Grand dit ( Bp. 40. l> comment l*y trouveroit^on *
7. T. 2. p. SS8. Ed. Ben. ) qu'il La partie du Calendrier où elle
fut fept ans Évêque de cette devoit être marquée n'exige
Ville 9 ce qui doit s'entendre plus. C'cft par la même raifon
non d'une réuuence perfon- qu'on n'y point les noros.de
lit
nelle à Antîoche , mais du Saint Pontius , de Saint Do»
fom particuber qu'il avoir do nat &de plufteurs autres Maii-
cette Égliic. S'U eû vrai qu'il tyr*. d'Afrique. Au refte >. il
ait fiégé 2$ ans à Rome, il eftcertain que l'Églife Ro-
doit avoir éraWi Chaire à maine célénroit la Foie de- 9,
Antiocho » trois ans après Pierre long-temps auparavant.
l'Afccnnon du Sauveur ; car S. Léon,»* uaSermpn fixe cev
«(ans cette hypothefe t il fera te fête ( &
il ne- dît rien qui

venu à Rome , la féconde an- montre qu'elle étoir nouvelle


née du règne de l'Empereur de (bn temps ). Ce Sermon eft
Claude. le centième dans l'Édition de
( b ) Les Latins l'appelloient Tes Œuvres donnée à Rome t
,

Natale Pétri de. Çathedrà. On par èacciari. Le P. Quctnd


lui donnait encore d'autres qui l'avait d'abord trairi de
noms qu'on peut voir , T. ï. fuppofé , fe rétraôa enfuite ,
F»M4. & prouva qu'on ne pouvott
( c) Quelques Critiques ont le contefter à S. Léon. Cac-
avancé que l'Églife d'Afrique crari a démontré lamêmecho*
ne $tok point Chaire de fe , T. 1. p. 285.
la
S. Pierre dans le V(WcIe;ât ce- ( d ). Voyez le T. 1. de cet
la , fondés flir ce qu'elle n'eft Ouvrage , p. 343«
point marquée dans l'ancien

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La Chairs de S. Pierre. \ 47
fur-tout ceux d'Orient , célébraient l'annivgr-* ^ .

(aire de leur Baptêmç. Us re&ouvelloient en ce


11#
jour le* vœux qu'ils aVQjent faits à Dieu, &
le remerçioieat de çe qu# fW un eflfet de fa min
féricorde il les avoit reçus au Nombre de fes
enfants. Ç'eft çe qu'Us appelloient le jour de
leur na$ance fptrituellç. Les Êyiqufs , coa-i
fermement à cette feinte pratique , célébroient
auffi ranniverfaire de leur Sacre- Nous avons
encore trois Difcours que fît Saint Léon fur
çelui de ion exaltation. Le Peuple continua fou*
WBt t 3{*rè$ la mort des Évêgues , dp fêter le
jour de leur Ordination. Telle .fut l'origine de
la fête de la Chaire de Saint Pierre. Nous de*
vonsla célébrer , difoit Saint Léon , avec au-
tant de joie, que nous ferions le martyre du
Prince des Apôtres. Par-là nous nous rappel-*
Ions tout à la fpis.&fQn entrée glorieufe dans
le Ciel, STfon éfévation à la dignité de pre»
jnier Pafteur de rÊ^life militante.

Notre devoir en ce Jour eft de remercier


Dieu d^ FétaM^êmen; dç {cm Eglife, &
d*
lui eft demander l'ralta^ par des tjfem
fervent?*. L'Ég}ife eft $e ^oyaip&e fpirituej
qug /Sgfus^Çbriû eft Yfp^foç4ff fwr h tWf§ 9 §6
qu'il ne ceffç de gouverner du haut des Cieux ,
en la perfonnç -de eeyx qtffl f n a établis les
Chefs vifibles. Or fi nous aimons véritablement
Jefus^Chrift ,nous défirons qu'il foit de plue
fi

tn plus glorifié fi nous nous intéreffons vive-,


,'

ment au fhlut de nos frères , pourrons-nous re*


tenir nos larmes à la vue de tant cFlafcdeles,
d'Apoftats &d'Hérétiques , &
ne pas déman*
der leur converfion avec toute l'ardeur dont
»ou$ fommçs capables ? Mais notre pi&é doit

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548 Ste. Marguerite 9 PenTt.
encore aller plus loin. Combien dans FÉgjBfe
de membres morts , qui , deftitués de la divi-
ne charité , ne tiennent plus au corps myfti-
cue de Jefus-Chrift , que par les liens d'une Foi
Itérile , &
qui ne fervira de rien farté les œu-
vres Prions le Seigneur Jefus de les reflufci-*
?

ter à la grâce, &


d'établir invariablement dan»
tous les cœurs le règne de fon faint amour.
Supplions-le de faire par fa miféricorde , que
le péché ne nous fépare jamais de lui , que &
nous nous fortifiions de plus en plus dans cette
charité qui donne la vie à toutes les autres
vertus. v A ?h *ii

» *

SAINTE MARGUERITE
DE CORTONE.
Pénitente.
* • *
« •

Tiré déjà Vu , tenu par fon Conftffeur \~ &


publiée par Bollandus , p.2$8. Voyer^ les Anna-
les des Frères Mineurs ,
par IPading, foûs-tan
*z
97 9 & les Vies dès Maints du Tiers-Ordre
4e Saint François , par Barbara % T. t.p.SoS.
r - - '*é *â * » f m » \ -m '
r

L'An 1107.
..
• 1 4 * •

• * t * • * 1 * * «

«M 0ÊÊI S'

1 Va Argue
ri te naquit à Alviano ; en
Tofcane. Elle fe livra dans fa jeuneffe à toute
firapétuofité des défits (fiine naturfc corrom-
pue au point quelle perdit mêiûë cette pu-
,

deur, naturelle à fon lexc. Mais une circonf-


tance ménagée par la .grâce , brifa les fers qui

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Ste. Marguerite , Pênit, 349
la retenoient dans honteux défordres.
les plus
Ses yeux s'étant arrêtes fur un Cadavre , déjà
à moitié rongé par les vers , elle reconnut
que c'étoit celui de l'homme auquel elle s'é-
toit abandonnée. Un fpeûacle aufli hideux la
frappa tellement , qu'elle ouvrit fon cœur à
la crainte des Jugements de Dieu , devint &
fur le champ une véritable pénitente. Son pre-,
mier foin fut d'aller fe jeter aux pieds de fon
!>ere , pour lui demander , encore plus par
es larmes que par fes paroles , un pardon dont
die fe difoit indigne par le mépris qu'elle avoit
fait de fon autorité &
de fes avertiflements.
Elle étoit alors âgée de vingt-un ans. Nuit jour &
elle pleuroit les égarements de fa jeuneffe ; &c
voulant réparer le fcandale qu'elle avoit caufé
par fes déiordres , elle fe rendit , la corde au
cou , à FEglife Paroifliale d'Alviano , pour
fcire connoître fon changement , &
pour pro-
tefter publiquement qu'elle fe repentoit d'avoir
été aux autres une occafion de chiite. Elljc
fé retira enfuite à Cortone , où elle fit une^
Confeflîon générale à un Religieux de Saint
François. Jamais Confeffion ne fut accompagnée
de plus vifs fentiments de douleur.
Marguerite, inébranlable dans fes premiè-
res réfolutions , ne fe laifla point abbattre par
les efforts des ennemis de fon falut. Les vio-
lentes tentations dont elle fut attaquée , ne
fervirent qu'à faire éclater la grandeur de fon
courage. Le défir de fe confacrer à Dieu d'une
manière particulière , lui fit demander la per-
miflion d'entrer dans le Tiers-Ordre de Saint
François ; ce qui lui fut accordé après une
épreuve de trois ans. Son ardeur pour les auf-

térités étoit incroyable. Elle pupiffoh par do


$$ô SS. ThaLAsSé et Limnèê.
rudes niaeératkms ce raênte corps qui avoîf
autrefois fervi à firiiquité.A ce$ pratiques ex^
férkures . die joknoit celles des humiliations.
La vue ae As péchés la cottvroit tellement
de confufion , qu'elle chefchoit tous les moyens
Êoffibles de s'anéantir aux yeux des hommes.
Ile mourut le 12 de Févrietf iH)j , après
avoir été pendant 23 ans , urt parfait ihodele
de pénitence* Le Pape Léon Xj ayarft confia*
Hé la vérité des miracles oui s'étoiettf opérés
par fon interfceffion , perrfnt à lia Villé de Cor-
tbne de célébrer fa fête. En 1 6*|, Urbain VIII
étendit cette permlflkm à tout rOrdre de Saint
François. Ennn, Benoit XIft canonifa la Bien*
heuréufe Marguerite éh Son corp^s'eft
confervé fans la moindre marque de corrup*
tion* Il eft à Cortônè dans rÊglife des- Reli*
gieufes de Saint François , laquelle a quitté le
nom de Saint Bafile , pour prendre celui de
Sainte Marguerite.

L M É M Ê î O V R.
E
SAINT T HA LASSE;
ET SAINT LîMNÉE • • •

Sot IT AI H É S.
CE s faints Solitaires étoienr
de Théodoret
contemporains
Evâque de Cyr, dans le Dio-
,
cefe duquel ils vivoient. Le premier demeu-
roit dans une caverne retirée , &
par là déro-
boit aux yeux des hommes les tréibrs de grâ-
ce que le" Saint Efprit avoit verfés dans fon

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S. Baradât ou Varadat 351
ame. Saint Unifiée fon difciple , fe rendit cé-
lèbre par plufjeurs guérifons miraculeirfes qu'il
opéra. Il étoit fujet à de violentes coUques ,
& à d'autres maladies qu'il fupportoit avec
une patience héroïque , (ans employer aucun
fecours humain pour s'en délivrer. Il ne laiffoit
entrer dans fon Enclos que Théodoret fon
Evêque , ne parlant jamais attit autres que par
une fenêtre. Voyez Théodoret , Philotfu c. 22.

SAINT BARADAT,
ou VARADAT,
Solitaire.
jJAradat ,ou Varadat , etoit un
autre Solitaire du Diocefe de Cyr. Il vivoit
dans une efpece de Cage , ouverte de toutes
parts , de forte qu'il étoit expofé à toutes les
intempéries de l'air. Ses vêtements étoient faits
de peaux de bêtes fauvages. Il acquit par le
commerce continuel qu'il avoit avec Dieu ,
une fagefle confommée, & une connoiflance
parfaite des. chofes céleftes. La promptitude
avec laquelle il obéit au Patriarche d'Antio-
che , qui lui ordonnoit de quitter fa demeure %
prouve combien il étoit détaché de fa propre
volonté. Malgré la foibieffede fa compfexion,
il pratiquoit toutes les auftérités des autres
Solitaires ;& il étoit vifible que le feu de l'a-

mour divin qui brûloU dans ion cœur > l'éle-


voit au-deflus de fa foibleffe naturelle. Voilà
de quoi confondre notre lâcheté > qui , pouç
35* Saint Sèrèn us M. ,

fe difpenfer des exercices de la pénitence , al-


lègue de prétendues infirmités. Ceft moins la
force, que le courage, qui nous manque*
Voyez Théodoret , Philot. c. z. & 27.

XXIII. JOUR DE FÉVRIER.


SAINT SÉRÉNUS,
JARDINIER ET MARTYR.
Tiré de fes Actes JincereS , publies par 27. Rui*
nart , p. $+6.

L'An 307.

• £5ÉRÊNU$, Grec de naiflance , quitta


fes biens , amis ,
fes &
fa patrie , pour aller
fervir Dieu dans la Solitude, c'eft-à-dire, pour
vivre dans le Célibat, &
dans les exercices
de la prière &
de la pénitence. Il viht à Sir-
mi ufti , en Pannonie , où il apheta un jardin
qu'il cultivoit lui-même , &
dont les fruits &
les légumes fourniiToient à fa fubfiftance. La
perfécution s 'étant allumée , il fe cacha , dans
la crainte d'être arrêté. Mais au bout de quel-
que temps , il' revint à fon jardin. Un jour
qu'il étoit occupé à fon travail , une femme
accompagnée de deux jeunes filles , entra ,
comme pour fe promener. » Que cherchez-
»vous , lui dit Sérénus, en Pappercevant }
» Je fuis enchantée de votre jardin , répondit-
» elle, &
je fuis venue dans le defTein de m'y

promener.

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Saint Sérénus M. ,

» Une femme de votre condition , réplicjua


» Sérénus . ne fe promené point À pareille F£ V 13 ,
» heure Ça). Vous devriez êtue aûuellement
» chez vous. II eft certain qu'un autre motifque
» celui de la promenade Vous amené ici. Je ne
» fuis pas tel que vous penfez ; ainli fortez au
» plutôt , &foyez déforriiais plus attentive à
» garder la retenue qu'exige votre fexe. » u eft
Cette femme, piquée des remontrances du 1 °rar i* -

Saint , fe retira couverte de confufion , mais


bien réfolue -dé fe venger , non pas de ce
qu'on l'avoit mife dehors , mais de ce qu'on
avoit refufé de fatisfeire fon infâme paffion.
Elle écrivit donc à fon mari, qui étoit dans les
Gardes de l'Empereur Maximien , pour fe plain-
dre à, lui d'une prétendue violence que Séré-
nus lui avoit faite. Le mari ayant reçu cette
lettre va trouver l'Empereur ,
, lui demande &
juftice pour fon honneur outragé. » Seigneur,
» lui dit-il , pendant que notre vie fe confume
» au fervice de votre Majefté , nos femmes
»féparée$ de nou$ , fe trouvent expofées à;
» rînfolence d'un corrupteur ». Le Prince lui
donne un Refcrit adrefle au Gouverneur de la
Province, auquel il eft enjoint de faire faire
à ce mari infulté toutes fortes de fatisfaftions.
Le mari part pour Sirmium , préfente le Refcrit
au Gouverneur , &
le prié de venger l'outra-
ge qu'il a reçu en la perfbnne de fa femme*
»Eh quel eu l'infolent , dit le Gouverneur,
n qui a ofé attenter à l'honneur d'une femme

(«) On étoit à la fixierae mi les Romains , comme cela


heure du jou/ , ou à midi. fe pratiqae encore en Italie.
Pcrfowe at forioit ajprs par-

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354 Saint Sérénus M. >

\ » dont le mari approche de fi près la perfonnè


j^v 15
» de l'Empereur î C'eft, répondit l'Officier, un
>> miférable Jardinier 9 jiommé
Sérénus ». Le
u ea arrê- Gouverneur l'envoya chercher auffi-tôt ; &
te. torfcro'il fut arrivé , il commença par lui de-
mander fon nom» » Je m'appelle Sérénus , ré-
» pondit-il. Le Gouverneur Quelle eft yo-
:

» tre profeffion } Sêr£nus : Je fuis Jardinier.


» Le Gouverneur Comment avez-vous eu
;

» l'audaçe cPinfulter la femme d'un Officier de


» cette diftinftion ? Sérénus : Jamais il ne
»m'eft arrivé d'infulter aucune femme. Le
n Gouverneur Qu'on lui donne la quefHon
:

» pour lui faire avouer le crime qu'il a corn-


» mis dans fon jardin. SÉRÉNUS : Je me four
» viens qu'une dame vint il y a queloue temps t
» dans mon jardin à heure indue , aan$ le def»
» fein , difoit-elle , de s'y promener. Il eft vrai
» que je pris la liberté de lui remontrer qu'il
» n'étoi* pas décent à une perfonnne de fon
» fexe & de fa qualité t de fortir de chez elle
» à pareille heure », Ce difeours ouvrit les
yeux au mari fur la conduite de fa femme ; il
iortit couvert de confufion f fans prefler da*
vantage le Gouverneur de le venger d'un hom*
me dont il voyoit l'innocence.
Cependant le Gouverneur, frappé de la ré*
ponfe de Sérénus , vit que ç'étoit un homme
de bien ; & çonfidérant <failleurs qufe loin de
profiter de la foibleffe d'une femme paffion-
née , il l'avoit reprife avec ime eénéreufe li-
berté , il le foupeonna d'être Chrétien. U con-
tinua donc de Pinterroger pour éclaircir ce
point, » Qui êtes-vous f lui dit^il , & quelle
» eft votre Religion } Je fuis Chrétien , repar-
» tit Sérénus fans béûter un fcul moment.

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Saint Sérénus > M. 355
h Le Gouverneur Ou vous :êtes*vous caché,
» & comment avez-vous pu vous difpenfer de F
£y
,> facrifier aux Dieux ? Sérènus U a plu au :

» Seigneur de me réferver pour ce temps-ci.


» U fembloit m'avoir rejeté comme une pierre
» peu propre à entrer dans fon édifice ; mais
» il a la me reprendre aujourd'hui
bonté de
» pour m'y placer. Au refte je fuis prêt à ,

» fouffrir tout pour fon nom afin qu il me ,

n reçoive dans fon Royaume avec fes Saints.


» Eh bien , lui dit le Gouverneur en colère
» puifque vous avez voulu éluder par la fuite
» les Édits des Empereurs , &
que vous vous
» êtes caché afin de ne pas facrifier aux Dieux
» pour réparation de ces crimes vous perdrez
» la tête. » A peine cette Sentence eut-elle été u e ft m^
prononcée, que le Saint fut enlevé &c conduit à mort,

au lieu dufupplice, où il eut la tête tranchée


lç^3 Février 307.
L'ancien Martyrologe attribué à Saint Jé-
rôme , &
publié à Lucques par Florentinius ,
joint notre Saint à foixante-deux autres Chré-
tiens qui fouffrirent à Sirmium en différents
temps. Mais les autres Martyrologes , fur- &
tout le Romain , n'en comptent que cinquante-
deux.

Quiconque auroit de la Foi , comme notre


faint Martyr , trouveroit de quoi s'inftruire à
la fimple vue d'un jardin. En confidérant les
plantes qui pouffent , croiffent
y
montent &
toujours , jufqu'à ce qu'elles aient atteint
un parfait degré de maturité , il fe diroit à
lui - même : Voilà l'image de ce que je dois
être pour répondre à ma deftination. Il faut
que je travaille fans ceffe à croître de vertu
Ziy

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I

3 j6 Sainte Milburce 3 V.
•— en' vertu , & que je mede toutes mes ac*
faffe

tév. 23.
à° ns > de toutes mes penfées , &
de tous mes
déûrs , comme autant de degrés pour arriver
à cette perfefHon que Dieu exige de moi. Je
ne m'en tiendrai pas là : je dirigerai vers la
même fin toutes mes occupations extérieures,
en ne me propofant jamais d'autre but que ce-
lui de plaire à Dieu , &
d'accomplir fa feinte

J *
il*
pareils fentiments Les chofes les plus h !ï«-
! » *

rentes, en paffant par fes mains , deviendroient


des moyens de fanftification. C'eft pour n'avoir
pas cet efprit de Foi , qu'on perd le fruit de tou-
res fes œuvres , qu'on néglige tant d'occafions
de s'élever à Dieu, &
qu'on ne fe met nullement
en peine de remplir l'obligation où eft tout
Chrétien d'avancer fans ceffe dans le fentier
de la juffice : obligation fondée fur ce précepte
de Jefus-Çhrift : Soyc{ parfaits comme votre Ptre
~célc/k ejl parfait.

LE MÊME JOUR.
SAINTE MILBURGE,
Vierge-
;

;
C Ette
cie& ,
Sainte étoit du Sang Royal de Mer-
fœur de Sainte Mildrede. Elle embrafTa
l'Étatmonaftique, &t fiit élue Abbeffe deWen-
*
loch dans le Comté de Shrop. Son exemple
& fes foins firent de ce lieu un fanôuaire de
toutes les vertus. Elle ne fe difHhguoit des
Sœurs , que par un fouverain mépris d'elle-mê*

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Sainte Milburce 3 V. 357,
me ; mais plus elle s'abîmoit dans fon néant
plus prenoit plaifir à la glorifier aux yeux f ê v>
Dieu 23>
des autres. Dansles dernières inilru étions qu'el-
le donna à fes Religieufes , elle infifta parti-
culièrement fur l'amour de la paix , fur la &
pureté du cœur. Elle mourut vers la fin du
feptieme fiecle. L'Abbaye de Wenloch ayant
été ruinée par les Danois , on bâtit depuis
en la même place un Monaftere de Cluniftes ;
& ce furent ces Religieux qui découvrirent en
1 101 , les Relicjues ae Sainte Milburge fous les;

ruines de l'ancienne Églife ; la tranflatioix s'en


fit le 16 Mai de la même année , il s'y opé- &
ra pluûeurs miracles , félon Guillaume de Mal-
mesbury &
Harpsfield ( a ).
Voyez Guillaume de Malmesbury , /. /. de
Rcg. éf L 4. de Pont. Angl. c. J ; la Chronique
de Thorn, Capgrave % Harpsfield, &c.

{&) Capgrave & le P. Ma- prend que cette Sainte mourut


billon ont pris le 16 de Mai le 23 de Février. Ceft d'ail-
pour le jour de la mort de leurs le jour auquel fa fête eft
Sainte Milburge mais il eft marquée dans les additions
-,

certain qu'ils fe font trompés. faites aux MSS des Martyro-


Car Harpsfield ,
qui avoit vu loges de tiède &d'Ufûard-, ce
les meilleurs & les plus anciens qui a été fuivi par le Marr^.
MS5 d'Angleterre , nous ap- rologe Romain,

Ziij

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358 Saint Boisrz.

FÉV. ij.
SAINT BOISÎL,
Prieur de l'A b bat e
de MailrofT * ou Melîoff ( a),
m

Xi Ë faint Abbé Eata gouvcrnoit en chef le


Monaftere dont Saint Boifil étoit Prieur, Il
parôît qu'ils étoierit Anglois tous les deux,
et que ce fut Saint Àïdan qui leur jperfuada
d'èmbrafier FÊtat monaftique. Boifil etoit , au
rapport du Vénérable Bede , un homme d'une
Vertu értinente 9 &
doué de fefprit prophé-
Û<jue. On ne parloit de toutes parts que de la
fainteté dè fa vie ; ce qui porta Saint Cuth-
bert , quand il quitta le fiecle , à préférer le
Monaftçre de Mailroff à celui de Lindisfarne.
Pè$ la prWiiète fois que Boifil le vit , il dit à
<eux qui étoient prélftits : FoUà un fcrviuut
%U Dieu. s'appliqua à lui donner l'intelligen-
Il

te des divines Écritures , St à le perfe£han«


ner dans la pratique de toutes tes vertus.
Boifil partait Couvent (tes trois Perfonnes dé
l'adorable Trinité & lorfqu'il prononçoit le
;

Saint Nom de Jésus le faifoit avçç une dé*


, il

yotion tendre
fi & quelquefois avec une
,

(«) Cette Abbaye , #ftée tendott à l'Orient de rÉcaflb;


dans une gi-ande forêt (fer te ju^'à la Mer. On
y fuivoit
J>ord de la Tweed , étoit dans primitivement Règle de
la
lefeptieme fiecle du Royau*
, Saint Colomb ; mais on y
me des Anglo Saxons du adopta dans la fuite celle de
NorthumberfaAd , Jeijuel s'^ Ctteau*,

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Saint Bojsil. 359
telle abondance de larmes , que les auditeurs î==
en étoient attendris» Comme fa Charge le p^v.
mettait dans^ le cas cfinftruire les Frères , H
3?en acquittait avec tout le zele toute l'édi-&
£ cation poffibles* II leur recommandoit fur*
tout de remercier Dieu de la grâce qu'il leur
avoit faite de les appelfer à la vie reKrieufe,
de réprimer fans cette les faillies de ramour
prbpre 9 de bannir tout attachement à leur
volonté &
à leur fens , de s'entretenir avec
Dieu par une prière continuelle , de tendre &
fans relâche à cette pureté de cœur , fans la-
quelle il ne peut y avoir de perfe&îon. 11 ne
ic bornait pas à nnftntéHon. des Frères ; il ak
lok encore prêcher dans les Villages. , imitant
l'exemple de JefusrChrift , qui failoit fes délU
ces de converfer avec les. pauvres.
Le Vénérable Bfede rapporte plufieurs pré-
dirons de notre Saint , une entr'autres ae la
Perte qui ravagea l'Angleterre en 664. S. Cuth~
bert fut auffi attaqué de ce redoutable fléau y
maiiil n'en mourut point. Boifil l'ayant vu aprèi
f
(on rétabliffement , lui dît : » Dieu vous a
» guéri r mon Frère ; & votre dernier moment
» n'eft point encore arrivé. Pour moi , je
» mourrai dans fept jours ; ainfi vous n'avez.
» pîus que ce tempsJà pour m'entretenîr &c
» me confidter. Mais i répondit S. Cuthbert *
» que pourraî-je tire dans un fi court efpace?
» 1 Évangile de S. Jean, répondit notre Saint*
h Sept jours fuffirontpour le lire, &pour felfe
» nos reflétons. » ÉHes avoient pour objet , ce*
réflexions , non de fatîsfàire un efprit vaines '

ment curieux , mais d'accroître les lumières


de la Foi & d'en augmenter la vivacité. Le
plaifir que S. Boifil prenoit à la leâure de PÉ>

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360 * SajntBoisil
vangile félon Saint Jean , vcnoit un ardent S
amour pour J. C. &
d'un grand défir d'allumer
en lui de plus en plus le feu de la divine charité.
Le difciple retint de fon Maître cette folide dé-
votion , &
Ton a trouvé dans fon tombeau une
copie latine de l'Évangile félon S. Jean ( £).
Le feptieme jour étant arrivé , le Saint fût
attaqué de la Pefte , comme il l'avoit prédit.
Plus il voyoit approcher fon dernier moment,
plus il fe réjouifloit de la proximité de fa dé-
livrance. Il répétoit fouvent avec une fer- &
veur extraordinaire ces paroles de Saint Étien-
ne : , recevez mon efprit* Sa bien*
Seigneur Jefus
lieureuie mort arriva Tan 664.
Bede dit que notre Saint s'intérefla du haut
'du Ciel en faveur de fon pays de fes amis ; &
Qu'il apparut deux fois à un de fes difciples ;
oc qu'il le chargea d'avertir Saint Eebert , que
la volonté 4e Dieu étoit quHl pafsat dans les
"Monafteres de Saint Colomb , pour y enfei-
•gnçrla vraie manière de çélébrer la Pâque (c).
Les Reliques de Saint Boifil furent transfé-
rées à Durham , &
placées auprès de celles de
Saint Cuthbert fon difciple , en 1030. Vilfon,
& d'autres Auteurs Anglois , marquent fa fête
&u 7 4'Aofit ; mais on Ta trouve au 23 de Fé-
vrier dans les Calendriers d'Écoffç.
Voyez Bede , Hifl. I,
+ ç. ,27. L S.c. /o ; &
in Vit» S. Cuthb. c. 8,

(b) Cette copte étoit dam celui 4e Fille de Colm Kill^


Je* mains du Comte 4e Ilitch* où a été la fépulture 4es Rois
'fleldactuellement vivant. I| d'Êcofle ,
jufqu'à Malcobn
M
en a fait préfent à t Thomas- IU , 6e celui de Magis » dans
Philips ? Chanoine de Toq- les Ityes Oreades, Us avoienc
grès. été bâtis par rÊvèt^e Co^
(f ) Cç$ Monaftçres Croient

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Le B. Dosithée, Moine. 361

*
LE BIENHEUREUX
a

#
DOSITHÉE,
Moine.
K3 Osithée paflk les premières années de fa
vie d'une manière toute mondaine , dans une &
ignorance profonde des vérités du Chriftianif-
me. Comme il avoit beaucoup entendu parler
de Jérufalem , il en fit le voyage par cunofité.
C'étoit-là oh la miféricorde de Dieu Patten-
doit. Elle fe fervit pour le toucher d'un tableau
qui repréfentoit les fupplices de l'Enfer» Dofi-
thée en ayant demandé l'explication à ime per-
fonne inconnue qui fe trouvoit là , fut telle-
ment frappé des chofes nouvelles & terribles
au'on lui dit
, qu'à
l'heure même il quitta lemon-
<ie pour aller vivre dans la retraite. Il s'adrefla à
l'Abbé Séridon , qui lui donna l'habit monafti-
que , &
le remit entre les mains de Dorothée
l'un de fes difciptçs qu'il chargea du foin de
,
Finftruire.
Dorothée , qui avoit beaucoup d'expérience
dansles voies de Dieu , & qui favoit com-
bien il de paffer tout à coup d'une
eft difficile
extrémité à ,
permit d'abord à fon élevé
l'autre
de mangçr tout ce qu'il voudrait ; mais par
des retranchements infenfibles , il le réduifit
à huit onces de pain par jour. Ce fat aufli
par degrés qu'il le difpofa à remolir les autres
devoirs de la vie monaftique. Il lui apprit fur-
tout à mortifier fa volonté , dans les petites
comme dans les grandes chofes ; & U le plia

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3^1 Le B. Dosithèe 3 Moine.
tellement à l'obéiflance , qu'il n'agiffoit plus
que par Pimpulfion de fes Supérieurs.
Dofiîhée ayant pafle cinq ans dans le Mo-
naftere , fut charge du foin de l'Infirmerie, II
remplit cette fbnâion avec une vigilance , une
charité , & une douceur , qui le firent univer-
fellement eftimer &
aimer. Sa préfence feule
fuffifoit pour que les malades fe cruffent fou-
lages. Mais ne tarda pas à fe déran-
fa fanté
ger. Il fut pris d'un crachement de fang , &
d'une langueur qui le minoient infenfiblement ;
ce qui toutefois ne porta aucune atteinte aux
premières difpofitions de fon cœur. Il en fer-
ma toutes les entrées à cette délicateffe , dont
les personnes confacrées à Dieu ne fe défen-
dent pas toujours. Il n'eut garde de s'imaginer
que tout lui étoit permis , fous prétexte que
la maladie exige des adouciffements. Ses forces
cependant l'abandonnoient entièrement , 6c il
ne lui en reftoit plus que pour vaquer à la
prière ; encore ne pouvoit - il y vaquer long-
temps de fuite. U eneut une lorte de peine
fur laquelle il confulta Saint Dorothée avec
fa fimplicité ordinaire. Le Saint lui dit de ne

Chrift fut préfent à fon cœur. Dofitnée ayant


conjuré un refpeâable Vieillard du Monaftere f
de prier Dieu , pour qu'il le retirât de ce mon-
de , celui-ci lui répondit : » Ayez un peu de
» patience : la miiéricorde de Dieu eft pro-
» chc. >> Et un inftant après il lui dit : » Allez
» en paix , & torique vous ferez en la préfen-
» ce dp l'adorable Trinité , priez pour nous. »
Le me me Vieillard déclara , après la mort de
Dofithée , qu'il avoit furpafle tous les Frères
en vertu , quoiqu'il n'eût point pratiqué d'auf-

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Le B. P. Damien \Card.E. 363
îérités extraordinaires. On donne le tkre de
Saint à Dofithée ; mais fon nom ne fe trouve F£ V
2]
point dans les Calendriers Grecs Latins.& '

Voyez dafts Bollandus , p< 38 , la Vu duB.


Dojuktc , écrite par un Moine qui vivoit auflî
dans le Monaftere de S. Séridon ; la prunier*
JnftruHion de Saint Dorothée ; ÔC les Fies de*
Verts des Diferts d'Orient , par le P, Marin 4
Minime, T. 6. p. 336.

LE BIENHEUREUX <

PIERRE DAMIEN,
Cardinal , Êvêque d'Ostie#
~
]P I e R R E , furnommé Damien ou de Damien 9
naquit à Ravenne vers Tan 088 , (Tune fkmillé
honnête , mais peu favorifte des biens de la
fortune. Ayant perdu en bas âçe fon pere &
fa mere , il tomba entre les mains d'un de fès
frères déjà marié , qui Oubliant fentimente
les
de la nature à fon égard , avec au-
le traita
tant de dureté , qu'il eût traité le plus vil ef»
clave. Il ne voulut lui donner aucune éduca-
tion , &
lorfqull le vit un peu avancé en âge 9
ilne rougit point de Penvoyer garder Ie$ pour-
ceaux. Cependant le jeune Pierre n'avoit que
d'heureufes inclinations. L'ufage qu'il fit (Tune
pièce d'argent qu'il avoit trouvée , montra que
fon ame «oit bien élevée au-deffus de la baf-
fefle de fon état. Il alla porter cet argent à un
Prêtre , afin qu'il offrit l'augufte Sacrifice de
la Mefle pour le repos de l'amc de fon pere.

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j<$4 Le B. P. D amien , Card. E.
Dieu , providence avoit des vues
dont la
rtv d fur lui , de l'efclavage où il étoit , en
le tira
înipirant a un autre de les frères , nomme
Damien , la charité de fe charger de lui. Ce
frère , alors Archevêque de Ravenne , em-
braffa depuis l'État monaftiaue. On croit que
ce fut par reconnoiffance ae tous Tes foins,
que notre Bienheureux prit dans la fuite le fur-
nom de Damitn (4). Jl eut en effet pour lui
toute la tendrefle d'un pere. Il le fit étudier &
Sm progrès Renvoya d'abord à Faenza , puis à Parme ofc
dans ic$ feien. il eut pour Maître le fameux Ives. Les progrès
cw*
de Pierre furent rapides , parce qu'il joignoit
une rare pénétration d'efprit à un grand
amour pour l'étude. Il furpaffa fes condifei-
ples en peu de temps , & fut bientôt capable
d'enfeigner les autres, La fupériorité avec la-
3uelle exerça cet emploi
il , attira beaucoup
ç monde à Ion École , & lui fournit des re-
venus affez confidérables. L'aifance oit il fe
trouvoit , jointe aux applaudiflements qu'il re-
cevoit de toutes parts , lui parut une tentation
fort dahgçreufe. Il prit donc , pour n'y pas fuc-
contber, toutes les mefures preferites par la
vigilance chrétienne. Il prioit beaucoup , por-
îoit un cilice fous fes habits , mortifioit fa &
-chair par la pratique du jeûne des veilles. &
Si la volupté venoit à le folliciter au péché
pendant la nuit , il fe leyoit promptement f
alloit fe plongerdans l'eau , y demeuroit &
jufqu'à ce que tous fes membres fuffent tranr

( a ) Il fe nomme fouvent avec un autre Pierre de Ra-


par humilité Pierre U pécheur. venne , qui ctoit do la fan
Ceux qui rappellent Pierre mille des B%nt$*
de HoncJlU , l'ont confondu

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LeB*P.Damien 3 Card.E. 365
fis de &
Enfuite il vifitoit les Églifes ,
froid.
récitoit le Pfeautier , en attendant que l'Office a^
divin commençât. Il fàifoit d'abondantes au*
axones , &
admettait les pauvres à fa table ,
s'eftimant heureux de les fervir de fes propres
mains ; parce que la Foi lui découvrent Jefus-
Chrift fous leurs haillons. ?

Cependant ik ne fe crut point encore aflez


en fureté ; &
il fe regardoit toujours com-

me un homme qui ne fuyoit qu'à demi le poi-


fon mortel du péché. Ilréfolut donc de quit-
ter entièrement le fiecle , & d'embraffer la rie
monaiHque , mais dans un lieu fort éloigné de
fon pays , de crainte que quelque obfiacle ne

vînt traverfer fon projet. Pendant qu'il s'occu-


poit de ces penfées , Dieu permit qu'il rencon- H & retiré
trât deux Hermites de Font-Avellane. Il leur
communiqua le deflein qu'il avoit de renoncer ne.
l^j^"
" J
au monde ; & &
il fut fi édifié de leur vertu

fur-tout de leur défintéreflèment , qu'il ctiSifit


leur Hermitage pour le lieu de fa retraite. Cet
Hermitage étoit dans l'Ombrie , au pied de l'Ap-
pennin, oc avoit été fondé vingt ans auparavant
par le B. Ludolphe. Les Hermites demeuraient
deux à deux dans des cellules féparées. La plus
grande partie de leur temps étoit confacré à
la leâure &
l'oraifon. Ils nç vivoiçnt que de •

pain & d'eau quatre jours de la femaine. Le


Mardi & le Jeudi , ils mangeoient un peu de •
*J

légumes qu'ils faifoient cuire eux-mêmes dans


leurs cellules. Les jours de jeune , on leur don-
noit le pain par mefure. Quoique le vin fût la
boiffon ordinaire du pays , ils n'en avoienc
que pour les malades & pour le faint Sacrifice
de la Mefle. Ils alloient nu-pieds , prenoient de
rudes difeiplines , faifoient de fréquentes génu-

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Le B. P. D amien j Ca&d< £ é
w
flexions , fe frappoitnt fouvent poitriné ,
la
pnoient , les bras étendus , chacun toutefois fé-
f ÊV a*,
lon fes forces &
fa dévotion. Après l'Office
de la nuit , ils difoient le Pfeautier en atten-
dant le jour.
Pierre fe livra à toutes ces pratiques avec
une ferveur étonnante ; il ajouta même en-
core aux veilles de la maifcn. Mais (a (an-
té n'y put tenir : il- fut attaqué d'une in-
fomnie dont il eut beaucoup de peine à gué-
tir. Cette maladie lui apprit par la fuite, qu'il

ne faut pas toujours fuivre l'ardeur de fon zele


& qu'on doit ufer de diferétion dans les exer-
cices de la pénitence. Son amour pour la pau-
vreté étoit extrême. Les habits les plus vils 6t
les plus ufés étoiçflt ceux qu'il préféroit. U
portoit fobéiflance au plus haut degré. Un
mot , un ligne , avoit à peine manifefié la vo-
lonté du Supérieur f qu^l couroit l'exécuter
fur le champ. Il partageoit entre la prière &
l'étude tous les moments qu'il paffoit dans 4k
cellule ; & il devint auffi habile dans la feience

de rÉcriture Sainte & de la Religion , qu'il


l'étoit dans la connoiffance des Belles-Lettres.
Ce fut ce (jui engagea fon Supérieur à le
Il eft char-
charger du loin de faire des exhortations aux
gé de faire Religieux. Gui 9 Abbé de Pompofie , in-
<ie$ inftnic-
formé de fe vertu &de fa capacité , le de-
manda pour inftruire fes Moines ; ce qui lui
fut accordé. Pierre refta deux ans à Pompofie ,
où il annonça la parole de Dieu avec autant
d'édification que de 'fruit. Son Abbé, Payant
rappellé , l'envoya au Monaftere de Saint Vin-
cent , près de Pierre-Pertufe , pour y exercer
la même fonâion.
Lorfqii'il fiit de retour i Font - Aveilane ,

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Le B. P. D ami en y Card. E.
PAbbé pour fon fuccefleur , du con- a -
le défigna
fentement de tous les Frères. Mais il trouva p^V. aj
3 67
— '

#
une grande oppofition à ce choix dans l'humilité
de notre Bienheureux; &
il fallut
,
pour la vain-
cre , cp'il fît ufage de toute fon autorité. Cet I! tû {ait
Abbé étant mort en 1 04 1 , Pierre fe trouva à la
tête du Monaftere , qu'il gouverna avec la plus
haute réputation de faint«té &
de fagefle. Il
fonda encore cinq autres Hermitages , où il
établit des Prieurs , qui gouvernoient fous lui.
Son principal foin étoit d'entretenir par-tout
cet eiprit de charité , de retraite d'humili- &
té , qui doit caraftérifer les Solitaires. Aufli
forma-t-il des difciples d'une vertu éminente
& qui devinrent dans la fuite de brillantes
lumières de lTEglife. Tels- furent entr'autres
Saint Rhou , ou Rodolphe , Evêque de Gub-
t>io , Saint Dominique > furnommé Ctncui-
raffe , &Saint Jean de Lodi , qui fut aufli
Evêque de Gubbio , &
qui a écrit la Vie du
Biçnneureux Pierre ( b ).
Le foin qu'il étoit obligé de prendre de fes
Monafteres ne l'empêchoit pas de rendre de
grands fçrvices à l'Eglife. Les Papes Grégoire .

VI , Clément II , Léon IX , & Viôor II , fans


parler de plufieurs Évêques , l'employèrent avec
îuccès dans des circonftances où il falloit un
homme qui eût beaucoup de lumières de &
capacité. Le Pape Étienne IX voulant abfo-
lument le rendre au monde ,
qu'il étoit fi ca-
pable de fandifier , le fit Cardinal - Évê que

{b) Saint Rodolphe eft ho- Saint Jean de Lodi t le 7 de


nore le 26 de Juin ; Saint Do- Sept«in>re#
minique , le 14 d' Oétabre ; &

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368 Le B. P. D ami ex 3 Card. E.
(POftieen 1057. Pierre, qui, comme les Saints;
FÉv ij
redoutoit les Dignités Ecclcfiaftiques , mit tout
en oeuvre pour engager le Souverain Pontife
n devient à le laiffer dans fon Défert. Mais fes efforts
CvdinaJ.
farent inutiles ; &
on le menaça de l'excom-
munication s'il réfiftoit plus long-temps,
Étienne étant mort en 1058, quelques per-
fonnes puiffantes élurent contre toutes les rè-
gles, Jean , Êvêque de Vélétri , qui prit le nom
de Benoit. Pierre contribua plus que perfbnne
P.
er^ua(^ er ^ e flatter un Siège fl u,il ne
^teïcrvi^
l^^g^'pouvoit pofféder légitimement , &
a faire
agréer l'éleûion de Nicolas II , qui joignoit
un çfprit pénétrant &
cultivé à des mœurs pu-
res &
à une immenfe charité pour les pau-
vres. Nicolas n'eut pas plutôt été reconnu
qu'on lui porta des plaintes fur la Simoni^-des
Eccléfiaftlques de Milan. 11 crut que perfonne
n'étoit plus capable que Pierre pe biencon-
duire cette affaire. Il 1 envoya donc à Milan en
qualité de Légat , avec plein pouvoir de pu-
nir les coupables , &
de remettre tout dans
l'ordre. L'événement juftifia la bonté de fon
choix.
Notre Bienheureux ne craignit point de
prendre le parti d'Alexandre ,*qui avoit fùccé-
dé canoniquement à Nicolas II en 1061 > con-
tre l'Empereur qui foutenoit l'Antipape Cada-
loiis , Evêque de Parme. Il obtint enfuite de
ce dernier , dans un Concile tenu à Rome ,
qu'il fe défifteroit de fes prétentions ; il &
engagea Henri IV , Roi de Germanie , à ac-
quielcer à tout ce qui avoit été décidé dans
le Concile. Ce dernier point étoit d'autant plus
difficile à gagner , que le Roi de Germanie
n'a voit rien des fentiments Religieux de Henri
III

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Le B. P.DawieN) Card. E. 369
UI fon pere. Il avoit même été élevé dès fa jeu- ==£=£5
neffe, dans les déteftables maximes de la tyrannie fév. aj.
& de l'irréligion. Mais tel eft le charme de la
vertu , qu'elle fait captiver jufqu'à fes enne-
mis, &
ciéfarmer leur fureur» \

Cependant l'Evêque d'Oftie foupiroit fans


ceflê après la Solitude , qu'il n'avoit quittée qu'à [ j
regret. Déjà il avoit voulu fe démettre de fon
Evêché , & plus d'iuie fois il en avoit deman-
dé la permirïion à Nicolas II ; mais ce Pontife
refiifa toujours d'y confentir. Il revint à la $on retour
charge fous Alexandre II , &
après bien des à Fonr-Avei-
difficuités y il obtint enfin ce qu'il défiroit avec nc » * fe*
^mt,% .

tant d'ardeur. Le Pape fe rélerva cependant le


pouvoir de l'employer dans les affaires de
ÎEglife , quand il le jiigeroit à propos. Pierre y
non content d'avoir abdiqué 1 Epifcopat , re-
nonça encore à la qualité de Supérieur Géné-
ral des Monafteres qu'il avoit fondés , afin

de vivre déformais en fimple Religieux. Il


reprit fes anciens exercices , &
s'en acquitta
avec autant de ferveur que de fidélité.
. Ce fut alors qu'il prit la plume pour com-
battre les abus qui attaquoient la Religion &c
la Difcipline. On
trouve dans fon ftile , de la
clarté , de l'aifance &
de la force. Par-tout on
voit un homme qui tient pour la févérité des
Règles. Mais ceci fe remarque principalement
dans les Ouvrages où il traite des devoirs des
Eccléfiaftiques &
des Moines. Citons quelques
exemples. Ayant appris que l'Evêque de Flo-
rence jouoit aux échecs ( i ) , il lui écrivit
pour lui en faire de féveres réprimandes. Le

I c. 7.
( ) Oflifc.2Q.

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37o Le B. P. Damten, €ard. Ë.
Prélat , touché des raifôns de l'homme de Dieu ;
reconnut qu'il avoit oublié là gravité de fon
càraâere , &
fe fournit à la pénitence qui lui
futimpofée pénitence qui confiftoit à réci*
:

ter trois fois le Pfeautier , à laver les pieds à


douze pauvres , &
à leur donner à chacun une
pièce d'argent. Piefre méfiagea encore moins
les Ecclénaftiques qui fervent les Grands &
leur font la cour , dans la vue d'en obtenir
des Bénéfices, fl peignit avec force l'indignité
de leur conduite , &
montra qu'ils étoient
coupables de Simonie ( 2 ). Il ne pouvoit fouf-
frir qu'on manquât de reîpeÛ à Dieu , fur-tout
dans la prière publique. S'éteint apperçu , tin
jour qu'il paffoit paf feefençon , que les Cha-
noines de la Cathédrale feftoient afGs pendant
l'Office divin , fon zele s'enflamma , lui mit &
là phune à la main ; il adrefTa à l'Evêque de
Befançon un Traité , où il 'prouve qu'on doit
afliftet debout à l'Office , àt qu'on ne peut
s*affeoir que pendant les Leçons ( j ).
Il recommandoit fortement Pufage des dif-

dplines , introduites pour châtier fit pour


réduire le corps en fervitude. On les regardoit
alors comme un moyen de fuppléerau* longs
jeûnes aire preferivoient tes Canons Péniten-
cîatix ; oc ron croyoit racheter une année de
pénitence canonique par trois mille coups de
fouet , accompagnés de h récitation de trente
Pfeaumes. Quoiqu'il en foit de cette croyance f
on doit au-moins avouer avec Saint François
de Sales , que les flagellations font très-pro-

( 1 ) Opufi. at. I Thâol Dapn, l. a. r. #. JUf. S.

(3 ) O^ufi. ))<N*u Alt*.


I

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Le B. P. Damien, Card. E. 371
1>res à réprimer les riéroltes de la; chair % à
'endurcir aux travaux, de la> pénitence > à écar* f£V . a
ter la féchereffe du cœur , &
à entretenir l'aine
dans de vifs fentiments de componction. Il
faut toutefois avoir foin d'éviter l'excès &c la
fingularité ; &C Von doit en général préférer
les jeunes & les veilles aux difcipline; , à
moins que Ton n'ait de bonnes rations pour
en agir autrement.
Notre Bienheureux étoit feniiblement affli-
gé de la décadence de l'État monaûicjue. On
voyoit en effet des Religieux , cjiii quoique dé-
voués par choix à une vie folitaire, ne rou-
giffoient point de quitter leiu*s cellules pour
le mêler avec les gens du monde. Us imagi-
noient mille prétextes frivoles pour fe dégui-
fer àeux-mêmes des dérèglements contraires
à leur profeflion , &
iur^tout cet eiprit de
propriété qu'on ne peut exeufer de crime dans
des hommes qui ojÇ &k vœu de pauvreté.
Pierre Damien attaqua ces abus avec fon zele
ordinaire. » Jamais , <Hfou>il à ces Moines relâ-
» chés , jamais nous ne pourrons rétablir les
* chofes dans l'état primitif. Mais par notre
» négligence nous anéaaiffans le peu de réV
» gufanté qui relie , comment les âges futurs
» répareront-ils de pareilles brèches ? Éparr
» gnons - nous au - moins le reproche honteux
h d'avoir porté les derniers coups à l'Ordre
h monaftique. Tranfmettons fidèlement à la
» poftérité les exemples de vertu que nous ont
n eft
» îaifles nos Pères ». de fo n
$6
Le Souverain Pontife tira Pierre de fa Retrai- na ft ere pour
te en 1 063 , pour l'envoyer en France en quali- le bien de
f^gWe.
té de Légat. Il montra la haute eftims qu'il
de fa perfome , en recommandant aux
Aaij

Digitized by
37* Le P. D amien , Carjd.E.
mmmmmmwmmm^
premiers Prélats de le recevoir comme luî-
m
~&v77î7 ^me. Les affaires dont il étoit chargé , de-
mandoient un homme doué du plus rare mé-
des fémences de di-
rite. Il s'agiffoit d'étouffer
vifion , de fixer les bornes de la Jurifdiâion
de quelaués Evêques , de juger &
de punir
les ÇcclefiafHques Simoniaques. Il fe conduî-
£t en chaque chofe avec une fupériorité qui
réunit tous les fuffrages. Son zèle l'empêcha
de mollir aux dépens des Règles ; mais en
même-temps , il fut éviter cette rigueur &
cette
dureté qui ne font qu'aigrir les efprits. Il ufa
•d'indulgence envers les coupables qui fe re-
pentaient de leurs fautes , fuivant en tout
-ce que lui diôoient la charité &
la prudence.
Quelque temps après , il fut chargé d'une
commiffion encore plus délicate que celle dont
nous venons de parler. Henri IV , Roi de Ger-
manie , Prince fans mœurs & fans Religion
.avoit époufé en 1066 , Çerthe fille d'Othon,
Marquis d'Italie. S'étant dégoûté peu à peu de
«tte Princeffe, il voulut s'en f éparer au bout de
trois ans, &demanda, fous de frivoles prétex-
tes, que fon mariage fût déclaré mil &c invali-
de. L'Archevêque de Mayence eut la foibleffe
d'entrer dans les vues criminelles du Roi , &
convoqua même un Concile , où l'on de-
voit prononcer la légitimité du divorce. Le
Souverain Pontife , allarmé du fcandalc qui
menaçoit la Religion , envoya Pierre à Mayen-
reen qualité de Légat , pour préfider au Con-
cile. La raifon de ce choix fut qu'il lui con-
noiffoit une vertu incorruptible f une pruden-
ce confommée , &
une fermeté à toute épreu-
ve ve. Le Bienheureux ayant trouvé le Roi &
}es Evêques à Francfort , leur rendit comptç

Digitized by Google
J

£èB. P:Damten,Cârï).E. 373


i
ILUi au y rin- 5^ 1}<
ce , &le conjura de la manière la plus forte
,
de refpeâer la loi de Dieu, & les Canons de
TEglife j de ménager fa propre réputation*
& de réfléchir ferieufement fur l'horrible
que cauferoit fon exemple. Phi-
fieurs Seigneurs de la Cour fe joignirent au
Légat, & fupplierent inftamment le Roi de
ne pas fe couvrir d'un opprobre éternel. Hen-
ri ne put réfifter à des motifs fi puiflants. ; if
fe rendit , &
abandonna fon projet de divorce ;
mais fon cœur refta toujours le même ; fon &
averfion pour la Reine ne fit que croître de
jour en jour.
v Pierre Damienn'eut pas plutôt exécuté (a
Commiflion, retourna au Défert de Font-
qu'il
Avellane. U rentra dans fa cellule avec la .

plus grande joie , &


s"y renferma comme dans
une prifon. Il y portoit des chaînes de fer, &
déchirait fon corps par de rigoureufes flagel-
lations. Ses jeûnes etoient extraordinaires ; il
paflbit les trois premiers jours de TA vent &
du Carême fans prendre aucune forte de
nourriture. Souvent iMui arriva , pendant les
quarante jours du Carême , de ne manger
rien de cuit , &de ne vivre que d'herbes
crues , trempées dans l'eau. Une nate éten-
due fur la terre v lui fervoit de lit. Ilavoit des
heures marquées pour le travail des mains ;
& alors il s occupoit à faire des cuillers de .

bois y ou d'autres petits ouvrages dç même


genre.
Henri , Archevêque de Ravenne , ayant
été excommunié pour des crimes énormes 7
le Pape Alexandre II chargea notre BienheiK
Àa jii

Digitized by Google ,
574 Le£. P.*D*Mizn; Car&.E*
reu* ilc partir pour cette! Ville avec le titre
FÉV..»). Légat , afin de remédier aux abus , de &
rétablir le bon ordre. Pierre Daroien ëtoit
tout propre à Aire rentrer l'Archevêque en
lui-même ; mais il n'arriva à 3latf ernie^qu'après
la mort de cet infortuné Prélat (<: )• il tacha
éa moins de convertir les complices de (es
crimes , &
il y réuflk il las amena même au

point d'accepter une «pénitence qu'il leur im«*


pofa. Nous touchons enfin au moment où
Dieu couronna les travaux de fon ferviteur*
Les fatigues de ce dernier voyage achevèrent
d'épuifer.un corpsaiflï 'de vieilkffei&taffoibH
par de longues auftérités. JPicrre Damen re-
tournant à Rome , fut pris de la fièvre dans
le Monaftere de Notre-Dame de Faerua , y &
mourut le xafiévrier 1071 , à l'âge de 83 ansx
Il eft honoré en ce jour avec le titre de Pa-
Sa mort.
tron ,à Eaenza &
à Font-Avellane.
Ce que nous avons dit du Bienheureux Pierre
Damien ^ çft tiré xle fes Ecrits
{ rf) ,& de fa
Fie écrite ^par Jean de Lodi , fon difciple , la?

.(«,) Ilmourut «n 1072. res , des Hymnes & 60


{d) Les Ouvrages du B. petits Traités fous le nom
f4etre Damien font divifés àWpufadtsi On remarque dans
1

«n plufieurs Tomes qui ie* tous les 'Écrits du B. Pierre


,

•xeHent ordinairement en un D ami en % .un efprit cultivé , &


ïeul volume, Los premiers inftruir des feiences divines
{Tomes -contiennent 'des Let* & humaines. lia îecrure n'en
très , «des Sermons , & des' peut être -que très-mile % fur-
Vie» de plufieurs Saints «nom-* tout aux Eccléiiaftiques & aux
roément de S. Odilon de Clu* Religieux, les Œuvres du B.
ni , de S, Maur de Céfene , de Pierre Damien ont 4ti im-
$, Romuald , de S. :Rpdoiphe' primées ^Hvfljeurs fois. Les
de Gubbio , de S. Domimique Editions les plus amples font
V Encuirajfè , &c, On trouve celles de Paris de 1641 ce
dans les autres Tomes des Priè-

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S. MATT HlASï,dPOTll<$.
quelle a été publiée par IX Maillon , Su. G. s

Ben. Voyez encore Fleury • 1. 59. n. 48 ; Henf-


chénius , fous le 13 de Février , p. 406 ; &
P. Ceillier, T. ZQ. p. J u. ?
.

JITjr/r. *
/OCiE />£ FÉVRIER.
• •

SAINT MATTHIAS
APOTRE. n 1 • • » »

r«>y«î /« -<4Stf <&j Apotrts L ai ; Hcnfchi*

*s,P>434i * TUltmçnty T. i. p. 40& ,

rtv
'O^ N ne peut gucres douter que Saint Mat-
-

thias n'ait été un des foixante-douze Difciples


de Jefus-Chrift ( a ; du moins eft-il certain
)
qu'il s'attacha de Éonne heure à la perfonnè
du Sauveur , & qu'il ne s'en fépara point de-
puis fon Baptême jufqu'à fon Afcenfion ( i ).
Les Fidèles étant allemblés pour attendre la
defcente du Saint Efprit , Saint Pierre leur dit
pour accomplir l'Ecrinire, il fallait choi-
rc un douzième Apôtre , à la place de Judas.
Peux de l'affemblée; furent jugés dignes de
cette éminente Wgnité ; Tun étoit Matthias ;
& l'autre , lofeph , appeilé Barfabas , que fa
piété extraordinaire avoit aufli fait fut-nom*
U Iifo Oa fe met auffi-tôt en prières

(4) Ceft le fentlment de /.#.*.#* ;


& de S. Jérôme i
Clément d'Alexandrie , Strom. in CataL
I. 4. F . 4 8$ i d'Eufebe, //</?.

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37(5 5. Matthias , o rjrJK
s afîn de connoîtrç là volonté du Ciel ; après

FÉV. u°î on procéda à l'éleôion voie dû par la


14, 3 ,

ïort. Màtthias ayant été défigné , on ne douta


plus que Dieu neTeût choin pour remplir ta
•place vacante par la mort du traître Judas ( b ).
Cette conduite des premiers Chrétiens nous
apprend que les motjfc- humains ne doivent
point influer dans le choix des Mïniftres de la
Religion , &
qu'il faut demander à Dieu dans
la prière ia connoiflance de ceux qu'il appelle
à un État fi faint. Aucun Difciple ne fe pré-
fente pour rempUrla^ plate- qui vaquoit dans
le Sénat des Apôtres, Pourquoi cela ? Ç'efl
qu'ils s'en croyoîent tous indignes ; c'eft qu'ils
craignoient d'attirer fur eux la colère célefte ,
en s'ingérant d'eux-mêmes dans les fondions
spoftohquçs ; ç'eft enfin qu'ils favoient que
les Intrus artentçnt aux droits du Seigneur,
& point de part à ces grâces
qu'ils n'auront
ipéçiales fans lefquelles on ne rçuflira jamais
*çan$ la conduite £es ames.
' Nous
n'avons rien de certain fur le détail
'des aÔions de Saint Matthias. On fait feule-
ment en général , qu'après avoir reçu le

1 1 " il i
i

( h ) Uufcge du fort ne peut aux fongçs 6; aux (ortx dont


ferre légitime , que quand il il eft parlé dans les Prophè-
eft impolTiblc dé fe détermi- tes , on n'en peut rien infé-
ner entre deux fujets d'un rer de contra ire a ce que nous
égal mérite, U y
aurpit de vepons de dire. Les Prophè-
U fuperftition à s/en fcrvir tes étoient des hommes inf-
Jiors de ce cas , à moins que pirés deDieu , qui agiffoient
Pieu n'eût révélé ou infpiré conformément aux lumières
que ç'erVlà lemo^en de çon- furnatureiles qui leur étoient
noltre fa volonté. Or , les communiquées ; & nous par-
Diiciples affemblés (fe trou- lons du cours ordinaire des
vaient dans cette pofition par chofes humaines,
rapport à S, Matthias. Quant

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,,

S. Matthias Apôtre. , 377


*
Efprit le jour de la Pentecôte , il alla prâçhe1
l'Evangile de Jefus-Chrift , &
qu'il confacra
le refte de fa vie aux travaux de l'Apoflolat.
-Clément d'Alexandrie rapporte de lui ( 2 ) ,
que dans fes Inftfuôions , il infiftoit principa-
lement fur la néceffité de mortifier la chair
en réprimant les défirs de la fenfualité : leçon
importante qu'il tenoit de Jefus - Chrift * &
qu'il mettoit lui-même en pratique* .
- >

Les Grecs prétendent , d'après une ancienne


Tradition , exprimée dans leurs Ménologes t
que Saint Matthias prêcha la Foi vers la Cap-
padpce , &
les côtes de la Mer Cafpienne. Us
ajoutent qu'il fut martyrifé dans la Colchide ,
à laquelle ils donnent le nom d'EtKiopie.
Les Latins célèbrent fa fête le 24 de Février.
On garde une partie de fes Reliques à l'Abbaye
de Saint Matthias de Trêves , à Sainte &
Marie-Majeure de R,omç. Il fç pourroit faire
pourtant , difent les Bollandiftes , que les Re*
liques de Sainte Marie-Majeure , qui portent
le nom de Saint Matthias , ne fuflent point
de l'Apôtre ; mais d'un autre Saint Matthias
qu'on fait avoir été Evêque de Jérufalem vers
l'an iio#,

Notre vocation à la Foi ; ainfi que celle de


Saint Matthias , a été
d'une miféricorde
l'effet
toute jgratuite de la part de Dieu. Il n'a rien
trouve en nous qui pût le déterminer à nous
féparer de la maîTe de perdition , à puri- &
fier nos ames des feuillures du péché , afin
de nous rendre participants de l'adoption di-

(i) Strom. /. 5. p. 436.

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378 5. Matthias , Apotre.
vine, & héritiers de fon Royaume. Or de

?ÉV. quel retour ne devons-nous pas payer une fa-


veur que nous avons reçue ', préférablement
à tous ceux qui vivent encore dans les ténè-
bres du péché & de l'erreur ! Avec quels trans-
ports d'amour & de reconnoiflanoe ne devons*
nous pas louer un Dieu fi libéral ? Avec quelle
ferveur ne devons-nous pas lui demander la
grâce d'être fidèles à notre vocation , afin de
ne pas reffembler à ceux, qui, après avoir été
comme nous , l'objet de tes complaifances ,
ont perdu par leur faute , le précieux tréfor qui
leur avoit été confié } Heureufe l'Eglife dt
Jefus-Chrift , fi fes enfants s'occupoientde ces
grandes vérités î Elle n'auroit pas la douleur
d'en voir tous les jours un fi grand nombre
vivre dans une aflreufe négligence de leurs de-
voirs , & retomber dans un état pire que celui
dont ils avoient été tirés.

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S S. Montan Lu aus , &c. , 379

LES SAINTS MARTYRS,


MONTAN , LUCIUS , FLAVIEN
JULIEN, VICTORIC, PRIMOLE,
RÉNUS,ET DONATIEN,
Disciples de Saint Cyprien,

Évêque de Carthage.
Tiré de leurs \ Actes Jtnceres 9 publiés par
*Surius & par Bollandus. L'Édition qiûen a don-
née D. Ruinart , efi beaucoup plus correcTc que
les précédentes. La première partie de ces Actes a
été écrite Martyrs mêmes ;
par les la féconde , &
par un témoin oculaire* Voye\ TUlemont , T*
fh P- zoG.

VAn 259.

IL A perfécution allumée par Yaiérien avok


levage le Troupeau de )eSfus*Chrzft pendant
<leux ans ; &
comptait Saint Cyprieii
l'on
parmi à Carthage. Le
les Fidèles martyrifés
îProconiul Galère-Maxime étant mort peu de
temps après , le Gouverneur Soloti continua
de perfécuter les Chrétiens , en attendant l'ar-
rivée du nouveau Proconfid. Les habitants de
Carthage , mécontents de ce Gouverneur , fe
révoltèrent contre lui ; &
les efprits des fédi-
ticux s'échauffèrent tellement, qu'on en vint
aux mains, & qu'il y eut plufieurs perfonnes
^
380 SS. Mo ntAit y LuciuSy&c.
tuées. Il étoit naturel que Solon recherchât

les coupables pour les punir ; maïs bien loin


de le Élire , il déchargea fa fureur fur les Chré-
tiens , afin de gagner l'eftime des Idolâtres*
U ordonna donc que Ton en arrêtât huit , tous
difciples de Saint Çyprien , &
la plupart mem-
bres du Clergé.
Auffi-tôt que nous fumes arrêtés , difent les
Martyrs dans leurs AQes , on nous conduifit en
prifon. Les Soldats du Gouverneur nous ayant
dit que nous devions être brûlés vifs , nous
priâmes Dieu de nous délivrer de ce fupplice ;
& le Dieu qui tient en fa main le cœur &
la
langue des hommes $ voulut bien nous exau-
cer. Lç Gouverneur changea donc de réfolu^
lion , & nous envoya dans une prifon téné-
breufe , oîi nous trouvâmes le Prêtre Viôor
avec quelques autres Confefleurs. Nous né
fumes point effrayés à la vue de cette horri-
ble demeure. Réunis tous par la même Foi ;
& foutenus par la joie dont le Saint Efprit
inondoit nos ames , nous" fouffrîmes des pei-
nes qu'il feroit difficile d'exprimer : mais ces
peines ne fervirent qu'à faire éclater la puif-
iknce dè celui qui fût lés vaincre en noàs. .

En même ternps notre frère Remis eut


une vifion. U lui fembla voir plufieurs pri-
fomiiers fortir de la prifon avec un flambeau
qu'on portoit devant chacun d'eux : mais il y
en avoit d'autres qui demeuroient faute de
flambeau. Il nous reconnut &nous afTura que
nous étions du nombre de ceux qui marchaient
avec des. flambeaux. Le récit de cette vifion
nous remplit de joie ; &nous ne doutâmes
plus que nous ne duflions fuivre par le marty-
re , Jefus-Chrift , qui eft la vraie lumière.

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,

S5. Mo ntan Lu au s 3t &c. 381


Le lendemain , le Gouverneur nous envoya sa
chercher pour nous interroger. Ce ftit un F
triomphe pour nous d'être conduits par la
Ville , chargés de chaînes. Les Soldats , in-
certains du lieu où nous ferions entendus >
nous traînoient de falle en falle , jufqu'à
ce qu'enfin on nous fit entrer dans la petite
chambre d'Audience. Nous répondîmes avec
modeftic , mais avec fermeté , aux diverfes
queftions du Préfident. L'interrogatoire fini ,

on nous ramena en oh nous nous pré-


prifon ,
parâmes à de nouveaux combats. Le plus ru-
de que nous eûmes à foutenir fut contre la
faim &
la foif ; on nous refiifoit jufqu'à un
peu d'eau , après nous avoir fait travailler

tout le jour. Cependant le Diacre Flavien
ajoutoit encore des auftérités volontaires aux
fouffrances communes. Nous le vîmes fou- * 4

vent donner aux autres ce qu'on nous diftri-


buoit feulement pour nous empêcher de mou-
rir.

Mais Dieu voulut nous confoler lui-même


dans cette extrême mifere , par une vifion dont
il favorifa le Prêtre Viâor, qui mérita la
couronne du martyre peu de jours après. J'ai
vu cette nuit , nous dit-il , un Enfant dont le vi-
fage étoit tout éclatant de lumière, entrer
dans la prifon. Il nous en a fait faire le tour
comme pour nous mettre en liberté. Mais il
ne s'eft point trouvé d'iflue. Alors il me dit :
» Ne perdez point courage pendant le peu
» de temps que vous avez encore à refter ici.
» Je fuis avec vous. Allez en affurer vos com-
* pagnons de ma part , &faites-leur connoî-
» tre qu'ils recevront la couronne de gloire. »
Et comme je lui demandois oii étoit le Para-
381 SS. Mont an Lucws , , &c.
dis , il me répondit qu'il étoit hors du mon-
de, h Daignez memontrer, lui dis-je. Et
le
» où feroit le mérite de votre Foi , me ré-
» pUqua-t'il ?» Le récit de ce fonge myftérieux
nous remplit de joie.
La nuit fuivante , Dieu nous donna une
nouvelle affurance de fa miféricorde , par une
vifion envoyée à notre Sœur Quartilofie , qui
étoit prifonniere avec nous. Il n'y avoit que
trois jours que fon mari &
fon fils avoient
fouffert la mort pour Jefus-Chriit ; elle ne &
tarda pas elle-même à les fuivre. Elle nous
fit aiml le récit de ce qu'elle avoit vu durant

fon fommeil. » J'ai vu entrer mon fils dans la


» prifon ; il s'eft aflis fur le bord du puits &
» m'a dit Dieu a été témoin de vos ioufrran-
:

» ces ». Là-deffus eft entré un jeune homme


% d'une merveilleufe beauté , qui nous a exhor-
tés à. prendre courage , &
nous a affurés que
Dieu s'étoit fouvenu de nous.
Le lendemain de cette vifion , nos fsdnts
Martyrs éprouvèrent le plus preflant befoin
de manger , parce qu'on ne leur avoit donné
aucune forte de nourriture le jour précédent.
Mais le Prêtre Lucien , qui fut depuis É vécue
de Carthage , trouva le moyen de leur faire
paffer des rafraîchiflements Ça) , par le minif-
tere du Sous-Diacre Hérennien , du Caté- &
chumène Januarius.
Nous n'avons tous, continue l'Auteur des
Aûes de nos Saints , nous n'avons tous qu'un

(a Les AÛes portent ali-


) qui fuirent celles-ci dans Le*
maman inicfcuns % ce que Til- Actes femblent exclure tout
lemont entend de rEucharif- autre fens.
tie. Effeôiyeincnt le* paroles

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SS. Montan , Lu au s 3 &c. 383
fcul & même efprit , cnii nous unit dans la SBBi
prière , dans les entretiens &
conduite de
la

la vie. Ce font ces aimables liens qui mettent


le Démon en fuite , &
qui obtiennent de Dieu
tout ce qu'on lui demande. Ce font eux qui
de plufieurs cœurs n'en font qu'un , qui nous &
rendent enfants de Dieu. Nous ne pouvons
prétendre à fon Royaume fans être fes enfants ;
& comment ferons-nous fes enfants , fi nous
ne nous aimons les uns les autres ? Encore une
fois l'héritage célefte n'eft cnie pour ceux qui
conferveront la paix &
l'union avec leurs frè-
res. Il eft vrai que cette union a reçu quelque
atteinte parmi nous , mais ceci n'a pas été de
longue durée. Montan s'étoit un peu échauffé
contre Julien , à l'occafion d'une perfonne
qui , fans être de notre communion , s'é-
toit mêlée avec nous. Ils gardèrent quelque
temps l'un 6c l'autre un certaûp froid qui pou-
voit avoir des fuites préjudiciables à la charité.
Heureufement le Ciel eut pitié de tous les deux ;
& il les réconcilia en envoyant à Montan un

longe qu'il nous raconta de la forte.


Il m a femblé qu'un Centenier &
des Soldats
fe iaififfoient de nous , &
qu'après nous avoir
feit paffer le long d'une grande rue , ils nous
ont conduit dans un champ , où nous avons
icncontré Cyprien &
Luce. Nous nous fom-
mes enfuite trouvés dans un lieu fort éclairé.
Nos habits font devenus blancs , & notre
poitrine fi tranfparente , qu'on voyoit au tra-
vers ce qu'il y avoit de plus caché dans nos
cœurs. Quand je ftrir venu à regarder dans le
mien , j'y ai découvert des ordures , me &
fuis aufli-tôt éveillé. Ayant enfuite rencontré
Lucien je lui ai fait pan de ce qui m'étoit
,

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384 SS. Mo NT AN , Lucius 3 &C.
arrivé , & lui ai dit que les ordures qui (a-
Ffcv. 24, liffoicnt mon cœur ,étoient le fymbole de ce
froid que eu pour Julien. Apprenons
j'avois
de-là , mes Frères , à nous aimer mutuelle*
ment , &à vivre dans l'union la plus parfai-
te. Soyons ici bas ce que nous devons être
éternellement. Si nous voulons recevoir les
récompenfes promifes aux Juftes , éviter &
les îupplices préparés aux méchants*; enfin fi
nous voulons être &
régner avec Jefus-Chrift
faifons ce qui peut feul nous ouvrir la porte
de (on Royaume ( b ).
Il y avoit déjà pluiieurs mois que les Con-

fbffeurs fouflroient tout ce que la faim la &


foif , jointes aux incommodités d'un horrible
cachot , ont de plus affreux. Le Préfident les
. fît venir pour les interroger une féconde fois ;
mais ils perfifterent généreufement dans leur
première Confejion. Flavien ayant dit- qu'il
étoit Diacre , les amis , par une tendrefle mal-
entendue , foutinrent qu'il ne l'étoit point , 6c
cela dans le deflein de le fouftraire à la mort ;
0
parce que l'Édit de Valérien n'avoit été porté
que contre les Évêqiies , les Prêtres , oc les
Diacres ; &
qu'il ne décernoit pas de peines
auffi rigoureules contre -les autres Fidèles. Fla-
vien ne fut donc point condamné avec les au-
tres. Ceux-ci allèrent avec joie au lieu du
fupplice , faifant au peuple les exhortations les
plus touchantes. La maladie 6c le long féjour
de la prifon avoient extrêmement aflbibli le

( b ) Ici finit la rélatioa écrite témoin oculaire des faits qu'il


par les Martyrs. Ce qui Cuit rapporte.
fut .ajouté par un Chrétien

jeune

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SS. MONTAN LuCIUS &c. 385 y ,

jeune Lucius & comme craignôit d'être


: il
1

" "

étouffé par la foule qui l'environnoit & d'être ,


^ty 1 4%
*
par-là privé de de verfer fon fang
la gloire *

pour la Foi , il avoit pris les devants avec un


petit nombre de Frères. Quelgues-uns lui difant :
» Souvenez-vous de nous , lorfque vous ferez
» avec Jefus-Chrift : Ceft à moi , répondit-il
» à vous demander le fecours de vos prières :
» ne me les refufez point ». D'un autre côté f
Julien & Viâoric exhortaient les Frères à la
paix , &à prendre un foin particulier des
Clercs , fur-tout de ceux qui avoient été em-
prifonnés pour Jefus-Chrift.
Montan , qui avoit toujours fait profeflîon
de dire la vérité à haute voix > Qui-
, crioit :

» conque facrifiera à d'autre Dieu qu'au véri- .

» table fera exterminé» » Il confondoit auflï


l'orgueilleufe opiniâtreté des Hérétiques , en
leur difant de reconnoître la véritable Églife à
la multitude de fes Martyrs. Puis en vrai dif*
ciple de Saint Cyprien , &
en défenfeur zélé
des Canons , il exhortoit ceux qui avoient ei*
le malheur de tomber dans l'Idolâtrie , d'ac-
complir leur pénitence avant que de demander
à rentrer dans la Communion des Fidèles. Il
recommandoit aux Vierges de veiller conti-
nuellement fur elles-mêmes , afin que rien ne
pût ternir l'éclat de leur pureté. Enfin il s'a-
dreflà à tous les Fidèles en général , pour les
exhorter k obéir aux Evêques , à vivre en- &
tr'eux dans l'union la plus parfaite. Comme le
Bourreau étoit fur le point de lui trancher la
tête , il fit à Dieu une prière fervente , pour
que Flavien cjui avoit été féparé des autres
leur fat réuni dans trois jours. Et pour mon-
trer qu'il étoit sûr que fa prière auroit fon

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386 55. Montan 3 Lucjus , &c.
effet , il déchira en deux le linge dont il avoit
lesyeux bandés , ordonnant qu'on en réfer-
vât une moitié pour Flavien. Il voulut auffi
qu'on lui laifsât une place à l'endroit où ils fe-
roient enterrés , afin qu'ils ne fuffent pas fé-
parés même dans le tombeau.
Cependant Flavien foupiroit avec ardeur
après la couronne du martyre, 6c demandoit
à Dieu d'accélérer le moment où il lui feroit
le facrifice de Samere,
fk vie* auffi généreule
que celle des Machabées ne le auittoit point
oc l'exhortoit fans ccffe à la perfévéïance. Elle
regardoit comme le plus grand bonheur d'a-^
voir un fils dont le fang coulât pour Jefus-
Chrift. » O
ma mere , lui difoit Flavien , qu'il
» me tarde de recevoir la palme du martyre 1
» Vous favez tout ce que ]'ai fait pour la mé-
» riter. n II eut dans une des nuits qui précé-
dèrent fa mort , une vifion où il entendit ces
paroles » Pourquoi vous attriftez-vous ? Pre-
:

n nez patience : vous avez été deux fois Con-


* fefleur , &
vous terminerez votre vie par le
» glaive du Bourreau. » Enfin le Préfident l'en-
voya chercher trois jours après la mort de
Montan. Le peuple , dont il étoit aimé , mit
tout en œuvre pour le fauver , &
cria plufieurs
fois qu'il n'étoit point Diacre.Et comme Fla-
vien proteftoit qu'il avoit l'honneur de l'être
un Centenier préfenta un papier ligné de plu-
fieurs perfonnes oui atteftoient qu'il n'avoit
jamais été élevé au Diaconat. Le Juge en ayant
entendu la lefture, fit de fanglants reproches
à Flavien , fur ce qu'il avoit eu recours à un
menfonge pour fe procurer la mort. » Maïs ,
» dit le Martyr , peut-on croire que je fois
» coupable d'une telle faute ? N'en devroit-oa

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SS. MoNtAN 3 LuïWS s &c. 3§f
» pas plutôt accufer ceux qui foutiennent le
» contraire de ce cjue j'ai avancé ? » Le peu-
pie , qui fe flattoit que les tourments le for-
f^y | ^
ceraient à fe rétraûef , demanda qu'il fut éten-
du fur le chevalet. Le Juge n'eut aucun égard
à cette demande, &c le condamna à perdre la
tête. Flavien alla avec joie au lieu du fup-
plice. Il étoit accompagné de plufieurs Prê-
tres , & d'un grand nombre de Fidèles. Une
pluie foudaine ayant difperfé les Païens , il
donna le baifer de paix aux Frères , & leur
racontti une vifion dont il avoit été fàvorifé.
Lorfqu'il fut arrivé à l'endroit marqué pour
l'exécution , il fit un difcours fur la néceflite dç
conferver l'union dans l'Eglife , défigna Lu-
cien comme le plus diene de fuccéder à Saint
Cyprien ; puis s'étant bandé les yeux avec le
linge qu'on lui avoit donné de la part de
Montan,il fe mit à genoux pouf prier, Se
reçut le coup qui confomma fon facrifice.
Donatien &
Primole moururent dans la pri-
fon , peu de temps après qu'ils y eurent été
renfermés.
Tous ces Saints font honorés conjointe-
ment , le 24 de Février , dans les Martyrolo-
loges anciens , & dans le Romain moderne.

Bbij

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388 Saint Prétextât y Arch.
ê

fêvr.04,
SAINT P RÉTEXT AT,
Archevêque de Rouen.
Tiré dt Saint Grégoire de Tours , Hift. Franc.
J. 5. c. 10 &
15 ; &
du Gallia Chrift.Nôva ,
T. 11. Part. 1. p. 638. Foyt[ FUury , /. 34.
72. Sz ; U P* Daniel , Hiitoire de France , T.

i.p. 242 ; & la nouvelle Vie de Saint Gré-


goire de Tours , par M. rEvêcjue de huRava-
Here, imprimée dans le Recueil des Mémoires
.de l'Académie des Infcriptions & Belles-Lettres,
T. 26. p. 609.

588.
O &
N ignore le temps le Ceu de la naiflan-
ce de Saint Prétextât. Il fut élu Archevêoue
de Rouen en 549 , &
affifta en < «7, autroilie-

me Concile de Paris , affemble pour abolir


les mariages inceftueux , &
pour remédier à
plufieurs autres abus. On trouve auffi fon nom
avec celui des Évêques qui fouferivirent au
feçond Concile de Tours, tenu en 5^6. Le
zele avec lequel il s'élevoit contre les injufti-
ces &
les cruautés de la Reine Frédégonde (a) ,
lui attira l'indignation de cette méchante Prin-
cefle , qui ne s'occupa plus que des moyens
de fatisfaire fa vengeance.

{a) Elle fut maltrcflc & d'a/faftlnats. Les princi-

femme de Chilpériç I paux coups de fa fureur tom-


Suis
oi de Paris &de Soiffons. bèrent fur la Famille Royale*
Sa Vie ne fut qu'un affreux £Uç mourut & m%
tiffu d'iftju^Çf , uahifons

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Saint Prétextât , Arc #. 389
Après la mort de Sigebert , Roi d'A uftra-
, que Frédégonde avoit fait aflaflîner , pour F£V .

délivrer fon mari affiégé dans Tournai , Chii-


péric Roi de Paris &
de Soiffons , fe vit le\
maître de Brunehaut ( b ) veuve de Sigebert f
& de fon fils Childcbert , âgé de cinc[ ans ,
Ïu'on lui gardoit avec foin dans la Ville de
ans. Mais Pévafion du petit Prince , que les
Auftrafiéns trouvèrent le moyen de tranfpor-
ter à Metz , l'obligea de venir à Paris en
toute diligence. Il y déchargea fa colère fur
Brunehaut qu'il haifToit mortellement ; il la
dépouilla de fes biens , la relégua à' Rouen
& fes filles à Meaux. envoya
enfuite fon
Il

fils Mérovée pour de Poitiers


fe faifir de &
plufieurs autres Places dépendantes du Royau-
me d'Auflrafic* Mérovée % au lieu d'exécuter
les ordres de fon pere , exerça avec fes Trou-
pes , des hoflilités à Tours , dans d'autres &
endroits de fes États. Pendant le fejour qu'il
fit à Rouen , il conçut une violente paflïojt
pour Brunehaut fa tante , lui propofa de&
î'époufer , propofition qui fut acceptée par la
Princeffe. Prétextât , qui craignoit les fuites
d'un commerce fcandaleux , les maria , perfua-
dé que le cas étoit affez preffant pour aurx>
rifer une difpenfc* La Cour informée de la

( b ) Brunehaut , fille d'A- calomnie la plus atroce fa-


thanagilde , Roi des Vifigoths briqua les crimes dont elle*
d Efpagne avoir époufé Si-
, fut chargée. Des. Auteurs con*
gebert I , Roi d'Auftrafie &, temporains , qui étoient bien
frère de Chilpëric. Elle fut instruits , fourniflfent des
condamnée^ mort en 613 ou preuves & de fa piété & de
t 14. Ou a dit beaucoup de fon innocence. Voyez l'Abbé
mal de cette Princeffe mais
: de Velly , Hift. de France , T.
les plus habiles Ecrivains con- 1. &c.
viennent aujourd'hui que la

Bbiij

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39© Saint Prétextât , Àttcn<
célébration de ce 'mariage , en fut outrée , &
s en P" t ^"tP11* à l'Archevêque. Le Roi , au*
FlVRt' M»*
quel on avoit donné à entendre que le Saint
trempoît dans la révolte de fon fus , convo*
cita un Concile en K77 , pour le feire con-*
damner, Cç Concile le tint à Paris , dans FÉgli-
fe de Saint Pierre , dite depuis de Sainte Gene-
viève. Saint Grégoire de Tours qui y étoit,

K't
hautement (a défenfe de Tacciné , mon* &
cju'il n'avoit point commis le crijne qu'on

lui imputoit. Prétextât avoua qu'il avoit fait


le mariage; mais il foutint en même-temps
1
qu'il n'avoit eu aucune part à ht révolte de
Mérovée. Comme il n'etoit pas poffible de
Pivçr l'aceufation intentée contre lui , ÇWk
ç, opur le perdre, eut recours à un in»
exiffiç ftratâgeme. Il hwfit dire par quelqu'un
elç ces hommes toujours prêts à fervir les
partions des Souverains, que ç'étoit en lui
Vn exc^s d'imprudence que de contefter avec
|eRoi ; qu'il valpit mieux avouer des crimes
quoique fuppofés , &
qu'il étoit fur que fa
jjracç ferpit fuiviç de cçt aveu. Le crédule
^rçhevêque donna dans le piège , confej?» &
titpar fpiblçffç à çe qu'on exigeoit de luî f
Mai§ & peinç fa bpuche eut-elle prononcé Fa»
veu que fes ennemis demandoient , qu'il fin
condamné par lçs Pères du Concile. Le Roi
ffrifo dans une petite Mç dç Baffe-Norman*
$e , près de Coutances.
Prétextât , dans fon exil , expia par la pé«*
nitence la foibleffe qu'il avoit eue de fe re*
frpnnoîtrg coupable de çrimes dont il étoit
îfinQçent, un faint ufage de fes fouffiran»
Il fit

, & donna Içfpeôacle des plus héroïque*


Verî^t Mai? la fo&V de fes ennemis n'etoit

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Saiùt Prétextât ,Arcr.
point encore fatisfàite continuoient de
; ils

noircir fa réputation par les plus atroces ca-


391
=
lomnies. Enfin les chofes en étoient à un
point , que plufieurs de fes amis n'ofoient Ce
déclarer publiquement en fa faveur. Il n'y
eut que Saint Grégoire de Tours qui fe fit
gloire de lui être inviolablement attaché.
Après 1» mort de Chilpéric , oui fut aflaflï-
né à Chelles en 584, le Saint fortit du lieu
de fon exil où il étoit depuis fix ans , &
re-
vint à Rouen , oit il fut rétabli fur fon Siège.
Mais comme Frédegonde crioit fans cefle que
Prétextât ayant été dépofé dans un Concile
ne pouvoit être rétabli que par un autre Con-
cile , il alla trouver à Paris Qontran , Roi
d'Orléans, pour le prier de faire examiner
faflaire de fa prétendue dépofîtion. UÉvêque
de Paris , qui s'étoit trouvé au Concile fous
Chilpéric , & qui même avoit été un des prin-
cipaux ennemis de notre Saint , déclara au nom
de tous les autres Prélats , que l'Archevêque
de Rouen o'avoit point été dépofé de l*Êpi£-
copat , mais feulement mis en pénitence. Un
témoignage aufli exprès détermina Gontran à
renvoyer Prétextât à fon Églife. Il affifta en
585 au fécond Concile de Mâcon , y fit plu-
fieurs difcours , &propofa de fages règle*
ments pour le maintien de la difciphne.
De retour dans fon Diocefe , il continua
de veiller avec foin à la garde de fon Trou-
peau. Et comme Frédégonde faifoit fa réfiden-
ce ordinaire à Rouen , il tâchoit par fes exhor-
tations, de lui ouvrir les yeux fur Pénormité

de fes crimes. Mais la malneureufe Princefle


que Dieu avoit livrée à l'endurcifTement, s'en-
fonçoit de plus en plus dans l'abîme. Enfin

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39* Saint Prétextât, Arch.
laflee d'entendre toujours répéter
des vérité*
IÉVR. lu ,U1 déplaifoient , elle réfolut
24-
3 de fe défeire
de celui oui avoit affez de zele de fermeté &
pour les lui dire. Il ne
plus que de
s'agiflbit
ehoifir un homme capable d'exécuter fon dé-
teftable deffein. Lorsqu'elle l'eut trouvé
, elle
donna les ordres , qui ne forent que trop ponc-
tuellement exécutes. L'affaffin pritJe
moment
oii le faint Archevêque chantait
Matines avec
fon Clçreé , pour lui donner un coup
de poi-
gnard , dont il mourut quelques heures
après.
Ceci arriva un Dimanche, Février j88 (ci
L EgUfe de Rouen fait la fête de S. Prétextât
dont on trouve le nom dans le
Martyrologe
Romain , $c dans ceux de France,

(c) Quelques Auteurs ont jour d< U


RJ/urreSUon de Noen
mis la mort de Sain» Prctex* Seigneur, Mais
ces paroles ne
fat au ?4 d'Avril , fuppofant prouvent
rien , puisque par
qu'il futpoignardé le jour de U jour de U RifmtHion de Ncr
Pâque. Cette fuppoiition eft tre Seigneur , on peut entendre
fondée fur ce qui eft dit dans le Dimanche,
A Vie , que fa mort arriva, U


«

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Saint Éthelbert > Rot. 395

FÉV.
SAINT ÊTHELBE,RT,
14.

Roi de Kent,
& premier Roi Chrétien d'Angleterre.

Voyti Btde , Hift. Angl. 1. i. c. i< ,6*c; &


Henfchcmus, T. 3-Febr. p. 471.

L'An 616.

Éthelbert, eut pour trisaïeul , Hen-


gifte, des Anglo-Saxons gui s'établirent
Chef
épou-
dans la Grande-Bretagne en 448 (a). Il
fa , du vivant de fon
pere , Berthe , fille uni-
que de Caribert , Roi de Paris , monta mr &
le Trône en 560. Une paix profonde de près
d'un fiecle avoit rendu le Royaume de Kent
d'Ethelbert
très-floriflant ; ÔC les conquêtes
fur les
lui avoient acquis une telle fupérionte
les Sa-
autres Royaumes également fondés par
par
xons , que ce Prince étoitfouvent défigné
Mais que
le titre général de Roi fAngUtem.
lui fervoit - il d'être fi grand aux
yeux du
avoit le malheur .de ne pas
inonde , puifqu'il
connoître le vrai Dieu , &
qu'il etoit tou-
Pour
jours attaché aux fuperftitions païennes.
qui n'étoit venue en Angleterre ,
Berthe ,
liber-
qu'à condition d'avoir une entière
elle vivoità la
té de profeffer fa Religion,
de toutes les vertus
Cour , dans la pratique

( «) On place dans Tannée me de Kent , par Hengifte.


I

45 j , la fondatipn du Royau-

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394 Saint Ètrelbert 3 Roi.
chrétiennes. Le faim Evêque Létard , qui Ta-
f&vh \a voit fui vie , n'oublioit rien pour l'affermir
de plus en plus dans les voies de Dieu. Ilal-
loit avec elle célébrer les divins Myfteres dans
une ancienne Eglife dédiée à Saint Martin 9
près de Cantorbery Cependant les Païens f
touchés de la vie exemplaire &
des difcours
du vénérable Prélat, revenoient peu à peu de
leurs préventions. Le Roi lui-même fentoit di-
minuer fon éloignement pour le Chriftianifine.
C'étoit ainfi que la Providence préparoit les
cœurs à recevoir l'Evangile , que le laint Moi-
ne Auguftin vint prêcher peu de temps après
dans le Royaume de Kent (é).
Enfin le moment de la divine miféricorde ar>
riva pour Éthelbert ; ce Prince ouvrit les yeux
à la lumière , &
renonça publiquement au culte
des Idoles. Le fcele &
la piété de Berthe contri-
buèrent beaucoup à fa conversion , fuivant le
témoignage des Hiftoriens Anglois. S. Grégoire
le Grand étoit du même fentiment , il fait &
le plus grand éloge de la Reine Berthe , qu'il
compare à Sainte Hélène , mere de Conftantin
le Grand ( i \
Le Roi de Kent , devenu Chrétien , parut un
homme tout nouveau ; & les vingt années qu'il
vécut après fon Baptême , furent entièrement
confacrées à la Religion. Il eut de rudes corn»
bats à foutenir , &
contre fes partions , con- &
tre le monde , & contre l'cfpnt de ténèbres :

(*) Quelques modernes ont quand il pana en Angleterre


prétendu que Saint Létard avec la Reine.
«toit Erfque dt Senlis mais *,
( e ) Voyez dans la Vie do
il clt plus probable qu'il étoit Saint Auguftin , le détail de
Evêque Régkmalre. Peut- Ces travaux apoftoliques.
être même ne £ut4l (açri que (1)1. 9 ,Ep.t:

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Saint Éthelbert s Rot. 39f
maïs il en fortit toujours vainqueur , en fe -

Servant des armes que fournit l'Evangile , c'eft- ^V,


i-dire, de la prière , de la vigilance , de l'hu-
milité , &
de la mortification. La bienfàifance
devint unç de fes principales vertus, fes peu» &
pies en éprouvèrent continuellement les heu-
reux effets. Il porta de fages Ioix , que l'on ob-
fervoit encore en Angleterre , plufieuf $ fiecles
après Ifa mort. Son attachement à la Religion
|ui faiioit faifir toutes les oeçaiions <fétendre
Fempire & la connoiflance du nom de J. C.
Il abolit les fuperftitions païennes • renverfale*
Temples des idoles , ou les confacra au vrai
Dieu. H fit préfent de fon Palais de Cantor*
béry à Saint AugufHn , &
fonda la Cathédrale
de la même Ville , connue fous le nom <TÉgU~
fe-<U-Chrijl , ainli que l'Abbaye de Saint Pierre
& de Saint Paul. On dut encore à fa pieufe
magnificence la fondation des Eglifes de Saint
André de Rochefter . de Saint Paul de Lon-
dres , &c. Il travailla avec zele à la çonver-
iion des Princes voifins , dont deux abjurèrent
le Pagânifmç. L'un étoit Sébçrt , Roi des Sa-
xons-Orientaux ; &
l'autre , Red<*ald , Roi
des Eft- Angles. Malheiureufement le dernier
fat infidèle à fa vocatiof) , & retourna dans la
fuite à Fldolâtrie.
Saint Êthelbert mo*rut en 616, après un
règne de 56 ans, &
fiit enterré dans PEglife
de l'Abbaye de Saint Pierre &C de Saint Paul.
On levaenfuite fon corps de teite , pour le
mettre fous le Grand- Autel. Il eft nommé en
ce jour dans le Martyrologe Romain, dans &
ceyx d'Angleterre, Il eft le même oue Saint
Albret , Patron d'une Eglife de Norwich ;
&: de plufieurs autres Eglifes d'Angleter-

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39^ Saint Lètarb,ÉK
rc ( d ). Polydore Virgile rapporte qu'on èn^
FÉVR. 04.
tretenoit autrefois une lampe perpétuelle de-
vant fon tombeau , &
ou'il s'y eîl opéré des
miracles jufqu'au règne d Henri VIIL

SAINT L É T A R D,
ÉVÊ^UE.
c E Saint
comme
gleterre
Reine Berthe en An-
fuivit la
nous l'avons rapporté dans
,

la Vie de Saint Êthelbert , &


fut mis auprès
d'elle , en qualité d'Aumônier de Direâeur. &
Les femences de Chriftianifme qu'il jeta dans
le Royaume de Kent , préparèrent le* voies
au faint Miffionnaire Auguuin. Il fiit enterré
fous le portail de l'ancienne Eglife de Saint
Martin , où il célébroit les divins Myfteres
pour la Reine Berthe. On Fhonoroit autre-
fois à Cantorbéry, On
y gardoit fes Reli-
ques dans l'Eglite Abbatiale de S. Auguftin
& on les portoit à la Proceffion des Rogations,
On l'invoquoit fur-tout dans les temps de fé-
cherefle , &
l'on éprouva fouvent les effets de
fon interceffion.
Voyez la ^ Vie de Saint Létard , par le
Moine Gofcelin. On en voit une copie MS
dans la Bibliothèque Cottoniene. Voyez auffi
le Monajlicon Anglicanum ; Guillaume de Mal,-
mesbury , de Pontif. Angl. L i ; Caperave ; la
Chronique de Tharn. c. 2. § 2 ; Henfchenius , p.
469.

( d ) L'Eglife de S. Albert | peut voir la-dcffus Blondficld


ou Ethelbert de Norwich eft dans fon Hijhirc dt Noifoll *
plus ancienne que la Cathé- & de U
VilU d* Hormich.
drale de la même .Ville. On

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Le B. Robert d'Arbrissel. 397

• LE BIENHEUREUX
ROBERT D'ARBRISSEL,
Instituteur
DE L'ORDRE DE FONTEVRAUD.
R Obert f furnommé
de fa naiflance , Village dans le Diocefe
<rArbriffel,A\i\iç,\\

de Rennes , fiit élevé dans la piété par fes pa-


rents qui avoient plus de vertu que de richef-
fes. Il commença fes études en Bretagne , &
vint les achever à Paris , oii il prit le Bonnet
de Doâeur en Théologie. Il fiit lucceflivement
Archiprêtre, Grand - Vicaire de Rennes, &
Chancelier du Duc de Bretagne : places qu'il
remplit avec autant d'édification que de capa-
cité. Mais il les quitta bientôt pour aller retra-
cer la Vie des anciens Solitaires dans la forêt
de Craon , en Anjou. Sa réputation lui ayant
attiré un grand nombre de difciples , il leur fit
bâtir un Monaftere , &
leur donna la Règle des
Chanoines Réguliers
Le Pape Urbain II , que le projet d'une Croi-
fade avoit fait venir en France , qui fe trou» &
voit à Angers pour la Dédicace de Eglife Ab-
batiale de Saint Nicolas , voulut connoître
un homme dont la renommée publioit tant de

( a ) Ccft l'Abbaye de Roê\ [1093. P*P* Urbaii» H ap-


latin de Rota. Duchefne prouva en
lç QOUVeji foftitut
met la foodation a l'agjiop*,
39 8 Le B. Robert D'ARÈkissÈÈ.
merveilles. l'entendit prêcher le jour de tà
Il

cérémonie mais avec une telle fatisfaâion ,


,

qu'il lui donna le titre de Miffionnaire Apofto-


ligue , avec plein pouvoir d'annoncer l'Evan-
gile par toute la terre. On île fauroit expri-
mer les fuccès qu'eurent les prédications du
Bienheureux Robert. Il gagna une multitude
innombrable d'ames dans tous les lieux où il
eut occafion d'exercer le miniftere de la parole*
Il fonda en 1099 le Monaftere de Fonte-

vraud , à une lieue de la Loire , dans le Dio-


cefe de Poitiers. Il fit bâtir deux Maifons fé-
parées , Tune pour les hommes , &Fautre
Cur les femmes de manière toutefois <jue
1

: hommes feroient fournis à la jurifdi£bon


de l'Abbefle , qui feroit Supérieure Générale
de tout l'Ordre. Son deffein etoit de faire par-là
honorer la Sainte Vierge f que Jefus - Chrifl
avoit donnée pour Mere à Saint Jean repré*
fenté par les hommes. Entre toutes les Règles
monaftiaues , il choifit celle de Saint Benoit
comme la plus propre à fa Congrégation. Il
défendit l'uiage de la viande à fes (Sfciples , mê-
me dans la maladie , &
leur prefcnvit le fi-
lence le plus rigoureux. La clôture étoit auffi
des plus exaâes. Les Prêtres ne pouvoient en-
trer dans l'Infirmerie des Religieufes ; &
quand
quelqu'une d'entr'elles étoit malade , on la
portoit à lTglife pour y recevoir les Sacre-
ments. Herfende de Champagne , parente du
Duc de Bretagne , fut la première Abbe(Te de
Fontevraud. Le faint Fondateur lui donna pour
coadjutrice , Petronille de Craon , Baronne de
Chemillé.
Cependant Robert continuoit de prêcher
avec foo zdte ordinaire. 11 fut l'inftrument dont

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Le B. Robert d'Arbrissel. 399
Dieu fe fervit opérer
converfion de la la
Re ine Bertrade, <jui avoit quitté fon mari ^ *4-
pour ^poufer Philippe I , Roi de France ( £).
Cette Princefle , touchée des difcours du Bien-

II

à Fontevraud , oîi elle pafla faintement le refte


de fa vie. Plufieurs autres Princefles embrafle-
rent le même Inflitut , du vivant & après la
mort du faint Fondateur.
Le Bienheureux Robert mourut à Pâge de
70 ans , dans le Monaftere rTOrfan , en Berry f
le 25 de Février, jour de Saint Matthias, dans
Tannée biflextile 1116. On reporta fon corps
à Fontevraud. En 1644, HEvêque de Poitiers
fitl'examen de plufieurs miracles opérés par
ion interceffion. Il eft honoré depuis fa mort
fous le titre de Bienheureux , l'on trouve &
fon nom dans les Litanies de fon Ordre. Il
n'a cependant point d'Office particulier, &C
l'on ne dit qu'une Meffe de la Trinité le jour
de fa fête (c).

( b ) Bertrade étoit fille de Chartres , lorfqu'elle


Simon de Montfort , & fœur ditprêcher le B. Robert.
d'Amauri de Montfort , Com- (r) On a voulu noircir la
te d' Evreux. Ce fut 1091 réputation du B. Robert d'Ar-
qu'elle quitta Foulques , Com- brùTel , en l'accufapt d'avoir
te d'Anjou fon mari , pour indifféremment donné l'Ha-
Thilippe I, Roi de bit Religieux à tous ceux qui
Le Pape Urbain II le lui demandoient, ce d'avoir
ce Prince en
inia eu des liaifons trop intimes
1094, à caufe de ce maria- avec les femmes. Ces accu-
ge fcandaleux. Philippe ren- Cations font tirées d'une lettre
voya Bertrade , mais il la re- de Rofcelio , homme décrié •
prit en 1 100 , ce qui lui atti- & dont le Concile de Soiifons
ra une féconde excommuni- condamna les erreurs fur la
cation. Bertrade étoit à un Trinité en 109t. U eft vrai
château dans le Diocefc de que pluAeurs gens de bien

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400 Le B.Robert v'Arbrissel.
Voyez Vie du Bienheureux Robert <TÀr*
la
briffel , Baudry , Evêque de Dol
écrite par
FÉVR. 1 4-
qui vivoit dans le même temps ; Hélyot , Hift.
des Ordres Relig.T. 6. p. 83 ; D. Lobineau,
Hifl. de Bretagne ,de l'Edit. de 1707 , p. 1 1 3 ;
& fur-tout Us Notes de Chaftelain fur le Marty-
rologe Romain 3 p. 73 <f. &juiv.
XXV. JOUR

reçurent quelques impreffîons mourut dans les fentiments de


contre Robert d'Arbriflel , tendre piété. Géofroy,
la plus

même de fon vivant. Tels de Vendôme fut défabufé i


furent entr'aurres l'Auteur de la longue , &
rendit juftice à
la lettre attribuée à Marbo- Robert. 11 devint même fon
dius , Évêque de Rennes , & ami &fon défenfeur. Sou*
Géofroy , Abbé de Vendôme. vent il l'alloit voir à Fonte-
Le fécond en écrivit au Bien- vraud , où il fit une fonda*
heureux lui-même ; car on tion conûdérable , il s'y bâtit
ne peut gueres douter que la aufli une maifon , afin d'avoir
lettre qui porte ion nom la facilité de l'entretenir plus
ne (bit effectivement de lui. commodément \ &
plus d'une
Mais toutes les aceufations fois il lui aida à exécuter fes
dont on chargeoit Robert pieufes entreprifes.
c'Arbriffel, n'étôient fondées Pour revenir à Marbodius %
que fur des bruits dont la les Continuateurs de l'Hinoi-
fauffeté fut bientôt découver- re littéraire de la France,
te. Après tout , il n'eft pas T. 10. p. 359, ont prouvé
étonnant qu'un homme qui contre le P. de la Mainferrae
jouilVoit de la plus haute ré- le P. Alexandre , Sec. que la
putation ait eu des ennemis. lettre qui porte fon nom eft
Le mérite , & fur-tout le zele, véritablement de lui. Mais
n'échappent gueres aux traits ceci ne f réjudicie point à la
de l'envie. 11 fuffit pour juf- caufe que nous défendons.
tifier Robert , de dire qu'il En
effet , Marbodius ne par-
fut le fléau du vice , que d'après des bruits.
qu'il le
le combattit jufques dans Toutes les expre fiions dont
les perfonnes les plus quali- il fe fert refpirent la cha-
fiées , qu'il rit constamment rité. Il exhorte Robert à
retentir les ordonnances de fe corriger , s'il eft coupable
la Loi divine aux oreilles des ou à fe juftiner s'il eft inno-
pécheurs endurcis , qu'il rut cent. II découvrit enfuite la
regardé comme un ferviteur vérité , rendit juftice au
de Dieu par ceux qui le con- Bienheureux , & protégea en
nurent vçritahkmçju t & qu'U HÇl l&MiGiW qu'il fit en
Bretagne.

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5. Tarais 3 Pat. de Const. 401

XXV. JOUR DE FÉVRIER.


m

SAINT TARAISE,
PATRIARCHE
DE CONSTANTINOPLE.
Tire de fa Vu , écrite par Ignacefin difciple 5 qui
fut depuis Evcqutde Nicie \bdes Hijloriens Eccle-
Jiafiiques de fin temps. Voye^ BoUandus , 7*. i.
/. Sy€ ; & Fleury , L 44.

L'An 80 6.
«

T>À R A I S Ê naquît à Conftantinople , vers févr. 2 y.


lt milieu du huitième fiecle. Son perc fe nom-
moit George , &
fa mere , Eucratie ; ils fl

étoient tous deux de race Patricienne. George res ^îà*!*


cxerçoit une des premières Charges de la Ma-
giftrature , &
jouiflbit de la plus haute consi-
dération , à caufe de fon attachement inviola-
ble aux règles de la Jufticev Eucratie , encore
plus diftinguée par fa vertu que par fa naif*
fance , n'étoit pas moins uniVeriellement efti-

Bretagne. Il paroi t racine dre -,le P. Alexandre , Sec.


qu'il l'invita à venir inftruire XII. Dijf, C \ 6r fur - tout
les Fidèle* de fon Dioccfe. V Apologétique du B. Robert,
Voyez Ouvrages que le
les parSorin imprimé en 1702,
,

P. de la Mainferme a com- Ce Ouvrage eft cent


dernier
potes pour venger la mémoi- avec autant de foh dite , que
re du Patriarche dt fon Or- d'efprit &. de poUtefîe.

Ce

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4oz S.Taraise, Pat. de Const.
SS5 mée. Elle voulut former elle-même fon fils à

2 *'
la pratique de k
Religion 9 &
elle y réuflit -

merveilleufement. Entr'autres leçons qu'elle


lui donnoit , elle infiftoit particulièrement fur
la fuite des mauvaife* compagnies. Le jeune
Taraife répondoit parfaitement aux foins dp
fa pieufe mere , & laiflbit déjà entrevoir ce
qu il feroit un. jour. U ne entré
fut pas plutôt
dans le monde
,
admirer
qu'il s'y fitpar fes
talents &
par fes vertus. Il mérita d'être élevé
à la dignité de Conful , puis à celle de premier
Secrétaire d'Etat , fous Conftantin llmpé- &
. ratrice Irène fa mere. La connoiffance qu'il
avoit du néant des chofes humaines , l'empê-
cha de fe laifTer éblouir par le feux éclat des
honneurs. Le féjour de la Cour , ordinairement
fi préjudiciable à l'innocence , parce que tout

y flatte les paffions , n'altéra point les fenti-


ments de pieté gravés dans fon cœur. Il y vé-
cut toujours en Chrétien , ou plutôt en Reli-
gieux. C'étoit ainfi que Dieu le préparoit à
la place éminente qu il lui deftinoit dans fon
Eglife.
L'Héréfie des Iconoclafles ou Brifturs-<T1-
mages , étoit devenue fort infolente à caufe de
la proteôion que lui avoient accordée les
Empereurs Léon Ifaurien , Conftantin Copro-
nyme , &
Léon , furnommé Cha{are. Irène ,
femme du dernïer de ces Princes , qui à de
mauvaifes qualités en joij^noit de bonnes , ne
s'étoit point laiffé entraîner par le torrent 9
& avoit toujours confervé un attachement fe-
cret à la Foi Catholique. Après la mort de fon
mari , arrivée en 780 , elle fe fit déclarer
Régente de l'Empire , afin de gouverner fous
le nom de fon fil* ConftmÛP , qui n'étoit âgé

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S. Taraise, Pat. dk Const, 405
que de dix ans. L'autorité dont elle fut revê- 555555
. tue apporta du changement dans les affaires
,
F£Vt
de PEgliie , & donna aux Orthodoxes l'efpé-
rance de voir finir la perfécution qu'ils fouf-
froient depuis long-temps. Paul III étoit alors
Patriarche de Conllantinople. Il avoit été élevé
à cette dignité par Léon , furnommé Cha^cire.
La crainte de déplaire à la Cour l'avoit em-
pêché de fe déclarer ouvertement pour la vé-
rité. avoit môme tenu , contre les lumières
Il

de fa confcience , une conduite qui favorifoit


l'Héréfie régnante. On remarquoit cependant
en lui plufieurs excellentes qualités , entr'au-
tres une immenfe charité pour
, lespauvres , qui
lui gagna le cœur du Peuple ; & une prudence
confommée , qui lui attira l'eftime d'Irène 8c
de toute la Cour. Une maladie dont il fut
attaqué , lui ouvrit les yeux fur fa lâcheté
criminelle ; &
ce fut pour l'expier qu'il ré-
folut de paffer le refte de fa vie dans la Soli-
tude. Il renonça donc à l'Epifcopat , pour fe
retirer dans le Monallere de Florus , à Conf-
tantinople , où il prit l'habit , fans avoir com-
muniqué fon deflein à perfonne. Lorfque l'Im-
pératrice en eut été informée , elle l'alla troiir
ver avec fon fils , & fit valoir les raifons les
plus fortes pour déterminer à reprendre le
le
gouvernement de fon Eglife. Mais tous fe$
efforts furent inutiles.Le Patriarche , fondant
en larmes , répondit qu'il vouloit réparer le
fcandale de fa conduite paflee , que c'é toit- &
là l'unique motif de fa retraite. Il ajouta qu'on
le preflbit envain de retourner à fon Sie^e % -

que le refte de fa vie feroit dévoué à la péni-


tence , &c que le leul parti qu'il y eût à pren-
dre , étoit de choiiir un digne Pafteur à l'f>
Ce ij

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404 S. Tarajse y Pat. de Const.
gtîfe dé Conftantinople. On le pria d'indiquer

tVR au-moins un fujet capable de remplir une pla-


* *1 * ce auffi importante. Il nomma Taraife, com-
me en jugeoit le plus digne. Il fur-
celui qu'il
vécut peu de temps à cette déclaration.
Après la mort du Patriarche Paul , on pen-
ii cft élu fa efficacement à lui donner
un fuccefleur. Ta-
Patriarchede-raife fut celui en faveur duquel tous les fuffra-
c onftanûno-
fe r évinirent. Mais il n'étoit pas aifé de le
PC
faire confentir à fon éleâion , parce que fon
*

humilité l'empêchoit de voir en lui ce que les


autres y découvroient. Enfin , preffé de toutes
parts , il repréfenta qu'il ne pouvoit en lïïreté
de confcience fe charger du gouvernement d'u-
ne Églife féparée de la Communion Catholi-
que ; &
qu'il ne fe laifferoit jamais ordon-
ner , qu'on ne lui eût promis d'affembler un
Concile ^Général , pour terminer toutes les
difputes qui s'étoient élevées touchant les Sain-
tes Images. On
accepta la condition. Ators
Taraife fe rendit , &
la cérémonie de fon Sacre

ie fît le jour de Noël de l'année 784.


Dès-gu'il fut inftallé , il donna avis de fon
Ordination au Pape Adrien , &
s'unit avec lui
dans la Communion de PÉglife Catholique.
Le Souverain Pontife reçut en même temps
une lettre commune de l'Impératrice de &
l'Empereur , dans laquelle ils lui marquoient
qu'ils étoient fur le point d'affembler un Con-
cile -Général , & le prioient d'y venir en per-
fonne , ou du moins d'envoyer des hommes
vénérables & favants pour repréfenter. Ta-
le

nûfe écrivit auffi aux Patriarches d'Alexandrie f

•d'Antioche & de- Jérufalem afin qu'ils'«1*


,

VoyafTent leurs Députés. Le Pape fut charmé


dp* iTje«feufe tpatnure que prenoient les afl&u*

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S. Taraise* Pat. de Const. 405
tes , &
il fe livra à la douce efpérance de ==s
voir bientôt triompher la vérité. Il chargea i£vr.2j,
"
*
fes Légats de lettres pour l'Empereur , l'Impé-
ratrice , & le Patriarche. Il
y applaudi (Toit à leur
zele pour la faine Doârine , y démontroit &
fort au long l'impiété des Iconoclaftes. Il leur
demandoit enfuite de faire anathématifer en
préfence de fes Légats le faux Concile cjue les
Hérétiques avoient tenu fous Conftantin Co-
pronyme , &
les conjuroitau nom de Dieu ,
de rétablir le culte des faintes Images à Conf-
tantinople , &
dans toute la Grèce. Il finiflbit
fes lettres à l'Empereur &
à l'Impératrice par
leur recommander les perfonnes qu'il envoyoit
pour le repréfenter , c'eft-à-dire , Pierre Ar-
chiprêtre de l'Eglife Romaine , Pierre &
Prêtre &
Abbé du Monaftere de Saint Sabas,
à Rome.
Les trois Patriarches d'Orient , qui étoîent
alors fournis à l'Empire des Sarrazins , ne vin-

rent point à Conftantinople. Ils craignoient


que ne fît ombrage à des Maîtres
leur abfence
jaloux, qui leur avoient défendu toute com-
munication avec l'Empire , fous les peines les
plus rigoureufes. Il étoit même dangereux &c

difficile d'envoyer des Députés ; ils le firen»


cependant par zele pour la caufe de Dieu.
Lorfque les Légats du Pape des Patriar-&
ches , ainfi que les Évêques de leur dépen-
dance , furent arrivés à Conftantinople , on y ,

fit 1 'ouverture du Concile dans l'Eglife des


g^ n ^raj de
Apôtres , le premier Août 786. Mais on ne put Nicée contre
rien ftatuerà caufe des violences que les Ico-! 1 " 1 *»* 1 *-
tes#
noclaftes exercèrent. Il fallut donc fe retirer
& attendre un temps plus favorable. L'année
fuivante , les Évêques fe rafTemblerent dans

Ce uj

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406 S. Taraisë, Pat. dê Coxst.
l'Êglife de Sainte Sophie , à Nicée en Bithynie*
Les deux Légats du Pape font nommés les
premiers dans les Aûes du Concile* Taraifc
eft nommé enfuite ,
puis Jean & Thomas
Prêtres & Moines
Légats des Sièges Apof-
,

toliques d'Orient , Jean pour les Pa-


: favoir
triarches cTAntioche de Jérufalem , &
Tho- &
mas pour le Patriarche d'Alexandrie. L'affem*
felée fut compofée de trois cent-cinquante
Évêques , fans parler d'un grand nombre
d'Abbés , de Prêtres & de Confefleurs ( a ).

- ... m

(a) On lut dans la rroifie- Orientaux • qu'on ne (bup-


me Se filon du Concile les çonnera pas d'avoir voulu
lettres des Patriarches d'Ale- flatter le Pape , eft décifif en
xandrie , d'Antioche de Jé-& faveur de l'autorité du Saine
jWalera, qui, comme le Pa- Siège dans les Conciles Gé-
pe Adrien, reconnoiflbient néraux.
«ni'on doit rendre un culte de Dans la quatrième Seflîon
relation aux feintes Images. on lut pluûeurs paffages des
•» L'abfcnce des Patriarches Pères , qui établiflbient le cul-
,

» dirent leurs . dépures , ne te de relation qu'on rend aux


h peut préjudicier à l'autori. (aimes Images. Après quoi
» té du Concile , puifqu'eUe tous s'écrièrent qu'ils croient
»» eû occasionnée par la Ty- enfants d'obéifiance , &
qu'ils
m rannie des Sarrazîns , fous faifoient gloire de Cuivre la
h laquelle ils gémiûent , & Tradition de rÉglife leur mè-
» que d'ailleurs ils ont envoyé re. Us dirent anathème aux
ttleur profeifion de Foi par Iconoclaltes , c'eft^à-dire, à
m écrit , 8c des pcrfbnnes pour ceux qui farifent les Images
» les repréfenter. Aucun des ou qui les nomment Idoles.
•f Patriarches d'Orient n'aflifta On lut enfuite une confeffion
» au fixieme Concile Gêné? de Foi , où tous déclaraient
9t raî , à cauie de la domina- qu'ils honoroient première-
»tion des Barbares \ cepen» ment la Mere de Dieu , qui
m dam il n'en a pas moins été cil au-defîus de toutes les
•*un Synode Écuméniquc ; vertus céleftes , puis les An-
m vû principalement que le ges , les Apôtres , les Pro-
m TrcS'Saint Pape de Rome phètes, les Martyrs, les Doc-
» Tapprauvoit & y préildoit teurs , &généralement tous
i» par fes légats. Un pareil i les Saints. Ils ajoutèrent qu'Us
témoignage rendu par les I honoroient auiîî leurs Images,

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5. Taraise Pat. de Const. 407
,

On expofa la Doctrine de PÉglife fur la ma-


tière en quefHon : après quoi on définit con-
j^y
tre leslconoclaftes , qu'on doit rendre un culte
de relation aux Images des Saints. Le Concile

pereur &
de l'Impéi
des Lettres Synodales à toutes les Églifes , &
nommément au Pape Adrien , qui approuva
tout ce qui s'étoit fait dans le Concile.

fans en excepter celles des noclaftes avoient tenu en 754,


Anges , qui , quoiqu'incorpo- fous Conllantin Copronyme.
reis, ont paru comme hom- On montra qu'on n'avoit pu
mes fur la terre. Cette con- lui donner le titre de Concile
feflîon de Foi fut fouferite par Général : i°. Parce que le?
les deux Légats du Pape , par autres Évêques de l'Églife
le Patriarche Taraife ôc les universelle l'avoient anathé-
députes de ceux d'Alexandrie, m a trie : 2°. Parce que les Évê-
d'Antioche & de Jérufaiem , ques d'Occident n'y avoient
& par )oi Évêques , Tans point affilié , & que le Pape
compter un grand nombre de n'y avoit point concouru
Prêtres &
de Diacres qui re- foit par fa présence , foit par
préfentoient les Évêques ab- fes Légats , foit par une let-
sents. Les Abbés fouferi vi- tre circulaire , comme cela
rent enfuite au «ombre de fe pratiquoitdans les Conci-
,130. les: 3°. Parce qu'il n'avoir
On lut dans la cinquième point eu le confentement
Se fii on pluaeurs paiTagcs des des Patriarches dAicxandrie ,
Pères , vifibleraent falfifiés & d Antioche de de Jérufaiem 9
corrompus par les Iconoclas- ni des Evêques de leur dépen-
tes. LÂrchiprêtre Pierre , un dance. On détruifit enfuite
des Légats du Pape , deman- l'accufation d'Idolâtrie , in-
da qu'on mit une Image au tentée contre l'Eglife par les
milieu de lAfîemblée , pour Iconoclaftes. Former une tel-
être honorée de tous , & que le aceufation , difoient les
les Écrits compofés contre Pères du Concile , c'eft don-
les faintes Images , fuffent ner un démenti facrilege à
condamnés au feu: ce que le Jcfus-Chrift ; puifque , félon

Concile accorda. l'Ecriture , fon Royaume eft


Dans la fixieme Seflîon éternel , & que la puiffance
on réfuta , article par article ne peut lui
qu'il a fur l'Enfer
le faux Concile que les Ico- être ravie. C'eft donc faire

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408 S. TaraisEj Pat.de Const.
Taraife , conformément à la décifion du Con-
p£y 2y
cile , rétablit les faintes Images dans toute l'é-
tendue de fon Diocefe. Il s'appliqua auffi avet
beaucoup de zele à corriger divers abus , :&
fur-tout à abolir la Simonie. Il écrivit une let-
tre fur ce fujet au Pape Adrien ; il y féli- &
citait FEglife Romaine d'avtfir confervé la pu*

injure à Jefus-Chrift que d'ac- on lut la définition de Foi


cufcr Ton Eglife d'Idolâtrie. faite par Concile. Elle
le
D'ailleurs , ajoutoient-ils , les portott que l'on placeront dans
Iconoclaftes font en contra- le$ Eghfes les Images , a mit
diction avec eux-mêmes. Ils bien que les Croix , ( les
reconnoiffent que les fix Con- Iconodaftes permettoient Tu*
ciles Êcuméniques ont confer- fcge des Croix ) , Ce qu'on les
vé la pureté de la Foi: or mettrait fur les Vafes facrés ,
comment , après un tel aveu Air les Ornements , les mu-
condamner les Images « dont planchers , les mai*
railles, les
l'ufage dans l'Eglife eft bien fons , &c. Plus on voit les
antérieur au nxierne Concile Images des Saints , a joutoienc
Ecuménique » puifqu'il re- les Pères , plus on eft excité
monte jufqu'au temps des au fouvenir des Originaux.
Apôtres ? Les Iconoclaftes On doit donc les honorer,
«voient avancé que le Cler- mais non pas toutefois du cul-
gé étant Jnfenfiblement tom- te de Latrie» qui n'eft du qu'à
bé dans l'Idolâtrie, Dieu Dieu. On honorera ces Ima-
«voit fufeité des Empereurs ges par l'encens & le luminai-
fidèles pom* détruire les for-
y
re , comme on en ufe à l'é-
terefles du Démon, Le Con- gard de la Croix , du Livre
cile releva l'impiété de cette des Evangiles , &
des autres
flatterie en montrant que
, chofes facrées , le tout fui-
Jes Evèques , & non les Prin- vant la pieufe coutume des an-
ces temporels font les dépo-, ciens. Car l'honneur que Ton
Jî ta ires de la Tradition. Quant rend aux Images , fe rapporte
à l'Euchariftie ,
que les Ico* à l'Original ; $c celui qui ré-
xioclaftes prétendoient être la vère l'Image, révère celui
feule Image permife de Jefus* qu'elle repréfente. Tel fut le
Chrift, les Pères prouvèrent Décret que le feptieme Con-
qu'on ne peut dire de l'Eu- cile Général porta fur la ques-
une Ima-
chariftie qu'elle foit tion des Images : Décret fon-
ge ou une figure de Jefus- dé fur la doctrine des Pères x
Chrift, mais qu'elle eft fon & fur la Tradition de l'EgUCo
Vrai Corps 8c fon vrai Sang. Catholique,
Dans la {èptieme Seflion ,

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r
$.Tarai$e,Pat. de Const. 409
reté du Sacerdoce , c'eft-à-dire , d'avoir fu fe " 1

préferver du crime de la Simonie. JÉVR.a$;


Un Patriarche , tel que Taraife , ne pouvoit
manquer de faire beaucoup de bien. Le Clergé
& le peuple trouvoient en lui un modèle ac-
compli de toutes les vertus. Il fui vit un genre Ses vertus:
de vie tout différent de celui de plufieurs de fes
prédéceffeurs. Il bannit de ia table tout ce qui
fentoit la fomptuofité , &
ne voulut point fouf-
frir dans fon Palais de meubles magnifiques.
Saintement avare de fon temps , il en donnoit
très-peu au fommeil ; il étoit toujours le der-
nier couché , &t le premier levé de fa maifon.
La prière &
la leoure emportoient tout ce
qu'il avoit d'heures de loifir. Fidèle imitateur
de Jefus - Chrift , qui aima mieux fervir que
d'être fervi , il avoit rarement recours à fes
domeftiques. Cette difpofition prenoit fa four-
ce dans une humilité profonde : vertu qu'il tâ-
choit d'infpirer aux autres par toutes fortes de
moyens. L'exemple du Pafteur ramena la {im-
plicite évangélique dans le Clergé , qui fe dé~
tacha du luxe , jufqu'à renoncer aux étoffes
de foie , dont la coutume lui avoit fait une
forte de néceffité. Les laïques rougirent auffi
de plufieurs dérèglements , &
rentrèrent dans
les bornes exaftes de la loi.
Mais la vertu dominante de notre Saint
celle çgxi fembloit abforber toutes les autres ,
c'étoit une charité immenfe pour les pauvres.
On le vit fouvent leur diftribuer de fes pro-
pres mains ce que l'on avoit fervi fur fa ta-
ble. Il affigna des revenus fixes pour fournir
à leurs befoins. 11 alloit lui-même dans les
Maifons & dans les Hôpitaux de Conftanti-
nople : tant il craignoit que quelque roalheu-

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4io 5. Taraise , Pat. de Coxsf.
reux ne reliât fans fecours. II redoublait en*
ftvk. 14*
core ^es aumônes dans le feint temps de Ca-
rême. Un Évêque dont la vie étoit fi exem-
plaire , avoit droit de s'élever contre les dé-
lordres ; &il étoit fur de parler avec fuccès.

.-:c En effet, que pourroit-on oppoferà un Minif-


tre de Jefus-Chrift , quand il pratique le pre-
mier la morale qu'il prêche aux autres ? Le
Saint , dans fes Inftruôions , revenoit fouvent
fur la néceflité de mortifier fes fens , fur&
les dangers que l'innocence court au Théâtre.
Quelque temps après , l'Empereur Conftan-
tin conçut une paffion criminelle pour Théo-
dote , Dame d'honneur de l'Impératrice Marie ,
qu'il n'avoit jamais aimée. Auffi-tôt il oublia
K réfiihraŒc
1
que du mariage font indiflbkibles ,
les liens &
il ^olut de Ifs rompre époufer Théo-
df n£p£ , pour

rcurqnîvou- dote. Il eût bien voulu que le Patriarche ap-


k>it lui feirt prouvât fon divorce
; mais il comprit qu'il ne
treturfondc-teroit
vour,
fedle de k gagner. Il lui envoya
cependant un de fes principaux Officiers qui
tâcha , mais inutilement , de prouver que Marie
yé le poifon pour ft
Iaraife , au lieu de fi
répondit que ce peu
foupirant : » Je ne fais comment l'Empereur
» pourra fupporter l'infamie dont ce divorce
y fcandaleux va le couvrir à la face de l'Uni-
v vers. Je ne fais non plus comment il pourra
» punir les adultères &
les autres débauches
f
» après avoir donné un tel exemple. Allez lui
» dire de ma part que je fouffhrai plutôt la
» mort & tous les fupplices imaginables , que
» de confentir[à fon deflein ». Le peu de fuccès
de l'Officier n'ôta point encore à l'Empereur
toute cfpérance de pouvoir gagner le Patriar*

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S. Taràise , Pat. de Const. 41 !
che. Il Tenvoya chercher , & lui dit lorfqu'il
fut arrivé » Je n'ai rien voulu vous cacher , ftpfa a j
: »
t
» parce que je vous regarde comme mon pere.
» On ne peut nier que je ne fois en droit de
» quitter une perfonne qui a attenté à ma vie,
» Elle mérite la mort , ou tout au-moins une
» pénitence perpétuelle ; &
pour vous convain-
» cre de fon crime , voyez^en les preuves de
» vos propres yeux ». Là-deflus il fait appoN
ter un
vaie qu'il prétend rempli du poifort
que l'Impératriceavoit préparé pour lui
ôter la vie. Taraife ne donna point dans le
piège , &
répondit généreufement à l'Empe-
reur, qu'il connoiflbit le motif de fes plaintes.
» Elles viennent , dit-il , de votre paflîon pour
»Théodote. Mais quand elles feroient fondées ,
» je ne confentirois pas pour cela à la célé'
» bration d'un mariage qui fera toujours illé-
*» gitime &
contraire à la Loi de Dieu , tant
» que l'Impératrice Marie vivra. Voudriez-voui
h me forcer , en époufant Théodote , à faire
» ufage des Cenfures Eccléfiaftiques ?» Le
Moine Jean , qui étoit préfent,*fe joignit à
Taraife , &
parla à l'Empereur avec tant de
force , que les Préteurs &
les Patrices le me*
nacerent de lui paiTer leur épée au travers du
corps. Conftantin , qui étoit d'autant plus fu-
rieux , qu'il n'avoit rien de folide à répon-
dre , les 6t chafler l'un &
l'autre de fa. pré-
foice.
L'Empereur , crue fa paffion aveudoit dé
plus en plus , obligea l'Impératrice Marie de
îbrtir du Palais , pour aller prendre l'habit
dans un Monaftere. Et comme notre Saint
perfiftoit à ne vouloir pas le marier avec Théo-
dote , il fit fcire la cérémonie par Jofeph

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4ii S. Tarais , Pat. de ConsI*.
!==== Économe de l'Églife de Conftantinople. Cette
FÉVTLaj. aôion fcandaleufe eut des fuites très-préjudi^
ciables à la Religion. Des Gouverneurs de
Provinces , &
d'autres perfonnes puiffantes fui-
virent l'exemple du Prince. Les uns ch afférent
leurs femmes , les autres en gardèrent plufieurs
à & la débauche publique fut autorifée.
la fois ,

Saint Platon & Saint Théodore fe féparerent ,

de la Communion de l'Empereur , pour mar-


quer toute l'horreur qu'ils avoient de fon cri-
me. Quant à Taraife , il n'exécuta point la
menace qu'il avoit faite d'employer les Cen-
fures Eccléfiaftiques. Il crut qu'il étoit de la
prudence de ne pas pouffer à bout un Prince ,
entier dans fes volontés , de peur qu'il ne réta-
blit l'Héréfie , pour l'extirpation de laquelle il
avoit déjà pris des meuires. Il ufa donc de
modération , pour ne pas' tout perdre. Cela
n'empêcha pas l'Empereur de le perfécuter
durant le refte de fon règne. Non content de
le faire obferver par des Efpions , nommés
Syncelles qui ne laiffoient approcher per-
,
fonne de lui , fans leur permiflion , il exila
encore fes domeftiques &
les proches. La con-
trainte où le faint Patriarche étoit obligé de
vivre , lui donna plus de temps pour vaquer
à la contemplation , & pour folliciter la mi-
féricorde divine en faveur de fon Troupeau,
Cependant l'Impératrice Irène , qu'on avoit
éloignée des affaires , fe voyoit avec peine
dépouillée de toute autorité ; fon ambition &
en fouffroit d'autant plus , qu'elle ne vifoit à
rien de moins qu'à réunir la puiflance fouverai-

deî'împéïf. ne m fa perfonne. Elle fit jouer mille refforts


mec ircnc. fecrets pour rendre fon fils odieux à l'Empire.
Mais cçs moyens ne lui ayant pas réuffi , elle

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S. Taraise, Pat. de Const 413
réfolut de lever le mafque , &
de ne plus
garder de mefures. Elle s'attacha donc à ga- j

cner les principaux Officiers de la Cour de &


FArmée , puis elle fit emprifonner l'Empereur
fon fils , &
ordonna qu'on lui crevât les
yeux : ce qui fut exécuté avec tant de cruauté
que le malheureux Prince en mourut (£).
Irène étant montée fur le Trône, rappella tou-
tes les jperfonnes exilées par Conftantin , &
régna feule pendant cinq ans. Dieu permit
qu'elle ne jouit pas plus long-temps d'une au-
torité qui étoit le fruit de fon ambition &
de fa cruauté. Nicéphore , grand Logothete ,
ou Tréforier Général , la détrôna en 802 ,
& la relégua dans l'Ifle de Lesbos , où elle
mourut de chagrin. Mais revenons à notre
feint Patriarche.
Taraife , auquel la mort de Conftantin
avoit rendu la liberté , ne négligea rien
pour rétablir par-tout le bon ordre. Il com-
mença par chafler &
dépofer Jofeph , qui avoit
marié &
couronné Théodote contre toutes
les Loix divines &
humaines. Cette aâion de
vigueur le réunit avec Saint Platon , qui avoit
défapprouvé fes ménagements pour le feu Em-
pereur. Il vécut en paix fous le règne de Ni-
céphore , uniquement occupé des pratiques de
la pénitence &
des fondions du faint minif-
tere. Mais fa fanté s'épuifant de jour en jour
1

il fut enfin attaqué de la maladie dont il mou-


rut. Il continua d'offrir le faint Sacrifice de la
Méfie , tant qu'il put fe foutenir. L'Auteur de
fa Vie , témoin oculaire de ce qu'il rap-

(*) Ceci arriva dans l'année 797.

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414 S. Tarai se 3 Pat.deCoùsT.
porte , dit qu'il tomba comme en extafe , urt
févr.»j. P eu avant
mort# n l,entendoit difputer
P
avec les efprits de ténèbres , qui fouilloient
dans fà vie paflee , pour trouver de quoi l'ac-
cufer. Le Saint , qui étoit fort agité , fe jufti-
fioit &
répondoit à toutes leurs accufations.
Les fpeâateurs ne purent voir fans frémir , les
efforts que faifoient les Démons , pour dé-
couvrir des fouillures dans la vie d'un hom-
me , dont la conduite avoit toujours été irré-
prochable. Un moment après , le calme fuc-
^
Mort dn c a *
^ora g€ > &
* e Bienheureux Patriarche

Saint. expira tranquillement le iy Février 806. Il


avoit gouverné l'Églifc de Conûantinople pen*
dant vingt-un ans 6c deux mois.
Dieu honora par plufiçurs miracles la mé-
moire de fon ferviteur Taraife ; Ton com- &
mença à célébrer fa fèteî fous le Patriarche
qui lui fuccéda. U eft honoré en ce jour par
les Grqcs Se par les Latins. Quatorze ans après
fa mort , il arriva un de ces événements qu'il
faut rapporter % parce qu'il eft appuyé iur des
témoignages inconteftabies ( 1 ). L'Empereur
Léon l'Arménien , qui favoriioit les Iconoclaf*
tes , crut voir en longe Saint Taraife avec un
vifage fort irrité ; il l'entendit en même, temps
commander à un homme , qu'il appella Michel
de percer de fon épée. L'Empereur étant
le
éveillé , fe perfuada que ce Michel devoit
être dans le Monaftere du faint Patriarche ;
il y envoya donc faire des perquifitions dès
le lendemain matin. On tourmenta même cruel-

"( 1
} Voyez Ignace dans la I drénus , Zonare , &c*
Vie de Saint Taraife > Ce-
[

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"S. Taraise^Pat. de Const. 415

le découvrir mais il ne fe trouva penbnne


:

de ce nom parmi eux. C'était envain que Léon


cherchoit a fe foufiraire aux coups de la Jus-
tice divine : fix jours après , il fut affaflîné
par Michel U Beguc ,
qui prit la Pourpre en

Saint Taraife n'a reçu la récompenfe i>ro*


mife aux Élus , que parce qu'il a confram-
ment perfévéré dans le bien , malgré les épreu-
ves nombreufes &
délicates dans lefquellès il
s'eft trouvé. C'eft cette perfévérance que nous

devons continuellement envifager , puifque


fans elle nous perdrons le fruit de toutes nos
vertus , même les plus héroïaues. Réfléchir-
ions donc fur les moyens de prévenir les
chûtes , afin qu'après les avoir profondément
gravés dans nos efprits, nous en fkffions ufage
dans les diverfes circonfiances de la vie. Or
ces moyens, fuivant Saint Chryfoftome (2 ),
font la crainte de Dieu , la vigilance , l'hu-
milité , la componction. » Une ame , dit ce
n Pere. 5 n'a prefque pas befoin d'être excitée
» dans le commencement de fa converfion.
» Comme elle eft encore toute brûlante de
» zele , elle court avec ardeur dans la voie
» des faints Commandements. Mais ce premier
» feu s'amortira bientôt , fi elle n'a foin de lui
» fournir un aliment continuel : elle doit s'at-
» tendre aux plus rudes affauts de la part du
* Démon. Ce n'efl point aux Vaifleaux nou-
» veliement fortis du Port qu'en veulent les

U ) Ho«, 3. 4 x. 6. p. 114. Ben,


416 S. Victorin ses Coup.
, MM.
» Pirates , mais à ceux qui reviennent chargés
» de richeffes. Telle eft la conduite du Démon.
» Il n'attaque une ame que quand elle a amafle
» des richelTes fpirituelles par la pratique du
» jeûne , de la prière , de l'aumône , de la
» chafteté , &
de toutes les autres vertus.
» C'eft alors qu'il Te jeté fur notre Vaifleau
» pour en piller les tréfors ; &
ce qu'il y a
»de plus déplorable , c'eft qu'on ne peut
» prefque plus fe relever après une pareille
» chute. On peut tomber au commencement
» de la carrière , faute d'expérience ; mais tom-
» ber lorfqu'on a couru longtemps n'eftrce
h pas l'effet d'une négligence criminelle , &
» tout-à-fait indigne $le pardon? ».


SAINT VICTORIN,
ET SES COMPAGNONS,
0
Martyrs. m M m

Tiré de leurs Actes Jinccrts , écrits en Chaldal-


que , &
publiés par M. Etienne AJJemani , Ach
Mart. Occid , T. i. p. 60. Voyc^ Henfchénius ,
fous ce même jour.

L'An 284.
G Es Saints Martyrs , au nombre de
fept, étaient de Corinthç^ &
y confefferent
la Foi en 149 , devant le Proconful Tertius
au commencement du règne de Dece. Ayant
onfuite paffé en Égyptc , fans qu'on lâche
s'ils

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S. VlCTORIN 3 SES^QMP. MM* 4I7
s'ils y furent relégués , ou s'ils s'y retirèrent
d'eux-mêmes , moururent pour! C.à Diof-
ils wLVK
v
polis , en 284 Gouverneur Sabin,
, fous le & * 2 ''

fous le règne de Numérien. On leur fît d'abord *

fouffrir la queftion du chevalet, &plufieur$ au-


tres fortes de tourments. Mais comme rien n'é-
toit capable d'ébranler leur confiance , le Juge
irritéordonna que l'on mît Viâorin dans un
grand Mortier , où il eût les pieds les jambes &
écrafées. On lui difoit à chaque coup qu'il
recevoit » Aie pitié de toi , malheureux,
:

» tu peux éviter la mort , en renonçant à ton


» nouveau Dieu. » Le Saint perfiflant tou-
jours dans fa première Confeflion , fut aflbmmé.
Ses Compagnons, loin d'être effrayés, de
fon fupplice , briiloient d'envie d'en partager
la gloire avec lui. Auffi quand on montra le
Mortier à Vi&or , Tun d'entr'eux , il répon-
dit tranquillement » C'eft-là où je trouverai
:

» le falut & la véritable félicité ». On fy jeta


aufli-tôt , & on
jufquà ia mort. Ni-
le battit
céjphore prévint les Bourreaux , fauta de lui- &
même dans le Mortier enfanglanté. Son cou-
rage redoubla la fureur du Tyran , qui or-
donna à plufieurs Bourreaux de le frapper
en même temps. Claudien fut coupé par mor-
ceaux , &
l'on jeta fes membres palpitants
aux pieds de ceux de fes Compagnons qui
vi voient encore. Il en reftoit trois favoir, :

Diodore , Sérapion , Papias. Le Juge &


leur dit , en leur montrant les membres
épars de Claudien » Il ne tient qu'à vous
:

» d'éviter un pareil traitement ; je ne vous


» force point à fouffrir. Vous nous connoif-
» fez mal , répondirent les Martyrs. Nous vous
» prions , fi vous avez un genjre de fupplice

GoogU
4i8 S. Ces aire, Médecik.
» encore plus cruel , de nous y condamner i
» car jamais nous ne violerons la fidélité que
» nous devons à notre Dieu ; jamais nous n*
» renierons Jefu$*Ohrift notre Sauveur. C'eft
» de lui que nous tenons l'être , c'eft à lui &
n feul que tendent tous nos défirs ». Le Tyran^
tranfoorté de rage , condamna Diodore à
être nrfilé vif, Sérapion à être décapité 9 6c
Papias à être noyé. Ceci arriva le 15 de Fé-
vrier ,
jour auquel tous les Martyrologes des
Latins font mémoire de ces SS. Martyrs. Dans
lesMénées , &
dans le Ménologe de l'Empe-
reur Baiile Porphyrogenete , leur nom fe trou-
ve au % 5 de Janvier , qui fut le jour où ils
confefTerent Jefus-Chnft , à Corinthe.

LE MÊMEJOUR.
'
S A I
la «
N T € É S A I R E,
* • •

MÉDECIN*
<Li£ Saint > qui étoit frère de Saint Grégoire

les fdences à Alexandrie. Il les embraflktoutes ,


& ce fut avec le plus grand fuccès. H sVtacha
cependant d'une manière particulière à FÉlo
ouence , à la Philofbphie 9 fur-tout à la Mé- &
decine. On s'apperçut en peu de temps qu'il
avoit un génie fait pour cette demiete ûSence.
Il eut bientôt efiacé les plus célèbres Méde-
cins de fon fjecle. II voulut , avant de retour-
ner dans fa patrie * faire un voyage à, Oonf-
tantînople + afin de fe perfectionner de plus en
plus dans fa profeffion quîii avait choifie. On

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Si CÈÏÀÎ&É >ÀfÉ&EttN. 4i$
te prefla beaucoup de refter' dans cette der*
niere Ville , &
on lui fit les offres les plus
fgy^. t *
*

magnifiques de la part de l'Empereur Coriftan-


ce. II ne les accepta point , parce qu'il avoit
envie de retourner dans fon pays. Mais il re*
vint dans la fuite à Conftantinople 3 &
s'y* ac-

quit la plus brillante réputation*-


L'Empereur Julien l'Apoflat eftimoit fin*
gulierement Céfaire ; il le fit fon premièr Mé-
decin , & l'excepta toujours dans les Edita
publiés contre les Chrétiens. Il eût b;en vauty
Î;agner un homme d'un aufli rare mérité , 6c
'arracher au Chriftianifmé. Mais Céfaire étoitf
inflexible fur fa Religion. Il repouffa génereufe*
ment qui lui furent livrés >
les affauts n£ &
fe IauTa jamais éblouir par les carëffes infi-
dieufcs de Julien* Cependant fcn pere ft &
mere craignirent pour fa Foi j quoique juf-
queS-là elix n'eût reçu aucune atteinte. Ils lui
peignirent donc vivement le danger qu'il coi*4

roit, & le déterminèrent enfin à s'éloigner*


d'une Cour idolâtre.
Céfaire reparut à la Cour fous les Empe-'
reurs Jovien &
Valens , qùi ious deux l'ho-
norèrent dé leur eftime. Le dernier le créa
Tréforier Général de fon Domaine , puis In-
tendant de la Bithynie. Mais il étoit temps
que notre Saint ne vécût plus que pour Dieuj
La providence fe fervit, pour tarifer les liens
qui le retenoient dans le monde , du tremble-
ment de terre qui arriva en 368 à Nicéé, en Bi-
thynie. Il fut fi fortement frappé du danger qu'il
avoit couru , que fur le champ il réfolut dd .

n'avoir plus rien de commun avec le monde.


11 mourut peu de temps après , c'enSà*dire
,
au commencement de Pannétf 369. II avoit
Ddij

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420 Ste. Walburge y V. A.
inftitué les Pauvres Le Martyr©*
fes héritiers.

févr, 2j. *°t>


e K-01113"1 k nomme
en ce jour ; mais les
Grecs en font mémoire le o de Mars , com-
me nous l'apprenons des Ménées de l'Hifto- &
jien Nicéphore ( i \
Voyez Saint Grégoire de Nazianze , Or»
io ; oc Hermant , Vus dt Saint BaJUc & de Saint
Grégoire

SAINTE WALBURGE,
Vierge et Abbesse.
Wa lburg
&
Richard
E .(*) étoit fille du faint Roi
fœur de Saint Guillebaud
, de &
Saint Gombaud (b ) r qui travaillèrent avec S.
Boniface à planter la Foi en Allemagne. Elle
naquit dans le Royaume des Saxons-Occiden-
taux , en Angleterre , &
fut élevée dans le
Monaftere de "Winburn, au Comté de Porfet,
où elle prit enfuite fliabit. S. Boniface ayant
prié TAbbeffe Tetta fa coufine , de lui en-
voyer quelques-unes de fes Religieufes pour
répandre en Allemagne la bonne odeur de Jefus-
Chrift, Walburge hit aflbciée à la pieufe Co-
lonie qui partit fous la conduite de Sainte
Liobe ( c ). Elle vécut deux ans dans le Mo-
'. ....

< L. il. c. 19.


i ) celui de Saint Gombaud, Wl*
(a) On
l'appelle par cor- nibaldus.
ruption, Vaubourg, Falbourg, ( c ) Les principales de ces
Avoubourg Waltpurde 4 &c. Religieufes étoient Ste. TecJe,
,

(b) hc nom latin de Saint qui fut oiiie a la tète du Mo-


GuiUebaud eft JTUUbaidia, 5c nafterc de rutzingen , fonde

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Sté. Walèu rge V. À. 421
naftere de Bischofehein
;
auDiocefede Mayen-
,

ce , puis fut élue Abbeffe du Monaftere que
févr.2 5 .
fes frères avoient fondé à Heidenheim , aujour-
d'hui dans le Duché de Wirtemberg. Cette
Ville étoit du Diocefe d' Aichftat ( dj , dont
S. Guillebaud fut facré Évâque par 5. Boniface.
Toutes les paroles &
toutes les aâions de
Walburge portoient l'empreinte de la piété %
de la douceur, &
de la charité. On ne pou-
voit réfifter à l'ardeur de fon zele , foutenue
par la force de l'exemple. C'eft ce qui fit qu'a-
près la mort de Saint Gombaud , arrivée eri
760 , on lui donna une infpeûion générale
fur le Monaftere d'hommes dé Heidenheim
dont il ayoit eu la conduite ; &
cette infpec^
tion lui fut laiffée tant qu'elle vécut.
Saint Guillebaud ayant fait transférer le
corps de fon frère à Aichftat , feize ans après fk
mort f Walburge affifta à la cérémonie. Elle né
furvécut que peu de temps à cette tranflation
f
étant morte le 15 Février 779. Elle avoit paffé
25 ans dans le Monaftere de Heidenheim.
En 870 , on transféra fçs Reliques à Aichftat ^ ,

& on les mit dans l'Églife de Sainte-Croix,


qui a pris depuis le nom de Sainte Valburge.
Il y a à Furnes une partie confidérable des

mêmes Reliques ; &


parce qu'on les enchâflk

par Alheide , fille du Roi furent depuis honorées d'un


Pépia ; Sainte Liobe , qu'on culte public. Sainte Cunihilt
fit Abbeffe de Bifchofchein ; eft encore connue fous les
Sainte Cunihilt tante de Saint noms de Gunthilde & de
Lulle , & Bérathgit fa fille Bilhilde. Voyez la Tkwingia
appellée auffi Bergitis. Les , imprimée i Francfort
Sacra
deux dernières portèrent le en I737*
véritable efprit monaftiquc (H) En Franconie , fur les
dans la Thuringe , où elles frontières de la Bavière.

Ddiij

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4%% Ste. Walburqe y V. A.
.. _ je premier de M*i ^ la fête de la Sainte eft
roarçwk en ce our les Martyrologes de
Vro m
FÉVR i
- 5 "
Flandre , que Baronius a fuivis dans l'Édition
qu il a donnée du Romain. Fumes a partagé
le tréfor qu elle poflecjoit , avec quelques Vil-
les des Pays-Bas & d'Allemagne ; telles que
£nver$ , Bruxelles, , Ârnhem , Cologne , "Wir-
(emberg f &c. On voyoit aufïi autrefois dans
l'Églife de Chrift , à Cantqrbéry , & dans d'au-
pes Eglifes d'Angleterre , des Reliques de
Sainte Walburge , qui y avoient été apportées
d'Aichftat. On en voit encore une Châtie dans
le Tréfor des Reliques du Palais Éleâoral de
JJanqver Uy
a un grand nombre d'E^
glifes dédiées fous l'invocation de notre Sainte
%

px Allemagne , dans le Brabant , dans la Flan^


Jlrc , &: dans la France.La plupart font fa fête
Jç mur de mort , les autres la fQnt le jour
fa

yg la Wnflation de fes Relicuie$.


Nous avpns fix Viçs différentes, de Sainte

Wiilbur^e , qui ont toutes, été publiées par


^enffhenius La première a pour Auteur Wol-
f

tîiart} , Prêtre d'Aichftat , aui écrivoit vers Tan

?cjq. La féconde eft d'Adelhod , dix-neuvieme

kvçqup d'Utrecht , Diocefe dont Hede fait la


a unte , Patronne. On ne connoit point l'Auteur
jje la troifieme. La quatrième vient du Poète
Jvfcdibard. La cinquième de Philippe, Évêque
^'Aichftat. La fixieme d'un Anonyme , qui
écrivit à la prière des Religieufes de Saiqte
^nlburge d'Aichftat, Voyez auffi Raderus ,
Bavai* Sancice, T. 3. p. 4; & Gretfer , de
Çanciis Eyfletunfibus.

9C98QBS
, {«) Vqyex le Cataloguai ver ç»

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S. Alexandre ^Pat. d'Alex. 41 y

XXVI. JOUR DE FÉVRIER.

S. ALEXANDRE,
PATRIARCHE
D'ALEXANDRIE,
.

, de Saint Athanafi , &ei


Tiré il Thiodoret
Poyti Hcrmant 9 TîlUmont , T. 6. pag. 213 &
Z40 ; Dom CciUUr, T. 4.

L'An 326.

Saint Alexandre fuccédaàSaînt


Àchillas dans le Siège d'Alexandrie ,«1313. féVR. 1*.

C'était un homme d'une vie irréprochable,


<Tune doQrine vraiment apoftôlique , plein de
tele , de ferveur , d'affabilité , & de charité
*pour les Pauvres. Il n'ordonnoit que de faints
Miniftres, & les tiroit ordinairement du corps
de ceux qui s'étaient dévoués aux exercices
de la vie folitaire. Il fut fort heureux dans le
'choix des^Évêques qu'il mit en différentes Vil-
les d'Égypte. Le Démon , furieux de voir di-
minuer chaque jour fon empire , par la ver-
tueufe conduite que tenoit Alexandre , & fur-
tout par le diferédit général oh l'Idolâtrie tom-
boit , entreprit de réparer fes pertes , en fufci-
tant une Héréfie qui fappât le Chriftianifme
par fes fondements. Arius, Prêtre d'Ale*an-

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,

424 S. Alexandre 3 Pat. d'Alex.


drie % fut rinftrument dont ilfe fervit pour Te^

FÉVR. 26 x ^cution de fes defleins.


Cet Héréfiarqùe étoit fort verfé dans là coh-
Héréfied'A- noiiîânce des Lettres humaines * &_ dans la
nus
Dialc&ique. Il avoit tout ce qu'il falloir pour lé-

duire un extérieur mortifié ,


, des manières &
infirmantes. Mais dans le fonds Vétoit un hy-
pocrite dominé par l'orgueil , la vaine gloire
-,

l'ambition &
la jaloirfie. Habile dans Part fu-
neite de paroître ce qu'il n'étoit pas , il cachoit
fous une modeftie affeftée un coeur fourbe &
capable de tous les crimes. L'an 300 de Jefus-
T
Chrift , il avoit pris Iç parti du Schifmatique
Mélçcç, Éyêque^ck Lycopolis, contre Saint
Pierre , Patriarche. d'Alçxandrie. U le quitta
enfuite , & parut donner des marques fi fin-
ceres de repentir , que Saint Pierre lui-même
l'ordonna Diacre. Quelque temps après , il ofa
fe rendre l'accufateur de fon propre Évêque ;
& les troubles qu'il excita à l'occafion des Mé-
lcciens, allèrent fi loin, qu'il fut chaffé pour

toujours de l'Églife. Il parut encore rentrer en


lui-même fous Saint Achillas , qui , trom-
pe par de fkufles apparences , l'admit à la Com-
munion , l'ordonna Prêtre , le fit Curé d'un &
des quartiers d'Alexandrie , nommé Baucale.
Comme il avoit prétendu à TÉpifcopat après
la mort de Saint Achillas , il ne put fouflrir
qu'Alexandre l|xi eût été préféré ( 1 ) : auffi de-
vint-il dèç-lors fon plus mortel ennemi. Ne trou-»
vant rien à reprendre dans fes mœurs, il fe
mit à calomnier fa doûrine , à en enfeigner &
une toute contraire , qui anéantiflbit la Divi-
— t
. ,

i 1 ) Thcçdorct. \. 1. Sopratc. I. 1. c. y.

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S. Alexandre 3 Pat. d'Alex. 415
nité de Jefus-Chrift. Il ne la débita d'abord que
dans des entretiens particuliers ; mais fe voyant ,
'
appuyé d'un grand nombre de feâateurs , il
la prêcha publiquement en 319. Il difoit avec
Ebion , Alternas & Théodote , que Jefus-Chrift
n'étoit point véritablement Dieu. A ce blaf-
phême , ilen ajoutoit d'autres qui lui étoient
particuliers , favoir, que le Fils de Dieu étoit
une créature tirée du néant ; qu'il y avoit eu - 1

un temps où il n'exiftoit point ; qu'il étoit ca-


pable de pécher. Il adoptoit encore toutes les
autres impiétés qui fui voient de ces déteftables
principes. Saint Athanafe l'accufe ( 1 ) d'avoir
auffi enfeigné que Jefus-Chrift n'avoit point
d'autre ame que cette Divinité créée ou fub-
ftance fpirituelle faite avant le monde : d'où il

fuivoit que le Verbe avoit foufFert fur la Croix,


qu'il étoit defcendu aux Enfers , &
qu'il étoit
reflufcité des morts. Arius engagea dans fes er-
reurs deux Curés d'Alexandrie , un grand nom-
bre de Vierges , douze Diacres , fept Prêtres f
& deux Éveques.
Colluthus , un des Curés d'Alexandrie , prê-
cha avec plusieurs de fes confrères contre la
nouvelle Héréfie. Le peuple fe partagea. Les
partifans d'Arius furent appelles Ariens ; &
ceux-ci donnèrent aux Catholiques le nom de
Colluthiens. Saint Alexandre vivement touché
du progrès de l'erreur, n'y oppofa d'abord que
cette douceur qui lui étoit naturelle. Il croyoit
que des exhortations diôées par im efprit de
modération pourraient gagner Arius. Plufieurs
Catholiques défapprouverent une telle conduis

(1) De Aivau, Ckr, p. C$j.

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4 16 S. Alexandre , Pat. t>Alex.
te parce qu'ils n'en pénétroiem pas les
,

Colluthus même , par un zele mal


fÉVR. i6
du , en prit occafion de fe féparer dç fon Évê-
que , &
de tenir des aflemblées à part. Heu*
reufement ce Schîfthe ne dura pas , celui &
qui en avoit été Pàuteur revint au centre de
l'unité. Cependant le Pàrti d'Anus groffiffoit
Le 5aînt tous les jours. Le Patriarche voyant donc l*iml"
excommunie tilité des; moyens dôrit il âvoit fidt ufage juf-
*nu*' "qu'alors citaPHéxéfiarque à comparaître dans
,
une Affemblée cômpofée du Clergé d'Alexart-
drie : vint ; mais fur le, refus qu'il fit de
il y
renoncer à fa doftrjne impie , il fut excommu-
nié avec fes feâateurs. La Sentence de notre
Saint fut confirmée par un Concile tenu à
Alexandrie, fur la'fih deTannée 3x0. Ce Con-
çile étoit compofé de 10 1 Évêques ,
qui , iif»
dignés d'entendre Ariùs répéter les blafphêmes,
& y en ajouter de plus horribles encore , di»
rent anathêhie à lui & &
à fes partifans.
Arius reûa quelque temps cache dans Alexai**
«Jrie, Mais ayant été découvert , il prit la fuite»,
& fe retira en Paîeftinè , oîi il gagna Eufebe de
Célarée , Théognis de Nicée , Eufebe de &
Nicomédie. Le dernier lui rendit de grand*
fervices pàr l'afeendarit qu'il avoit fur Tefprit
de Conftantin ( a ) , ou plutôt de Conftantie
fa fœur. Nous apprenons de Conftantin lui-
même, que l'Evêque de Nicomédie étoit un
intrigant , l'empli d'orgueil 6c d'ambition. Un
tel homme étoit feit pour être Héréfiarque ;

(a) Conftantin réfidoit fecttîté de rendre


J
fouvent à Nicomédie c'eft : I Arius,
ce qui donnait à Eufebe la |

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S. Alexandre, Pat. d'Alex. 417
& avec le crédit qu'il avoit à la Cour , il ne
pouvoit manauer de trouver de partifans , ^tvVL *6«
même parmi les honnêtes gens , qui fouvent
£e taillent éblouir par la faveur. Eufebe A- &
rius entretenoient enfemble un commerce do
lettres ; &c l'on convint de part & d'autre ,
qu'Anus fe rçtireroit à Nicomédie. Ce fiit-là 1

qu'il compofa fa Thal'u , Poëme qui n'étoit


qu'un d'impiétés , &c de louanges fede$
tiffu
qu'il fe donnait à lui-même*
. Cependant Alexandre écrivit au Pape Saint
Sylveftre , pour loi rendre compte de la doc- 11 ^ erît au
trine &c de la condamnation d'Arius. Il envoya
éJJLJJ
auffi une lettre circulaire fur le même fujet à thoU<jucs,
fous les Évêques Catholiques. En même temps,
Arius , Eufebe &
plufieurs autres perfonnes lui
écrivirent , pour le prier de lever la Sentence
d'excommunication qu'il avoit portée. L'Em-?
pereur Conftantin fe mêla auffi de cette affaire,
ïl exhorta fortement notre Saint à fe réconci^

lier avec Arius ; &


comme le grand Ofius avoit
toute tà confiance , il le chargea d'aller à Ale-
xandrie , afin de pacifier les elprits , &
de met-
tre firç aux divifions. Le réfultat des informa-
tions que fit l'Évêque de Cordoue, fut qu* Arius
tiioit opiniâtrément la Divinité de Jefus-Chrift,

& qu'Alexandre s'étoit comporté avec tout le


3ele &toute la prudence qu'on devoit atten-
dre d'un digne Pafteur. Quand Ofius fe fut
acquitte de fa commiffion , il partit d'Alexan-
drie pour en aller rendre compte à l'Empereur.
. Il l'informa du véritable état des choies , 6c
lui confeilla d'aflembler un Concile général
qui vu la grandeur des maux de l'Eelife , pour-
voit feul rétablir la paix. Notre Saint avoit auffi
^çrit plufieurs lettres à Conftantin fur la nécef-

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4i8 5- Alexandre, Pat. d'àlex. -

'
fité du Concile ( b ).
JÉVR.26. L'Empereur, convaincu dela folidité des
que lui avoient apportées Ofius
raifons Saint &
Alexandre, travailla efficacement à procurer
leConcile qu'on lui demandoit. Il défigna pour
Concile de ieii eu j e l'Affemblée la Ville de Nicée, en Bi-
c*
thynie, &
envoya aux Évêques des lettres ref-
peôueufes , pour les inviter à s'y rendre en
diligence. Il leur fournit les voitures tout &
ce qui étoit néceflaire pour le voyage. L'ou-
verture du Concile fe ht dans le Palais Impé-
rial 19 Juin 325. LesÉvêques étoient au
, le
nombre de trois cent dix-huit. Plufieurs d'en-
tr'eux avoient généreufement confeffé la Foi.
Les plus illuftres étoient , Saint Alexandre , S*
Euftathe &
Saint Macaire , Patriarches , l'un
d'Antioche, &
l'autre de Jérufalem; Cécilien,
Archevêmie de Carthage ; Saint Paphnuce , de
la Haute-Thébaïde ; Saint Potamon , d*Héra-
clée fur le Nil ; Saint Paul , de Néocéfarée ; S.
Jacques , de Nifibe , &c. Le Pape S. Sylveftre
n'ayant pu venirà caufe de fon grand âge,envoya
des Légats qui préfiderent au Concile en ton
nom ( c ). L'Empereur entra fans Gardes dans

( b ) Rufin dit dans le pre- rantînople.. A&. 18. p. io^f*


mier livre de fon Hiftoire, T. 0" . Conte.
c. 1. que le Concile fut af- ( c ) Ceci eft reconnu par
femblé par l'avis des Prêtres , les Evêques d'Orient , afTem-
tx Sacerdotam fenuntU. Mais blcs à Conftantinople en j 5 U
le troifieme Concile de Conf- (T. f.Conc. p. 337 338). &
tantinople en attribue la con- Les Légats de Saint Sylveftre,
vocation au Pape Saint Syl- étoient , Viton ou Viûor , &
veftre & à l'Empereur Conf- Vincent, tous deux Prêtre»
tanttn. Confiant nus & Sylvef- de r Egltfe Romaine , Ofius, &
ter magnam in Niccâ Synodum Evêque de Cordoue en Ef-
congregabant. Voyez les Àttcs pagne. Ce dernier jouiflott
j

du troiueme Concile de Conf- 1 d'une haute confidératioa

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S. Alexandrê, Pat. d'Alex. 429
le lieu de PAffembléç,
ne s'affit , au rap- & ^—
port dliufebe ( que quand les Évêques
3 ) t
j^y^
l'en eurent prie. Théodoret ajoute (j.} qu'il
n'y entra , qu'après en avoir demande la per-
mlflion aux Êv eques.
On
examina plufieiu*s jours de fuite la
doârine d'Arius, qui fut lui-même entendu.
Marcel d'Ancyre oc Saint Athanafe en décou-

dans l'Eglife d'Occident t the d'Antioche préfida au


& ctoit d'ailleurs fingulie- Concile de Nicée ? 11 eft vrai
rement eftimé de l'Empe- que Facundus ( 1. 8. c. I . &
feur Conftantin. Jpfi ttican I. u.c. 1. ) l'appelle le pre-
Ofius at Hifpanis wninis & mier du Concile ; que Ni- &
fama ctktoitatt infignis , qui cephore ( Chronol. p. 146. )
Sylvejbri Epifcopi Maxim* Ro- lui donne le titre de chef des
rut locum obtintbat
, unà tum Evêques mais ceci ne doit
:

Romanis Prtsbyurii Vitom & s'entendre qu'en ce fens , qu'il


Vinctmio adfuit. Ce font les étoit le premier des Evêques
paroles de Gélafe de Cyzique Orientaux. Théodoret dit 1.
( in Hifi. Cette. Nictn. I. t. c. 1. c. 6. qu'Euftathe ctoit aflis

y T. x. Corn. p. tfj ). La le premier du côté droit.


même chofe eft atteftée par Quant aux Légats du Pape
le Pape Adrien, ( T. 6. Conc. & au Patriarche d'Alexandrie,
p: t8to). Dans tontes les Edi- il paroit par Eufebe qu'ils
tions,du Concile *e Nicte, étoient amis les premiers du
on voit le nom d'Oûus , & côté gauche. D'ailleurs il au-
celui des deux Prêtres » Vi- rait pu arriver qu'il eût été
ton et Vincent , i la tète de plus honorable d'être à la
toutes les Souscriptions. So- gauche , parce qu'on feroit
crate, 1. i. c. 13. les nom- entré par la droite. Quoi-
me auffi les premiers , & qu'il en (bit , voici du moins
avant les Patriarches. Ofius un fait certain. Les Légats
Emjfcçpm Corâuba. Hifpanix, du Pape qui préfiderent au
ità crfdo ut fupcriùs diàum tft. Concile de Calcédoine» é-
Vuo Fbtccntius ,
Presbyuri toient aflîs les premiers du
Urbis Rama. Egypfi AUxandcr côté gauche , au-deflus du
Epifcopus , magnat Antiochia Patriarche d'Alexandrie ; le
SLujlathius.Hierojolymorum Ma' Patriarche d'Antioche fe trou*
cartus 6t. Comment donc
, vant placé à la droite.
Blondel a-t-il ofé avancer ( 3 ) In Vit. Confiant, c. /o.

dans fon livre de la Primauté (4) HOU. I. C 7.


diTsïgli/c , p. it 95 , qu'Eufta-

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43b S.Alexandre, Pat. iïÀLEJt*
i
vrirent toute l'impiété. Saint Alexandre avoit
fêvr. 16. une g ran<le eftime pour le fécond $ il Fa- &
voit amené avec d'Alexandrie, quoiqu'il
lui
Condamna, ne fût encore que Diacre. C'étoit le plus re-*
non d'Arius.
d outa ki e fléa U des Ariens. Il lés réfiita en plein
Concile , &c cela avec une force une iupé- &
riorité qui les couvrirent de confufion. Les
Hérétiques , pour fe fouftraire à Pindignatiort
publique , curent recours à la diflirtiulation ,
& adoptèrent des expreflions en apparence
catholiques. Les Pères du Concile s'en apper-»
çurent , &
déclarèrent , pour ne biffer aucun
fubterfuge à l'Héréfie , que le Fils étoit Con-
substantiel au Pere. Ils inféreront ce mot
dans la formule de Foi qui fut dreffée par Ofius*
& fouferite par tous les Éyêques $ a l'excep-
tion d'un petit nombre qui favorifoient le
parti d'Arius. C'eft cette formule de Foi qu'on
appelle le Symbole de Nicée. Il y eût d'abord
dix-fept Évëgues qui refuferent de la fouferi-»
re : enfiiite ils fe réduifirent à cinq , favoir
Eufebe de Ni comédie , Théognis de Nicée ,
Maris de Calcédoine , Théonas Second , de &
Lybie. Eufebe de Céfaréé , qui avoit rejeté le
mot de Confubfiomid , l'approuva dès Iç len-
demain du Concile. Des cinq Évêques oppo-
fants , Êufebe , Maris 6c Théognis , fe rain
gèrent du côté du plus grand nombre , moins
toutefois par devoir ,
que par la crainte d'être
bannis & dépofés. Il ne s'en trouva donc plus
que deux , favoir , Théonas & Second , qui
refterent ôpiniâtrément attachés à A ri us

(d) L Hiftorien Philoftor- febe de Nicoroédie & Théog-


gc , qui étoit Arien , pré- nis y fes Héros, en difant
tend C t. 1, c. 9. ) cxcufcrEu- qu'ils inférèrent un ioU au

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-

;S. Alexandre, Pat. ïfAlex. 431


-Conftantin les exila dans l'Illyrie avec Anus
& quelques Prêtres d'Égypte. Le Concile re- févr. 16.
çut les Méléciens à la Communion , parce
qu'ils parurent fe repentir : mais ils retombè-
rent enfuite dans le Schifme , plufieurs d'en- &
tr*eux fe joignirent aux Ariens. On fit encore
vingt Canons de difcipline , puis le Concile
fe feprà le 25 d'Août (<r). Avant le départ
des Evêques , Conftantin leur donna un feftin
magnifique &
leur fit de riches préfents.
Saint Alexandre reprit la route d'Alexan-
drie , où les Catholiques le reçurent avec la
plus grande joie. Mais il ne furvécut pas long-
temps à la viâoire que PÉglife venoit de rem-
porter fur l'Arianifme. Il mourut le 26 Février Mo" & S«
Al€xaadrc »
3 26 , après avoir défigné Saint Athanafe pour
fon fucceffeur. Le Martyrologe Romain en
fait mémoire en ce jour.

L'humilité &
la défiance de foi-même ca-
raâérifent le vrai Difciple de Jefus-Chrift. De
là vient qu'il fe porte comme naturellement à
fe fbumettre à toute autorité établie de Dieu ;
& c'eft ce qui fait fa paix , fa fureté , & fa
joie. U trouve dans cette fainte difpofition un
préfervatif contre la préfomption l'orgueil &
ui de tout temps ont enfanté les plus gran-
a.es erreurs. On iàit de quoi l'orgueil eft ca-
pable. Il ne refpire que la révolte & l'indé-
pendance. Un homme aflez malheureux pour

mot qui caufoit la difpute: hypocrites.


de forte qu'ils ne lignèrent ( e ) Les Canons Arabi-
que «ipMifaof , fembUble en ques ont été fauflement at-
fubftance , au lieu de «j«»*jif tribués au Concile de Nicéc.
de U
mime fubfiance. Si le fa iC C'eft un Recueil tire de plu.
eft vrai Eufebe & Théognis
, fieurs anciens Conciles.
étoient deu* fourbes & deux

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43 1 S. Alexanï>b£ , Pat. d'ALêT*
fe dominer par Ct vice , adore fes pro»
laifl'er

près penfées » &y


refte opiniâtrement atta*
ché. En vain la lumierè fait- elle briller fes
rayons t il ferme les yeiix > ou ne les ouvre
point fuffifamment pour être éclairé. La jalou-
iie &c la paflion de contredire entretiennent
le défordre &
le rendent incurable. En pei-
gnant Arius nous avons peint tous les Hé-
rétorques. Apprenons de là à detefter Porgueil
& la jaloufie , dont les fuites font fi fiineftes.
Ah ! fi malheureufetaent nous nourriffons ces
xnonftres dans nos cœurs , travaillons à les étouf-
fer promptement, &
à établir fur leurs rui-
nes les vertus <jui leur font contraires. Ce ne
fera qu'à ce prix que nous deviendrons véri-
tablement çlilciples de Jefus-Chrift , & que
nous mériterons de jouir des avantages qui
font attachés à cette glotieufe qualité.

SAINT

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Saint Porphyre E. 433

SAINT PORPHYRE, «vr. *


É vê que de Gaze.
7W </* /i Vit, écrite avec une grandi fidélité\'
par Marc fon difeiple. Il y a dans la Bibliothèque
du Roi à Paris une Vie MS. de S. Porphyre en Grec, ,

qui na jamais été traduite , & qui parott n'être


quun abrégé de la précédente. Voye^ Fleury 3 7V
S ; Tillemont 9 T. 10 ; & Chajlclain y p% yyy* •

fi,i
-

L'An 420.
Orphyre- naquit Jl Theflalonique en
Macédoine, d'une famille où la nobleue étoit
jointe à de grands biens. Il fut élevé avec
foin dans la piété &
dans l'étude des Belles-
Lettres. La connoiflance parfaite de la littéra-
ture , jointe à celle de 1 Écriture qu'il acquit
depuis, lui fervit merveilleufement à défendre,
la Religion, &
à réfuter lès Païens les Héré- &
tiques qui oferent difputer avec lui. Le défir de
fe confacrer uniquement à Dieu dans la Solitu-
de , lui fit quitter fes amis &
fa patrie , à l'âge de
a 5 ans , c'eft-à-dire , en 378. Il choifit pour le* n retire
lieu de fa retraite le célèbre Défertde Scété en**» * e D <s
Égypte. Après y avoir paffé cinq ans dans tous p£
les exercices de la vie monaftique , il alla vifiter itftine,

les Lieux faints de Jérufalem ,


puis s'enferma
dans une caverne auprès Jourdain. Sa fanté
ày.
fe trouvant épuifée par diverfes maladies , il fut
obligé d'en iortir au bout de cinq ans , de &
fe faire mener à Jérufalem. Là il cha-
vifitoit
Îrue jour les Lieux iaints , à l'aide d'un bâton
ur lequel il s'appuyoit j car il étoit fi foibie f
Ee

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434 Saint Porphyre , E.
-

qu'il n'eût pu fe foutenir autrement. Marc ;


févr, 26.
originaire (PAfie,
qui écririt enfidte fa Vie ,
arriva dans ce temps-là a Jerufalem. II fut ex-
trêmement édifié ue la pieufe affiduité avec la-
quelle Porphyre alloit à l'Églife de la Réfur-
reâion &
aux autres Oratoires. L'ayant vu un
jour monter avec beaucoup de peine les de-
grés de la Chapelle bâtie par Conftantin , il

courut lui offrir fon bras , afin qxi'il s'appuyât


defTus. Mais le Saint le refufa en difant » Laif- :

» fezrmoi, je vous prie. Comme je ne viens


» ici que dans l'efpérance d'obtenir le pardon
» de mes péchés , il n'efl pas jtifle que Ton
» m'aide. La peine que j'ai à monter ces de-
» grés , fervira peut - être à me
rendre Dieu
» propice. » Son extrême ne l'empê-
foiblefle
cha jamais de fatisfaire fa dévotion pour les
Lieux faints. Il participoit aufli tous les jours
à la Table mymque , c'eft-à-dire , à l'Eucha-
riftie. En un mot, il fembloit à le voir, qu'il

ne foufiroit rien , ou plutôt qu'il foufiroit dans


un corps étranger.
Une feule chofe Pinquiétoit ; c'eft qu'il n'a-
voit point encore vendu fon bien pour le dif-
tribuer aux pauvres. Marc fut chargé d'aller à
Theflalonique pour faire cette vente. D revint
à Jérufalem au bout de trois mois , rapportant
au Saint la valeur de 4500 pièces d'or , fans
parler de plufieurs autres Porphyre >
effets.
charmé de voir fon de retour , rem-
difciple
Il eit guér îbrafla tendrement, il fe portoit bien alors , Se
miracuicufc-
jj s 'étoit fait en lui un tel changement , que
mcnt#
Marc pouvoit à peine s'imaginer que ce fut la
même perfonne. Il ne reftôit fur fon corps au-
cune trace de fa première foiblefle : fon vifage
étoit plein , frai* &
vermeil. S'étant apperçu

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Saint Porpwyre, E. 4^
de l'étoimement de fon difcipte fur le rétablif-^^*
fement de fa famé , il lui dit en fouriant : » Ne F £ VR
h (oyez pçint furpris de l'état où je me trouve ;
>» mais admirez plutôt ^infinie bonté de Jtfu$-

» Chrift , qui peut aifément guérir ce que les


» hommes regardent comme incurable. » Et
comme Marc lui demandoit de quelle manière
il avoit recouvré la fanté , il continua ainii :

» Repentant la plus vive douleur , il y a qua*


» rame jours j je me traînai fur le Mont Cal*
» vaire. Ty fus pris d'une foibleffe , pendant
* laquelle j'eus une efpece d'extafe* Il me fem*
» bk>it voir Notre Seigneur attaché à la Croix 4
» & le bon larron fur une autre Croix , à côté
» de lui* Alors je me mis à dire à Jefus-Chrift :
* Sêignepr , fouyeru^-vous di moi dans yotrt
» Royaume. Le Sauveur commanda au bon
» larron de venir à mon fecour*. Celui-ci vint
» à moi , me leva de terre , &
me dit d'aller*
» à Jefus-Chrift» Quand je fus arrivé auprès
h de lui, defcendit de la Croix, 6c me dit i
il

» Prenei ce bois &


gartk^U. J'obéis» Je chargé
h la Crpi# fur mes épaules, &
la porte quel-
» eues p*s. Je revins à moi dans ce moment-
» la ; &
depuis il ne me refte plu* aucune mar«
h que de maladie »•
Ce difeours remplit Març d'admiration.
Frappé beaux exemples de vertu
d'ailleurs des
qu'il avoit remarqués en Porphyre, il réfolut
de s'attacher inviolablement à lui. Une telle
réfolution ne pou voit êtne que fort utile à fon
avancement Ipirituel. Notre Saint étoit en
effet un homme entièrement mort au monde
& à lui-même , &
très-verfé dans la connoif-
lance des voies intérieures de la piété. Il avoit
auffi cette .rare prudence qui eft un dpo de

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4}6Saint P orphtre 3 E.
Dieu & poffédoit dans un degré éminent
,

févr. 226
"
^P™ e Pr ere & de componôion.
^ 1 *

'
Porphyre n'eut pas plutôt reçu ce que Marc
lui avoit apporté qu'il le diftribua aux Pau-
vres de la raleftine &
de l'Égypte. Il oublia
fes propres befoins , & fe vit bientôt réduit à
n'avoir que fon travail pour vivre. Ce fut ce
qui te détermina à apprendre à
faire des ten-
tes. Quant à Marc, gagnoit à copier des
il

Livres, plus qu'il ne lui en falloit pour ful>


fifter. Il voulut engager fon maître à parta-

ger le produit de fon travail ; mais Porphyre


lui dit avec Saint Paul , que celui qui ne tra-
vaillait point ne dtvoit point manger.
L^vêque de Jérufalem , inftruit des vertus
du Saint, crut qu'il feroit utile à TÉglife de
l'attacher au fervice des Autels. Il l'ordonna
H cftor-p êtr
donné Prc- 7 Jt 7
maig© r é lui ',
9 *
j ,
lui confia en
.
& *2* »%
. T
uç< le foin de garder la Croix du Sauveur. Por-
phyre avoit alors quarante ans. Pour avoir
changé d'état , il n'en fvit pas moins auftere
dans fa manière de vivre. Toute fa nourri-
ture confiftoit en un peu de pain bis qu'il
mangeoit avec quelques herbes. Il mêloit un
peu de vin avec l'eau qu'il buvoit * à caufe
de la foiblefle de fon eftomac. Les Dimanches
&
les Fêtes , il fe permettoit l'^fage de l'huile
& du fromage & ; il mangeoit ces jours-là à
midi , au lieu que les autres jours , il attendoit
que le foleil fût couché pour prendre fon re-
pas. Il ne fe départit point de cette règle jus-
qu'à fa mort.
L'Évêque de Gaze étant mort en * 96 , le
Clergé &
le peuple de cette Ville /adrefle-
rent à Jean, Archevêque de Céfarée , leur
Métropolitain , pour lui demander un Pafteur,

Digitized by GoOQle
Saint Porphyre 3 E. 437
Jean écrivitau Patriarche de Jérufalem pour ^=
le prier de lui envoyer Porphyre , prétextant févr.
d'avoir befoin de le confulter lur quelques paf-
fages de FÉcriture Sainte. Le Patriarche con-
fentit au départ de Porphyre , mais à condi-
tion qu'il reviendroit dans fept jours. Il lui
ordonna donc de fe rendre à Céfarée. Cet
ordre imprévu troubla d'abord le Saint , mais
il obéit en difknt : » Que la volonté de Dieu
» (bit faite. « Le matin il dit à Marc : » al-
» Ions , mon frère , allons vifiter les Lieux
h faints , & adorer la Croix du Sauveur : nous
» ne les reverrons de long-temps. « Comme
Marc n'entendoit point ce que fignifioient ces
paroles , il continua ainfi : » le Seigneur m'eft
h apparu la nuit dernière , &
m'a parlé de la
» forte : Rendez le tréfbr de la Croix qui vous
» a été confié : je veux vous donner une épou-
» fe , qui , à la vérité , eft pauvre paroît&
» mépnfable , mais qui eft recommandable
*> par fa piété & fa vertu. Ayez foin de la
» bien orner ; car quoiqu'elle loit dans un état
» humiliant , elle eft ma fœur. Voilà , ajouta
» le Saint, ce que Jefus-Chrift m'a révélé la
» nuit dernière. Je crains bien d'être chargé
h des péchés des autres, tandis que je tra-
» vaille k expier les miens : mais il faut obéir
s» à la volonté de Dieu. » Porphyre , accom-

pagné de fon difciple , vifita enfuite les Lieux


faints. Il pria long-temps devant la vraie
Croix , les yeux baignés de larmes , puis l'a-
yant mife dans fon étui d'or , il le ferma , &
en porta les clefs au Patriarche, auquel il
demanda fa bénédiâion. Il partit le lende-
main avec Marc & trois autres perfonnes.
Entre elles étoient Barochas ,
qui s'étant at-
-w-i • • •

L e uj
438 Saint Porphtrr 3 El
* taché au Saint, en reconnoiflance de ce qu'il

*ÉVK z6 1 * yoit P" 5 fQm ^ c l lt * dans une maladie , a voit


fait fous fa conduits , de grands progrès
dans la vçrtu,
Notre Saint & les perfonnes qui Paccom*
pagnoient arrivèrent à Céfarée un famedi au
,

loir. L'Archevêque les retint à fouper chez


lui. Le repas fini , on s'entretint de chofes
fpirituclles , & Pon alla repofcr jufqu'à l'heure
de l'Office de la nuit. Le lendemain , l'Arehevê-*
que dit à ceux de Gaze de fe faifir de Por-
tlàqus
Gaze,
% phyre , afin qu'il Pordonnât Évêque ce qui
fut fait. Pendant la cérémonie , le Saint ver-
:

foit un torrent de larmes, l'on eut tou- &


tes les peines du monde à le confoler. Il af-
fifta à l'Office du Dimanche , & refta enco-
re le lendemain à Céfarée. îl prit enfuite la
route de Gaze , oii il ^arriva le mercredi au
foir. Il étoit très fatigue
,
Païens parce cjue les
des Villages , informés de l'arrivée prochaine
de PÉvôgue , avoient tellement gâté &c em-
barrafle les chemins , qu'ils étoiçnt prefquÇ
impraticables,
Cettç même année , le pays fut affligé d'une
grande fécherefle. Les Infidèles en attribuè-
rent la caufe à l'arrivée du nouvel Évêquô
des Chrétiens. Ils prétendoient quç le Dieu
Marnas avoit prédit que Porphyre feroit le
fléau de leur Ville. Marnas étoit le nom de
fldole que les Gazéens adoroient, L'Empereur
Théodofe aVoit ordonné qu'on en fermât le
Temple , n*ayant pas voulu le faire détruire f
parce que c'étoit un chef-d'œuvre d'Architec-
ture. Les Gouverneurs permirent enfuite au*
Païens de le rouvrir. Comme il n'étoit point
tombé de pltu> pendant les deux premiers

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Saint Porphyre, E. 439
mois qui fuivirent l'arrivée de notre Saint,
les Idolâtres s'affemblerent dans ce Temple , jtWi. 16,
offrirent des Sacrifices , & adrefferent mille
fupplications à leur Dieu Marnas , qu'ils ap-
pelloient le Maître de la pluie. Ils firent les
mêmes cérémonies fept jours de fuite , & tou-
jours (ans fuccès. Déjà la féchereffe commen-
çoit à caufer la famine. Cependant Porphyre
ordonna un jeûne aux Chrétiens ; lorique &
la nuit fut venue , il la pa£a avec eux dans
des prières ferventes. Le lendemain , ils allè-
rent tous en Proceffion à l'Églife de Saint Ti-
mothée oîi repofoient les corps de Saint
Meuris Martyr , &
de Saint Thée Confef-
feur. Ils étoient au nombre de deux cent qua-
tre-vingt , tant hommes que femmes , en- &
Us reprirent enfuite le chemin de la Ville ;
fants.
mais les Païens en avoient fermé les portes
pour les empêcher d'y rentrer. Porphyre &
les Chrétiens ne perdent point courage : ils
implorent la mifericorde divine avec une
nouvelle ferveur , &
bientôt leurs prières
pp|ye ^
font exaucées. Le Ciel fe couvre de nuages , racuicufc.
& il tombe une pluie abondante. Les Païens

frappes de ce miracle , ouvrent les portes de


la Ville , & fe mettent à çfier : » Le Chrift
» a vaincu ; lui ieul eft Dieu ». Ils fe joignent

aux Chrétiens , & les fuivent à l'Églife , pour


y remercier le Seigneur avec eux de la grâce
qu'il venoit d'accorder. Il y en eut cent foixantç-
leize qui fe convertirent. Le faint Évêque les
inftruïut , .& leur donna les Sacrements 4e
Baptême &
de Confirmation. Il s'en convertit
encore cent cinq autres avant la fin de la même
année. Quelque temps après , une femme
Païenne, aùi étoit en travail d'enfent depuis

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44° Saint P orp bvre ,

s fept jours ayant été miraculeufement détl*


,

F£VR« 16 4 vr^e P ar Porphyre , renonça au culte des Ido-


les , avec toute fa famille , compofée de foi-
xante-quatre perfonnes.
Cependant la fureur des Idolâtres croiflbit
*
à melure que le nombre de Chrétiens aug-
'
mentoit. Les derniers étoient exclus de toutes
*
les charges , &
fe voyoient fouvent infultés
de la manière la plus indigne. Porphyre, croyant
de ion devoir <fintereffer la puif-
ou'il étoit
lance temporelle à la caufe de J. C. eut recours
Il fait un à la proteâion de l'Empereur. Il fît partir Marc

fondifciple , pour Conitantinople , où il le joi-


Coaftautino-
pie pour lé gnit peude temj>s après avec Jean , Archevêgue
bien «le il* de Céfarée , fon Métropolitain. Saint Chrylof-
glife* -tome 9 auquel ils s'adreflerent , les reçut avec
<joie, &
les recommanda à l'Eunuque Amantius,
*
qui , rempli de zele pour la gloire de Dieu ,
les préfenta à l'Impérafrice , auprès de laquelle
*
il avoit beaucoup de crédit. La Princefle leur

donna mille marques de bonté, leur promit


de s'employer pour eux , & leur demanda
dont elle éprouva
le fe cours de leurs prières ,

féfficàcité au bout de quelques jours , en ac-


couchant heureufement d'un fils. Porphyre &
Jean lui ayant fait une féconde vifite , elle
voulut qu'ils la marquaient du figne de ia
Croix avec l'enfant dont elle étoit devenue
-mere. La cérémonie du Baptême de fon fils
*
( a ) lui parut une circonstance favorable
<pour obtenir de l'Empereur fon mari , ce que
les deux Evêques demandoient. Elle ne fe

( a ) U fut depuis Empe- dofe


1 le jeune,
reui foui lt nom de Théo-

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Saint Porphyre , E. 441
trompa point. L'Empereur fit expédier un or-
<lre pour la démolition des Temples que les j^vr,
ife
Païens avoient à Gaze ; &
l'exécution de cet
ordre fut confié à Cynégius , Chrétien fort
-zélé pour la Foi. Les deux Evêques , après
avoir célébré la Fête de Pâque à Conftanti-
nople , prirent congé de l'Empereur d,e &
l'Impératrice, qui leur firent de riches préfents.
Lorfqu'ils furent arrivés en Paleftine, &
ue lesChrétiens furent qu'ils approchoient
3 c Gaze , ils allèrent au-devant d'eux avec la
Croix , en chantant des Pfeaumes. 11 y avoit
dans un Carrefour une Statue de marbre , con-
iàcrée à Venus , &
pofée fur un Autel auffi
•de marbre. Elle étoit devenue fort célèbre

Ear le concours des jeunes filles qui venoient


1 confulter fur le choix d'un époux. Mais les
mariages , contraâés en conféquence des pré-
tendues réponfes de la Déefle, avoient û
fouvent mal réufli , que plufieurs Païens mê-
mes n'y ajoutoient plus de foi. Les Chré-
tiens, précédés de la Croix, ne furent pas
•plutôt devant l'Idole, qu'elle tomba d'elle-mê-
me & fe brifa. Cet événement fit une tellç
impreffion fur les efprits des Idolâtres, que
trente-neuf d'entr'eux fe convertirent fur le
champ. ;
f

Cynégius arriva à Gaze, dix jours après


le Saint. Il étoit accompagné d'un homme
-Confulaire , d'un Commandant , d'une nom-
ire ufe efcorte de Soldats , &
des Magiftrat$
du pays. Les ordres de l'Empereur ayant été . .

Jus aux Gazéens , il commanda qu'on les mît des xempS


fur le champ en exécution. On réduifit donc des idoles à
en cendres les Temples du Soleil , de Venus , Gm«*
d'Apollon, de Profçrpine, d'Hécate, de la

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44* S AINT P ORPHYRE, E.
Fortune, &
de Marnas. Le Marnion , ou tem*
*ÊVR e ^ e Marnas , qui étoit le principal , bru-
zs P'
la pendant plufieurs jours. On fit eniuite dans
les maifons une exafte recherche des Idoles *
qui furent toutes jetées dans des lieux immon-
des. Quant aux Livres oui traitoient des cé-
rémonies magiques &
fuperftitieufes, ils fui-
rent tous coniumés par les flammes. Plufieurs
Païens demandèrent le Baptême ; mais Por-
phyre , avant de leur adminiftrer ce Sacre-
ment , voulut s*affurer de la fincérité de leur
converfion* Il les admit au Catéchumenat , &
leur fit des infirudions auffi folides , qu'édi-
fiantes.
On bâtit à l'endroit oîi avoit été le Tem-
ple de Marnas une Églife magnifique , fur
,

un deflein fait en forme de Croix , que l'Im-


pératrice Eudoxie avoit envoyé. Cette Prin*
cefle envoya auffi de Conftantinople du mar-
bre & des colonnes d'un «pand prix. Le Saint
Évêque voulut que le marbre tiré des débris
du Marnion , fervît à paver la place qui de-
voit être devant TÉglife. Par-là il humi-
lioit le Paganifme , en fkifant fouler aux pieds
des hommes &
même des animaux , ce que
les Idolâtres avoient regardé comme fàcré.
Quand nétoyé , Porphyre or-
le lieu eut été
donna un jeûne. Le lendemain > on s'aflem*
Ma dans l*Eglife , d'où l'on partit proceffionet
lement , en chantant le Vmiu , txulttmus Do-
mino y &d'autres Pfeaumes, dont chaque
Verfet étoit terminé par VAltduia. Lorsqu'on
fut arrivé , on creufa les fondements, Tous
les Chrétiens /empreffoient à donner des mar-
ques de leur zele , en apportant des pierres
« les autres matériaux. Tout ceci fe paffoit

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Saint P o rphy re 3 E. 443
en 403 Sur
. ces entrefaites , on reçut de PIm- if

pératrice trente colonnes , dont deux étoient féVR. i6«


brillantes comme des Émeraudes. Enfin . l'Égli-
fe fut achevée au bout de cinq ans ; &
Saint
Porplwre en fit la Dédicace 14 jour de Pâ-
que. Le même jour, il diftribua des aumô-
nés confidérables aux pauvres. Il fembloit que
la circonftance de la cérémonie fut pour lui
un motif de donner avec profufion. On ap+
pella la nouvelle Êglife Eudoxienc , parce <nie
l'Impératrice Eudoxie en avoit fourni le deflein,
& ravoit fait bâtir à fes frais.
Notre Saint paffa tranquillement le refte de
fa vie dans les fondions du facré Miniftere :
il avoit la confolation de voir chaque jour di-

minuer le nombre des Idolâtres ; mais fa joie


ne pouvoit être parfaite , tant que Jefus-Chrift
n'étoit pas connu de tous. Dans fa dernière
maladie , U fit fon teftament ipirituel , où il
recommandoit tendrement à Dieu fon Trou-
Mm ,

*
peau. U mourut le 16 Février 410 , à Tâge
d'environ foixante-fept ans, Il eft honoré en ce
jour par les Grecs & oar les Latins. Le pieux
Auteur de fa Vie , la finit ainfi : » Il eft main-
h tenant dans le Paradis de délices. Il inter-
* cède pour nous avec les Saints , dont les
» prières attirent fur nous les miféricordes dç
»Diçu>t,

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444 Saint Victor
FÉVR. 26.

SAINT VICTOR
d'Arcis sur Aube*
en Champagne.

S Aint Vi&or , vulgairement appelle Saint


Viclre ou Saint Vitre 9 fortoit d'une famille
confidérable du Diocefe de Troyes , en Cham-
pagne. Il montra dès fon enfance les plus
heureufes difpofitions pour la verni. La prie-*
re , le jeûne &l'aumône étoient fes délices. II
s'appliqua avec fuccès à Fétude de l'Écriture
Samte , &embrafla l'État EccléfiafHque. Mais
l'amour de la retraite le fit renoncer aux fonc-
tions extérieures du Miniftere, pour aller vaquer
à la contemplation dans la Solitude. Ses progrès
dans ce faint exercice furent fi rapides , que
fon ame étoit continuellement unie à Dieu. II
reflembloit moins à un homme qu'à un Ange
ïevêtu d'un corps mortel: auffi fut-il hono-
ré de fon vivant , du don des miracles. Il
mourut dans le fixieme ou le feptieme fiecle
à Saturniac , appellé aujourd'hui Saint Vitre
à deux lieues d'Arcis , dans le Diocefe de
Troyes. On bâtit une Églife fur fon tombeau**
En 837 , on transféra fon corps à l'Abbaye
de Montier-Ramey , qui efl à quatre lieues
de Troyes. Cette Abbaye , qui appartient
aux Bénédi&ins , pofledipi encore ce précieux
tréfor.
Saint Bernard compofa un Office de Saint
Viftor, à la prière des Religieux de Montier-

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Saint Victor. 445
Ramey ( a
compofa aufli deux Panégy-
). Il

riques en l'honneur du même Saint , dont il


y£vk. 26.
parle ainfi en un endroit ( 1 ). Viâor 9 pla-
» cé dans le Ciel , contemple Dieu à décou-
» vert. Il nage dans un océan de délices mais :

n il s'occupe encore de nous. La terre des


» Saints qu'il habite , n'eft point une terre
» d'oubli. Le Ciel ne refroidit point les cœurs.
» Il les rend au contraire &
plus tendres &c
» plus compatiflants. Il communique une nou-
» velle activité à leurs affeftions. Les Anges f
» pour voir la face du Pere célefte , n'en vo-
» lent pas moins à notre fecours. Comment
» donc lerions-nous oubliés de ceux qui ont
» été femblables à nous , &
qui ont paffé par
»les miferes fous le poids defquelles nous
» gémiffons ? Non , non Je fais que les JuJIes
:

» attendent que je reçoive la ricompenfe (i ).


» Viâor n'eft point comme l'Échanfon de Pha-
» raon , qui ne penfa plus à Jofeph lorfqu'il
» fut forti de la pnfon. Il n'a poipt pris la Cou-
» ronne de gloire , pour fermer fes entrailles à
»'nos maux. »
Voyez les deux Panégyriques de S. Bernard y
& Fanciene Vie de notre Saint ^ publiée par
Henfchénius. Il paroît par cette Vie , que Saint
Viûor n'a jamais été Moine.

{a) Cet Office a été im- Edit. nov.


prime parmi les Ouvrages ( 1 ) Serm. 2. p, 966.
às. Saint Bernard. f>, . (1) Pf. CXU. S.

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446 Saint t i a ndr e , £.

XXV U. JOUR DE FÉVRIER.


SAINT LÉANDRE,
ÊVÊQUE DE SÊVILLE.
Tiré de Saint Ifidore de Sivillt , de Saint Gri-
moire &
U Grand, de Saint Grégoire de Tours 9
Hift. royei FUu*y t
1. 5. 34, 3* & 3<>
Dont Mabillon , Sec* 1. Ben. 6* 22oaz Callier «

L'An 596.

.
3j!ÉANDRE naquit à Carthageiie en Ef-
pagne de parents très-diftingués par leur
,

naiflance. Il eut pour frères Saint Fulgence,


Eyêque , d*Éciia &
Saint Ilidore , qui lui fuc-
ceda dans Siège de Séville. Il eut au/fi une
le
fœur , nommée Florentine , qui fit à Dieu le
facrifice de fa virginité. Léandre , étant encore
fort jeune , fe retira dans un Monaftere , où
il pafla plufieurs années. L'application qu'il

donna à l'étude & à l'accompliflement de tousy


fes devoirs
, fit de lui un parfait modèle de
fdence &
de fainteté. L'éclat quefon mérite
répandoit de tous côtés , attira les yeux fur
lui; &, après la mort de TÉvêque de Séville,
on le choifit pour gouverner TÉglife de cette
Ville ( a ). Le changement d'état n'en apporta

i
" —
( a ) L'Églife de Séville a te par la beauté de fa ftruc-
toujours eu le titre de Mé- ture 8c fa magnificence , iur
tropole depuis le troificme toutes les Eglifes d'Efpagnc.
ficelé. La Cathédrale l'empor-

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Saint Lèandrr y E. 447
point dans fa manière de vivre. II ne relâcha
rien de fes auftérités , quoiqu'il fut chargé de
p^y^ 17,
la conduite d'un Peuple nombreux , du foin &
de pourvoir aux befoins de prefque toute
FÉglife dïfpagne*
Ce Royaume étoit alors fous la domination
des Vifigoths ou Goths Occidentaux , qui
s'étoient d'abord établis en Languedoc , puis
en Efpagne , vers l'an 470 ( b ). Ces Barbares ,
prefque tous Ariens , répandirent le poifon de
leurs erreurs dans les lieux qu'ils conquirent ;
& il y avoit
cent foixante-cÙx ans que FEfpa-
gne en étoit infeâée
,
lorfque Léandre fut
élevé fur le Siège de Séville. La vue des déf- Son 2çIé
ordres caufés par FHéréfie toucha vivement contre l'A-
ie faint Évêque. Il employa d'abord les prières rianifine.
& les larmes auprès de Dieu , qui peut feid
convertir les cœurs , puis fe mit à travailler
de toutes fes forces à rétablir le règne de la
vérité. Le fuccès répondit à la vivacité de fon
zeie ; de toutes parts on ouvrit les yeux , &
l'Arianifme ne comptoit prefque plus de fec-
tareurs. La viôoire que PÉglife venoit de renw
porter fur le Démon, rendit furieux Lévigilde,
Roi des Vifigoths. Il fit fentir à notre Saint
les effets de fa colère , &
le condamna à TexiL
U étoit fur-tout outré de la converfion d'Her-
ménigilde fon fils aîné , &
l'héritier de fa Cou-
ronne. Aufli l'année fuivante , ce malheureux
Prince devint-il la viâime d'un pere barbare,
qui le condamna à mourir , pour avoir refufé
de recevoir la Communion des mains d'un

( h ) Us payèrent les Alpes I foit en Italie les Ofl r0 gotl*$


tandis que. Thçoderic ctablif- 1 ©u Goths Orientaux,
448 Saint Léandre 3 E.
Evêque Àrien. Lévigilde ne tarda pas à fe re-
tÉVIU 27. Pcntir de ce qu'il avoit fait ; pour appaifer &
les remords de fa confcience , il rappella le
fàint Evêque de Séville. Etant enfuite tombé
dans la maladie dont il mourut , il envoya
chercher Léandre , &
le chargea d'élever dans
la Religion Catholique fon fils Récarede , qui
devoit lui fuccéder. Il étoit naturel de croire
que de fi belles difpofitions porteroient le Roi
à abjurer l'erreur mais il eut la foiblefle d'y
:

refter attaché , de peur de choquer ceux de


fes fujets qui étoient encore Ariens.
Récarede , inftruit par les foins de Léandre,
devint un fervent Catholique ; lorfqu'il fut &
monté fur le Trône , il parla avec tant de
fagcflc des motifs de fa converfion , dans une
conférence qu'il eut avec les Évêques Ariens,
qu'il les ramena à l'Orthodoxie , plutôt par la
iolidité des fes raifons , que par fon autorité
royale. Aiofi fe convertit tout ce qui reftoit
d'Ariens parmi les Vifigoths. Les Sueves
pervertis par Lévigilde , rentrèrent aufli dans
l'unité. Ce fiit un grand fujet de confolation
pour PÉglife entière , de voir les abondantes
bénédiûions que Dieu verfoit fur les tra-
vaux de notre Saint. Le Pape Saint Grégoire
le Grand en reflentit la joie la plus vive ;
il écrivit à Léandre pour le féliciter des pro-

diges qui s'étoient opérés pas fon miniftere.


Notre Saint ne le borna pas au rétablifle-
ment de la vraie Foi ; il travailla encore à
corriger les abus , & à nourrir la ferveur des
Fidèles. Delà ces fages Règlements du Concile
de Séville qu'il affembla en 590 , &
dont il
fut l'ame & le chef. Il aflïfta auffi au troifieme

Concile de Tolède , qui fit vingt-trois Canons


pour

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Saint Leandre,E. 449
pour arrêter cours des maux occafionnés
le
par rAriaruTme. Il étoit défendu par un de ces
rtVR% X1%
Canons, aux Évêques aux Prêtres ?
aux &
Diacres qui avoient abjuré fHéréiie , dTiabi*
ter dans la même chambre , i\ cela étoit &
poflible , dans la même maifon que leurs fem-
mes ( 1 ). Un autre ordonnoit de tenir la main
dans les différents Diocefes , à l'exécution des
anciennes Règles de l'Eglife touchant la péni*
tence ( c )•
Comme Saint Léandre étoit un homme cfo*
raifon pas étonnant qu'il ait mis tout
, il n'eft
en œuvre pour infpirer l'amour de la prière à
tous en général , mais fur*tout aux Religieux
pour lelquek elle eft doublement un devoir
mdifpenfable. Il écrivit fur ce fujet une lettre
à fa lœur Florentine , où l'on trouve d'excel-
lentes inftruôionsfur le mépris du monde, &
fur l'exercice de la prière. C'eft cette lettre
qu'on appelle fa Rtgie monaftique. Il s'appliqua
enfuite, pour perfeâionner l'ordre qu'on doit
garder dans l'Office divin , à réformer la Li-
turgie de l'Eglife dTEfpagnc ( d )• Il fut ordon-

\ Conc. t\ j k p* 998»
( 1 ) tué par Saint Pierre» Les cé-
(c) Le pieux Cardinal rémonies & la difeipline des
d'Aguirre a donne une (a* mêmes Eglifes avoient une
vante Diitcrtation fur ce Tu- origine Romaine. Ccft un
jet. VU. Dijf. S. in Conc. Hifp* tait dont on peut fe con-
{d) L'Efpagne reçue dt vaincre par la lecture de leurs
Home les premières lumiè- anciens Conciles. Les Goths
res de la Foi , comme nous tubftituerent à la Liturgie de
rapprenons de la lettre du Rome, celle qu'Uphilas avoic
Pape Innocent 1 à Décen- compofée d'après les Litur-
tius. Et c'eft pour cela que gies Orientales. On croit que
Saint IUdore dit(/. #. c. tj. Saint Lcandre en fit une nou-

tid. Offic. ) que l'Omce des velle d'après ces deux premiè-
F-glifcs d'JLfpagnc a été insti- res ,
6c d'après celle ^es Gau-

Ff

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450 Saint Lé an d r e , E.
* né dans cette liturçe , comme il Pavoit été
FÉVR. déjà par le III Concile de Tolède ,
que , con-
17.
formément à ce qui fe pratiquoit chez les O-
rientaux , on
Symbole de Nicée à la
liroit le
Mefle , pour faire une déclaration exprefle
qu'on déteftoit FArianifme. Peu de temps a-r
près , cette pieufe coutume pafla dans l'Eglife
Romaine , ainfi que dans les autres Eglifes
d'Occident.
Notre Saint , vers la fin de fa vie , fiit affligé

les. Saint Ifidore & Saint celles des Orientaux* Voye»


lldéfbnfe lui donnèrent de- fa Sfana Sagrada, T. }. *Dt(Tm

puis un nouveau degré de de la Mijfa antigua de Efpana


9
perfection. L'Efpagne ayant p» 198 , &c. Mais quoi*
paffé fous ladomination des que ces Liturgies euflent en-
Sarrazins ou des Arabes , le* tr'elles beaucoup de confor^
Chrétiens de ce Royaume mité, elles avoient pourtant
furent appelles mixti Arabe* , des différences confidérablos
«feft4-dire, Arabes milds , d'où en quelques points. Nous ap»
leur Liturgie prit le nom de prenons ceci d'une lettre qug
Mo\arabi(fut. Elle fit place à le P. Burriel, favant Jéfuite*
celle de Rome on-
dans le a donnée fur les monuments
zième & dans le douzième littéraires trouvés en Ef*
fieclcs. Le Cardinal Xi menés pagne. On puifera fansdou*
rétablit la Liturgie Mozam- te de grandes lumières* fut
bique dans une Chapelle de la cet article , atnii que fur plu*
Cathédrale de Tolède on l'y -, fours autres particularités;
fuit encore dans la célébration concernant l'antiquité Ecclé*
de tous les Offices de l'an- fiaftique d*Efpagne , dans la
née. Elle eft auffi en ufa^c collection des Manufcrits go*
dans fept Eglifes de la même thiques , que le P. Florès c
Ville , mais feulement pour promife au Public. Les eu*
le jour de la fête du Patron. ricux confulteront auffi avec
Voyez le P. le Brun , Liturg. nouvelle Edition de
plaifir la
T. S. p. 2J2. toutes les Liturgies des Egli-
Le P. Florès penfe que la fes Chrétiennes , que MM.
Liturgie de Saint Léandre Affémani vont donner à Ro-
n'étoit point différente de la me en 1 5 Vol. in folio. L*
Mozambique , & qu'à l'ex- Liturgie Mozambique a été
ception de quelques Rits de imprimée à Rome in folio
g
peu de conféquenec , elle par les foins du P. Lefley-^
n'avoit nen de commun a ver Jéfuitc Ecoffois. . --• „
|

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Saint Lèanvre 451
ac ûivenes infirmités , entr autres ae la goutte.
Ilfuccomba enfin , & mourut le 17 Février
^
596 (*).

Le mépris dû inonde qui ftôcis eflî ïi èx^ref-


fiément recommandé par l'Évangile > 8c que S.
Léandre pratiqua d'ùne fhatiiefe 11 parfîutÇ, eft
le fondement de la vie* fpirituelle. Mais ce
précepte de méprifer le monde a beaucpup
plus d'étendue , que la plupart des Chrétiens
ne s'imaginent. On ne l'accomplit qu'en vivait
dans un entier détachement ,de Mates les xhfr
fes ctéées. San* cefe* il éït impoffiblc de par-
venir à cette union parfaite avec Dieu , çà
quoi conftfte la véritable {àinteté. Ce mépris
du monde eft d'une obligation encore plus
étroite pour tous ceux -qui font déviftiés par
état au fervice du Seigneur. Si cette véri>
té étoh profondément gravée dans l'eiprit 6i
dans le coeur des EccléiWîiqties des Reli4 &
gieux , on ne les vexroit pas fi fou Vent dcsho*
noTer leur Profeffion par une vie profane &£ .

quelquefois fîcandaleufe. UÉdife auroit la corb


folation de retrouver des Apôtres dans te Giferi
gé , des Arftoines , dés Benoits &
des Bernards
dans le Ck>ître* La fâinteté y les prières Sfc/teii
exemples des tins &
desautres feraient au Ciel
une douce violence > en attireroient les grâces
fur la terre , &
raniroeroient cet efprit de Foi p
dont la corruption des mœurs entraînera bien*
tôt la ruine entière,

(€ ) On ne peut plus éou \ porté» fit D. AtaWkmpbujf


ter de la certitude de cette I la cooft&er*, , n
<iate,aprfc ta preuves ap i ,

%
- -

Ffij
35* SS. Julien t Chronion , &c.

févr.x7.
LE MÊME JOUR.
LES SAINTS MARTYRS
JULIEN, CHRONION
ET BESAS.
K

IL' Édit porté contre les Chrétiens par


l'Empereur Dece , répandit la terreur dans la
Ville d'Alexandrie. Tous les Difciples de Jefus-
Chrift ne furent pas fidèles à leur devoir. II
s'en trouva parmi les Riches &
les Nobles qui
trahirent leur Foi. On voyoit pourtant à la
pâleur &
à la crainte de quelques-uns de ceux
qu'on menoit devant les Idoles , qu'ils n'avoient
le courage ni de facrifier , ni de mourir pour
leur Religion. La défertion ne fut cependant
pas générale. Plufieurs Chrétiens fe montrè-
rent par leur confiance véritablement dignes
du nom qu'ils portoient. De ce nombre furent
Julien , Chromon & Befas.
. Julien étoit un vénérable vieillard , à qui les
douleurs de goutte avoient ôté le pouvoir
la
de marcher &
de fe tenir debout. Ihroiifefla
généreufement la Divinité de Jefus-Chrift
ainfi que Chronion l'un de feé ferviteurs. On
les lia tous deux fur des chameaux pour les

f>romener ignominieufeme&t dans les rues d'A-


exandrie. On les fouetta enfuite cruellement 9
puis on les jeta dans le feu , où ils confomme-
*ent leur fàcrifice. Un foldat , nommé Befas
qui ne les avoit point quittés pendant qu'on
les conduisit par la Ville , &
qui les avoit

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S. Tbalèlèe , Solitaire. 45 3
fltème garantis des outtages d'une populace in-
folente , fut arrêté comme ennemi des Dieux. févr. 17.
Sa fermeté à confefler fa Foi , rendit le Ma-
giftrat furieux. Voyant l'inutilité de fes mena-
ces , & défefpérant de pouvoir vaincre le
Martyr , il le condamna à perdre la tête. Nos
trois Saints font nommés en ce jour dans 1*
Martyrologe Romain.
Voyez Saint Denys d'Alexandrie , cité par
-
Eufebe, L 6. c. 41. Éd. Vatcf.

S AI NT THALÉLÊE,
*
Solitaire» x

CE
tira fur
homme , qui étoit de Cilicie , fe re*
faint
une montagne de Syrie près de la Ville
4e Gabales , pour ne converfer qu'avec Dieu*
H vécut dix ans renfermé dans une efpece de
cage de bois , oh il étoit fi gêné qu'il ne
pouvoit fe tenir debout. Théodoret l'ayant
vu en cet état , lui demanda pourquoi il avoit
choifi un pareil genre de vie. » Ah t dit le
» faint Pénitent , je punis mon malheureux
h corps , afin que Dieu voyant ce que je fou£*
» fre pour mes péchés , il me les pardonne , ou
h. que -du. moins il diminue la rigueur des tour*
» ments exceffifs auxquels j'ai mérité d'être
h condamné dans l'autre vie. » Saint Thalélée
floriiToit vers l'an 480 ( a ).

.
(a) Jean Mofch , dans (on I tre Thalélée, au/fi CiKcien*
Pré fpirittul , parle d'un au- 1 mais plus jeune d'un ixecle
Ffiij

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4î 4 & Galmieà y Serrurier.
Voyez Théodoret, Philat. c.z8 ; ôcles M&*
rtva.17. **** ^ Grecs.

SAINT GÀXMIER,
SERRURIER,
PUIS S O U. S-D I ACRE
à Lyon.

13 A ld o m F r ; vulgairement appelle CW-


mUr 9 naquit dans le Forez. Il quitta fa patrie
pour fe retire* à Lyon J où ihexerça d'abord
le métier de Serrurier. Il fan&ifioit fon travail
par une. parfaite fbiuniflion à la volonté de
Dieu , p^r Pexercicç de là prière ^ par la. &
pratique des plus grandes mortifications. Tous
ffes moments de foifir étaient employés à des
pîeufes leftures &
à d'autres bonnes œuvres.
Il aimoit fingulierement les pauvres, leur &
difrribùoit le produit de fon travail. Quelque-
fois lui arriva de leur donner jufqu'à fes ou-
il

tilspour foulager leur mifere. Son mqt favori


,

Àoit, qu'iï fàlloit toujours undre grâces a Dieu


un nom dt notre $tign*ur.

<jne notre Saint. |I dit qu'il yenoictu le viûier : •» £leu-


6o ans dans la Solitude ,
jjafla »» rons , mes frères « ce temps
uniquement occupé de la priè- m ne nous eil donné par 1*
re &des exercices de la plus m bonté divine , que pour
atrftere pénitence pleurant
, n faire pénitence. Malheur à
prefqus fans cette comme un h nous , û nous en perdons
autre Arfcne. Pour toute inf- >» nn inftant. Voyec le Pré
fru&oit , U difoit à ceux qui fairiuul , c. p. 9jz.

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S\ GalMier , Serrurier. 455
Vivence , Abbé de Saint Juft , puis Arche-
vêque de Lyon , l'ayant vu dans l'Églife , fut F £ VR m
extrêmement frappé de la ferveur avec laquelle
il prioit Dieu. Mais il le fut encore bien plus

lorfqu'après avoir converfé avec lui , il vit qu'il


étoit fupérieurement verfé dans la connoiïïance
des voies intérieures. Il lui donna une cellule
dans fon Monaftere , afin de lui procurer les
moyens de tendre à la perfeôion avec plus de
facilité. Galmier , entièrement retire du monde,
ne s?occupa plus que du foin de vaquer à la mé»-
ditation des chofes divines , &
de pratiquer tout
ce que la pénitence a de plus laborieux. Il fut
enfuite élevé à l'Ordre de Sous-Diacre , & mou-
rut vers fan 650. Ses Reliques devinrent bien-
tôt célèbres par un grand nombre de miracles
& par un concours prodigieux de Pèlerins que
la dévotion attiroit à fon tombeau. Elles ont
été enlevées & dirTipées par les Huguenots dans
le feizieme fiecle. Saint Galmier eft nommé
dans leMartyrologe Romain en ce jour , qui
fut cehii de la mort.
Voyez Bollandus , p. 683 ; &
le Coinl
inte
fous Tan 641.

%
V

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4^6 SA I nt Ne S T O R , E.
m i n 1
.
— i .
, - - rw

SAINT NESTOR,
ÉVÊQUE DE SIDA,
in Pamprilie,
ET MARTYR»
Epolius ayant été fait Gouverneur de U
lycie de la Pamphilie ,
, de la Phiygie, j>ar &
.l'Empereur Dece , crut ne pouvoir mieux rare
ia cour à ce Prince , qu'en perfécutant les Chré-
tiens avec encore plus de cruauté que fes col*
lègues. Il les fit donc rechercher avec toute
l'exa&tude poffible. Parmi ceux qui furent ar-
rêtés , étoit Neftor Évêque de Sida , en Pam-
philie ( a ). Ce faint Évêque fut conduit à Per-
Î;e 9 oii il çonfeïïa généreufement fa Foi. Il eut
a gloire d'y fournir le même genre de mort
que fon divin Maître » vers l'an *fo.
Les Bollandiftes ont donné des Actes latins de
S. Neftor ; mais ils ont belbin d'être corrigés
par les Aâes grecs du même Saint , qui font en
jnanufcrit dans la Bibliothèque du Roi à Paris
Coin 20 10. Ces dçrniçrç ont été écrits dans lq
dixième fiede. r "

— " 1 1

* -
( «) Le P, le Quîea a fort 1 Neftor Evoque de Perge % em
bien réfuté ceux qui foat S,\4c Mandis 9 ou de
Madigis.

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Ste. Honorine t S. Alnoth. 457

SAINTE HONORINE,
Vierge et Martyre.
S Ainte Honorine fouffiît au Pays de Caux
en Normandie , & fut enterrée au Village de
Gravilie , près l'embouchure de la Seine. Du-
rant les incurfions que firent les Normands au
drxieme fiecle , on transféra fes Reliques à
Conflans , lieu où l'Oife fe décharge dans la
Seine , &connu aujourd'hui fous le nom de
Conflans-Sainte-Hohorine. UÉglife de Con-
flans 'poffede encore ce précieux tréfor.
Voyez le Bréviaire de Paris , le nouveau
Martyrologe d'Evreux , &c.

SAINT ALNOTH, f

Anachorète
JAugleterre.
r

GE
réburge
Saint étoit contemporain de Sainte Vé-
, dont il imita les vertus
héroïques. Il
ftit maflacré par dés Brigands dans fa Solitude.
Voyez la Vie de Sainte Wéréburge , Harps-.

fcld, Sec 7* c. ; & Bollandus, p. 684*


4*8 Les saints Martyrs:

XXriÏL JOUR DE FÉVRIER.


*
-• i
LES r

SAINTS MARTYRS j j < i

Qui moururent pendant la grande Perte


.dont la Ville d'Alexandrie fut affligée.

Tiré <r$ufd>e > /. ç. zi & zz,p. 7.66.

Années 261 \ z 62 f 26$.

JL** HISTOIRE nous a laiffé la defcrip*


tion la plus effrayante de la Perte qui '^peu-
pla la plu* grande partie de l'Empire Romain ,
depuis Tan 249 jufqu'à Tan 262. A Rome,
elle emporta jufqu'à, cinq jnille performesen
un feul jour. Mais ce fut fur-toùt à Alexandrie
qu'elle fit fentir fes horribles ravages. Écoutons
parler SaintDenys , Êvêquë de cette Ville.
II. commence par le récit de la fçdi tion. qui

arma les Alexandrins les uns contre les âtitres.


La fureur de la guerre civile alla fi loin , qu'on
je voyoit par-tout que trôuble , que confu-
fion , qtie carnage. eut été moins dange-
Il
reux , "dit Saint Denys , de pafler d'Orient ërt
Occident , que d'un quartier de la Ville à l'au-
tre. A ce premier fléait iiiccéda la Pefte la
.

plus violente. II n'jravoit pas une feule maifon


dans Alexandrie , qui n'eftt quelque mort à
pleurer. On n'entendoit de toutç$ parts que

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Les saints Martyrs. 459
cris & gue gémiflements ; l'image de la mort
était peinte fur chaque vifage ; la puanteur qui Yt\K. i*.
sfexhaloit des cadavres , communiquoit aux vi-
vants le poifon contagieux ; les vents , au lieu
de purifier l'air , ne faifoient que le corrom-
pre de plus en plus, en apportant les vapeurs
1 nfeftes du Nil. La crainte de mourir éloîgnoit

les Païens de leurs amis & de leurs proches.


Ilsne les voyoient pas plutôt frappés de la
maladie > qu'ils les abandonnoient fansfecours.
même à demi-morts dans les
Ils Jes jetoient
rues , &
refufoient la fépulture à ceùx qui ne
vivoient plus : tant ils craignoient d'être les
viâimes du redoutable fléau dont toits les
foins ne pouvoient arrêter le progrès.
Mais cette maladie , que les Idolâtres re-
gardoient comme la plus grande des calamités ,
ne fut qu'une épreuve pour les Chrétiens. Ils
montrèrent en cette occafion de quoi I9 cha-
rité eft capable. Ces hommes , qui , pendant
les persécutions de De ce , de Gallus &
de
Valérie» avoient été obligés de fe cacher t
,

& de tenir leurs aflemblées dans les Déferts ,


eu fur des Vaifleaux expofés à la fureur des
vagues , qui n'avoient pu offrir les ftints
Myfteres , que dans des prifons ou des lieux
ibuterrains ; ces hommes , dis-je , aceoururent
afc fecours des peftiférés , & fe dévouèrent
genéreufement à leur fervice t malgré le dan-
ger évident où ils mettaient leur propre vie.
Us fermoient la bouche &le* yeux aux morts
& les emportoient enfuite fur leurs épaules
pour leur rendre les derniers devoirs* Plufieurs
1

de ces vrais Difciples de Jefus-Chrift furent les


viâimes de leur charité mais ils laiffoient en
:

mourant de fidèles imitateurs de leur zele pour

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-

4&> £ ES saints Martyrs:


- 'le fervice des malades , lefquels à leur tour;
FÉVR. !$• étoient remplacés par d'autres, * C'eft ainfi 9
» ajoute Saint Denys , que les plus pieux de
h nos Frères , que les plus faims de nos Prê-
» très , de nos Diacres ,. &
même de nos
» Laïques, ont terminé leur vie ; il eft hors&
» de doute que ce genre de mort ne diffère
» en rien du martyre. » Il eft dit dans le Mar-
tyrologe Romain que les Chrétiens morts au
fervice des peftiférés d'Alexandrie , font ho-
norés comme Martyrs , par une coutume que
la piété des Fidèles a introduite*

Pourquoi ces Saints portèrent-ils la charité


envers le prochain à un degré fi héroïque ?
Ceft qu'ils étoient folidement établis dans
la vertu , & avoient devant les yeux
qu'ils
la félicité éternelle.Quand on penfe férieu-
Cernent aux avantages infinis que l'on trouve
dans le fervice de Dieu , &
que l'on occu-
pe Ion efprit des récompenfes qu'il promet »'
on fkifit avec ardeur toutes les occauons qui
fe préfentent de lui témoigner fon amour
& de procurer fa gloire. Delà naît le mépris
de ce qui feroit capable d'éloigner de IuL
Lorfqu'on eft dans ces faintes difpofitions %
on fouiFre avec patience , &
même avec joie t
les travaux , les difgraces , les dangers , les
douleurs, la perte des biens , des amis, de la
vie , quand la gloire de Dieu y eft intérefleeJ
On va plus loin : on les regarde comme un
gain , &
comme un germe précieux de l'im-
mortalité bienheureuie , après laquelle on fou-
pire.

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Saint Protere 3 Pat. 461

FÉVR.
SAINT PROTERE, 18.

PATRIARCHE D'ALEXANDRIE ,

Martyr.
Tiré (TÉvagrt , Hift. Eccl. 1. i. c4 ; de Li-
Hrat , Breviar. c 1 5 ; de Thlophane , in Mar-
cîano & Leone ; de Théodore Lciïeur , />.

Voyc[ aujji U P. Caecum , Diff. in Open S.


Leonis , T &
3 ; Htnfchimus y T. 3 . Febr. p. 719.

P Ro tere, dont on ignore la famille &


Téducation , fut ordonné Prêtre par Saint Cy-
rille , Patriarche d'Alexandrie. Diofcore , fuc-
ceffeur de Saint Cyrille , mit tout en œuvre
pour le gagner au parti d'Eutychès, gu'il favo-
rifoit ,& le fit dans cette vue, Archiprêtre de
rEgixfe d'Alexandrie. Mais Protere ne donna
point dans le piège , &
refta conftamment at-
taché à la Doûrine Catholique. L'impie Diof-
core ayant été condamné &
dépofé par le
Concile de Calcédoine , notre Saint fut élu à
fa place, & ordonné en 552. Cette Ordina-
tion caufk beaucoup de trouble dans Alexan-
drie , parce que les uns étpient pour Diofco-
re ,& les autres pour Protere. Les partifans du
premier avoient à leur tête Timothée , fur-
nommé Elurt , & Pierre Monge , contre le-
quel notre Saint avoit porté une Sentence
d'excommunication. Ces deux hommes étoient
Eccléfiaftiques : mais ils déshonoroient leur
État par de grands vices. Ils avoient tellçr

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46x Saint Protere, Pat.
ment animé la populace contre Protere , qu'il
FÉVR. 18. nV avoit P as ^e j° ur ou & v* e ne ex poiée ,
quoique l'Empereur &
Concile de Calcé-
te
doine euflent pris fon Elure ne s'en tint
parti.
pas là ; il profita un jour de l'exceffive fermen-
tation011 étoient les efprits , pour fe faire or-
donner Patriarche par deux Evêques de fk
faôion,qui avoient été dépofés. Il monta en-
fuite fur le. Siège de notre Saint , & obtint à
force de cabales , qu'on le proclamât feul Evê-
que (FAlexandrie. L'Empereur l'ayant exilé
peu de temps après, en punition d'un tel fcan-
dale , les Euty chiens s'en vengèrent fur Protere,
Leur fureur contre lui alla fi loin , qu'ils le
pourfuivirent jufques dans le Baptiftere atte-
nant à l'Églife de Saint Quirin , où ils eurent
la barbarie de le maffacrer. Ceci arriva un ven-
dredi faint de l'année 557. Ce ne fut point
encore affez pour affouvir la rage des Euty-
chiens. Ils traînèrent le cadavre du Patriarche
dans les rues ; après quoi ils le mirent en
pièces , le brûlèrent , &
en jetèrent les cendres
au vent. Les Évêques dç Thrace rendirent un
témoignage bien glorieux à ùl mémoire dans
une lettre au'ils écrivirent peu.de temps après
fa mort à FEmpereur Léon. Ifa y difent ou'ifa
l'honorent comme Martyr , qu'ils efperent &
obtenir miféricorde par fon interceffion (*).
On trouve le non* de Saint Protere au 28
de Février dans les Calendriers Grecs.

(û) Sanàijfîmam Troterlum terccJponibusmïfiricorAtm & pro-


in oriint & choro San&orum pitium Dcum nobis fieri poj/ulw
Manyrum pcnimut , & ejut in- mus. Conc. T. 4. p. 907.
1 I. J « « s •

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5. Romain & S. Lt/picid. 463

SAINT ROMAIN FÊVR. 28.

ET SAINT LUPICIN,
Fondateurs
des Monafteres du Mont-Jura.

Tiré de leur ancienne Vie , écrite par un Moine


de Condat ; &
de Saint Grégoire de Tours 9 de
Vitis Patrum ,ci, Voy*\ D. Matillon Annal,
,
Bened. 1. i. T. i. p. 23 ; TMemont, T. iG p.
J42 ; & Bulteau , Hift. de S. Benoit . L 1 • \
m

Cinquième Siècle.

R Om Ain
ans pour
quitta le fiecle à Pâge de
3
, vivre dans le Monaftere d'Ai-
aller
nai , fitué au Confluent de la Saône du &
Rhône. Ce lieu étoit fort
célèbre par une.
Eglife bâtie fur les cendres des Saints Martyr^
de Lyon : car quoique les Païens , après avoir
brûle leurs corps , en euflent jeté les cendres*
dans le Rhône , les Fidèles en avoient cepen-
dant ramafle une grande partie qu'ils dépofe-
rent en cet endroit (a). Romain ayant paffé

( a ) Ce Monaftere , un lesFauxbourgs de cette Ville y


«lesplus anciens des Gaules mais il e* renfermé depuis
s'appeHoit en latin Athana- long-temps dans l'enceinte de-
€cnji.II avoit été fondé en fes murailles. Il fut nommé'
l'honneur des SS. Martyrs de Athanaccnfe d un mot grec qui
Lyon autrefois U étoit dans
-,
fignifie immortel y ou pîutôr

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464 S. Romain & S. Lvpicin.
quelque temps dans le Monaftere d'Ainai , fe
FÉVR. 27. ***** ^ m' e MontJura
, qui fépare la Suifle
de la Franche-Comté. Il avoit emporté avec
lui les InfHtutions &
les Conférences de Caf-
fien. U s'arrêta dans un vallon, nommé Con-
dat,ou Condatifcone , parce qu'il y trouva
un petit terrein qui ipouvoit être cultivé , avec
une fource , & des arbres qui lui fourniffoient
des fruits fauvages. Dans cette Solitude , il
employoit au travail des mains tous les inftants
qu'd ne donnoit point à la prière à la lec- &
ture. Lupicin fon frère, ne tarda pas à fe
"oindre à lui. La réputation de leurs vertus &t
!
'éclat des miracles qu'ils opéroient , leur atti-
rèrent bientôt un grand nombre de difciples. Ce
frit ce qui les détermina à bâtir le Monaftere de

Condat. Voyant enfuite qu'il ne pouvoir conte*


nir tous ceux qui venoient fe ranger fous leur
conduite , ils bâtirent celui de Leuconne, qui en
étoit éloigné d'environ une lieue. Us en firent
encorp conftruire un troifieme pour les femmes
qui voudroient fe confacrer à Dieu , dans un
vallon, nommé la Beaume, & aujourd'hui S.

àA th encan , Académie , par- qu'elle en regardée com-


eft
ce que l'Empereur Caligula me fondatrice. Cette Abbaye,
avoit établi en ce lieu une qui avoit paflé à la Congréga-
célèbre Académie d'éloquen- tion de Cluni • s'étoit pro*
ce. Cétoit là aufli qu'étoit digieufement relâchée par la
le fameux Temple que les fuite des temps. Innocent XI
60 Nations des Gaules avoient la fécularifa en 1680 , à la
confacréà la gloire d'Augufte. requifition de Louis XTV. L*E-
L'ancienne Egtife des Mar- gUfe Collégiale &
Abbatiale
tyrs de Lyon étant tombée d'Ainai a un Abbé qui eft
en ruine
, Brunehaut , Reine aufli Doyen , un Prévôt
de Bourgogne la fit rebâtir
, dix-neuf Chanoines en titre ,
avec un Monaftere » vers & fix Chanoines d'honneur. '

£an 620 i & c'eft pour cela

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RoMAitf & S. Lupicitr. 46^
S.
Romain de la Roche. On obfervoit dans ce -
dernier la clôture la plus «exafte , & on n'y f£vr. 18.
laiflbit jamais entrer ahommes. Saint Romain
y choifit le lieu de fa fépulture.
Nos deux Saints gouvernoient conjointe-
ment leurs Monafteres , mais avec une union
qui ne laiflbit pas appercevoir la pluralité des
Supérieurs ; &cette union étoit d'autant plus
admirable , qu ils avoient des carafteres diffé-
rents , Romain inclinant pour la douceur , &
Lupicin pour la févérité. Le dernier demeuroit
ordinairement à Leuconne , où il avoit fous fa
conduite cent cinquante Religieux. Des per-
fonnes pieufes ayant enrichi de leurs libéral*-»

tés le Monaftere de Condat , quelques-uns des
Frères voulurent y introduire le relâchement»
Ils fubftituerent des mets plus délicats à ceux

oue la Règle» prefcri voit. Lupicin , qui en fut in-


formé de bonne heure', fc rendit à Condat pour
remédier au défordre , &
il y réuflit. Il n'or-

donna pourtant pas une abftinence aufli rigou-


reufe que celle qui fe pratiquoit en Orient 9
ou même à Lérins , foit parce que les Gaulois
étoient naturellement de grands mangeurs , foit
parce que la Communauté s'occupoit à des
travaux pénibles : mais aufli il interdit l'ufage
de la viande , &
ne permit le lait &
les œufs >
que dans le cas de maladie. Quant à lui , il fe
diftinguoit des Frères , par l'auftérité de fou
genre de vie , par la pauvreté de fes vêtements,
par la rigueur de fes jeûnes &
les autres mor-
tifications de la pénitence.
Saint Romain , qui eft nommé en ce jour
dans le Martyrolçge Romain , mourut vers l'an
460. Saint Lupicin lui furvécut environ vifigt

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466 S. Romain & S. Lupicin.
ans , & eft honoré par lTfeglife le ai de Mars
FÉVR. iS. (*)•

( h ) On trouvera dans la | des changements arrivés à


Vie de Saint Oyend au pre- l'Abbaye de Condat.
jnicr de Janvier , l'Hiftoire
|

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S. O StT ALDy Archkv> *
467

XXIX. JOUR DE FÉVRIER.


SAINT OS WALD,
D'ABORD ÉVÊQUE
DE VORCESTER,
PUIS
ARCHEVÊQUE D'YORCK.
Tiré de la Vie écrite par Ëadmcr j de Florent
de Worcejter ; de Guillaume de Malmesbwy ; &
fur-tout du judicieux & élégant Auteur de Hfifi
taire de Ramfey , publiée par le favant M. Gale f

p. $83* Fokard , Abbé de Thorney , avait aujji


écrit en ioS8 \ une Vie de S» OJwald. Warthon la
croit perdue ; mais le P. Mabillon ne feroit pas
éloigné de penfer que c'ejl celle qui a été donnée par
Surius & Capgrave. Voye[ aujji un Manufcrit in-
8°. copié vers tan 1064 , lequel a pour titre ,
Portiforium S. OfValdi, Archiep. Eborac. //
ejl dans le Collège de Saint Benoit à Cambridge %

ir Wanley en fait mention in Catal. p. 110.

L'An 992.

S V
A L D étoit neveu de Saint Odon , FÊVR« 17.

Archevêque de Cantorbéry &


d'Oskitell f
d'abord Evêque de Dorchefter, puis Arche-
vêque d'YorcK. Saint Odon prit un foin par-
ticulier de fon éducation, &le fit Doyen du
Ggi)

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S. Osw ald ,Archev.
Chapitre de Winchefter. Ofvald, quoique
1

' -

F VR 29 encore ^ort jeune, avoit déjà toutes les ver-


tus d'un Eccléfiaftiqne contommé dans les
voies de la perfeâion. Mais il ne garda pas
long-temps fon Bénéfice : il s'en démit , pour
fuivre l'attrait qui le portoit intérieurement
à la Solitude. Il pafla en France , alla pren- &
dre l'habit monaftique à l'Abbaye de Fleury ,
autrement dite <U Saint Bcnoit-fur- Loire. Quel-
que temps après , l'utilité de FEglife d'Angle-
terre le fit rappeller dans fa patrie ; il fuc- &
céda à Saint Dunftan fur le Siège de Worcef-
tre , vers l'an 959. Il remplit tous les devoirs
de l'Epifcopat avec beaucoup d'édification ;
& pour faire fleurir la piété dans fon Dioce-
fe , il y bâtit un Monaftere d'hommes à Veft-
berry. Le bien qui réfulta de cet établiflement
détermina le Duc Aylwine à lui confier en
72 , la fondation du célèbre Monaftere de
Samfey, dans le Comté de Huntington

(a) Dans une Me formée L'Hiftorien de Ramfey lui


par de grands marais , & par donne le titre de Htlf-JOngi
la rivière d*Oufc. L'Abbaye c'eft-à-dire , demi-Roi.
de Ramfey ctoit une des plus Mais pour faciliter l'intel-
magnifiques d'Angleterre. Le ligence des Vies des Saints
grand portail fubfifte encore, Anglois , nous allons donner
j *
une vr

êc on y voit une Statue de I


: :
Notice des principaux ti
:

pierre qui repréfente Aylwi très d'honneur, 6c des prin-


ne , tenant à fa main des cipales dignités, quiétoient
clefs & un bâton noueux , en ufage parmi les Anglo*
fymboles de fa dignité. Ay- Saxons.
lwine , auili pieux que bra- Èthtling &
Clito étoienr les
ve , étoit proche parent d'Ed- épithetes qu'on donnoit aux
gar , l'un des plus grands fils des Rois ou à leurs hé«

Rois d'Angleterre. Il étoit ri tiers.

tout à la fois &


le Général Aldtrman étoit dérivé ItAlâ
des Armées de ce Prince , & I ou Old , ancien. Rapin Thoy.
l^derman de fon Royaume, I ras sert trompé on écrivant

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S. Oswàld ,Archev. 469
Deux ans après , le Saint en dédia FEglife fous
l'invocation de la Mere de Dieu, de Saint Be-
noit, &de tous les Saints Vierges. Il etoit
pour lors Archevêque dTorck , fans avoir tou-
tefois renoncé au Siège de Worcefter , Saint
Dunftan l'ayant obligé à gouverner en même
*
temps les deux Egliles.

Earlderman au Vitufi Aldtrman ,


nels, tt s*appelloît en latin
& en le dérivant du mot Earl. Vice-Dominus. ,

L'Aléerman d'Angleterre , La dignité d'Earl , Danot-


quand il y en avoir un , étoit fe d'origine , ruccéda dans
le chef de l'Etat, fous le Roi, la faite à celle d*Àlderroan
tant pour la guerre, que pour des Provinces. Elle fut prin%
les autres affaires, VAider- cipalement introduite par Ca-
mon d'une Ville ou "d'une Pro- nut , Roi de Suéde. 11 y
vince , en étoit le Gouver-i avoit, au rapport d'Afférius,
neur. Les Wapentaku , c'eft- des Earls de Sommerfet fie de
à-dire , les Villages ou Can- Devons hire , fous le règne
tons qui fournùToient un cer- d'Éthelwolph r mais il paroit
tain nombre de gens d'armes ,
pourtant que cette dignité ne
«voient auûî leur AUermtm , fut en Suéde qu'en
établie
dont la fonction etoit de les 804. Voyez les Remarques
gouverner ,& de connottre cfOlaf Detin , dans fa nou-
de leurs affaires civiles fie cri- velle Hiftoire de Suéde, c.
minelles. 15. T. 1. p.
Le Reeve répondoit à ce IfHeartogh étoit un Due ou
«rue nous appelions Intendant. Général d'Armée. Hengift a
Le Reeve de l'Evêque étoit fouvent ce titre dans la Chro-
un Officier qui avoit foin de nique Saxonne. Conftantin
fes affaires temporelles, fie établit de ces Ducs dans les
qui préfidoit dans fes Tribu- différentes Provinces de l'Em-
naux, pour juger les caufes pire. Us commandoient les
qui y reffortifToient. Troupes, ficétoient devrais
Le Sherijfè ou SmhReeye , Gouverneurs militaires. Il y
étoit le député de l'Alderman» avoit auftt des Comtes , dont
à la place duquel il connoif- 1» fonction primitive étoit
foit de certaines affaires d'accompagner toujours l'Em-
tomme Juge fubalterne. Il pereur , fie de vivre dans fon
étoit* encore chargé de faire Palais ; d'où vint le titre do

exécuter les Sentences por- Comte* PaUe/nt. L'Empe-


tées par l'Alderman , 8c d'af- reur les envoya enfuite dans
fifter au fupplice des crimi- inces , pour gérer des
• • •
47° & O sw azd Arches. 3
» Notre Saint ne s'occupa plus que du foin dd.
vifiter Ton Troupeau. Il s*appliquoit fans relâ-
FÊVR, %% ^ prêcher ja parole de Dieu , à réformer les
abus , &
à étendre le règne de la piété. Et pour
diiliper les ténèbres de l'ignorance , qui font
touiours fi nréiudiciables aux bonnes mœurs «

affaires importantes , qui Ceux qui relevoient immédiat


étoient quelquefois civiles, tentent de la Couronne t
& quelquefois militaires. Peu étoient Thanes du Roi. On;
à peu ces Titres devinrent hé- donnoit le titre de Grands
réditaires. Ils commencèrent Thanes aux Pues, aux Al*
Ù être purement honorifiques dermans , Ôt généralement à
du temps d'Othon I furnom- , tous ceux qui tenoient en
mé /< Grand. Les peuples du Fief des Terres , des Châ-
Nord Octant partagés fous teaux 6c des Seigneuries 4
plufieurs Chefs dans les pays pour lefquelles ils dévoient
dont Us avoient fait la con- au Roi l'hommage & le fer*
quetc , etaoïirent aes eipcccs vice militaire ou civil §
de Fiefs dont nous voyons
, en temps de
guerre, ils
des traces fous les premiers étoient obligés de conduira
Hois d« France f ( voyez ou de faire conduire à l'Ar-
J'Abbé VeUy , T. i. p. mée du Prince un certain]
<6z, fit (\ùv, ) Mais ce n'eft nombre de gens d'armes pour
qu'aux Lombards d'Italie chaque Fief) ce qui s' appel-
qu'on doit attribuer Vétablif * loit Knighes fe< pu la Ren-
,

femer|t des Fiefs proprement te de Chevalier, Les Thanes


dits, ainiî que de toutes les <U U Mtfft étoient ceux qui
Jpix qui les concernent, & relevoient de VÉglife. On en*
qui ont été ajoutées comme
un appendice, au corps du ceux qui tenoient du Rot
Proit Romain. Les Titres de quelque petit Fief, ou qui
Comtes Duct furent reçus en tenoient des grands Thanes
France fous les Rois de la une partie de leurs Fiefs Ro.
première r\ace , fr. devinrent yaux, l*es Normands leur
quelquefois héréditaires du donnèrent le nom de ravaf^
temps des Pépins ; ceci pour- fturt , &à leurs Terres celui
tant n'étoit pas cpmmun a- de V^mfforUs. Ceux qui ter
yant Charlemagne, noient quelques Terres de ces
Eq Angleterre , on appelloit derniers étoient appelles pt~
,

Thwt* ,
ce mot %iifioit
( tits Thanes, |t n'étoient
$eryiuurs ) tous ceux qui re- point cenfés Gentilshommes*
levoient de quelqu'un pour Tout Thane avott droit de
Jrs Terres qu'ils, poffçdoient. difpofcr de fçs Terres, A

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S. 0sw\ld 3 'ArcêeV* 471
y de (cèux qui cultivoient
excitoit l'émulation
les fciences ; tous les moments qu'il pouvoit
F £yR 1
% 1
dérober aux fondions de fon État , il alloit les '

avoit fondé à Worcefter , afin d'y vaquer avec


les Religieux , aux exercices de la prière da &

elles paflbient par Chartres U


d'Amiens. Vidai
mais
icr, me
eft dérivé du latin Vict*
toujours avec la charge de Dominus.
rendre l'hommage le fer-» & On nommoit Clorts ou Churï
vice. Ces Terres fe nom- un payfan ou artifan dé con*
moient BloeklanJ. dition libre. Les Cçorles qui
Le Titre de Baron fut (ubf- tenoient quelques fonds k fer*
tltué à celui de Grand Tha- mage pour un certain nom-
ne , &
devint général en An- bre d'années , étoient appel-
gleterre fous les Normands , les Sockmm, & leurs Terres
quoiqu'avant la conquête de Sol kland. Les Céorles qui te*
ce Royaume % il fui quelque- noient cinq familles de Terré
employé pour fignificr un avec
Ibis une grande maifon »
Thane Royal. Les mots Btn* cour &
cloche pour auem*
ro , Varro y Faro y Btr , ve-» blcr do me (tiques , c-
leurs
noient du latin Vir ou Viro , toient élevés au grade de pe*
& figntâoient en Allemagne t tits Thanes.
en Italie , en France , &c. On donnoit le nom de VU
un homme illudre , un nom- loin» ou de Serp , aux pay-
me noble t un homme d'ar- fans attachés pour la vie au
mes. Les femmes appelloient ftrvice de quelqu'un pour
leurs maris , leurs Barons* labourer fes Terres. Les VU
Ced pour cela qu'encore au- lains avoieht droit , tant en
jourd'hui en Angleterre les Angîererre > qu'en France 4
Juriftes difent Baron pour d'acquérir & de pofféder des
mari. biens en propre. Il n'y a Ja*
On a fait le mot Seigneur mais eu dans ces deux Ro-
de Senior , &
cfehii de Dame , yaumes de Serfs proprement
de Dominas. Ce dernier n'eft dits , comme parmi les Ro*
plus aflfeâé qu'aux femmes mains.
de condition depuis près de Les Wltan OU Vîtes (c'erV
?
trois fîêcîes. On fa pourtant à-dire, Us Sages) étoient les
conTerVé en certains titres Magiftrars te les Jurifcon*
qUi marquent quelques digni- fuites. On appelloit Burpvit*
tés particulières. De là vient tan les Magiflxats d'une Ville
km'en France , on dit encore particulière.
le Vidant* de Normandie , de Quelques Provinces d'An*

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1
4J1 S. OSW ALD ÀRCHEV. y
5=5=== la mortification ( avoit toujours douze
FtVR4 *9. Pauvres à fa table , «ju'il fervoit avec affeâion 9
après leur avoir lave &
baifé les pieds. Le but
qu'il fepropofoit en pratiquant cette bonne
oeuvre , étoit de s'entretenir dans de vifs fen-
timents de charité &
d'humilité. Enfin il tom-
ba malade dans le Monaftere de Worchefter
où il s'étoit retiré félon fa coutume. Sentant
que fa dernière heure approchoit , il reçut l'Ex-
trême-Onâion &
le S. Viatique avec beaucoup
de ferveur .-après quoi il expira tranquillement
au milieu des Moines , en fimflant la doxologie,
Gloire au Pert, au Fi/s, & au Saint Efprit. Sa
bienheureufe mort arriva le 19 Février de
Tannée biflextile 992. Il avoit été 33 ans
Evêque. Son corps fut levé déterre en 1001,
par Saint Adulphç fon fucceffeur, Dieu &
l'honora de plufieurs miracles. On le transfé-
ra depuis à Yorck , le 1 é'Oâobre qui eft le
c.
,
jour où l'on fait la principale fête de notre
Saint.

Si Saint Ofwald fit tant de progrès dans

gletcrre avoient le titre de du peuple. On la tenait deux


Shires ou de Comtés , dès avant fois par an. LÉvêque & l'Ai-
Alfred qui partagea tout ce derman , ou leurs Députés ,
,
y
Royaume en Comtés les *,
préfîdoient. Voyez Selden*
Comtés en Tithings ou Dîmes , on the Tities of Honour «
Cn Lathes & Wapcntakts \ les Spelman , dans fon Glojfairt ,
Tithings en Centuries ; &
les de la dernière Edition » Squi-
Centuries en Dixièmes, Cha- res , on the Governcment of
que divifion avoit une Cour the English Saxons ; Guillau-
de Juftice, mais qui étoit me Honrel , Hifi. Unir. T. r.
Subordonnée à la Cour Su- p . 2 7 i ; fie Teryl, Hifi. fAngL
périeure. La Cour ou le Tri* (O
L'Eglife de ce Mo-
tmnal fuprème de chaque naftere , dédiée fous l'invo-
Comté s'appelloit SMire- Ge- cation de la Sainte Vierge
nou , ou Folkmou % c'eft-à- devint enfuite la Cathédrale
tUre , «uTemblée du Comté ou de Worchefter.

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Saint Séver 3 E. 473
les voies de la perfeâion , ce ne fut fans clou-
te que parce qu'il pratiqua conflamment cette
p^VR
maxime fondamentale que Saint Benoit , dont
il avoit fuivi l'Inftitut , répète d'après la Vé-

rité éternelle , d'une manière fi énergique.


Quiconque , dit le faint Patriarche dans la
conclufion de fa Règle , veut fe donner à
Dieu , doit fouler aux pieds toutes les cho-
fes de ce monde , renoncer à tout ce qui n'eft
pas Dieu , &
mourir à toutes les affeûions
terreftres : car fans cela il n'eft pas poflible
que Dieu poflede entièrement fon cœur , &
qu'il y établifle à jamais le Royaume de fa
grâce 6c le trône de fort amour. Je ne m'a-
drefle , dit-il encore dans fon Prologue , qu'à
celui qui eft fermement réfolu de renoncer en
tout à fa propre volonté , &
de ne rien né-
gliger pour arriver au Royaume célefte.

MÊME JOUR.
LE
S A IN T SÉVER,

ÉVÊQUE D'A VRANCHES;


S Aint Séver
naquit dans le Cotentin;
de parents peu du côté de la fortune. Il
aifés
s'attacha d'abord au fervice d'un Seigneur du
pays , nommé Corbec , encore plongé dans
les ténèbres de l'Idolâtrie. Mais il le gagna à
Jefus-Chrift par fes bons exemples & par fes
inftru&ons. Le défir qu'il fe fentoit pour la
retraite augmentant de jour en jour, il quitta la
Maifon de£orbec, &
alla fe confiner au milieu

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474 Saint S è r e r, E.
s d'un bois qui n'en étoit pas éloigné. II y fut
bientôt fuivi par un grand nombre de perfon*
nés qui demandoient à vivre fous fa conduite ;
ce qui donna naiflance à un nouveau Monaf-
tere. Rien n'étoit plus édifiant que la Commu-
nauté de Séver. Tous les Frères ne pofledoient
& ne fouhaitoient rien ; leur habillement étoit
fort pauvre ; ils ne vivoient que de pain &:
d'eau, & ne fkifoient qu'un repas par jour.
Lorfque notre Saint eut été élevé au Sacerdoce ,
il ofrroit le plus fouvent qu'il lui étoit poffi-
ble la viôime du falut. Là éomponâion avec
laquelle il célébroit les divins Myfteres , étoit
vive , qu'on voyoit couler de fes yeux un
torrent de larmes.
Après la mort de Saint Senier , Évêque cTA-
Vranches , on choifit Séver pour lui fuccéder.
Cette nouvelle l'accabla de douleur ; il confentit
pourtant à fon éleâion , de peur d'aller con-
tre la volonté de Dieu. La prière, la lefhire,
les jeûnes , les veilles , furent comme aupa-
ravant , fes exercices ordinaires. L'auftérité de
fa vie ne prenoit rien fur cette douceur fi né-
ceflaire à un Miniftre de Jefus-Chrift. Il avoit
pour fon troupeau la charité la plus tendre. I!
slntéreflbit d'une manière toute particulière
«n faveur des pauvres , dont il foulageoit la
mifere par des aumônes abondantes. Et com-
me il joignoit le don de la parole à celui des
miracles , il rertouvella en peu de temps la
fece de fon Diocefe. Les fuperftitions de l'I-
dolâtrie difparurent, pour faire place à la vraie
Foi. Cependant le faint Prélat foupiroit tou*
jours après la Solitude ; ce fut ce qui le déter-
mina à demander un fucceffeur. On refufa
long-temps de fe prêter à fes déûrs ; mais on

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Saint Sèver,E. 475
fut obligé de céder. Enfin Séver rendu à ^""^
lui - même , retourna dans fon Défert , où il févr.
mourut de la mort des Juftes, On ignore en
quel jour &
en quelle année. Le corps de
notre Saint fut depuis transfé ré à Rouen , par
Tordre de Richard , Duc de Normandie. Sa
fêre eft marquée au 7 de Juillet dans le Mar-
tyrologe des Saints de France. On l'honore à
Coutances le 5 du même mois. Mais PÉglife de
Rouen en fait l'Office le 1 de Février,
Voyez Bollandus fous le 1 de Février , les
nouveaux Bréviaires de Rouen de Coutan-&
ces , & PHifloire EccUfiafiique de la Province
de Normandie ,
par M. Tngàn,

FJN DU MOIS DE m
FÉVRIER,

f
* • - • • • »

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SAINTS
DU MOIS
DE MARS.

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477

VIES DES PERES,


DES MARTYRS,
ET DES AUTRES PRINCIPAUX SAINTS.
r

I. JOUR DE MARS.
SAINT DAVID,
-

* ARCHEVÊQUE,
et Patron
du Pays de Galles.

Voyt[ fa Vit y par GiraUus Cambrenjis , dartï


fAnglia Sacra de Warthon , T. 2. Voyt^ auffî
BrownrWills , &
WUkins , Conc. Britan. «
Hyber. T. 1.

Vers Y An 544.

SaINT DAVID étoit fils de Xantus, MARS 1.

Prince de Cérétique , aujourd'hui le Car-


la
diganshire. Il reçut une éducation très-chrétien-
ne , qui influa fur toute la fuite de fa vie. Après
avoir été ordonné Prêtre , il fe retira dans rifle

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1

478 Saint David, Akch.


de Wfflth , oh il vécut fotis la conduite ctu
mars 2. pieux oc favant Paulin , qui avoit été difei-
pie de Saint Germain d'Auxerre. On dit que
Dieu récompenfà les émmentes vertus de Da-
r^^ r
D
vid,par le don des miracles r
le figne de la Croix
qu'en fcifant
i|
&
rendit la vue à fon
Maître , devenu aveugle , foit pour fon grand
âge , foit par un effet des larmes abondan-
tes qu'il verfoit dans la prière. Lorfqu'il fe
fut bien préparé aux fondions du feint Mi-
niftere , il quitta fa Solitude , & comme un
autre Jean - Baptifte forti du Défeit, il alla
prêcher aux Bretons la parole de la vie éter-
nelle. 11 bâtit une Chapelle à Glaftenbury f
lieu que les premiers Apqtrçs dp la Grande-
Bretagne avoient coniacré au culte du vrai
Etteu. Il fonda auffi douze Monafteres , dont
II fonde des
Monafteres. le principal étoit dans la- Vallée de Roff(#),
près de Ménévie. On vit fe former dans ce
Monaftere un grand nombre de Saints , dont
plufieurs gouvernèrent l'Églife en qualité de
premiers Pafteurs.
La Règle que David donna à fes Moines
çtoit fort auftere. Ils travailloient continuelle-
ment des mains en efprit de pénitence , (ans
jamais faire ufagp des animaux propres au la-
bourage , &
cela pour que leur travail fut
plus pénible. La néceilite feule pouvoit les
autonfer à rompre le ûlence. Une prière non
Manière de interrompue , au moins mentalement , fanôifioit
rtvre de fes
Moines.

(a) Cette Vallée a pris naftere de Roff dans les Àûes


fon nom du territoire dans de pluûeurs Saints Irlandois ,
lequel elle fe trouve renfer- fous le nom du Monaftere
mée , &qui s'appelle Roff. de Rqfnat ou Rofran.
U eil fou vent parlé du Mo-

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Saint David 9 Arch. 479
toutes leurs aûions extérieures. Vers la fin du
jour , ils rentroient dans le Monaftere , pour
vaquer à la leôure &
à la prière vocale. Du
pain &
des racines dont le fel étoit Tunique
aflaifonnement , fàifoient toute leur nourritu-
re ; &
ils n'avoient d'autre boiflbn que de l'eau

mêlée avec un peu de lait. Après leur repas


,
ilspaflbient trois heures en oraifon ; ils don-
noient enfuite quelque temps au fommeil ; ils
fe levoient au chant du Coq, fe remettaient&
à prier jufqu'à ce que le moment du travail
fut arrivé.Leurs vêtements étpient grofliers
& de peaux de bêtes. Quand quelqu'un
faits
demandoit à être reçu dans le Monaflere , il
demeuroit dix jours à la porte ; pendant tout &
ce temps-là, on l'éprouvcit par des paroles ru-
des , par des refus réitérés , par des travaux &
pénibles , afin de l'accoutumer à mourir à lui-
même. S'il fouflroit cette épreuve avec conf-
tance & avec humilité , il étoit admis dans la
Maifon. Quant à fes biens , il les laifToit dans
le monde , la Règle du Monaflere défendant
de rien recevoir pour l'entrée dans la Reli-
gion. Tous les Frères étoient obligés de faire
connoître leur intérieur à l'Abbé , de lui
v
&
découvrir leurs penfées &
leurs tentations les
plus fecretes.
Le Pélagianifme s'étant montré une féconde
fois dans la Grande-Bretagne , les Évêques ,
pour le déraciner entièrement , s'afTemblerent
en 5 1 2 ou plutôt en 5 19 ( 1 ) à Brevy , dans
le Cardiganshire. Saint David fut invité à fe
trouver au Synode. U y parut avec éclat , &

( * ) Voyez Wilkins , Con. T. i.


480 Saint David , Ar ch.
confondit PHéréfie par la force réunie de fort

MARS u
favoir, de fon éloquence &
de fes miracles
\b). Saint Dubrice , Archevêque de Caer-
léon , profita de cette circonftance pour lui
.
. réfigner le gouvernement de fon Églife. Da-
propofition qui lui en fut
A^hJvô^ie vid , allarme de la
de Caeriéon faite , fondit en larmes , &
protefta qu'il ne
ou de Mené- fe chargeroit jamais d'un fardeau fi au-deffus
V1C#
de fes forces. En vain on allégua les raifons les
plus preffantes pour l'y détérminer ; jamais il
ne rendu , fi les Pères du Concile ne lui
fe fut
euflent ordonné expreflement d'acquiefeer au
choix de Dubrice. 11 obtint cependant de trans-
férer le Siège de Caeriéon , Ville alors très-
peuplée , à Ménévie , aujourd'hui S. David
lieu retiré &
folitaire (c). Peu de temps après,
il affembla un Synode à Viâoria , où les Aâes

du Synode précédent furent confirmés. On y


fit auffi pluneurs Canons de Difcipline , aux-

quels TÈglife Romaine imprima depuis le fceau


de fon approbation. C'étoit dans ces deux Sy-
nodes que les Églifes de la Grande-Bretagne
puifoient autrefois des Règles de conduite.
Cependant la réputation de notre Saint auc-
mentoit de jour en jour. Il étoit tout à Ta
fois l'ornement &
le modèle des Pafteurs de
fon fiecle. Il poffédoit le talent de la parole
dans un degré éminent ; mais fon éloquence
avoit encore bien moins d'efficace , que la for-

{b) Oïi bâtit dans la fuite vi.


une Églife à l'endroit où s'é- ( c ) Ce lieu étoit prefque
toit tenu le Concile ; & on entièrement féparé de rifle.
l'appella Llan - Devi Brtvi , U y a aujourd'hui une com-
-
c'eft-à-dire l'Églife de Da- munication par le Havre de
,

vid, près la Rivière de Brc- Milford,

ce

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Saint David, Arc h. 48
ce de fes exemples. Aufli regardé de
a-t-il été
tout temps comme une des plus brillantes -

j^ ARS 1
lumières de l'Églife Britannique. Il fut , par la
fondation de fes divers Monafteres , le Pere
fpirituel d'un grand nombre de Saints qui il-
luftrerent l'Angleterre & l'Irlande leur patrie.
,

Enfin , un Épifcopat long


après &
laborieux f
Sa moru
il mourut en paix vers Fan
544 , dans un âge
fort avancé. Saint Kentigern vit des Anges
porter fon ame dans le Ciel. Son corps fut
enterré dans l'Églife de Saint André , qui de-
puis a pris le nom de Saint David , ainfi que
la Ville &
le Diocefe de Ménévie. Auprès de
cette Églife , font plufieurs Chapelles oit la
dévotion attiroit autrefois un grand concours
de peuple. La principale eft celle de Sainte
Nun , mere de notre Saint. Une autre eft dé-
diée fous l'invocation de Saint Lily , furnom-
mé Gwas-Dewy , c'eft-à-dire , l'homme de S»
David , parce qu'il étoit un de fe$ plus chers
difciples. Il y eft honoré le 3 de Mars. Quant
à Sainte Nun , qui avoit formé à la perfe&ion
plufieurs femmes retirées du monde , elle eft
Honorée le 2 du même mois. Anciennement
les Galloisméridionaux fetoient les trois pre-
miers jours de Mars , en l'honneur de Saint
David , de Sainte Nun , &: de Saint Lily ; on
ne fête plus aujourd'hui que le premiér , dans
tout le pays de Galles. En 961 * les Reliques
de notre Saint furent folennellement transfé-
rées à Glaftembury , avec une partie de celles
de Saint Etienne , premier Martyr ( d ).

Nous apprenons ceci


(rf) tembury , publiée par Héarne
de Jean de Glaftembury. en 1716 , p. 130.
Voye* fon Hiftoirc de Glaf-
Hh

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482 Saint David^Arch.
On ne peut aimer Dieu , fans fe fentir vi-
vement embrafé du défir de le louer , de &
célébrer fes perfeâions infinies. L'ame trouve
dans cet exercice des charmes ineffables. Elle
y goûte à longs traits combien le Seigneur eft
doux pour ceux qui le fervent avec fidélité ;
elle y foupire après l'heureux moment , ofi
rien ne fera plus capable d'arrêter les ardeurs
de fes tranfports. Par-là elle nourrit, fortifie
*

fes bonnes habitudes , &


attire fur elle les
grâces les plus abondantes. Saint David en fie
répreuve dans la Solitude , &
au milieu des
fbnâions de l'Épifcopat. Nous lifons dans les
maximes de S. Étienne de Grandmont , qu'un
de fes difciples lui ayant demandé pourquoi
les Écrivains facrés exhortoient fi fréquem-
ment à louer &
à bénir Dieu , vu qu'étant
infini , les hommages de fes créatures ne pou-
voient lui procurer aucun accroiffement de
gloire , ce grand Saint lui fit cette réponfè 1
» L'Écriture ne nous preferit rien que par rap-
» pon à notre falut. Lorfqu'elle dit, Loue[ Dieu^
» binijfti Dieu , ce n'eft que pour l'avantage &
» le bien de l'homme, parce qu'il doit lui feul
» retirer tout le fruit que peuvent produire
» ces devoirs qu'il eft obligé de rendre à Dieu.
» Car toutes les fois qu'un homme dit avec
» un cœur pur &pénétré des fentiments d'une
» véritable piété Dieu foit loué , Dieu fait bc-
:

» ni ; le Seigneur lui répond à fheure même ,


» Elles font pour vous les bénédictions , & les
» louanges que vous me donne{. On comprendra
» facilement cette vérité , fi l'on confidere que
» l'homme ne fauroit bénir Dieu , que Dieu
» ne le béniffe le premier , &ne le prévien-
» ne de fa grâce. D'oïl il fuit que toute bé-

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Saint SwtDÈKAt § È. 4S3
H iiédiôion venant de Dieu comme Ad ion
» uniaue fource * l'homme ne fait que la lui *| ARâ
» rendre après l'avôir reçue de lui. De forte
» qu'en béniflknt Dieu continuellement i il ac-
» cumule fur lui-même les bénédidions divi-
» nés , qui font autant de nouveaux accroiffe-
» mençs de charité dans fon ame

S. S WIDBERT 00 SWIBËRT
ÉVÊQUE RÉGIONNAIRE,
et Apôtre de la Frise.
1

Tire de Èede, tiiÛ. 1. j. t. 10. f 1 , 6- /<*

Colltclion hijlorique s donnée par Henfchinius fous


le i de Mars. Voye[ aujjile Martyrologe Romain
^
la Batavja Sacra , &
M. F/eury , L 40*

L'An 713

s Wi DBERT Yancien naqùit efl Angleterre? i


& vécut quelque temps fous la conduite dd
Saint Egbert , Prêtre &
Moine , qu'il fuivit
en Irlande pour s'y perfectionner dans la pra-
tique de toutes les vertus monailiques. te zeld
du-falut des ames étoit une des qualités qui ca-<
raftérifoient le plus Saint Egbert ; & il feroit
paffé dans la Baffe-Germanie pour y prêche*

. (1) Maximes de Saint I p. 12t. Item, /. Sentent, S4


Etienne de Grandmout , c. *p/. \Stevh. Grand, c. io;.p, tç* m

Hhij

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484 Saint Swidbert^E.
Foi , fi cela lui eut été poffible. Il fe fentoît
la

MARS i.
percé d'une vive douleur , toutes les fois qu'il
réfléchiffoit fur le peu de fucccs qu'avoient eu
les travaux apoftoliques de Wigbert , qui le
premier avoit pénétré dans la Frife , fur les &
différents obftacles par lefquels Radbod , Priri-
ce du pays , avoit traverfé fa pieufe entreprifé.
Plein de toutes ces penfées , il réfolut de ten-
ter une féconde Miffion dans la Frife, efpjé-
rant que Dieu fe laifTeroit à la fin toucher. Il
y envoya donc douze Miffionnaires , du nonf-
ti .a •« bre deiquels Swidbert. Ces Ouvriers
fut
voyé dans la evangeliques , qui avoient aaint Wulibrord à
Frife en qua- i eur t ête
9 s'embarquèrent en 690 , pour fe

floMake^" tentez au lieu de leur deftination. Us prirent


terre à l'embouchure du Rhin , comme nous
l'apprenons d'Alcuin , &
allèrent à Utrecht
où ils commencèrent l'exercice de leur Mi-
niftere. Ils furent puifiamment foutenus
par
Pépia de Hériftal , Maire du Palais de Francç,
qui , dix-huit mois auparavant s'étoit rendu
maître d'une partie -de la Frife, avoit forcé &
Radbod (<i) à payer un tribut annuel.
Notre Saint exerça principalement fon zele
dans la Frife Citërieure, qui comprenoit alors
la partie méridionale de la Hollande , la partie
feptentrionale du Brabant , &
les Pays de
Gueldres &de Cleves. Il eut la confolation
de voir une multitude innombrable ^Fhommes
abjurer le Pagamfme , &
renoncer à leurs

( «r) Ce Prince refta Sou- doit depuis les


verain de la partie fepten- du Rhin 8c de la Meufe ,

trionale de la Frife. Dans le jufqu'au Danemarc , fie à l'an-


moyen âge ,1a Frife s'eten- cienne Saxe.

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-

* Saint Sw-iubert^E.^
défordres. Le Pape, Serge I , ayant facré à
Rome en 696 Saint Willibrord Archevêque mars 1..
«fUtrecht , on repréfenta de toutes parts à
Swidbert qu'il devoit auffi fe laiffer ordonner
Évêque , afin d'être en état de pourvoir plus
facilement aux befoins des nouveaux conver-
tis. Les raifons qu'on lui apporta , çtoient fi
: j. >:i a.* ^li* / j»_ • /*

-— 0
&y fut facre
>
^ l
4 ue icmpb aprçs i année 097 , n eft
Eveque Régionnaire par Wil-Évêque.
fait

fricl dTorck ,
qui , étant alors châtie de fbn
Siège , fkifoit des Millions dans la Merçie ( b ).
Swidbert , revêtu de l'augufte cara&ere de.
l'Épifcopat , reparut au milieu de fon peuple
avec plus de zele que jamais. Il établit le,
meilleur ordre dans les Églifes qu'il avoit pré-
cédemment fondées* Ayant ennûte confie fe»
Brebis au foin de Saint Willibrord de fes &
dix Compagnons , il pénétra dans le Pays des?
Boruâuariens , connu aujourd'hui fous le nom
de Duché de Berg, &
de Comté de la Mark,.
& en convertit grand nombre à la Foi. Mal-
heureufement le fuccès de fes travaux fiit ar-
rêté par une irruption des Saxons , qui s'em-
parèrent de tout le Pays des Boruttuariens
après y avoir fait les plus affreux ravages.
Le faint Évêque, prefTé depuis long-temps^
du défir d'aller fe préparer à la mort dans la

( h ) Ou le Siège de Can-
"
cette cérémonie » ne put s*y
torbéry n'avoit point encore trouver. Il eft probable que'
été rempli depuis la mort de S. Wilfrid connoiuok per->
S. Théodore , ou Brithwald fonnellcment S. Svidbert. Ils
fon fuccefleur , à qui il ap- étoient tous deux du Ko*
partenoit de droit de faire yaumede Northumbcrland.
Hhiij

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r-
486 $4INT SfFI2>BERT 3 E.
Sollmde , fe retira dans une petite Ifle dont
préfent (c). Il y fonda un
MARS h Pépin lui ÊVoit fait
Monaftere f oii il mourut dans les exercices
*

de |a pénitence le 1 Mars 713 On fài-r


{bit autrefois fa fête avec une grande folennité
dans la Hqllande dans les autres Pays dont &
i{ pvoit été l'Apôtre. Nous avons un Pané*

gyrique compofe en l'honneur de ce Saint f


par Radbod , Évêque dUtrecht, qui mourut
en 917 (e). En 1616, on trouva les Reliques
Saint Svidbert à Kcifewerdt; elles étoient
renfermées dans une Châfle d'argent avec cel-
les de Saint Willeic (/). Elles font encore
fL\\ même endroit , à l'exception de quelques
petites parties que l'Archevêque de Colognç
3 données à plufiçurs Êglifes(^),

(c) Cette Ifle étoit for- ( e) Ce Panégyrique a été


liiée par différents bras du publié par Henfchénius.
fthin, & par une autre Ri- (/) Saint Willeic , né en
vière -,
on l'appelloit Keifer- Angleterre , fut fucceffeur de
werdt, c eft ?
r à-dire, Me S. Swidbert dans le gouver-
f}e l'Empereur , Werit figni- nement de l'Abbaye de Kei-
ferwerdt. U eft nommé fous
le 2 de Mars dans le Mar-
,

( d ) Ce Monaftere
qui a ,
tyrologe Anglois de "Wilfon,
çtc fort célèbre durant plu- imprimé en 1608 , mais on
fleurs fie cl es , eft aujourd'hui ne trouve point fon nom dans
\me Collégiale de Chanoines le même Martyrologe % de
féculiers. La Ville qui fe for- l'Édition de i6>8 3 Le P«
j»a autour, a porté long- Édouard Maihew le compte
temps le nom de l'Ifle de S. parmi les Saints d'Angleter-
£sridbert ; mais elle a repris re , dans fes Tropfuta Congre*

f nftiite celui de Keiferwerdt gationis Anglican* fiened. Rhc-


fjui étoit l'ancien. . Ceft une mif. 161$. Le P. Jérôme Por-
place bien fortifiée, Elle eft ter fait la même chofe dans
ftt u ce fur le Rhin à fix , fes Flores SanHorum Angine 9
milles au-deflbus de DmTcI- Scott* , & fiiberni*. Duaci.
florp, Il n'y a plus d Ifle , ?
tffS.
depuis qu'un, des bras du Rhin ( g ) Les Aûes de S. Svid-
bert , donnés par Surius , &

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-

Saint Aubin , E. 487

MARS
SAINT AUBIN, 1.

Evêque d'Angers.
Tiré defa Vie f par Fortunat f Évêque de Poi-
tiers 9 & de Grégoire de Tours , 1. de glor. Con-
feff. c. 96. Foyci aujji Us notes <CHtnfchenUiS
fitr la VU du même Saint*
<

- *

L'An 540.
• •

S Aînt Aubin fortoït d'une famille no-


ble &
ancienne , qui s'étoit établie dans la
Bretagne , mais qui étoit originaire d'Angle»
terre ( i ). Il montra dès fa jeunefle beaucoup

qui portent le nom de Mar- ou de Verden % eft nommé


cellta, qu'on a cru râufte- dans quelques Martyrologes
nem être S. Marchelm , dif- fous le 30 d'Avril. Il y a eu
ciple ou collègue de notre encore un autre Swidbcrt,
Saine , ne méritent aucune qu'on a aulB confondu mal-
créance. Ils font Pouvrage de à-propos avec notre Saint,
quelque impofteur du XV puifqu'U étoit plus jeune que
fiecle. H ne faut point con- lui de 40 ans. Bede en par*
fondre , comme l'ont tait l'Au- le dans fon Ht Moire Eccl. 1. 4;
teur de ces Aftes , & quel- c- 31. II fut Abbé d'un Mo-
naftere , fitué dans le Cumber-
Swidbert de Keifenverdtavec land dont on ne voit plus de
,

un autre Saint du même nom traces depuis la conquête de


,

h. de la même nation , lequel l'Angleterre par les Norman ds-


fut le premier Évêque de Voyez Léland , Héarne , Col*
Verden ou Ferden dans la UH, T. r. p* if *. La Britannid
Wcftphalie, au commence- de Cambden augmentée par ,

ment du neuvième ûecle. Le Gibfon . Col. 8p ; la Noti- &


corps de ce Saint Évêque fut tUmùnafiica de Tanner, p. 7?.
levé de terre en 1630 , avec ( 1 ) Voyez l'Itinéraire de
ceux de fept Évêques fes fuc- Léland, publié par Héarne;
cçfleurs. S* Swidbcrt It jeune T. J. p. 4.

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488 Saint Aubin 3 E.
d'inclination pour la vertu & beaucoup, Ae
ferveur dans tous les exercices de la Religion*
On le voyoit , dans un âge où Ton n'a com-
munément de goût mie pour les plaifirs , tra-
vailler fans relâche à détacher fon cœur des
chofes créées , pour enconfacrer à
Dieu toutes
les affeûions. Ce fut pour rendre ce détache-
ment plus entier , qu'il fe retira dans le Mo*
naftere de Cincillac , nommé enfuite Tintil-
lant , aux environs d'Angers. U
homme qui afpiroit uniquement à la perfec-
tion. Il au plus haut degré l'amour de
portoit
la prière , des veilles &
de la mortification

bornes ; fa volonté étoit toujours fubordon-


née à celle de fes Supérieurs , ou plutôt if
n'en avoit point. Tous lç$ Frères ne le regar-
doient qu'avec refpeâ : aufli l'élurent-ils pour
les gouverner , après la mort de leur Abbé ,
arrivée en 504. Le Saint avoit alors trente-
cinq ans. Ses exemples &
fes leçons , rani-
mèrent la ferveur des ames tiedes , & confir-
mèrent dans les voies de la perfeûion , celles
qui y marchoient.
Il y avoit vingt-cinq ans que Saint Aubin
gouvernoit fon Monaflere , lorfqu'il fut élevé
iur le Siège Épifcopal d'Angers , par les fuf»
frages réunis du Clergé &
du Peuple. H vou-
lut s'oppofer à fon éleâion ; mais on n'écou-
ta point les raifons que lui fuggéroit fon
humilité ; &
il fut obligé de fe laifler ordon-

ner. U fç mit à travailler aufli - tôt au réta-


JblifTement de la difeipline eccléfiaftique
, qui
«voit fouffert de rudes atteintes en plufieurs
points. Ses travaux continuels ne prirent rien
fur fes auftérités , ni fur fon recueillement*
k

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Saint Au bi n ^ E. 489
lefpefté de tous , même des Rois , il ne s'en
prévalut jamais pour s'élever au - deffus des
autres. Quoique favorifé du don des miracles
il ne s'en regardoit pas moins comme le der-
nier des hommes , &
il fouhaitoit que tout le

monde eût de lui la même idée. Son extrême


douceur ne l'empêchoit pas d'être ferme , lorf-
cru'il s'agiflbit de défendre la Loi de Dieu, &
de maintenir la févérité de la difcipline. Ce
fut par fes foins que le Concile tenu a Orléans
en 538 , remit en vigueur le trentième Canon
du Concile d'Êpaone,qui profcrivoit les Ma-
riages inceftueux , aflez communs dans ces
temps-là (a\ Ce faint Evêque mourut le 1
Mars 549 , a l'âge de 81 ans. En 556 , fou
corps fut levé de terre &
enchâfle par Saint
Germain de Paris, en préfence d'une affem-
blée d'Évêques , du nombre defquels étoit
Eutrope , fuccefleur du Saint. La plus grande
partie de fes Reliques eft encore à Angers j
dans la célèbre Abbaye de Saint Aubin , fon-
dée par le Roi Childebert. Il y a en France
beaucoup de Monafteres , d'Eglifes &j de Vil-
lages , qui portent le nom de Saint Aubin*

( a de maria-
) Il s'agiffoit I au fécond degré de cooôn*
gcs contraries au premier & |
guinité ou d'affinité*
490 Saint Ziojv, E.

MARS i.
M Ê ME JOUR*
L E
SAINT LÉON,
Évêque de Bayonne;
APOTRE DES BASQUES,
rt Martyr*
CE Saint naquit vers Pan 8 \ 6 à Carentan
en Baffe-Normandie , au Diocefe de Coûtan-
tes. Ceft fans fondement que quelques Au-
teurs l'ont fait Archevêque de Rouen. Il n'étoît
<|ue Prêtre , ou tout au plus Évêque Région-
naire * lorfqu'il partit avec fes frères Gervais
& Éleuthere , pour aller prêcher l'Évangile à
Bayonne &
dans le Pays de labour f habité
par les Bafques (*),

(«) Le Pays de labour Quelques Auteurs veulent


s*étendoit autrefoisdepuis que la Ville de Bayonne ait
l'Adour jufqu'à S. Sébaftien, eu des Évêques depuis l'an
dans la Province de Guipuf- 381 ; mais on lit dans le Gal-
coa » mais il eft borné au mi- ba Chrift. Nova, qu'il n'y a
di par les Pyrénées , depuis point d' Évêque de cette Ville
que la Province de Guipuf- qui foit connu avant l'an 980.
coa fait partie du Royaume Le Pays de Labour eft ain-
d'Efpajçne. On peut confulter fi appellé de LapurJum ,an-
Pline &Pomp. Mêla fur l'ori- cien nom de la Ville de Bayon-
gine des Bafques- Il paroît ne. 11 eft fl ftérile , que les
que la langue de ces peuples habitants font exempts des
eft la même pour le fonds que Importions ordinaires » ils ne
celle des anciens Breton! payent au Roi qu'une petite
laquelle s'eft confervée en redevance.
bonne partie dans le pays de Le nom de Bayonne dé-
& dans la Baffe-Bre- rive de Baye & d Ona % qui en
%
Galles
tagne. langue Bafquc

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SAiitt Léonc e. 491
Les Bafques étoient des Cantabres , qui ,
ayant été chafles de leur patrie, s'étoient éta- j^rs 1^
Mis dans les montagnes de la Bifcàye , dans &
les Défçrts du Pays de Labour jufqu'à Bayons
ne. La lumière de la Foi avoit éclàiré cette
Contrée dpi les premiers flecles du Chriftia^
nifme ; mai$ les conquêtes &
les ravages des
Sarrazins en avoient prefque entièrement obf~
curci la clarté. Mon , chargé par le Pape de
faire ime Miffion chez les Bafques, vint à
Bayonne avec fes deux frères 9 vers 1 an 900.
S'il n'eft pas certain qu'il ait été Évêque de

cette Ville , il Tell du moins , qu'il y fat con-


noître Jefus-Chrift , &
qu'il y fonda une Églife
fous l'invocation de la Sainte Vierge. Ses tra-
vaux apoftoliques rendirent la Relieioit Chré-
tienne floriflante dans le Pays de LaDour , dans
les Landes au-delà de Bordeaux , dans la Byf-
caye & la Navarre. Il fut martyrifé par des
Pirates avec fon frère Gervais , le 1 de Mars f
jour auquel fa fête eft marquée dans les Mar*
tyrologes. On ignore Tannée de fa mort. Oit
garde les Reliques dans la Cathédrale de Bayon-
ne , & il eft honoré comme Patron du Dk*

cefe
h . * J ...

Bajc ou bon Port, Cette Ville des mœurs de ces Peuples ;


renommée pour fou commer- de Topogr. Hihtrn.part* J. c. e.
ce , eft fur les Rivières de (*) Ce Diocefe, qui s*é-
r Adour 6£ de 1* Nive , à une tendoit autrefois jufqu'à la
lieue environ de U mer. Ville de S. Scbaftien en Ef-
Une Coloqie de Bafques pagne , ne contient plus au*
ayant paffé en Irlande, ils y jourd'hui que 72 Paroiffes,
portèrent leur langue. Ceft qui font tant dans le Pays de
ce que nous apprenons de Gi- Labour , que dans la Baffe*
raldus Cambrenfis » qui don- Navarre. Fontarabie &le*

ne une defeription fort eu- 19 autres Paroîffes qui en


rieufe des armes , des habits dépendoient anciennement,

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49* Saint Mon an, M.
Voyez l'ancien Bréviaire de Bayonne , Bol-;
landus , Baillet , & le GalUa Chrifiiana nova ,
T. p. 1309.

S. MONAN ou MINNAIN,
Martyr en Écosse.

C E fut Saint Adrien , Évêque de Saint An-


dré , qui forma Monan à la vertu dès fes pre-
mières années. Il l'ordonna Prêtre , s'en fer-, &
vit utilement pour le bien de fon Églife. Il
l'envova enfuite prêcher l'Évangile dans l'Ifle
de May , fituée à l'embouchure du Forth. No-
tre Saint vint à bout d'y déraciner la fuperfti-
tion & les défordres qui en font la fuite. Lorf-
qu'il eût établi le règne de la piété dans cette
Ifle , il paffa dans la Province de Fife, où il fut
maflacré par une troupe de Barbares en 874 ,
avec 6000 autres Chrétiens. Ses Reliques , cé-
lèbres par plufieurs miracles , étoient autre-
fois en grande vénération à Innerny , lieu de
fon martyre. Le Roi David II , ayant éprouvé
la proteâion de ce Saint , fit rebâtir FÉglife
d'Innerny , & y fonda une Collégiale.
Voyez le Bréviaire d'Aberden , le Calendrier
de Iting , & la Vie manufcrite du Saint , qui
eft au Collège des Écoffois à Paris.

font foumiies aux Évèques de par le Pape S. Pie V , à la

Pampclune & de Calahorra. follicitation de Philippe U»


Ce démembrement fut fait Roi d Efpagne.

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Saint Siviard , Abbé. 493
f———— — ——
^^^i^^—

S. SIVIARD ou SÉVARD, mars,,

Abbé de Saint Calais,


, . . au Maine.

Cl E Saint naoïiit à Dablen dans le Maine.


Son pere s'appeiloit Sigeram , &
fa mere Adde.
H fut élevé avec foin dans les fciences dans &
les maximes de la piété. Ayant enfuite réfolu
de quitter le ficelé , il fe confacra à Dieu dans
le Monaftere d'Ange , ou de Saint Calais
dont il devint Abbé. Il remplit dignement tous
les devoirs d'un bon Supérieur , mourut &
lahuitième année du Roi Thierri III ou Thierri
IV , c*eft-à-dire , en 68 1 ou 718.
Voyez Bollandus , p. 66 ; MabiHon f A3. SS.
Ben. Sec. 3 ; &
Bulteau , Hijl. de Saint Benoit %
L 3. c. 22. p. 475.

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494 Les saints MARrrns.

IL JOUR DE MARS.
L £> S

SAINTS MARTYRS
D^TALIE,
sous les Lombards.
Voyt{ les Dialogues de Saint Çrigoire U Grand,
c.2.6. 27, T. p*337*

païens,
étant fortis de la Scandinavie Se de la Pomé-
ranie , s'établirent d'abord dans les Contrées
connues aujourd'hui fous les noms d'Autriche
& de Bavière. Quelques années après , c'eft-
à-dire , vers le milieu du fixieme fiecle , ils
tournèrent leurs armes contre l'Italie, dont la
Îtarde feptentrionale tomba entre leurs mains,
ls portèrent par-tout le ravage &
la défla-
tion , Se voulurent encore ôter la Foi à ceux
qu'ils avoient dépouillés de leurs biens. La
perfécution commença par quarante Payfans ,
auxquels ils ordonnèrent de manger des vian-
des offertes aux Idoles. Mais ces fidèles fervi-
teurs de Jefus-Chrift ayant refufé de le faire
ils forent inhumainement maflacrés , vers l'an

597. Les mêmes Barbares effayerent aufli de

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Les saints Martyrs. 495
pervertir une autre compagnie de prifonniers
en les obligeant d'adorer leur Idole favorite, mars 2,
C'étoit une tête de Chèvre portoient en
qu'ils
£roceflion, &
qu'ils honoraient par des chants
: de génuflexions. Les Chrétiens refuferent
conftamment de rendre un culte religieux à un
objet auffi méprifable , &
ils aimèrent mieux

perdre la vie , que de la conferver par une


criminelle apoftafie. On croit que les faints

rTTI •

Saint Grégoire le Grand dit que ces pauvres


Payfans s'étoient préparés à recevoir la cou-
ronne du martyre , par les exercices de la pé-
nitence &
de la prière , &
par une patience
invincible dans les afflictions. Il ajoute que le
courage qu'ils firent éclater venoit de l'amour
divin qui régnoit dans leurs cœurs. » Le vé-
» ritable amour , dit Saint Pierre Chryfolo-
» gue , rend une ame courageufe &
intrépide ;
» il ne trouve rien de pénible ; il brave les
» dangers , envifage la mort avec joie , &
» triomphe de tout ( 1 ). » Jugeons de là com-
bien nous fommes éloignés d'aimer Dieu. Où
font en effet les preuves de notre amour ?
Nous fommes pleins d'ardeur lorfqu il s'agit
de de nos pallions. Mais s'agit-il de
l'intérêt
taire à Dieu les facrifices qu'il nous demande
la plus légère contrainte nous effraye nous &
déconcerte ? Roujriflbns donc enfin de notre
lâcheté. Tâchons d'allumer dans nos coeurs le
feu facré de l'amour divin ; &
pour y réuffir >

( 1 ) Serm. 4.

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49 6 Saint Chad > E.
demandons-le à Dieu ; réfléchiffons fur les
11

mars 2. Souffrances de Jefus-Chrift , &


fur les tour-
ments qu'endurèrent les Martyrs. Quand une
fois nous aimerons Dieu véritablement , nous
deviendrons des hommes nouveaux ; le mon-
de ne nous fera plus rien ; l'exercice de la
mortification ceffera de nous paroître pénible ;
& nous accomplirons fidèlement nos devoirs
ipalgré tous les obftacles.

SAINT CEADDE , ou SAINT CHAD


m

Évêque de Lit c hfield.


Foye{ Bcdc; Hift. 3.
1. 28. c.
4. & 3.
1. c. 1.

L'An 675.

C HAD
de Londres
étoit frère
&
de Saint Cedd ,
des faints Prêtres Cclin
Evêque
&
,

Cymbel. Il fut élevé dans le Monaflere de


Lindisfarne , fous la conduite de S. Aïdan.
Il pafla enfuite en Irlande, pour fe perfection-

ner dans la connoiflance de l'Ecriture , &


dans
les voies intérieures de la piété , &
y vécut
fort long-temps en la compagnie de Saint
Egbert. Il fiit enfin rappelle en Angleterre par
Saint Cedd , fon frère, qui le pria de lui aider
. à établir une bonne Règle dans le Monaflere
de LefHngay , qu'il venoit de fonder fur les
montagnes des Déïrois ; & lorfque Saint Cedd
eût été fait Évêque de Londres ou des Saxons-
Orientaux , il lui laifia le foin de gouverner
feul la nouvelle Communauté. Notre Saint
remplit

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Saint Cbad & 9 497
remplit fa Charge d'une manière qui donna la
plus haute idée de Tes vertus.
MARS 3.
Alcfrid , Hls d'Ofwi , étant devenu Roi des
Northumbres , jeta les yeux fur Saint Wilfrid %
pour remplir le Siège dTorck y vacant par la
retraite de Saint Paulin. Et comme il n'y a*
voit alors qu'un feul Evêque en Angleterre
qui pût le fàcrer , il l'envoya en France , afin ïleftfclt

qu'il y reçût l'On£Kon Epifcopale. Mais le Êvêque

long léjour de Wilfrid dans ce dernier Royau-


me , ayant fait défefpérer de fon retour, Ofwi
nomma l'Abbé Chad pour le remplacer. Notre
Saint fut donc facré Evêque dTorck en 666
par Wini de Winchefter , affifté de deux Pré-
lats Bretons qu'on fit venir de fort loin. Il fe
mit a cultiver la vigne confiée à fes
aufli-tôt
foins. prêchoit avec zele la parole de Dieu j
Il

& vifitoit à pied les différentes parties de


fon Diocefe. Sa follicitude avoit principa-
lement pour objet Pinftru&ion des Pauvres t
& de toutes les perfonnes qui étoient les
plus abandonnées. On le voyoit parcourir
les Villages &
entrer dans les plus viles Ca-
banes , pour y porter la conlolation &les
lumières de la Foi.
Cependant Saint Wilfrid arriva de France*
Voyant que fa place étoit remplie > il fe retira
fans murmurer dans fon Monauere de Rippon f
en Northumberland. Sur ces entremîtes parut
Saint Théodore , que le Pape Vitalien. avoit
facré Archevêque de Cantoroéry ; & dans la
vifite générale qu'il fit en qualité de Primat
de toute PÉglife Britannique , il jugea que le
Siège d*Yorck appartenoit à Saint Wilfrid. » Si n fe démet
ff vous croyez, lui dit notre Saint , que mon àefcn Évê-
» Ordination ne foit pas canonique , je renonce
II
498 Saint Chad 3 E.
» volontiers à FÉpifcopat > dont je n'ai jamais été
MARS 2.
» digne ; &
fi je l'ai accepté f malgré mon in-

» dignité , ce n'a été que par obéiflance, » I*


Primat fut charmé d'une réponfe qui refpi-
roit la candeur &
Phumilite. Chad remit le
Siège dTorck à Saint Wilfrid , alla fe ren- &
fermer dans l'Abbaye de Leftingay. Mais on
ne tarda pas à le tirer de fa Sobtude. On le
11 cft fait donna pour fucceffeur à Jaruman , Évêque
Évêque desjçj
Merciens (a). Il fût le premier Évêque
eraens.
^^ Peuples , qui fixa fon Siège à Litchfield
(£). Saint Théodore lui défendit, à caufe
de fon grand âge , de faire à pied la vifite de
fon Diocefe , qui étoit très-vaite. U vouloit par-
là conferver plus longtemps à FÉglife un Paf-
leur fi capable de la fervir.
Quand notre Saint avoit quelques moments
de loifir , il Solitude avec
les pafibit dans la
quelques Moines qui demeuroient auprès de
fa Cathédrale. C'étoit-là qu'il puifoit de nou-
velles forces &
de nouvelles grâces , pour
fe bien acquitter des fonôions de fon Minif-
tere. U étoit fingulierement touché de la penfée
des jugements de Dieu ; lorfqu'il enten- &
doit gronder le Tonnerre , il alloit prier à
l'Églife , &
s'y rappelloit ce jour formidable
où Jefus-Chrift viendra juger tous les hom-

(a) Le premier Évêque (*) Litchfield iîenifie U


des Merciens fut Dittma champ des corps morts. Cette
ÉcoiTois; le fécond KéoUach t nommée a cau-
Ville fut ainfi
de l^a même nation > le troi* fe de multitude de Mar-
la
fieme Trumhere, qui avoir tyrs qui y verferent leur
été Abbé de Gethling dans fang pour la Foi, 6c qui y
le Royaume des Northum- turent enterrés, (bus Maxir
bres ;quatrième Jaruman
le , mien-Hercule.
prédécoûeur de S. Chad.

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S a / # t C m ad, E* 499
mes. Il fonda
par uii effet des libéralités du
,
Roi Wulfere , le Monaftere de Barrow , dans j^RS lt
la Province de Lindfey ( c } , où l'on vivoit
encore avec la plus grande régularité , du teriipp
de Bede ( d). Il mourut de la Pefte , le i Mars
673 , après avoir gouverné le Diocefe de
Litchfield deux ails &
demi. Un des Moines
parmi lefquels il avoit coutume de fe retirer 1

quand les devoirs de fa charge le lui permet-»


toient , fut averti de fa mort par une vifion
(*). Le Saint connut auffipar une inspiration
particulière qu'il fortiroit bientôt de ce monde*
Etant donc tombé malade , il fe recomman-
da 1 aux prierez de fes Religieux 4 les exhorta
à fe préparer eux-mêmes au paffage de l'éter-
nité, par une exaâe vigilance , par la pra- &
tique de toutes fortes de bonnes œuvres. U
reçut enfuite le Corps &
le Sang de Jefus**
Chrift ; après quoi il alla dans le Ciel jouit
de la béatitude promife aux Élus* Son corps
fut enterré à Litchfield , dans l'Églife de Notre*
Dame ; mais on le transporta peu de temps
Après dans celle de S. Pierre. Bede parle de plu**
fieurs guérifons miraculeufes qui s étoient opé-
rées dans ces deux Eglifes par Pinterceflion
du Saint. Ses Reliques furent enfuite trans-
férées dans l'Églife bâtie en 1148, fous l'ii:«

( c ) Au Nord de la Pro- des Eft-^ngles avec là Reind


vince de Lincoln. Étheldred, communément ap
(</) Çarte eft aflez porté pellec Sainte Àudry fit avoir
à croire que S. Chad com- été le premier Officier de fa
mença la fondation du grand Cour. Urenonça enfuite au
Monaftere de Bardney dans monde, pour aller fe ren-
la même Province. fermer dans le Monaftere <to
(<) Ce Moine fe nommoit Leftinçay*
Ovin. Il ctôit vemuiù pays
..

I.

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joo Saint Simplick 3 Pape.
vocation de la Sainte Vierge & de Saint Chad,
laauelle eft aujourd'hui Cathédrale de Litch*
field ; elles y ont été vénérées par les Fidèles
jufqu'à la prétendue Réforme.

Saint simplice,
Pape.
Tiré de fis Lettres , <TÊvagre , de Théophant
& de Libérât. Voye^ parmi Us modernes , Baro-
mus y Henfchénius > & D. Ceiltier, T. lâ.p. i2j r

L'An 485.
5 Implicë étoit de Tibur , aujourd'hui
appellé Tivoli. Après avoir été l'ornement du
Clergé de Rome , fous les Papes Saint Léon
6 Saint Hilaire , il fuccéda au dernier fur
la Chaire de Saint Pierre , en 467. Dieu le
fufeita fans doute dans ce temps orageux 9
pour confoler &
pour défendre fon Églife
dont la Foi fut expofée à de rudes affauts.
Les Barbares s'étoient emparés de toutes les
Provinces de l'Empire d'Occident , ils les &
avoient infeftées pour la plupart* des fuperfti-
tions du Paganifme > ou de lHéréfie d'Arius.
Rome elle-même tomba en leur puiflance la
huitième année du Pontificat de Simplice.
Pluiieurs défordres avoient préparé les voies
à cette grande révolution.
Les Peuples d'Italie avoient été pouffes à
bout par les taxes énormes &c arbitraires dont
on les écrtfoit. Les Gouverneurs qu'on leur

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Saint Simplice, Pape. 501
avoit donnés , s'étoient comportés en vrais
Tyrans en forte qu'ils aimèrent mieux fe re- mars 2<
;

tirer parmi les Barbares , que de refter fous


la domination des Romains , qui les traitoient Tr e é i îlt
J 5 î , l

avec une cruauté inouie. L'ftaUene futbien^ afo«fdcot.


lot plus qu'un vafte Défert. Les Sueves , les
Alains , les Hérules , &
les Goths , qui fer-*
voient dans les Armées de l'Empire , en qualité
de Troupes auxiliaires , fecouerent le joug
de la fubordination , &
firent enfin la loi à
leurs anciens Maîtres. Les Hérules fe révoltè-
rent ouvertement , &
mirent à leur tête Odoa-
cre , <jui fut proclamé Roi à Rome , en 476.
Cétoit im homme de baffe extraftion , mais
plein de bravoure. Il haiffoit les Catholiques 9
parce qu'il étoit attaché au parti des Ariens.
La vue de tant de calamités reunies , pénétrait
notre Saint de la plus amere douleur. Il tâchoit
de confoler fon Troupeau défolé > l'exhortoit &
fans ceffe à conferver le précieux tréfor de la
Foi dans toute fk pureté. Il travaillent aufïi
avec zele à la converfion des Barbares.
Le trifte état de PEgïife d'Orient ne donna Trîfte état

pas moins d'occupation à la follicitude de Sim- de rÉgiife

plice. L'Empereur Zénon, fils, fucceffeur & d0ncllt#

^de Léon I , favorifoit l'Euthychianifme. Bafi-


lifque l'ayant détrôné ça 476 , mit tout en
oeuvre pour répandre la même Héréfie. Le
trouble & la confufion régnoient partout. En*
fin Zénon recouvra l'Empire & publia en ,

481 , fameux Edjt de pacification, connu


le
fous le nom $ Hc no tique. Cétoit une efpece
de Formulaire , dréffé pour réunir les diffé-
rents Partis ; mais étant conçu en termes fort
équivoques , &
paroiffant rejeter d'ailleurs
l'autorité du Concile de Calcédoine » il ne
Il uj

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jos Saint Simplîce 3 Pape;
produifit pas l'effet que l'Empereur s'en étoit

MARS *, p rom * s# nouveaux troubles furent occa*


fionnés par l'intrufion de Pierre Foulon fui*
le Siège d'Antioche , &
par celle de Pierre
Monge » fur celui d'Alexandrie. Le dernier pu»
fclia THénotiquç ; mais ayant refufé d^nathé-
matifer le ConeUç de Calcédoine , les Eu*
fychiens rigides , qu'on appella depuis Aci+
phaks ou fins Chçf 9 fe féparerent de fa Com-
munion, Acace de Conftantinople , reçut la
Sentence que le Pape Simplice avoir portée
contre le toux Patriarche d'Antioche, Quant
à Pierre Monge , qui avoit auffi été condamné ,
U prit le parti de Pierre le Foulon , &
contre
le Pape , &
contre toute l'Églife Catholique»
Il fe donna encore mille mouvements pour
faire adopter l'Hénotique» Notre Saint fe vit
è la fin obligé d'excommunier ce Prélat hypo*
ente, qui n avoit de Religion qu'autant qu'elle
Jç merçoit à fes fins. Il travailla en même-temps
& maintenir la Foi dans les Églifes d'Antioche
& d'Alexandrie , livrées à deux Intms : ce qui

itQtt d'autant plus difficile , qu'il n'y avoit


point Mors de Prince Catholique. Il mourut
CI 483 , après avoir fiégé 15 ans , 11 mois
ff 6 jours, Son corps hit enterré dans TÉ-
Mars,

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Saint Marnante. 503

LE MÊME JOUR.
SAINT MARNAN,
ÉVÊQ U E. -f
'
**.

CE
Roi des
fat aux prières de ce Saint
Écoffois
; qu'Aïdan ;
attribua la viôoire qu'il
,

remporta fur Ithelfrid t Roi Païen des Anglok


Northumbres, Plein de reconnoiflance envers
Dieu , il recommanda à fon fils Eugène IV 9
qui lui faccéda peu de temps après , de traiter
tous les prifonniers avec bonté , pour les eagnet
à Jefus-Chrift ; ce qui réuffit merveilleufç-
ment pour la gloire de notre Religion. CWVald u
& OfVi , Pnnces Northumbres , furent ins-
truits par Saint Marnan des vérités du ChriN
tianifme. Il mourut dans la Province d'Annan-
dale,en 6xo. On vénéroit autrefois fon Chef
à Moravie , &
on le portoit en procefliôn. S.
Marnan eft Patron titulaire de FÉglife d'Aber*
kerdure , fur la Duvern , oui étoit ancienne*
ment très-fréquentée à caule de fes Reliques
qu'on y gardoit. .

Voyez d'Aberden; Buchanan*


le Bréviaire

Hift. I. Rois Aïdan ,


i. fous les Eugène IV^ &
& les Vies MSS des Saints 9 qui font au Çofc
legç des Écoffois à Paris. , ;

504 S. Jqavan y Le K Charles.
5== 6sssss===e=s==s=ss==
S. JOAVAN ocr S- JOE VIN,
ÉV Ê QU E.

CE
tlans la
Saint fut difcîplc de Saint Paul de Léon ;
Grande-Bretagne patrie , &
pafla &
1

avec dans PArmorique. U mena la vie ana-


lui
chorétique dans le Pays d'Ack , puis dans rifle
4e Baz. Il mourut un an après Saint Paul ,
qui Pavoit choifi pour Coadjuteur dans le gou-
vernement de fon Églife. Il eft Patron titu-
laire de deux Paroiffes du Diocefe de S. Pol
<le Léon.
Voyez les Vlts dt$ Saints it Bretagne , par
Lobinçau , p. 71.

VÉNÉRABLE
LE
CHARLES LE BO iV,
Comte de Flandres

^de
C H Arles
Dannemarc ,
de Saint Canut, Roi
étoit
& d'Alizé
fils

de Flandres. Il de*
vint Comte de Flandres en 11 19 , après la
TOôrt de Baudouin , qui , pour récompenfer
fa valeur &
fon râre mérite , Pavoit infli-
tué fon héritier par teftament. On vit briller
en lui toutes les vertus chrétiennes , mais par-
ticulièrement la charité & l'humilité. Ennemi
de la flatterie , il ceux qui Pappro-
n'eftimoit
choient qu'à proportion de la franchife avec la-

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:

Le VéNérable Charles. 505


cjuelle ils Favertiflbient de fes fautes. Plus d'une *
fois il épuifa fes tréfors en faveur des Pauvres ; mars
& lorfqu'il n'avoit plus rien à leur donner , il
faifoit vendre fes propres habits pour les fou-»
lager. Il leur diftribuoit lui-même du pain &
de quoi couvrir leur nudité. On remarqua ,
qu'étant dans la Ville cTYpres , il leur donna
en un feul jour jufqu'à 7800 pains. Il les ai-
xnoit enfin fi tendrement , qu'il tint toujours le
bled & les autres denrées à bas prix , afin
cju'ils ne reflentiffent point les effets de la mi-
(ère. Il porta auffi des Loix très-fages , pour
les garantir des oppreffions des Grands.
Parmi les opprefieurs du pays , on comp-
toit particulièrement Bertoul avec fes parents.
Ce méchant homme avoit ufurpé la rrevôté
de Saint Donatien de Bruges , à laquelle la
Dignité de Chancelier de Flandres étoit atta-
chée. Pour fe venger du vertueux Comte , qui
arrêtoit le cours de fes injuftices , il forma
l'horrible projetde lui ôter la vie. Il en confia
l'exécution à quelques fcélérats , qui fe posè-
rent dans l'ÉgUfe ae Saint Donatien , où le
Comte alloit tous les jours de çrand matin.
On avoit averti Charles de ce qui fe tramoit :
mais il fe contenta de répondre : » Nous fom-
n mes toujours environnes de dangers. Il fuffit
» que nous ayons le bonheur d'appartenir à
» Dieu. Si c'eft fa volonté que nous perdions
m la vie , pouvons - nous la perdre pour une
h meilleure caufe , quepour celle de la juftice
» &de la vérité ? » Tandis qu'il récitoit les
Pfeaumes de la pénitence devant l'Autel de
la Sainte Vierge , fes ennemis fondirent tout
à coup fur lui , & l'aflaffinerent en 1 1 24.
Au commencement du feptieme fiecle , Phi-

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ço(5 Le Vénérable Charles.
lippe Rodoan , quatrième Évêque de Bruges »
ordonna que l'onmît dans la Chapelle de la
Sainte Vierge la Châffe qui renfermoit le corps
du Vénérable Charles ; & depuis Pan 1610 ,
on chante le jour de fa fête une Meffe de la

Voyez les Vies du Vénérable Charles , par


Gautier, Archidiacre de Terouenne ; parGual-
bert , Syndic de Bruges ; & par le Moine
jElnoth. Ces trois Auteurs étoient contempo-
rains. Voye^ auffi les Martyrologes de Molan
& de le Mire , ainfi que les remarques d'Henf-
chénius.

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Sainte Cunêgonde, Imp. 507

///. JOUR DE MARS.


Ste. CUNÉGONDE ,
IMPÉRATRICE.
Tiré de fa Vit, écrite par un Chanoine de Bam+
bcrg , vers fan u5i ; & de la Difftrtation pré*
liminaire fHcnfchénius , p. 2G7.

L'An 1040.

Sainte cunêgonde eut pour marsj.


premier Comte de Luxem-
pere Sigefroi ,
bourg & pour mere Hadefwige. Elle fût
; ,
élevée dès Ion enfance 9 dans les fentiments
d'une tendre piété. Ses parents la marièrent
enfuite à Saint Henri , Duc de Bavière , qui ,
après la mort de l'Empereur Othon IH , fut
élu Roi des Romains , couronné à Mayen- &
cele 6 Juin 1001, Pour Cunêgonde, la céré-
monie de fon couronnement fe fit à Pader-
born , le jour de Saint Laurent. Les Eglifes
de cette Ville reffentirent de alors les effets
accompagna fon
fes pieufes libéralités. Elle
inan à Rome , en 1014, y reçut avec lui 9 &
la Couronne Impériale des mains du Pape
Benoit VIO.
Cunêgonde , avant la célébration de fon
mariage , avoit fait vœu de virginité perpé-
tuelle , & cela du confentement de fon futur

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ç 08 Sainte Cvnégonde 3 ImpI
époux , qui
de fon côté fe réfolut à vivre dans
,

continence parfaite. Un engagement auffî


mars j.
faint , loin de nuire à leur union , en ferroit
les nœuds de plus en plus. Mais le Démon
fut jaloux de leur bonheur , &
fe fervit de la
Sa répuu- calomnie pour le troubler. On accufa donc
itta "
quée! l'Impératrice d'entretenir fecretement un com-
merce L'Empereur fe laifla féduire ,
illicite. &
conçut des foupçons défavantaeeux à la fidélité
de ion époufe. Cimégonde fut moins affli-
Î[ée de l'humiliation qui lui revenoit de la ca-
omnie , que du fcandale qui en réfultoit. Elle
mit en Dieu toute fa confiance ; pour &
prouver qu'elle étoit innocente du crime dont
on faccuibit , elle marcha nu-pieds fur des
focs de charrue cm'on avoit fait rougir , fans
en recevoir le moindre dommage. Henri frap-
pé de ce qui vçnoit d'arriver , s'açcufa d'un
excès de crédulité, &
demanda pardon à l'Im-
pératrice. Depuis ce temps-là , ils vécurent
l'un &l'autre dans l'union la plus intime ,
cherchant en tout les moyens de procurer la
gloire de Dieu , &
de contribuer à l'accroif-
fement de la piété»
Notre Sainte étant allée faire une retraite
dans la Hefle, y tomba dangereufement ma-
lade. Dèfqu'elle fut rétablie , elle accomplit
le vœu qu'elle avoit fait de fonder un Monaf-
tere à Capungen , aujourd'hui Kaffungen ( a ).
Elle vouloit y mettre des Religieufes de l'Or-
dre de Saint Benoit. Mais tandis qu'elle étoit
occupée de ce pieux établilTement , la mort
lui enleva fon mari en 1014. Cette perte lui

(«) Près de Caflel, dans lcDioccfe dcPadwrbom.

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Sainte Cunèg onde j Imp. 5 09
caufa une douleur très-fenfible , fans la jeter
toutefois dans l'abattement. Elle pria & fit
mars 3,
prier Dieu pour le repos de Pame de l'Empe-
reur. Elle le recommanda fur-tout à la piété
de fes Religieufes , en leur témoignant le dé-
iir qu'elle avoit de fe réunir à elles : défir
qu'elle ne tarda pas à effeâuer»
Déjà l'Impératrice avoit épuifé fes tréfors
& fon Patrimoine à fonder des Evêchés à ,

bâtir des Monafteres à décorer


9 Eglifes
les ,
& à foulager mifere des pauvres. Mais ceci
la
ne fuffifoit point encore à fon détachement
des biens du monde. Elle voulut embrafler EU? fe fafc
la pauvreté évangélique , afin de n'avoir plus K* ^*"**-
1

que Dieu pour partage. Voici comment la


chofe fepafi». Le jour anniverfaire de la mort
de l'Empereur, elle affembla un nombre confia
dérable dTivêques , pourj faire la Dédicace de
fEglife de Kafiungen : elle affifta à la céré-
monie , &c offrit fur l'Autel un morceau de la
vraie Croix. Après la leôure de l'Evangile de
la Méfie , elle quitta l'habit d'Impératrice ,
pour fe revêtir d'une robe fort pauvre. On
lui coupa enfuite les cheveux. Après quoi ,
i'Evêque de Paderborn lui mit le Voile fur la
tête ,& lui donna un Anneau pour gage de
la fidélité qu'elle devoit à fon divin Époux*
Cunégonde , après fa confécration , parut
avoir entièrement oublié fon ancienne Digni-
té. Elle fe regardoit dans la Communauté com- $es vertu^
&
me la dernière des Soeurs , ne craignoit rien
tant que ce qui auroit pu lui rappellcr ce qu'elle
avoit été dans le monde. A la prière & à la lec-
&
ture , elle joignoit le travail des mains d'autres
pratiques de pénitence. Son plus grand plaifir
étoit de vifiter tk de çonfoler les malades. Elle

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5 10 Sainte Cunègonde , Imp.
1

traitait durement fon corps , mefurant ce qu'elfé


mars |. lu* accordoit fur le (impie befoin , &
non fur
la convoitife de la chair* Ce fut ainfi qu'elle
pafla les quinze dernières années de fa vie. A
la fin , fes mortifications affaiblirent confidéra-
blement fa fanté ; &c Ton eut lieu de tout crain-
dre pour fa vie. Le Monaftere de Kafiungen
& la Ville de Caffel ne pouvoient penfer, ian9
une très - vive douleur , que la Sainte alloit
,

bientôt leur être enlevée* Cunègonde feule ne


s'affligeoit point de fon état. Elle étoit cou-
chée fur un rude cilice y quoique près de ren-
dre l'efprit ; &
dans le moment même qu'on
récitoit pour elle les prières des agonifants
s'étant apperçue qu'on préparoit un drap mor-
tuaire brodé en or , pour mettre fur fon corps,
jelle changea de couleur > &
ordonna pal* figne
qu'on Tôtât ; on ne put la tranquilifer , cjiren
lui promettant de l'enterrer avec fon habit de
Sa mort. Religieuse* Elle mourut le 3 Mars 1040* Son
. corps fut porté à Bamberg , &c inhumé à côté
de celui de l'Empereur. Le Pape Innocent III
la canooiia fojexinellement en 1 100. Il s'opéra
plufieurs miracles à fon tombeau , ou par fon
mterceffion. La plus grande partie des Reli-
ques de notre Sainte eft encore à Bamberg*

Comment arrive-t-il que de tant de perfonnes


tendre à la perfeâion, il y en ait
<ïui paroiffent
pourtant fi peu qui y parviennent ? La raifon
en eft que la plupart la font confifter unique-
ment dans certaines pratiques de dévotion qui
peuvent fe trouver , &
fe trouvent effeftive*
ment avec beaucoup de. défauts. Que notre
Sainte avoit de la perfe&ion une idée bien
différente Ioftruifgns-nous £ foa exemple , 6c
!

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Sainte Cunégonde > Imp. 5 1
gravons profondément dans notre efprit les ^^ww
maximes fur lesquelles elle régla fa conduite»
MAK^
Pour devenir nous devons travailler
parfaits ,

fans relâche à bannir de notre cœur toute af-


feûion terrelbre , &
à acquérir un entier dé-
tachement de tout ce qui n'eft pas Dieu, Or
cette pureté de cœur eft plus rare qu'on ne
penfe. Elle ne fe trouve que dans ceux qui
combattent iàns ceffe leurs défauts &
leurs
imperfections ; que dans ceux qui maîtrifent
leurs fens par des mortifications fréquentes ;
que dans ceux qui marchent continuellement
en la préfence de Dieu , &
qui préviennent
par le recueillement habituel de leur ame le
danger des communications extérieures ; que
dans ceux qui s'ouvrent à leur Direôeur avec
fimplicité fur leurs peines, leurs doutes , leurs

perplexités principalement lorfqu'ils fe fen-


,

tent tentés d'ufer de diffimulation ; que dans


ceux enfin dont toutes les aâions &
toutes les
penfées ont pour unique 'mobUe TaccompUf-
fement de la volonté de Dieu.

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çii 55. Marin & As t ère , MM.

* S. MARIN ET S. A STERE,
ou A N s t r R E t

Martyrs.
yoyei Euftbt, Hift. 1. 7. c. 15,16, 17.

Vers PAn 272.

\ L y avoit à Céfarée , en PalefHne , vers fan


272 , lin Officier , nommé Marin , auffi di flin-
gue par grande probité, que par fes richef-
ûl
les. Son rang étant venu pour demander une
place de Centurion qui vaquoit , il fe préfen*
ta un compétiteur qui dit au Gouverneur,
nommé Achée , que les Loix Romaines défen-
doient d'élever Marin à ce Grade , parce qu'il
étoit Chrétien. Le Gouverneur fit aufli-tôt
venir le Saint , qui confefla généreufement ik
Foi. Il ne lui donna que trois heures pour dé-
libérer fur le parti qu'il auroit à prendre ; en
forte gue , ce temps expiré , il devoit mourir
eu abjurer fa Religion. Théoâene , Évêque
du lieu, n'eut pas plutôt appris ce qui fe paf-
foit , ou'il accourut pour joindre Marin au
fortir du Prétoire. Il l'aborda , le prit par la
main 9 &le conduiiit à PÉglife. Là , il lui de-
manda , en lui montrant fon épée & le livre
des Évangiles , lequel de deux il
choifilïbir.
Le Martyr , fans héfiter , main vers
étendit la
le Livre , & le prit fur le champ. » Attachez-
» vous donc à Dieu , dit FÉvêque , il vous
» fortifiera

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Saint Êmétere , &c. MM. 5 1
» fortifiera par fa grâce, &
vous mettra en
» pofleffion de ce que vous venez de choifir.
MARS 3»
» Allez en paix. » Marin ayant été cité devant
lé Tribunal du Juge pour déclarer fa dernière
réfolution , y comparut avec fermeté , ne &
démentit point fa Foi ; elle avoit même acquis
un nouveau degré de force de vivacité. &
Le Magiftrat le condamna à avoir la tête tran-
chée ; ce qui fiif exécuté dans le moment
Parmi les témoins de fon martyre , étoit
un Sénateur Romain , nommé Aftere ou Aftyre
,
qui étoit fort confidéré des Empereurs , &
très-connu par fa naiflance &
fes richeffes.
Quoiqu'il fût magnifiquement vêtu , il ne laifla
pas de charger le corps enfanglanté fur fes épau-
le* , &
de remporter à la vue du Peuple. Il l'en-
veloppa enfuite dans une étoffe très-précieufe,
& l'enterra avec toute la décence convenable.
Rufin dit qu'Aftere fut décapité pour cette
aâion ; &
il eft Hbnoré dans le Martyrologe

Romain, , avec la qualité de Martyr.

- — ...... . . .
x . .

MÊME
*

LE JOUR.
SAINT ÉMÊTERE,
VULGA IRE MENT APPELLÉ
• - *. • .

S. MADIR , ET S, CHÉUDOINE
h É
Martyrs. •

\j E s deux Saints % qui fervoient avec dif-


tinûion dans l'Armée Romaine , en Efpagne,
furent martyrifésà Calahorra : mais on ignore
Kk

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5M S.Gui CH O LÈ , ÀBB é.
en quel temps. A là vùé du courage & de la
joie qu'ils faifoient éclater au milieu des tour-
MAR$
ments on eût dit que
, flammes & les glai-
les
ves n'avoient pour eux rien que dé doux &C
d'agréable. Prudence dit que les Païens brû-
lèrent lés Àâes dé lèur fhàrtyre , afin de pou-
voir par-là enfevélir dans l'oubli Phiftoire de
leur confufion. 11 ajoute qu'on célébroit leur
fête en Efpagne , avec une dévotion fingulie-
re , qu'on venoit de toutes parts vifiter leurs
Reliques , .& qu'on éprouvoit vifiblement les
effets de leur puiffanfe interceflïon. » A peine 9
h continuè-t-ii , a-f-on réclamé leur protec-
ff tion , qu'ils écoutent les prières qu'on leur

» fait , & les portent fur le champ aux oreil-


» les du Roi Eternel. »
Voyez Prudence , de Cor. ffymn. /•

SAINT GUIGNOLÊ,
Abbé diLandeveneCj
en Bretagne.

G Uigno l£ (a) étoit fils de Fragan ou


Fracan , proche parent de Cathoun , un des
Rois ou Princes du Pays de Galles. Sa mere
fe nommoit Gven , ou Blanche. U fut con-
facfé à Dieu dés fon enfance , en accompli£-
fement d'un vœu que fés parents avoient fait.
Il naquit ; ainfi que fa fœur Créirvie , dans

(-) E» latin VinwàUim. I { *U S,


On l'appelle encore ©a fran- )

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S.Guigkolè.Abbè. jîj
FArmorique i où l'invafion des Saxons avoit
obligé fa famille de fe retirer Quant à mars
ies deux frères , Guéthenoc Jacut , ils&
étoient nés dans la Grande-Bretagne. Girignolé
fut élevé dans la crainte de Dieu , fc lentit &
de bonne heure un ardent défir d'embrafler la
vie monaftique. Mais la tendreffe que fes pa-
rents avoient pour lui , devint un obftacle à
fa retraite ; &il fut obligé de refter malgré

lui dans le iiecle. A la fin cependant Ton pere >


touché de fa perfévérance , &
d'une grâce
particulière de Dieu , lui laifla la liberté de
vivre dans la Solitude , &
le conduifit lui-
même au Monaflere de Saint Budoc , dans
rifle des Lauriers (<:).
Budoc , né dans la Grande-Bretagne , s'étoit
acquis beaucoup de réputation , par fa piété 6c
}>ar fa feience. Il avoit quitté fon pays avec
es compatriotes, pour fefouflraire à la fureur
des Saxons , Se étolt venu chercher une re-
traite dans PArmorique. Plufieurs Moines s'étant
réunis avec lui dans rifle des Lauriers , il y forma
line Communauté , &
y ouvrit pour la jeune-
fe , une École qui devint très-célebre. Notre •

Saint, fit fous fà conduite des progrès fi rapi-


des , qu'il le donna pour Supérieur à onze
de fes difciples qu'il envoyoit fonder un nou-
veau Monaflere. Ces Religieux , ayant tra-

(>) Ceci arriy a rer$ le mi- Traçai. H cft firué fur la ri-
lieudu V ûecle , & peu après vière de Gouer. Le mot Goût*
que Rival > charte par les Sa- figmfioit fang dans l'ancienne
xons , eut paffé du pays de langue des Gaulois ôt dea
Galles dans rArmorique. Fra- Bretons.
gan s établit avec fa famille ( € ) Aujourd'hui rifle ver-
dans un heu qui depuis a été te. Elle eft auprès de celte
appelle de fon nom » fbu* dcBrehat.
Kk ij

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5 16 SvGuiGN0L± 3 ASBÉ.
verfé la Domnonée C d ) , s'arrêtèrent dans une
Ifle déferte ,
près de rembouchure de la Rivière
d'Aven (0»-& «V conftruifirent de petites
Trois ans après , ils quittèrent cette
cellules.
Ifle , que des vents furieux rendoient
inhabita-
ble , h. pafferent de l'autre côté du Golfe, oh
.ils bâtirent un Monaftere dans la
Vallée de
Landevenec , à trois lieues de Breft (/).
Depuis que Guignolé eût quitté la maifon
de fon pere , il ne porta pour tout habit qu'une
tunique de peaux de chèvres , qui cachoit un
rude cilice. Jour & nuit ,
hyver & été, il étoit
toujours vêtu de la même
manière. Le pain de
froment & le vin n'étoient d'ufage dans fa
Communauté que pour le faint Sacrifice de la
Mefle. On n'y buvoit <^ue de l'eau , mêlée
quelquefois avec une decoûion d'herbes fau-
vages. On n'y mangeoit que du pain d'orge
avec des racines bouillies , excepté le Samedi
. & le Dimanche il étoit permis de man-
, oh
ger du Fromage &
des coquillages. Quant au
iaint Abbé , il fe refufoit les adouciflements
.qu'il accordoit à fes Religieux. Il mêloit tou-
jours avec fon pain , une certaine quantité de
, qu'il avoit coutume
.cendres de doubler en
: carême ; &
durant ce faint temps , il ne fài-
. foit que deux repas la femaine. 11 couchoit fur
. le fable ou fur des écorces d'arbres , n'ayant

( d ) Cétoit le nom qu'on re à préfent.


. donnoir à la Côte feptentrio- (/) Grallon, Comte de
. nale de l'Armorique. CornouaiUes a paffe pour
(<) On la nomme aujour- Fondateur de cet Monaftere,
dhui Château-lin, L'Ifle où parce qu'il avoit donné rem-
nos faints Religieux habite placement & fourni tout ce
lent t prit dans la fuite le qui étoit néceffairc pour le
_ nom de Ti-bidi ou de
Mai/on bâtir.
'
àifr'itns , qu'elle porte enco- . « .... .

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, ,,

S.GVIGNOLÉ, AB BÉ. 517


qu'une pierre pour chevet 11 pofledoit

Pefprit d'oraifon dans un aegré éminent ; mars j..


& il étoit toujours debout ou à genoux, du-

rant ce faint exercice. Il mourut le 3 Mars


vers Tan 529, dans un âge fort avancé. On l'en- -
terra dans TEglife qu'il avoit fait bâtir à l'en-
droit où eft aujourd'hui la Maifon Abbatiale/
On transféra depuis fon corps dans la nouvelle
Églife de Landevenec. Les ravages des Nor-
mands le firent porter en divers lieux delà
France, puis en Flandres. la plus grande partie,
des Reliques de notre Saint eft prefentement à
Blandinberg , près de Gand, à Montreuîl, en &
Baffe-Picardie , dont il eft Patron titulaire (A)..
On trouve fon nom dans les Litanies Angloifes
du feptieme fiecle (i). Il y a en France plu-
fieurs Églifes dédiées fous fon invocation (k ).

( g ) De ce que la Règle de (h) n eft honoré en Picar-


notre Saint difpenfoit en par- die , fous le nom de Saint
tie de l'abftinence les £a- VipievaUy ou Walovay. Quel-
medis, on doit conclure qu'el- ques Auteurs cependant pré-
le étoit quant à la fubftance tendent que le S. Guignolé
la même que celle qu'on fm- de Picardie eft différent de
voit dans les Monafteres de celui de Bretagne. On l'ap-
la Grande-Bretagne , de FÉ- pelle en Bretagne Guiptolé,&
coffe 6c de l'Irlande* Il fuit plus communément VcnnoU*
encore de-là qu'elle étoit ti- Les Anglois le nomment Win-
rée des Règles monaftiques waloé OU JPtnwaloc,
d'Orient , puifque , confor- (i) LePere Mabillon les
mément à la difcipline de a publiées dans fes AnaUHa.
ï Églife Romaine, on jeû- (k) Le pere & la mero
noit alors les fa médis en Oc- de notre Saint font honorés *.

cident. Cette Règle fut fui- d'un culte public. S. Fragan


vie à Landevenec jufqu'en eft Patron Titulaire de la Pa-
Si 8 , que Louis le débonnai- roifle de Plou-fragan f au
re y fit fubftituer celle de S. Diocefe de S. Brieuc dont
Benoit. Le Monaftere de on croit qu'il étoit Seigneur
Landevenec fut réuni à la & d'une autre Paroifle au
Congrégation de S. Maur en Diocefe de Léon , appcllée
1636. S. Frogan. Sainte Gwen eft Pa-

Kkiij

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ji8 S at xt Lamaiissï.
Voyez dans Bollandus , l'ancienne Vie de
MARS Saint Guignolé , Baillet , & Lobineau Vus ,
3.
des Saints de Bru , p. 43 & fuiv. La Vie du
même Saint , donnée par Surius &par Creffy »
mente peu de créance.

SAINT LAMÀLISSE.
S Aint Lamalisse floriffoit dans le fep-
fieme vivoit dans rifle cTAran , fituee^
fiecle. Il
à l'Occident de FÉcoffe. Son éminente fainteté
lui acquit la plus grande réputation. Une pe«
rite Me voifine prit dans la fuite fon nom , qu'elle
5>orte encore. Voyez les Mémoires qui MSS
ont au Collège des Ecoflbis à Paris.

troue de deux ParoitTes , pour difciples à S. Guignolé,


l'une au Diocefe de Léon, S. Manin , & S. Balay ou
& l'autre au Diocefe de Quira- Valay, premier Patron de
per. fin France , 00 l'appelle la Paroifle de Plou-balay,
communément Ste. Blanche au Diocefe de S. Malo. Us
le mot Breton Gwtn ligni- croient , avant de fe faim
fiant BUnchg. S. Guéthenoc Moines , Seigneurs de Rof-
9c S. Jacut ou S. Jacques , fire- meur & de Rof-madeuc. On
?es de notre Saint , font auffi trouve dans les Calendriers
honores en Bretagne , Pun de pluûeurs Églifes de Bre«
le f de Novembre, &
l'autre, tagne les noms de quelques
le 8 de Février &le 3 de autres difciples de S. Guigno-
Wars. I^e dernier eft Patron lé , tels que ceux de S«
de l'Abbaye de S. Jagu , au Guenhael , de S. Idunet o«
Diocefe de DoU On donne Yonnet, deS. Dei, &c

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S: Casimir , Prince. 519

IV. JOUR DE MARS.


SAINT CASIMIR,
PRINCE
DE POLOGNE.
Tiré de fa Vu ; icriu tnntt-Jlx ans après fa
mort par Zacharie Fcrrier , Ligat de Léon f X
en Pologne ; d'une Rilation authentique défis
, accompagnée
miracles de plufieurs cùxonflances
concernant fa Vie, par Grégoire Swiecicki , Cha-
noine de Vilna ; &
du Commentaire fHcnfché^
*w>P-337-

YAn 1485

c
fants
M
A S I I R fot le troificme detreïze en- mars
que Cafimir III , Roi de Pologne , eut
*
cPÉlizabeth d'Autriche , fille de l'Empereur
Albert II ( a )• Il vint au monde le < Oôobre premie-

j 45 8 , & iit paroître dès fon enfance beaucoup


îumcc$ •

d'inclination pour la vertu. Il eut pour Pré-


cepteur Je?n DuglofT, dit Longin , Chanoine de
Cracovie , homme qui joignoit une rare piété
à une grande étendue de connoiflfances , q\ji&

(«) Cette Princeffct quii mourut en ipj.


avoir beaucoup de vertu ,|

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52o 5. Casimir P rincé. ,

par humilité plufieurs Évêchés cpie fon


refiifa
mérite extraordinaire lui avoit fait offrir. Cafi-
mir &
les autres Princes Tes frères lui étoient fi
tendrement attachés , qu'ils nepouvoient fouf-
fiir qu'on Jes en féparat un moment ). Mais
notre Saint fut celui qui profita le plus des le*
çons d'un fi habile Maître.
On le vit à la fleur de fbn âge , fe livrer
avec ardeur aux exercices de la piété, aux &
pratiques de la mortification. Il avoit une fou-
veraine horreur pour le luxe la moleffe <jui&
régnent à la Cour des Rois ; il portoit un dli*
ce fous fes habits , qui étoient toujours fort
fimples. Souvent il couchoit fur la terre nue
& paflbit une grande partie de la nuit à prier
& a méditer, La Paffion de Jefus-Chrifi étoit
le fujet le plus ordinaire de fes méditations.
&U fortoit fréquemment la nuit , pour aller
prier à la porte des Eglifes , oh il attendoit
ou'on les ouvrît j pour affifter aux Matines.
5on efprit & fon cœur étoient continuellement
unis à Dieu ; &
la paix intérieure de ion
ame à tout le monde par la fé-
fe manifeftoit
rénité de fon Plein de refpeô pour
vifage.
tout ce qui concernoit le culte divin , les plus
petites cérémonies de FEglife intérefToient fa
piété. Une chofe lui devenoit chère, du mo-
ment que la gloire de Dieu en étoit l'objet. Il
avoit une dévotion particulière à Jefus fouf-
fraot ; 8c U ne pçnfoit jamais au Myftere de

( h ) Uîadiflas t l'aîné de» deux autres de fes frères,


frères de notre Saine , fut montèrent fucceflivement fur
élu Roi de Bobçme en Ï47* i le trône de, Pologne , le

& devint Koi de Hongrie en premier ert 1491» & k fé-


1490. Albert &
Alexandre, cond en if oi.

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S. Casi mir 3 Prince, kn
notre Rédemption , fans fondre en larmes , &
fans fe fentir embraie d'amour. Quant au faint mars
4,
Sacrifice de la Mefle , il y aflîftoit avec tant
de ferveur & de recueillement , qu'il paroif-
foit ravi en extafe. Pour marquer la confian-
ce qu'il avoit en la prote£Hon de la Sainte
Vierge , il compofa , ou du moins il récitoit
fouvent en fon honneur l'Hymne qui porte
fon nom ; & il voulut à fa mort , qu'on en

mit une copie dans fon tombeau. Il aimoit fi


tendrement les Pauvres , qu'il reflentoit eh
quelque forte leurs miferes. Non content de
leur diftribuer fes biens , il employoit encorè
pour les foulager , tout ce au'il avoit de cré-
dit auprès de fon pere & de fon frère Ula-
diflas, Roi de Bohême.
Les Hongrois , mécontents de Matthias leur
Roi , voulurent élever notre Saint fur fon
Trône en 147 1. Us envoyèrent pour ce fujet
une députation au Roi de Pologne fon pere.
Le jeune Cafimir, qui n'avoit pas encore treize
ans accomplis , eût bien voulu refufer la Cou- n Wufeia
ronnne qu on lui offroit mais , par complaî- Couronne d*
:

fance pour fon pere , il partit à la tête d'une


Armée , pour ioutenir le droit de fon éleâiori.
Étant arnvé fur les Frontières de la Hongrie
il apprit que Matthias venoit de ramafler feize
mille hommes pour aller au-devant des Polo-
iiois , & qu'il avoit regagné les cœurs de fes
Sujets. Il fut aufH que le Pape Sixte IV s'étolt
déclaré pour le Roi détrône, & qu'il avoit en-
voyé une ambaffade à fon pere , pour lui
feire abandonner fon entreprife. Toutes ces
circonftances réunies donnèrent une joie fe-
crete à ce jeune Prince. Il demanda à fon
pçre la permiffion de revenir fur fes pas ;
yiz S. Casimir PrincH ,

ce qui ne lui fut que très - difficilement a£±


MARS cordé. Mais pour ne pas augmenter lè cha-
4.
que fon pere reflentoit d'avoir vu échouer
i

r" defleins , il évita d'abord de paroître ea


fa préfence. Ainfi , au lieu d'aller droit à Cra-
covie , il fe retira au Château de Dobzki m
qui en eft à une lieue ; & il
y paflk trois mois
dans les pratiques d'une auftere pénitence*
Ayant reconnu dans la fuite finjuftice de l'ex-
pédition qu'on l'avoit forcé d'entreprendre
contre le Roi de Hongrie , il refufa conftam-
ment de fe rendre à une féconde invitation
Sue lui firent les Hongrois , & cela malgré les
>llicitations& les ordres réitérés de fon pere.
Cafimir employa les douze dernières an-

4a fan£Hficatk)n. Il vécut dans la plus exacte

continence , malgré les raifons preflantes


Sa mort, qu'on allcguoit pour le porter au mariage. H
mourut de phtyôe à Vilna , Capitale de la Li-
thuanie , le 4. Mars 1483 , à l'âge de 14 ans
& cinq mois. Il avoit prédit fa mort avant
qu'elle arrivât, &
s'y étoit préparé par un re-
doublement de ferveur , & par la réception
des Sacrements de l'Eglife. On l'enterra dans
FEglife de Saint Staniflas.Il s'opéra un grand

nombre de miracles par fon interceflion. Le


Pape Léon X le canomfa en 1 512. Cent vingt
ans après fa mort , on trouva fon corps fans
corruption. Les riches étoffes dont on l'avoit
enveloppé furent aufli trouvées entières, mal-
gré l'exceflive humidité du caveau où il avoir
été enfermé. On a fait conftruire une ma-
gnifique Chapelle de marbre , pour y dépo-
ter fes Reliques. Saint Cafimir eft Patron de
la Pologne , & on le propofe commuaé-

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S. Casimir, Prince: jxj
ment aux jeunes cens comme un parfait mo-
dèle de pureté ( c).

Un Chrétien qui veut que Dieu règne dans


fon ame , doit être mort à toutes 1& vanités
du monde , &c juger de chaque choie par 1*
rapport ou Toppoution qu'elle peu* avoir avec
fon avancement fpirituel. Il y en a bien peu
qui arrivent à cet heureux état. C'eft que
parmi ceux qui fe difent Chrétiens , qui &
font même profeffion de piété . il n'en eft
prefque aucun qui ne laifle fubimer dans fon
cœur des attachements illicites , ÔC qui ne
corrompe fes meilleures actions par des retours
fecrets d'amour propre. Il eft vrai que notre
fragilité eft prodigieufe , &
que , malgré tou-
te notre vigilance , il nous arrivera louvent
de ttanfgrefler la Loi divine en plufieurs points.
Mais ayons foin du moins d'ettacer ces tranf-
greffions par les gémifferaents d'un cœur con-
trit ôc humilié , oc de n'oftenfer jamais le Sei-
gneur de propos délibéré. Penfons, pour ani-
mer notre ferveur , que nous avons à faire à
un Dieu qui ne fe laifle point vaincre en gé-
néralité , &
qui faura dès cette vie , nous
récompenfer de nos peines avec ufure. Que
ne comprenons-nous cette vérité comme S,
Cafimir la comprenoit ! Ce fot le défir d'éta-
blir le règne de Dieu dans fon ame , qui lui

(c) On voitdans une Cha- Pologne 8c dernier Prince de


pelle do S. Germain - des - la maifon de Waza , qui ,
Près à Paris ,le portrait de après avoir abdiqué la Cou-
S. Cafimir, tiré d'après na- ronne , fe retira à Paris , où
ture. Cette Chapelle a été il mourut Abbé de S. Ger-
bâtie par Cafimir. Roi de main - des - Près ; en x668.
5 24 & Lu ce, Pape & M.
infpira le courage de méprifer les Royaume*
ym^g
"

4*
de la terre , &qui le conduifit à ce parfait
détachement de toutes les créatures , fans le-
ouel il ne fût jamais parvenu à une fainteté fi
eminente.

SAINT LUCE,
Pape et Martyr.
, /. 7. c* z; &des Lettres
Tire (TEufebt de Saine
Cyprien. Voye^ TiÛemont, 71 4. p. 118 ; le Pi
Pagi; D. Ceiltier, T. 3 . p. 118; & Pearfon
Annal. Cyprian. p. 31. 33.

L'An 255
s A in t Luce Romain, de naiflance ,
n

fervit utilement l'Eglife fous Papes Saint


les
Fabien & Saint Corneille. Il fuccéda au der-.

nier , martyrifé en 151. Gallus ayant renou-


vellé, au moins dans la Ville de Rome, laf
perfécution de Dece fon prédéceffeur , Luce
fut banni avec plufieurs autres Chrétiens ; mais
on ne fait pas précifément en quel endroit*
» Cétoit amfi , dit Saint Denys d'Alexandrie
» que Gallus fe privoit du fecours du Ciel ,
» en perfécutant &
en exilant ceux qui cha-
» que jour prioient Dieu pour la paix &
la
» profpérite de fon Empire, » Saint Cyprien
écrivit à Luce au nom de fon Eglife &
de fes
Confrères, pour le féliciter fur fa promotion
& fur le bonheur qu'il -avoit de fouffrir l'exil
pour le nom de Jefus-Çhrift. Peu de temps
après, ce faint Pape ayant çté rappelle à Rome,
ily fut reçu avec une joie incroyable par

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S. Lu ce i Papj& &M. 525
Ion peuple , qui îotût de la Ville pour aller,
au-devant de lui. Saint Cyprien lui écrivit
une féconde , pour
lettre lui témoigner la
part à fon retour dans fon Egli-
qu'il prenoit
îe. » Vous n'avez point perdu la gloire du
» martyre , lui diioit-il , puifque vous avez
» eu la volonté de mourir pour Jefus-Chrift.
» Le cas où vous-vous trouvez eft femblable
» à celui où fe trouvèrent les trois enfants je*
» tés dans la fournaife, que Dieu fauva delà
» mort. La dignité du Sacerdoce vient de re-
» cevoir en vous un nouvel éclat. Vos paro-
» les foutenues par vos exemples auront bien
» plus de force , lorfque vous exhorterez les
» autres à confefler Jefus-Chrill aux dépens de
» leur propre vie. En faifant une telle grâce
» aux Pafteurs , Dieu a montré où étoit la
» véritable Eglife. On n'a point vu fou/frir
» les Novatiens ; l'ennemi de Jefus-Chrift n'at-
» taque que ceux qui le fervent. Il épargne
» les Hérétiques parce qu'ils lui appartiennent.
» Il n'en veut qu'à ceux qui font contre lui. *
Le Saint ajouta , en parlant en fon nom & en
celui de fes Confrères : Nous ne celions dans
» nos prières & ctans nos facrifices , de rendre
» grâces à Dieu Je Pere , & àr fon Fils J. C.

» notre Seigneur , &de demander que la glo-


» rieuie couronne de votre Confèffion s'achève
» en vous. Vous n'avez peut-être été rappellé
» à Rome , qu'afin que votre gloire ne fut point
» cachée ; car il faut que la viâime qui doit
» aux frères l'exemple du courage & de la Foi ,
t> foit immolée en leur prélence ( 1 ). »

Saint Cyprien, dans fa lettre au Pape


Saint Adrien y E.
Etienne, dite l'autorité de Saint Lace , com-
me ayant décidé contre les Novatiens , qu'on
ne àevoit point refiiferla Communion à ceux
qui étoient tombés durant la perfécution , mais
qu'il fàlloit les abfoudre , lorsqu'ils auraient
expié leur apoftafie par la pénitence. Eufebe
dit que notre Saint ne fiégea que huit mois;
il paroit même par la chronologie des lettres
de Saint Cyprien , que fon Pontificat ne fut
que de cinq ou fix mois , &
qu'il mourut le
4 Mars ijf ) , fous k règne de Gallus. On igno-
re quel fut le genre de fa mon; On lit fon
nom au 5 de Mars , dans les plus anciens Ca-
lendriers ; mais il eft nommé le 4 du même
mois dans le Romain &dans plufieurs au-
tres. Cette différence pourroit venir de ce
qu'il mourut le 4 , & fut enterré le 5 de Mars.
Son corps ayant été découvert dans les Cata-
combes, on le porta dans l'Egliie de Sainte
Cécile à Rome, où il fut expofé à la véné-
ration des Fidèles , par l'ordre du Pape Clé-
œent VIII.

LEMÊME JOUR.
SAINT ADRIEN,
ÊVÊQUE DE S. ANDRÉ,
EN ÊCOSSE,
Martyr.
Le ftint Pafteur fe trouva fouvent expofé
à lafureur "des Danois qui dans le neuvième
fiecle firent de fréquentes defcentes fur les
Côtes dïçoffe f & qui après avoir ravagé plu-

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Saint BasiNjE. 5 27
fieursProvinces , en taaffacrerent encore la
plupart des habitants. Mais il étoit toujours
MAKS 4.
venu à bout d'arrêter le cours de leur barba-
rie , &<Pen convertir même un grand nombre
au Chriffianifme. Ces Pirates étant tombés
fur rEcoffe avec encore plus de fureur que
jamais , il fe retira dans FIfle de May , fituée
à l'embouchure du Forth. Ils ne l'y eurent pas
plutôt découvert , qu'ils le mirent à mort
avec un Evêque nommé Stalbrand , plu- &
iîeurs autres Chrétiens. Le Bréviaire d*Aber-
den en compte 6600. Ce maflacre arriva en
874 , fous le règne de Conftantin II. On bâtit
depuis dans llfle de May , un Monafiere en
l'honneur de Saint Adrien. On vifitoit autre-
fois l'Eglife de ce Monaltere avec une grande
dévotion , à caufe des Reliques de notre Saint
qui y avoient été dépofées.
Voyez Lefley , Hift. L 5 ; le Bréviaire d'A-
berden ; & les Ckronka Skonmjia.

SAINT BASIN,
Évèque de Trêves.
*

B Royaume
Asin
<lu
fortoit d'une des premières maifons
d'Auftralie. U fe confacra à Dieu
dans Monaftere de Saint Maximin de Tre»
le
ves. Les Frères , dont il âvoit toujours été le
modèle , l'élurent pour Abbé , après la mort
de Hervin. Il fut enfuite élevé fur le Siège
Epifcopal de Trêves, qui étoit devenu vacant
par la etraite de Saint Hidulphe, Le nouvel

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1 ,

5 2.81 Saint Bas i n , E.


Evêqiie cpnferva au milieu de Tes travaux cet .

efprit de prière &


de mortification dont il a-
voit été animé dans la Solitude. Son Palais
devint une efpece de Communauté Régulière ,
où il forma d'excellents Sujets. Mais il n'y en
eut aucun qui lui donnât plus de fatisfa£hon ,
que Ludvin fon neveu. Ce jeune Seigneur
qu'on engagea depuis dans le mariage , n'eut
pas plutôt recouvré fa liberté , par la mort
de fa femme , qu'il renonça entièrement au
monde. Il fonda le Monaftere de Mithal ou
Mettloc , à fix lieues de Trêves , s'y ren- &
ferma , afin de ne plus vivre que pour Dieu.
Bafin , qui foupiroit depuis long-temps après
le repos d'une vie privée , fe déchargea du
fardeau de l'Epifcopat , <ju'il avoit porté près
de zi ans, entre les mains de fes Confrères ,
qui en chargèrent Ludvin ( a ). Il mourut le
4 Mars , vers l'an 700 , fut enterré dans &
l'Abbaye de Saint Maximin. On l'honore en
ce jour à Trêves , en Lorraine , dans les &
Provinces voifines.
Voyez dans Bollandus fa Vie, écrite par
Nizon , Abbé de Mithac , Baillet , &c.

« * • .. . — .

(a) Ludvin mourut vers ves parmi I les Saints*


l'an 718. U cHk honoré à Trc-
V
w m

-m
....
V. JOUR

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SS. Adrien igvsfr^MM. h^9

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1

i?vfcT
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JO ZI R jt) Èt
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SAINT ADRIEN^
il t n^i?Ui . «
E T v ô siotl

SAINT EUBULE
4
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- M'A R
1
T V 'R;
.i>#^ti. i.«
W
-uni/a
UT

- en -Paleftintel * : >v* midi*

T/W i/« THifinn </« Martyrs M la Pàkfitu*


par Elfth^c. />. Jf*W 3£ -rirtluO

^
A ftpticme année dé la petfécutîôtf '9è mars. *
Dioctétien, continuée par (yaléh^Maxitifiëtf
la Paleftine ayant pour Got^rerhtut RrmtKlBh ? 1

qui venoit de faire couler le fang de plufieury


Martyrs^, Adrien &
EitrÀile vinrent de M?ûV !

gane à .Céfarée ,poury vifiterîes ConfeflTeurs.r


On leur demanda à la porte de lâ Ville que!
étoit le- fujét de leur votydgé , comme cela fe ' 1

pratiquoit àJ'égafd des Etranger*. Ils avouèrent


ingénument 1& vérité , 6fc durent âuffi-rôt con^
duits devant le Gouvernetir , qui \ après kitr
avoir fait déchirer les côtés avec les ongles de
fer, les condamna aux bêtes. Deux jours après7
c'eft-à-dire, le j de Mars, jour auquel les Païq**

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. ,
,

fôè
Adrien Evbvlë ,MAt ,

célébroient la tëte de la Fortune ou du Génie


de la Ville , Adrien fut expofé à un Lion , puis
percé d'une épée. Eubule foufirit le mêmefup-
plice le 7 de Mars. Il aima mieux faire le
facrificë vie ,~ que de là cbnferver en
de fa
adorant les Idoles , comme on le lui propo-
foit. Il fut le derhiér qui foUffrlt à Ceferée,
oîi la perfécution avoit duré fept ans , fous
trois Gouverneurs COnfécutifs , Flavien , Ur-
bain , & Firmilien. Au refte Dieu tira une
vengeance éclatante de Firmilien obi avoit
,

été le plus cruel des trois. Il fut décapité la


même année a par Tordre de PEttipereur , en
punition de les crimes. Deux ans auparavant
Urbain avoit fubi U niêitie fort.

Gtft enValn que nous prions le titre de


thréfien^ , &
oue nous prétendons être dilci-*
pies de J élus - Chrift , fi nous refufons de por-
ter notre croix à fa fuite. Voilà la condition
àj laquelle le Royaume célefte nous eft promis
( i ). Nous ne pouvons y arriver par une au-
tre voie , mie par celle qui nous à été frayée

par notre divin Maître. L'obligation de porter


la croix regarde tous les hommes en général
te ne fouftre aucune exception. Mais réglons-
nous notre conduite fur cette doârine ? Som-
mes-nous patients dans les épreuves, morti-
fiés dans nos fens &c nos panions ? Recevons-
nous avec réfignation les peines les mala- &
dies que Dieu nous envoie i Travaillons-
nous fans relâche à la réformation de notre
Embraflbns-nous avec tele les pra-


intérieur ?
*

- i ; -
i

• « > « *- •

< (S ) MittK XVI Mtttb XXIV. à*A

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& KîÀkAPf) NOMMÉE, yji
tiques de la pénitence , fi néceffaires pour ex*
pier nos fautes paffées , & pour détruire tous in^ ,4
les de l'homme charnel } Ah 1 quelle
défirs
monftrueufe contradiûion entre notre créance
& nos moeurs ! Nous voulons appartenir à
Jefus-Chrift , fans porter notre croix , comme

fi ces deux chofes n'étoient pas incompatible*.


Arrnons-nous donc de courage pour fouffrir
avec notre divin modèle. Il nous confolera de
is fortifiera au milieu de nos fouffrances
,
ime il a confolé &
foutenu les Martyrs
au milieu de leurs fupplices comme il : &
a couronné leurs travaux , il couronnera auflî
les nôtres , &
nous fera régner avec eux
dans la célerte Jérufalem.

1£ MÊME JOUR.
SAINT KIARAN ov KENERIN,
jv o mmè par les Bretons

SAINT PYRAN,
> .
>

ÊV Ê QU E.

ÏW I a ft a N eft le plus célèbre des Sàînfs gui


parurent en Irlande quelque temps avant Saint
Patrice ; &C les Irlandois rappellent le premier
né de tem* Saints. Les Uns te font naître dans

le Comté d'Oflbry , & les autres dans celui


<leCork. Il vint au monde , fuivant UÏTérius,
Vers Tan x 52. Il fit un voyage à Rome , pour
fe perfçftiontier dans la connoiffance & dans

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-

13* S.RlAR:Atf>#OMMÈE.
la pratique de la Religion Chrétienne, dont
il avoh été médiocrement inftruit à l'âge de

30 ans* H repafla enfuite en Irlande avec quatre


Eccléfiaftiques , qui méritèrent depuis par
leur fainteté d'être éïeyé$' à l'Épifcopat ( a ).
:

Les E^riyains Irlandois fuppofent qu'il fut or-


donné Èvèque à Rome ; .ipais il eft plus fur
de 4 Jean de Tinmouth , cjui
s'en rapporter
dit que Kiaran fut un des douze que Saint
Patrice facra Evêques , pour lui aider à plan-
ter k Foi en Irlande. _ „>ç.
Notre Saint fe fit çopiWre tuie cellule dans
un lieu environné de jtx>is ^ près de la Rivière
de Fuaran ; &
il s'y forma bientôt un Mo-

naitere fort nombreux. On bâtit enfuite en


;

cet endroit une Ville qu'on appella Saiger , &


qui depuis a été- nommée à caufe du Saint,
Sicr-Keran. Kiaran convertit toute fa famille ,
& un grand nombred'kùtcts Idolâtres. Il don-
na le voile de la Religion à Lia dan fa m ère ,
oc lui fonda un Monaft ère auprès du fien , Mo -
naftere que les Irhndois nommoient Céall*
LiSaih. S^tL amour pour ht Solitude augmen-
tant de jour en jour , il pafla dans la Province
de Commuai lies , où il mena la vie hérémi tique
près de la Sévern , à quinze mille de Padftov.
Il lui vint quelque* difdples qu'il forma à la

piété par fes diicours &


par fes exemples. Ce
fut dans cet Hermitage. qu'il termina fainte-
ment fa vie. On y élfcva depuis, une tgiifej
pour confacrer fa mémoire ^ -
-7

-"'j—
(a) Leurs noms étoient
|
un Bourg appelié
droit 5.
Lugace, Columban , Lugad \Pirms dans Us SabUs.
%c Caflan. . s> heurs des SS. Irlandoi* qui
. {*) Dy a ^unième «-Javoic^ pailc <Uus U Pair

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£ GéRÂSiMË 3 Abbé. $33
> Voyez Jean de TinmoUth , Ufférius ; & les
Golleftions de Léland ,
publiées par Hearne , jviars 5.
T. 3 : p. 10& 174*
1'. >

SAINT GÈRASIME, *• '*


' 1

A B i

G ÉRASIMI
naftique dans
embraffa d'abord l'Etat ino^
Lycie, dont il étoit originai-
la
;

re. Il pafla enfuite dans la PalefHne > lorfque :


les erreurs d'Eutychès commençoient à. «y ré-
:
pandre. Il eut le malheur de fuivre le parti
des Hérétiques ; mais le-famt Abbé Euthyme f
qufilvîfiîav lui ouvrit les yeux, le t'amena &
au centre de Puraté. Vivement touché de fa
faute , il l'expia par ùnerigoxireufe pénitence.
It eut toujours depuis ipne liaîfon fort étroite
ayee Saint EuAyme > Saint Jean le SUentiairc f -,

Saint Sabas
grand nombre pies- étant venus

fe ranger ïous fa conduite: , U bâtit près du


»

vînec de Coraouailles , don- nu (bus le nom de? FUU of^


nèrent auflî leur nom à des Êrèaca. Elle' paiTa ehfuite dans
Églifes & à des Bourgs. laProvince de Cornouailles î
LaParoiffe de Sainte Ban- & s'arrêta dans le Territoire
ka , par exemple , a été ain- de la Paroiffe de Pembro,
si appellée de Sainte Bréaca qui prit enfuite fon nom.
Vierge d'Irlande. Elle* em- Elle Y* bâtit deux Églifes ,
braûa PÉtat Religieux fous l'une à Trenewith , l'autre &
Sainte Brigitte , qui lui bâtis à Talmeneth. Voyez l'Itiné-
un Oratoire féparé , puis un raire de Léland , publié par
Monaftere dans le lieu Hearne , p. J.

Lliij

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Jourdain une Laure , compofée de 70 cellules.
Il y avait au milieu un Monaftenç defHnç air
logement de ceux gui devoieqt mener la vio
Cenobiriquc* Cétoit-là qu'on formoit des fit*
jets propres pour la Laure, Ceux qui PhabU
loient 9 étaient obligés au plus rigoureux fi*
Ience. l\$ ne fe nourriflbient que de pain, do
dattes 8c d'eau. Le Samedi fie le Dimanche, ils
venoient à pouryparticiper aux Saints
l'Églife
Myfteres, Ils pouvoient ces deux jours-là man-
fer en commun
quelque chofe de cuit 9 fie
oire un peu de vin. On n'allumoit jamais de
feu dans leurs cellules ; une natte de jonc leur
îervoit de Ut, Enfin tout rcfpiroit chez eux
la plus exaôe pauvreté, -r : :

Notre Saint portoit l'abfUnence encore plus


loin que fes Frères ; il palfoit tout le Caremg
fans prendre d'autre nourriture que celle du
Corps de Jefus-Cbrift dàns PEuchtri/Ue, U poA
fédolt auffi toutes les autres vertus dans un
degré éminent. Saint Euthyme avott tant de
vénération pour lui , qu'il lui adieflbit ceux
de fes difcipîes qu'il vouloit faire parvenir à
une haute perfection. Saint Gérafime mourut
le 5 Mars 475. Il eft nommé en ce jour dans
le Martyrologe Roman,
Voyez la Vie de Saint Euthyme , par le

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,

Saint Théophile, E. m
SAINT THÉOPHILE, **** if

en Paleftine •

C
fe
9 Saint rendit de grands fervîces à FÉgli*
par rapport à l'affaire des Quartodécimans.
9
0 aida beaucoup le Pape Viftor à établir jfe
niformitc dans la célébration de la Pâque. Il
aflembla pour ce fujet un Concile à Çéfarée

Lettre Synodale ,
fingulierement eftimée de S#
Jérôme pour combattre ceux, qui, comme
,
les Juifs , faifoient la Pâque le 14 de Mars. Û
y) difoit entr'autres choies , que la coutume
de célébrer la Réfurreâion de Jefus-Chrht le
lie , étoit de tradition apoftolique. I|
vers la fin du fécond fiecle. J-é Mar-
tyrologe Romain , qui le nomme en ce jour 1
dit de lui qu'il s'eft rendu iUuftre par fa ia-
geffe & par l'intégrité de fe yie.
Voyez Eufebe , Jfijt. L 6. c. 2. p. 194 ; Saint
Jérôme , CataL 43. p. 118 } Conc. T. 1. pi

( a) Nous avons des Aûes Mali ii n'y a point de pfetii


que Ton 1 fait pafier pour ves fatiafaifantes de leur au*
ceux du Concile de Céfarée thenticité. Voyez Tillemontf
depuis le vénérable Be4e. T. 3. p. 105. 623. 3c 6 n.

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te. -k

MARS y.
«
*
saint>vrk
AR C H%V Ê 4Û É D'A R Lt S.

I R G i L E naquît fous le règne de Clotaûre

J; ;dans l'Aquk£ne. A; péinè fut4i en âge de ;

jdifpofer dç fajibetté* «qu'il fe retira dans le


itfçnaftere
- <fc Vérins. Onll'en tira enfuite pour
g faire.$upéri^r d'une Màifo/i de Clenisou de
jLsligîe>uç , à Ajm& Wj &Wgogne( a ). U s'ac-
quitta fi faintement, de cet emploi, Wil mé~
pta /Têti:e élevé furJe Siège Archtepifcopal
:

J -5 la Ville d'Aries
58*. Deux ans après
iwt Grégoirç lç Prend lui envoya le Pallium,
: l'établit Viç^irp du Saint Siège , pour les
Lglifçs des Royaumes de Bourgogne & d'Au£-
afie (£). Il le chargea encore de travailler

bannir entièrement la Simonie Jl fupprimer


vénalité de$ Dignités Eçdéfiaftiques , &
igner les Néophytes des Ordres Sacrés.
Il voulut' auffi que S^int Auguftin
$ Apôtre
^Angleterre reçut de fes mains l'Onftion
fpifçopaîe, Nçtp&nat gouverna fon Diocefe
avec beaucoup de zelè* de prudence , bâtit &
<fe. nouvelles Eglife^ entr'autres , la Cathédra-
le d'Arles, qu'il dédia à Saint Etienne Premier-
Martyr. Il bâtit encore PEglife de Saint Ho-

(â) L'Auteur de fa Vie ,


fut Supérieur à Autun.
qui écrivoit dans leVIII fie- ( b )pouvoit en
Il

clé , le fait Abbé de Lérins. qualité juger les Caufes ma-


Mais Grégoire de Tours , 8c jeures en première in fiance ,
plus ancien , & mieux rhf- tenir des Conciles , &c.
truit, dit Amplement qu'il

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SAiiït Duausin , E. 537
horat hors de la Ville , & y mit des Religieux ^mmmmmmm -

pour la deffervir. Mabi lion place fa mort vers mars j.


Fan 614 ; &
Baillet , vers Pan 614. II fut en-
terré dans l'Eglife de Saint Trophhne de &
Saint Honorât. On fait fa fête à Létins , le *
de Mars y & le 10 d'Oôobre , dans le Diocefe
d'Arles.
:
Voyez Saint Grégoire le Grand , /. /. Ep.
4j ; 1.6. Ep. 43 ; h. 6. Ep. 63 ; L g. Ep. 10G 9
tu , &
; Grégoire de
114 Tours 9 ffijl. 1. 5. c.
&3 ; &
Vie anonyme du Saint , écrite au
la
Vin fiecle , avec les notes de Barralis , Hifto-*
biographe de Lérins£ celles de Mabillon &
Sec. 2. Ben.

SAINT DRAUSIN,
ÉVÊQUE DE S O S O N S. I S

D R au s in ou Drofin ( a ) naquit dans le


Soiflbnnois , de parents recommandantes par
leur piété &
leur hoblefle. Il fut élevé fous la
conduite de. Saint Anféric, fon Evêque , gui
l'admit en 649 , au nombre des Clercs de (on
Eglife. Devenu Archidiacre dé SoifTons, il tra-
vailla avec fuccès à corriger pluiieurs abus , &
a faire fleiu"ir la "piété. Bertolen , fuccefleur de
Saint Anféric , s'étant démis de fon Evêché 9
engagea le Clergé &
le peuple à élever notre
Saint fur fon Siège. Le nouvel Evêque , quoi-
que d'une complexion très-foible
r" ~~
,

( 4 ) On l'appelle en latin Drufins , Draufcio , Draueio.

Google
538 S41VT D$4vs*»f&
une ardeur aux fondions du minif-
infatigable
tere. Il vjfltoiffouvent fon Diocefe , ôf exer-
çoit tous les devoirs de la charité envers les
Pauvres , (es prisonniers 6ç les Pèlerins, H
bâtit en $57 , à une lieue &
demie de Corn-»
piegn?, l'AbhKaye <fc Saint Pierre de Retondes,
& y mit des Religieux , qu'il gouverpa lui*
même dans une parfaite régularité (£). Ce fut
par (es coitfeijs qu'Ebrpïn , Maire du Palais p
6c Leutru^e fa femme , fo&derent Vannée Ajf T
vante ai# portes de Soiflbns, un Monaftere df
Filles, qui rut achevé çn : mais on Iç fransr

fera depuis 4ans ja Ville ^ &


il fubfifte encore

aujourd'hui fous le nom d'Abbaye dfi Wofrçm


Dame de Soiïïbns. Saint Draufin mourut vers
fan 675 , &
fUt enterré dans le Monaftere
fitué hors de la Ville. On porta ion corps
dans la nouvelle Eglife de la Ville, tel Juin
688. Les Martyrologes de France des Pays- &
Bas , nomment S. Draufin *n ce jour.
Voyez dans Bollandus , la Vie du Saint , par
un Aqonyme ; &
ÏHifloire de Notre - Dame dé
Soiflbns , par Dom Michel Germain 1 Bénédie*
tin, p. 187 & fitfv. Baillet, &c
4 '

(*) Ce Monaftere n'eft gieux, dépendant de TAhi


plus aujourd'hui qu'un Prieu- baye de Saint Médard do
ré fans Cloître ôc fans Reli- Soiflbw.

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5. Roger Franciscain. 539

SAINT ROGER,
Religieux Franciscain.
Î^Oger étoit un difciple de S. François
«FAffifé ,qui le reçut dans fonOrdre eç 1416
& Tenvoya enfuite enEfpagne, quoiqu'il n
fut que Laïque , au rapport de Wadwg. U ppf-
fédoit refprit de pauvreté dans un degré fu^
périeur ; & fon p. Perc le regardoit coippit
celui de Tes difciple* oui avoit le plu* de
charité. Le don de prophétie &
celui des mi*
racles le rendirent fort célèbre pendant fa vie
& après fit mort , arrivée en 1*36. Son çhef
eft à Villa-Franca , au Diocefe d'Aftorga , &
le relie de fon corps à Todt, en Italie , oïl
Fon dit en fon honneur un Office particulier
qui a été approuvé par Grégoire IX. S. Roger
eft honoré en ce jour par les Fiwcif&ijis ,
auxqueU Benoit XIV a pçrmfc d'eu &ïre la
fgte.
Voyez Henfchénius f p. 41 S f Se les Anndu
ét Vading f publiée* à %om& par JFf>ofié<* f
en i73x.T.x.p.4*J«
540 S. ChrodeganG, E.
-

».

VI. J 0 17 R DE MARS.
S. CHRODEGANG,
ÊQUE DE METZ.
7ïr*Ptf^Z , Diacre , 1. 1. de Geft. Longob.
C. l6du P. Henfchinius ,
; 4^3 ; de la Vit
du Saint , donnée par George Von Eckart , Hift.
Francise Orientalis., T. 1. p. 912. Voye[ 9 D
Mabillon, Annal. Ben. Lu,*
Aô. SS. Ord.
Ben. T. 4. p. 184 ; D. Ceillier , T. /£. '76*;
6* de Miurijfe , Hiit des Évêques de Metz , 1. x.

L'An 766.

™~w«. HRODEGANG, iflu d'une famille


naquit dans lé Brabant, nommé
trés-illuftfë,'
alors Hasbain. Ilpafla fes premières années dans
l'Abbaye dé S. Tron , oti il fe rendit fort habi-
le dans les Science^ &
dans les voies intérieu-
res de la piété. Il devint Référendaire Chan- &
celier de France , puis premier Miniftre de
Ses vertus.
Charles-Martel en 737. Quoiqu'il fut obligé
de vivre à la Cour , il ne changea rien à la
fimplicité des habits qu'il ayoit coutume de
1
porter. Il continua, aum de macérer fon corps
par les jeûnes , le$ vdtfés ; & l'ufage du cili-
ée. Son amour pour la mortification alloit fi
loin , qu'il n'accordoit à la nature ,
que ce qui
étoit abfolument indifpenfable. Sa charité pour
les pauvres ne connoiflbit point de bornes.

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t

5. ClHR O DE G AN G 3 E. 54J
Il pourvoyoit aux befoins (Tune multitude
innombrable de malheureux ; il protégeoit les MARS ^
veuves &
les orphelins , qui le regardoient
comme leur pere & leur tuteur.
la mort de Charles-
Quelque temps après
Martel , c'eft-à-dire , en 741 > il fut élu pour
remplir le Siège Epifcopal de Metz. Mais Pé-
pin , fils &
fuccefleur de "Charles , ne voulut

iiftre

doîibïe dignité lui impofoit. Il ne perdit rien


de fon humilité, de fa douceur , de ion recueil-
lemêhti &
de la-fimplicité qui régnoit dans
tôut fon extérieur. Il portoit toujours un rude
cilice fous fes habits. U Daffoit une grande partie
de la nuit en prières , & fes yeux avoient coiv-
tume de verfer un torrent de larmes durant ce
feint exercice.
Tf?

; Pépin , devenu Roi de France , députa Chro-


iegang vers le Pape Étiennfc III , pour l'invi-
ter i paffer en France, afin de ft délivrer de
Toppreffion des Lombards. Le Saint fe chargea
Im-même de conduire le Souverain Pontife 9 ,

& lui fit traverfer les Alpes fans danger.


Ucft
Eqennè Affaires donc
char s*«
fut reçu avec les plus grandes marques d'hon-
iieur.Le Roi n'eut pas plutôt appris qu'il âlloit
ehtwt dâni fes Etats , qu'il envoya fon fils aîné
pour faécompagner julqu'à Pohî-fur-Yonne eii
Ohampagnb , où il fe tendit en perfonne pour
le recevoir. Le Pape étant fur le point "d'arri-
ver en cettç Ville *, Pépin alla* au devant dë
lui; & lorfqu'il l'eut joint, il defcendit de che-
val, fe j>rofterna avec toute fa famille ^& les
r

Sdjfjjbdfts de fâ Cour , 6c mafçha quelque temps


à pied", par refpeû pour 'feS&tt Pere, &fcno&

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S. CnRobEGAftetE.
fe retira dans leNlonaftere de Saint Denys % en
att€n dan ^ que fes affaires prirent une tournure
Mars é.
plus heureufe.
Cependant Pépin , qui avôît fait fa propre
Câufe de celle du Souverain Pontife , députa
notre Saint en 7*4 , vers Aftolphe
des , Roi
Lombards , pour le conjurer au
des SS» nom
Apôtres de n'exercer aucunes hoftilités contre
la Ville de Rome , de fendre au Saint Siège
les Places cprïl lui avoit enlevées
f de ne &
j>oint affujettir les Romains à des fuperftitions
incompatibles avec leurs Loix. Cnrodegaag
s'acquitta de fa commiffion ; mais il avok af-
faire à un Prince inflexible qui ne voulut rien
accorder.
De retour dans Ion Diocefe , Il s'appliqua
à rétablir la difcipline f &
à faire fleurir la piété
Son tele de toutes parts. En
pourudifa- a Cathédrale
75 5 il fit du Chapitre de
,

une Communauté Régulière ; en


pline
quoi il fut imité par plufieurs autres Eglifes. Il
donna à fes Chanoines une Règle fort fkge
compofée de trente-quatre articles. Dans le
premier de ces articles , l'humilité étoit forte-
ment recommandée 9 comme étant la bafe de
tout le refte.Dans un autre , le Saint obligeoit
les Chanoines à fe confefTer à PÈvêque
au
moins deux fois par an , (avoir, au commen-
cement du Cârême &
de l'Avent(<*), fl bâtit
& dota Moàafteres de Saint Pierre , de
les
Goreé, &
de Lorsh ou Laurisham. Cfc dernier
étoit dans 1e Diocefe dç Worms, Saint
Chro-

{* ) M. Fleury 1 donné Cointe ,T, f 1 , & dans Im


un abrégé des
La
autres articles. Ornières Éditions des Cw
ftefcU entière -a <èté "infé- cites.
rée dans les Annales de le

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• ,

S. tHR0DÈèAyà 3 E. $4$

dans le Monaftere de Gorze , auquel il avoit mars $#


légué de grands biens par (on Teftament , que
nous avons encore. Il eft nommé ert ce joter $•
dans les Martyrologes de France , d'Allemagne ,
& des Pays-Bas.

Le zele que notre Saint fit paraître pour ra-


nimer dans le Clergé cet efprit de prière &
de
ferveur qui caraâérifoit les temps apoftoli-
«nies, eft une preuve bien fenfible de fôn ar-
deur pour le fervice de Dieu , &
pour l'accroif-
fement de fa gloire. La réforme qu'il entreprit
itoit fondée fur la connoiffance qu'il avoit dei
grandes difpofi rions qu'exige une fonftion auffi
iublime, que celle de faire l'office des Anges,
en chantant louanges du Séigneur ,
les & d'ê-
tre établis médiateurs entre le Ciel &la Terre.
Puiflent ceux qui font attachés au fervice des
Autels , n'oublier jamais l'ém inérité dignité de
leur État ! Rien né fera plus ptôpte à les entre-
tenir dans cette fainteté de rie > dahS cette pureté
4e cœur , &
dans ce détachement de toutes les
créatures 5 qui doivent les diftinguer du com-
mun des Fidèles. On ne les verra plus foupi-
rer qu'après les chofes de Dteu ; Ôc leur vertu
n'aura plus rien à craindre du fouffle empefté
du riçt

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544 B- Colette:
mars 4. LA BIENHEUREUSE
COLETTE BOILET,
RÉFORMATRICE DÉL'ORDRE
DE SAINTE *
9

»•
CLAIRE, t

7W difaVitytcntt par Pïerrt


de Vjaux^fom
Voyt\ U Min ; Mttyot , Hift. des
Confejfcur.f
Ordres Relig. T. 7. p. 98 1 & Barbara , Vies
des Saints du Tiers Ordre de Saint François*
X# 2. p. 5 1* . . 1 »» -, .

L'An 1447.

OLETTE Boilet , fille d'un Char-


pentier, naquit en 1381 , à Corbie, en Picar-
die. Elle reçut au Baptême le nom de Colet-
te , c'eft-à-dire , de petite Nicole , à caufe de
la dévotion que fes parents avoient à Saint
Nicolas Eilç fut élevée dans i'amour des hu-
Sa famîHe.
initiations ;&
des auftérités , de- la pénitence.
La craipte de bfcfl& la vertu de
qu'elle ayoit
Ses venus.
pureté , la fit renoncer à toutes les coippar
gnies , même à celles des perfonnes de Ion
fexe ; ou fi quelque fois elle voyoit ces der-
nières | ce n étoit que pour leur donner des
inftruftions falutaires fur les vanités du mon-
de. Ses difeours avoient alors une onûion
qui , aidée de la grâce , touchoit les cœurs les
plus infenfibles. L'humilité étoit fa vertu favo-
rite ; & fa joie croifToit à proportion du mé-
pris

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\

L& B. C OZET TE. J4J


pris qu'on avoit pour fa perfonne. Vivement
pénétrée du fentiment de &
de fes MARS
fa baflefle
6.
sliferes, elle n'ofoit paroître aux yeux du mon-
de fans rougir. Elle fe regardoit comme une
très-grande péchereffe , & prévenoit les moin-'
dres retours de l'amour propre , par la prati-
que de toutes fortes d'humiliations* Les pau-
vres & les malades trouvoient en elle une bien-
faitrice qui les fervoit avec une affeâion, qui
feule auroit été capable d'adoucir la rigueur de
leur fort. Elle s'étoit fait une Solitude de la mai-
fon paternelle , vivant retirée dans une petite
chambre oh elle partageoit fon temps entre
la prière & le travail des mains. Allarmée du'
péril auquel fa beauté Fexpofoit , elle pria
Dieu de la lui ôter ; & elle devint fi maigre
& fi pâle , qu'elle étoit à peine reconnoifla-

ble. Elle coopéra de fon côté à ce changement


par de rudes macérations. Cela n'empêcha
pourtant pas qu'il ne lui refiât un certain air.
de majefte , de douceur &
de modeftie , qui;
édifioit tous cçux qui la voyoient. Son pere
& fa mère , qui découvraient en elle une con-<
duite extraordinaire de Pefprit de Dieu , ne
la gênoient point dans fes exercices , lui &
laiffoient à cet égard une entière liberté.
Après la mort de fes parents , Colette dis-
tribua aux Pauvres le peu de bien qu'ils lui
avoient lailfé , & fe retira parmi les Béguines
établies etf Flandres , en Picardie &
en Lorrain 5i rwiiie.

ne. C'étoit une fociété de femmes pieufes qui


fubfiftoient du travail de leurs mains , qui &
menant une vie fort régulière fans faire de
vœux , tenoient une forte de milieu entre les
femmes &
du fiecle, celles qui s'étoient con-
sacrées à Dieu dans la folitude du
Mm

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j4f Za B. Colette.
Ncttre Bienheureufe ne trouvant point affer
mars 6.
d'auftérités parmi Tes compagnes , clic les
auitta, & prit, de l'avis de Ion Confefleur,
1 habit du Tiers-Ordre de Saint François, dit
des Ptniunts. Trois ans après , elle fe rendit
chez les Religieufes de Sainte Claire , appellées
IMamfkiy du nom du Pape Urbain IV , qui avoit
mitigé leur Règle. Son deflein étoit de travail-
ler à la réformation de cet Ordre , de le &
ramener à la pureté primitive de fbn Infiitut.
Pour fe préparer à cette grande œuvre, dont l*ef-
de Dieu lui avoit uifpiré la penfée , elle
r't
renferma , avec la permiflion de l'Abbé de
Corbie , dans un petit Hermitage , où elle
pafia trois ans , toute occupée des pratiques
de la plus rigoureufe pénitence. Elle alla en-
faite chez les Clarifies d'Amiens &
de plufieurs
autres endroits. Mais la perfuafion où elle
étoit qu'elle ne réuffiroit dans fon pieux de£»
fein , qu'autant qu'elle feroit autoriiée, la dé-
termina à faire le voyage de Nice , en Proven-
ce , afin de conférer avec le Cardinal Pierre
de Luna , que la France reconnoiflbit pour
Pape légitime , fous le nom de Benoit XIIL
Le Cardinal la reçut avec bonté , &
lui pro-
mit fa protection. Il lui donna le titre de Su-
périeure Générale des Clarifies , avec le plein
pouvoir d'établir dans cet Ordre tous les Rè-
glements qu'elle jugeroit propres à contribuer
à l'honneur de Dieu &
au falut des ames.
Colette embrafée d'un nouveau zele , par-
courut les Diocefes de Paris , de Beauvais ,
.
de Noyon , & d'Amiens , afin de ranimer dans
F . ctor- Maifons de fon Ordre le vérita-
les différentes
™c 1 re
^ e tfy™1
^c Saint François. Mais elle éprou-
ce.
^°cf va de grandes difficultés de la part d* tous

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La B. Çolett^ 547
.ceux qui ne favoieiu pas décerner l'œuvre de
Dieu. On la traita même de vifionnaire , de &
fanatique. Elle fouffrk avec joie les injures dont
on la chargeoit y Se mit toute fa confiance en
Dieu, qui tait réuffir tôt ou tard les entreprî-
tes dont fa gloire çfl le principe. Elle fe retira
en Savoye , où mieux dif-
les efprits étoient
pofés. Elle y Réforme , qui , bientôt
établit (a
après fut adoptée en Bourgogne , en France ,
en Flandres &
en Efpagne. Outre plufieurs an-
ciennes Maifons qui la reçurent , la Bienheureu-
fe Tintroduifit encore dans 17 nouveaux Cou-
vents qu'elle fonda de fon vivant ; toutes ces &
Rcligieufes furent dans la fuite diftinguées des
Urbaniiles, par le nom de pauvres Clarîffh. Il
y eut aufli plufieurs Communautés d'hommes
qui fe fbiunirent à la Réforme de la Bienheu-
ieijLfe Colette (*).
La fervante de Dieu avoît un amour extra-
ordinaire P our te pauvreté. Elle vouloit oue
tout refpirat cette vertu dans les Eglifes les &
Bâtiments des Maifons de fon Ordre. Elle ne
pOrtoit point de fandales, alloit toujours &
pu-pieds. Son habit étoit non feulement d'une
étoffe groflîere, mais de différentes pièces raj>-
>rtées &c coufues enfemble. Elle mculquoit
ement à Ces Sœurs la néceflité de morti-
er fa volonté. Jefus-Chrift , difoit-elle ,
n'ayant jamais fait que la volonté de fon Pè-
re , depuis le premier inftant de fa vie juf-
xju'à fon dernier foupir, comment voudrions-

( «) LéonX, par uneBul- [le nom général d'Obfervmii-

le datée de l'an 15 17 , ™it \nts. Par là fut éteinte la dif-

les Réformes dejrtn&ion des Colltuin*.


différentes
iOràrt dt^Françdis , iousj
Mmij
548 La B. Colette.
nous nôtre ? Quiconque , ajoutoït-
faire la
elle , opiniâtrément attache à fon fens ,
eft
MARS 6.
marche dans la voie de l'Enfer. La Paffion du
Sauveur étoit le fujet le plus ordinaire de fes
méditations. Les Vendredis elle vaauoit à ce
faint exercice , depuis fix heures du matin
jufqu'à fix heures du foir , fans prendre aucu-
ne forte de noiuriture. Durant tout ce temps-
là fon efprit & fon coeur n'étoient occupés
eue des louflrances de Jefus-Chrift ; & ils en
étoient fi vivement touchés, qu'ils donnoient à
fes yeux une fource abondante de larmes. Sa
ferveur pour Jefus Crucifié redoubloit encore
dans la Semaine Sainte : ne pouvoit modé-
elle
rer les tranfports de fon amour pendant Pau-
gufte Sacrifice de la Méfie ; & elle fe confef-
loit fouvent avant d'y aflifter , afin de le faire
avec une plus grande pureté d'ame. Par une fui-
te de l'immenle chanté qu'elle avoit pour le
prochain, elle follicitoit continuellement par
des prières ferventes , la converfion des pé-
cheurs , &
la délivrance des ames du Purga-
toire.
Enfin notre Bienheureufe arriva au bout de
tomba malade à Gand ,
fa carrière. Elle y &
mourut, munie des Sacrements de TÉglife,
Sa mort.
le 6 Mars 1447, dans la foixante-fixieme an-
née de fon âge. S on corps eft expofé à la,
vénération publique dans FEglife du Monafte-
re de fon Ordre , dit de Bufdéan. La Bien-
heureufe Colette n'ayant jamais été canoni-
nommée dans le Martyrologe
fée, n'eft point
Romain. Cela n'empêche pas que les Francis-
cains , &
quelques Villes , ne difent en fon
honneur un Office particulier, qui a été ap-
prouvé par les Papes Clément VIII 9 Paul ê V

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Fridolin,Abbé. 549
S.
Grégoire XIII, & Urbain VOL Lorfqu'on je-
1

va fon corps de terre à Gand en 1747 , il s'o- ^


péra plufieurs miracles. L'Ordinaire du lieu *

en conftata juridiquement la vérité, en dref- &


fa le procès-verbal, qui fut envoyé à Rome.

- • >
LE MÊME ,
JOUR. ;

SAINT FRIDOLIN,
Abbé.
c E Saint , qui étoit d'Irlande ou (TÊcofle ;
quitta fa patrie &
vint en France , où il fe mit
(f abord à prêcher l'Évangile. Il fonda enfuite
plufieurs Monafleres dans l'Auftrafie, la Bout-'
gçgne , &
la Suifle. Le dernier Monaftere qu'il
fonda , fut celui de Sekingèn , qui eft dans une
Ule formée par le Rhin , &
aujourd'hui une
des quatre Villes foreffieres qui appartiennent
à la Maifon <T Autriche. Il y mourut en 538.
IIeft le Patron titulaire des Suiffes du Canton
de. Glatis , qui porte pour armes l'image de
Saint Fridolin , auquel on donne un habit de
Bénédiûin , quoiqu'il n'ait jamais été de cet
Ordre.
* Voyez Molan , addit. ad Ufuard; Pantaléon ;
Profopogr. Vïr. llluflr. Gtrnu ad an. 5oz ; King ,
in Caknd. Wion , Lign. Vit. /. 3.

Mmiij

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1)0 S, Baldrede y &c. Saintes , &ei
— C >
*

• ttRSfc
SAINT BALDREDE,
ÉvêÇve de Glas co^
Jl9 Aldrede , vulgairement appelle Bau«
dré , fuccèda immédiatement à Saint Mungo f
'

dans leSiece Epifcogaljje Glafcov. Il fonda


f)lufieurs Monafteres en Ecofle , mourut vers &
'an 608 , dans la Province de Laudon. Ses
Reliques étaient anciennement vénérées avec
beaucoup de dévotion dans un grand nombre
d'Eglifes d'Ecoffe.
Voyez King in Ca/end. les Hiftoires d$ &
11
Boèce, de Major, de Lefley, &c.
*
- «

j
* «1 1

SAINTE KINEBURGE,
SAINTE KYJÏESWIDE,
SAINTE K Y NE DR IDE,
ET SAINTE TIBBA.
Xj E s trois premières étaient filles de Penda f
Roi païen de Mercie , & foeurs des Princes PéîK
da, Wulfere, Éthelred & Mérovald(>). Kyt

(a) Plufieurs Auteurs pré- ment Rois de Mercie, &


tendent que Sainte Kynédri- embraflerent le Chriftianiime*
de eft la même que Sainte MéroiraJd fut un Prince très-
Kï neburge. Péada , Wulfere , religieux
éc Éthelred furent fucceûlve-

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SAINTE KlNEBURCE 3 &C J|I
neburge époufa , au rapport de Bede ( i
) ,

Alchfrid , hls aine d'Ofvi ,


lequel fut Roi de j^xtu 4,
Bernicie , du vivant de fon pere. On dit qu'ils
vécurent tous deux dans une continence per-
pétuelle. Notre Sainte , étant devenue veuve
à la fleur de fon âge , quitta le monde , &
alla gouverner le Monaftere de Dormundéa£-
ter, ntué fur les frontières des Comtés de Hun-
tington , &
de Northampton ( b ). Elle y donna
l'exemple des plus éminentes vertus , entr'au-
tres,d'un zele ardent pour la perfeftion des amea
confiées à fes foins. Elle veilloit fur fes Religieu-
fes avec une bonté vraiment maternelle , les inf-
truifoit de leurs devoirs, les portoit fans relâche
à la pratique des préceptes &
des confeils évait-
géliques , & adreflbit pour elles à Dieu les priè-
res les plus ferventes. Elle aimoit tendrement
lesPauvres , & les recommandoit fortement
aux chantes de les frères.
Kynefwide &
Kynédride étoient encore fort
jeunes lorfque leur pere mourut. Elles firent
à Dieu de leur virginité ,
le facrifice embraf- &
ferent FÉtat monaftique. Kynefwide prit le
voile dans le Monaftere de Dormundéailer.
Les corps de ces Saintes furent transférés à
Téterborough , où l'on anciennement
faifoit

leur fête le 6 Mars. On


hônoroit conjointe-
ment avec elles une Sainte Vierge , nommée
Tibba , qui étoit leur parente. Elle mourut le

13 de Décembre,
après avoir paiTé plufieurs
années dans la Solitude , dans les exercices&

Voit fondé félon quclques-


( b ) Ce Monaftere fut de-
,

puis appcllé KynéburgC'Caftcr, uns. Ceft aujourd'hui Caficr.

y Google
55* SAINT CâDRO KLyÀMBi.

MARS Cambden ( x ) > qu'on avoit autrefois une dé-


votion finguliere pour cette Sainte 9 dans le
JBourgde Rihal , bâti fur la Rivière de Wash »
au Comté de Rutland.
Voyez Ingulphe, Ififl. />. 8So ; Guillaume
àt Malmesbury , de Pontif. L 4. e. 29 ; Cap-
^rave , & HarpsHeld , Sec 7. «. 23.

SAINT CADROEL,
\,i \. - A B B
#
É.

v>i E Saint , iflu d'une bonne famille cFÉcofle;


pafla en France , &y prit l'habit monafKque
a Saint Benoit-fur-Loïre.Il réforma en 960 , le
^Monaftere de Saint Clément de Metz , &
mourut à Nériftein vers Tan 975 , dans le cours
tfune vifite qu'il fit à Adélaïde , mere de l'Em-
pereur Othon L Ses Reliques fe gardent à S.
Clément de Metz , &
on IV honore en ce
TOUT,
Voyez Henfchénius , Mabillon, Sec. S. Ben*
p. 480 , &
Su. €.p. 28 ; D. Calmet , HiJU&
de lorraine r l. /g. n. Cj. p. /<>//•

- -

<*) h RutUnâshku

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Si Thomas d'Aqvin. 553

VIL JOUR DE MARS.


SAINT THOMAS
D> A QU I N,
'>

DOCTEUR DE L'ÉGLISE.
Tiré de la Vie , écrite par Barthtlani de Laïques i
qui avoit été quelque tempsfin Confejjtur , 6* <Tune
jteonde Fie , compofie pour fa Canonifation 9 par
Guillaume de Tocco 3 Prieur de Bénevent f lequel
avoit été lié particulièrement avec lui. Voyt[ en-
core la Vie du mime Saint , que le P. Touron donna
à Paris en , in-4°.

L'An 1274.
»
* * - —
»

Jdt E S Comtes tTAouin^ fi connus dans le MARS *


Royaume de Naples les derniers fiecles , ti-
xoient leur origine d'un Prince Lombard. Us
«étoient alliés aux Rois de Sicile , d'Arragon , Sa frmffl*

-de France , &


à plufieurs autres Souverains de
- l'Europe. L'aïeul du Saint dont nous donnons
Ja Vie , avoit époufé la lœur de l'Empereur
Frédéric L .

Thomas eut pour pere , Landulphe Comte


«FAquin ,
Seigneur de Lorette de Belcaftro. &
Sa mere , nommée Théodore , étoit fille du
Comte de Théajfc, II vint au monde vers la fin
.de l'année 1216I On s'apperçut dès fes premie- res
^J^es.^
jes années , que Dieu le deftinoit à quelque

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^4 S. Thomas d'A^uin.
chofe de grand. Il fut en effet exempt despaflîoas
& des défauts qui font l'appanage ordinaire de
l'enfonce. L'innocence de fes mœurs , la féré-
nité de fon viface , l'égalité de fon caraâere f
fa modeflie , fe douceur f to« enfin annonçoil
due fon ame avôit été prévenue des plus abon*
dantes bénédi&ons du Ciel. A peine eut-il at-
teint Tâge de cinq ans , ,<jue fon pere le mit
fous la conduite des Religieux du Mont-Caffin,
potir lui donner les premiers principes des
Sciences &
de la Religion. Ses Maîtres furent
étonnés dé 11 rapidité de fes progrès. Ils n'a-
voient point encore eu de difciple qui annonçât
tant de talents pour l'avenir , & qui montrât
de henreufes difpofitions pour la vertu.
fi

Le jeune Thomas n'avoit encore que dix


ans , lorfque l'Abbé du Mont-Gaffin confeilla
à fon pere de l'envoyer dans «quçbque Ifotvef*
fité. Le Comte d'Aquin , avant que d'éloigner
fon fils , lui (it pafler quelq\i^s mois auprès

de fa mere dans le Château de Lorette , lieu


que la dévotion à la Sainte Vierge a rencta fi
fameu* depuis la fin du treizième fiècle. Tho-
mas fixa fur lui l'admiration dé toute fa famil-
le. On étok frappé de voir en ha tant de tno*
l

deftie , dé piétë ot de recueillement. Les plus


nombreufes Compagnies ne pouvoient le dit-
traire ; &
it étoit toujours auflî occupé de
Dieu 9 que dans le Monafter^du Mont-CafTm.
Il parloit peu , &
ne difoit jamais rien qui nfe
<&t très-à-pWpos. Tout fon tertips fe trouvoit
partagé erftte^îa priera y l'étude , ou quelques
autres éKtfeices auffi férieuff qu'utiles. Son
plus gralid pfoiflr étoit dô plaider la caufe des
Pauvfe*< auprès de fes parehts, dont il obte-
noit de quoi- faire d'abondantes aumônes. Sa

Digitized by
S. Thomas b> A<ivin. 555
citante féconde en reflburces, trouvoit toujours
le moyen de procurer dés foulagements aux j^ars i9
malheureux. Il lui arriva piûs d'une fois de re-
trancher de fa nourriture pour affifter ceux qu'il
favoit dans lebefoin. Son pere en ayant été
informé , lui permit de faire telles aumônes
qu'il voudroit. Le Saint agit conféquemment
à cette permiffionpendant le peu de temps n ra cm-
,
dieràNapict
qu'il relia au Château de Lorette,
La Comteffe , que tant de bonnes qualités
a voient fingulierement attachée à fon fils , pro-
pofa de lui faire commuer fes études dans la
maifon paternelle. Elle apportoit pour raifon 9
que fon innocence feroit trop expofée dans les
Écoles publiques. Mais le Comte fut d'un au*
tre avis ; & rejetta l'éducation particulière 9
dont avantages ne lui parurent point con-
les
trebalancer ceux que l'émulation procure aux
jeunes gens. Il fe détermina donc à envoyer
fon fils à Naples, où l'Empereur Frédéric^ EL
avoit fondé une Univeriité en 1124. Ce. Prin-
ce avdit en même temps défendu d'étudier
ailleurs v ét cela pour faire tomber rUniyer-
ftté de Bologne , Ville contre laquelle il ét&it
irrité* H
arriva de-là qu'une multitude inbotfi-
brable tPÉtudiants fe rendit à NapleS* Mais le
défordre &
la corruption les y iuivirent ; &•
l'on pouvoit dire alors des Écoles de cette
Ville , ce que Saint Auguftb difoit (j)-de
celles de Carthage.
- Thomas ne fut pa$ long-temps à s'apperce-
voir que la vertu avoit beaucoup à craindre
du féjour de Naplfcs ; &
il regret* plus d'Une

r) Coirfcf. L T. c. K^

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^6 S. Thomas d'Aquim*
fois le Monaftere dû Mont-Caffin. Mais com~
me il n'étoit pas en fon pouvoir de retourner
dans cette chère Solitude , il fe revêtit des
armes de la Foi ,& fut garder fon cœur avec
tant de vigilance , qu'il ne fut point infeôé par
le poifon du vice. Il imita le jeune Daniel 6c
Tobie , qui demeurèrent fidèles au Seigneur,
au milieu des défordres de Babylone & de
* ^Ninive. Il fit un paôe avec fes yeux , pour
grès dJ^i ne les biffer jamais repofer fur des objets
& dangereux ou profanes. Il évitoit avec le plus
^ lavcr
" grand foin la fociété de toutes les perfonnes

dont la vertu étoit fufpefte ; &pendant que


fes condifciples couroient aux divertiflements
du monde , il fe retiroit dans quelque Eglife
pour s'y entretenir avec Dieu , ou dans fon
cabinet pour y vaquer à l'étude. Il apprit la
Rhétorique fous le célèbre Pierre Martin.
Quant à fon Cours de Philofophie , il le fit
fous Pierre cTHibcrnu , l'un des plus favants
hommes de fon fiecle.Ses progrès furent fi ra-
pides , qu'il étoit en état de répéter les leçons
publiques avec encore plus de clarté &

préciuon , que les Maîtres ne les avoient ex-
pliquées. Mais fon application à l'étude ne
rempâchoit pas de travailler à fon avancement
fpiritùel. Il fe perfeéHonnoit chaque jour
dans la fcience des Saints , par l'exercice de
Poraifon , & pat la pratique de toutes fortes
de bonnes œuvres , que ion humilité lui fiu-
fbit cacher aux yeux des hommes. Il.feprivoit
fcuvent du néceffaire pour affilier les. Pauvres ;
& les àûipônes qu'il -leur diftribuoit. avoient
d'autant plus de mérite , que Dieu feul en étoit
le témoin. Enfin , il fe con tormoit k cette ma-
ime de l'Évangile : Quô la main gauche m

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S. Thomas d'Aqvin. 557
vote pas ce que donne la main droite* %

Les difciples de Saint Dominique , mort mars 7,


depuis vingt-deux ans , fàifoient alors l'orne-
ment de l^feglife , par l'éminente fainteté de
leur vie. Thomas eut quelques entretiens
avec un d'entr'eux 9 qui étoit un homme tout
rempli de l'efprit de Dieu. Les inftruâions
qu'il en reçut augmentèrent en lui le mépris
qu'il avoit déjà conçu pour toutes les chofes
du monde. Sa ferveur prenoit tous les jours
de nouveaux accroiffements ; & Pamour di-
vin s'allumoit de plus en plus dans le fonds
de fon cœur* Cette flamme facrée agifîbit fur
lui avec tant de vivacité , qu'étant un jour
en prières , fon vifage parut tout rayonnant
de lumière. Enfin , deeouté du fiecle plus que 11 entre ch«
jamais , il réfolut de fuivre le défir ardent qu'il Ics Do ™"û-
.

cauu*
avoit d'entrer dans l'Ordre de Saint Domini-
que. Le Comte fon pere en ayant été informé,
employa les promeffes &les menaces pour
empêcher l'exécution d'un pareil deffein. Mais
tout fut inutile. Le jeune Thomas , qui favoit
que lavoix de la chair &
du fang ne doit
point être écoutée , lorfque celle de Dieu fe
fait entendre , perfifta dans fa première ré-
folution , & prit l'habit chez les Domini.
cains de Naples en 1243. Il avoit alors dix-fept
ans.
La Comteffe famere n'eut pas plutôt appris ce
3ui venoit de fe pafler, qu'elle courut à Naples ,
éterminée à tout entreprendre pour faire ren-
trer fon fils dans le monde. A la première nou-
velle que Thomas reçut du motif de fon voya-
ge , il pria fes Supérieurs de lui épargner les
combats qu'il auroit à foutenir , en l'éloignant
de Naples. On eut égard à fa demande i 6c çn

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558 S. TaoxiAr d'Aqvin*
l'envoya à Rome dans le Couvent de Sainte
mars 7.
Sabiii» On le fit enfuite partir de cette Ville,
pour 1 envoyer à Fans mais il ne put y ar-:

river par les raifons que nous allons rapporter.


Perfécmions On avoit mandé fa marche à deux de fes
qu ii eiTuye frères Landulphe
,
&
Raynald , qui tervoient
EftLSte" Tofcane à*™ rAnnée de l^poeur Fré-
déric II. Us firent garder les chemins avec tant
*

de vigilance , que Thomas fut pris auprès


d'Acqua-Pendente (a), &
remis entre leurs
mains. Us voulurent l'engager à quitter ffeabk
qu'il portoit. Mais le jeune Novice déclara cons-
tamment crue rien ne feroit capable de l'y déter-
miner. On le conduifit donc en habit de Religieux
au Château deRocca-Sicca , qui appartenoxt à fa
famille. Sa mere fut enchantée de l'avoir auprès
d'elle , fe flattant qu'on pourroit peu à peu le
porter à choifir un autre État. Elle eflàya de
lui perfuader qu'il n'étoit pas dans Tordre de
la Providence , fous prétexte qu'il avoit difpo-
fé de fa liberté fans le confentement de fes
parents. Elle conclut de-là qu'il alléguerait
envain la vocation du Ciel , puifqu'elle ne
pouvoit être oppofée à la Loi qui oblige les
enfants à ne rien faire que de concert avec
leurs parents. Elle ajouta encore beaucoup
d'autres raifons , auxquelles les prières , les
larmes &
les careffes donnèrent une nouvelle
force. On fait combien la nature eft éloquente
dans de femblables circonflances. Thomas fut
fenfible à la douleur de fa mere : mais fa fen*
fibilité fe renferma dans les bornes du devoir.
H lui répondit avec une fermeté modefte 6c
. 1
,

* • • » ». a m
1

( a ) Petite Ville finnie entre Sienne & le Lac de Bolfcnne.

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V

S. Thomas D'A^inir. 559


tcfpeûueufe , qu'il avoit tout
pefé , que fa vo-
cation venoit certainement de Dieu , qu'il & *
étoit réfolu d'y correfpondre , quelque chofe
qu'il dût lui en coûter. La Comtefle , outrée
de colère , accabla fon fils de reproches fan-
glants , ordonna qu'il fut étroitement enfermé
& ne permit qu à fes deux fœurs de le voir
& de lui parler.
Qu'on fe figure les aflauts que Thomas eut
a foutenir de la part de fes fœurs. Elles atta-

dreffe a de plus II
a
fur-tout la couleur d'une mere défolée , que
rien ne pouvoit confoler. Le Saint , toujours
inébranlable , ne répondit que par des difcours
touchants fur le mépris du monde, fur l'a* &
mour de la vertu. Il parloit fur ces matières
avec tant d'énergie , qu'à la fin fes fœurs en
furent vivement touchées. Il eut même la
confolation de les voir entrer dans fes fenti-
ments , &embraffer avec zele le parti de la
piété. La conyerfion de deux perfonnes que
la grâce venoit d'iuiir à lui par des liens in-
finiment plus forts que ceux du fang , ne con-
tribuoit pas peu à adoucir la rigueur de fa
captivité. U employoit la plus grande partie
de fon temps à &à
la méditation ;
la prière
le refte , il le leûnre de quelques
donnoit à la
Livres que les Religieux de Saint Dominique
lui avoient fait remettre par le moyen de fes
foeurs. Ces Livres étoient une Bible , la Dia-
leôiaue d'Ariftote , &
les Ouvrages de Pierre
Lombard , dit U Maître des Sentences.
Cependant Landulphe & Raynald revin-
rent de l'Armée. En arrivant ils trouvèrent
leur mere dans la défolation , & Thomas auffi

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,

j6ô S. Tsomas î>


9
A<ivik:
ferme qu'auparavant. Cette circonftance, à la-
quelle ils ne s'attendoient peut-être pas , leur
ht imaginer , pour réduire leur frère , des
moyens que l'humanité défavouoit , ainfi que
la Religion. Le premier coup qu'ils lui por-
tèrent, fut de le renfermer dans la Tour du

Château. Ils mirent en pièces fon habit de


Religieux, le chargèrent d'opprobres, lui &
firent fouffrir mille indignités. Rien n'étant
capable d'ébranler le Saint, ils s'aviferent d'un
artifice , dont le Démon feul put leur infpi-
rer la penfée. Ils introduifirent dans fa cham-
bre une des plus belles Courtifanes du pays
& lui promirent une grande récompenfe ,
dans le cas qu'elle vînt a bout de le léduire.
Cette malheureufe employa pour réuffir , tout
ce qu'une femme de fon caraôere a de rufes
& d'impudence. Thomas , effrayé du danger
que court fon innocence , ne perd point
courage : il fe défie de lui-même , ap- &
pelle a fon fecours le Dieu de pureté. 11 s'ar •

me enfuite d'un tifon allumé , pourfuit celle


qui vouloit le corrompre , &
la chafle de fa
chambre. Après cette viûoire , il reffentit
une confufion fecrette d'avoir été tenté d'une
manière fi humiliante ; puis s'étant profterné,
il rendit grâces à Dieu du fecours qu'il lui

avoit envoyé , il fe confacra de nouveau à


fon fervice , &
lui demanda , les yeux baignés
de larmes , la grâce de ne jamais pécher con-
tre la vertu que le Démon avoit eflayé de
lui ravir. Sa prière fut exaucée ; car non feu-
lement il vécut depuis dans une chafteté par-
faite , mais il n'éprouva pas même la moindre
tentation de la chair , comme il le déclara
quelque temps avant fa mort au Pere Renaud
fou

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S. Thomas d'AqUîn. 561
foh Confeffeur. Tant il eft vrai qu'une premie- =g
re viâoire défarme quelquefois pour toujours hiÀKS
?
Fennemi du falut. Mais cela ne difpenfe pas
de l'obligation de veiller fur foi -même avec
la plus grande exaûitude ; autrement on mé-
riterait d'être abandonné de Dieu, qui ne hait
rien tant que la préemption.
Il y avoit un an, ou même deux , félon
quelques Auteurs , que Thomas étoit empri-
fonne dans le Château de Rocca - Sicca. Le
Pape Innocent IV , 8c l'Empereur FrédéricII ,
auxquels on avoit rendu compte de la cruelle
perlecution qu'on lui avoit fuîcitée , slntéref-
vivement en fa faveur. Ils firent parler
pour lui à fa mere & à fes frères , qui à la
fin prirent des fentiments plus humains à fon
égard. La Comteffe même ne parut pas éloi-
gnée de vouloir favorifer fecrettement l'évafion
de fon fils. Les Dominicains de Naples , qui
furent inftruits de fes difpofitions , envoyèrent
quelques Religieux déguifés au Château de
Rocca-Sicca. Ceux-ci s'étant rendus à Theure
marquée , au bas de la Tour , recurent dans
leurs bras le Saint , qu'une de fes fœurs fàifoit /

defcendre par le moyen d'un pannier , & le


menèrent avec joie a leur Couvent. Thomas it ^ïo"
' 5_^
fit profeffion l'année fuivante. Le jour oii il

offrit à Dieu le facrifice de fa liberté , lui pa-


rut le plus beau de fa vie : il le paflk dans
les exercices de la piété la plus tendre & la
plus affcftueufe. Cependant fa mere & fes frères
défapprouverent hautement fa Profeffion ; ils
lui prêtèrent des motifs odieux , 8c en portè-
rent leurs plaintes au Saint Siège. Le Pape
manda auffi-tôt à Rome le jeune Profès , pour
l'examiner fur fa vocation à l'État Religieux,
Nn

Digitized by Google
]6i S. Thomas d'Aquin.
Il de fes réponfês,
fut 'extrêmement fatisfàit &
mars 7 P^tré d'admiration pour fes vertus. Il ap-
prouva le genre de vie qu'il avoit embraffé 9 &c
lui permit d'y perfévérer. Depuis ce temps-là
notre Saint ne fut plus inquiété par fa famille.
Cependant Jean le Téutonique , Général
des Dominicains , ayant fait un voyage à
Paris , y mena notre Saint avec lui. Il le fit
enfuite pafler à Cologne , où Albert le Grand'
enfeignoit la Théologie avec beaucoup de ré-
putation. Thomas fuivit les leçons de cet ha-
bile Maître. Tout le temps que les devoirs de
la Religion lui laiffbient libre , il le confa-
croit à rétude. L'envie de s'attirer les applau-
difTements des hommes , n'entroit pour rien
dans le défir qu'il avoit d'apprendre ; il ne fe
propofoit que la gloire de Dieu 6c l'intérêt de la
Religion. U fit bientôt des progrès extraordinai-
res ; mais il les cachoit par humilité. U fe con-
damna par le même motif à un rigoureux filen-
ce , que fes condifciples prirent pour flupidité.
On fappelloit par derifion U Bauf muet , ou U
Éloge de îotiFan ^ Sauf dt SiciU. U arriva même une fois
humilité, qu'un de fes condifciples lui offrit de lui expli-
quer la leçon , afin de lui en faciliter l'intelli-
gence. Thomas accepta l'offre avec une vive
reconnoiflance , quoiqu'il fût dèflors en état
de fervir de Maître aux autres. Une telle hu-
milité avoit d'autant plus de mérite devant
Dieu , eue les Étudiants font plus portés à
faire briller leurs talents & leur fupériorité.
Mais Dieu qui fe plaît à glorifier les fervi-
teurs, à proportion de l'éloignement qu'ils ont
pour l'effime &
les louanges, permit que l'on
reconnut dans le Saint une grande beauté de gé-
nie , une pénétration d'efprit finguliere, 6c un

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S. Thomas &Aqvin. 56$
IHofond faVoir au jugement le jptus fo-
, joint
ide» En eflfet , Albert Fayant interroge fur des mars
7%
matières fort obfcure$,il répondit avec tant

même de joie : » Nous ap-


s'écria tranfporté
pelions Thomas le Bœuf muet : mais il mugira
* un jour fi haut par fa doâxine , qu'il fera en*
» tendu de tout 1 Univers ( z) ». Un éloge auffi
flatteur n'excita dans le Saint aucun mouvement
de vanité. On ne vit point de changement dans
fa conduite, parce qu'il n'y en eut point dans
fou intérieur. C'étoit toujours même modeftie ^
même fimplicité 9 même même
recueillement,
amour pour la retraite , le filence , la prière.
Pénétre fans ceffe de la grandeur de Dieu , &C
de la baflèffe de fon néant , il étoit dans la
plus parfaite indifférence par rapport aux mé»
pris &
aux louanges. Ce fut dans la première
année de fon cours d'études fous Albert le
Grand , qu'il écrivit fes Commentaires fur la
Morale d Ariflote.
Le Chapitre général des Dominicains tenu
à Cologne en i*4J* ayant arrêté qu'Albert
iroit enfeigner la Théologie dans le Collège
de Saint Jacques à Paris , notre Saint eut or*
dre de l'y fuivre , pour continuer fes étu-
des ( b ). Il y parut avec le plus grand é-
clat. Mais fon application à la Théologie ne
porta point lafécherefle dans fon cœur , corn*

( 2 ) Nos vocamus ijîum Bo~ Jacques avoit été donné aux


vem TTtutum : fed ipfe dabit talent Dominicains par TUniverficé
in doSrina mugitum , quoi in tO~ de Paris. C'eft de là que cet
to mundo fonabit. Religieux ont été appelles
{b) Le Collège de Saint Uçobin* en France.
Nnij

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j$4 S. Thomas D'JqzriNé
me que trop ordinaire à ceux qui
cela n'eft
n '&u<lîent que pour devenir favants. Il avoit
MAKS 7
trouvé le moyen de rendre fa prière conti-
nuelle , en marchant fans cefle en la préfence
de Dieu , &
en s'uniflant à lui par de fré-
v
quentes afpirations. Dans l'éclairaflemcnt des
queftions épineufes , il comptoit moins fur
Ion travail, que fur la bonté divine , qu'il
follicitoit avec une nouvelle ferveur. Il le
trouva très-bien de cette méthode. Auffi avoit-
il coutume de dire qu'il avoit moins appris

dans les Livres , que devant fon Crucifix ,


& aux pieds des Autels.
La joie intérieure de fon ame fe manifef-
Son obéif- toit par la férénité de fon vifage , par fa dou-
fon
ceur&fonafiabmté dans la converfation. Son
m c
i™mîn* 1
*
obéi/Tance étoit égale à fon humilité. Nous en
citerons un Un
jour qu'il lifoit au Réfec-
trait.
toire , le Correâeur de table lui dit par méprife
de prononcer une fvllabe autrement qu'il n'a-
voitfait : quoiqu'il l'eût bien prononcée , il fe
reprit aufli-tôt ; & lorfque les Frères lui dirent
après le repas , qu'il n'auroit pas dû fe repren-
dre , puifqu'il ne s'étoit point trompé , il leur
répondit : » U nous importe bien peu de pro-
» noncer un mot de telle ou telle manière : mais
» il importe toujours à un Religieux de prati-
» quer Pobéiffance &
l'humilité. » 11 étoit fi
mortifié &
tellement mort à fes fens , qu'il pre-
noit fes repas fans faire la moinde attention à
l'efpece ou à la qualité des mets qtfon lui fer-
voit ; &fouvent il lui arrivoit de fe lever dç
table fans favoir ce qu'il avoit mangé.
U fut nommé en 1148, par le Chapitre gé-
néral de fon Ordre pour profefler à Cologne
avec Albert le Grand. Dès fes premières leçons,

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$. Thomas &Aqvin. j6ç
de Ton ancien Maître
iî égala la haute réputation

quoiqu'il ne fut que dans k 11 e . année de MARS


7.
ion âge. Ce fut alors qu'il publia fes Com-
mentaires fur la Morale &
fur les autres
Ouvrages philosophiques d'Ariftote. Lorfqu'il
vit approcher le temps oii il devoit recevoir H e ft
les Saints Ordres, il s'y prépara par un re-
doublement de ferveur dans la prière , les veil-
les & les autres exercices de piété. Il avoit
une dévotion extraordinaire pou^ Paueufte
Sacrement de rEuchariftie. U pafToit plufieurs
heures du jour &
une bonne partie de la nuit
au pied du Sanâuaire , où il produifoit les
A&es de l'Adoration la plus profonde , fe&
livroit aux tranfports de l'amour le plus ten-
dre , à la vue de l'immenfe charité de Jefus-
Chrift. Quand il eut été ordonné Prêtre , il
cffrit le Saint Sacrifice avec une dévotion
vraiment angélique. Il arrofoit fouvent l'Autel
de fes larmes , & y paroiffoit comme ravi hors
de lui-même. On remaïquoit dans fes yeux &
fur fon vifàge un feu qui montrait extérieu-
rement celui dont fan cœur étoit embrafé. L'ac-
croiiïement de fa ferveur étoit il fenfible après
la réception du Corps &
du Sang de J. C.
que les Fidèles qui fe trouvoient alors dans
rEglife , en étoient fingulierement attendris.
Sa Meffe finie , il en fervoit ou en entendoit
ordinairement une autre, en aftions de grâces*
Notre Saint ayant été chargé d'annoncer la
parole de Dieu , il le fit avec une onâion ad-
mirable. Par-tout on l'écoutoit comme un An-
çe defcendu du Ciel. Auffi fes Sermons étoient-
îls fuivis d'un grand nombre de convenions.
Cologne , Paris , Rome , & quelques autres
Villes d'Italie , furent les principaux théâtres
Nniij

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$66 S. Thomas zfA<£vitfi
de fon zele. Les Juifs même fuivirent
quel*
quefois l'exemple des Chrétiens , parce qu'ils
yums r#
n'étoient pas moins frappés de l'éclat de fes
vertus , que perfuadés par la forte de fes tal~
Il q«ivef-
fonnànents ' yi{ intérêt ^U'ilpi^hûit ail fa-
it? fa famille, lut de fes proches , lui infpirà un ardent dé*
fir de les voir marcher dans les voies die la
juftice. Il travailla donc à leur converfion , &:
il vint à bout de les porter à la pratique de la
" bli*e
vertu. Sa fœii* aînée fe confacra
! dans le Monaftere de Sainte Marie de
Capoue , dont elle mourut Abbeffe. Théo-
dore fa féconde fœur , qui époufa le Comte
de Marfico, pafla le refte de w vie d'Une ma-
nière très-exemplaire , fie s'endormit du fom-
jneil des Juftes. La Comteffe fa mere expia
par toutes fortes de bonnes œuvres , les fau-
tes que lui avoit fait commettre une tendrefle
trop naturelle , 8c termina auffi faintement
fa çarrierç. Quant à fes deux frères Landul-
phe &
Raynald, ils eurent également le bon-
heur de mourir en véritables Chrétiens. Us
fatisfirent à la juftice divine par la patience
,
avec laquelle ils fouffrirent les perfecutions
que leur fufeita l'Empereur Frédéric II , qui ,
pour fe venger de ce Qu'ils avoient quitté fon
îçrvice, rafa ta Ville d'Àquin, en 1150,
Thomas renvoyé a Paris, en iiji ,
fat
pour y enfeigner la Théologie. La réputation
qu'il s'étoit déjà faite f par la vivacité de fon
efprit & par la folidite de fon jugement , at-
tira dans fa claffe une multitude innombra*
pjisîedjî^^ d'auditeurs ( c). Il reçut le deçré de
-

( ç ) On fuivoit alors âans |


rUniverfitt! de Pari» une

Digitized by
,

S. Thomas d A<zvin 9

x 567
Doôeur. le 13 Oâobre 1157 ; mais il fallut
pour l'y déterminer , que les Supérieurs s'ex- mars
pliquaflent par des ordres. U avoit alors trente-
un ans. Les Prbfeffeurs de rUniverfité deJRà-
ris s'étant trouvés partagés l'année fui vanté? , ;

au fujet des accidents Eucharistiques , ils réso-


lurent de le confultér , & de s'en tenir à fa
décifion. Cétoit une diitinûion bien flattcufe
w P *
4 -
\ .

thode de celle qu'on


différente an U Maître des Sentemets dans
y fuit aujourd'hui.
Les Pro- la Ciafie d'un Docteur le
-,

fcffcurs ne diâoient point de fur l'atteftation de ce Doc-


caiers; ils prépar oient leurs teur , ildes exa-
fubiffoit
leçons avec foin , & les pro- mens rigoureux
publics &
nonçoientde fuite comme des puis étoit admis au grade de
Harangues. Les Écoliers en Licencié, qui lutéonnoitle
retenoient ce qu'ils pou- droit d'enfeigner comme Doc-
voient , 6c fouvent faifoient teur. U employoit une fécon-
en leur particulier de cour- de année à expliquer U Msi-
tes notes pour graver dans ère des Sentences ; après quoi f
leur mémoire ce qu'il y avoit il recevoit du Chancelier do
de plus eftentiel. Cette ma- l'Univerfité le grade de Doc-
nière d'enfeigner eft encore teur : & dèftors il avoit une

en ufage à Padoue , 8c dans École avec un Bachelier qui


quelques autres Écoles. On enfeignoit fous lui.
n'accordoit alors tes degrés Saint Thomas avoit déjà
Académiques qu'à ceux qui commencé les Acles nécciVai-
enseignaient. Ilfalloit, pour pour parvenir au Docto-
rcs
être reçu Maître -es- Arts , mais il fut obligé de les
rat i

avoir étudié, au moins fix interrompre pour quelque


ans , & en avoir vingt -un temps, à l'occa£on des dé-
accomplis. Quant à la Théo- mêlés qui diviferent en 9*
logie, on ne pouvoir l'en* les Docteurs Séculiers & Ré »

feigner , que lorfqu'on l'avoit guliers. Ces derniers étoiene


étudiée tait ans, 6c qu'on principalement des Ordres de
en avoit trente-cinq. L'Uni- Saint François 6c de Saint
veriité difpenfa Saint Thomas Dominique. Notre Saint me
de la règle générale , à cau- fut point épargné dans Je
fe de ion rare mérite , 6c lui feu de la difpute ; on l'ac-
permit de profeffer la Théo- cabla d'invcttives 6c d'inju-
logie à vingt -cinq ans. Ce- res, auxquelles il n'oppofa
lui qui étoit nomme Bache- long-temps que la modertic
lier expliquoit pendant un 6c le filencc. Comme il prfi-

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568 S. Thomas î>*A<£ir in.
!">oiir un jeune Doâeur. Mais le Saint , dont
'humilité égaloit la fcience , ne
préva- fe
lut point de cette marque d'effime. Il mit en
Dieu toute fa confiance , puis il eut recours au
jgàne &
à la prière , pour obtenir du Ciel les
htmieres dont il avoit befoin. S'étant ainfi
préparé à l'examen de la queftion propofée
il la traita dans un Ouvrage que nous avons
encore , &
cela avec une telle fupériorité , que

choit un Dimanche des Ra-


, nier Ouvrage , infatué des
meaux dans l'Églife de fon erreurs de l'Abbé Joachim,
Couvent t il furvint un Be- foutenoit entr'autres impié-
deau , qui t après l'avoir in- tés, que le Nouveau Tefta-
terrompu , fit la lefture d'un ment feroit aboli comme l'An-
Libelle où il étoit fort mal- cien , en 1160 , fie qu'on ver-
traité , ainfi que fes Collè- roit alors commencer le troi-
gues. Cette leûure finie , fieme État du monde , qui
Thomas reprit tranquillement feroit le temps du Saint Eiprit,
fon difcours t fie le continua d'un autre Évangile , fit d'un
fans dire un feul mot pour Sacerdoce plus parfait. Saint
la jurtification v ni pour cel- Thomas écrivit contre cet
le de fes frères. Les chofes Auteur, fie contre quelques
n'en refterent pas là. Guil- autres Fanatiques ; après quoi,
laume de Saint Amour dé- il s'embarqua pour revenir
chira les Ordres mendiants en France. Il furvint dans ce
dans fon livre du périls du trajet une tempête fi violen-
derniers temps. Saint Louis te , que les mariniers fit les
Payant envoyé au Pape Ale- pafiagers fe crurent perdus
xandre IV , Saint Thomas & fans reffource. Au milieu de
Saint Bonaventure payèrent la confternation générale % le
en Italie , pour prendre la dé- Saint , fans rien perdre de (a
fenfe de leurs Ordres. Ce fut tranquillité , redoubloit la
là que notre Saint compofa ferveur de fes prières , met-
fon dix-neuvieme Opufade , tant toute fa confiance en ce-
qui étoit une excellente ré- lui auquel la mer fit les vents
futation de tout ce qu'avoit obéiffent. Elle ne fut point
avancé Guillaume de Saint vaine ; le calme fuccéda à
Amour. Le Pape condamna la tempête , fit on fit heure u-
le livre des périls des derniers fement le refte du trajet.
temps , ainfi qu'un autre Li- L'exil de Guillaume de Saint
vre intitulé l'Évangile éternel,
: Amour rétablit enfin la paix
L'Auteur anonyme de ce der- dans rUniverfité de Paris.

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S. THOMAS D'AqVlS. 5*9
fentiment
tout le monde fut de fon
n'étoient pas les feulsqui ren- julrs T,
Les Savants
diffent iuftice au rare mérite de
Thomas.
avoit une entière con-
S. Louis , Roi de France ,
fiance en fes lumières , lui &
demandoit fon
avis fur les plus importantes affirires
de 1 Etat.
fl ^
^
^
U rinvitoit fouvent à manger à fa table : hon- nQré St

neur que le Saint acceptoit le plus


rarement U um
tfhu-
qu'il lui étoit poffible par un principe
milité. Quand toutefois il étoit oblige de 1 ac-

cepter , il paroiffoit à laCour , auffi modeite


& aufli recueilli que dans fon Couvent. Etant
un Jour à la Table du Roi, il lui arriva une
de ces diflradions qui doit être rapportée ici.

U à réfuter l'Héréfie des Bul-


travaillent alors
depuis
gares ou nouveaux Manichéens , qui
quelques années , s'étoit renouvellée en Ita-

lie. Comme il avoit la


tête pleine de fa ma-

tière &
l'efprit fortement occupé des
pro-
s'écria
fondes méditations ou'il avoit faites, il
tout-à-coup : » Voilà qui eft déçifif contre
les
qui Favoit ac-
» Manichéens ( 3 ) ». Son Prieur
compagné lui ayant dit de penfer au heu ou
il étoit , il fe mit en
devoir de réparer fa
faute en demandant pardon au Roi.
Mais ce
bon Prince , loin de marquer auc
lentement, ordonna à un de fes
d'écrire le raifonnement que le
Saint venoit

de faire , de peur qu'il ne s'échappât de fa


mémoire. #

Thomas affifta en 1x59, au trente-fixieme

Chapitre Général de fon Ordre, qui fe


tint

&t chargé conjointe-


à Valenciennes. Il y ,

Conchfim <jt contré ManUktos.


( 3 )
570 Thomas d'A^uin.
S.
ment avec Albert Grand & trois autres
le ,

j^y^ Doâeurs , de quelques Règlements pour


faire
les études. De retour à Paris , il y continua
les leçons de Théologie , &
acheva d'y gagner
les cœurs par fon affabilité &
fa modeftie.
Malgré fon zele à défendre la vérité connue ,
ii-fe poffédoit toujours dans le feu de ht difpu-
te , & ne fe fervoit jamais d'expreffions dures
& injurieufes. Ce fat par fa douceur, encore
-plus que par la force invincible de' fes rai-
ions , qu'il détermina un jeune Doâeur à ré-
traâer publiquement une opinion dangereufe
qu'il avoit avancée dans fes Thefes.
• Le Pape Urf>ain IV , oui connoiflbk tout
n refait les le mérite de notre Saint , rappella à Rome en
Dignités Ec-:i 261. Thomas y fat charge par fon Général
ciémftKjues.
je p ro feffeT iâ Théologie ; emploi dont il s'ac-
quitta avec fa capacité ordinaire. Le Souverain
Pofttife voulut l'élever plufisurs fois aux Di-
gnités Eccléfiaftiques ; mais le Saint les reftifa
toutes > &
préféra l'état de {impie Religieux
à des places que l'ambition rechercheroit
moins , û elle etoit capable de refléchir fur
les dangers "qui les environnent. Tout ce quTJr-
bain put obtenir de lui , fut qu'il ne s'éloigne-
roit point de fk perfonne. Ceci lui procura
l'occafibn d'annoncer fa parole de Dieu dans
toutes lè$ Villes où le Pape avoit coutume de
réfider, comme à Rome , à Viterbe^ à Orviette ,
à Fondi&àPéroufe, Il parut auffi depuis avec
éclat dans les Villes de Bologne &
de Naples,
donnant par-tout les preuves les plus fenfibles
fes talents pour la prédication pour &
l'enfeignement. Prêchant à Rome un jour de
Vendredi Saint , il parla d'une manière fi tou-
chante de l'amour de I. C. pour les hommes , &

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S. Thomas d'Aquin. 571
de fingratitude de ceux-ci envers leurRédemp- -

teur , qu'il fit couler les larmes de tout fon mars 7.


Auditoire. Les foupirs & les gémiffemente dé
l'afTemblée l'obligèrent même de s'arrêter plu-
fieurs fois. Le Sermon qu'il fit le jour de Pâ* Fruit de fet

ques fuivant fur la gloire de Jefus - Chrift *


s«rao ^
& fur le bonheur de ceux qui refTufcfteht
avec lui par la grâce , produifit encore de
merveilleux Guillaume de Tocco ajou-
effets.
te 9 que comme de l*EgIife de
le Saint fortoit
Saint Pierre , après fon Sermon , une femme
fe trouva tout à coup guérie d'une perte de
fang , en touchant les bords de fon habit»
Mais la converfion de deux Rabbins diftin-
gués parmi les Juifs , fut un prodige encore
plus grand. Le Saint, qui les avoit rencontrés
par hazard à la maifon de campagne du Car*
dinal Richard , entra en difpute avec eux, fiç
leur prouva folidement que le Meffie étoit
venu, que ce Meffie étoit J. C. Dieif hom« &
&
me tout enfemble , qu'il falloit par confé*
quent fe foumettre à l'Évangile. On convint
de part &
d'autre -<jue l'on reprendroit la con«
ference le lendemain. Thomas paffa la nuit au
piéd des Autels , &
conjura celui qui peut
feul convertir les coeurs , d^chèver l'ouvrage
qu'il avoit déjà commencé. Sa priçre fut exau-
cée. En effet les deux Rabbins le vinrent
trouver le lendemain matin , non pour re*
commencer la difpute , mais pour embrafler
fe Religion Chrétienne. Lçur exemple fut fuivi
par plusieurs autres Juifs.
Les Dominicains ayant tenu leur quaran*
tieme Chapitre général à Londres en 1163 ,
notre Saint y aflifta. Il demanda quelque temps
après , la permiffion de ne plus enfeignçr ; ce

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57* S. Thomas H'Aqi/ix.
qui lui fut accordé. U rentra par-là dans f état
de Ample Religieux , comme Ton humilité le
lui faifoit délirer ardemment. Cependant le
Pape Clément IV ,
qui Teftimoit autant que
fon prédéceffeur , lui offrit en 1 165 l'Archevê-
ché de Naples. Mais il le refufa conftamment
ainfi que toutes les autres Dignités Ecdéfiaf-
tiques auxquelles le même Pape voulut Péle-
ver. Thomas étant à Bologne , y compofa la
{première partie de fa Somme Théologique.
1 pafla de Bologne à Naples. Ce fut dans cette

dernière Ville qu'arriva ce qui eft rapporté


de lui par Tocco, &
par quelques autres Écri-
vains. Un jour qu'il prioit avec ferveur devant
fon Crucifix , il entra dans une douce extafe,
& fut élevé de terre à la hauteur de phifieurs
coudées. Dominique de Caferte , qui le vit
en cet état , fut nien moins frappé du ravif-
fement ou'on favoit lui être affex ordinaire ,
que de la voix miraculeufe qui fortit de la
bouche du Crucifix , pour lui faire entendre
ces paroles : » Vous avez bien écrit de moi
» Thomas , quelle récompense demandez-
» vous ?» A quoi le Saint répondit : » Nulle
vautre que vous, Seigneur (4) ?
Depuis le 6 Décembre 1273 , jufqu'au 7
de Mars fuivant , qui fut le jour de fa mort,
le fâint Doâeur ne voulut plus ni parler ni
écrire fur les madères Théologiques (rf). Il

(4) Béni fcripfiJU it me , en quatre claffes différentes.


Thoma. , quam mtrteâcm acch Dans lapremière font les Ou-
fies ? Non slidm % nifiu % Do- vrages de Philofophie » dans
mine. la ieconde , ceux de Théolo-
(d) On peut divifer les gie ; dans la troifierae
?
les
Ouvrages de Saint Thomas Commentaires fur l'Écriture

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S. Thomas d'Aquix. 575
renonça entièrement à fes études, pour ne
plus s'occuper que de l'éternité > pour fou- mars&
pirer à loiur après le moment heureux oui le
feroit entrer dans la jouiflance de fon Dieu.
Mais pendant qu'il vivoit ainfi dans la retraite
& dans la prière , Grégoire X
le tira de &

Sainte y dans la quatrième fieurs principes dangereux


les Opufcules qu'on peut ap- dont les Hérétiques des pre-
peller Qb&rts miliu , à caufc miers ûedes s'étoient fervis
de la diverfité des matières pour fapper les fondements
qui y font expliquées. du Chnflianiûne. Elle avoit
Ufaut reprendre les «ho- donc moins de cours que cel-
fes d'un peu haut, pour fai- le de Platon. Et voilà pour-
re connoitre les Ouvrages quoi Tertullien appelloit Arif-
philotbphiques de Saint Tho- tote, U Patriarche des Héréti-
mas. L'élégance du fiile avoit ques , fie qu'un Concile de Pa-
donné aux Écrits de Platon ris proferivit Ces Ouvrages
la plus grande vogue parmi vers l'an 1109, Cela n'em*
les Païens i &les plus (avants pèche pourtant pas les per-
Pcres de l'Églife avoient été tonnes qui jugent fans par*
élevés dans les maximes de tialité, de le regarder corn*
l'École de ce Philofophe. Sa me le plus beau génie de
doÛrine parouToit favorifer l'antiquité , fie peut-être mê-
la Religion Chrétienne. Ef- me comme le génie le plus
fectivement aucun Auteur profond fie le plus pénétrant

Païen n'a voit jamais parlé qui ait jamais paru. U eft le
d'une manière auffi fublime feul des Anciens qui ait con-
des attributs de la Divinité » nu , approfondi , développé
de la Providence, des Aippli- les règles du raifonnement »
ces fie des récompenfes d'une fie qui ait donné un fyftème
vie future. On a conclu de* complet de Philofophie. Et
là que Platon , dans le cours s'il eft tombé dans des er-
de fes voyages en Égypte fie reurs p comme on n'en peut
en|Phénicie , y avoit appris difeonvenir , ceci vient de
phriîeurs de ces vérités pri- ce qu'il a trop compté fur la
mordiales que ta tradition y raifon humaine , qui eft bien
avoit confervées , malgré les foible , lorsqu'elle n'eft pas
ténèbres du Paganiûne. U éclairée par les lumières de
n'en étoit pas de même de la révélation. Les anciens
laPhilofophie d'Ariftote ; ou- Hérétiques ne font pas les
tre qu'elle ne préfentoit pas feuls qui aient abufé des
d'auûl belles connoiflances principes d'Ariftote, Us eu-
•Ue çontenoit encore plu- rent des imitateurs, dans le

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>

574 s+ Thomas d'Aq^ui».


chère folitude , afin de l'envoyer au Concile
qu'il venoit de convoquer à Lyon , pour tra-
vailler à l'extin&on du Schifme des Grecs ,
& pour procurer du fecours à la Terre Sainte.
Comme les Ambafladeurs de l'Empereur Mi-
chel Paléoiogue dévoient y affifter , ainli que

douzième & dans le treiziè- de peu de conféquence v cf eft


me fiecles, tels moins fa faute » que celle du
que Pierre
Abaillard , les Albigeois , ficc» génie fophiftique des Arabes*
Mais de tous ceux qui écri* i°. Les Commentaires de
virent alors fur les principes Saint Thomas fur les quatre
du Philofophe grec , il n'en Livres du Matin des Sente*»
cil point qui aient pouffé la tes , renferment un cours mé-
iubtiliîé plus loin que les thodique de Théologie, &
Sarrazins d'Arabie &
d'Ef- forment les Volumes fix &
pagne. Saint Thomas attaqua fept de fes Œuvres.
les ennemis de la vérité avec 3°. Les Tomes dix» onze
leurs propres armes , & rit 8c douze » contiennent la
servir la Philofophie même Somme Théologique. Cet Ou-
d'Ariftote i la défenfe delà vrage eft admirable, quoique
Foi ; & Ton peut dite qu'il la mort n'ait pas permis à ion
réunit dans (on entreprife au- Auteur d'y mettre la dernière
delà de toute eipéranee. U main. Saint Auguftin eft ce*
diftingua les erreurs pour les lui de tous les Pcres qu'il a
réfuter t & présenta (bus le le plus fuivi ; ce qui a fait
jour le plus frappant , des dire aux favants Cardinaux
vérités que la raifon avoit de Noris 6c d'Aguirre que
découvertes , mais qui étoient Saint Thomas étoit fon plus
ibuvent enveloppées de té- fidèle interprète. U a tiré
nèbres que tout le monde principalement des Morales
n'étoit pas en état de percer. de Saint Grégoire fur Job
Enfin Ariftote , qu'on appel- les Règles pratiques des de-
loit la terreur des Chrétiens , voirs &des vertus. Ce fut
fut rendu comme Orthodoxe à la follicitation de Saint
par Saint Thomas , & four- Raymond de Pennafort , que
nit à la Religion de nouvel- notre faint Docteur compo-
les armes contre l'Athéifme fa la Somme contre les Gentils,
& l'Idolâtrie. Ce que
notre Le but de cet Ouvrage étoit
faint Docteur a écrit fur ce de fournir aux Prédicateurs
Philofophe , fait la matière d'Efpagne les moyens de tra-
des cinq premiers Volumes vailler avec fruit à la con-
de fes Œuvres. Si Ton y verfxon des Juifs fie des Sar-
trouve quçlquetoU dw caofo

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S. Thomas d'Aqvii?. 575.
plufieurs Prélats de PÉglife Orientale, un hom-
me tel que Thomas pouvoit rendre des fervices MARS
7.
importants à TÉglife. Le Souverain Pontife lui
enjoignit donc par un Bref particulier , de fe
rendre au Concile , dont l'ouverture étoit fi- n va au
xée au i Mai 1 274. Il lui ordonna en même Conciie de.
temps de fé préparer à défendre la Foi Catho- r,yoiu
lique en prefence des Grecs. La famé du Saint
étoit alors en mauvais état ; mais cela ne Penw
pécha point de partir de Naples où il fe trou-
voit vers la fin du mois de Janvier. On lui
donna pour compagnon de voyage le P. Re-
naud de Piperne, qu'on chargea de prendre foin
de lui , parce qu'il étoit û peu occupé de fon
corps , qu'il auroit fouvent oublié de pourvoir^
aux plus indifpenfebles aéceffité$, fi quel-.

4°. Nous avons auffi de D odeur , dans Tes Traités de


Saint Thomasdes Commen- piété réduit les Règles de la
taires fur la plus grande par- vie intérieure aux deux fui-
tie de l'Écriture. 11 parut fe vantes: i°. A travailler par
furpafter lui-même dans l'ex- la pratique de la mortifica-
plication qu'il donna des Épi- tion &
du renoncement à
très de Saint Paul. Ce fut foi-même , à détruire le règne
lui qui par Tordre du Pa^ de l'orgueil &
de l'amour
pe Urbain IV, compoû l'Of- dèfordonné des créatures »
fice du Saint Sacrement , que 2°. A allumer fans cefle dans
l'Églife chante encore aujour- fon cœur le feu de F amour
d'hui. divin par l'exercice de la
,

5°. Ses Opufcuks ont diver- prière &


de la méditation
fes matières pour objet. On & par un parfait accompliiTc-
y trouve la réfutation des ment de la volonté de Dieu
erreurs des Grecs Schifmati- en toutes chofes ( Opufc. 17.
ques &
de plufieurs Héré-
fies \ la difcuffion de quel- La meilleure Édition des
ques de Philofophie
points Œuvres de Saint Thomas eft
ou de Théologie ; des expli- celle qui ie donna à Rome
cations du Symbole , des Sa- en 1 J70 , 17 Vol. fol, & par-
crements, duDécalogue, de mi les Éditions particulières
l'Oraifon Dominicale , de la de fa Somme , celle du P.
Salutation Angélique, Lcfaint picolai mérite la préférence.

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576 S. Thomas b'Aqviit.
qu'un n'y eût veillé particulièrement.
MARS Thomas ayant trouvé fur fa route le Châ-
teau de Magenza , y pafla quelque temps
'

pourvoir Françoife d'Aquin fa nièce, mariée


au Comte de Cécan. Là fa maladie augmenta
confidérablement , &
il fitt pris d'un dégoût

général pour toutes fortes de nourriture. Com-


me on le preflbit un jour de dire ce qu'il avoit
envie de mançer , il répondit , pour \t délivrer
des importumtés de fes parents , qu'il mange-
roit peut-être d'un certain poiffon , très-com-
mun en France , mais fort rare en Italie. On
fe donna toutefois tant de mouvements , qu'on
en trouva & qu'on lui en fervit , mais il ne
voulut point y toucher par eforit de mortifi-
cation. Ce dégoût univerfel étant un peu di-
minué y & fes forces commençant à revenir
il continua fa route , malgré la certitude qu'il

avoit que fa dernière heure n'étoit pas éloi-.


Mauva Ué- Cependant les fatigues du voyage redou-
g,^.
tât iic a
-
gjerent fon ; &
la hevre devint fi violen-
te , qu'il fut obligé de s'arrêter à Foffa-Nuo-
va, célèbre Abbaye de l'Ordre de Cîteaux,
au Diocefe de Terracine ( e ). La première
chofe qu'il fit en y entrant , fut d'aller faluer
le Saint Sacrement félon fa coutume. La face
profternée contre terre , il répandit fon ame
en préfence de celui qui devoit bientôt l'ap-
peller dans fon Royaume. Ayant enfuite paiié
dans le Cloître , il
y prononça ces paroles du
Pfalmifle : pour toujours le lieu de mon
Ceft ici

repos (4). On le mit dans l'appartement de


"l'Abbé , où il demeura malade près d'un mois.
-

(<) Cétoit là qu'étoit an-| Forum Appii.


cwirncmcat la ViUc appcllcc | ( 4 ) VC. CXXXI. 14-

Les

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$. Thomas d'àq&in. 577
Les Religieux de Foffa-Nuova lui donrierertt
toutes les marques poffibles de refpeft & de juars 7.
vénération. Ils fe difputoient l'avantage de le
fervir , s'eftimant heureux de pouvoir être
utiles à un homme qu'ils regardoient comme
un Ange revêtu d'un corps mortel. Ilsétoient
auffifurpris qu'édifiés de fa patience , de foa
humilité , de fon recueillement , &
de fa fer-
veur dans la prière.
Plus le Saint voyoit approcher l'heure de fa
mort il foupiroit après le moment for-
, plus
tuné qui de voit le faire entrer dans la gloire
de fon Dieu. On l'entendoit répéter continuel-
lement ces paroles de Saint Aueuftin : h Je ne »

» commencerai à yivre véritablement , ô mon


» Dieu , que lorfque je ferai entièrement rem-
» pli de vous &
de votre aiftour. Maintenant
» je me fuis à charge à moi-même, parce que
» je ne fuis point encore affez plein de vous
» ( 5 ). Les Religieux de Fofla-Nuova l'ayant
prié de leur expliquer le Cantique des Canti- tl e*t>lh?tit

ques , comme Saint Bernard l'avoit fait autre- e Cantique


ntl "
fois en pareille circonflance : » Donnez-moi ,
» leur dit-il , l'efprit de Saint Bernard , je &
» me rendrai à ce que vous exigez de moi. »
Il céda pourtant à la fin à leurs infiances réi-

térées , &
leur diâa une courte expofition de
ce Livre myftérieux. Cette expofition fut moins
le fruit de fa fcience , que de fa charité. Elle
ne pouvoit venir en effet que d'une ame , qui
courant après l'odeur des parfums du célefle
Époux , fe hâtoit de brifer les liens de fon ef-
clavage , pour aller jouir des délices de l'éter-

( f ) Confcf. L xo. c. 18,

Oo

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578 S. Thomas d'Jqvin.
nité (/). Cependant notre Saint fe trouva
fort mal. Sa foiblefle devint fi grande , qu'a-
près s'être recommandé aux prières des Reli-
gieux qui Tenvironnoient , il les conjura de le
laitier feul , afin qu'il pût confacrer unique-
ment à Dieu le peu de moments qu'il avoit
encore à vivre. Quand il fe vit en liberté , il
produifit avec les fentiments de la foi la plus
vive , des Aûes d'Adoration, d'Amour, de Re-
merdment , d'Humilité &c de Contrition. D
fit enfuite une Confeflïon générale de toute fa

vie au P. Renaud , & cela avec une grande


abondance de larmes. Ce n'étoit pas qu'il eût
commis de crime , mais fon amour pour Dieu
lui rcpréfentoit les fautes les plus légères com-
me des infidélités confid érables ; ceux aux- &
quels il avoit manifefté fon intérieur , ont tou-
jours été perfuadés qu'il ne s'étoit jamais ren-
du coupable d'aucun péché mortel. 11 dit au P.
Renaud , avant de mourir , qu'il remercioit
Dieu de l'avoir conftamment prévenu par fa
grâce , de l'avoir toujours conduit comme par
lit main , & d'avoir préfervé fon ame de ces
chutes qui détruifent la charité. Puis , à l'exem-
ple de S. Auguftin , il ajouta que c'était par un
pur effet de la miféricorde divine , qu'il avoit
été délivré de tous les péchés dans lefquels il
n'étoit pas tombé (#).

(/) L'cxpofition du Canti- TOuvragt de Haymon , Évè-


que des Cantiques par Saint que de Halberftac Voyez
Thomas , commence par ces Echard, T, ï. p. 3a} *» le P.
mots Salomon
: infpirattu. Cel- Touron , p. 714 -, fit le Long,
le qui commence par Sonet Bibl. Sacra , p. j66,

rox tua, 6*. point de


n'eft {g) Ttbi debio 6* quoi n*k
lui , quoiqu'elle porte quel- fici* S, Aug»
quefois (00 nom» elle cft

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S. Th 0 M A3 &A q t/IN. 579
Le faim Dofteur ayant fççtiFabibluti 00 avec
tous les fentiments «un parfait pénitent , de- j^j^ 7#
manda le Saint Viatique. Pendant qus l'Abbé
& Tes Religieux fe préparoient à le lui ap-
porter , ceux qui étoient autour de
il pria
ion lit demettre fur la cendre , afin de pou-
le
voir , difoit-il , recevoir Jefus-Chrift avec plus
de refpeft. Ce fut ainfi qu'il voulut attendre
le Sauveur y malgré l'extrême foiblefle où il
étoit réduit. Lorfqu'il vit la Sainte Hoftie entre II reçoit le
Viatl<iuc -
les mains du Prêtre , il prononça les paroles
fuivantes avec une tendreffe de dévotion qui
tira les larmes des yeux à tous les affiliants :
» Je crois fermement que Jefus-Chrift , vrai
m Dieu &
vrai Homme , eft dans cet augufte
» Sacrement* Je vous adore , ô mon Dieu &
» mon Sauveur. Je vous reçois , ô vous qui
» êtes le prix de ma rédemption , &
le Viati-
» oue de mon pèlerinage , vous pour l'amour
» duquel j'ai étudié , travaillé, prêché en- &
» feigné. J'efpere n'avoir rien avancé de con-
w traire à votre divine parole ; ou , fi cela
» m'eft arrivé par ignorance , je me rétraflte
» publiquement , &
foumets tous mes Écrits
» au jugement de la Sainte Églife Romaine ».
Le Saint s'étant enfuite recueilli pour former
quelques A&es de Religion , reçut la Ste. Com-
munion , &
ne permit qu'on le portât fur foa
lit
,
que lorfqu'il eût fait fon aâion de grâces.
Comme (es forces diminuoient de plus en plus ,
il voulut qu'on lui adminùtrât le Sacrement
de PExtrême-On&ion , tandis qu'il étoit encore
en parfaite connoiflance. 11 répondit lui-même
diftinétement à toutes les prières de l'Égliie.
Il refta tranquille après cela ,
joui (Tant d'une
paix profonde qui femanifeftoitpar la férénité
Oo ij

Googl
580 S. Thomas d'Aquin.
ssdefon vifage. On l'entendoit répéter fouvent:

f
» Bientôt j bientôt, le Dieu de toute confola-
» tion mettra le comble à fes miféricordes
» & remplira tous mes défirs. Bientôt je ferai
» raflafié en lui , &
je boirai du torrent de
» Tes délices. Il m'enyvrera dè l'abondance
» de fa m&ifon j &
me fera contempler la
» véritable lumière dans fon effence , qui
» eft la fource de la vie ». S'étant apperçu que
ceux qui l'environnoient , fondoient en lar-
mes , il pour les confoler , qu'il voyoit
leur dit
arriver lamort avec joie , parce qu'elle etoit
un gain pour lui ; &
comme le P. Renaud lui
marquoit le regret qu'il avoit de ne le pas
voir triompher des ennemis de l'Églife dans
le Concile de Lyon , &
occuper une place
où il pourroit rendre des fervices impor-
tants à l'Époufe de Jefus-Chrift, il répondit
avec fon humilité ordinaire : » J'ai toujours
» demandé à Dieu , comme une rare faveur ,
» de mourir en fimple Religieux ; & je le
.» remercie préfentement de la bonté qu'il a
» eue de m'exaucer. En m'appellant au féjour
» de la gloire dans un âge li peu avancé , il
» m'a Êut une grâce qu'il a remfée à plufieurs
» de fes ferviteurs. Ne. vous attriftez donc pas
>f fur le fort d'un homme qui eft pénétré de
» la joie la plus vive ».
Il témoigna enfuite fa reconnoi fiance à l'Abbé

& aux Religieux de Fofla-Nuova , pour tous


les aôes de charité qu'ils avoient exercés à
fon égard. Un Religieux de la Communauté
lui ayant demandé ce qu'il falloir, faire pour
vivre dans une fidélité perpétuelle à la grâce :

» Quiconque , répondit-il, marchera fans ceffe


en la préfence de Dieu , fera toujours prêt

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S. Thomas d'Aqvin. 581
h à lui rendre compte de fes a&ons , &
ne .

» perdra jamais fon amour en confentant au mars 7,


m péché ». Ce furent-là fes dernières paroles.
Il pria encore quelques moments , puis s'en-
dormit dans le Seigneur , le 7 Mars 1 274 , un Sa mort,
peu après minuit, fi étoit , félon quelques Au-
teurs 9 dans la cinquantième année de fon âge.
Mais nous aimons mieux fuivre le fentiment
de Ptolémée de Lucques, & des autres Au-
teurs contemporains , qui difent tous qu'il,
mourut dans fa quarante-huitième année. ail- D
leurs cette date s'accorde mieux avec toute la
fuite de l'Hiftoire de fa Vie.
Saint Thomas étoit d'une taille haute &
bien proportionnée , mais d'une complexion
fort délicate. Il étoit fujet à de grands maux
d'eftomac , qid augmentoient encore par fes
auftérités , & par fon application infatigable
au travail. Quant aux qualités de fonelprit,,
nous les avons fait connoître lorfque l'occa-
fion s'en eft préfentée ; & nous n'avons rien,
dit qui ne foit encore au-deffous de l'idée qu'on
en a eue dans tous les fiecles ; & ce qui ajoute
infiniment à cette idée, c'eft que le public a.
formé fon jugement fur celui des pcrfonnes
qui fe font le plus diftinguées par leur fcience. .

: Le bruit de fa mort ne fe fut pas plutôt ré-


pandu qu'on accourut de toutes parts pour
,
aflifter à fes funérailles. Quelques Religieux
de Fofla-Nuova , & plufieurs autres perfon-
nes malades , furent miraculeufement guéries
par la vertu de fes Reliques. On conftata la
vérité de ces guérifons, & on en drefla des
procès-verbaux en bonne forme , qui font ci-
tés par divers Auteurs Notamment par Guil-
laume de Tocço &c dans la Bulle de la Cano-
Oo iij

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j8i S. Thomas d'Aqu ix.
nifation du Saint. Ii s'opéra encore de fera-;
niables miracles dans la fuite , 6c fur-tout dans
4ARS 7.
les différentes tranilations de fes Reliques.
Nous en avons des Relations fort authenti-
ques , qui ont été publiées par les Bollandiftes.
L'Umverfité de Paris donna les marques les
plus fenfibles de l'eftime &
de la vénération
qu'elle avoit pour Saint Thomas , dans une
lettre qu'elle écrivit à i'occaûon de fa mort,
au Chapitre Général des Dominicains qui fe
tint à Lyon en 1174. Elle demanda inftanv»
Son culte, ment fon corps ; les Univerfités de Rome , de
Naples &de quelques autres Villes , plufieurs*
Princes & différents Ordres le demandèrent
auffi. Enfin , après bien de conteftations , le
Pape Urbain V le donna aux Dominicains, leur
permettant de le porter à Paris ou à Toulou-
fe , parce que l'Italie poffédoit déjà celui de
Saint Dominique , dépofé à Bologne. En 1 188 f
la Comtefle Théodore fœur du Saint , avoit
obtenu une de fes mains , qu'elle fit enchâf-
fer précieufement, pour la placer dans la Cha-
pelle du Château de San-Sévérino. Après la
mort de Théodore , cette Relique fut donnée
aux Dominicains de Salerne. On tranfporta
fecrettement en Fraftce le refte du corps de
Saint Thomas , & il fut reçu à Touloufe avec

la plus grande folenniré. U y eut à cette cé-


rémonie un concours prodigieux. On voyoit
à la tête des autres , Louis Duc d'Anjou ,
frère du Roi Charles V , les Archevêques
de Touloufe & de Narbonne , un grand
nombre d'Évêques , d'Abbés &
de Seigneurs.
Le corps du faint Dofteur fe garde encore
dans ^FÉglife des Dominicains de Touloufe.
Il eft renfermé dans une Châffe de vermeil

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S. Thomas d'Aq^vin. 583
fur laquelle on a élevé Un fuperbe Mau-
folée à quatre faces. On en détacha un mars s.
bras pour l'envoyer au grand Couvent des
Dominicains de Paris. Il fut placé dans la Cha*
pelle de Saint Thomas , à laquelle le Roi don*
na le titre de Chapelle Royale. La Faculté de
Théologie feit célébrer tous les ans une Mené
dans PÉglife des Dominicains , le jour de la
fête de Saint Thomas*
Les Napolitains , aprèsles plus prenantes
follicitations obtinrent enfin un os de Pau*,
,
tre bras de notre Saint. 11 leur fut accordé ert
1372, par un Chapitre général. Cette Relique
fut dépofée dans PÉglife des Dominicains de
Naples ,&y
eft reftee jufqu'en 1603 y qu'on
la transféra dans TÉglife Métropolitaine , k
l'occafion d'une calamité publique dont onavoh
été délivré par l'interceffion de Saint ThomaSè
Elle fut placée parmi les Reliques des Patrom
& des Proteâeurs du Pays» Le Royaume do
Naples honore Saint Thomas comme ion prin»
ci pal Patron y en vertu des Brefs de Pie V
4
& de Clément VIII , confirmés par Paul V. ;
Saint Thomas fut folennellcment canonifé
par Jean XXII en 1313 ; 6C Pie V ordonna
en 1567, que fa fête feroit célébrée de la
même manière , que celle des quatre Doc*
teurs de l'Églife d'Occident , cfeft-è-dii* , de
Saint Ambroife , de Saint Auguftin, de Saint
Jérôme, & de Saint Grégoire le Grand.
^

on la fépare de l'humilité & de la fimplicité du


coeur , & fi l'on n'a foindelà faire précéder
& accompagner de la prière ; car en nippofant

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,,,

584 S. Thomas d* Aqv in.


B ^ qu'elle ne précipite pas toujours dans des
la Foi , elle nourrk au
erreurs contraires à
MAftS 7,
moins l'orgueil , &
produit cette fécherefle de
cœur qui traîne à fa fuite le dégoût des exer-
cices de piété ; & ceci regarde l'étude des
feiences relatives à la Religion , comme celle
des feiences purement proânes. C'eft une
vérité qui n'eft que trop prouvée par l'expé-
rience. Quiconque veut étudier en Chrétien
doit fe propofer fans cefie l'exemple de Saint
Thomas ; c'eft-à-dire , qu'il doit fe défier de
fes propres lumières , ne fe mettre au travail
qu'après avoir imploré le fecours cTen haut
{e tenir continuellement en la préfence de
Dieu , élever de temps en temps fon cœur
vers lui, par des afpirations enflammées , lui
demander avec ferveur l'éclairciffement de fes
doutes , &C la folution de fes difficultés. S'il eft
fidèle à cette pratique , il éprouvera bientôt,
comme Saint Thomas 9 qu'0/1 apprend plus aux
pieds du Crucifix , que dans Us Livres. Alors les
çonnoiflances qu il acquerra , tourneront tou-
tes au profit de fon ame. Elles deviendront
pour lui un nouveau motif de reconnoître
ion néant , de s'attacher à Dieu , de l'aimer
de le fervir. N'oublions jamais ce que dit Saint
Bonaventure (6). » Un homme d'étude qui
» répétera fouvent dans fon cœur : Quand eft*
* C4> Seigneur , que je vous aimerai , allumera
» beaucoup plus aifément en lui le feu facré
» ae l'amour divin , que par des penféeç bril-
» lantes , ou par des fpeculations arbitraires
» fur la profondeur des fecrets de Dieu , fur
» la génération éternelle du Verbe , ou fur la
» Proceflion du Saint Efprit ».

(6) l. de Myfi. Theol. eu vit.

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Sainte Perpétue 9 &c. MM. 58$
»

SAINTE PERPÉTUE,
SAINTE FÉLICITÉ,
ET LEURS COMPAGNONS,
Martyrs.
« * *

Tiré de leurs Actes quifont tris-authentiques , &


qui ont étécités\par Tcrtullun , 1. de animâ ,«",55;
& par S. Augujim, Serm. 180 , 183 , 194. //
paroit par le Sermon 280 de S. Augujtin , qu'on
les lifoit publiquement dans rÉglifi. La première
partie de ces A
des , qui va jufquà la veille du mar-
tyre de Sainte Perpétue & de Sainte Félicité , fut
écrite par la première de ces deux Saintes. Saine
Sature y ajouta le récit de la vifion qu 'il avoie
eue. Le refte vient de la plume d*un témoin oculaire.
On a donné plufieurs éditions de ces Actes ; mais
celle de D, Ruinart cji la plus ample & la plus exae*
te. Voye[ Tillemont , T. 3. p. 13$ ; Ceillier, T. 2.
P*2i$9& C Ouvrage du Cardinal Orfi , intitulé:
Vindicis Aâorum SS. Perpetuae
0
&
Felicitatis ,
in-4 . On trouve dans ces Vindiciae la réfutation
de ceux qui ont foupçonné les Actes de nos SS.
Martyrs , de favonfer les erreurs des Montaniftes.

L'An 20}.
lu A perfécution allumée en 101 par l'Empe-
reur Severe ayant étendu fes ravages en Afri-
que Tannée luivante , le Procomul Minuce
Ti mini en ou Firminien donna des ordres pour
arrêter à Carthage cinq jeunes Cathécumenes
j 8(5 Sainte Perpétue 3 &c. MM:
-ikvoir , Révocat & Félicité, tous deux de con-
dition Saturnin , Secundule 9 Se
fervile ,
Vibia-Perpétue. Félicité étoit pour lors greffe
• de fept mois ; &
Perpétue avoit un entant à
la mammelle qu'elle nourriflbit de Ton propre
lait. Cette dernière étoit une femme de 2 z
ans 9 iflue d'une famille confidérable , ma- &
riée à un homme de qualité. Elle avoit encore
fon pere &
fa mere. De trois frères qu'elle
avoit eus , l'un nommé Dinocrate , étoit mort
à fept ans. Son pere , qui étoit vieux fort&
attaché au Paganifme , l'aimoit plus que fes
autres enfants. Quant à fa mere , ilparoît
qu'elle étoit Chrétienne , ainfi qu'un de fes
frères ; l'autre n'étoit encore que Cathécu-
mene. Sature , qui , félon toutes les apparen-
ces , étoit frère de Saturnin , &
avoit inftruit
nos cinq Martyrs , fe laiffa volontairement
emprifonner , pour leur être réuni. Lorfque
ces généreux Soldats eurent été arrêtés , on
les garda quelques jours enfermés dans une
maiion particulière. Ce fut-là que commencè-
rent les affauts qi/ib eurent à foutenir de h
part de la nature &
de l'enfer. Mais écoutons
parler Sainte Perpétue elle-même.
» Nous étions , dit-elle , entre les mains de
» nos persécuteurs , lorfque mon pere , pouffé

» faire de nouveaux efforts afin d'cbranler ma


» confiance. Comme il continuoit , je lui dis :
» Ce vafe que vous voyez par terre peut - il
» changer de nom ? Il ne le peut affurement
» me répondit-il. De même , lui répliquai-je ,
>» je ne puis me dire autre que je ne fuis 9
* c'eft-à-dire , Chrétienne. À ce mot , mon pere
» fe jeta fur moi , comme s'il eût voulu m'ar-

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Sainte Perpétue > &c. MM. 5 87
» racher les yeux ; mais il fe contenta de me a
» maltraiter , & fe retira enfuite , tout confus de mars
» n'avoir pu vaincre ma réfolution , avec toits
» les artifices que le Démon lui avoit fuggé-
» rés. Ayant été quelques jours fans le revoir f
h j'en rendis grâces à Dieu , &
me trouvai
h beaucoup foulagée. Nous profitâmes de ce
» petit intervalle pour recevoir le Baptême.
» Au fortir de l'eau , le Saint Efprit m'infpira
» de ne demande/ autre chofe que la patien-
» ce dans les tourments.
» Peu de jours après oh nous conduifit dans
h une prifon , dont l'horreur Se l'obfcurité me
» faifirent d'abord ; car je ne favois ce que c'é-
» toit que ces fortes de lieux ( a ). Nous fouf-
» frimes beaucoup ce jour-là , tant de la cha-
» leur caufée par la foule , que de l'info len ce
» des Soldats qui nous gardoient. Ce qui me
» caufoit le plus de peine, étoit que je n'avois
» point mon enfant. Mais les Diacres Tertius
» &Pomponius , qui nous afEftoient , obtin-
h rent à force d'argent , que l'on nous mit pour
» quelques heures dans un lieu où nous puf*
h uons refpirer. Pendant; que chacun fongeoit
» à ce qui le regardoit , je donnai à têter à
» mon enfant , qu'on m'avoit apporté & qui
» mouroit de faim. Je priai enfuite ma mere
» d'en avoir foin , &
la confolai , ainfi que
» mon frère. Fétois pénétrée de douleur en
» voyant celle qu'ils reffentoient à caufe de
» moi. Je paflai quelques jours dans la peine

( « ) Les priions des Ro- verture très-étroite. On en


mains étoient des cachots af- voit encore dansplufieurs an-
freux, ou la lumière ne pou- ciens Amphithéâtres.
voit pénétrer que par une ou-

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,,,

5 88 Sainte Perpétue , &c. MM.


5
la plus cruelle ; mais ayant obtenu qu'on
»
mars 7. » me mon enfant dans la prifon , je me
» trouvai entièrement tranquille , &
la prifon
» me parut un féjour agréable ; en forte que
» j'aimois mieux y être qu'ailleurs.
» Un jour mon frère me dit je fais , ma
:

* fœur , que vous avez beaucoup de pouvoir


» auprès de Dieu. Demandez-lui donc , je vous
» prie , qu'il vous fafle connoîtré par Quelque
Vifio» de >> vifion li vous fouffrirez le martyre, oc vous
SamtcPcrpc»^ »
m
en iriRruirez enfuite. Comme je favois
h que Dieu me donnoit chaque jour mille mar-
» ques de fa bonté , je répondis avec confiance
» à mon frère vous faurez demain ce qui en
:

» fera. Je conjurai donc le Seigneur de m'en-


. avoyerune vifion , & voici celle que j'eus.
» Je vis une échelle d'or , d'une prodigieufe
» hauteur , qui touchoit de la Terre au Ciel
» mais fi étroite qu'il n'y pouvoit monter qu'une
» perfonne à la fois. Les deux côtés étoient
* hérifles d'épées , de lances , de crocs , de cou-
» teaux ; enforte que quiconque y feroit mon-
» té négligemment, ou fans regarder en haut
» ne pouvoit manquer d'être déchiré par
» tous ces inftruments. Au pied de l'échelle
m étoit un Dragon d'une énorme grandeur
»qui paroiflbit toujours prêt à s'élancer fur
» ceux qui fe préfentoient pour monter. Le
» premier qui monta fut Sature , qui n'étoit
» point avec nous lorfque nous fiimes arrêtés
» mais qui depuis fe livra volontairement aux
» perfécuteurs à caufe de nous. Quand il fut
» arrivé au haut de l'échelle , il fe tourna
» vers moi , & me dit : Perpétue , je vous
» attends ; mais prenez garde que le Dragon
» ne vous morde. Je lui répondis : Au nom de

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SAfNTR Perpétue, &c. MM. 589
» Notre Seigneur Jefus-Chrirt , il ne me fera
» point de mal. Alors , comme s'il eût eu peur de MARS
?#
» moi , il leva doucement fa tête de deflbus
» l'échelle ; & moi m'étant mife en devoir de
» monter , elle me fervit de premier échellon.
» Lorfque je fus parvenue au haut de l'échelle
» je vis un jardin très-fpacieux , au milieu du-
* quel étoit affis im homme d'une grande taille
» habillé en Berger , dont les cheveux étoient
» blancs. U tiroit le lait de Tes brebis , étoit&
» environné d'une multitude innombrable de
» perfonnes vêtues de blanc. Il m'appella par
m mon nom , & me dit Ma fille , foyez la bien
:

» venue. U me donna d'une efpece de caillé


» lait avec le lait qu'il tiroit. Je le reçus en
» joignant les mains , & le mangeai tous ceux
:

» qui étoient répondirent : Amen.


là préfents ,

» Je m'éveillai a ce bruit , mâchant ^quelque


m choie de fort doux. Je racontai cette viuon
» à mon frère , &
nous en conclûmes que nous
» fouffririons la mort.
» Quelques jours après , le bruit s'étant ré-
» pandu que nous allions être interrogés , je
» vis arriver mon pere dans la prifon la dou- Sainte Per-
:

» leur étoit peinte fur fon vifàge. Ma fille, me P^c eft vi *


par ° n
» dit-il en m'abordant , ayez pitié de mes che- p^.
» veux blancs : ayez pitié de votre pere , fi je
» fuis digne que vous m'appelliez de ce nom.
» S'il eft vrai que je vous aye élevée moi-mâ-
» me jufqu'à cet âge , &
que vous ayez, tou-
» jours eu dans mon cœur la préférence fur
» vos frères , ne me rendez pas l'opprobre
» des hommes. Jetez les yeux fûr vos frères
» fur votre mere , &C fur votre enfant qui ne
» pourra vivre fans vous. Quittez cette fierté
» qui nous perdroit tous i car aucun de nous

Digitized by
590 Sainte Perpétue, &c.MM.
99 n'ofera paroîtrc en public , fi vous êtes con*
99 damnée au fupplice. En parlant ainfi , il me
» baifoit les mains ,
puis fe jetant à mes pieds ,
* il m'appelloit , non mais fa dame.
fa fille ,

99 J'avoue que ma peine étoit extrême , lorfque

» je confidérois <jue mon pere feroit le feul de


99 toute ma famille qui ne fe réjouiroit pas
99 de mon martyre. Je lui dis pour le confoler :

9> Il arrivera de tout ceci ce qu'il plaira à Dieu


;
m car fâchez que notre fort eft entre fes mains
9> 6c non entre les nôtres. H fe retira accablé
9f de triftefle.
Le lendemain comme nous dînions , on
99

99 vint nous enlever tout à coup pour nous


» faire fubir un interrogatoire , nous arri vâ- &
9> mes à la place. Le bruit s'en étant auffi-tôt

99 répandu , la Salle d'Audience fut en un inf-


99 tant remplie de peuple. On nous fit mon-
99 ter fur une efpece d'échaffeud où étoit Je
99 Tribunal du Juge. Nous comparûmes devant
99 Hilarien , Intendant de la Province ,
qui re-
99 préfentoit le Proconful mort depuis peu. Tous
h ceux qui furent interrogés avant moi , con-
99 fefferent généreufement Jefus-Chrift. Quand
99 mon tour fut venu , mon pere parut avec
99 mon enfant , il m'éloigna un peu du pied du

99 Tribunal , &
employa tous les moyens que
» la tendreffe put lui fuggérer pour m'attendrir
99 fur le fort de cette innocente créature. Hi-
99 larien fe joignit à lui , &
me dit : Quoi vous !

99 ne ferez touchée ni par les cheveux blancs


1

99 d'un pere que vous allez rendre malheureux

99 ni par l'innocence de cet enfent qui va deve-

99 nir orphelin par votre mort ? Sacrifiez donc

99 pour la profoérité des Empereurs. Je tépon-

» dis ; Je ne ikerifierai point. Vous êtes donc

Digitized by Google
Sainte Perpétue , &c. MM. 591
* Chrétienne , reprit-il : Oui f je fuis Chré-
* tienne repliauai-je. Cependant mon pere
? ?#
» qui étoit refté là , dans l'elpérance qu*il pour-
» roit enfin me gagner , reçut un coup de ba-
» guette d'un Huimer à qui Hilarien avoit or-
» donné de le Élire retirer. Ce coup me flit

» très-fenfible ; & je reffentis une vive dou-


» leur de voir mon pere ainfi maltraité dans
» fa vieillefle.Le Juge prononça enfuite notre l« faints
» Sentence , &
nous condamna tous à être
^ndYmncs
mncs à*
» expofés aux bêtes. Nous retournâmes à la mo rt^
» pnfon , remplis de joie. Defque j'y fus ren-
» trée , j'envoyai le Diacre Pomponius deman-
n der mon entant à mon pere , qui ne voulut
» point me l'envoyer. Mais Dieu permit que
» l'enfant ne demandât plus à têter , & que
» mon lait ne m'incommodât point. »
t 11 paroît queSecondule étoit mort en prifon

avant l'interrogatoire , puifqu'il n'eft plus par-


le de lui. Hilarien , avant de prononcer la
Sentence , avoit fait fubir une cruelle fla-
gellation à Sature , à Saturnin &
à Révocat ;
il avoit aufli fait battre au vifage Perpétue &
Félicité. Il différa le fupplice des Martyrs juf-
qu'aux jeux qui dévoient fe donner à la fete
de Géta , que l'Empereur Sévère fon pere ,
avoit créé Céfar , lorique Caracalla eût été pro-
clamé Augufte.
Sainte Perpétue raconte de la manière fui-
vante une viiion qu'elle eut après fon retour Seconde vi.
dans la prifon : » Un jour que nous étions û°n *****

» tous en oraifon , il m'arriva de prononcer tc PcrP ctue -


» le nom de Dinocrate. Ceci me parut extra-
» ordinaire , parce qu'il ne m'étoit point en-
» core venu dans l'efprit. Je donnai quelques
» larmes à fon malheur , &
je connus que je

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-

59i Sainte Perpétue 3 &c. MM.


» pouvois & devois prier pour lui. Je comment
»çaidoncà le faire avec ferveur, &à gémir en
» la préferçce de Dieu. La nuit fuivante , il me
» fembla voir Dinocrate fortir d'un lieu tén<
» breux , où il y avoit plufieurs autres perfon-
» nés. Une foif brûlante le dévoroit fon vifege :

» étoit pâle &


défiguré , &
on y voyoit en-
» core l'ulcere cju'il avoit en mourant. Ce
» Dinocrate étoit mon frère , qu'un horrible
» cancer avoit enlevé de ce monde à l'âge de
» fept ans. C'étoit pour lui que j'avois prié. Il
» me fembloit qu'il y avoit une grande diftan-
» ce entre lui oc moi ; de forte que nous ne
» pouvions approcher l'un de l'autre. Près de
» lui étoit un baffin plein d'eau , mais dont le
» bord étoit plus haut que n'eft la taille d'un
» enfant. Il fàifoit d'inutiles efforts pour attein-
» dre jufou'à l'eau , afin d'étancher fa foif ; ce
» qui m'affligeoit extrêmement. Je m'éveillai &
» connus que mon frère étoit dans la peine ;
» mais j'eipérai que je pourrois le foulager. Je
» me mis' donc à prier pour lui nuit jour , &
» demandant à Dieu avec larmes qu'il daignât
»*m'exaucer. Je continuai jufqu'au moment où
» l'on nous transféra dans la prifon du Camp ;
» car nous étions deftinés à fervir aux fpeâa-
» cles qui dévoient fe donner dans le Camp
» à la fête de Céfar-Géta. Le jour que nous
» fumes dans les Ceps ( b) , j'eus une autre vi-
» fion-

( b ) Le Cep , en latin N<r- 1 y attachoit les pieds des


vus , étoit une machine de Martyrs, & on leur écartoit
bols percée de plufieurs trous, quelquefois les jambes juf-
de diftance en diftance. On qu'au quatrième & au cin-
quir-

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Sai ste Perpétue j &CéMM. 59$
» fion. Ce même lieu obfcur d'où j'a vois vu
» fortir Dinocrate, me parut très-éclairé. Pouf
MARS
* Dinocrate , il avoit le corps net , il tfcoit & 7,

» bien vêtu. On n'appercevoit plus fur Ton


» vifage qu'une cicatrice à l'endroit Oii étpifc
» auparavant la plaie caulee par le cancer-
» Les bords du bafliri etoient baiffés , l'enfant &
* pouvoitavec facilité atteindre jufau'à l'eau. Il
» y âyoit même fur le rebord une phiole toute
» pleine. Lorfque Dinocrate eut étancné fa jfpjf #
Mil alla jouer, comme font d'ordinaire les ern
» fants. je m'éveillai alors , je compris qu'il &
» avoit été délivré des peines qu'il enduroit-(t>.
3 "

V.\J
I
'i
' '
1

quicme trou. Cette efpe.ee içe ne perdroit rien èe fa '

de queftion étoit fort dou- force ,quand bien même' on


kmrcufe i comme il eft fa- fuppoferoit que; les deux Yi-.
cile de fe l'imaginer. Sainte fions qu'eut Sainte Perpétué
Perpétue remarque que du- ht venoient point, de JDiçu«
rant tout le temps qu'elle & Il en relulte toujours qu'on

fes compagnons pal 1er en: croyoit alors pouvoir foula-


dans là prifon du Camp , ils ge r les ames des morts par
furent enchaînés &
retenus le fecojrs de fes prières,.
d'ans les Ceps. H paroit qu'ils Mais comment pren-s'y
restèrent plùfieurs jours dans drbit-on pour prouver quo
cette prifon, en attendant Dieu n' croit pas l'Auteur des
celui qui était marqué pour v liions qu'eut notre Sainte?
lés jeux publics. Saint Auguftiri & les autres
('cj II eft évident parles "Pcres n'ont jamais eu lé moin'
conséquences que Sainte Per- dre foupçon fur cet ârticleà-
pétue tira de Tes deux vi- Lé moyen d'ailleurs de s'iraà-

vons au fujet de Dinocrate ,


giner què Dieu qui <
eft là
eue 4c Ton temps là doctri- uonti même» eût permis
ne <!e l'Êglifé étoit qu'il y qu'une perionne brûlante d'à*
avoît des* peines dues à cer- niour pour lui , fut trom-
tains, pèches qu'où expioit pée fur un point auffi efien-
après la mort & qu'on prioit tiel ? Celui qui a donné à
,

pouf là délivrance des FidcUs Oxford une Édition des Actes


trtpajj'is. Là croyance du Pur- de nos SS. Martyrs a très- ,

g^to ire remonte donc aux bien fénti la difficulté qua


premiers fiecïcs. Cette preu- les Catholiques font au*Pro-

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594 Sainte Perpétue , &c. MM.
h Quelque jour après l'Officier , nommé
MARS 7; * Pu<kns 9 «F" commandoit les Gardes de la
» prifon , voyant que Dieu nous fevorifoit de
n plufieurs dons , conçut une grande eftime pour
» nous , &
laiflà entrér librement les frères qui

h venoient nous voir , (bit pour nous confoler,


n foit pour recevoir eux-mêmes de la confo*
» lation. Comme le jour marqué pour les fpec-
» tades approchoit , mon pere revint me trou-
» ver. U etoit dans iui accablement qu'on ne
» pourrait exprimer. U s'arrachoit la barbe , (fe
n jetoit par terre , y demeurait couché fur le
n vifage , maudiffoit fa vieilléffe , difoit des &
0 choies capables d'émouvoir toutes les créa-
» tures. Je mourais de douleur de le voir dans
» cet état.
Tr fi«Be M'Enta,.. la veille des fpeûacles j'eus cette
^ t9
perpétue.
'
* vifion. U me fembla que le Diacre Pom-

teftants
se qu'il
\

y
fie lt
a faite
fade répon-
de
, ait été
/• 1. t.to. p, m• 61. 4. <•

tt.p. 40t. T. to , Ctt. ajou-U


dire (p. 14 ) que Sainte Per- te , en parlant des vifions de
pétue paroiflbit avoir été Sainte Perpétue, que Dino-
Montanifte. Cette idée n'a crate avoit reçu le Baptême ,
point fait fortune , elle A mais qu'il avoit enfuite fouillé
a été fondement réfutée fon innocence , ou en faifant
par plufieurs favants Protef- quelque afte d'Idolâtrie à la
tânts, entr'autres par Dod- follicitarion de fon pere , 01a
well t in Dijf. Cypr. A.n. S. en Mettant la vérité , ou en
p. tj. Déplus, eft-il croya- commettant quelqu'une do
ble que Saint Auguftin & cet finîtes dans lefquelles les
l'Églife entièreayent mis une enfants peuvent tomber. H~
Montanifte au rang des plus lius tutu pmtri , & mintvi , 6>
ilïuftres Martyrs } Saint Au- rtrwn loqui , & tonfxtn , &
guftin n'enfeigne-t-il pas lui- gare non poffunt. fi>id. 1. 1. C
même dani plufieurs endroits 10. voyez fur-tout le Car-
de Tes Ouvrages, qu'il y a dinal Orfi, Diff.dtAmsSS/
des peines temporelles à fu- Ptrptaut & FUrtx^
Ftlûitéuii.
bîr dans rautre vie ? Voyez ti*. tji$ t in
Ç3 Pett, /, 4c erig. anUrm t

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,
,

.SAintè Perpétue, &c.MM. 795


»pone étoit venù à la porte de la prifon ,
» au'il
y frappoit à grands coups , & que j'y fdAILS 7*
» etois accourue pour la vetu
lui ouvrir. Il étoit
* d'une robe blanche , ornée d'une infinité de
» petites grenades d'or. Il me dit : Perpétue ,
» nous vous attendons , venez. En même
» temps il me prit par la main , &
me con-
» duiut par im chemin étroit &
raboteux. Nous
» arrivâmes enfin à PAmphithéatre prefque tout
» hors d'haleine. Quand nous fumes au milieu
h de Tarene , il me dit : Ne craignez point ; je
» ferai avec vous dans un moment , je par* &
» tagerai votre combat. A ces mots , il fe re-
» tira &
me laifla. Sachant <jue je devoîs
et
» nois pas pourquoi on •M 1
h lâcher contre moi. Alors parut un Égyptien
» fort laid , qui s'avança pour me combattre
» avec plusieurs autres auffi difformes que lui.
» Je vis en même temps une troupe de jeunes
» gens qui vinrent j>our me fecourir , qui &
» me frottèrent d'huile. Je me fentis changée
en un Athlète fort &
vigoureux. Auifi-tôt
» parut un homme d'une grandeur prodigieufe
» qui avoit une robe traînante , avec deux
» bandes de pourpre pardevant. Il tenoit une
» baguette femblable à celle des Intendants des
» jeux , &
un rameau verd d'où pendoient des
» pommes d'or. Il fit faire filence , &
dit : Si
» l'Égyptien remporte la viôoire fur la femme
» il la tuera avec le glaive ; mais fi la femme
» eft viâorieufe de l'Egyptien , elle aura ce ra-
» meau. Nous nous approchâmes l'Égyptien &
» moi , &
le combat s'étant engagé , je ren-
» verfai mon ennemi fur le vifage après une
» longue réfiftanc* de fa part , & lui marchai
ppy

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596 Sainte Perpétue 3 &c.MM.
» fur la tête. Le peuple fe mit à applaudir ,
mars 7.
" ^ mes défenfeurs à chanter. Je m'approch
» de l'Intendant des jeux , de cet homme ad-
» mirable qui avoit été le témoin de ma vio-
» toire ;& il me donna le rameau avec un bai-

» fer , en me difant : La paix foit avec vous,


» ma fille. Après cela je m'éveillai , &je con-
» nus que je ne combattois point contre les
» bêtes, mais contre les Démons. » Ici finit la
relation de Sainte Perpétue.
Vifion de Sature eut auffi une vifion qu'il écrivit liri-
Samrc même. Il lui fembla que quatre Anges le con-

duifoient , ainfi que (es compagnons , dans un


jardin délicieux. Ils y rencontrèrent Jocond
Saturnin , & Artaxe' 9 qui avoient été brûlés
vifs pour la Foi , & Quintus qui étoit mort en
prifon pour la même caufe. Et comme ils s'in-
formoient où étoient les autres Martyrs de
leur connoiffance , ils furent tranfportes dans
. un Palais magnifique , tout refplendiflant de
lumière comme le Soleil. Ils virent le Roi de
ce beau lieu , environné de les heureux fujets,
-
qui répétaient continuellement : Saint , Saint y
Saint. Sature s'étant alors tourné vers Perpé-
: tue , lui dit : w Eh bien , ma Cœur , vous avez
» ce que vous défiriez. Dieu foit loué , me
» répondit-elle ; j'ai plus de joie ici , xjue je
» n'en ai jamais eu dans le monde. Lorfque
» nous forrions , ajouta Sature , nous trouvâ-
» mes l'Evêque Optât & le Prêtre Afpafe ,
» mais fort trilles & éloignés l'un de l'autre
» de quelques pas. Defcju'ils nous eurent ap-
: » perçus , ils vinrent fe jeter à nos pieds , pour
» nous prier de les réconcilier enfemble. Nous
» les embraflâmes en leur difant ; Eh ! n'etes-
. i> vous pas, vous notre Evêquc, & vous un

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>

Sainte Perpétue, &c. MM. 597»


» Prêtre du Seigneur? Comment donc pour* 1 s~
» rions «nous vous ïbuffrir ainfi à nos pieds? m^rs 7
.-

H.Ceft à nous de nous profterner aux vôtres.


» Perpétue fe mit alors à s'entretenir avec eux.
» Mais il vint des Anges qui écartèrent Optât
» & Afpafe, en leur ordonnant de ne pas trou-
» bler les Martyrs , & de terminer feuls leurs
» différents. Il fut dit encore à l'Évêque de'
» travailler à affoupir les conteflations qui di-
» vifoient quelques-uhs de fes Diocéfains. Les
» Anges après les avoir réprimandés tous
,

» deux, de vouloir fermer les


firent femblant
» portes du jardin. Pour nous , continue Sa- ï

h ture , nous vîmes là plufieurs de nos frères*


» Nous nous nourriffions de parfums délicieux
» qui nous raffafioient ». Telle fut la vifion
de Sature. Le refte des Aftes de nos faims
Martyrs fut écrit par un témoin oculaire.
Mais revenons à Félicité. Elle étoit groffe

de huit mois ; &


comme le jour des foedacles
apprôchoit , elle craignoit extrêmement*
que fon martyre ne rut différé. Ceft qu'il
n'étoit permis d'exécuter les femmes enceintes
au après leurs couches. Ses compagnons s'af-T
fligeoient auffi fenfiblement de leur côté , en.
prévoyant qu'ils la laifferoient feule dans le che^;
min qui devoit tous les conduire au terme
de leur commune efpérance. Ils fe mirent donc
tous en prière , afin d'obtenir de Dieu qu'elle
accouchât avant le jour marqué pour les fpec-
tacles.A peine leur prière ftit-elle finie , que
les douleurs de l'enfantement prirent Félicité.
La violence du mal lui faifant jeter quelques félicité ac-
cris de temps en temps , un des Gardes qui çouche dans
L'avoir entendue , lui dit : » Quoi, tu te plains ? ta P'^n.
» Que feras^tu donc ,
lorfque tu feras expofoe v

Ppiij

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^98 Sainte Perpétue y &c. MM.
MARS 7t

pour lui. h Elle accoucha d'une


fille , qu'une-

femme chrétienne éleva comme fon enfant,


;Cependant le Tribun qui avoit les faims
Martyrs en fa garde , les traiu>it«avec une
extrême rigueur; &
cela * parce qu'on tur-
avoit r«prefenté les' Chrétiens- des- wmme
gens qui ponrroient le tirer de prifon parle*
moyen de la magie. Perpétue lui dit hardi-
ment : » Ofez-yous bien traiter avet cette du-
nreté des prifonniers qui appartiennent à Cé-*
Hlar y oc qui font deflinés à combattre le jour
**de fa fête ? Pourquoi leur refufez-vous le'
:

m peu de foulagement qui leur eft accordé


» jufques-là ? N'eft-il pas de votre honneur
* qu'on nous trouve en bon état ?» Le Tribun
honteux &
confus de ce reproche , ordonna
que les Martyrs fiuTent traités avec plus d'hu-
manité. Il permit auifi aux frères de tes vifi- 1

ter , & de leur porter des rafraîchiffements.


Le Geôlier Pudens,qui s'étoit converti, leur'
rendoit fecrettement tous les bons offices qui
dépendoient de lui. La veille de leur combat
on leur donna , félon la coutume , le fouper
qu'on noiftmoit le. fouper libre, qui ie rai- &
toit en public. Mais nos Saints le changèrent,
autant qti'il leur fut poifible ; en un. repas de
charité. Ils parloient avec leur fermeté ordi-
naire au peuple que la curiofité avoit attiré
dans la Salle où ils mangeoient ; en le me- &
naçant de la colère de Dieu , ils relevoient le
bonheur
de Jefus-Chrift. » Quoi , leur difoit Sature, le

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Sainte Perpétue , &c. MM. 595
» jour de demain ne fuffira-t-il pas pour fàtis-
» firire votre inhumaine curiofité ? Vous pa- mars 7é

» roiflez aujourd'hui avoir pitié de nous ; mais


» vous applaudirez demain à notre mort. Re-
» gardez bien toutefois nos vifages , afin de
h nous reconnoître à ce jour terrible où tous
» les hommes feront jugés ». Ces paroles pro-
noncées avec ce ton d'affurance , &
cette fer-

meté que la Foi feule donne , remplirent les

Païens d'étonnement. Il y en eut même plu-

fieurs d'entfeux qui fe convertirent.


Enfin le jour qui devojt éclairer le triom-
phe de nos généreux Athlètes étant arrivé >
on les fit fortir de prifon * pour les conduire
à T Amphithéâtre. La joie étoit peinte fiir. leurs phithéatre.
vifages ; elle éclatoit dans leurs paroles &
dans tout leur extérieur. Perpétue marchoit
fe ma-
la dernière ; la tranquillité de fon ame
nifeftoit dans fa démarche; elle tenoit lés yeux
modeftement baiffés vers la terre. Pour Féli-
qu'elle
cité , elle 1* pouvoit exprimer la joie
refTentoit , de ce qu'elle fe trouvoit en état

de combattre les bêtes , aufli bien que les au*


très. Lorfqu'ils furent à la porte
de l'Amphi*
théâtre , on voulut , félon la coutume , faire

prendre aux hommes la robe des Prêtres de


Saturne , &
aux femmes la bandelette que por-
Martyrs
taient les Prêtreffes de Cérès. Les
refuferent de s'affujettir S cette cérémonie
fu-

perftitieufe , &
dirent qu'ils étoient venus de
gré à l'Amphithéâtre fur la parole
leur plein ,

d'eu*
qu'on leur avoit donnée de ne rien exiger
qui fut contraire à leur fainte Religion. Le Tri-

bun eut égard à la juftice de leur demande ,


& les laiffa habillés comme ils étoient. Perpé-

tue chantoit , compie fe tenant déjà affurée

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"
000 SÂINTÈ Perpètûe, &C. MM %

t 1
la viâoirp. Révocat , Saturnin it Satiirô

7t
«cn^çoi^t I e peuple des Jugements de Dieu.
Quand iU furent vis à vis du balcon d'Hilarien
iU lui crièrent i» Vous nous jugez en ce mon*
» de ; mais Dieu vous jugera en l'autre ». Le
peuple irrité de cette hardieffe , demanda qu'ils
pallaiTent par les fouets (•'</). Nos Saints fe
réjouirent d'être traités çtç
, comme l'avoit
r *
Jfçfu^Chrift leur divin Mâîfre,
Dieu leur accorda tout ce qu'ils lui a voient
demandé. Un jour qu'ils s'entretenoient enfem-
Me de* diverfes fortes de fupplices qu'on fài-
fojt endurer aux Chrétiens , ceux-ci fouhaî*
?
toient mourir d'une feçon , ceux-là d'une &
.
gutre. Saturnin dit qu'il défiroit d'être expofé à
toutes les bêtes de l'Amphithéâtre , afin de

Jui & Révocat ,


après avoit été attaqués par
Un Léopard , le furent auffi par un Ours. Sa-
lure lie cr&igrçoit riçn tant que d'être expofé
à un Ours ; &ç il auroit fouhaité qu'un Léo-
pard lui eût ôté la vie du premier coup de
tient. On l'exj>ofa dVbord à uîi Sanglier ; mais
ççt animal s'étant tourné contre le piqueur
qui J'avpit lâché , lui ouvrit le flanc avec fes
^cfenfes. Il revint enfui te fur Sature , qu'il
g? fit que fraîner quelques pas fur le fable.

m » 11 jij. mil.) ' t \ j m -


1
.j -* *i

( i fro ordine Vtnatoruw


) , ou personnes cou»
les Btfiiarii
gifent Içs ÀcVs. On appel? damnées aux bêtes , pafToient
Jpjt FenatoKs ceux qui étoient au milieu d'eux t ils Jeu» en
armés pour combattre les tjéchargeojent chacun un
bêtes. Il; fc rangopien; fur coup, Les, BeJHariï étoient
deux liguer t ayant un fouet nus en paffant par ce genre
de fuppUc*,

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Sainte Perpétuer &I.MM. 6or
Le Martyr ayant été après cela conduit auprès 3

d'un Ours * cet animal ne voulut point fbrtir ma&s *


jf
de fà loge. Comme Sature ctoh iain & entier ,
on le rappellapour tenter un fécond combat.
Ce fut alors qu'ayant trouvé l'occafion
de par-
ler à Pudens f il l'exhorta à perfévérer conf—
tamment dans la Foi, » Vous voyez , lui difoit-»
» il que les bêtçs ne m'ont, point fait de mal
» conformément à mes déûrs , fie à la prédic-
» tion que fen avois faite» Croyez donc fer-*
» mernent en Jefus-Chriû ; je retourne dans
» l'Amphithéâtre , où un Léopard m'ôtera la
» vie d'un fçul coup de dent ». La chofe ar->
riva ainfi ; car un Léopard s'étant jeté fur
lui , il lui fit une fi large bieffure d'un coup
de deat , que fon corps fut tout couvert de
fon fang. Le Martyr tourna fes derniers re-
gards fur Pudens , fie lui dit : n Adieu , cher
»ami, fouvençz'vous de ma Foi; que nos &
» fouffVances , au lieu de vous troubler , ne fer-
h vent qu'à vous fortifier ». Il lui demanda
à fon doigt, puis Leurm°rf
enfuite l'anneau qu'il avoit
trempé dans fon fang , il le lui rendit
l'ayant
comme un gage propre à animer fa Foi(t)«
çes entremîtes , Perpétue ÔC Félicité fo-
Siu:
rent enfermées toutes nue* dans des rets , fie
cxpofçes à une vache fauvage fie furieufe. Le
peuple fut touché tout à la fois d'horreur fie
de pitié , voyant l'une fi délicate , fiç l'autre
qui venoit d'accoucher , les mammelks encore
dégouttante* de lait. On les retira, ôç on les

( <) Quelques Auteurs peit- ici, eft celui qqe l'on hono*

(eut , avec le Tarant P. Ma-» recoinme Martyr en Afrique,


billon , ( Analtft. T. j. p, 40$ ) le 29 d'Avril,
que le Pudens dont il s'agit . i \

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6oi Sainte Perpétzte 3 &c+
couvrit d'habits flottants. La vache s'étant je-
tée d'abord fur Perpétue , l'éleva en l'air &
la laifla tomber fur les reins. La jeune Mar-
tyre qui s'apperçut que fes vêtements étoient
déchirés , les arrangea promptement 9 moins
ocaipée des douleurs qu'elle reflentoit , que
de l'honnêteté qui pouvoit être bleffée. Elle
renoua enfuite les cheveux qui s'étoient déta-

perfonnes affligées. Comme Félicité avoit été


Fort maltraitée par vache ,
la &qifelle étoit
étendue par terre, elle courut à elle , & lui
donna la main pour lui aider à fe relever. Elles
attendoiem toutes deux qu'on leur fit foutenir
une nouvelle attaque : mais le peuple n'ayant
as voulu qu'on les expoflt de nouveau , on
p
es conduifit à la porte Sanevivaria , qui don-
le

nent dans la place publique. Perpétue y tut reçue


par un Catéchumène , nommé Ruftique, qui lui
étoit fort attaché. Alors cette femme admira-
ble s'éveilla comme d'un profond fommeil , &
fe mit à regarder autour d'elle > en demandant

nd onic
les expoferoit à cette vache furieu-
lorfqu'on lui raconta ce qui s'étoit paffé *
elle n'en voulut rien croire . juïqu'à ce qu'elle
eût reconnu lé Catéchumène , & apperçu fur
fon corps & fes vêtements des marques de ce
qu'elle avoit fouffert. » Eh où étoit-elle , siéent
» Saint AugufKn en parlant de cette circonf-
tance ? Où étoit-ellé donc > lorfquelle étoit
» attaquée & déchirée par une bête foriéufe i
m fans en reflentir les coups, &lorfqu'après
» un fi rude combat , elle demandent quand il
» devait commencer ? Que vorjrbit-elle * pour
* ne point voir ce que tout le monde voyoit ?
» Que fentoït-elle , pour ne pas fentir une dou-

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Sainte Perpïtve, &c. MM. 603
h leur fi amour , par quelle
violente ? Par quel
>fvifion par quel breuvage étoitnelle ainfi
,
m toute tran/portée hors d'elle-même , corn- &
h me divinement eny vrée , pour paroître
»impaffib!e dans im corps mortel»? La Sainte
fit appeller fon frère , &
lui dit ainfi qu'à
Ruftique : » Demeurez fermes dans la Foi :
* aimez-vous les uns les autres , Se ne foyeï
» point feandalifés de nos fouffrances ».
Cependant on fe difpofoit à égorger les
Martyrs dans le SpoUanum (/)• Mais le peuple
ayant demandé qu'ils (uflent forgés au milieu
de l'Amphithéâtre , ils fe levèrent auffi-tôt
8c S'y* rendirent d'eux-mêmes ; après S'être &
donnés le baifer de paix , ils reçurent tous
le côup de la môindre mou-
mort, fahs faire le
vement, & moindre
fans laiffer échapper la
plainte. Sature fut le premier couronné , con-
formément à la vifion qu'avoit eue Sainte
Perpétue Celle-ci tomba entre lés mains d'un
Gladiateur mal adroit qui la fit fouffrir long-
temps. Elle conduifit elle-même à fa gorgé la
main tremblante du Bourreau , lui marqua &
l'endroit où il devoit frapper.
Ce glorieux martyre arriva le 7 de Mars 9
félon les plus anciens. Martyrologes. Il eft raar-,
qué au même jour dans, le Calemkier dé TÉ-
glife Romaine de l'an J54, lequel a été pu-
blié par Buchérius. Saint Profper dit qu'ils
fournirent à Carthage , ce qui s'accorde par-*
faitement avec toutes les circonftances de leur
Hiftoire. Leurs corps écoient dans la Grande'
Églife de cette Ville , au cinquième lieclé ( 1 ).
1
,
.
.
f " . '

{/) Cctoit l'endroit où les | entièrement tués.


Conteneurs achevoient ceux I ( i ) Viftor , /. i. p. 4.
quî les faites a boient pasf
604 Saint Paul, Anachorète? »

Leur fête au rapport de Saint Aiiguftin , at~


,

mars tiroit plus de monde pour honorer leur mé-


?#
moire -,que la curiouté h'avoit autrefois at-
tiré de Païens à leur martyre. Les noms de
° Perpétue & de Sainte Félicité ont été
dans le Canon de la Meffe.

LE MÊME J 0 V R.
SAINT PAUL LE SIMPLE,
Anachorète dè la Thêbaide.
*

G E Saint fiit furnommé U Simple , à caufe de


fon humilité extraordinaire & de l'ignorance
où il étoit de toutes les Sciences humaines.
C'étoit un pauvre Laboureur qui avoit fîdéle*
ment fervi Dieu dans le monde jufqu'à l'âge
de foixante ans. Sa retraite fut occafionnee
5jar la mauvaife conduite de fa femme , qu'il
uiprit en adultère. Fortement occupé du
deflein de fe confacrer fans rélerve au lervice-
de Dieu, il fortit de famaifon, & s'enfonça
dans le Déiert U arriva , après huit jours de
marche , au^lieù oîi s'étoit retiré Saint Antoi-
ne. S'étant adreffé à ce faint homme , il le pria
de le recevoir au nombre de fes difciples, 6c
de le mettre dans les voies du ialut.
Antoine n'eut point d'égard à fa prière ,
"
&
lui dit qu'il étoit trop
aufi^rités de* Solitaires,
retourner chez lui , & à refter dans fa pro-
feflion , ou il pourroit fe fanôifîer en animant
toutes fes aûions par un efprit de piété &de

by Google
,

Sajnt Paul > Anachorète. 605


recueillement. U ferma enfuite fit porte. Paul
: ne fe rebuta pôint : il demeura conftamment MARS -,
à la porte du Saint * où il joignoit le jeûne à
la prière. Antoine, frappé de fa ferveur, lui
ouvrit au bout de quatre jours , le mit au &
nombre de fes difciples , mais après avoir é-
prouvé fon obéiflànce de différentes manières.
•Il lui prefcrivit un Règlement de vie , dont le

but étoit de le faire travailler à dompter fes


paflions, à mortifier fes fens fa volonté , à &
purifier fans cefTe les affeâions de fon cœur ,
&à y allumer le feu de l'amour divin ( 1 ). Il
lui enfeigna la vraie manière de prier , lui dé-
fendit de manger avant le coucher du Soleil, &
luirecommanda de ne jamais fe nuTafier entiè-
rement dans fes repas. Paul fuivit avec exac-
titude les avis de Ion maître ; parvint en &
peu de tefaps à une éminente fainteté. Nous
allons citer quelques exemples de fon obéif-
fance , afin de montrer jufqu'à quel degré de
perfeâdon il portoit cette vertu.
Un jour qu'il avoit fini quelque ouvrage , S.
Antoine le défit , &
lui ordonnée le refiûre.
obéit fans répliquer un feul mot ,
Il fans &
demander de nourriture , quoiqu'il n'eût rioi
.pris depuis fept jours. Une autre fois , Saint
Antoine lui dit de mettre quatre pains dans
l'eau, pour les faire tremper, parce que le
pain des Solitaires étoit très-dur très-fec. &
Quand tout fut préparé pour le repas , il lui
commanda de chanter des Pfeaumes avec lui
au lieu de le laiffer manger. La prière étant

(1 ) Pallad. Laufiae. c. \S.\ Sozom. 1. I. c. I?;


/. 942. Rufin , Vit, Pasr. c.jiA

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606 S. Paul 3 Anachorète.
faite j il repofer ; mais il le cap-
lui dit d'aller
pella à minuit afin de fe remettre en prières
avec lui. Paul foutint toutes ces épreuves avec
une patience admirable , &
s'entretint avec
Dieu jufqu'à trois heure* après midi du len-
demain. Le foir , lui &
<bn maître mangèrent
chacun un pain. Après quoi , Antoine lui de-
manda s'il vouloit en manger un fécond. » Je
» le veux bien , répondit-il , fi vous en man-
* gez un fécond vous-même. Mais je fuis Moi-
» ne , dit Antoine. Et moi je délire le devenir ,
» reprit Paul ». Là-deflus ils fe mirent eh priè-
res , chantèrent douze Pfeaumes , récitèrent &
plufieurs autres prières. Ils prirent enfuite un
peu de repos jufqu'à minuit , qu'ils recom-
mencèrent le même exercice.
Ce ne furent pas là les feules épreuves aux-
quelles Saint Antoine mit l'obéi ffan ce de fon
ûifciple. Un jour que plufieurs Solitaires étoient
venus le confulter , il lui dit de répandre
du miel qui étoit dans un vafe , de le ramaf- &
fer enfuite fans y mêler aucune ordure. Il l'occu-
pa une autre fois pendant un jour entier à tirer
de l'eau , qu'il lui ordonnoit de répandre à
mefure qu'il la tiroit. Tantôt il lui comman-
doit de défaire &
de refaire fes panniers, de dé-
coudre &
recoudre fon habit ( i ). Paul enfin
n'avoit point de volonté , &
n'agiflbit que
par l'imprefiion de celle d'Antoine.
Lorfque celui-ci fe fut afliiré par toutes for-
tes d'épreuves des difpofitions de fon difcîple
& ou'il l'eût parfaitement mftruit des devoirs
de la vie folitaire , il l'envoya dans une cel-

( 2 } Rufin, & Pallad, kc> ci(f

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S. i*AVL 3 Anachorète. 607
Iule qu'il lui fit bâtir à une lieue de la fienne, I

Il alloit l'y vifiter de temps en temps , & le


MXRS
voy oit avec pbdfir pratiquer fidèlement cé qu'il
lui avoit prefcrit. Il avoit de lui une fi haute
idée ,
qu'il le propofoit
à fes autres difciples
tomme le modèle accompli qu'ils puf-
le plus
fent imiter. Il luienvoyoit les malades &les
pofledés qu'il n'avoit pu guérir , reconnoiûant
que ce bon Solitaire avoit reçu de Dieu une
grâce plus étendue que la fienne ; &
Paul ne
manquoit jamais d'obtenir leur guérifon par
fes prières. On ne fait plus rien du détail de
la ;Vi«[de ce fidjif homme. Il mourut quel-
temps après l'année 330. Les Grecs oc lç%
Setins l'honorent en ce jour.
Voyez Pallade , Rufin , Sozomene , Henf-
chénius , p. 645 ; &
Tillemont , T. 7. p. 144.
Ce dernier n'a gueres fait qu'abréger Sozomene*

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,

608 Saint Jean de Diëç.

viil jour de mars*


St. JEAN DE DIEU
-
FONDATEUR.
DE L'ORDRE DE LA CHARITÉ.
Tiré de fa Vu , écriii ans après fa mùrt ,
par François de Cafiro. Elle à été abrégée par
Baïllït , &
par lé A
Hétyàt ? dans fin Hiftoil*
des Ordres Religieux § T\ 4* p. tju
• # ...» »

L'An 1 <co.
MARS 8.
Q
£9>AîtfT fEÀN , farnommé de Dieu , na-

quit en Portugal , en 1495 , de parents peu


Ses premie- favorifés des biens de la fortune , mais pieux
tes années,
charitables. L'envie de voyager le porta *
dans un âge encore tendre , à quitter fa pa*
trie & fa famille. Son départ caufa tant de
douleur à fa mere , qu'elle en mourut au bout
de trois femaines. Cependant ilfe trouva
bientôt dépourvu <te tout fecours , & réduit
*
à une telle mifere , qu'il fut;, obligé de fervir ,
pour avoir de quôi fubfifter. Il s'attacha au
Mayoral , ou maître Çergçr 'du Comte d'Oro-
peiua , en Caftille. Il vécut dans ce nouvel
état avec toute l'innocence d'un vrai Chré-
tien.
Le Comte d'Orepeufa ayant levé une Com-
pagnie d'Infanterie, en 1511, Jean s'y enrô-
la, &fervit dans les Guerres qui divifoient
alors

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Saint Jean de Dieu. 60$
alors la France & ÏÏEfpagne. Il fervit auffi de- 1

puis dans Guerre que l'Empereur Charles- mars


la 8.
Quint alla faire aux Turcs en Hongrie. Mal-
heureufement la corruption qui régnoit par-
nn fes camarades , infeâa fa vertu. Il perdit 4

infenfiblement la crainte de Dieu , aban- &


donna prefque tous fes exercices de piété. La
Compagnie dont il étoit membre , ayant été
licentiée en 1536, il fe retira dans FAndalou-
sie aux environs de Séville, &
s'y mit au fer-
vice d'une Dame fort riche , en qualité de
Berger. Il étoit alors âgé d'envirdh quarante
ans. Éloigné du tumulte des armes , aban- &
donné à fes réflexions , il fe fouvint de ce
qu'il avoit été dans fa jeuneffe ; ce fouve-& sa coaverw
nir fut fuivi des plus vifs regrets. L'état aôuel
de fon a me , le grand nombre de défordres
dans lefquels il s étoit plongé , les remords
de fa confcience , tout le rappelloit vers Dieu ;
& il eut le bonheur de correfpondre fidèle-

ment à la grâce. Il commença deflors à con-


facrer la plus grande partie du jour de la &
nuit aux exercices de la prière de la mor-&
tification. Sans ceffe il gémiflbit fur fon ingra-
titude envers Dieu , & ne s'occupoit çlus oue
desmoyens de la réparer par le facritice d un
cœur contrit & humilié. Il crut enfin qu'il ne
pouvoit rien de plus propre à fatisfeire
faire
la jxiftice que
divine
,
de fe dévouer au fervi-
ce des malheureux. Pour exécuter fon deflein ,
il pafla en Afrique > afin de procurer aux Ef-

claves Chrétiens toute la confolation & tous


les fecoursqui dépendroient de lui. Il efpéroit
encore trouver daus ce pays la couronne du
martyre après laquelle il foupiroit ardemment.'
Étant à Gibraltar ; il y* rencontra un

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6io Saint Jean j>e Diev.
homme Portugais , que le Roi Jean III avo'rt
mars $.
dépouillé de tous les biens &
condamné à l'e-
xil. Les Officiers du Prince étaient chargés de

n fe met le conduire avec fa femme &


fes enfants aCeu*
au
, par charité , fe mit gra*
fervice ta en Barbarie. Jean

iZ^lt «dément à fon fervice. Mais à peine fut-on


S? arrivé à Ceuta, crue le chagrin &
rinternpérie
de l'air cauferent au Gentilhomme une maladie
fàcheufe. Il fut bientôt réduit à une extrême
néceffité , & obligé de vendre pour fâ fubfif-
tance& pour celle de fa famille j le peu qu'il
avoit appotté. Cette reffource ayant manqué ,
notre Saint y fuppléa,en vendant fout ce qu'il
poffédort. ne s'en tint pas là ; il alla encore
Il

travailler aux ouvrages publics , &


employa
le falaire de fes journées au foulagement de
fes malheureux maîtres. La joie pure qu'il gou-
tok dans les exercices tle la charité , fut trou*
blée par l'apoftafie d'un de lès compagnons.
Ceci , joint aux avk de fon Confeffeur , qui
repré
û repréfenta
lui qu'il y avoit de Piliufion à re-
chercher le martyre", le détermina à repafler
en Efpagne. De retour à Gibraltar , il fe mit
à y vendre des Images &
des livres de piété ;
ce qui lui fourniffoit Toccafion d'exhorter à la
pratique de la vertu ceux cpii s'adreffoient à
lui. Comme fes fonds s'étoient confidérable-
ment augmentés , il fe retira à Grenade , où il
établit une boutique en 153 8. U étoit alors âgé
4'environ 43 ans. Sachant que la Ville de
Grenade célébroit avec beaucoup de dévotion
k fête de Saint Sébaftien , il fe tranfporta dans
l'Hermitage du nom de ce Saint. La foule y fut
grande cette année , parce que Jean d'Avila M
Prêtre d'une grande (ainteté , le plus célèbre
Prédicateur d'Efpagne , &c furnommé 1'

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Saint Jman de Dntr. 6n
de PAndàloufie > y prêcher (*)• Jean
de voit
l'ayant entendu , fut fi touché de fon Sermon y MAR$ s.
qu'il verfa un torrent de larmes , remplit &
ÏÉglife de fes cris & .de fes lamentations, il
n comrc .
déteftoit publiquement fa vie paffee , fe frap- faiti'imcafe.
poit la poitrine , 6c demandoit tout haut ml-
ïericorde pour les péchés qu'il avoir commis.
Non content de cette première démarche , il
fe mit à courir les mes , s'arrachant les che-
veux > &
faifant tant d'autres chofes extraor-
dinaires , que la populace le poursuivit com-
me un intenté à coups de pierres
Enfin il rentra chez lui tout couvert de boue
& de fàng. Il donna aux Pauvres tout ce qu'il
avoit 9 &
fe réduifit à une pauvreté univer-
recommença à contrefaire tinfenfé
selle. Il
& à courir dans les rues comme aupara- n ft m.t
vam. Quelques peifonnes eurent pitié de lui ; fous lacon-
.elles J'^rreîerent & le conduisirent au Vénérable duite de Jean
d Avilâ*
Jean <PAySa. grand homme , plein de Pef-
Ce
prit de Dieu . découvrit bientôt que notre
,

Saint n'étoit point tel qu'il paroiflbit à l'exté-^


xieur. Il lui parla en particulier , entendit fa*

iConfeffion générale , lui donna des avis falutai-


jres ., .& lui promit de l'alTifter en toute occa-
fion.
Cependant notre Saint , brûlé d'un ardent
\r .des humiliations de nouveau
, contrefit
rinfenfé en forte qu'on crut devoir l'en*
:

fermer comme un phrénétique. On employa


les remèdes les plus violents pour le guérir de •

fa prétendue maladie. Il fouffroit tout en ef?

( a) Voyez après la Vie i celle du Vénérable Jean d'A-


du Saint , une -Notice, de j
vila.

Qqij

Digitized by
6n Saint Jean de Dieu.
prit de pénitence & en expiation de les pé-
chés paffés. Jean d'Avila informé de ce cjui
,

fe paflbit , trouva épuifé


alla le vifiter. Il le
de forces 3 &
tout couvert des plaies faites
par les coups de fouet qu'on lui avoit donnés»
Mais fi fon corps étoit dans un état de foiblefle ,
fon ame étoit pleine de vigueur de coura-&
ge , &
faintement avide de nouvelles fouflran-
ces &
de nouvelles humiliations. D'Avila fut
extrêmement édifié d'un amour fi extraordi-
naire de la pénitence. Cependant après avoir
donné aux motifs du Saint les éloges qu'ils
méritoient , il lui confeilla de changer fon
genre de vie, &
de s'occuper déformais à
quelque chofe dont il pût rélulter une plus
grande utilité pour lui &
pour le public. Jean
profita des avis de fon Direûeur , revint &
auffi-tôt à fon état naturel ; ce qui fuiprit
beaucoup les perfonnes chargées de le garder.
Il fervit auelque temps les malades de PHôpi-
tal où étoit >
il &
en fortit le jour de Sainte
Urfule de Tannée 1539.
Nous n'avons garde de propofer pour mo-
dèle aux pécheurs la conduite que notre Saint
-tint dans la ferveur de fa converfion. C'étoit
une voie extraordinaire dont Dieu fe fervit
pour guérir en peu de temps l'ame de fon fer-
viteur , &
pour la purifier de fes anciennes
fouillures , afin de l'élever enfuite par la
grâce à une fublime perfeâibn.
Le Bienheureux Jean ne penfa plus qu'aux
-moyens d'exécuter ledeflein qu'il avoit formé
de faire quelque chofe pour le foulagement
des Pauvres. Mais avant que de rien entrepren-
dre , il fe mit fous la proteftion de la Sainte
Vierge , &
fit un pélérinage à Notre-Dame de

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1

$Aitft Jean se Diev. 6\$


Guadeloupe en Eftramadoure. A fon retour , -

il commença par vendre du bois au marché ,


MARS 8^
& ilemployoit au foulagement des malheu-
reux le gain qui lui en revenoit. Il loua enfuite
une maifon pour y retirer les pauvres mala-
des ; & il pourvoyoit à tous leurs befoins

avec une aûivité , une vigilance &


une éco-
nomie , qui étonnèrent toute la Ville. Ceci
arriva en 1540. Telle fut la fondation de Satendreffe
C Ordre de la Charité, qui, par une bénédi&ion pour les m*- p

vifible du Ciel , s'eft depuis répandu dans J^* £5*


*s>t t » « tr- rr• ' t
,tous les mal-

toute la Chrétienté. Le Saint paltoit les jours heureux,


auprès des malades , &
employoit les nuits à
en tranfporter de nouveaux dans fon Hôpital,
Les habitants de Grenade furent fi édifiés de
cet établiffement , qu'ils s'emprefferent à Fen-
vi , de fournir toutes les choies dont les pau^-
vres avoient befoin. UArchevêque , témoin
des grands biens qui en réfultoient, &
de Tor-
dre admirable qui y régnoit par rapport à *

l'adminiftration des fecours fpirituels &


cor-
porels , le prit fous fa proteâion , &
donna
des ibmmes confidérables pour le rendre fixe
& permanent. L'exemple du Prélat produifit
de merveilleux effets , &
excita la enariré de
plujieurs perfonnes vertueufes. Comment en
«ffet n'auroit-on pas fàvorifé un Inftitut aufli
utile , &
dont le Fondateur étoit un modèle
accompli de charité , de patience , de & mo
deftie?
L'Evâque de Tuy , P^fident de la Cham-
bre Royale de Grenade , retînt un jour le
Saint à diner. Il lui fit diverfes queftions ,
auxquelles Jean répondit avec tant de jufteffe f
que l'Evêque conçut de lui la plus haute idée.
Ce fut ce Prélat qui lui donna le nom de Jean

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6i4 Saint Jean de Dîtif\
-
de Dieu , & qui lui prefcrivit fa forme de PHa-
j^j^ bit qu'il devoit porter. Natre Saine ft'anroit
*
jamais eu Kntentîoft fonder un Ordre Re*
dfe
hgieux ; auffi fie dreffa-t-if point de Règle
pour ceux qui fe confacferoiem , à fon exem-
ple , au foulagement des malades \ càr celle
qui porte fon nom , ne fat faite que fix ans
aprèi fa mort , c'eft-à-dire , eft ij 56., Quant
aux vœux de la Rêligion , ils ne tarent intro
^\ùts parmi fes difciples qu'en 1 5^0.
rordrc^dcla
Ciiifité. Le Marquis de Tarifa Voulut un joûr mettra
à répreuve le défintéreflement du Saint. Il
l'alla trouver , étant deguifé , & lui demanda
de quoi pourfuivre un Procès qu'il difoit être
jufte & indifpenfable. Jean lui donna aufE-tôt
vingt-cinq Ducats ,
qui étoient tout ce qu'il
poffédoit. Le Marquis fut extrêmement édi<*
fié d'une pareille générofité ; il rendit les
vingt-cinq Ducats , &
y joignit cent-cinquante
écus d'or. Pendant qu'il fut à (Grenade , U
envoya chaque jour d'abondantes proviûonÀ
à l'Hôpital du Saint.
Jean avoit une tendrefle fihguliere pour les
pauvres malades. U en donna les preuves les
plus frappantes , un jour que le feu prit à fon
Hôpital. Vivement allarmé du danger que cou-
doient les malades , il réfolut de s'expofer à
tout pour les fauver. mettoit fur Ion dos
Il les
les uns après les autres Se les emportait à
*

travers les flammes. U éprouva bien vifible-


rtent la proteâion de la providence ; car ni
lui , ni les malades , ne furent endommagés par
l'incendie.
Mais ne fe concentroit pas dans
fa charité
l'enceintede fon Hôpital ; elle étoit trop aâi*
ve pour ne pas fe produire au-dehors. Il était
percé de douleur , lorfqu'il apprenoit que

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Saint Jean de Dieu. 6i j
quelques perfonnes étoient dans l'indigence. Il
Ht faire une exaâe recherche de tous les Pau- MARS 9
vres de la Province , afin de pourvoir à leurs
befoins. Il fourniflbit aux uns de quoi vivre
dans leurs maifons , &
procurait du travail
aux n'y avoit point de moyens
autres. Enfin il

qu'il n'employât pour confoler pour affilier &


les membres tournants de Jefos^Chxift. Il avoit
un foin tout particulier des jeunes filles que
la mifere auroit pu précipiter dans le crime.
Il travailloit en même-temps à retirer de la dé*
bauche eu le malheur de s'y
celles xjui avoient
laitier entraîner ; il &
lui arriva plus d'une
fois d'aller trouver , le Crucifix à la main , les
péchereffes publiques , &
de les conjurer avec
larmes d'entrer dans la voie de la pénitence*
Il en convertit plufieurs , &
pourvut à leur
iubfiftance , afin de leur ôter l'occafion de re-
tomber dans leurs premiers défordres. renu*™™*
A une vie auffi aftive , il joignoit une prie*
re continuelle &
de grandes auftérités. U a*
Voit le don des larmes , &
poffédoit fupérieur
rement l'efprit de contemplation. Toute fa
conduite portoit l'empreinte d'une profond?
humilité ; &
il étoit fi affermi dans cens ver*»

tu , que rien n'étoit capable de l'altérer. Ceci


parut fur-tout à la Cour dé Valladolid , oîi (es
affaires l'avoient appellé. Le Roi & les Prin-
ces donnèrent à l'envi , dès marques éclar
lui
tantes de leur eftime , &
lui remirent des fonv*
.mes confidérables , qu'il diftribua avec une
économie admirable dans Valladolid même
& aux environs. Quant aux honneurs dont
*
on le combla , il les reçut avec cette fainte
infenfibilité qui caraâérife un homme vrai-
ment mort à lui-même. U s'accomrtiodoit bien

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6i5 Saint Jean de Dieu.
mieux des humiliations qui faifoient fes déli-
ai ces. Il les fupportoit avec joie , & les recheiv
choit même avec empreflement. Une femme
Payant un jour traité d'hypocrite , & accablé
de mille autres injures , il lui donna fecrette-
mcnt de l'argent pour Fengaeer à répéter dans
la place publique ce qutelle lui avoit dit.
Il y avoit dix ans que notre Saint foute-

noit avec un dburage invincible les grandes


fatigues qu'entraînôit le fervice de fon Hôpital,
lorfquHl tomba malade. On attribua principa-
lement la caufe de fa maladie aux peines qu'if
s'étoit données dans une inondation , pour re-
tirer de l'eau plufieurs effets appartenants aux
Pauvres > & pour fauver la vie à un homme
qui alloit fe noyer. Il diflimula d'abord le mau-
vais état de fa fanté , dé peur qu'on ne l'o-
bligeât à relâcher quelque chofe de fes tra-
vaux & de fes aufiéntés. Il travailla en même-
temps à faire l'inventaire de ce qui étoit dans
fon Hôpital , & à revoir tous les comptes.
Il revit auffi les façes règlements qu'il avoit
drcffés pour l'adminiftration du fpintuel & du
temporel. L'Archevêque de Grenade lui ayant
fait part d'une plainte portée contre lui, fur
ce qu'il avoit reçu des vagabonds & des fem-
mes de mauvaife vie , il fe jeta à fes pieds , &
lui dit : » Le Fils de Dieu eft venu au monde
» pour le falut des pécheurs , & nous fommes
> obligés de travailler à leur converfion par
» nos foupirs , nos prières & nos exhortations.
» fai été infidèle à ma vocation en négligeant
» ce devoir ; & j'avoue à ma confufion , que
» je ne connois d'autre pécheur dans mon
» Hôpital que moi-même , qui fuis indigne de
» manger le pain des Pauvres». Il prononça ces

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Saint Jean Dieu. 6\y
paroles avec une telle candeur, que tous ceux
qui les entendirent en furent attendris ; & que
1 Archevêque , plein de refpeâ pour le Saint ,
MARS *•
lai fia le foui de tout à fa diferétion.
Cependant la fanté du Bienheureux Jean
s'affoibliffoit de jour en jour , & fa maladie
Sa dernier©

devint fi dangereufe , qu'il ne lui fut plus pof-


fible de la cacher. Le bruit s'en étant répandu
une Dame vertueufe , nommée Anne Oflb-
rio , le vint voir. Elle le trouva couché avec
fes habits dans fa pçtite cellule , n'ayant d'au-
tre couverture qu'une vieille cafaque. Le Saint
avoit feulement fubftitué à la pierre qui lui
fervoit ordinairement d'oreiller , le pannier
dans lequel il avoit coutume de mettre les au-
mônes qu'il ramaffoit par la Ville. Les mala-
des & les pauvres fondoient en larmes autour
de fon lit. Anne Offorio fut vivement touchée
de ce fpeâacle , & avertit fecrettement l'Ar-
chevêque de l'état où étoit le Saint. Le Pré-
lat envoya fur le champ dire à Jean, qu'il
eût à obéir à cette Dame , comme à lui-même.
Anne ainfi autorifée , obligea le Serviteur de
Dieu à quitter fon Hôpital. Mais avant que
d'en fortir , il nomma Supérieur Antoine Mar-
tin , donna quelques inftru&ions à fes Frères
& leur recommanda fur-tout la pratique de
l'obéiffance & de la charité. Il vifita enfuit*
le Saint Sacrement , & y répandit fon cœur
en préfence de Jefus-Chrift. Sa prière fut
fi longue
,
qu'Anne Offorio fe vit obligée
de l'interrompre , pour le faire monter dans
fon Caroffe. Elle le conduifit à fa maifon , fe
réfervant à elle & à fes filles , le foin de le
fervir dans fa maladie. On lui fàifoit fouvent
la leûure de la Paffion de Jefus-Chrift j ce qui

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6i8 Saint Jean de Dieu.
" le portait à produire des Aûes d'humilité , ttt
mars S.
confidérant qu'il étoit fi bien traitétandis
,

que le Sauveur mourant l'avoit été fi mal.


Les progrès de fa maladie furent fi rapides 9
qu'on n'eut bientôt plus d'efpérance. Tout le
monde fut allarmé du danger où étoit l'hom-
me de Dieu ; toute la Nobleffe le vint vifiter,
& les Magiftrats accoururent pour le prier de
donner fa bénédiftion à leur Ville. Le Saint
répondit à ces derniers ^ qu'ils ne dévoient
point demander la bénédi&on d'un auffi grand
pécheur que lui. Il leur recommanda enfuite
les pauvres , & fes Frères qui avoient foin de
l'Hôpital. L'Archevêque lui ayant enfin or-
donné de fe rendre aux inftances des Magif-
trats , il donna fa bénédiction à la Ville de Gre-
nade , &
fit les exhortations le plus pathéti-

ques à tous ceux oui étoient préients. U s'en-


tretenoit continuellement avec Dieu par une
prière accompagnée des fentiments de la com-
ponôion la plus vive , &
de l'amour le plus
ardent. L'Archevêque dit la Méfie dans fk cham-
bre , &lui administra les derniers Sacrements
après avoir entendu fa confeffion. Il lui pro-
Sa mort»
je payer fes dettes , &
de pourvoir aux
befoins des pauvres dont fon Hôpital étoit
chargé. Jean , étant encore à genoux devant
l'Autel, expira le 8 Mars 1550. U avoit 55
ans accomplis. Il fut enterré par l'Archevêque
avec beaucoup de folennité. Le Clergé Sécu*
lier & Régulier de Grenade aflifta à les fiine*
railles > ainfi que la Cour &
la Nobleffe. Diett
ayant glorifié fon Serviteur par plufieurs mi*-
racles , Urbain VIII le béatifia en 1630, &
Alexandre VIII le canonifa en 1690. Ses Re-
liques furent transférées en 1664 , dans l'Églifc
de fes difciples.

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Saint Jean de Dieu. 619
L'Ordre dc$ Fferes de Charité , inftitué
la '

pour le féfrvke des malades , fut approuvé 9


par le Pape Pie V. Les Prefes <fc h
Charité
d'Efpagne ont iifi Général particulier ; ceux de
France &
d'Italie éft ont tin qui réfide à
Rome. Us fuivent tou* la Règle de Saint Au*
guftin.
4

Notre Saint ,
pour avoir entendu tm Ser*
*
mon , brifa entièrement les fers qui Pavoient
fi long-temps retenu dans Pefclavage du mon-

de & de fes palflions. Pourquoi donc fôfnme*-


nous toujours les mêmes , malgré tant de Ser-
mons & de leûurès pieufes } Ceft que
nous ne recevons point la parole de Dieu
avec les difpofmons convettables. Cette divi-
ne femence hé peut prendre racine dans des
cœurs indifférents &
mondains. Elle ne fruc-
tifiera que dans ceux qui la recevront avec foi f
avec refpeft , avec cette tranquillité d'ame
qu'on trouve dans le filence des créatures , fie
qui enfuite auront foin de la nourrir , &
d'é-
carter tout ce qui feroit capable de l'étouffer.
Telle fut la conduite de Saint Jean de Dieu :
auffi devint-il un homme tout nouveau après
fa converfion. Il embraffa courageufement la

pratique de toutes les vertus chrétiennes , &


principalement de la charité , fi fortement re-
commandée dans l'Evangile. Il fe dévoua
au fervice du prochain , fur l'affurance que
Jefus - Chrift nous donne qu'il tiendra pour
Élit à lui-même ce que nous aurons Êut aux
autres. Animons-nous à l'amour du prochain
& à l'accompliflement de nos autres devoirs t
en nous rappellant ces paroles que Saint Jeaa
de Dieu adreffoit fouvent à les difçiples :

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610 Saint Jean i>e Dieu.
» Pratiquez fans relâche toutes les bonnes œu-
IVIARS s. * vres ^ont en votre pouvoir , tandis que
» vous en avez le temps. » Entretenons-nous
comme lui , dans la ferveur , par la méditation
des fouffrances du Sauveur. Nous aurons fait
bien du progrès lorfque nous pourrons dire y
k fon exemple ; » Seigneur , vos épines font
» mes rofes , & vos fouffrances font mon Pa-
» radis. .

Notice de la Vit du Vénérable Jean <f Avila.


Le Vénérable Jean d'Avila % ou Avila , qu'on peut


appeUer le pere de tant de Saints qui parurent en E /pagne
«dans le feizieme fiecle, naquit au Dioccfe de Tolède. Il
fut envoyé à Salamanque , à l'âge de 14 ans , pour y étu-
dier en Droit. On le vit dès fon enfant* fè porter avec la
plus grande ferveur à tous les exercices èt piété. Il cm-
braffa de bonne heure l'État Eccléfiaftique pour lequel il
s'étoit toujours fenti beaucoup d'inclination. Le principal
but qu'il fe propofa fut de travailler de toutes fes forces à
allumer dans les cœurs le feu facré de l'amour divin. Ses
parents l'ayant rappellé chez eux , ils ne furent pas moins
furpris qu'édifiés % de l'ardeur avec laquelle il prariquoit tout
ce que la perfection a de plus héroïque » 8c comme Us
craignoient Dieu, ils fe donnèrent bien de garde de ré-
£î (ter aux impreflîons de l'Efprit Saint qui agifToitdans l'ame

de leur fils. Us lui permirent de fuivre fon attrait pour


la mortification. Jean fut bien profiter de cette permiffioiu
H recherchoit , mais toutefois fans affectation , la nourri-
ture la plus Ample &la plus groflîerc. U couchoit fur des
fagots de farment , portoit le cilice , Ce prenoit fouvent
la difeipline. Aux mortifications du corps il joignoit celle
,

de l'efprit. H mouroit tous les jours à lui-même par la prati-


que d'un renoncement abfolu , d'une humilité profonde 8c
d'une obéi (Tance entière. Il confacroit à la prière tous les
moments qu'il avoit de libres , s'approchoit fréquemment
des Sacrements , &
fur-tout de celui de FEuchariftie ,
pour leque) il avoit la dévotion la plus tendre. Sa cou-
tume étott de ne recevoir la fainte Communion, qu'après
s'y être préparé long-temps par les Actes des vertus qui
font les plus propres à purifier le cœur , Ôc à rembrafcff
d'amour pour Jefus-Chrifl.

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Le Venèr. Jean d'àvila. 621
Ayant été envoyé à Akala , pour y continuer fes éro-
des , il fe diftingua dans PUniverfité de cette Ville, au-
———
tant par fa piété , que par fes progrès dans les fciences. JVIAR S $•
Le célèbre Dominique Soto , Dominicain, fous lequel il
prit des leçons, conçut pour lui une tendre affection &
une haute eftime. Il déclara même plus d'une fois que fon
difciple étoit deiHné à être un jour un grand homme > ce
qui fut confirmé par l'événement. Pierre Guerrera , de-
puis Archevêque de Grenade , étoit un des principaux ad*
mirateurs de Jean d'Avila -, & il fc lia avec lui d une ami-

tié qui ne fit que s'accroitre de jour en jour.


Ce fut vers ce temps-là que Jean perdit fon père 8c fa
m ère. U ne penfa plus qu'a fe difpofer à recevoir les fainta
Ordres, Le jour qu'il célébra fa première Mefië , U ha*
billa doute pauvres , leur donna à dîner , & les fervit de
fes propres mains. Ayant appris qu'un jeune Prêtre venoit
de mourir après fa première Méfie : » Cen eft affez , dit-il »
» pour avoir un compte rigoureux à rendre au Tribunal de
m Jefus-Chrift.
De retour dans fà patrie » il vendit fon patrimoine, ot
en distribua tout le prix aux pauvres , afin d'imiter les Apô-
tres , auxquels Jefus-Chrift avoit recommandé le détache-
ment de toutes les chofes de ce monde. Il entra e nfuite
dans le miniftere de la prédication , fe propofant fans
cette l'exemple de Saint Paul , qu'il avoit pris pour patron
& pour modèle. Il fe prépara aux fondions fublimes de
T Apoftolat , non feulement par l'étude des dogmes de la
Religion , &
des règles de la morale chrétienne , mais en-
core par la pratique de l'humilité , de la charité fie de l'ab-
négation. Sa maxime étoit que la feience ne fervoit qu'au-
tant qu'elle étoit jointe à une piété folide. Un jeune Eo
défiait ique l'ayant un jour confulté fur les moyens de pré*
cher avec fruit , il répondit qu'il n'en favoir point de
meilleur que d'aimer beaucoup J. C. Son exemple étoit une
preuve fenfible de la fageffe 6c de la vérité de fa reponfe.
L'homme de Dieu partageoit tout fon temps entre la
prière fit les fondions du miniftere. Les travaux les plus
pénibles ,les dangers les plus preflants n'avoient que des
charmes pour lui , lorfqu'il s'agifToit de travailler à la con-
verfion des pécheurs. Il fembloit même eue les obftacles
donnoient a fon zele un nouveau degré de force & d'acli*
vite. Ses difeours, auxquels l'amour divin communiquoit
une onction admirable , touchoient les coeurs les plus en*
durcis. 11 fe fut fait un crime d'imiter ces Prédicateurs
qui font bien plus jaloux des applaudiflcments des hom-
mes , que de l'accroiifement de la gloire de Dieu. U ne
montoit jamais en chaire , qu'il n'eût imploré le fecours
&
divin, afin d'attirer les bénédictions céleftes fur lui.

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,

6 ii Le Vèner. Jean d'Avila.


$cfur fe* auditeurs. On eût dk que le Saint Efprit lui*

même parloir par Ta bouche , tant fes difcours étoient rem-

MARS S.
plis de ces traits de feu qui convertifient & changent les
coeurs. 11 rctirok du vice ceux <jni y étoient plongés , fit
contlrmoit dans le bien ceux qui ne s'éroient point «car*
tés des voies de la jufiiee. qui
voient l'entendre , nétoient pas pour cela privées de fes
inftru&ons ; il leur écrivoit des lettres pour leur indiquer
les moyens qu'il falloit prendre pour fe fan&ifier.
Nous avons un Recueil des Lettres du Vénérable Jean
d'Àvila, lefquelles ont été traduites en plusieurs langues*
Elles ne peuvent être l'ouvrage que d'un homme brûlant
de charité » ce fort verfe dans la connoilïance des voies
du falur, La facilité avec laquelle elles font écrites , an*
nonce un homme parfaitement infiruit des principes de la
morale , & doué du talent de rendre fes idées
thode & avec clarté. On fent que le coeur feul les a
tées. La vertu y cil peinte avec des couleurs fi
bles , le vice y eft représenté fous des traits fi hideux
qu'on ne peut s'empêcher Ae chérir Tune , &
de détefter
l'autre. Enfin t pn y trouve des règles de conduite ap-
propriées à toutes liés cùxonftances > des inftruclions aullî
fages que fblides , pour les divers États de la vie , te des
motifs puiftanxs de confblarion pour toutes les épreuves où
le Chrétien peut fe trouver.
Jean d'Avila récitoit fbn Office &
difoit la Mené avec
une ferveur vraiment angélique. U ne montoit à l'Autel
qu'après s'être long-temps préparé à la célébration de Vau-
gufte Sacrifice. U donnoit auflî beaucoup de temps à fon
a&ion de grâces^ Outre cela , il faifoit encore quatre heu-
res de méditation par jour , deux le matin , &
deux le
foir. H fe couchoit à onze heures , <8c fe levoit à trois.
Sur la fin de fa vie , les infirmités l'ayant rendu incapa-
ble d'exercer ies fonctions du minifterc , il confa croit pres-
que tout fon temps à la prière. U fut toujours pauvre
dans fes habits & dans fa nourriture i &
ne voulut jamais
avoir de doraefiique. 11 ne cefioit de recommander aux
autres l'amour de la pauvreté. La pratique de cette ver-
ru , difoit-il , fait mourir plufieurs panions , & nous rend
fcmblablcs à Jefus-Chrift , qui eft né , qui a vécu , & qui
eft mort dans la pauvreté. Il portoit le détachement du
monde à un tel point > qu'il a eu depuis bien peu d'imi-
tateurs. Un Seigneur lui ayant un jour montré fes jardins
& fes bâtiments , où toutes les beautés de la nature de &
l'art fe trouvoient réunies , il fut fort étonné de voir
qu'il ne contemploit tout cela qu'avec indifférence , il lui&
en demanda la raifon. * J'avoue , répondit le faint nom»
** me qu'il n'y a rien là qui me fatisfafle , parce que mon
,

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*

Le Vènèr. Jean d'Avila.


» cœur n'y prend aucun
croit fi
plaifir. Effç£Hvement Ton cœur
parfaitement rempli de Dieu 8c de l'amour des
——
— -p

biens invifibles , qu'il n'avoit que du dégoût pour tout ce MARS S


qui ne fe rapportoit pas directement à une fin fi noble.
Ce tant Prêtre prêcha avec le plus grand fuccès à Sé-
vUle . à Cerdoue , à Grenade , &
dans toute ÏÀndaJoufie.
Par fes inftru&ions , il porta à la vertu la plus é m mente
plufieurs perfonnes de l'un ce de l'autre fexe , entr'autres
Saint Jean de Dieu, Saint François de Borgia , Sainte
Therefe , Louis de Grenade , la Comtene de Féria la &
M arquife de Pliego. U avoit un talent fingulier pour la
direction des ames. U inculquoic d'abord la néceifité de
connoitre Dieu Ôc de fe connoître foi-même , cette dou-
ble connoi (Tance étant la bafe &
le fondement de la
perfeâion chrétienne. Mais fi Ton veut ûvoir jufqu'à quel
point U étoit verfé dans la vie intérieure , on n'a qu'à
lire le Traité qu'il compofa fur ces paroles du Pfeaurae
XlSVzEcomtex, ma flU, préui » Oc. Voici quelle
lut l'occafion de cet ouvrage*
Donna Sa ne ha Carilla , fille de D. Louis Fcrnandez de
Cordoue , Seigneur de Guadalcazar » laquelle joignoit de
grandes vertus à une rare beauté , étoit fur le point d'aller
a la Cour, &de s'y attacher à la Reine, en qualité de
Dame d'honneur. Déjà tout étoit prêt pour fon voyage ;
mais elle voulut, avant que de partir , feconfeûer à Jean
4'Avila. A
fon retour de l'Églife, on ne la reconnut plus,
tant étoit grand le changement qui s'étoit fait en elle.
Tous les avantages du monde ne furent plus à ies yeux
que des vanités dignes de fixer un cœur chrétien ; elle
y renonça v &
prit le parti de refier dans la maifon pater-
nelle , où elle mena jufqu'à fa mort , la vie la plus édi-
fiante. Ce tut pour ion inftruûion que notre faint Prêtre
compofa le Traité dont nous avons parlé plus haut. U lui
indiquait les moyens qu'elle devoit employer pour vain-
cre fes pallions , fie fur-tout celle de l'orgueil , pour mor-
tifier fes fens & fa volonté , &
pour allumer dans fon cœur
le feu facré de l'amour divin. Il lui recommandent de
méditer fbuvent fur la Paffion de Jefus-Chrifi , fur l'ex- &
ces d'amour qui a porté ce divin Sauveur à foutirir pour
nous.
On voit par tous les écrits de Jean d'Avila qu'il avoit ,

une dévotion extraordinaire envers Jefus crucifie • La mê-


me chofe eft atteftée par tous les Auteurs qui ont parlé
de lui. Ce fut en méditant la Paflion du Sauveur qu'il le
perfeaionna dans la pratique de toutes les vertus. Ce fut
par ce moyen qu'il alluma en lui ce défir ardent de founrir
pour Jefus-Chrift. Et voilà *uffi pourquoi il exhorte fi
fortement les hommes à rendre grâces au Seigneur , lorf-

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6 14 Lè Vener. Jean ïïAvila.

«3^ qu'il leur fournit l'occafion
ion faim nom.
de fouffrir quelque chofe pour
Le bon ufage qu'on fait des épreuves a di-

MARS S( foit-il, fortifie l'ame , & la rend capable de fouffrir en*


core davantage.
Dieu permit que Ton fervtteur devint pour un temps la
vi&ime de l'envie. Quoiqu'il n'eût jamais prêché que la
morale de l'Évangile, on ne laina pas de l'accufer d'un
rigorifme outré , qui lui faifoit exclure les riches du Royau-
me du Ciel. L'accufation étoit deftituée de toute vrai-
femblance il fut cependant arrêté à Séville , 8c mis dans
*,

les prifons de l'Inquifition. Il fouffrit les mauvais traite-


ments de (es persécuteurs avec une patience &une dou-
ceur admirables ; fie lorfque fou innocence eut été recon-
*

nue , il porta l'héroïfme jufqu'à remercier ceux qui avoient


voulu le perdre.
de diverfes infirmités à l'âge de cinquante
11 fut affligé
ans. Au milieu des douleurs aiguës qu'il reflentott, on
l'entendoit répéter fouvent cette prière : » Seigneur , aug-
tt mentez mes fouftrances , mais accordez-moi la patience.
Enfin , après avoir foufTert durant dix-fept ans au-delà de
tout ce qu'on peut imaginer, il mourut le io Mai 1569.
Le Vénérable Jean d'Avila fut un homme piaffant en
oeuvres & en paroles , un prodige de pénitence . la gloi-
re du Sacerdoce. Il mérita par fa doctrine , par foa zele
& par fes autres vertus d'être l'édification , le founen , &
l'oracle de l'Églife. Cétoit un génie univerfel f un Di-
recteur éclairé , un Prédicateur célèbre , un homme révé-
ré de toute l'Efpagne , connu de tout l'Univers chrétien ;
un homme enfin dont la réputation étoit parvenue à un
point , que les Princes fe foumettoient à fes décifions , &
que les lavants lui demandoient le fecours de fes lumiè-
res. Nous finirons (on portrait en difant que Sainte Thérefe
le regardoit comme fon protecteur , lè confultoit comme
fon maître , êc le fuivoit comme fon guide & ion modèle.
Voyez les Vies du Vénérable Jean d'Avila , l'une écrite
par Louis de Grenade , &
l'autre , par Louis Munnoz.
M. Arnaud d'Andilly en a donné un abrégé à la tête de
fa traduction des Œuvres du Vénérable Jean d'Avila » im-
primée à Paris en 1673 » i» M««

Sajxt

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Saixt Fàtix , (î 2
^

LEMÊME SÔÙR> ^ 84

SAINT FÉLIX,
Êvêque en Angleterre*
Félix étoit itn faînt Prètré de Boiirgôgné
;
oui convertit &
baptifa Sigebert , Roi des Eft-
Angles , lequel avoit été obligé de pafler en
France , pour fe fouftraire aux coups que lui
préparait fa propre famille. Le Prince ayarit
été enfuite rappellé pour monter fur le Trôné
de fes Ancêtres , il engagea Félix à le fuivre
en Angleterre , afin qu'il pût lui aider à pro*
curer la converfion de ceux de fes Sujets qiii
étoient encore Idolâtres» II s'âgiflbit des habi^
tahts de Norfolk , de Suffblk &
dii Comté de
Cambridge. Notre Saint fut facré Évêque par
Honorius , Arthevêque de Cantorbéry puis
i
chargé d'aller prêcher la Foi dans PEft-Anglie*
Dieu donna tant de fuccès à fa Miffion , qu'il
amena prefque tous les Idolâtres à la connoif»
fance de la vérité*
Sigebert , à qui Bedç donne le titre de Roi
&
erès^écioiré trh^Chritun , féconda de tout fon
pouvoir les travaux apoftolîaues de Félix. Il
fonda des Églifes , des Monaueres &
des Éco*
les ta). Deux ans après , il defcendit du Trône
qu'il céda à Égrick fon coufin , &
fe fit Moine

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6i6 Saint Félix 3
>
à Cnobersburgh ( b) , dans le Comté de Suffolk.
l\ vécut tranquillement dans fa Retraite durait

Fefpace de quatre ans. Mais fes Sujets l'en re-


tirèrent , &
le mirent à la tête de l'Armée
deftinée à repoufler le cruel Penda , qui étoit
venu fondre fur PEft-Anglie. Sîgebertrefuia de
porter des arjnçs , parce que cela lui parut
contraire à la profeffion monaftique ; il ne
voulut avoir qu'une baguette à l*i main. Ce
vertueux Prince fut afiaflînéavec Égrich(c) f
en 642. 11 eft nommé comme Martyr dans les
Calendriers de France, &
dans ceux (l'Angle-
terre , mais fous différents jours. Les premiers
le nomment le 7 d'Août , &
les féconds le 27
4e Septembre.
Quant à Saint Félix , il établit fon Siège à
Pummoc ,
aujourd'hui Dunvich , dans le Com-
té de Suffolk. Il mourut en 646 , après avoir
gouverné dix-fept ans fon Églife avec tout le
zele d'un bon Pafteur. On l'enterra à Dunvich
(d} 7 mais fes Reliques furent transférées à
JrAboaye de Ramfey 9 fou* le Roi Canut.

111 m >

teurs ota conclu de ce ptffa- Étheldrede , de Sainte Sex-


, que Sigebert étoit le burge, de Sainte Éthelbugre,
fe
ondateur de rUnivernté de de Sainte Édilburge , toutes
Cambridge. Saint Félix éta- quatre Àhbefles, &
de Sainte
des Écoles à Félixftow \
blit W ithburge. Ce Prince fut rue
Creffy ajoute qu*il en établit dans une Bataille contre les
.aufïi à Flixton ou Félix ton. Païens , après un règne de 19
(b) Aujourd'hui Burgh- ans. On l'enterra à Blither-
Caftlc. Sigebert avoit fondé burg mais on porta enfui te fon
xe Monaftere pour Saint corps à Saint Edmond's-Bury.
Furfy. (d) Dunvich étoit an-
( c ) Égrich eut pour fuc- ciennnement une grande Vil*
cefleur le bon Roi Annas , le » où l'on comptoit 5 a Mai'

%
qui fut pere de Saint Ercqn- fous Religieufes -,
mais elle a
;waid , £yêque , de Sainte été peu à pen. engloutie par

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S. ÀPOLLOtfE y ùc. MM. 617
Voyez Ëede , ; Guillaume de Malmef-
1. 1
bury ; & Warthon, T. i.p. 403.

SAINT APOLLONE,
SAINT PHILÉMON, &c.
Martyrs.
ONE
étoit un faint Anachorète «
plein de zele pour la gloire de Jefus-Chrift.
Ayant été arrêté à Antinoé en Égypte , plu-
fieurs Païens s'attroupèrent autour de lui pour
Finfiilter ; mais parmi ceux qui l'irrfukoient ,
il n'y en avoit point qui le fit avec plus de

malignité qu'un fameux joueur de flûte , nom-


mé rhilémon , qui étoit fort aimé du peuple.
Il traitoit le Saint d'impie & de féduâeur f
qui méritoit haine de tous les hommes.
la
Apollone ne répondit à Tes injures que par ces
paroles : » Dieu veuille, mon fils , avoir pitié
» de vous , &
ne pas vous imputer tous ces
» difcours ». Cette douceur toucha fi vivement
Philémen , qu'il renonça fur le champ au Pa~
ganifme , &
déclara qu'il étoit auflî Chrétien.
On le conduHit avec Apollone devant le Juge
( a ) , qui avoit déjà condamné à mort Saint
Afclas , Saint Timothée , Saint Paphnuce , &c

la mer. On découvre encore] Anà+àtù dt DwtwU ; inV.


les reftes des clochers fous
l'eau , environ à 5 milles du ( a ) Métaphrafte & Ufuard
rivage. Voyez M. Gardi- l'appellent Arien.
ner , dans Ton Hiftoin &fi*
Rij
628 S. Apollone s &c* MM.
pilleurs autres Chrétiens. Après leur avoir
fait fouffrir diverfes tortures , il ordonna qu'ils
fufTent tous deux brûlés vifs.
, Apollone fit
Lorfque le bûcher fut allumé
cette prière : Seigneur , ne pas aux bêtes
livrer
les ornes qui confeffent votre nom ; mais manifef-
te[ votre puiffance. Il n'eut pas plutôt achevé ,
qu'un nuage plein de rôfée l'environna , ainfi
que fon compagnon , &
éteignit le feu. Le
Juge & le Peuple , frappés du miracle , fe mi-
rent à crier : » Le Dieu des Chrétiens eft erand
»& le feul Dieu ». Le Préfet d*Égypte , informé
de ce qui s'étoit paffé , fe fît amener à Alexan-
drie le Juge &
les deux ConfefTeurs chargés de
chaînes. Durant le voyage , Apollone con-
vertit les Soldats qui leconduifoient, avec fes
compagnons ; de forte ou'en arrivant à Alexan-
drie , ils rendirent auffi témoignage à la Foi
de Jefus-Chrift. Le Préfet défefpérant de pou-
voir ébranler la confiance de tous ces Confef-
feurs , les fit jeter dans la mer , vers l'an
311. Quelques jours après , on trouva leurs
corps fur le rivage , &
on les mit dans un
même tombeau. » Il s'y eft opéré plufieurs
» miracles jufqu'à ce temps-ci , dit Rufin. Les
» Fidèles n'y ont jamais prié envain. Le Sei-
» gneur m'y a exaucé moi-même ».
Voyez Rufin , Fit. Patr. I. 2. c. #9. p. 477^
Se Paliade , Laujiac 9 c. 65 & ffff.

-
1

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Saint Ji/iien t Arcm, 619

MARS 8.

SAINT JULIEN,
Archevêque de Tolède.
CE
élevé dans
Saint (tf ) quî étoît de Tolède , y fut
la venu &
dans toutes les scien-
ces eccléfiaftiques. Il prit enfuite la réfolu-
tion d'aller , aveç Gyailan fon ami , paflôr le
relie de fa vie dans la Solitude , afin de vaquer
uniquement aux exercices de la pénitence &
à la méditation de l'Écriture Sainte* Mais fon
Êvâque le retint , &
l'obligea de fe confacrer
au fervice de PÉglife. Ayant été élevé fur le
Siège Archiëpifcopal de Tolède , en 680 , il
fit que l'Apôtre de-
briller toutes les vertus
mande dans un digne Pafteur des ames. Il fut
le perc des pauvres , Fàppui des foibles , le
proteâeur des affligés. Il préfida au XIV au &
XV Conciles de Tolède , mourut en 690, &
Ce fut de fes mains que le Roi Wembâ , étant
tombé malade, reçut la pénitence & l'habit
monaftique , qu'il porta le refte de fes jours
(*)•

( a ) On Ta confondu quel» traité dans ce dernier Ou*


quefois avec Julien Pomere vrage , de la mort , fie de l'état
qui vivoit long-temps aupa- de Tame après, la morfc Le
ravant, Saint y enjfeignc que l'amour
( b ) De pîufieurs Ouvra- de Dieu fie le dcûr de lut
ges que Saint Julien avoit être uni y doivent éteindre
oompofés , il ne nous refte en nous la crainte naturelle
plus que l'Hiftoire des guer- de la mort ; que les Bienheu-
res du Roi Wemba , un li- reux dans le Ciel prient pour
vre contre les Juifs , fie trois. nous % qu'ils s'intéreifent vi-
Livres du PronojUcs. Il cil à notre félicité , 6c
Riij

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630 Saint Dut h ac s E.
Voyezl'Appendice du Livre des Hommes
MARS S.
Iiluftres par Udéfonfe de Tolède. Ce qui y eft
,
dit de notre Saint , a été corapofé par Félix
fon fucceflêuf.

SAINT DUTHAC,
ÉVÊQtJE DE ROSS EN ÉCOSSE,

XJ N zèle ardent pour la gloire de Dieu une


9
humilité profonde , une tondre charité envers
les pauvres &
les pécheurs f un amour extrê-
me de la pauvreté &
de la mortification , fu-
rent les traits principaux qui caraâériferent
Saint Duthac. Le don des miracles rendit par
tout fon nom célèbre. Il reçut auffi de Dieu
la connoiffance de l'avenir. Il prédit Pinvafion
des Danois en Écoffe , qui arriva en 1163
dix ans après fa mort. Les Écoflbis attribuè-
rent à l'interceffion de Saint André de Saint &
Duthac , la viâoire qu'ils remportèrent en cette
occafion fur leurs ennemis ( a \ Notre Saint

qu'ils connoûTcnt nos aôions, tit pas avec nos Anges. If


Ibit qtflls les voient dans l'ef- enfeigne encore que les priè-
ience divine avec toutes les res pour les morts accélèrent
vérités qu'il eft de leur état la délivrance des ames du
ét ne pas ignorer , foit que Purgatoire , mais qu'elles ne
les Anges , qui font les mefiV fervent de rien aux réprouvés.
Ç?rs de Pieu , les en inftrui- (a) Les Danois, comman-
Rnt. Quant aux damnés , il dés par leur Roi Achol , fu-
•joute qu'ils ne connoiffent rent défaits par Alexandre
point ordinairement ce quife Smart , bifaïeul de Robert .
pane
parce
fur la terre; êc cela premier Roi d'Écoûe de U
qu'ils ne voient pas raaifon de Stuart.
Pieu f & qu'ils ne conver-

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S a i n t ê Rose , 631
qui foupiroit depuis long-temps après la bien- -

heureule éternité, en alla prendre pofleffion mars $.


en 1x53. piété attiroit autrefois un grand
nombre de Pèlerins à fon tombeau , qui étoit
dans la Collégiale 'de Thané , ail Comté de
Roff. Le célèbre Lefley Évêque deRoff, avoit
une dévotion finguliere pour S. Duthac $ pre-
mier Patron dé fon Diôcéfé (a).
Voyez Lefley , Dtfcripi. Sc*e. p.*7\ & là
Vié tnafiufcrite dé Sairit Duthac , par un Jé-
fUité Écofîois , neveu dé Lefley. Voyez auià
Kirtg , in ÙâUnd.

SAINTE ROSE DE VITERBE,


Vierge.
EL lE fe confiera
cice de la pjiere
dès fe jeuneffe * à Pexef-
,

& aux auftérités


de la péni-
tence. Dieu récompenfe fon éimnente vertu
par le don des miracles ; il lui accorda auffi un
tatéftf extraordinaire pour la converfion des
pécheurs les plus endurcis. Rofe entra dans te
Tiers-Ordre de Saint François , dont die obfer-
va la Règle avec une fidélité inviolable juf-
IJtfâ ft tAôff, arrivée ért ïi6f.
Voyez lés Annales de Wading , les Vies &
dis Saints âu Tiers-Ordre de Saint François 9 par
Barbaza , T. 2. p. 77,

(4) Lefley étant refte* qua- élu Suffragant deRouen par


tre ansenprifon avec la Reine le Cardinalde Bourbon , te
Marie , pafla en France , tut mourut à Bruxelles en 1591.

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6$i Saint Sènan , 2s.

SAINT SÉNAN,
ÊvÊQVE çn Irlande.
-

c E Saint qui étoit né en Irlande , fut difci*


pie des Abbes Caffide &
Natal ou NaaL Le
défir de fe perfeâionner dans la vertu , lui fit
entreprendre le voyage de Rome. Il paflà en*
fuite dans la Grande Bretagne , &
s'y lia <Tu*
ne amitié fort étroite avec Saint David. De
retour en Irlande , il y fonda plufieurs Églifes,
& un grand Monaflere dans Tille d'Inis - Ca-
th^ig ? qui eft à l'embçuçhure du Sbannon. 0
gouverna ee Monaftere avec beaucoup de fk-
gefle , & y fit toujours fa réfidence , même
eprès qu'il eût été élevé à l'Épifcopat ( a ). If
mourut la même année & le même jour que
Saint David ; ruais l'Églife d'Irlande l'honore
le 8 de Mars. Il y a un Bourg de fon nom
^ans la Province de Cornouaille.
Voyez les AÔes de çe $airçt dans Col^an J
6o* t

<uccef- a depuis été partagé en trois •


(,) Les Abbés.
feurs de Saint Sénan » °™
& on en a fait les Diocefrs
plu- de Limérick, de Killalof »
tous été Évèques durant
Dio- $c d'Ardfert,
fleurs ficelés. Mais leur
c tfe qui étpit fort étendu
,

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& Psawobe , Anachor. $tf

S, PSALMODE oirS. SÀUMAY


Anachorète-
CE Saint, qui étoit Irlandois de nai fiance,
auitta fa patrie pour paffer en France. H fe re-
tira dans le Lîmoufin , où il mena la vie ana-
chorétique. La réputation de fon éminente
fainteté fut encore relevée par les miracles
qu'il opéroit. Il mourut vers Van 5 89,
Voyez le Martyrologe d'Évreu*.

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i

634 Sainte Françoise t Veuve.

IX. JOUR DE MARS.


S™. FRANÇOISE,
VEUVE
FONDATRICE
DES COL LATINES OU ÔBLATES.
Tiré de deux Vies de 1a Sainte, tune écrite par
le Chanoine Mattiotti fin Confeffeur ; & rature
par Magdelene StlTAnguiUara , Supérieure des
Collatines. Voye[ Hilyot , Hiftoire des Ordres
Religieux , T. 6. p. 108.

L'An 144.0.
'

TET*
MARS 9» 3? RANÇOISE naquit â Rome en 1384,
de Paul Buxo 9 6c ét Jacqueline Rofredeichi
tous deux d'uiîe fàmillé très - diftinguée. Elle
marqua dès fon enfance beaucoup d'inclina-
tion pour la vertu , tt une horreur extraordi-
naire pour tout ce qui étoit capable de blefler
la pureté. Ennemie de tout amufement puéril
elle n'aimoit que la folitude &la prière. Elle
n'eut pas plutôt atteint l'âge de onze ans ,
qu'elle réiolut de fe faire Religieufe. Mais fes
parents n'y ayant pas confenti f elle entra par
obéiflance, dans l'état du mariage, &
époufa en
13^6 , Laurent Ponzani , jeune Seigneur Ro-
Son mariage, main dont la fortune égaloit la naiflance.
Françoife s'appliqua à conferver l'efprit de

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1
Sainte Françoise 3 Veuve. 635
-

grâce qui l'avoit animée jufqu'alors. Elle vi-


voit dans la retraite , autant qu'il lui étoit pof- mars *
fible , évitant avec foin les compagnies dan-
&
gereufes , les feftins , les fpeôacles , tous les
divertiflements profanes. Elle n'étoit jamais
plus contente , que lorfqu'elle avoh la liberté
de vaquer à la prière & à la méditation 9 Se
de viuter les Églifes. Mais comme fa piété
étoit éclairée , elle ne prenoit rien fur les de-
voirs que le titre d'époufe lui impofoit. Ses at-
tentions &c fes complaisances pour fon mari
avoient quelque chofe d'extraordinaire. Aufli
furent-elles payées par celui-ci d'un jufte re-
tour. Rien n'étoit plus édifiant que de voir les
deux époux ferrer de plus en plus les liens de
leur union par des égards mutuels ; & ce qu'il
y eut de plus admirable , c'eft qu'ils ne furent
jamais divifés par la moindre conteftation du-
rant les quarante années qu'ils pafferent en-
femble. Françoife , qui favoit trouver Dieu
par-tout , ne balançoit point à quitter fes
exercices de piété , lorfque fon mari l'appel-
loit , ou que fa préfence devenoit néceffaire
quelque part. Elle avoit coutume de dire à
cette occafion , qu'une femme mariée devok
quitter toutes les pratiques de dévotion pour
ie retrouver au milieu de fon ménage. Elle
prenoit le plus grand foin de l'éducation de fes
enfants , & veilloit continuellement à la garde
xle leur innocence. La feule grâce qu'elle de-
mandoit au Ciel pour eux # étoit qu'ils vé-
euffent toute leur vie de manière k mériter
une place dans le Royaume célefle. Elle trai*
toit fes domefHques comme fes frères & fes
fœurs f &
comme fes cohéritiers futurs dans
lç Royaume du Ciel. De-là ce zele qui lui

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6^6 Sainte Françoise , Veuve.
* fàifoît tout mettre en œuvre pour les porter
xjms 9 à travailler à leur falut.
Les mortifications de notre Sainte, gui a-
voient toujours été fort grandes, devinrent
Ses morti- extraordinaires lorfque fon mari lui eût per-
**onv
{

mis de traiter fon corps avec toute la rigueur


cru'elle voudroit Elle s'interdit dèflors lufage
du vin , du poiffon & de tout ce qui eft capable
de flatter le goût. Elle ne fe permettoit le gras
mie dans les maladies dangereufes. Du pain
aur & moifi étoit fa nourriture ordinaire.
Souvent elle en donnott de bon aux Pauvres,
afin d'avoir en échange les croûtes deflféchées
dans leurs poches. Dans fes meilleurs repas, elle
ajoutoit à fon pain quelques herbes infipides
qu'elle n'aflaifonnoit pas même d'huile. Elle
ne buvoit que de l'eau. Elle ne faifoit qu'un
feul repas par jour ; & fes longues abfii-
nences lui ôterent peu à peu le fens du
goût. Ses habits étoient d'une étoffe groffie-
re ; jamais elle ne portoit de linge , pas même
en maladie. Sa difeipline étoit armée de poin-
tes de fer. Elle avoit toujours un cilice & une
ceinture de crin ; elle en avoit d'abord porté
une de fer ; mais fon Confefleur Tavoit
obligée de la quitter , parce qu'elle lui avoit
déchiré tout le corps. S'il lui arrivoit de com-
mettre quelque faute de fragilité , elle s'en
puniffoit aum-tôt de la manière la plus rigou*
reufe. Si , par exemple, il lui arrivoit de pécher
par la langue , elle fe la mordoit rudement.
Elle châtioit de même les autres parties de fon
corps , lorfqu'elles lui avoient fervi d'inftru-
ment pour offenfer Dieu.
Une vie auffi auftere fit beaucoup d'im-
preffion. fur les Dames Romaines. Il y en eut

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Sainte Françoise, Veuve. 637
plufieurs , qui , frappées de l'exemple de Fran-
m+mm ^ m*
çoife , renoncèrent aux pompes &
aux vani- uà&& 9*
tés du fiecle , & s'affujettirent , comme elle ,
à des exercices réglés de dévotion , fous la
conduite des Bénédiâins de la Congrégation
du Mont Oliveto. Cétoit une efpece de Çon*
frairie , oîi Ton fe devouoit fpecialement au
fervice de Dieu , fans quitter le monde , fans
faire de vœux , &
fans porter d'habit particu-
lier.
Dieu , pour purifier vertu de fa fervante
la
réprouva par durant les
diverfes affligions
troubles qui fuivirent finvafion de Rome par Sa patlra*
Ladiflas , Roi de Naples, &
pendant le grand «e daM lcs
Schifme qui déchira l'Eglife fous le Pontificat éprcuvcs-
de Jean XXIII. Il permit en 141 3 , que fon
mari fut banni de la Ville avec fon beau-frere
Paulucci, après avoir été dépouillé de tous
fes biens , &
s'être vu enlever fon fils ainé
,
aue l'on gardoit en otage. Françoife ne per-
dit rien de la tranquillité de fon ame au mi-
lieu de toutes ces calamités domeftiques. Elle
difoit avec le faim homme Job : » D
'uu m'a été
» ce qu'il nïavoit dormi. Je me réjouis de tou-
» tes ces pertes , parce qu'elles font une fuite de
» la volonté du Ciel. Quelque chofe que Dieu
» m'envoye , je louerai & bénirai toujours fon
» faint nom.
Son mari ayant été rétabli dans fon premier
état après l'extinâion du Schifme la fin des &
troubles , elle continua fon ancien genre de
vie avec une nouvelle ferveur. Elle avançoit
tous les jours dans les voies de la perfeûion
& recevoit de Dieu des grâces fignalées. Son
mari fut fi touché de fon éminente vertu ,
qu'il lui accorda une pleine liberté de fuivre fa
j

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,

6}% Sainte Françoise , Vevvê.


dévotion , &
même à vivre avec
qu'il confentit
elle dans une parfaite continence. Il lui per-
Mars £ 4

mit encore en 141c , de fonder un Monalrere


pour les vierges &
les femmes qui voudraient
renoncer au monde. La Sainte fe mit fous la Rè-
gle de S. Benoit , à laquelle elle ajouta quelques
Conftitutions particulières. Elle en confia la
conduite aux Religieufes de la Congrégation des
Olivétains. Ce Monaftere s'étant enluite trou-
vé trop petit t pour loger toutes les perfonnes
tT1 c qui venoient y chercher un azile contre la
Elle fonde »
,

» v . ti « i« /- 1 1 1

l'Ordre <ies corruption du iiecle , elle 1 aggrandit connue-


Obiates. rablement en 1433. Ce n'effqu'à cette der-
nière année qu'on rapportç la fondation du
nouvel Ordre, qui fut apprQUvé en 1437 par
le Pape Eugène IV. Les Reiigiçufes qui le com-
pofent font appçlléçs Oblatts , parce qu'en fe
confacrant à Dieu , elles fe fervent du mot
d'otlation , &
non de celui de proftffion
( a ). On les appelle auffi Collatlncs , peut-
être à caufe du quartier de Rome où elles
habitent.
Françoife ne put fe réunir à fes chères Fil-
Mais lorfque
les aufli-tôt qu'elle l'auroit déliré.

Elle entr-
' a mOTt ^on ^P*** > e " e
' U * *Ut ° r"
chez les Oh- drc à profterner à la
afïaires , & alla fe
htes. porte du Couvent , nu-pieds la corde au &
cou , demandant comme une grâce, <fêtre ad-
mife au nombre des Sœurs. Elle prit l'habit
& fit fon obianon le jour de Saint Benoit de

Tan 1437. Loin de fe prévaloir de fa qualité


de Fondatrice , elle fe regardoit comme la
dernière de la maifbn , travailloit à fe ren- &
( a ) Au lieu de dire , | ttor , elles difent ofiero.
comme les autres , prof- \

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Sainte Françoise 3 Veuve. 639
dre auflt méprifable devant le monde qu'elle
,
Tétoit à fes propres yeux. L'efprit d'humilité
& de pauvreté ne fouffrit en elle aucune at-
teinte, lorfqu'on Peut élue Supérieure de
toute la Congrégation. Elle n'avoit eu garde
de rechercher cette place ; &
ce ne fut que
malgré elle qu'elle s'y vit élevée.
Dieu récompenfa ton humilité par des vi-
fions , &
par le don de Prophétie. On lit
dans fa Vie , &
dans le Procès de fa Ca-
nonifation , qu'elle converfoit familière-
ment avec lbn Ange Gardien. Son cœur étoit
extrêmement touché lorfqu'elle méditoit fur
la Paflîon du Sauveur, &
elle étoit tellement
abimée en Dieu durant le Saint Sacrifice de
la Mefle
, qu'elle paroiflbit immobile , fur-
tout après la Communion. Elle avoit une
tendre dévotion à Saint Jean FÉvangélifte
;
mais elle en avoit encore plus à la Sainte
Vierge , qu'elle avoit prife pour Patrone de
fon Ordre.
Ayant été obligée de fortir de fon Mo-
naftere
, pour aller voir fon fils Jean-Baptifte
qui étoit dangereufement malade elle fut
,
elle-même attaauée de la maladie dont elle
mourut. Elle prédit fa dernière heure reçut
,
les Sacrements de FEglile
, expira le
Mars 1440, à la cinquante-fixieme année de 9 U
fon âge. Dieu attefta fa feinteté par
des mi-
racles ; de forte qu'elle fut honorée
d'un culte
public , immédiatement après fa mort
, quoi-
qu'elle n'ait été canonifée qu'en
1608. On
voit fon corps à Rome , dans une
Châffe ma-
gnifique , & l'on y célèbre fa fête avec beau-
coup de folennité.
lies Religieufes qui reconnoiffent notre Sain-
,

64Û Sainte Françoise , Vèxxvè.


te pour Fondatrice r ne font point de vœux ;

elles promettent Amplement d'obéir à la Mut-


Prcfidcntc. Elles ont des Penfions , héritent de
leurs parents , &
peuvent fortir avec la per»
million de leur Supérieure. U y a dans le Cou*
vefit qu'elles ont à Rome , plufieurs Dames
de la première qualité.

L'État Religieux fournit fans doute de grands


moyens de lalut par la fage difhibution des
divers exercices de piété oui partagent toute
la journée. L'ame n'y eft occupée que de
Dieu , & ne cherche qu'à lui plaire. Tous
les délirs , toutes les penfées , toutes les de*-

marches , y font ennoblies , fanélifiées par la

profeffion folennelle que l'on a faite de fe

confacrer à Dieu fans réferve. Toutes les ac-


tions d'un vrai Religieux , celles même qui
paroiffent les plus indifférentes , participent
félon Saint Thomas , au mérite de fa première
confécration , &
la renouvellent. Ces avan*
tages ne font pourtant pas tellement propres
aux Cloîtres , que l'on ne puifTe en jouir
fans fortir du monde. Il fuffit pour cela de
remplir fidèlement les devoirs de fon état
en vue de Dieu , & de lui rapporter fes pen-
fées , fes paroles , fes aûions tk tous les mou-
vements de fon coeur. Ce fut ainfi que vécut
pendant quarante années de mariage la Sainte
dont nous venons de donner la Vie. Elle fut fi
tien allier les maximes de la Religion avec les
devoirs d'Époufe 6c de Mere de famille
?
&
conferver la ferveur au milieu des occupations
attachées à ion état , qu'elle converioit tou-
jours avec le Ciel , où. la vivacité de fon amour
Tentraînoit continuellement.
SAINT

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S. Grégoire , E. de Nvsse. 64T

MARS 9.
SAINT GRÉGOIRE,
ÉVÊ QUE DE NYSSE.
Tiré de la Vit ,
compojee par Her-
du Saint
mant ,
Ouvrages ,
d'après fes &
ceux de Saint
Grégoire de Na[ian{t , ainji que d'après Us His-
toires de Socrau &
de Thiodoret. Voye[ Tille-
mont , T. j). p. SGi ; &
C$illier 9 T. 8. p. 200+

Vers PAn 400.-

G RÉ GO
Grand ,
ire,
fut élevé
'frère de
avec foin dans
Saint Bafile le
la con-
noiflance des Lettres facrées & profanes. H
refta dans le monde , &
s*y unit par les
liens du mariage avec Theofébie , dont
les vertus ont été louées par Saint Grégoire
de Nazianze. Quelque temps après , il renonça
au monde , &
fe confacra au fervice de PÉ-
glife en qualité de Leâeur. Mais la pafllon
qu'il avoit pour l'éloquence , lui fit bientôt
quitter les fondions de fon Ordre 9 pour en-
(eigner la Rhétorique à de jeunes gens. Un
pareil changement excita des murmures de
toutes parts ; on le regardoit comme un dét-
ordre aulli honteux à l'Etat Eccléfiaftique, que
funefteà celui qui s'en étoit rendu coupable.
Saint Grégoire de Nazianze en écrivit à
notre Saint dans les termes les plus forts, Se
lui repréfenta fi vivement les fuites de la
faute qu'il avoit commife , qu'il le ramena à
fa première vocation,
s*

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,

64t S. Grégoihe % E. de Nrsst.


Saint Baille ayant été élevé en 370 , far le
Siège de Céfarée , Métropole de la Cappadoce
appella fon frère auprès de lui , ann qu'il
pût être aidé dans l'exercice de les fonc-
tions paftorales. Grégoire fat à fon tour jugé
digne de PÉpifcopat , &
on le chargea en
37Z du gouvernement de rÉeiife de Nyfle en
Cappadoce (*)• 'Mais il fallut ufer de vio-
lence pour le Élire confentir à fon Ordina-
tion ( b ). Son attachemént à la Foi de Nicée
lui fufcita de nides perfécutions de la part
des Ariens. Ces Hérétiques le calomnièrent
auprès de Démofthenç Vicaire de Pont, qui
envoya des Soldats pour l'arrêter. Le Saint
fe laiffa prendre fans aucune réfatance. Mais
comme- les Soldats ne vouloient lui accorder
aucun foulagement ? malgré le mauvais état
de fa (an té , &
la rigueur de la faifon, il s'é-
chappa de leurs mains , &
fe fit tranfporter
dans Un lieu retiré. Saint Bafile , qui crai-
gnoit que la faite de fon frère n'infpirat à Dé-
mofthene quelque réfolution violente , lui écri-

(4) La Ville de Nyfle ellegarda la continence après


droit fur le» frontières de la le Sacre de fon mari. Saint
Petite-Arménie, Grégoire de Nazianxe dit
( b ) Cave a fauflement en parlant d'elle , qu'on la
avancé que notre Saint avoir vit marcher fur les traces de
continué de cohabiter avec fes beaux-freres qui étoient
fa femme »
après qu'il eut dans le Sacerdoce. U lui
été fait Évêque. Ceci étoit donne auffi le titrede per-
contraire à ce qui fe prati- ibnne facrit , probablement à
quoic dans toutes les Églifes caufe qu'elle avott été raife
Orientales comme nous
, au rang des DiaconefTes ,
l'apprenons de S. Jérôme. lordque fon mari eut été éle-
Quant à Théofébie , femme vé à l'Épifcopat.
de Saint Grégoire de Nyfle , Voyez l'éloge de Théofé-
il paroit qu'elle vécut juf- bie , par Saint Grégoire de
quet vers l'an 380 mais Naiianxe , £>. 9/. p. S4C.
-,

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Sk Grégoirè, E. dé NrssÊ. 64$
vit une lettre très-refpeÛueufe , au nom de

tous les Evêques de Cappadoce f pour l'adou* j^j^iu


cir, & pour diiiïper les préventions qu'on lut
avoit données. Il le fupplioit auffi de faire exa-
miner l'affaire dont il s'agiffoit , dans la Pro-
vince , plutôt que dans des pays éloignés. Dé-
mofthene affembla à Nyffe en 376, un Con-
cile , uniquement compofé de ceux qui
tutoient du parti des Ariens* On ne voit pour-
tant pas qu'il s'y (bit rien paffé de confidéra-
ble à l'égard de notre Saint , dont le Siège
étoit alors rempli par un miférable Intrus fans
Foi , fâns mœurs , &
fàfts capacité. Grégoire

défolé de tant de troubles , abandonna le pays*


La perfécution qu'il fouffiroit de la part des
Ariens , lui caufoit bien moins de douleur ,
que les progrès rapides cjue THérefie feifoit
tous les jourë. Il en écrivit à Saint Grégoire
de Nazianze , qui lui manda de mettre Ùl
confiance en Dieu , &
cTefpérer que Terreur
ne triompherait pas de la vérité. C'était uné
forte de pfédi&on de ce qui arriva peu de
temps après.
En effet ,
l'Empereur Valens , grand pro-
teâeur de l'Arianifme, étant mort en 378 f
les affaires de TEglife changèrent tout à coup
de face. Gratien , devenu feul maître de PErtH
pire , rétablit Grégoire fur fon Siège. Mais
la joie qu'eut notre Saint de fon retour à Nyffe 9
fut troublée au commencement de Tannée fui-
vante , par la mort de Saint Bafile fon frère 9
po\\r lequel il avoit autant de vénération que
de tendrefle. Il alla à Céfarée , afin d'aflmer
à fes funérailles , & de lui rendre les devoirs
tpie la nature & la Religion preferivent égi
lement. Il fut enfuite choifi par les Evêques
S si;

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644 S. Grégoire , E. de Ntsse.
Orthodoxes d'Orient , pour travailler à la ré-
formation des abus qui s'étoient introduits
dans les Eglifes de l'Arabie &
de la Paleftine.
Mais il n'exécuta que l'année fuivante la com-
mifïion dont on l'avoit chargé.
Il profita de cet intervalle pour aller rendre

vifite à Sainte Macrine fa foeur , qu'il n'avoit


point vue depuis près de huit ans. Elle gou-
vernoit un Monaftere de. Vierges dans la Pro-
vince de Pont. Il la trouva dans un état d'in-
firmité , qui lui annonça qu'elle ne tarderait
pas à fortir de ce monde. Il eut quelques en-
tretiens avec elle fur des matières de piété.
Mais le mal de fa fœur augmentant toujours , il
vit bien qu'il n'étoit venu que pour lui rendre
les derniers devoirs. Elle mourut effectivement
dans les bras de fon frère , &
fut enterrée dans
l'Eglife des quarante Martyrs , qui étoit éloi-

fnee du Monaftere de fept à huit ftades. Notre


aint fit lui-même la cérémonie de fes funé-
railles.
Ce fut au Printemps de l'année 380 , que
Saint Grégoire de NyfTe exécuta la commifhon
cu'il avoit reçue par- rapport aux Eglifes de
de l'Arabie & de la Paleftine. L'Empereur
Théodofe lui facilita le voyage , en lui four-
niffant gratuitement un Chariot public. Le
Saint & ceux qui Faccompagnoient , chan-
taient des Pfeaumes le long du chemin , &
pbfervoient les Jeûnes de l'Eglife. On ne fait
pas au jufte quels abus Saint Grégoire réfor-
ma dans l'Arabie , ni ce qu'il y fit. Quant à la
Paleftine, il y alla autant par dévotion que
par néceffité. Al vifita tous les lieux confacrés
par les Myfteres. de la Rédemption. Les dé-
sordres quil y vit , le fçandaliferent beaucoup ;

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S. Grégoire 3 E. de Nvsse. 645
& fa douleur fut d'autant plus vive , qu'il ne
put y remédier entièrement pendant ion fe-
ai X rs 94
jour dans la Palefline.
Saint Grégoire affilia au Concile tenu 2
Conftantinople en 3 8 1 . Il fut du nombre de
ceux que Ton regai-doit en Orient comme le
centre de la Communion Catholique ; de for-
te qu'il failoit communiquer avec lui , pour
être cenfé appartenir à la véritable Eglile. Il
afliffct encore a deux autres Conciles de Con£

tantinople , dans les années 381 394. Dans &


le dernier, il fut placé parmi les Métropoli-
tains. C'étoit une diftinâion que l'on accordçit à
fa perfonne &
à fon mérite. Il mourut Vers
l'an 400. On croit que ce fut le 10 Janvier ,
jour auquel les Grecs ont toujours célébré fa
fête : pour les Latins , ils l'honorent le 9
Mars.
Les Anciens ont comblé S. Grégoire de
Nyffe des plus beaux éloges. Ils ont fur-tout
relevé fafageffe , la foi, fon innocence , fa mo-
dération &
fa force dans Padverfité. Le feptie- 4

me Concile Général étoit pénétré pour lui de


la plus profonde vénération. Il lui donna le
titre de Pere des Pères , &
produifit fes Écrits
pour confirmer l'ancienne Doftrine de FÉr
glife , &
pour condamner par fon fuffrage les
impiétés de Neftorius.

Notice des Ouvrages de Saint Grégoire


JeNyffc.
i°. VExadminm , ou Livre fax l'ouvrage des fut jourt;
Ccft un (uppléraent aux Homélies que Saint Bafile avoit
laites fur le même Tu] et. Ce dernier a voie omis toutes
les que (lions qui étoient au-deûus de la portée du peuple»
Ssiij

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6a6 S. Grégoire, E. de NrssE.
i— ^p— Saint Grégoire entreprit de les expliquer à prière de U
pluiieurs peifonncs recommandables par leur fcience 6c
JVJ\ftS o, leur vertu , &
il le fit avec une exactitude , digne d'un
frère du Grand Bafile. U montre dans cet Ouvrage qu'il
a/voit une parfaite contvouTance de, la Philosophie ancienne.
1°- Le Traité de U formation de Thomme f peur être
regarde comme une continuation de TOuvrage précédent t
quoiqu'il ait été compofé le premier , ceft-a-dire , vers
Tan 379- H très-curieux oc plein d'érudition. On j
trouve de fort belles chofes fur l'excellence le la dignité
de l'homme , fur fa reflemb lance avec Dieu % fur U fpi»
fitualité de fon ame , fur la réfurreâion des corps &c. ,

3°, Le Livre de la vie de Moyfc ou de la vie parfaite y t

cft adreiTé à un nommé Céfaire , qui avoit prié le Saint


de apprendre en quoi confiftoit la vie parfaite , afin
lui
qu'il tâchât d'y parvenir. Saint Grégoire lui traça un
modèle accompli de toutes les vertu* datte la perfonne de
Moyfe.
4°. Les deux Traités fur Vinfcription des Pfeaumcs , &
X Homélie fur U Pfemme fixions Saint Grégoire donne dans
ces deux Traités une idée générale des Pfeaumes , dont
il fait voir la merveilleufe utilité pour la fanclification
des Fidèles, Il dit que de fon temps les Chrétiens de tout
âge , de tout fexe , de toute condition , avoient fans cène
dans la bouche ces divins Cantiques.
p
j . Les huit Homélies fur les trois premiers Chapitres
de TEccltfiajk. Elles renferment des Inftructions admira*
bits fur les vertus &
les .vices , 6c fur les effets qui ex
. font les fuites.
6°, Les if Homélies fur le Cantique des Cantiques , qui furent
toutes prêchées , font adreffées à une vertueufe Dame de
Conftantinople , nommée Olympiade , qui étant devenue
veuve environ après ao mois de mariage , diftribua fes
biens aux Pauvres &
aux Églifes. Le faim Docteur y dit
que le Livre du Cantique des Cantiques , ne doit être lu
apte par ceux qui ont le cœur pur &
dégagé de l'amour des
Créatures.
Q
7 , Les cinq Homélies fur VOraifon Dominicale , qui fu-
rem auiu prêchées t contiennent des Inirru/rions fort uti-
les Air la néceflité & l'efficacité de la prière.
. S Les huit Homélies fur Us mût Béatitudes % font du mê-
'

me ftile que les précédentes. On y trouvera des Infime-


lions folides fur l'humilité , la douceur , la pauvreté d'ef-
prit « &c.
9", LtS Traites fur la fiumijfioA dm fil* & fur U Pytho-
nijfi , fie le difeours fur l* Ordination de Saint Grégoire» H
n/eft pas certain que le premier Ouvrage foit de notre
«une DoOeur, L'erreur des QrigciuAcs fur U ccûauon des

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S. Grégoire , E. de Nysse 647
peines des Damnés , paroît y être enfeignée. Ceux qui 555=
donnent ce Traité i Saint Grégoire , difent que Terreur MARS 9.
qu'on y trouve , y a été ajoutée après coup par quelque
Ôrigénifte. Le Traité far U
Pythonijfe eft en forme de
lettre , &
adreffée à un Évêque nommé Théodofe. Saint
Grégoire y agite la queftion de révocation de Verne de
Samuel , &
penfe que ce rut le Démon , qui , fous la fi-
gure de Samuel , parla à Saûl. Le difcours fur POrdina-
tion , qu'on dcvroit plutôt appeller le difcours far la Dé"
die ace , fut prononcé en 394 , i Poccanon de la Dédicace
d'une magnifique Églife , que Rufin , Préfet du Prétoire ,
avoit tait bâtir au Bourg du Chêne , près de Calcédoine.
xo°. VAntmétique , ou Traité contre Apollinaire. D
n'y en avoit qu'un fragment dans les Éditions des Œuvres
de Saine Grégoire ; mais Laurent Zacagnius , Bibliothé-
caire du Vatican , le donna entier en 1698 , d'après un
JV1S de plus de 700 ans. Léonce de Byfance , Euthymtus ,
& Saint Jean Damafcene , en citent pluiieurs endroits fous
le nom de Saint Grégoire i fit le VI Concile Général
le lui attribue. On ne peut donc douter que ce Pere
n'en foit l'Auteur. Il fat compofé vers l'an 377* Le faint
Do&eur y prouve contre Apollinaire , que la Divinité
eft impaflible , que Jefas-Chrift a une ame , qu*il réunit
en fa Perfonne la nature divine 8c la nature humaine , ^cc.
ti°. Le Difcours far P amour de la pauvreté , qui eft une
exhortation pathétique à l'aumône : Le Livre contre U defa
tin , où il eft prouvé que tout arrive par l'ordre de la
Providence. II fat compofé vers l'an 381 f &
eft écrit en
forme de Dialogue. Le Traité des Notions communes , qui
eft une exposition philofophique des termes dont les An-
ciens s'étoient fervis pour expliquer le myftere de la Trinité.
1 1°- VÉpitre canonique à Létoius , Êveque de MéUtine
,
Métropole d'Arménie. Elle fait partie des Canons péni-
tentiaux , publiés par Bévéridge. Saint Grégoire y pref-
erit des pénitences pour les péchés les plus énormes. D.
Ceillier a montré T. S. p. 265 6c 166 , le peu de Solidité
d'js raifons qui ont déterminé quelques Proteftant* à rayer
cette Épitre du Catalogue des Ouvrages de Saint Gré-
goire de Nyffe.
1 3°. Difcours contre ceux qui différent leur Baptême» Les
Pécheurs y font exhortés à la pénitence , 6c les#Cathécu-
menes i recevoir le Baptême
, par des raifons très-fortes
qui de l'incertitude de l'heure de
(e tirent principalement
la mort , 6c des divers accidents qui peuvent a chaque
inftant nous précipiter dans le tombeau.
0

14 Les Difcours contre la fornication & Vufurt , fur la
.

pititence & P aumône , offrent une très-belle expofitioa de


1* Morale Chrétienne fur ces divers points. Le Difcours

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648 S. Grégoire , E. de Ntsseï
BggBg "Tt rouir* Vufurt , mérite une attention particulière par la mi-
nière forte &
intéreflante dont les chofes y font traitées.
MARS 9* I J°. Difcours fur la Pentecôte. Témoignage contre la* Juifs.

On n'avoir, qu'en latin le premier Ouvrage > mais Zacag-


nius Ta public en grec d'après trois MSS de la Bibliothè-
que du Vatican. Saint Grégoire Ce propofe dans le (econd
Ouvrage, de prouver le Myftere de la Trinité contre les
Juifs , par les propres paroles de l' Écriture. On ne l'avoit
non plus qu'en latin , avant que Zacagnius en eût publié le
Texte grec. Ce Savant n'ayant pas trouvé "dans les MSS
les trois derniers Chapitres des anciennes Éditions lati-
nes , en a conclu avec raifon qu'ils étoient fuppofés; &.
au lieu de ces trois Chapitres , il en a donné quatre
autres qui font une fuite &
rendent l'Ouvrage complet.
16°, Les 12 Livret coure Eunomius. Saint Grégoire y
venge la mémoire de Saint Bafile fon frère, attaquée par
Eunomius , 8c y prouve contre cet Héréfiarque la Divi-
nité &
la Confubftantialité du Verbe. U y dit qu'indépen-
damment de l'Écriture qu'il employé avec une fagacité
merveilleufe , la Tradition feule fiiffiroit pour confondre
les Hérétiques.
17°. Le Traité à Ablarius % &
le Traité fur la Foi» Oeil
une défenfe de divers points de la Doctrine Catholique
contre les Ariens.
18°. La Grand* Catéchefi , divifee en 40 Chapitres, eft
Cttéé par Théodoret , Léonce de Byfance , Euthyxnius v
Saint Germain de Conftantinople. Les ao dernières lignes
y ont été ajoutées après coup. Dans cet Ouvrage , Saint
Grégoire de Nyfte , apprend aux Catéchiftes comment ils
doivent prouver par le rationnement les itères de la Foi*My
19°. Le Uvrt de la Virginité , eft divifé en 24 Chapt.
très , non compris le Prologue. Le faint D odeur y montre
l'excellence de la virginité , & les avantages qu'elle a fur
rétat du mariage.
20°. Les dis Syllogijhus contre Us Manichéens , & le Livre,
el* Pâme & de la réjurrc&ion. Il eft prouvé dans le premier
Ouvrage que le mal n'eft point une nature incorruptible
& incréée « non plus que le Diable qui en eft le pere
& l'auteur. Le fécond eft un dialogue , ou récit d'un
entretien que Saint Grégoire eut avec fa foeur la veille
de fa mot* , fur celle de Saint Baûle- U tut compofé
vers l'an 580.
at°. La Lettre à ThéophiU ( Patriarche d'Alexandrie)
contre les Apollinarifles. Elle eft citée dans le V. Concile
Général , & dans la Panoplie d' Eu thym i us.
22°. Trois Traités d* la perfection chrétienne^ Saint Gré-
goire examine dans le premier à quoi oblige le nom &
M profefliott de Chrétien. U trace dans le fécond des re-

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S. Grégoire, E. de Nvsêe. 649
gles pour arriver à la perfeâion. Dans le troifieme , in- ^
titulé , Le but du Chrétien , il développe & met dans
tout leur jour les maximes les plus (aintes de l'Évangile. MARS 9.
0
25 . Le
Difcours court ceux qui ne veulent point être re-
fris , ôt le Traité des enfants qui meurent prématurément. Plu*
fieurs queftions intéreûantes font traitées dans le fécond
Ouvrage.
24°. Le Difcours fur la Nativité de Jefus-Chrifl , les &
deux Panégyrique* de Saint t tienne. D. Ceillier prouve T.
P* 34Ï qu'on ne peut conteftef le Difcours à Saint
tl

Grégoire. eft parlé , non feulement de la Naiflance de


Il y
Jefus-Chrift , mais encore du meurtre des Innocents. On
ne trouvoit que le premier Panégyrique dans les anciennes
Éditions. On eft redevable à Zacagnius de la pubticatioa
du fécond.
0
25 . Difcours fur le Baptême , la Réfurre&on & VAfctn-
fion de Jefus-Chrift, Le premier , qui eft intitulé dans quel-
ques Éditions : Sur le jour des Lumières , fut prononcé la
Fête de l'Epiphanie , jour auquel on baptifoit les Caté-
chumènes dans les Églifes de Cappadoce. Des cinq Di£
cours fur la Réfuireûion , il n'y a que le premier , le
troifieme 6t le quatrième , qui paroiflent être de Saint
Grégoire.
26°. Le Difcours fur la Divinité du Fils & du Saint
Efprit. On y trouve la réfutation des erreurs des Ariens
& des Eunoméens.
0
27 . Les Panégyriques de Saint B afile & des 40 Myartyrs j
les Oraifons funèbres de Pulchéric & de Placcille % les Vies de
Saint Grégoire Thaumaturge % de Saint Théodore , de Saint
Mélece , de Saint Ephrem , & de Sainte Macrine.
18 0 . Le Difcours fur la mort , a été fort maltraité par les
Hérétiques. Le but de Saint Grégoire étoit de fournir des
motifs de confolation aux Chrétiens qui s anngeoient ex*
ccfllvement de la mort de leurs proches.
29°. Plufuurs Lettres, Dans celle qui eft intitulée , fur
le pélérinage de Jérufalem , le Saint s'élève contre pluiieurs
abus que commettoient quelques Chrétiens , fous prétex-
te de vifiter les Lieux Saints » mais il ne condamne
point les pèlerinages en eux-mêmes t comme l'ont prétendu
pluiieurs Proteftants. Outre les Lettres dont nous venons
de parler , en a donné quatorze autres d'a-
Zacagnius
près un MS du Vatican. Jean-Baptifte Caraccioli f Pro-
feffeur de Philofophie au Collège de Pife , en fit auflî
imprimer fept qui n'avoient jamais été publiées , à Flo-
rence , 1731 » in-folio. Il les avoit tirées d'un MS de la
Bibliothèque du Grand Duc de Tofcane.
Saint Grégoire de Nyffc peut être comparé aux olut
célèbres Orateurs de l'antiquité , pour la pureté , faifan-

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tfyo Saint Pacien , E.
ce , La douceur , U force , la fécondité & la magnificence de
(on ftile. Mais il fe iurpaffc en quelque forte lui-même dans
MARS 9. fes Ouvrages polémiques. U y montre une pénétration d'ef-
prit finguliere , & une fagacité merveilleufe à démaiquer &
a confondre les fophifmes de Terreur. C'eft celui de tous les
Pères qui a le mieux refuté Eunomtus. On a feulement
reproché à Saint Grégoire d'avoir trop donné à l'allégorie
& d'avoir quelquefois expliqué dans un fens figuré des tex-
tes de l'Écriture , qu'il auroit été plus naturel de prendre
à 1a lettre»
La meilleure Édition des Œuvres de Saint Grégoire de
Nyffe , eft celle que Fronton-le-Duc donna en grec latin &
à Paris , en 161 j , a. Vol. in fol. Mais il faut y joindre
le troifieme Vol. auûi in fol* que le même Fronton-le-Duc
donna en 161 8 par forme d'Appendice. On préfère cette
Édition avec le Supplément à celle qui parut i Paris , en
1638 , trois Vol. in fol.

LE MÊME JOUR.
SAINT PACIEN,
ÉVÊ QUE DE BARCELONNE.
Ce S aint , Pun des plus grands hommes
que l'Efpagne donnés à PEgiife , naquit
ait
dans quatrième fiecle , de parents très-
le
diftingués par leur naiffance. Il fut d'abord
engagé dans le mariage, eut un fils , nom- &
me Dexter , qui parvint aux premières digni-
tés de l'Empire , &
qui après avoir été grand
Chambellan fous Théodofe , fut Préfet du

Prétoire fous Honorius. U fe' rendit fur-tout


recommandable par l'innocence la faintete &
de Ayant enfuite renoncé au monde ,
fa vie.
il s'attacha au fervice de TEglife , fut fait &
Evêque de Barcelonne en 373. S'il mérita
d'être compté parmi les dignes Pafteurs, il

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Saint Pacten 9 E. 651
mérita auffi par fon éloquence & par la beau- œhhh
,

té de fon fKle, d'occuper une place diftinguée mars


parmi les Savants, Il mourut fort âgé , vers
la findu IV fiecle. Nous avons encore quel-
ques Ouvrages de ce Saint, qui eft mis au
nombre des Pères de TEglife ( a ). Son fils
Dexter , qui lui furvécut , étoit ami de S. Jé-
rôme , qui lui dédia fon Livre des Hommes Ilr
Voyez S. Jérôme de Viris IUuji. c*
lujbres(b).
ioG,p. t$S; & D. Ceillier^T. 6. p. 71 j.

( a ) 1°. Les trois Lettres à ticulière.


Sympronun , Dooatifte , qui 2°. V Exhortation à U péni-
demeuroit dans le voifinage tence. C'eft une efpece de Let-
oc oarccionne. àaint racien tre Paftorale où Sainr Pacien
commence U
première par traite i°. de la différence des
une énumération des Héré- péchés : «o. des pécheurs
fies qui s'étoient élevées dans qu'une mauvaife honte empê-
l'Églife depuis Simon le Ma- che d'appliquer à leurs plaies
gicien ,
jufqu'aux Nova tiens. le remède d'une Confeffion
Il dit enfuite que le nom de falutaire : 3°. de ceux qui
Catholique que porte l'Églife après avoir eoafefle leurs pé-
lui vient de Dieu 4
& que chés , ne les expient point
c'eft par-là mi'clle a toujours par la pénitence : 4°. des pei-
été <Uftinguçe des Seûes des nes réfervées aux pécheurs
Hérétiques, n Chrétien, ajou- impénitents , 8c des récouv
* te-t-il t eft mon nom , Ca- & penfes promifes à ceux qui fis
ntholique monfurnom; l'un purifient par une ûncere eoa-
n me diftingue , 6c l'autre me verfion.
>* défigne. »• Après avoir ex- 3°. Traité du Baptême aux
pliqué la lignification du nom Fidèles & aux Catéchumènes.
de Catholique , il réfute les er- Le faint Doûeur s'y propo-
reurs des Novatiens fur la pé- se trois chofes, i°. d'expli-
nitence. Le feint Docteur quer de quelle manière nous
employé û
féconde lettre à naiffons v i°. de montrer com-
détruire quelques objections ment nous fommes renouf
qui lui avoient été Élites par vellés par le Baptême : 3°.
Sympronien. Il revient dans de développer les fruits de
la troiûeme à la matière de la Foi que l'on reçoit de Dieu.
la pénitence qu'il traite à Cet Ouvrage eft moins châ-
fonds. Le Novatianifme y eft tié fie moins élevé , que le
folidement réfuté. Cette let- précedenr.
tre mérite une attention par- Nous n'avons plus Je. Trai

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6ji Sainte Catherine , V.
F

SAINTE CATHERINE
VIERGE, -m "

et Abbesse des Clarisse) -

de Bologne.

Sainte Catherine naquit à Bolo*


gne en 141 3 , d'une des premières familles du
pays. L'amour de la vertu parut avoir pré-
venu en elle Pufage de la raifon. A l'âge de
douze ans , on la mit , en qualité de Dame
d'honneur , auprès de la Princefle Marguerite f
fillede Nicolas dïft , Marquis de Ferrare. Il
y avoit deux ans qu'elle occupoit cette place ,

té que Saint Pacien «voit belles , le tour agréable. Le


fait contre le jeu du petit cerf. faint Docteur eft plein d'onc-
Il dit lui-même , au commen- tion quand il exhorte à fa ver-
cement de fon exhortation à tu, plein de feu & de force
la pénitence , que plus il avoit quand il combat le vice.
montré de zele à combattre Il y a eu plufieurs Édi-
le jeu du petit cerf , plus on tions des Œuvres de Saint
s'étoit opiniâtre à le conti- Pacien. On les trouve auffi

nuer 6t à rapprendre. Il pa- dans Bibliothèque des Pè-


la
roi t que ce jeu étoit mêlé res , T, 4. &
dans le Tome
d'infamie. Ceci faifoit dou- 2 des Conciles d'Efpagne que
ter à Saint Pacien s'il ne vau- le Cardinal d'Aguirre publia
drait pas mieux ne point par- à Rome , avec des notes , en
ler de certains vices » que 1694, 4. Vol. in folio,
d'en parler , même pour les ( b ) On a publié en Ef-
combattre. pagne une Chronique fous le
On fent beauté nom de Flavius- ester , qu'on
mieux la D
des Écrits de Saint Pacien en a prétendu fauneraent être
les niant , qu'on ne peut l'ex- fils de Saint Pacien. Cette
primer le ftile en eft poli & chronique eft une pièce mi-
-,

châtié , les raiionnements férable.


juftes &
folides , les penfees

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Sainte Catherine > V. 653
lorfqu'on mafia Marguerite, Elle profita de
cette circonftance pour recouvrer fa liberté.
MAR5 9#
Le premier ufege qu'elle en
de fe re-fît , fut
tirer à Ferrare, dans une fociété de femmes
du Tiers-Ordre de Saint François. Cette fo-
ciété ayant enfuite été érigée en un Monaftere
de Rehgieufes , fous le nom du Corps de Chrijt,
& fous la Règle de Sainte Claire , Cathenne
s'y engagea par la profeffion des Vœux folen-
nels. Elle y refta jufqu'à la fondation du Cou-
vent des Clarifies de Bologne , dont elle fut
la première Prieure.
Elle avoït un zele extraordinaire pour la
converfion des pécheurs , qu'elle ne ceffoit
de folliciter par fes larmes fes prières. &
Son amour pour Foraifon , fa fermeté &
au milieu des épreuves intérieures qu'elle eut
a fouffrir , firent d'elle un fpeôacle digne de»
Anges. Pénétrée des fentiments de l'humilité
la plus profonde , elle ne défiroit rien tant
que de fervir fes Sœurs , &
d'être employée
aux plus viles fondions du Monaftere. Soi)
éminente vertu fiit récompenfée dès cette vie
par le don des miracles , &
par celui de pro-
phétie (a). Elle mourut le 9 Mars 1463 , dans

(«) On publia un Livre Benoit XIV , de Canoni^.


de fes Révélations à Bologne SanHor, T. j. c. p. p. jij.
en 1511. On doit fe défier On doit encore plus fe tenir
en général de toutes les Hif- fur fes gardes , lorfque ces
toires de vifions & de révéla- vifions ou révélations , ont été
tions , qu'on ne voit pas tou- écrites , non par ceux qui les

jours avoir été examinées ont eues , mais par quelque


main étrangère. Encore faut-il
félon les règles établies pour
le difeernement des efprits. examiner ceux qui les ont
tiner fi ceu
Sans cela on courrait rifque eues patient conftammeut
d'être le jouet de quelque il- pour avoir été doués d'une
luûoa. Ceft la remarque de | humilité profonde , d une

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,,

6$ 4 Sainte Catherine, K
fut înferé dans le Martyrologe Romain par
Clément VIII, en 1591. Le Procès de fa Ca-
nonifation fe fit fous Clément XI , mais la
Bulle n'en fut expédiée qu'en 1714, fous Be-
noit XIII(i\
Le corps de Sainte Catherine , qui efl en*
core entier , fe garde à Bologne dans FEglife
des Clarifies. Il eft affis dans une efpece de ta-
bernacle vitré grillé ,& eft enveloppé &
d'une étoffe grife , mais fort précieufe, excep-
té cependant le vifage, les mains les pieds, &
qu'on voit à découvert. La chair en paroit
encore vive &
maniable. Elle eft feulement un
peu livide aux endroits les plus expofés. Henf-
chénius , Laflels ^ &c. qui avoient vu le corps
de la Sainte, nous ont laifle la defeription du
Reliquaire où il eft renfermé.
Voyez dans Bollandus , la Vie de là Sainte
écri te 50 ans après fa mort par Denys Paléotti
Obfervantin.

expérience contaminée, Jt (ufpeôéf U vérité. D'ailleurs


d'un grand discernement des il eft aise* comme on le voit,
efprits. Toutes ces conditions, de commettre de grandes feu-
dit Benoit XIV , fe trouvent tes dans ces fortes d'otrv rage*.
Sainte Catherine de Bo-
tions de Sainte Thé refcf' écri* logne compofa quelques Trai-
tes par elle-même. Quant aux tés en Latin &
en Italien* Le
de Sainte Catherine
révélations plus fameux* de tousses Ou-
de Bologne, elles n'ont point vrages, eft le Livre dsuftpt
été écrites par elle-meate , anus ftiriHttUts.
mais par des perfonnes qui ( i ) BuiUr. Rêm. T, #j. f.
rravailloient d'après des réla- $y.
fions dont on eft en droit de

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Les quarante MM. de Seb.

X. JOUR DE MARS.
LES
QUARANTE MARTYRS
DE SÉBASTE.
Tiré de CHomélie de Saint Bafile , fur leur
Jeté , Hom. 10 , T. I.p. 453 ; &
des trois Pa-
négyriques de Sains Grégoire de Nyjfc en leur
honneur , T. 2. p. 203. T. 3. p. 499 , 504 ,

Itfquels ont été fuivis par Saint Ephrem ,T. î.p.


341. Edit. Vatic. par Saint Gaudence , & par
Saint Chryfofiome. Voye^ Tillemont , T. 5. p.
S18 ; Ruinart , 3£/ ; Ceillier , T. 4. />. Çz ;
M. Jofiph AJJÎmam , in Calend. Univ. ad 1
Martii , T. 6. p. 172.

L'An 320.

c
Sébafte
ES
f
faims Martyrs fouffriient en 320 , à
Ville de la petite Arménie , fous
M*** 10,

l'Empereur Licinius. Us étoient de diffé-


rents pays f mais tous enrôlés dans le même
corps » tous jeunes , bienfaits , braves , &
diflingués par leurs fervices. On lit dans Saint
Grégoire de Nyfle &
dans Procope , qu'ils
faifoient partie de la Légion Fulminante , fi
célèbre par la pluie miraculeufe qu'elle obtint
du Ciel fous l'Empereur Marc Aurele. Cette
Lépon, la douzième de l'Empire, avoit alors

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,

6j6 Les quarante MM. de Ses.


en Arménie. Lyfias étoit Géné-
fes quartiers

mjj^ , 9.
aes Troupes ;
ral &
Agricola , Gouverneur
de la Province. Le dernier ayant fignifîé à
l'Armée un Edit de Licinius , qui ordonnoit à
tout le monde de facrifier aux Idoles , il fc
préfenta quarante Chrétiens qui confeflerent
C°n
fcffi™!
généreufement leur Foi , &
qui protefterent
que les tourments ne feroient point capables
de la leùr faire trahir. Le Juge , dans l'efpé-
rance de les gagner , eut d'abord recours aux
voies de douceur. Il leur dit que leur opiniâ-
treté les couvriroit d'un déshonneur éternel
&
qu'au contraire leur foumiflion aux volon-
tés du Prince feroit récompenfée par les plus
grands avantages. Mais voyant que les pro-
méfies étoient inutiles , U employa les mena-
ces , qui ne produifirent pas plus d'effet. Les
faints Confefleurs de Jems-Chrift lui répon-
dirent que les promefles qu'il leur faifoit n'a-
voient aucune proportion avec les biens infi-
nis dont il vouloit les priver. » Quant à vos
» menaces 9 ajouterent-ils , elles ne nous ef-
» frayent point. Vous n'avez de pouvoir que
w fur nos corps que nous avons appris à mé-
» prifer. Et pour nos ames , elles font à l'abri
» de toutes les pourfuires des hommes. » Le
Gouverneur, qui ne s'attendoit point à une
pareille réponfe de leur part, en fut vive-
ment irrité, &ordonna qu'on leur meurtrît
le corps à coups de fouet , & qu'on leur dé-
chirât les côtes avec les oncles de fer. Ils fo-
rent enfuite chargés de chaînes, & conduits
en prifon. Quelques jours après , Lyfias ar-
riva de Céfarée à Sébafte. Il mit la confiance
des Confeffeurs à de nouvelles épreuves ; mais
il eut auffi la honte de fe voir vaincu. Enfin,

le

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ZzS quaHanteMM. deSèè. 6tf
^ | " < "*8
le Gouverneur tranfporté de rage, imagina - -

un genre de fupplice lent & rigoureux, au*


quel il les condamna tous*
On en Hyvet , faifbn très* fude
étoit alors
en Arménie. Un vent de Nord qui fouffioit Ils {but ex*
avec violence , aui intoit encore de beau- gofés fur un
coup la rigueur du froid. Il y avoit auprès des «*»g»
murailles de la Ville un Etang tellement gbn
cé , que les gens de pied les chevaux &
pouvoient fans rifque paffer deflus. Le Gou-
verneur ordonna que les Saints y fuffent ex*
pofés tout-nus pendant la nuit ( a ) ; afin &
<le les tenter plus vivement par la facilité du
remède , il fit préparer un bain chaud à une
petite diftance de 1 Etang , pour réchauffer ceux
qui voudroient faerifier. Les Martyrs n'eurent
pas plutôt entendu prononcer la Sentence *
qu'ils coururent avec joie à l'Etang. Ils ôte*
rent eux-mêmes leurs habits , s'encourage* &
rent mutuellement au combat , en le difant
l'un à l'autre , qu'une mauvaife nuit leur vau-
drait une éternité de bonheur ( b ). Ils fai-
foient tous enfemble cette prière ; » beigneur

( a ) Les Acles de nos être dans la ville même. La


Saints , Ôt la plupart des raifon qui l'a déterminé à
Écrivains qui ont parlé d'eux, adopter ce fentiment , c'eft
fuppofent qu'on les fit mou- qu'il lui a paru plus confor-

rir dans l'eau-mênie. C'èft me au texte de Saint Bafile


une faute que TiHemont t
de Saint Grégoire de NylTe,
Baillet, Ruinait, Ceillier, &c. Voyez Tillemont T. j*
&c. ont corrigée d'après Saint note 111. p. 789.
Bânlc &Saint ércêoire de (*) Nous Ufons dans Saint
Nyffe* Selon Saint Éphrem, Grégoire dcNyffe , que les
les Martyrs furent expofés faints Martyrs fouflfrirent ce
au froid fur l'Étang glacé. fupphce trois jours fie trois
Mais 'fittemoht penfe qu'ils nuits ce qui leur emporta
i

y furent expofés à quelque les membres les uns après


diftauce de l'Étang , Se peut- les autres.
" t

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,

65 8 Les quarante MM. de Sàs.


» nous fournies entrés quarante au combat ;
MXqg IO » ne permettez pas qu'il y en ait moins de
» quarante de couronnés* Qu'il n'en manque
» pas un du nombre que vous n'avez point
» limité tans deflejn »• Les Gardes de leur
côté ne ceffoient de les exhorter à obéir au
Prince , afin qu'on leur accordât la permiffion
d'entrer dans le bain chaud. *

Malheureufement il y en eut un de cette fainte


troupe oui fe laifla gagner par les Païens. Il quitta
fon polte comme un déferteur , &
alla fe jeter
dans le bain chaud. Mais à peine y fut-il entré
qu'il expira, Dieu n'ayant pas permis qu'il
jouît long-temps du fruit de fon apoftafie. Ses
compagnons , fenfiblement affligés de fa chû-
te , ne tardèrent pas à en être confolés par un
événement tout-à-fait merveilleux. Il y avoit
Un des un Garde qui fe chaufibit près du Bain , qui &
Gardes (c avoit ordre d'obferver fi quelqu'un des Mar-
converat.
s fle ^jg^^ point de réfolution. Tan-
dis qu'il étoit tout occupé de ce foin , il fut
frappé d'un fpeâacle extraordinaire. Il vit des
Efprits célefies qui defcendoient du Ciel , &
qui , comme de la part de leur Roi , diftri-
buoient de magnifiques récompenfes à ces gé-

cepté , &c c'étoit celui qui trahit lâchement


fa Foi. Le Garde touche de lavifion célefte f
fe convertit , & après avoir quitté fes ha*
bits, alla fe joindre aux trente-neuf Martyrs,
en criant qu'il étoit Chrétien comme eux.
Ceci , remarque Saint Ephrem , eft bien
propre à nous faire adorer les voies incom-
prchenfibles de la miféricorde &
de la juftice
u$ font con- de Dieu fur les hommes.
g™***» Le jour étant venu , le Juge ordonna qu'on

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Ies quarante MM. de Seb. 659
les mît fur des chariots , &
qu'on les jetât =
dans le feu. Ils étoient tous morts ou mou*
y
nuits , excepté le plus jeune ( c )\, qu'on trou-
va encore plein de vie. Les Bourreaux le laif-
ferent , dans l'efpérance qu'on pourrait le
faire changer. Mais fa mere qui étoit préfen-
te , ne put fouffrir cette fkufle pitié- qu'on a-
voit pour fon fils. Elle ofa même en faire des
reproches aux Bourreaux. Cette généreufe
femme étoit une veuve de baffe extraâion %
mais enrichie de tous les tréfors de la Foi»
Elle approcha de fon fils , l'exhorta à persé-
vérer , puis l'avant pris elle-même entre fes
bras , le mit dans le chariot avec les autres
Martyrs. » Va , va , mon fils , lui dit-elle f
» achever cet heureux voyage avec tes cama- •

» rades , afin que tu ne te préfentes pas à


» Dieu le dernier ( d ) ». Elle prononça ces
paroles fans répandre une feule larme , ac- &
compagna le chariot jufqu'au bûcher avec un
vifage plein de joie.
Apres que les corps des ùints Martyrs
eurent été brûlés , on jeta leurs cendres dans
le Fleuve. U en refta pourtant une partie aux
Chrétiens , qui les enlevèrent fecretement
ou les achetèrent à prix d'argent. La Ville
de Céfarée avoit de ces précieufes Reliques
,& Saint Bafile les regardoit comme un Bou-
levard affuré contre les attaques des ennemis

( c ) Il e(l appelle Mélicon beau, ni plus touchant que


dans les Aâes des SS. Martyrs. le dtfcours 'que Saine Éphrem
{4) Voyez le Panégyrique met dans la bouch#'de la me-
des 40 Martyrs par Saint re du plus jeune de nos SS;
Éphrem , T. 2. p. 314. Êdit. Martyrs.
Vaûc, tjtf. Rien neft pli»
Tt 1

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66o Les quarante MM. de Ses:
les plus formidables (i). Le même Per«*
» 1 1 n e ajoute qu'elles avoîent la vertu de relever ceux
oui etoient tombes, de fortifier les toibleSj
oc d'augmenter la ferveur des Fidèles. Saint
Bafitç <, pere du faint Doôeur dont nous ve-
nons de parler , &
Sainte Emmélie fa mere
Saint Grégoire de Nyfle , Saint Pierre de Se*
bafte , &
Sainte Macrinc , fc procurèrent une
partie des Reliques de nos faints Martyrs ( 2).
Sainte Emmélie en mit dans l'Églife qu'elle fit
bâtir près du Village d'Anncflcs ; on les y re-
çut avec une grande folennité ; Saint Grégoire &
rapporte des miracles qui s'opérèrent en cette
occafion : » Ce dernier enterra les parents auprès
» des Reliques des faints Martyrs , afin qu'ils
» puffent un jour reffufeiter avec ceux qui
» avoient animé leur Foi. Il avoit , difoit-il
» des preuves inconteftables de leur crédit au-
» près de Dieu ».
Saint Gaudence de Brefle avoit aufïl une
grande dévotion pour ces faints Martyxs :
» Dieu , dit-il dans le difeours qu'il fit à leur
» louange , Dieu m'a favorifé d'une partie de
» leurs précieufes Reliques , &c m'a accordé
» la grâce de fonder une Églife en leur hon-
>> neur
( 3 ). Il ajoute que deux nièces de Saint
Bafile , l'une &
l'autre. chargées de conduire
des Vierges Chrétiennes , avoient bien voulu
partager avec lui un tréfor qu'elles tenoient
de leur oncle. Ceci arriva lorfque Saint
Gaudence paflk par Céfarée en allant à Jéru-

'
( 1 ) Saint Baffl. or. to.
( 3 ) Saint Gaud. Brix,
( 1Saint Grcg. Nyff. or.
) Strm* 17. d< 40 Mart.
j. de 40. Msrt. T. £. p in. t

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LÈS QUARANTE MM. ÛE SÈB. 66l
falcm. On porta auffi à Conftantinople une
partie des mêmes Reliques, on les y ho- &
noroit avec une dévotion finguliere , comme
nous rapprenons de Sozomene t 4 ) de Pro- &
cope ( 5 ). Cette dévotion , dirent les mêmes
Auteurs , fut fouvent récompenfée par des
Yifions &
par des miracles.

Saint Ephrem vivement touché de l'invinci-


ble confiance des Martyrs, faifoit les réflexions
fuivantes. » La fagefle des Philofophes , l'éld-
» quence des Orateurs , font déconcertées par
» le fpeâacle extraordinaire qu'offrent les glo-
» riçux combats des Martyrs. Les Tyrans &
» les Juges font faifis d'étonnement à la vue de
» la Foi , du courage , de la gaité de ces fainft
h Athlètes, Quelle fera notre excufe au Tribu-
nal de Jefus-Chrift , fi ayant été à l'abri des
» pçrfé.cytiQns & .de$ tortures , nous avons ce-
pendant négligé d'aimer Dieu, ÔC de travailler
t>> fanôincation de nos ames ? Quel contraf-
la
» te D'un côté le$ Martyrs inséparablement
!

» attachés à Dieu parmi les plus rudes épreu-


» ves de l'autre , la plupart des Chrétiens^
:

» qui, quoique .dans le fein d'une paix pro-


» fonde , refirent à ce même Dieu Ha cœur
'
» qui lui eft dû à tant de titres l Encore unç
» fois , que ferons-nous dans ce jour terrible
» qui fixera nos deftinées ? Et tandis que le$
». Martyrs , pleins d'une faînte confiance , mon-
» trefônt .à Jefus-Chrift Jes cicatrices die leurs
» bfeflures , qu'aurons - nous à lui montrer^
» Pourrons - nous fui préfenter une Foi vive ,
»une charité fincere , un détachement entier

<.4> i. 2. ( y) L. de ^Edifie. Jujliiiian.c.}.

Tt iij
661 SS Caius 3 Alexandre ) MM.
» des chofes terreftres des viôoires rempor-
,

MARS io. » tées ^ur nos pallionsdes ames accoutumées


,

» au fîlence &
au recueillement , des coeurs
» doux &
pacifiques ^ des biens verfes dans
» le fein des Pauvres , des prières , xles veil-
» les , des larmes ? Heureux l'homme qu'ac-
» compagneront ces bonnes oeuvres. Il paroî-
» tra avec confiance devant Jefus-Chrifl & les
» Anges. Saints Martyrs f qui avez mérité
par vos triomphes d'être intimement unis à
» Dieu dans le Ciel , daignez vous intéreffer
» en notre faveur. Nous ne Tommes que de
» tniférables pécheurs ; mais ii vous nous ac-
5» cordez le fecours de vos prières , k grâce
m de Jefus-Chrift éclairera nos ames , & em-
m brafera nos cœurs du feu fecré de l'amour
» divin ( b ).
LE MÊME J O
5* CAIUS ET S. ALEXANDRE
Martyrs
à Apamée en Phrygie.

u s ne ûvons de ces Saints Martyrs que


ce qu*Eufebe en a dit cPaprès Aftérius Urba-
niis , Auteur contemporain. Ils étoient de la
Ville d*Euménie , dans la grande Phrygie , &
Turent condamnés à mort pour la Foi à Apa-
"mée fur le Méandre. Cétoit le pays que les
Montantes a voient le plus infeôé de leurs
erreurs (a ). Lorfque ces Hérétiques fe trour-

( h ) Saint Ephrem , Nom. Vatie. an» 1746.


h SS; Martyres , T, j. Op. (a) Les Montanîftes fe
Cr*e. & Latin, p. sjr. EMt. donnoienc pour des

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SS. Caivs ^Alexandre , MM. 66y
voient arrêtés avec les Catholiques ; les der-
niers fe féparoient des premiers , en protef- ^rj.
tant qu'ils n'avoient pas la même doârine , &
mouroient fans vouloir communiquer avec
eux. Ce fut la conduite que tinrent .entr'au-
tres Saint Caïus &
Saint Alexandre. On met

oc aes rTopneres. 11$ rurenr glife, 6c en noircirent les


Pafteurspar tous les difçours
tholiques v entr* autres par que la haine 61 la vengean-
Miltiadc, favant Apologifte ce peuvent infpirer. Afté-
ée la Religion Chrétienne , rius Urbanus entroit dans le
qui fiorinoit fous Marc-Au- détail pour mieuxfaire fen-
rele & Commode ( Saint Hycr. tir des Prophéties
la faufleté
Cat, c» j*. Euf. L j. €. ij ) *, des Montanrftes. Maximille,
par Aftérius Urbanus, qui difoit-il, a prédit des guerres
écrivoitenaj? , & par Apol- ot des malheurs. Elle eft
lonius. (Euf.l.f. e. ,rf.)Mil- morte il y a plus de 13 ans ;
tiade convainquoit de faux lestemps marqués pour l'ac-
Montan &
fes Propheteffes , compliûcment de fes prédic-
( Prifcille &
Maximille ) par tions font paiTés , 61 cepen-
ce raifonnement. Vous tom- dant il n'y a point eu de guer-
bez en fureur lorfque vous res ; les Chrétiens ont tou-
prophétifez. Or il n'eft rien jours joui d'une paix pro-
arrivé de femblable aux vrais fonde*
Prophètes , &
jamais ils n'ont Les Momaniftes fe van-
perdu l'uûge de la raifon. toient d'avoir des Martyrs*
nuctins vriHiiu) rciuic icur
fe mit à foire le Prophète prétention , Ce montre qu'au-
4xt Aftérius Urbanus , on le cun d'eux n'a iti crucifié, fit

prit pour un poffédé , Ôt on le fourni^ ni lapidé -dans Us Sy-


conjura de fe taire ; on le nagogues des Juifs. Apollonius
crut rempli de refprit du Dé- aflure la même chofe. Il ajou-
mon , parce qu'il étoit agité te que Theraifon leur Héros
de fureur , &
qu'il débitoit avoit donné de l'argent pour
une doârine contraire à cel- fortlr de prifon , &
qu'il n'a-
le trae l'Églife tient de la voit rien foufTcrt. Alexan-
tradition des Anciens. Prif- dre , continue-t.il , étoit un
cille ce Maximille fe trou- homme de bonne chère ; il »
voient dans le même cas que été convaincu de larcin, ftc

Montan. Tous ces Fanati- condamné à Éphefe pour ce


ques s'étant vus retranchés crime. 11 feroit aifé de dévoi-
de la Communion des Fidè- ler les dérèglements des au-
les , déclamèrent contre VÉ- tres Momaniftes. » Un Pro-

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664 S.' DnocrorÉE, Abèè.
leur martyre fous Marc-Aurele, vers Tan 179 >
iq,
ou ^ous Révère > vers ' c commencement du
'troifieme fiecle. Ils font nommés en cç jour
dans lç Martyrologe Romain,
Voyez Eu&be, 1. 5. c. 16,

SAINT PROÇTO VÉE,


Premier ApBè de S. Vincent ,
JVJOV&iïHU! S. ÇÇRJdAIN - DES - f*EZ,

RoctovÉe
(tf ) étoit du Diocefe d'Au»
tun en Bourgogne, oç naquit vers Tan 535.
H Ait élçvé dans l'Abbaye de Saint Sympho-t
riea, fous la conduite de Saint Germain,
qu'on mit depuis fur le Siège Épifçopal de
raris. On
chargea enluite du gouvernement
le
du Monaftere que le Roi Childebert venoit
-<le fonder à Paris , fous l'invocation de Saint

Y inççnt ( b ). \\ y fit flçurir la çlifeipline mo,

mm '
1 1 .
. 1 i j 1 1* 1 ii tu i i

1» phete peint-il fescheveux mont, Ceillier, &c.


» frotte- t-il fes yeux d'Anti- trent par Eufebe qui nous en
,» moine , q-t-il foin de fe pa- a confervé des fragments,
t» ter , joue-t-il aux Dès , qu'on doit fottribuer à Afté*
t»préte rt-il à ufure ? rius Urbanus , Prêtre Catho*
Saint Jérôme attribue l'ou- Hque , qui écrivit à la priera
vrage contre les Montantes de l'Églife d'Ancyre.
où U eft parlé de nos SS. ( a ) Anciennement appeUé
Alartyrs , è Rhodon qui écri- Saint Trotuims, Saint Drotté.
vit contre Marcion Apelfes. & - { b ) Ce Monaftere prit en.
^iaU* Rhodon étant mort fous fuite le nom de Saint Gtrm*in-
Je règne de Sévère avant Tan dts -Prt\ t 4 caufe de Saint
an % il ne peut être Auteur Germain , Éveque de
fTun Ouvrage compoib en dont le corps y avoit éto
Henri de Valpis , Xille- tçansjçré.

1 Digitized by Google
Saint Att ale ^Asbè. 66
haftique , & y donna
à Tes frères l'exemple de
toutes les vertus. Son humilité , fes mortifi- •

cations, fon amour pour la prière, fa chari-


té pour les pauvres , fa patience fa fagefle , &
lui attirèrent la vénération de tous ceux qui
le connoiflbient. Il mourut de la mort des Juf-
tes , vers l'an 580: on garde fes Reliques à
Saint Germainnies-Prez. L'Églife honore &
mémoire le 10 Mars.
La vie originale de notre Saint s'eft trou-
vée perdue. Mais un Moine de Saint Ger-
main-des-Prez, nommé Giflemar , lequel vi-
voit dans le neuvième fiecle , recueillit avec
foin tout ce que la tradition quelques &
Mémoires épars en avoient confervé. On
trouve ces pièces dans Bollandus 8c dans
Mabillon. *

i
1
sa

. SA N T ATTÂLE,I

Second Abbé de Bobbio,


en Italie,

Sa 1 n t
, né en Bourgogne , fut élevé

fous conduite de Saint Ange , Évêque de


la
Gâp. Il alla enfuite prendre Fhabit k FAbbaye
de Lérins. Mais il en fortit quelque temps
après , pour
dans celle de Lu-
fe retirer
xeuil , fondée &
gouvernée par Saint Colom-
ban. Son cher maître ayant été banni par
Thierri , Roi de Bourgogne , il le fuivit en
Italie , &
continua de vivre avec lui dans le
Monaltere qu*il fonda en 6 11 à Bobbio , aux
, ,

666 Saint Kessoge 3 E.


extrémités du Milanès. Après la mort de Saint
Colomban y Attale fut choifi pour lui fuccé-
*
der. Quelques mauvais Religieux mirent fa
patience à de rudes épreuves ; mais il vint
à bout par fa prudence &
fa charité de les
ramener i leur devoir. Il fe diftingua fur-tout
par fon humilité , par l'auftérité de ûl vie , &
par une pénétration d'efprit finguliere. Il fut
nonoré au don des miracles dès fon vivant
& mournt le 10 Mars 6x7. Il eft nommé en
ce jour dans le Martyrologe Romain. Mais fa
tranflation eft marquée au 16 du même mois,
avec celle de Saint Colomban &
de Saint
Bertoul.
Voyez dans Bollandus, p. 43 ; & dans Ma*
billon , A& SS. Ben. T. x , la Vie de Saint
Attale , écrite par Jonas fon difciple.

SAINT MACKESSOGE,
ov KESSOGE
ÉvÊQUE DES PROVINCES DE LEVINj
ET DE BOYH, EN ÉCOSSL

CE
de ,
S A in t floriffoît dans le fîxieme fie*
fous le pieux Roi Congal II , qui fe con-
duisit en tout pat fes confeils, pleins de ver-
tu &de jfogefle. Jl fot fevorife du don des
miracles , &
mourut en 560. On voit encore
en Ecoffe une Eglife célèbre qui eft appellée
de fon nom Saine Kcffbgc-Kirk. Les Ecoflbis
avoient tant de vénération pour fa mémoire ,

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Saint Kesso ge,E. 667
qu'ils firent de fon nom leur cri de guerre ; 1

mais ils lui fubftituerent enfuite celui de Saint j^j^ x0<


André. On repréfentoit quelquefois Saint
Keffoge en habit de Guerrier , tenant en main
une flèche fur un arc bandé.
Voyez le Bréviaire d'Aberden ; la Chroni-
que de Pafley , célèbre Monaftere de Cha-
noines Réguliers du Comté de Renfrev ; le
Florarlum ; & Buchanan , de Repus Scot. L 5%

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46% S. E & lo c e Prêtre* y

«<sty *Ç$f m*&v

ï AT/. /O^/l DE MARS.


SAINT 'EU LOGE,
PRÊTRE DE CORDOUE, »

Martyr.
Tiri de fis Ouvrages , in Bibl. Patr. T. 9 ; &
de fa Vu , écrite par Alvart fon intime amu
V oye[ Bollandus , T. 7 ; &
Fleuri , /. 48\ p*
0
466. in-4 .

L'An 859.
ULOGE étoit ïflu d'une des premier
WARS XI,
res familles de Cordoue, : alors Capitale des

k Mores ou Sarrâzins d'Efpagne* Ces Barbares


en ruinant l'Empire des Goths 3 n'avoient pas
entièrement aboli le Chriirianifme. Ils en a-
voient même toléré ^exercice public jufqu'à la

naiflknee de notre Saint ^ fe contentant d'éri-


ger un tribut de chaque Chrétien , à toutes
nouvelles Lunes*
les
Euloge
pafla les premières années de (a vie
arm* Clercs de l'Églife du faint Martyr Zoi-
«é dcl^Écoie P
*
dc Cordoue* e > <I U * fouffiit à Cordoue durant la perlecution
de Dioctétien , &
qui y eft honoré le 27 de
Juin. Il s'y diftingua bientôt par fa vertu &
par la feience. Ayant été eniiiite ordonné Prê-
tre , il fiit mis à la tête de l'École Eccléfiaftique

de Cordoue , qui étoit alors très<$cbre. D fanc-


tifioit fes études par la prière % le jeûne &

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S.El/LO CE , P RÊTRE. 66$
les veilles ; & il véné- "
s'attiroit l'amitié & la 1
1

" *
ration de tous ceux qui le connoifibient , par mars
h,
fon humilité , fa douceur &c fa charité. Il vi-
iîtoit fouvent les Monafteres , afin de fe former
à la çerfeâion fur les modèles accomplis qui y
vivoient. Son zele pour le falut des ames ,
Pengageoit à drefler des règles de conduite
our Tes perfonnes qui vouloient fe donner à
Dieu d une manière fpécialc.
Quelques Chrétiens , par un zelo indifcret,
ayant déclamé publiquement contre Mahomet
Se la Religion qu'il avoit établie , TÉglife n eft mîi
d'Efpagne le vit expofée à une cruelle periecu-» en prifon
tion. Elle s'alluma Fan 850 de Jefus-Chrift, pour la Foi.
& le vingt-neuvième du règne d'Abderrama IIL
A Pinftigation d'un Apoftat , nommé Recca-
frede , FEvêque de Cordoue fut emprifonné
avec plufieurs Prêtres & d'autres Chrétiens.
Du nombre des Prêtres fut Euloge , dont tout
le crime étoit d'encourager les Martyrs par
fes Inftruôions. Ce faint homme employa le.

temps dans la prifon , à compofer,


qu'il parla
fon exhortation au Martyre. Elle eft adrefTée à
deux Vierges , nommées Flore & Marie , qui
furent décapitées le 14 Novembre de l'année
fuivante. Euloge & fes compagnons ayant été
élargis fix jours après le martyre des deux
Vierges , attribuèrent leur liberté aux priè-
ils

res que Marie &


Flore leur avoient promis
de faire pour eux dans le Ciel.
Un grand nombre de Chrétiens reçurent
aufli la couronne du martyre , en 851. Les
principaux d'entr'eux, furent Gumifond , Au-
relius ,&
Félix avec leurs femmes ; Chriflo-
phe , Léviailde , Rogel , &c. Mais comme
TÊglife «TElpagne craignoit pour la foibletfe

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670 S. Eu loge Prêtre. ,

de fes enfants , & qu'elle connoiffoit les fuî-


tes flineftes qu'entraîne ordinairement la pré-
MXjus IX '
fomption , il fe tint la même année un Con-
cile à Cordoue
par lequel il fut défendu i
,

tout Chrétien de fe livrer lui-même aux Per-


fécuteurs.
La perfécution continua fous Mahomad,
H encoura- fils &iucceffeur d'Abderrama. Le Moine Fan-

tyn
te dile , Anaftafe , Félix , & trois Religieufes ,
*
nommées Digne , Columbe & Pompofe ,
moururent pour la Foi en 8 5 3 Saint Euloge .

les anima tous à combattre genérettfement. II


eût bien voulu avoir part à leurs triomphes,
comme on le voit par fes Écrits , qui annon-
cent un homme brûlant d'amour pour Jefus-
Chrift , & prêt à lui faire le facrifice de fa
vie. Il de leur martyre en trois
écrivit l'Hiftoire
Livres , fous le titre de Mémorial des Saints, &
fit aufli leur Apologie contre ceux qui leur

difputoient la qualité de Martyrs , fous prétexte


qu'ils n'opéroient point de miracles , comme
ceux qui avoient fouflert pour Jefus-Chrift
dans la primitive Églife.
Le Saint avoit un frère oui éprouva auffi
les effets de la haine des Mahométans pour
le Chriftianifme. On le priva de fa place, qui
étoit une des plus confidérables du Royaume.
Euloge , depuis fon élargiffement , ne pouvoit
fe féparer de Reccafrede , cet Évéque Apoftat
dont nous avons parlé , ce Loup vêtu en Ber
ger , qui prêtoit fon miniftere aux Perfécu-
teurs. Dans une extrémité aufli affligeante, il
s'interdit toute fonâion , excepté celle d'an-
noncer la parole de Dieu , s'abftint de dire&
la Meffe , afin de ne pas communiquer avec
cet ennemi domeftique.

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S. Eulooe Prêtre.
, 671
L'Archevêque de Tolède étant mort en
8y8 , Euloge fut élu tout d'une voix pour
lt *
lui fuccéder. Mais il fe rencontra quelque
obftacle qui empêcha fon Sacre ; au refte , il
ne furvécut que deux mois à fon éleâion ;
& il fouffrit le martyre
, auquel il avoit exhorté
tant d'autres Chrétiens, Voici quelle en fat Poc-
cafion. Une Vierge, nommée Léocritie , d'une
famille diftinguée parmi les Mufulmans , avoit
été inftruite dès l'enfonce dans le Chriftianif-
me, par une de fes parentes qui la fit même
baptiîer. Son père oc fa mere , qui s'en apper-
çurent , la maltraitaient nuit & jour pour la
foire renoncer à fa Foi. Elle informa de fon
état le Prêtre Euloge, & fa fœur Anulone , &
leur fit dire qu'elle auroit envie de fe retirer ,
en quelque lieu , où elle pût exercer fa Reli-
gion en liberté. Euloge lui indiqua fecrete-
ment les moyens de lortir de la maifon pa-
ternelle , &
la tint quelque temps cachée chez
des amis fidèles. Le pere & la mere , au dé-
fefpoir d'avoir laifle échapper leur fille
,
mirent tout en œuvre pour la retrouver,
& ils y réuiUrent enfin après bien des re-
cherches.
Onconduifit Euloge &
Léocritie devant le îleft co»-
Juge. Celui-ci ayant demandé au Saint pour- duit deydtxx
le Jugc-
quoi avoit détourné une fille de l'obéiffance
il

qu'elle devoit à fes parents , il lui prouva


qu'il étoit des cas où la défobéifTance aux pa-
rents devenoit un devoir. Il s'offrit à lui enfei-
gner , comme à elle , la voie du Ciel , &à lui
démontrer que Mahomet étoit un impofleur.
Le Juge , irrité de ce difcours , le menaça de
le foire fouetter jufqu'à la mort. Euloge lui
dit que les tourments feroient inutiles , &

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67* E u loge Prêt A ê.
3
a
3u'il ne changéroit jamàis de Religion. Lâ
effus le Juge ordonna qu'on le conduisît aU
'
Palais , afin qu'il comparût devant le Confeil du
Roi. Un des Confeillers Payant pris à part
lui dit : » A la bonne heure , que des îgno-
* rants courent aveuglément à la mort* Mais
» un homme fage & éclairé comme vous
h ne doit pas imiter leur folie. Croyez-moi
» je vous prie ; accommodez-vous à la nécef-
» fité qui exige un mot de vous. Vous pour-
» rez enfuite reprendre votre Religion , &
h nous vous promettons de ne plus vous in-
» quiéter déformais. Ah 1 répondit Euloge , fi

wvous aviez la moindre idée des récompen-


v> promifcs aux Chrétiens qui perfévére-
fes
» ront jufqu'à la fin , vous renonceriez avec
» plaifir à tous les avantages temporels pour
» vous les procurer ». Il fe mit aufli-tôt à prou-
ver au Confeil la vérité du Chrifhanifme ; mais
on ne voulut pas l'écouter , & on le con^
damna fur le champ à perdre la tête. Pendant
qu'on le conduifoit au lieu du fupplice , un
Eunuque lui donna un foufflet pour avoir
parlé contre Mahomet. Le Saint tendit l'autre
joue &
en reçut patiemment un fécond. 11
confomma fon glorieux martyre le 1 1 Mars
859. Léocritie fut décapitée quatre jours après.
Les Chrétiens enlevèrent leurs corps , &
les
enterrèrent honorablement. L'Églife fait mé-
moire de l'un & de l'autre en ce jour.

La conduite deJefus-Chrift à l'égard de fon


Egliie a quelque chofe de bien admirable. Il
,

Ta formée &C répandue au milieu des perfécu-


tions les plus fanglantes. Il a voulu que dans
tous les fiecles elle fut aflaillie de violentes
.
tempêtes ;

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S> EULÛG E>PRÊTkÉ. 6?1
tempêtes. Il femble qu'il fe foit plu à laif-
fer dans la tribulation » au * moins quel-
qu'une de fes parties. NJais cette Êglife ne pa-
rut jamais plus triomphante que dans les plus
terribles épreuves. Ce fut alors en effet que fon
fein fécond produilit cette multitude innom-
brable de Héros qui retracèrent en eux la Vie
de Jefus Crucifié. La conduite de ce divin
Maître à l'égard de fon Églife , eft le modèle
de celle qu'il tient envers ces ames privilégiées
que fa miféricorde deftine aux faveurs les plus
rignalées. Ce ne fera que dans l'autre vie
qu'elles fendront toute l'utilité des épreuves.
Elles verront alors qu'elles dûrent aux infir-
mités , aux humiliations , aux croix , la dé-
faite de leurs ennemis , l'extin&ion des vi-
ces , la pratique des vertus , & ce tréfor de
bonnes œuvres dont leur Couronne eft for-
mée dans le Ciel. Elles comprendront enfin
qu'il n'y a point de falut fans croix , louesr
ront éternellement Jefus-Chrift de les avoir
affociées à fes fouffrances > pour les rendre
enfuite participantes de fa gloire.

Vv
<?74 $• SOPHRONE y PATR. DeJÉR.
g 1

,
'
1
L

M 1RS il.

SAINT SOPHRONE,
PATRIARCHE
DE JÉRUSALEM.
-

Tiré des ASes


du Concile de Latran , T. 6.
Concil. & du P.
le Qu'un , Or. Chr. T« p.
264. fayq; Ai Differtatiqn Hijlor. iHtnfchcmus ;
& Fleury y L & 38.
L'An 639 pu 644.

SopHRONE naquit à Damas , Ville cé-


lèbre de la Céléfyrie. Les progrès extraor-
dinaires qu'il fit dans les feiences divines &
humaines , méritèrent le furnom deSopkijU f
lui
<qui étoit alors fort honorable. Il pa<& vingt
ans auprès de Jérufalem, fous la conduite d'un
faint Hermite , nommé Jean Mofch , fens
embrafler toutefois l'État monafHque. Cet
SesY0yages.
deux hommes étant allés vifiter les
Monafteres d'Égypte , Saint Jean l'Aumônier
les retint à Alexandrie , vers l'an 610 , &
les employa avec fuccès pendant près de deux
ans à l'extirpation de TEutychianifme , à &
la réformation de plufieurs abus qui s'étoient
gliflfés dans fon Diocefe. Ce fut vers ce temps-

là que Jean Mofch compofa fon Pré fpiritucl 9


qu'il dédia à Sophrone. Ce Livre eft un Recueil
d'exemples des vertus pratiquées par les So-
litaires que l'Auteur avoit vus , ou dont il a-
voit entendu —parler. Le ftile en eft fimple,

Digitized by Google
& SoPtikbXÊ ,Pàth* dé Jâr. 6?$
hiais inféréflant , toiit y tend à l'édification
tout y refpire la piété. Jean Mofch Sophro* &
tie firent ënfuite un voyage en Italie , 6c vin-
rent à Rome. Notre Saint quitta cette Ville
après la mort de fon cher maître , retourna &
en Orient , où il trouva les efprits fort parta*
gés fur le dogme.
Athanafe , Patriarche des JacobitèS Oit Eu-*
tychiens en Syrie , reconnoiflbit deux natu-4
res diftinôes en Jefus-Chrift , mais il n'ad*
mettoit én lui qu'une volonté ; ce qui eft une
contradi&ion manifefte , puifque la volonté
eft une propriété eflentielle de la nature. D'ail-
leurs cette doôrine étoit évidemment oppofée
à l'Ecriture , où nous voyons Jefus-Chrift lui*
même établir de la manière la plus formelle 9
la diftinôion dé fa Volonté divine de fa vo* &
lonté humaine , dans la prière qu'il fit à fon
Pere au Jardin des Olives. On ne laifla pour*
tant pas de la répandre , fous prétexte qu'elle
étoit propre à ramener les Eutychiens à l'uni-
té Catholique. Elle eut fur-tout pour protec-
teurs Sergius Patriarche de Conftantmople ,
Théodore Evêque de Pharan , Cyrus Pa- &
triarche d'Alexandrie* L'Empereur Héraclius
la confirma en 639 , par un Edit nommé Ec-

tfufe 9 c'eft-à-dire , Expofition , où il déclaroit


qu'il n'y avoit pas d'autre volonté en Jefus-Chrift,
que celle du Verbe Divin ( a ). On donna à
ceux de cette Seôe le nom de Monothilius tb\
Sophrone, allarmé du péril que couroit la Foi,

(a) VEWu/eiut condam- de deux mots grecs , dont


née par Pape Jean IV.
le l'un fignifie fiât , 8c fautr*
(*) Ce root eft compofé
Vvij
,

676 S. SOPHRONE, PâTR. DE JeR.


- en prit la défenfe auprès de Cyrus ; il fe jeta à

™atic
MAKi XI.
fes pieds,
r »
& le
conjura,
t j
les larmes aux yeux ,
t y ,

de ne pas publier de prétendus articles de reu-


nion , quiétoient contraires au Dogme Catho-
lique. Mais tous fes efforts furent inutiles.
Voyant donc qu'il ne pouvoit rien gagner à
Alexandrie , il fe rendit à Conftantinpple , afin
d'agir auprès du Patriarche Sergius en faveur
de la Doftrine de l'Eglife. Ayant trouvé en lui
des diipoiitions femblables à celles de Cyrus
il quitta Conftantinople , & fe mit à voyager
dans la Syrie.
11 cÇi é u
II étoit temps que Sophrone , qui avoit fi
*

°
j^ruraicm. bien fervi l'Eglife , en devint un des premiers
Pafteurs. On l'élut en 634 , pour fuccéder à
Son zeic Modefte Patriarche de Jérufalem ; mais ce ne
,
'

Aîonothcli- q u avec beaucoup de peine qu'il confentit


t«s. à fon Sacre. Un de fes premiers foins , après fon
inflallation, fut d'affembler un Concile de tous
les Evêques fes Suffragants , pour condamner
le Monothélifme. Il compofa en même temps
une Lettre Synodale , où il donnoit une expo-
fition de la Foi Catholique, avec toutes les
preuves qui l'établiffent expofition cjui fût
:

depuis approuvée par le VI Concile général*


Le Saint envoya cette Lettre au Pape Hono-
rais , &au Patriarche Sergius. Le motif qui le
détermina à agir de la forte , fut la crainte oit
il étoit que le Pape ne fe laiflat féduire par une

lettre captieufe que Sergius lui avoit écrite pour


l'engager à tolérer le filence fur la matière dont
il étoit queftion. Ce n'étoitpas toutefois qu'Ho-

norius fut tombé dans le Monothélifme. Les mo-


numents les plus authentiques dépofent en fa-
veur de fa Catholicité , &
prouvent d'une ma-
nière inconteftable qu'il ne donna jamais fon

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S. Sophrone y Pat. de Jer. 677
confentement à l'erreur ( c ). Mais comme le fi- H
lence en fait de Doôrine , eft une efpece d'ap- mars i x.

proTbation de la part des premiers Pafteurs , &


que d'ailleurs la conduite d'Honorius produifoit
alors de funeftes effets , Sophrone mettoit tout
en œuvre pour démalquer les fophifmes d'une
Héréfie dont les fauteurs étoient puiffants &
en grand nombre.
Le Saint ne fe contenta j>as d'écrire pour la
défenfe du Dogme attaque; il porta fes vues
plus. loin, comme nous Talions voir. Il prit
Etienne Evêque de Dore , le plus ancien de
fes Suffragants, le mena fur le Mont-Calvaire
& lui dit » Si vous négligez le péril où la
:

» Foi fe trouve , vous en rendrez compte à


» Jefus-Chrift , qui a été crucifié en ce faint
» lieu , lorfqu'il viendra juger les vivants &c
» les morts. Faites donc ce que je ne puis fai-
» re en perfonne,à caufe de l'incurfiori des
» Sarrasins. Allez-vous préfenter au Siège A*
» pofloliqùe , où font les fondements de la
» faine Doôrine. Informez les faims perfon-
» nages qui y font de tout ce qui fe paffe ici ^
» & ne celiez point de les prier jufqu'à ce
n qu'ils jugent cette nouvelle Doôrine, ôcfa
» condamnent canoniqyement, >> Etienne par-
tit auffi-tôt Rome ; 'pendant lies dix
pour &
afts qu'il pafladans cette ViHe , il pourfuivit
avec beaucoup dç zele la condamnation dii
Monothélifme. Il l'obtint enfin fous le Pontifi-
cat de Martin I , qui affembla pour cet. effet le
premier Concile de Latran , en 649, ,

Cependant Sophrone avoit beaucoup à

( c ) Voyez le P. Alcxan- I nely , TraS. de Incttm*


dre , Sec. 7. Witafïc & Tour-
V vnj

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67$ S. Sqphrjone , Pat. de Jïr,
fouffrir de la part des Sarrazins, qui s'étaient

A
***** «• de dçux ans. Omar ( d ) , qui étoit à la
. .

de ces Infidèles , profana les lieux fkints , &


entreprit de bâtir luie Mofquée à la place du
Temple de Salomon. Mais l'édifie? ne pou-
vant fe foutenir, il en demanda la Caufe, &
les Juifs lui dirent mie le bâtiment tomberait
toujours , s'il ne fàifoit ôter la. Croix qui étoit
fur le Mont des Olives. Effeûivement on n'eut
pas plutôt ôté la Croix, que la Mofquée de*
pleura ferme ( e ). Le Saint, comme un autrq
Jérémie , dépiQroit amèrement les malheurs de
Jérufalem , &C travailloit de toutes fes forces
à empêcher la difperfion dç forj Troupeau. Sa
charité le feifoit veiller exaftement à ce que
Jes malheureux ne manquaffent d'aucun fe-
cours , tant pour Pâme que pour le corps ; U
il d'une fois d'çxpofçr ia vie
lui arriva plus
pour les befoins de fon Eglife. Enfin Dieu le
retira du milieu des impies , pour le recevoir
parmi le$ Bienheureux, Il mourut le 1 1 Mars
$39, ou644(/>

(d) Omar avoît fuccédé à Théophane , p. 1S4.


Abembe-ker en 6)6. Àboube- (/) Cette dernière date a
ker avoit fticcédé à Maho- été fume pat k P. Papcbrok,
met en 634 , fous le titre de 7V. Pntlim. ad T. p AfaJi •
Çalifty ou de Vicaire du Pro- n. 144. p. tt. Outre la Let,
jthere. On fait que Mahomet tre Synodale de Saint Sophro-
jeta les fondements de fa re- ne > &
celle qu'il écrivit au
ligion à la Mecque en 608 ; Pape Hoaorius , nous avons
que les habitants de cette encore de lui quelques Ser»
Ville l'ayant obligé eWeor mons qui , - (èJhon Phorius ,
fuir , il fe retira a Médine en refpirent une tendre piété»
quoique Té Uïïe ffën (bit pas
(O Voyex fur ce fait tort correû. U dit dans un

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i

S. Constantin , Martyr. $79

MARS u.
MÊME J O U IL
LE
SAINT CONSTANTIN ,

Martyr.
ON
qui
dît que ce Saint étoit
après avoit abdiqué la Couronne , alla fe
,
un Roi Breton }

faire Religieux dans le Monaftere de Saint


David. On ajoute que s'était joint enfuite
à S. Colomb , il prêcha avec lui l'Évangile aux
Pides , qui liabitoient une grande partie du
cays , connu aujourd'hui fous le nom d'ÉcolTe,
Il fonda un Monaftere à Govane , près de la
Cluy d & gagna à Jefus-Chrift tout le Territoi-
,

re de Cantire. fut martyrifé par les Infidèles


Il

vers la fin du fixieme fiecle & enterré dans ,

le Monaftere de Govane. On dédia en Écofle


plufieurs Églifes fous fon invocation. Il paroît
au refte que ce Saint ne doit pas être confon-
du avec Saint Conftantin , Martyr d'Écofle.
Çolgan fuppofe que ce dernier étoit un Moins
Irlandois qui avoit vécu dans la Communauté
de Saint Carthag à Rathene (a).

-
de fe$ Sermons fur TÈnaita- T. 1, de Craee , p. $9.
tion de la Croix qu'on avoit
, [a) Plufieurs Hiftoriens
coutume au milieu du Carême ÉcoiTois donnent le titre de
d'expofer ce Bois facré à la Saint à Conftantin , m
Roi
vénération des Fidèles. In me- d'Écofle t
qui abdiqua la Cou-
dio je} uni , adorât ionis grand , ronne | & fe retira en 94)
proponi JbUt vitale lignum >e- parmi les Religieux de Saint
nerandx Crucis. Bibl. Patr. T. André.
12. p. 214. &
ap. Gretfer ,

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6So Saint M s gv s 3 E.
Voyez Vies MSS des Saints (TÉcoffç
les
qui font au Collège des Écoflbis à Paris.

SAINT iENGUS,
Évéque en Irlande.
Ce Saint, appellé en François Ainçuïs f
étoit iffu du fang royal
( a ) , naquit en &
Irlande dans le huitième ficelé. Il renonça à
tous les avantages du monde pour s'attacher
uniquement à Jefus-Chrift &
le retira dans le
célèbre Monaftere de Cluain - Edneach , au
Comté d'Eft-Meath. Il s'acquit bientôt une ré-
putation extraordinaire par fçm cminçnte fain-
teté , par l'étendue &
la profondeur de fon
favoir. Importuné des louanges qu'il recevoit
de toutes parts , il réfolut de s'y fouftraire
i>our toujours. S'étant donc déguifé , il prit
a route du Monaftere de Tambacht qui é- ,

toit à trois milles de Dublin , y vécut fept &


fins inconnu , en qualité de Frere^Convers 9
toujours occupé aux plus bas emplois de la
Communauté. Un pareil genre de vie s'ac-
commodoit merveilleufement avec fon hu-
milité» Mais ayant été enfin découvert , il
retourna dans ion premier Monaftere , dont
il fit l'admiration par fes aflftérités par la &
»
( « ) De la famille des Rois fignoit alors les Moines dans
Palaradiens de VUlûçr. Ce la langue des Écoflbis , qui
jbaint eft furjionuné KtU-dc , les appelloiçnt cemmunemen %
c'etë-à-dire , Adorateur 4c CuU*cs ,

UUu. Cétoit ainfi qs'on dc-

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Saint Vin di ci en y E. 69i
ferveur de fes prières. Il fut élu Abbé , pui
s ^^^^
Évêque , fufàge étant en Irlande d'élever à mars u,
l'Épifcopat les Abbés des principaux Monaf-
teres qui fe diftinguoient par leur mérite &
leur vertu. jEngus avoit une tendre dévo-
tion pour les Saints ; ce fut ce qui le déter-
mina à écrire deux Martyrologes , quel- &
ques Opufcules fur les Saints de fon pays
(*). Il mourut vers 814 , non à Cluain-
Edneach , mais au lieu où fe forma depuis le
célèbre Monaftere dl/Engùïs , ainfi appeilé de
fon nom, Voyez tes Aâes dans Colgan , p, 579.

SAINT VINDICIEN,
Évêque d'Arras et de Cambrai

V In d ic i en 9 qui étoit né dans PArtoi*


vers la fin du règne de Clotaite À , pàflk
quelques années fous la conduite fe Saint
Éloi , Évêque de Noyon. Lorfqu'il fe fut
bien inftruit dans la connoiffance des devoirs
de la vie cléricale , &
dans celle de l'Écritu-
re Sainte , il revint à Arras, &
s'attacha au
fervice de TÉglife de cette Ville , ailors gou-
vernée par Saint Aubert. Sa modeftie , fes
auftérités , fon amour pour la prière , fon
zele pour la gloire de Dieu , le rendirent bien-
tôt I objet de la vénération publique. Les Villes
de Cambrai & d'Arras , qui avoient un Évêque

( * ) Ils font compris dans I Saltuir-no-rann.


ce que les Irlandois appellent
|
t

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,

6ii Saint Vindicîen ,E.


commun , l'élurent unanimement pour rempla-
ces Saint Aubert , dont il avoit été Vicaire
Général ( a ).
Notre Saint parut avoir hérité des vertus
& de l'efprit de fon prédéceffeur ; il fe le pro-
pofa pour modèle dans toute fa conduite. A-
près l'aflaflinat commis en la perfonne de Saint
Léger , par les ordres d'Ébroïn , Maire du Pa-
lais fous Thierri III , il alla trouver le Prince
pour lui repréfenter toute Pénormité de ce
crime ; & il lui parla avec tant de force , qu'il

fe fournit à la pénitence qu'on voudrait lui


impofer. Il exigea de Thierri , qu'il bâtiroit
& doteroit ouelcpes Monafteres. Le Roi ne
s'en tint pas là ; il ouvrit les yeux à la lu-
mière , rentra férieufement en lui-même , &
changea de conduite. Vindicien paffa le refle
de fon Epifcopat dans l'exercice continuel des
fonâions de ion miniftere. Il mourut à Brof-
feUes ( b ) , le ii Mars 705 . dans un âge fort
avancé ( c ) , &
fut enterre au Monaftere du
Mont - Saint - Eloi ( i ) , à une lieue de- &
mie d'Arras. Les miracles qui s'opérèrent à
foh tombeau , y attirèrent un grand concours
de peuple. Ses Reliques , après avoir été
transférées en divers lieux , ont enfin été
rapportées au Mont Saint Eloi , où elles fe
gardent encore aujourd'hui.
Voyez dans Bollandus la Vie du Saint com-

( O Son Élcftîwi fe fit en xelles en Brabant.


669 , félon le Cointe & en
, (c) Il mourut en 711»
67/, félon Hcnfchénius- félon Henfchénius.
(*) Celieuétoitdel'Évê- (i ) On en fit dans la fui-
che de Cambrai. Quelques te une Abbaye de
modernes l'ont pris pour Bru- Réguliers.

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Saint Eut ff y me , E. 683
pofée par Dorefrtvieux , Abbé du Mont^Saint»
Eloi , d'après le réçit de Baldéric ou Baudry ,
Eveque de Noyon &de Tournajr ;& de Gau-
tier , Abbé du Saint Sepulchre de Cambrai.
Ces deux Auteurs vi voient dans te XI fieete.
_ __ . 2 -

SAINT E.UTHTME,
r
Evéçuï de Sardes,
Martyr,
•• •
-

Ces, 1 t i qui avoit paffé fes premiè-


res années dans un Monaftere , fut élevé fur
le Siège Epifcopal de Sardes y en Lydie , fous
le règne de Conftantin &
d'Irène fa mère. It
parut avec éclat au Concile général , aflemblc
à Nicée , en 787 , contre les Iconoclaftes. Il
fut chaffé de fon Siège par l'Empereur Nicé-
phore , pour avoir admis à la Profeffion ReB-
gieufe une fille qui avoit pris la fuite , afin
d'éviter les pièges tendus à fa chafteté. Léon
l'Arménien ayant replongé PEglife dans les
malheurs où elle s'efoit vue fous Conftantin
Copronyme &ion fils Léon , Euthyme,
qui avoit été .rendu à fon Eglife , prit haute-
ment la défenfê de la vérité. Il ofa même en
foutenir les droits en préfence de l'Empereur.
Sagénéreufe liberté le fit condamner à un
exil,3m dura jufqu'à l'an 813. Son zele à
affermir ceux que la perfécution avoit ébran-
lés , 8c à combattre 1 erreur des Iconoclaftes r
lui mérita l'honneur d'être chaffé de nouveau
de fon Siège, Il fut relégué au Cap d'Acride ,
6*4 Satxt Euthtme^E.
Il y fut enfermé dans une prifonj
en Bithynie.
MARS ii. °^>
^dre
Par de l'Empereur, il fut frappé fi
"cruellement à coups de nerfs de bœuf, qu'il
en mourut huit jours après, vers Tan 820 fa).
Il eft nommé en ce jour dans le Martyrologe
Romain avec_ la qualité de Martyr. Mais fou
nom eft marqué au 16 de Décembre dans les
Menées des Grecs.
Voyez les Aftes du VII Concile général,
les Auteurs de PHiftoire Byzantine ; la Dif-
fertation hiftorique d'Henfchénius ; & Falconi,
in Toi. Capponianas 9
ad 2.6 Dcctmb. p. St.

( a ) Baillet dit que le Saint de fon exil qu'il rubit cette


reçut cette flagellation à peine. Quelques Auteurs ont
Conftantinople , qu'il mou- & placé le martyre de Saint
rut en allant au Lieu de fon Euthyme en 818 , fous Mi-
exil, mais Falconi prouve chel le Bcgue; d'autres Toot
que ce fut dans le lieu même mis en $40. fous Théophile.

* 9

*• 't f
t

•a* s
If

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S. Grégoire le Grand. 68ç
- »>

.*://. JOUR DE MARS.


SAINT GRÉGOIRE
LE GRAND,
PAPE, ET DOCTEUR DE L'ÉGLISE.
Tiré de fis Ecrits
, 2?*</e
9
& de Paul Dia-
cre Moine du Mont - Cz^Tzi , lequel vivoie verf
,

la fin du VIII ficelé. La Fie du Saint , &n'ft par


Jean Diacre de CEglife Romaine , mérite peu de
créance ; elle efi , y&o/z Aï remarque de Baronius ,
/oatt remplie de fautes* Le P. de Sainte Marthe 9
Supérieur Gênerai de la Congrégation de S. Maur 9
fit imprimer à Rouen, en '657, in-40 . une Vie
françoife de Saint Grégoire le Grand. Il Ta redon-
née depuis en latin , avec des améliorations con-
Jidérables , dans le quatrième Tome de fion Edi-
tion des Œuvres de notre Saint 9 qui parut en
ijoS. Voye\ aufli Fleury ,1. 34, 35, 36; Ma-
Villon , Annal Ben. 1. 6. T. i ; Ceillier, T. 17.
p. 118 ; &
P. Wietrowski 9 Jéfiuite 9 Hift de
le

Rébus in Pontif. S. Gregorii Magni geftis. Ce


dernier Ouvrage ejl tire en grande partie de
rHifioire du Pontificat de Saint Grégoire, par
Maimbourg.
L'An 604.
Saint Grégoire , fumommé u mars ».
Grand, pour l'éclat de fes aâions & de fes ver-
tus,
naquit à Rome, vers l'an Gordien » * f
J40. .
a mûLtm
.

fon pere, étoit Sénateur, jouiflbit d'une &

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6S6 S. GkèGoi re le Gras? n.
• fortune confidérable; mais il renonça au mon-*
mars ii<
^ e a Pr^s *a naiflancc de fon fils , fe fit Ecclé-
fiafhque ,& mourut étant Rigionairt , c*eft-à-
Sorféduca-dire , un des fept Cardinaux Diacres qui a-
tion.
voient foin, Chacun dans fon quartier , des
Pauvres &
des Hôpitaux , appelles Diaco-
ùies. Sylvie * mere du Saint, iuivit l'exemple
de fon mari , &
fe confacra du fervice de
Dieu dans Un petit Oratoire , près dû Portique
de S. Paul. Grégoire s'appliqua dans fa jeunefle
à l'étude de la Grammaire , de la Rhétorique &
de la Philofophie , puis à celle du Droit Ci-
vil & Canonique dont il acquit une grande
connoiffance. Il n*avoit encore mie trente-
quatre ans , lorfque l'Empereur Juftin II le
créa Préteur ^ ou premief Magiftrat de Rome.
Cette Dignité , qui approchoit affez de celle
«le Confui , l'obligea de porter un habit dif*
tinûif, c'eft-à-dire , la Trahie, quiétoitune
robe de foie , enrichie d'une magnifique brode*
rie , &
toute couverte de pierres précieufes.
Mais il pouvoit dire avec Efther , que fon
cœur n'avoit point d'attache 4 cette pompe
extérieure , que fon état lui rendoit indifpen*
feMe. Dès fon enfonce, il s'étoit accoutumé
à n'eftimer que les chofes du Ciel : auffi n'a-
oit-il point de plus grand plaifir que de s'en-
tretenir de Dieu avec de (àints Religieux , &
de fe retirer dans fa chambre , ou dans quel-
que Églife pour vaquer à l'exercice de la prière
&
de la méditation.
Après la mort de fon pere , il fonda fix
Monafleres en Sicile , oïl étoit une grande
partie de fon patrimoine , & y attacha des
Il embraffe fonds fuffifants pour la fubfifiance des Reti-
rât monaf- gi çux Il en fonda un feptieme à Rome dans
tique.
m .

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S. Grégoire le Grand. 6%j
fa propre maifon , fous l'invocation de Saint i

André ( a \ II y prit lui-même ffiabtf en 57* MARS 12.


fous l'Abbe Valentin, à l'âge dejj ans. La,
éloigné du tumulte des pâmons , cç unique-
ment occupé de fon falut , il fe liyra avec tant
d'ardeur à la leûure des Livres Saints , aux &
pratiques de la mortification , qu'il en contrac-
ta une extrême foiblefle d'eftomac. Ses jeûnes
dérangèrent tellement fa fanté , qu'il tomboit
en fyncope lorfqu'il ne prenoit pas fréquem-
ment de la nourriture ; ce qui l'affligeoit le
plus , étoit de ne pouvoir pas jeûner le Samedi
Saint , jour auquel tout le monde jeûnoit
fans en excepter les enfants. Le défir ar-
dent qu'il avoit de fe conformer à la pratique
uni venelle de PÉglife , le porta à' s'adreffer à
un Moine fort pieux , nommé Eleuthere , afin
qu'il réunît fes prières aux fiennes pour obte-
nir de Dieu la grâce de jeûner au-moins ce
faim jour. Ils furent l'un &
l'autre exaucés ;
car Grégoire fe trouva tout à coup guéri , &
en état de faire plus qu'il n'avoit demandé ( 1 ).
Il n'étoit pas encore monté fur la Chaire

de Saint Pierre , &


peut-être même n'é-
toit - il pas encore Supérieur de fon Monaf-
tere, lorfqu'il projeta la converfion des An- ta ^^SfiOT
glois. Voici l'ocçanon qui lui fit naître cette de l'Angle-
pieufe idée ( 1 ). Partant un jour par le marché tcrrc -

de Rome , il y vit des Efclaves d'une grande


beauté qui étoient expofés en vente. Il ^infor-
ma de leur Pays &c de leur Religion. On lui

(a) Sur le Mont Scaurus. ( I ) Gregor. Dial. r . c. jy.


Ce Monaftcre appartient au- ( 2 ) Pau* Diacre , Hifi. t.
jourd'hui aux Camaldule*. 2, C, t.

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, ,

688 S.Grécoire le Grand.


répondit qu'il* étoicnt de PHIe de Bretagne i
& encore Païens : » Faut-il , s'écria Grégoire
*
# en {empirant , que des créatures auffi belles
» foient fous la puiffance du Démon, &qti\in
» tel extérieur ne foit pas accompagné de la
» grâce de Dieu (£) ». Il alla trouver auffi-
tôt le Pape Benoit I ,
pour le prier inftara-
ment

(b) Bede ajoute que le perfonnes n'ont vu dans cet-


Saint rit encore les que (lions te converfarion de Saint Gré-
fuivantes : h Comment s'ap- goire qu'un tiflu de miférables
» pcllent ces peuples ? » Et jeux de mots « & ont avancé
comme on lui répondit qu'ils en confcqucncc qu'elle étoit
s'appelloient Angliou Aaglet j indigne de lui. Mais on peut
ce nom , répliqua-t-il t en exeufer ce Pere , en difant
faifant allufion au mot Angli ,
qu'il ne faifoit que ftuvre le
qui eft prefque le même que goût de fon fiecle. Saint Au-
celui cVAngeli , » ce nom leur gufiin , qui s'eft auffi permis
convient à merveille \ n car de pareils jeux dé mots , s'en
»» ils ont des vifages Angéti- juftirle fur ce qu'il étoit quel-
> ques , &
ils méritent bien quefois nécefiairc de les em-
>> compagnons des
d'être les ployer pour plaire à des Audi-
y» Anges dans le Ciel. Quel teurs dont les oreilles y étoient
îi eft , ajoutait-il , le nom de accoutumées. L'ingénieux Au-
»t la Province où ils font nés ? teur de la dernière Vie du
»» Ceft , lui dit-on , celle des Chancelier Bacon, fe fert aufii
y* Deïri ou V étroit. Fort bien de l'argument tiré de la force
» reprit-il , parce qu'ils font del'ufage, pour difculperce
m à l'abri de la colère de grand homme du reproche
»» Dieu , & appelles à la mi- qu'on lui a fait par rapport
r* féricorde de Jefus-Chrift. n à fon ftile. *» On a reproché
9% Il faifoit allufion au mot m dit-il , au Chancelier Bàcon
Deïri auquel il donnoit la li- » un ftile affefté &rempli
gnification de ceux-ci , dt iri n d'une éloquence faune. Mais
Dei trut'u II demanda enfuite nça été moins le défaut de
comment s'appelloit le Roi h l'Auteur , que celui du temps
de la Province. Il s'appelle h où il vivoit , & fur-tout ce-
Aile , lui dit-on. Alors le » lui d'une Cour qui regardoit
Saint faifant encore allufion nies pointes & les jeux de
à ce mot , s'écria * Alléluia, : h mou comme une preuve

> on doit chanter dans cette w d'efprit &
de fa voir, m On
m contrée les louanges du ne doit donc pas être furpris
m Dieu Créateur, » Quelques que Saint Grégoire , qui rca-
nilTotr

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S. Grégoire le Grand. 689
ment d'envoyé* des Prédicateurs Evangéli-^^55
ques dans Bretagne. Mais comme perfonne
la mars
n'avoit aflfez de courage pour entreprendre
une Million auffi pénible , il s'offrit lui-même
& demanda au Souverain Pontife la permiffion
de partir. A peine Feût-il obtenue , qu'il fe
mit en chemin avec quelques Religieux de
fon Monaftere. Mais lorfque la nouvelle de ion
départ fe fut répandue dans la Ville , le peu-
ple en reflentit une vive douleur. Il s'at-
troupa autour de Benoit qui pafToit pour aller
à TÉglife de Saint Pierre , oc fe mit à crier
tout d'une voix » Saint Pere , qu'avez-vous
:

» fait ? En lai (Tant partir Grégoire • vous avez


» détruit Rome , vous nous avez réduits à l'é-
» tat le plus déplorable , vous avez offenfé S.
» Pierre ». Le Pape étonné de ces cris , en-
voya des Couriers après Grégoire , qui avoit
déjà fait trois journées de chemin, pour l'obliger
de revenir fur fes pas. Il n'y eut que le mérite
de l'obéiflance qui le confola d'un contretemps
aufli fâcheux.
Peu après fon retour , Grégoire fut mis au
nombre des fept Diacres de l'Eglife Romaine ,
qui avoient alors beaucoup de part dans Pad-

niftoit d'ailleurs la beauté du tion & à tourner le cœur vers


génie à rétendue des connoif- Dieu. D'autres Saints ont
ianccs , fc Toit conformé au fait la même chofe. Au refte ,
goût de Ton ficelé dans une fi l'on veut critiquer le Dialo*
conversation particulière 6c gue de Saint Grégoire , on
:

loin de cenfurer fa conduite doit encore moins épargner


nous devons plutôt admirer les lettres de Saint Paulin 6c
fa piété qui lui faifoit tirer de de Sulpice Sévère, que les
toutes les circonftances 8c des connoilTeurs ont toujours tant
mots mente , des alluiions prifées à caufe d: leur élc->
propres à nourrir la dévo- tance.

Xx
,

6$0 S. G&ÈÛOÎ &£ LÉ GttAN D.


- miniftmîoit des affaires ( c). Pelage II, fuc-
mars il.
eeff*ur d « Benoit î. , reftimoit finguliere-
rtrent , &
avoit en lui la phis grande confian-

n cû envo é
ce ^ e" ^c e ' l'engagea à le choifir pour
à Hionftlmi. Renvoyer à Conihlrttinople , vers l'Empereur
nopicenqua- Tibère, en qualité d'Àpocrifiaire , ou de Non-
ApOCri" ce A oftoli< ue I* Sam fot reÇ* de PE"1 -
iuirc
ia
P ï -
î y
* bereur avec toute la«diftinâion poflîble. Mais
la pompe qui l'environnoit ne put rien fur ion
humilité, il continua toujours de vivre en
Moine ; pour mieux oblerver les pieufes
pratiques de cet Etat , if avoit amené avec
Kii quelques perfonnes de la Communauté
dont les exemples puffent ^entretenir fans
cefle dans Pefprit de recueillement de priè- &
re. Pendant le fejour qu'il fit à Conftâmino-
pie , il fe Hâ d'une amitié fort étroite avec S.
Léandre , Evêque de Séville ; &
ce fut à fa
follicitation qu'il écrivit fis Mo toits fut Job 9
divifées en trente-cinq livres. Ceft un Ouvra-
ge qu'on ne fetrroit affez eftimer. Les expli-
cations allégoriques &
morales y font telle-
ment (fiftribuées , qu'on y trouve réunies
comme en un corps , les règles des mœurs &C
les vrais principes de la vie intérieure. C'eft
là que Saint Ifidore , Saint Thomas , fans par-
ler de beaucoup d'autres , ont puifé ces ma-
ximes fublimes que nous admirons dans leurs
Écrits. Le Saint reçut en 583 , une mar-
que bien fenfible de l'efthne qu'avoit pour
hii le fucceffeur de Tibère c'etoit Maurice f
:

( O Selon Jean Diacre 6c


, mais Baronius dit (rue ce fut
les Bénédictins, ce fut Be- Pelage II , fucceffeur de Be-
noit I qui mit Saint Grégoire noit I.
su nombre des Upt Diacres ;

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& CkèôdîAÈ LÉ G&AttD. &>f
Qui par fon mariage avec là fillé du feit
pereur étoit parvenu à l'Empire" Tannée pré- mars 12*
eédente* Il voulut que Grégoire fut le par*
rein de fon fils ainé*
Le Saint fe fit beaucoup d*hoiinéiir paf
la conduite qu'il tint à l'égard d*Eutychius , Pa- H ««tew .

triarche de Coitftantinople (</). Ce Prélat


refpeâable d'ailleurs par l'innocence de fa vie u faine Doc-
& par le titre de ConfefTeur qu'il avoit méri-
té fous Juftinien', tomba dans l'erreur par
rapport aux corps des Bienheureux après la ré-
iurreâion , enfeignant qu'ils ne (eroient plus
palpables , mais qu'ils deviendroient plus fid>
tils que l'air. Il compofa même un Ouvrage
pour foutenir fon fentiment. Saint Grégoire
en fut alarmé ; & pour faire ceffer le feanda-
le , il eut avec le Patriarche , des conférences
particulières fur le fujet en quefHon , une en*
tr'autres ou l'Empereur Tibère fut préfent Uy
démontra clairement par les Ecritures , que
les corps des Saints ne différeroient de ceux
qu'ils avoient eus fur la terre , qu'en ce qili
porte l'empreinte de la mortalité , que dans &
le féjour de la gloire ils feroient palpables ,

(<0 Eutychhn avoit pris roit point été formé de It


avec beaucoup de zele la dé- fubftance de la Sainte Vierge,
renie de la Foi Catholique & qui n'avoit été fujet que
contre les Eut yehiens 6c con- par miracle à la douleur , à
tre l'Empereur JufHnicn qui, ,
la faim & à la foif» Ceux qui
quoiqu'il eût condamné ces donnoient dans cette Héréfie»
Hérétiques , avoit cependant furent appelles incormpticoUs,
adopté une partie de leurs Juftinien s'en déclara le fau-
blafphèmes. Ce Prince pré- teur , ot ternit la gloire qu'il
tendoit en effet que J. C. en s'étoit acquife, en periecutant
s* incarnant avoit pris un les Catholiques , 8c en
corps incorruptible } qui n*a- lant Eutychius.

Xx ij

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692 S. Grégoire le Grand.
- J comme celui de Jefus-Chrift le fut après fc

.
BC Réfurreaion ( 3 ). Eutychius humble do- &
"'cile, ouvrit les yeux à la vérité, donna &
publiquement la rétradation de fon erreur.
Etant tombé malade peu de temps après ,
il

fit fa Profeffion de Foi


en préfence de l'Em-

pereur , qui l'avoit honore d'une vifite , &


dit en prenant fa peau avec fa main » Je
con- :

» feffe que nous reffufciterons tous en cette

» même chair ( e ) ».
Le Pape Pelage rappella notre Saint à Ro-
me en 584. Grégoire emporta avec^ lui de
11 revient
Conftantinople un bras de Saint André , le &
à Rome ,& chef de Saint Luc , dont l'Empereur lui avoit
eft fait Abbé
fa } t pr éfe nt. U mit ces deux Reliques dans fon
na
£ de° s at; Monaftere de
Rome ; &
la première y eft en-

André. core aujourd'hui. Quant à la féconde, elle a


été transférée à l'Eglife de Saint Pierre , où
elle fe garde avec beaucoup de vénération. Le
Saint fe vit avec joie rendu à lui-même. Il ne
déliroit rien tant que de pouvoir s'enfévelir
dans la Solitude pour le refte de fes jours. L'ex-
périence lui avoit appris à combien de dan-
gers on eft expofé dans le monde , ce qu'il &
en coûte de peines pour ne point participer à
fa corruption. Quelque temps après fon re-
tour , il fut élu Abbé du Monaftere de Saint
André , &
il en carda toujours la conduite ,

même lorfqu'il eut été fait Secrétaire du Pa-


pe Le trait fuivant montrera jufqu'à quel
( /). •

î) S. Greg. Moral. L 14. Eiitychii


. ad 6* Aprilm
(
e. 76. T. 1. /». 46s. (/) Fleury a cru que Saint
(e) Eutychius mourut en Grégoire avoit été nomme
j8i. Les Grecs l'ont mis au Abbé avant fon départ pour
nombre des Saints. Voyez Conftantinople ; mais Ceil-
les Bollandiftes t in vitâ Sêniïi lier & pluûeurs autres Au-

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Grégoire le Grand.
=—
S. 693
point il portoit l'exaftitude touchant l'obfer-
vation de la Règle. ^
mars
Un de fes Moines , nommé Jufte , avoit
amaffé trois Pièces d'Or, &
les avoit foigneu-
fement cachées mais il révéla fa faute quand
:

il fe vit au lit de la mort. Grégoire , pour pu-


nir d'une manière exemplaire , cette infradfaon
de la Règle qui profcrivoit l'efprit de proprié-
té , défendit à la Communauté de vifiter le
malade , &
d'aller prier autour de lui , comme
cela fe pratiquoit ordinairement. Il ne lui en-
voya au'un Prêtre pour l'affifter l'exhorter &
à la pénitence. Jufte détefta fa faute & mou-
rut dans de la plus vive com-
les fentiments
ponûion. Le faint Abbé ne s'en tint pas là ;
Ton zele à maintenir la difcipline monaftique ,
lui fit faire ce que*Saint Macaire avoit fait
dans une femblable circonftance. Il ordonna
gue Jufte fut enterré avec les trois pièces d'or
fous un tas de fumier. Mais comme il étoit
mort pénitent , il ne voulut pas qu'il fût pri-
vé des prières de l'Églife , &
il ordonna qu'on

offrît pour lui le faint Sacrifice de la Mefle


durant trente jours confécutift ( g). On lit dans

teurs , ont prouvé qu'il ne le nels pour défunts , le


les
fut qu'après fon retour de troifieme , feptieme , le
le
.cette Ville. trentième , &
quelquefois le
{g) D paroit par la Vie quarantième tour après leur
de Saint Théodofe le Céno- mort. On a donné le nom de
. biarque, par l'Oraifon funè- Grégoriennes aux Méfies que
bre de l'Empereur Valenti- Ton dit trente jours de fuite
nien 9 compofée par Saine pour l'ame de quelque dé-
Ambroife , & par pluûeurs funt , en mémoire de ce que
autres monuments de l'Anti- Saint Grégoire en avoit fait
quité Eccléfiaftique, que dans dire un égal nombre pour le
les premiers fiecles du ChriG- repos du Moine Jufte- Vovez
tiani fme, on offroit des priè- Gavantus & les autres Ru-
res & des facrifice* folcn* bricaires.

AX 11)
,

694 S. Grégoire le Graxi*.


les Ouvrages de Saint Grégoire ( 4 ) , qu'après
la Meffe du trentième jour, Jufte apparut à un
jyj^l
des Frères , & lui apprit qu'il veijoit d'être dé^
livré des peines qu'il avoit endiyéeç depuis ia
mort,
Le Pape Pelage H ayant été enlevé par la
H *ft <Iu pcfte au mois de Janvier de Tannée 590, le
Clergé , le Sénat , & le peuple de Rome jeté*
rent les yeux fur Grégoire pour le rçmpia*
1er. Il n'y eut que le Saint qui s'oppofa à foneiec*
rion ; il le croyoit indigne d'occuper une place
qui le rendroit fuccefleur de S. Pierre. Comme
les Empereurs étoiertf alors dans IVage de con-
firmer les élçftions des Papes , il réiohit d'agir
d la Cour de Conftantinople, afin qu'on n'eut
point d'égard à tout çe qui s'était pafle.
il écrivit donc de la manière la plus preffante

à l'Empereur Maurice qui lui avoit donné des


preuves de fon amitié , pour le conjurer de ne
Kint approuver le choix qu'on avoit fait de
. Il eçrivit auffi pour le même fujet à Jean
Patriarche de Conftantinople , à plufieurs &
fiutre$ personnes puiffantes de la même Ville
qu'il croyoit difpoféçs à le fervir dans cet*
te occafion, Mais Germain Préfet de Ro*
fne , qui fut infermé à temps des pieufes ma-
poçuvres du Saint , les rendit inutiles ; il or-
donna qu'on interceptât fes lettres , çn écri- &
vit une £ l'Empereur en fon Qora , en celui &
du Sénat & du peuple , pour lui demander la
confirmation du Décret d'éledion.
Cependant la Perte continuoit fes ravages
gyçç unp violence qui augmentait de jour eo

m 11 . i > i i . i ! 111

(4) M /t 4, €.jj. T.z.p. 4 6;.

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S. Grégoire ls Grand. 695
jour. Le Concitoyens
Saint eut pitié des fes
Î[ui attendoient avec impatience la réponfe de
Empereur. 0 leur fit un difcours fort tou-
MARS il.

chant ( A) , pour les exhorter à appaifer la juf-


tice de Dieu par de dignes fruits de pénitence. Son zele
nt la
Il ordonna enfuite une proceffion îblennelle. p""
Les Fidèles, divifés en fept choeurs qui avoient
çhacun un Prêtre à leur tête , partirent de fept
Églifes différentes pour fe rendre dans ceUç
de Sainte Marie Majeure , chantant les Lita-
nies le long du chemin. Il y çuf quatre-vingt
{>erfonnes oe la Proceffion qui moururent dç
a Pefte en moins d'une heure* Le Saint prit
4e là occafion d'infifter avec encore plus dç
force fur la néceffité d'avoir recours à la prier
ye & aux gémiffements ( i ). On eût dit, à voir
les foins qu'il fe donnoit durant la concerna?
|ion générale , qu'il n'étoit plus occupé de I4
crainte d'être élevé fur la Chaire dç S, Pierrç.
Il apprit fur ces entrefaites , que tes lettres

avoient été interceptées ; qu'on en avoit écrit


à l'Empereur de toutes contraires, que forç &
éleâion étoit confirmée. Les Gardes placée
Il fuit pour
aux portes de la Ville ne lui permettant pas éviter d'être
4e prendre la fuite , comme il fauroit défiré , focré.

41 fe fit enlever p*r des Marchand* , déj^fê fif


enfermé dans un parçnier d'pfier , puis U alla
fe cacher dans 4es hpis & dap$ des cavernes.
Les Romains , inçonfolablçs <}e fa fuitç , pafle-

• 1 ....... —
(A) Saint Grégoire de remettoit fon glaive dans le
Tours l'a inféré dans fon fourreau. Mais cette circonfc
Hiftoire v 1. 10. c. 1. tance ne fe trouve ni dans
(i) On lit dans quelques Saint Grégoire de Tours , ni
Modernes qu'on vit alors fur dans Bede . ni dans les an-
te fuperbe Maufoléc de l'Em- ciens Auteurs qui ont écrit la
pereur Adrien un ^nge qui Vie de notre Saint.

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696 S. Grégoire le Grand.
&
rent trois jours dans la prière le jeûne, afin

WJW$ 1 2.
de mériter de connoître le lieu de fa retraite.
'
Ils firent enfin exaucés , obtinrent (Tune&
manière miraculeufe , ce qu'ils avoient deman-
dé avec tant d'inftance(t). Grégoire ne crut
pas pouvoir réfifter davantage , comme il le
dit lui-même ( 5 ) ,
lorfqu'il vit la volonté de
Dieu fe manitefter fi vifiblement. Il fe laiiîk
donc mener à Rome , où il fut reçu avec les
plus grandes acclamations , & facré le 3 Sep-
tembre
J90.
On le conduifit , félon la coutu-
me à la Confeffion , c'eft-à-dire , au tom-
,

beau de Saint Pierre , où il fit ime Profcffion


de Foi qui eft parvenue jufqu'à nous. Après
fon inftallation , il écrivit aux Patriarches une
Lettre Synodale , oii fa Profeffion de Foi étoit
renfermée (6). Il y déclaroit qu'il recevoit
les quatre Conciles généraux avec autant de
refpçû que les quatre Évangiles,
La nouvelle de fon exaltation s'étant répan-
due dan$ toute la Chrétienté , on lui écrivit
lui grand nombre de lettres pour l'en félici-
tîr mais il ne répondit gueres que par des
;

larmes à toutes les dcmonftrations de la joie


publique , larmes qui avoient leur fource dans
Son humilité fentiments d'une profonde humilité. Voici ce
qu'il difoit de fa promotîpn dans une lettre à
Théoôifte , foeur de l'Empereur ( 7 ) : » J'ai per-
» du tous les charmes du repos 9 lorfque j'ai &
» paru monter au-dehors y je fuis réellement
» tombé au-dedans Je ne me propofois

( k ) Paul Diacre dit que le I il étoit caché.


Saint fut découvert par une ( ç ) £. /. Ep. it l. 7» fy* 4*
colonne de lumière que Dieu (6) L. i. Ep. */.
fit paroùrc fur l'endroit où ( 7 ) l* J- P- 49'»

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S.Grégoire le Grand. 697
» plus que d'éloigner de images mon efprit les
» des chofes fenfibles, afin de m'appliquer uni- mars iz.
» quement à contempler les biens céleftes. Ne
» défirent &
ne craignant rien en ce monde ,
» je m'imaginois être élevé au-deflus de tous
» les objets terreftres : mais l'orage m'a jeté
» tout à coup dans les alarmes les frayeurs ». &
Il ajoute que l'Empereur en approuvant foit
éleûion , n'a pu lui donner le mérite les &
vertus qui lui feraient nécefTaires. Il difoit encore
dans fa lettre au Patrice Narsès ( 8 ) : » Je
» fuis tellement accablé de douleur , cjue je
» peux à peine parler. Mon efprit eft environné
» d'épaifies ténèbres. Je ne vois rien que de
» trifte. Je ne trouve que dégoût affiiftion &
» dans tout ce qui paroît le plus agréable au
» refte des hommes ». Sa lettre à Saint Léan-
dre n'étoit pas moins touchante : » Je ne oui*
» retenir mes larmes , lui difoit-il , lorlque
» je penfe au port dont on vient de m'arra-
» cher. Mon cœur foupire à la feule vue de
» la terre ferme , à laquelle il ne m'eft plus
» poffible d'aborder. Si vous m'aimez , affiftez-
» moi de vos prières ». Il invitoit auffi fes
autres amis à pleurer avec lui , à s'inté- &
r effer en fa faveur auprès du Ciel.
Jean , Archevêque de Ravenne , ami du &
Saint , lui ayant fait un petit reproche fur ce
qu'il avoit pris la fuite pour éviter FÉpifco- ,
°n
pat , quoique cependant il en fut fi digne ,
p^J^)*
1
• M
nu fous le nom de Paftoral. Il
y développe

( 8 ) £. /. Ep. 6» p. 498.

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.

6<)%S* Grégoire le Grand;


merveilleufement les dangers & les obligations
d'une perfonne chargée de la conduite des
ames : conduite qu'il appelle , après S, Gré-
goire de Nazianze t C4rt des 4ns , & U Scien-
Cet Ouvrage eut tant de répu-
ce des Sciences.
tation dès naiffance f que l'Empereur Mau-
rice en envoya chercher une copie à Rome y
& qu'Anatole t Patriarche d'Antioche , le tra-
duint en grec* U a reçu depuis les plus grands élo-
ges de la part des Conciles &
des P&pes , qui
en pnt fortement recommandé la ieÔure aux
Pafteurs des ames , afin qu'ils s'y confidtraffcnt
tomme dans un miroir (/). Les faints Évêques
d'Angleterre en firent toujours la Règle de leur
conduite , &
le Roi Alfred en donna une tra-
duftton en Langue Saxone,
Grégoire fignala les commencements de
foti Pontificat bar plufieurs fàgcs règlements,
Il réforma enfuite le Chant de l'Églife , afin
4e perfefHonner une fonôion aufli noble que
celle d'oftir au Seigneur dans fon Temple
un tribut continuel de louanges d'aûions de &
grâces (m). U aoumffpit lm-mâme fon Peu-

( /) Voyez le troisième Cet Ordinaire ne diffère point


Concile de Tours , Cam. j. le pour le fonds, de celui dont on
la Préface que Bult«au 9 ini- fe fert aujourd'hui » |es chan-
te a la tgte de ùl traduÉUpn gements qui oqt, été faits i
françoife du Pa floral de Saint certaines prières , font pure-
Grégoire , imprimée en 1 60 8 ment accidentels f 61 ne tou-
( m ) Saint Orégoire ^or- chent point à la fttbftancç,
tna auifile Sacrawcntçini c'eil- Le Pape Qélafe revit la Xi,
à-dîre , le Miflel $t le Rituel turgic en ^90 ; £c fop vérjr
de PÉgliiê Romaine, il eft table Sacramentaire fut pu-
parlé 4909 les Lettres des blié ? Rome par Tfaomafius
Papes Saint Innocent I , Saint en 16S0. U y eft parlé de l'a-
çéipftin 1 , & Saint L&n i
doration de la Crpij au Ven-
d'un Ordinaire de la Méfie , dredi Saint, de la Be né dic-
telle qu'on la difoit à Rome. tion folcnnelle des Saintes

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S. Grégoire le Grand. 699
pie du pain de la parole divine , regardant cette
fonâion comme la plus eflfentielle la plus & |JU
indifpenfable de toutes celles d'un P&fteur des
ames. voit par fes quarante Homélies fur
On
les Évangiles , qu'il çarloït autant de
clarté que de fimplicite , &C qu u ét$nt doue cher la paro-
m
de cette éloquence du cœur infiniment plus le de Dieu,
perfuafive , que celle dont l'art çft principe. k
On doit dire la même chofe de fes vingt-deux
Homélies fur Ézéchiel , qui furent prêçhées à
Rome en 59* ,
pendant que les lombards ôi-

Huiles, des Cérémonies du se Romaine, Dora Ménard


Baptême , de l' in vocation des publia en 1641 le Sasramen-
Saints , & de la vénération taire de Saint Grégoire avec
de leurs Reliques, de l'Eau
bénite , des Menés votives
pour les voyageurs , les ma- Nous allons donner de fui-

lades & les morts , de celles te la notice des autres Ou-


qu'on difoit aux Fêtes des vrages de Saint Grégoire,
Saints, &c. Le Sacrarnen- qui font I°. Les Morales fur
taire de Saint Grégoire ne lob , qui turent composées à
diffère de celui du Pape Gc- Conftantinopte vers l'an f Sa.
lafe , que dans quelques col- Nous avons fait connaître cet
lectes ou prières, Ceft par Ouvrage dans la V#e du Saint»
cet Ouvrage de notre Saint, ainû que U Pafrnd % les
ainii que par fon Antiphonaire Homélus fur le Prophète Ézé-
& fon Réfponfoirt ,
qu'on voit chiel &fur les Évangiles. Le
la conformité qu'il y a entre Paftoral eft dtvife quatrem
l'Office Ecdéfiaftique d'au- parties , dont la première
jourd'hui , &
celui des pre- traite des difpoiiri.ons requî-
miers temps. Les mêmes cé- fes dans un homme appelle
rémonies & les mêmes béné- à l'Épifcopat la féconde
-,

dictions fe trouvent dans les des devoirs d'un Pafteur v la


Conftirutions Apoftoliques & troifieme , de l'in^ruûkm
dans les plus anciennes Li- qu'il doit à fon Troupeau*,
turgies. Ceft dans ces four- la quatrième , de la néceOké
ces que Grabe , Hicks , &c. où U eft de veiller ûir ion
*
ont puifé de quoi former leurs propre cœur.
nouvelles Liturgies qui fe rap- i°. Quatre Livres de DU*
prochent affez de celle qu'on logues entre le Saint & un de

fuit préfentement dans l'Égli- (es diiiiples , nommé Pierre,

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700 5. Grégoire le Gran d.
foîent le fiege de cette Ville. La dix-neuvieme
MARS xi, e ^ ^ort remarquée par les preuves que le
Saint y donne de fon humilité. Il s'applique à
lui-même tout ce que le Prophète dit des Paf-
teurs indolents mercenaires , & déplore &y
amèrement le malheureux état oîi il fe croit
être.
Perfuadé qu'il étoit par fa place , le pere
commun des Pauvres , il pourvoyait à leurs
divers befoins ; &
cela avec tant de douceur
& d'affabilité, qu'il leur épargnoit jufqu'à la

Saint Grégoire y rapporte dans le douzième fiecle.


d'après le témoignage de per- Les Églifes Chrétiennes
fonnes dignes de foi , plusieurs ont toujours foit une eftirae
miracles arrivés de fon temps. tinguliere des Écrits de Saint
Son ftile y eft moins élevé Grégoire. On y trouve de
que dans Tes autres Écrits. quoi confondre pluûeurs Hé-
Voyez la Préface de D. rétiques , & une très-belle
Denys de Sainte Marthe. expofition des vérités & des
3 . Un grand nombre de maximes de l'Évangile. On
Lettres , divifées en quatorze y rencontre quelquefois des
Livres > fans parler d'un Ap- allégories trop recherchées;
mais c'étoit le gout du fie-
Elles forment un Recueil très* cle. LeSaint s'embarranoit
utile fit crès-intereflant. peu des grâces du difeours;
4°. Une excellente exp op- c'eft ce qui fait que fon ftile
tion du Cantique des Canti- n'eil pas toujours pur &
ques. Elle eft furement du correct.
faint Doûeur ( voyez Ceil- Dom
Denys de Sainte Mar-
lier t T. 17. p. 350 ). Il the donna à Paris en 1705
ne paroit pas certain que une bonne Édition des Œu-
Saint Grégoire foit l'Auteur vres de Saint Grégoire , en
du Commentaire fur les fept 4 Vol. in folio. On l'a fùivie
.

Pfeaumes de la Pénitence. dans celle de Vérone ôt dans


0
5 . On a , fous le nom de celle qui parut à Ausbourg
Saint Grégoire, diverfes com- en 1778. On a augmente la
pilations extraites de fes Ou- dernière d'un Ouvrage ano-
vrages y par Claude , Abbé nyme , fort utile , lequel
de Gaffe fon difciple , par cft intitulé ; de formulé Pr*~
Patérius Notaire » par un & latorum.
Moine de Tournai qui vivoit

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S. Grègo ire le Grand. 701
home naturelle à ceux qui reçoivent des aumô-
nés. Il les chériflbit tendrement , & témoi- mars n.
gnoit de la déférence aux plus âgés d'entr^eux
en lés appellantfis Pères. Il fit faire une lifte exa- Son amour
te de tous les indigents , afin cjue tousreflentif- ?° m lc$ Pau
"

fent les effets de fa libéralité ( n ). Il leur


diftribuoit au commencement de chaque mois
du blédu vin , du fromage , des légumes , de
,

la viande , du poiffon , &


de l'huile. Chaque
rue avoit un Officier, chargé d'envoyer tous
les jours de quoi fournir aux néceffités des
malades &
des infirmes. Enfin Grégoire ne
prenoit fes repas , qu'après avoir donné aux
pauvres une partie de ce qu'on lui fervoit pour
la nourriture. Ayant appris qu'un mendiant
étoit mort au coin d'une rue écartée , on dit
ou'il s'abftint plufieurs jours de célébrer les
divins Myfteres dans la crainte de s'être ren-
,

du coupable de négligence à rechercher le nom-


bre des malheureux. Sa charité embraffoit aufli
les Etrangers. Il en afliftoit un grand nombre ,
foit à Rome , foit dans les autres contrées ; &
il avoit ordonné à fon Sacriftain d'en inviter
tous les jours douze à manger à fa table. Sa
tendrefle pour fes Vaflaux &
fes Fermiers étoit
extraordinaire. Il défendit à fes Receveurs de
les vexer ; il leur recommanda même de four-
nir de l'argent à ceux d'entr'eux qui fe trouve-
roient dans le befoin , de leur donner du
temps pour le rendre , &
de leur permettre
de s'acquitter , &
en divers payements.
Dans la pieufe distribution qu'îNît de fes Re-

( n) Ces Liftes etoient appejlces matrUuU par les Anciens.

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762 $. GrèGo îRe lë Granî)*
venus i il n'oublia point les Temples con&crég
au Seigneur; il pourvut plulieurs Eglifes des
MARS i*.
ehofts néceflaires au culte divin , celles fur-
tout oui avoient le plus louffert en Italie des
incarnons des Lombards.
Ces Peuples ayant fait urt très^gfand nom-
fere de Prifonniers , Grégoire s'attendrit fur
leur fort , 6c leur procura la liberté , en payant
leur rançon. Il s'intéreffoit fi vivement à cet-
te bonne oeuvre , &
la trou Voit fi conforme
à Pefprit de Jefus-Chrift , qu'il engagea les
fevêques de Fano 6c de Meffine à y contri-
buer * en vendant les Vafçs fiicrés de leurs
Sa douceur Eglife ( 9 ).
envers les Ce fut paf line fuke de la mêmfc charité
Herét.ques,
^ Gr égdire travailla à la converfion des
Hérétiques ; mais il n'employoit à leur égard
que les voies de la douceur de la perfua-&
fion. il écrivit à l'Evêque de Naples de rece-
voir tous ceux qui voudroient rentrer dans le
fein de PEglife : » Je prends fur moi , difok-
» il , les inconvénients qui pourroieat réfulter
* de leur prompte réconciliation. Une trop
» grande fevérité feroit ici préjudiciable au
» ialut de leur âme »* U n'avoit garde cepen-
dant de fournir matière au triomphe des enne-
mis de PEglife par un excès de complaifance ;
il favoit être ferme à propos ; jamais il ne &
relâcha rien de lafévérité de l'Evangile ( 10).
U montra la plus grande modération envers
les Juifs & les Schématiques d'Iftrie. Pierre
Evêque de Terracine i ayant enlevé aux pre-

(9) I. 6. Ep. jj. X. 7. Ef . (10) l.t. Ep.jf. &c


|

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S. Grégoire le Grand. 703
leur Synagogue , il lui ordonna de la
leur rendre. C'eft qu'il favoit que les voies Mlï . .„
de ne pouvoient manquer d aigrir les ei*
lait
prits. Auffi manda-t-il à Pierre de s'abftenif
de toute violence , &
de n'employer que les
armes de la doucetir &
de la charité , comme
étant lés feules qui fuiTent capables de conque*
rir les cœurs. Il tint la même conduite à l'é-
gard des Juifs de Sardaigne &
de Sicile ( 1 1 )
Malgré ce fonds de douceur , Grégoire étoit
ferme &
inébranlable dans l'occafion ; fon & s»
courage dans le$ épreuves étoit d'autant plus
invincible , qu'il avoit pour principe une con-
fiarice fans borner en la bonté de Dieu. » Vous
» connoiffez mon caraâere , écrivoit-il à Sa-
» binien fon Nonce à Conftantinople , &
» vous lavez que je fôuffre long-temps. Mais
» Iorfque je ne dois plus fouffrir, ma patience
» fe change en force , &
j'affronte gâiment
» tous les dangers ( i i ).
Toutes les vertus du faiftt Pape étoient côu.
_^ou^elj«
tonnées par une humilité protonde, il fe re- preuves de
fon humilité.
gardoitcomme le dernier des hommes , &
comme un miférable pécheur qu'une lâcheté
criminelle empêchoit de marcher dans les
voies de la perfection Son plus ardént
{ 13 )•
défir étoit de fe voir l'objet du mépris public
& d'être le lebut du peuple
Ç 14 ).
Le vit fen-
timent qu'il avoit de fes miferes , lui faifoit
fouhaiter qu'on l'avertît continuellement de fe$
fautes. » Je fuis prêt à écouter tous
f difoit-il ,

(II ) I. ». Ep. jf. I. 7. I ( 1? ) Pr*f. in DiaU


Ep. L. il. Ep. 30.
f. (14) X. 9. Ep. tzu
(il) X.4. Ep. i7. \

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,

704 Grégoire le Grand.


S.
» ceux qui voudront bien me reprendre; & je ne
» compte parmi mes amis , gue les perfonnes
» affez génereufes pour m'indiquer les moyens
» de purifier mon ame de fes iouillures (15).
Il prenoit k dans fes lettres , le titre de Serviteur
des Serviteurs de Dieu : titre qui s'eft changé en
formule pour tous fes SuccefTeurs. Par là
il donnoit à entendre cju'un Supérieur n'ert
autre chofe que le ferviteur de ceux dont il
doit répondre devant Dieu. S'il eût été moins
humble , fon cœur n'auroit pu fe défendre
du poifon de la vaine gloire , au milieu des
louanges &
des applaudiflements qu'il rece-
voit de toutes parts à l'occafion de les Ouvra-
ges. Marinien , Archevêaue de Ravenne , lut
fes Commentaires fur Job aux Fidèles affem-
blés dans PEglife. Le Saint fut vivement affli-
gé de voir au'on fkifoit à fes Ecrits le même
honneur qu'à ceux des Pères ; il manda à Ma-
rinien , que fon livre ne méritoit pas d'être lu
dans PEglife , &
qu'il feroit bien mieux de
choifir les explications des Pfeaumes par Saint
Auguftin ( 16 ). Enfin il étoit tellement mort
à lui-même , que , malgré Paflemblage de tou-
tes les vertus & les aftions les plus éclatantes
il ne trouvoit en fa perfonne que des motifs de
fe confondre &
de s'anéantir en la préfence de
Dieu.
Mais revenons aux Ecrits de Saint Grégoi-
re. On ne conçoit qu'avec peine comment il a
pu en laifTer un fi grand nombre à la poftéri-
té , fur-tout lorfque l'on confidere que durant
les treize années que dura fon Pontificat, il fut

{ M ) L. s- Tp. m. ( 16 ) X. Jx. Ep. 14,

fans

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S. Grégoire le Granv. 705
&ns occupé des moyens de procurer la
ccffe
gloire de Dieu &
de PEglife, par la réforma-
mars
tioades mœurs &
l'édification des Fidèles
de foulager les pauvres , de confoler les affli-
gés, de maintenir la Difcipline Ecdéfiaffique
de travailler à Paccroiffement de la piété de &
la Religion. La furprife fera
encore plus gran-
de , fi l'on fait attention à la foiblefle de fa
fanté à fes maladies continuelles ,
, &
au temps
confidérable que lui emportoit l'exercice de la
prière &
de la contemplation. Son
Après ce que nous avons dit de S. Grégoire l**"" 18
on juge aifément au'il devoit avoir beaucoup * lea
******
d'horreur pour le Me &
le luxe , dont les per-
fonnes conftituées en Dignité ne fe font pas tou-
jours de fcrupule. Il n'y avoh rien dans fon
Palais qui ne refpirât la fimplicité chrétienne.
Sa maifon n'étoit compofée que dïccléfiafti-
cjues ou de Moines diftingués par leur vertu
leur favoir &
leur prudence. Tout fon dome£
tique retraçoit la perfeâion des premiers Dif-
ciples de Jefus-Chrift Mais comme fa vertu
étoit éclairée , il ne fe bornoit pas à étendre
le règne de la vertu ; il s'appliquoit auffi à dif-
fiper les ténèbres de l'ignorance qui traînent
,
ordinairement à leur fuite les plus grands déf-
ordres. De là ce zele avec lequel il encoura-
geoit les talents de ceux qui cultivoient les
Arts & les Sciences , fur-tout dans la Ville de
Rome.
Le trifte état où étoit alors la Chrétienté , de*
mandoit un Pontife tel que Grégoire , c*eft-à-
dire , un homme d'une fainteté confommée
t
d'une capacité fupérieure , &
d'un courage à
toute épreuve. Lorfqu'il monta fur le Saint
Siège , les Églifes d'Orient étoient en proie

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, ,

jo6 S.Gréçoihe ie Grand.


au* dlvifions caufées par les erreurs, de Nef-
«A.:../.
torius
Sir
&
*l'I?«i«^rs*Vi^c
d'Eutychès •: U il K-c r/'iin!r
1$$ réunit.
Danc
Dans
m vrs '
l'9ccident t %
l'Angleterre ét^it encore plongée

. ^ *f — T ' » r •
o — — ^ - ' -

impiétés d'Anus : il y rétabEt la profeffion de


U laipe doûrine. Il délivra l'Afrique de tous les
niaux qu'y caufoient les Donatiiles. Il bannit
le Schiime de l'Iiirie des Provinces voifines, &
&c purgea l'Églife Gallicane du crime de la
Simonie , qui fi$Q# les plus affreux ravages ;
;

cbns cette portion de la Maifon de Dieu. Une


grande partie de l'Italie étant tombée fous la
domination des Lombards ( q ) , qui croient ou
Ariens ou Idolâtres , il repris lpuyent la fu-
reur de ces Peuples , leur arracha des fen- &
tinjents d'humanité en faveur de fon Troupeau*
Il eut même la gloire d'en convertir pluiîeurs,

( o ) Les Lombards , ori- tres de Milan en 5 68 , fous


ginaires de la Scandinavie la conduite de leur Roi AI-
t'établirent d'abord dans la boin. Us étendirent leurs con-
Poméranie. De-là ils paffe- quêtes de proche en proche 9
rent dans la Pannonie , où les & firent trembler Rome mê-
Huns conduits par Attila , s'é- me. On les appella Lombards
toient arrêtés à leur retour à caufe de leurs longues bar-
d'Italie. Narfés , pour fe ven- bes, &nonà caufe de leurs
ger de ce que l'Empereur Juf- longues épées , comme quel-
tin le jeune le rappclloit de
,
ques Auteurs l'ont prétendu.
l'Italie , où il a voit com- On en trouvera les preuves
mandé les Armées avec beau- dans M. Jofeph Afiemani ,
coup de di(Hnâion durant qui cite le témoignage exprès
Tcfpace de feize ans , invita de Paul Diacre , qui étoit
res Lombards à y entrer. Ces Lombard , celui de Conftan-
Peuples ne tardèrent pas à tin Porphyrogenete f Vo*
féconder fon reffentiment. yez M. Jofeph Affémani
Ils laqTerenfla Pannonie aux Ital. Scriptor. T. f« c. pp. f/f }
fcuns, vinrent fondre fur Muratori , Hifl. d'Italie , 6V.
lUuU^, *
fc rendirent maî-

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S. QàÊGOtRÈ LÉGàAttD. 707
8i fûMOitt leur Roî AgHùlf qui fit une abjura-
tion folennelle de PAriahîfme.
MARS il.
Romain , Exarque ou Gouverneur d'Italie ,
s'empara en 592, de Péroufe deplufieurs &
S aconduî-
autres Villes , au iriépris du Traité qu'il avoit te durant les
feit avec les Lombards ( 17 ). Mais il ne jouit guerres des
pas long-temps du fruit de fa mauvaife foi. Le* Lombards '

Barbares , qui lui étoient fupérieurs en forces


ffe mirent en campagne , reprirent les Places
£onquifes , ravagèrent tout le pays , s'avan- &
cèrent jufqu'autf portes de Rome , dont ils fi-
rent lé Siège. Saint Grégoire mit tout en œu-
vre pour confoler &
fecourir fon peuple ; ÔC
à force dé prières &£ de préfents , il vint à
Bout d'éloigner Penftemi. Il reprit généreufe-
mfcnt Romain de l'infraôion du Traité , qui
avoit' été fuivie de tant de maux. Mais l'effet
de ce j ufte reproché fut d'attirer au Saint l'in-
digriatiôn de l'Exarque' Ori & de l'Empéreur.
fevoit d'ailleurs qu'il défapprouvoit condui- la'

te que les-Officiers de l'Empire tenoient en Ita-


fie. EH comment fon zele n'eût - il pas écla-
!

té à- la vue de toutes les horreurs dont il étoit


lè témoin ? Les Gôuvernéurs violoient les loixî
le$ plus facrées de la Religion
!
' de' ITiuma- &
riite. Les vexations &
les injuftices étoient
montéés'à un point, que les Sujets de l'Empiré
fe trouvoierit moins malheureux fous le ioug
dés Barbares , que fous la domination de leurs
maîtres légitimes. Outre que les Impôts étoient
ex'ceffifs ,-on les levoit avec une cruauté inouie ;
eii forte que plufiéurs'pauvres de Corfe furent

( 17 ) Paul Diacre , de . Saint Grégoire , X. s. fy. +f*


G<Jl lonsàbnnk & 4% + i.l

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708 S. Grégoire le Grand.
obligés pour les payer f de vendre leurs pro-
pres enfants. De pareilles oppreffions crioienr
vengeance , &
Saint Grégoire étoit défolé de
ne pouvoir y apporter de remède. Il s'en plai-
gnit dans une lettre à l'Impératrice Conftanti-
ne ( 1 8 ) , qu'il conjuroit de la manière la plus
touchante 9 de s'intérefler en faveur de tant
d'infortunés. Il la prioit aufli de repréfenter
fortement à l'Empereur qu'il répondroit à Dieu
de la conduite de fes Officiers , s'il ne les re-
tenoit pas dans les bornes du devoir.
Dans la même année 591, l'Empereur Mau-
rice publia un Edit par lequel il étoit défendu
à tous ceux qui auroient exercé des Charges
publiques , d'entrer dans le Ckrgé , avant
d'avoir rendu compte de leur adminiftration ,
& à tous ceux qui avoient pris quelque enga-
gement dans la Milice , d'embrafter la vie mo-
naftique. Ces derniers étoient aifés à connoî-
tre , parce qu'ils portoient une marque impri-
mée fur la main. L'Edit fut envoyé aux Pa-
triarches , afin que chacun d'eux le notifiât
aux Laïques de fon diftriâ. S. Grégoire étoit
malade quand il le reçut. Ceci l'obligea de
différer quelque temps à écrire à l'Empereur 9
pour lui reçréfenter les inconvénients de fa
nouvelle Loi. Sa lettre au Prince fut tout à la
ibis ferme &
refpeôueufe ( 19 ). Il y approu-
vait la première panie de rEdit , concernant
les perfonnes qui avoient exercé des Charges
publiques. Il étoit jufte en effet qu'elles ren-
diflent compte de leur adpûniftration , avaût
de changer d'état , d'autant plus qu'elles pou-

( 18 ) L. /. Ep. 4<. (19) 1. + Ef. , #.

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S. Grégoire le Grand. 709
voient ne s'engager dans la Cléricarure , que
par des vues profanes , & même criminelles. 1 2.
Quant aux gens de guerre , qui communé-
ment ont grand befoin de pénitence , le Saint
penfoit que c'étoit leur fermer l'entrée du
Ciel , que de leur fermer celle des Monafte-
res, l'expérience prouvant que pluiieurs ne
peuvent fe fauver, à moins qu'ils ne faffent
un divorce éternel avec le monde. Il conju-
rait donc l'Empereur de modérer la rigueur
de fa Loi , & de ne pas trouver mauvais qu'on
ÎmBÊt de la Milice du fiecle dans celle de
efus-Chrift. Ce n'étoit pas qu'il prétendit qu'on
dût recevoir indifféremment tout le monde à
la Profeflion monaftique. Il vouloit qu'on
examinât auparavant les difpofitions &les mo-
tifs de ceux qui fe préfentoient ; & fi après
cette précaution , Dieu fembloit les appeller
à la pénitence , U jugeoit qu'on ne pouvoit
plus les empêcher d y entrer , fans réfifter
aux ordres du Ciel.
p
Quoioue Saint Grégoire n'approuvât pas
en tout l'Édit du Prince , il ne faifTa pas de
l'envoyer conformément à l'ordre qu'il enavoit
reçu : » Par-là , difoit-il à Maurice , je me fuis
» acquitté d'un double devoir ; j'ai obéi à FEm-
» pereur en publiant fon Édit ; &j'ai rempli

» mon miniftere en repréfentant que cet Édit


« ne s'accordoit pas avec les intérêts de la
» gloire de Dieu ». L'Empereur , déjà préve-
nu contre le faint Pontife , fut piqué de la
généreufe liberté avec laquelle il lui avoit par*
lé de fon Ordonnance ; & lui donna en plu-
iieurs occafions des marques de fon reffenti-
ment. La vérité fe fit pourtant jour à la fin ;
& Maurice modéra la rigueur de fa Loi , en

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,,,

710 S. Grégoire le G rax p.


permettant de recevoir les Soldats à la ?r&-
mars n.feffion monaftique après un Noviciat de trois
ans. Le Saint témoigna la joie qij'il en f^f-
fentoit dans line lettre adfeffée aux JÉvéques
de l'Empire.
Ce grand Pape étoit
bien éloigné de penfcr
Son ref-jcomme les Novateurs fur le refpeÛ dû à la
cs Croix
, aux Reliques , aux Images des Saints.
JjJ W ous allons en donner d/es
J

Remues- ^ prçuves. 11 enyoyîi


à rimpératrice Conftantine un voile (p ) , qui
avoit touché les Corps des Saints Apôtres ,
Taffurant qu'il s'étoit opéré* plufieurs miracles
{>ar la vertu de fcmblables Reliques ( ip ). Il
ui prqmit
aufli de lui envoyer dç la limaille
des chaînes de Saint Paul , dont il fait men-
tion dans plufieurs endroits de fes lettres. Va
Juif de Cagliari , qui étoit fort riche, ayant
embralTé le Chriftianifme , s'empara de la Syr
nagogue de la Ville pour en faire unç Egliie
& y mit une Croix, avec une Image de la a^inte
Vierge. Les autres Juifs s'en étant plaints , Gré-
goire ordonna ( *i ) la reiftitution de la Syna-
gogue , mais feulement après qu'on en «lurpit '

tranfporté ailleurs l'Image &


la Çrqix , aveç
tout le refpeft qui leur étoit dû
(q j. Il en-
voyq au jeune Roi des LonibprfU , fils

Théodelinde ,une petite Croix <fens laquelle
étoit enchaffé un morceau 4e la vrai? Ççoix
afin qu'il la portât à fon cou paj dévotion
(21). Un faint Hermitç,' nommé Secondin,
"qui demeuroit dans le voifinage de Ravçxyie

par efl ventrationc , imagine &


(10) L. 4. Ep. 30, crues.L. 9. Ep. 6. p. 930.
( 21 ) L. 9. Ep. 6. (22) L.ij.Ep. tz.p.izjo*
(?) Sublatd vùndè, quâ

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S. Grégoire leCran d. yxi
& qui étoit parrein du Prince dont nous ve-
nons de parler, lui ayant demandé quelques
Tableaux aui refpréfentaflent des fujets de pié-
MARS 12.

té , il lui répondit en ces termes : » Nous vous


» avons envoyé deux toiles où vous trouve*
n rez une Croix , les Images de Dieu notre
h Sauveur , de Marie la fainte Mere de Dieu

» nous vous avons envoyé àufli une clef


» qui a été appliqué* fur le corps très-faint de
» Pierre , le Prince des Apôtres , afin qu'elle vous
» ferve de défenfe contre l'ennemi (/*)•» Séré-
nus , Evêque de Marfeille , avoit
mis en pie-
ces quelques Images des Saints auxquelles des
perfonnes groffieres &
nouvellement conver*
ties du Paganifme > rendoient un culte fuperf»
titieux. Grégoire lui écrivit pour le louer
de foh zele à réprimer les abus , mais il le
blâma en même temps d'avoir brifé le»
Images (13^.
Sa follicitude ^aftorale embraflbit toutes
les Églifes ( s ) ; &
cela fur le fondement que

(r) Ces paroles font ci- L. 4. Ep, 14 ).Les Centu^


tées par Paul Diacre , par riateurS de Magdebourd v
le Concile de Rome , ( Conc. Heylin , &c. difent que le
T. 6. p. 1462 ) , & dam la Saint abrogea le décret qu'il
lettré que le Pape Adrien aVôit pôrté pour obliger tous*
écrivit à Charlemagne pour les Clercs .à la continence 1
la défenfe des faintes fanages. & ils le difent , fondés fur
( L. 11. Ep, 13.
23 ) une prétendue lettre d'Ulda-
{s) Saint Grégoire fe dé- ric au Pape Nicolas , où Ton
clara en toute occation pour voit que Saint Grégoire avoit
le Célibat des Clercs ; il y trouvé un très-grand nom-
aflujettit même les Soudia- bre de têtes d'enfants dans
cres , qui jufques-là n'avoient un Vivier , près d*un Mo-
été comptés que parmi les naftere. Mais c'eft là un
Clercs engagés dans les Or- c )nte ridicule » tels que ceux
dres mineurs ( L. 1. Ep. 44. qu'on voit fouvent dans les

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yn S. Grégoire le GrakdI m

le foin des Égliies de tout le monde chrétien


mars ii a été confié à Saint Pierre &
à fes fucceffeurs
fur le Siège de Rome
( 14 )• Auffi fa primatie
étoit-elle reconnue jufques dans les Patriar-
chats d'Orient. Un Moine f fituflement accufé
de Monothélifme , ayant été battu par Pordre
de Jean le Jeûneur y Patriarche de Conftanrino-
ple, en appella à Saint Grégoire du Jugement
rendu contre lui. Le Saint inftruit de TaflEai-
re , caffa la Sentence du Patriarche , lui fit u-
ne févere réprimande , l'exhorta à renvoyer
un favori qui abufoit de fa confiance , à de* &
mander pardon à Dieu.» Si vous refufex , lui
» difoit-il, de garderies Canons de PEgtife , je
» ne fais qui vous êtes ( 2* ). » Il renvoya le
Moine abious , &
le rétaolit dans tous fes
droits , après avoir reçu fa Profeffion de Foi*
U renvoya auffi abfous Jean Prêtre de Calcé-
doine , contre lequel on avoit prononcé une
injuite Sentence, au nom de Jean& jeûneur.
Ce Patriarche avoit pris le titre de Patriar-
Ses démêlés ch e Œcuménique
, ou univerfel dès Tan 589 9
*rtc 4
dans un Concile tenu à Conftantinople ; ce
qui porta le Pape Pélaçe à cafler les Aâes de
cette Aflemblée. Ce titre parut d'autant plus
choquant , que le terme d' Œcuménique avoit

écrits des Proteftants. La par-tout 3 répréfenre la Loi


lettredUldaric eft une pie- qui oblige les Clercs au Cé-
ce fuppofée , &
qui , par libat, comme une Loi an-
conséquent , ne mérite au- cienne 8c inviolable. Voyez
cune Uldaric n'a
créance. Baronius , 0c la Vie de Saine
été contemporaind'aucun Grégoire par le P. de Sainte
Pape qui ait porté le nom Marthe.
de Nicolas. Qu'on life d'ail- ( 24) L. j. Ep. J9. L. f. Ep»
leurs les Lettres de Saint 1 1. L. 7. Ep. IÇ. L. fm Ef. XOm
Grégoire» &
l'on y verra que (15 ) L t.Ep.ij* 16 % #7.

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S.Grecoire le Granb.*jii
été jufques-là confacré pour défigner un Con-
cile général qui reprelentoit toute FÉglife. mars i».
Celui donc qui le prenoit donnoit à entendre
qu'il s'attribuoit à lui feul PEpifcopat , qu'il &
ne regardoit les autres Evêques que comme
fes inférieurs & fes Vicaires. Saint Grégoire
lui donna cette interprétation, comme teL &
le condamna ( 26 ). 11 eft vrai que le Patriar-
che ne lui prêtoit pas une lignification fi éten-
due , mais il étoit toujours condamnable de
^attribuer un titre nouveau faltueux* Le &
Saint lui en fit parler par fon Nonce à Conftan-
tinople , &
lui écrivit même plufieurs lettres à
ce fujet. Ces moyens ne lui ayant pas réuifi , il
employa la force de l'exemple , ne prit que &
des titres (impies &
conformes aux règles de
l'humilité chrétienne. Une telle conduite ajou-
ta encore à la haute idée qu'on avoit conçu
de lui &
de fon éminente fainteté. De toutes
parts les Fidèles s'adreffoient à lui , comme à
un oracle , pour avoir l'éclairciflement de leurs
doutes & la folution de leurs difficultés.
*
rcponft
Entre les perfonnes qui le confulterent fur a
leurs peines intérieures , fut une Dame nom- fendes,
mée Grégoria , attachée à l'Impératrice. Elle
étoit dévorée de fcrupules j>ar rapport à fes
péchés , quoiqu'elle en eût fait une Confeffion
exaûe & fincere. Elle écrivit donc au Saint
pour lui expofer l'état de fon ame , lui &
manda que fes inquiétudes ne prendroient fin
que quand il lui auroit afiuré qu'il favoit par
révélation , cjue tous fes péchés lui étoient
remis. Grégoire lui fit une reponfe , telle qu'on

( 26 ) L. 11. Ep. %S. p. uSo .

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7M S. Grégoire lè Grand.
- s de voit Pattendre d'un, homme confommé dans
MARS 11 k connoiffance des voies de Dieu. » Vous
"
» me demandez , difoit-il ( 17 ) , une chofe
» qui eft tout à la fois difficile &
inutile ; diffici-
» le, parce que je fuis indigne d'avoir des révéla-
it tions; inutile, parce que vous ne devez point

» être (ans inquiétude de vos péchés * jusqu'à


» la fin de votre vie , c'elt-à-dire , jufqu'au
» temps où vous ne pourrez plus les pleurer.
» Vous devez toujours trembler pour eux, &
» les expier fans cefle par vos larmes. Paul
» avoit été enlevé jufqu au troifieme Ciel , il
» craignoit cependant d'être du nombre des
» reprouvés ••••••••• La fécurité eft la mère de
» la négligence*
H envoyé ré rC ëcu * a
? P «
59* > « ^
des Miflion- ^« , f
avoit forme depuis long-temps , aen-
oairesenAn- voyer en Angleterre des Prédicateurs évangé-
*Jctcw - liques. Il mit à la tête de cette Miflion , Au-
gulKn , Prieur du Monaftere de Saint André-
Il ne pouvoit faire un meilleur choix, comme

l'événement le montra. Les converfions furent


innombrables en Angleterre. Mais nous n'en-
trons point ici dans le détail de toutes les
merveilles qui accompagnèrent les travaux
apoftoliques des faints Mimonnaires : nous nous
réfervons à en parler pins au long dans la Vie
de Saint Auguftm.
Cependant la fanté de Saint Grégoire s'af-
foibliflbit de jour en jour. Cela ne l'empêchoit
pas de travailler de toutes fes forces à procu^
rer la gloire de Dieu , &
à ménager urie paix
folide avec les Lombards. Mais il eut bi«H

( 27 ) I. 7. Ep. 2f.

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S. Grégoire le Grax d. 715
tôt la douleur de voir l'Empire livré à la
conrufion , &
devenir la proie d'un ufurpateur. M4J)C .„
L Empereur Maurice avoit été oblige de
Aire une paix honteufe avec les Abares , Peu-
ple originaire de Scythie , alors ét^f)Ii fur &
les bords du Danube ( 18). Les vainqueurs
lui ayant offert les prisonniers qu'ils avoient
faits , pour une rançon très-modique , H ne
rougit pas de la leur refluer. Ce refus inhumain
mit les Barbares en fureur, leur infpl- &
ra l'affreux deflein de faire pafler tous les pri-
fonniers au fil de l'épée , ce qu'ils exécutèrent.
L'Empereur déchiré de remords , diftribua
d'abondantes aumônes , 6c fit prier dans tou-
tes les Eglifes pour obtenir le pardon de fon
crime mais il ne fe corrigea point de l'ava-
;

rice qui en avoit été la câufe le principe.


e nterTpho-
&
Ce fut en 601 qu'il tomba dans le précipice cas meur- ,

u'il creufoit depuis long-temps fous fes pieds. **** & fuc
-

1L avoit ordonné à fon Armée de prendre


dc

fes quartiers d'hyver dans le pays ennemi , &


d'y fubfuter du feul pillage , fan$ recevoir
la paie ordinaire. Les Troupes fe révoltè-
rent d'être traitées fi durement, mirent 4 leur
tête un Officier nommé Phoca$ , & s'avan-
cèrent vers Conftantinople cou- , oh elles le-

ronnèrent Empereur. Maurice prit la faite ;


mais il fut arrêté par les rebelles avec fa fa-
mille. On égorgea fes enrarçts en fa présence

le fien à la place , il l'en reprit Rte


& montra fon fils aux Bourreaux. Pendant

( iS ) Théophane % Chranogr.

Digitized
,

7i6 S. Grégoire le Gran n.


cet horrible maflacre , il recueilloit tout ce
que Religion peut infpirer de force
la de &
courage» Il répéta plufieurs fois ces paroles
du Prophète : Vous êtes jufU> Seigneur , vi- &
trejugement efi plein d'équité ( 19 ). Enfin
après avoir reçu autant de coups mortels au'3
en avoit vu porter à fes enfants , il s'inclina
fous la main du Bourreau , eut la tête &
tranchée. U avoit régné vingt ans trois &
mois. Sa femme Conftantine fes trois filles &
furent aufli immolées à la cruauté du Tyran.
On a dit du bien &
du mal de l'Empereur
Maurice , parce qu'il ternit par de grands Vi-
ces l'éclat des vertus qu'il avoit*
Phocas ne fut pas plutôt monté fur le trô-
ne, qu'il envoya à Rome fon portrait &
celui de fa femme Léontia. Ils y furent re-
çus tous deux avec les acclamations ordinai-
res. Saint Grégoire crut que les circonilan-
ces lui rendoient permis un compliment de
félicitation. Il écrivit donc au nouvel Empe-
reur ( 30) une lettre où , après quelques fé-
licitations fur fon avènement à la Couronne,
il Fexhortoit à mettre fin aux injuftices , à &
faire régner parmi fes Sujets la liberté la &
paix. Il n'avoit garde d'approuver la condui-
te que l'ufurpateur avoit tenue; il le reear-
doit au contraire comme un autre Jéhu , dont
Dieu fe fervoit pour punir les péchés de fon
peuple. Le bien général de l'Italie exigeoit
qu'il ménageât Phocas , qu'il n'aigrît pas &
un homme revêtu de la fouveraine puiflânee.
Quant aux expreffions de fit lettre qui atta-

(19) Pf. it$. ($0 )£. tj.Ep. p , jî.

Digitized by Google
S. Grégoire le Grand. 717
quent la mémoire de Maurice , elles ne tom-
bent que fur des chofes vraiment condamna-
MARS XX
bles. On doit d'ailleurs les regarder comme
un avis tacite donné à Phocas de ne pas corn*
mettre les fautes reprochées à fon Prédé-
ceiTeur ( t ).
Sa mort.
Le de la Vie de Saint Grégoire ne
refte
fut plus qu'un tiflu d'infirmités , qu'une appli-
cation continuelle aux affaires de l'Eglife aug-
mentoit encore. Il mourut le 1 1 Mars 604 f
vers la foixante-quatrieme année de fon âge.
Il avoit fiégé treize ans , fix mois dix jours. &
Avant fa mort , il donna plufieurs fonds de
terre pour entretenir le luminaire de l'Eglife
de Saint Paul ( «). On a confervé long-temps
fon Pallium , fa Ceinture , &
le Réu^uaire
qu'il portoit à fon cou (*). Sa mémoire eft

(t) On doit raifonner des I même manière à régard de


compliments que Saint] Gré- Phocas, fi la mort ne l'eût
goire fit à la Reine Brune- enlevé.
haut , comme de ceux qu'il N. B. Brunehaut n'étoit
fit à Phocas. Le Lord Bo- pas telle que quelques Écri-
lingbroke a donc eu tort d'en vains l'ont repréfentée. Les
être choqué. P'ailleurs ne plus habiles Critiques fefont
doit-on pas du refpe& aux déclarés fes Apologiftes &
Souverains , quels qu'ils puif- fes Panégyriftes. Voyez l'Ab-
fcnt être } Notre Saint ne bé Velly
, T. i. tel.
flatta jamais leurs vices mais
-,
(11) On lit encore fur un
il crut qu'il pouvoit tenir à marbre de cette Églifel'A&e
leur égard la conduite que de Donation , qui eft daté
Saint Paul avoit tenue envers du 25* Janvier 604.
Agrippa & Feftus. On le vit ( * ) Le portrait de Saint
toujours armé de zele , quand Grégoire , ainfi que ceux de
il y avoit moyen d'arrêter le fon pere &
de fa mère, fe
cours des défordres. U s'op- voyoient encore au Monaf-
pofa toujours fortement aux tere de Saint André, du
in} mies projets de l'Empe- temps de Jean Diacre qui les
reur Maurice ; & Ton ne peut décrit exa&ement. Les An-
douter qu'il n'eût agi de la tiquaires liront avec plaifij?

<

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7i8 S. Grégoire le Gran d.
tn grande vénération parmi les Grecs & le*

Latins. On garda Tes Reliques dans FEglife du


Vatican*
Le Concile de Clif ou Cloveshove , tenu
en jjtf > fous l'Archevêque Cuthbert , ordon-
na à tous les Monafteres d'Angleterre de fêter
le jour auquel PEglife honore Saint Grégoire.
La Fête devint d'obligation pour tout le Ro-
yaume en vertu d'une Ordonnance portée en
122a par le Concile d'Oxford ; cette Or- &
donnance a été obfervée iufqu'à la prétendue
Réforme

( r> *

Un
Supérieur qui $ l'humilité ta charité &
de Saint Grégoire le Grand , regarde com-
me le ferviteur de tOQP ceux* dont conduite &
hiia été confiée ; St dès qtfil s'agit de pro-

' ' •

ies note* curieufes d'Ange 'ItPajfîonariumSarttionrtn, &C.


Hocca &
des Bénédictins Voyez le Catalogue des MSS.
tant fur les portraits dont Saxons par Mi Wanley , à la
nous venons4 de parler , que fin du Thtfanrus dtt* Docteur
fur les Donations faites à Hlckes y p. 172;
l Eglife par le Saint. On gardoit aiilri autrefois
(y) Saint Grégoire avoir dans ? le Monaftere de Can-
formé une petite Bibhoth* totbérjrdes Otnefnent* pré-
que pour Saint Auguftifi dems des Vatês , des Reli-
Apôtre de l'Angleterre; & qtfesY 61 un' Mlrum que
ce dernier la* mie dans £bn Saint Grégoire a Voit don-
Monaftere de CantorbérV* Il nés à Saint' Auguftin. On
en refte encore un Livré des voit encore dans la Biblio-
Évangiles , qui etV dus la
1
thèque Harléienne à Londres
Bibliothèque Bodléienhe à l'Inventaire MS de tous ces
Londres. 11 y en a aufli un Effets , qui avoit été fait par
Exemplaire dans la Biblio- Thomas Elmham, fous le règne
thèque de Corpus Chrifit à d'Henri V. Il a été publié par
Cambridge. Les autres Livres la favante Dame Eîftob , à la
que Saint Grégoire a voit don- tin d'un Panégyrique de Saint
nes à Saint Auguftin , étoient Grégoire en Langue S axone.
des Pfeautiers , le J\»jW

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S. Grégoire leGrand.jiç
curer le bien fpirituel du moindre d'entr'eux ,
il n'y a point de facrifice qu'il ne foi* prêt à

faire. Il s'interdit cette hauteur impérieufe cpu


aliène les efprits, &
n'arrache qu'une obeif-
fance forcée. Ses ordres ne font que des priè-
res ; ou fi quelquefois il eft obligé de fe fer-
vir de fon autorité , il ne le fait qu'avec une
feçrete répugnance , & que pour ne pas
trahir fon devoir. Il n'ufe de fes droits , qu'au-
tant qu'il y eft contraint par la gloire de Dieu
& le ialut du prochain. Alors même il fe met
en efprit au-deflpus de fe? inférieurs , & ne
fe donne que la dernière place parmi les hom-
mes. Il a fans celle devant les yeux l'exemple
des Apôtres , &
règle fur leur conduite celle
qu'il tient dans le gouvernement des ames»
Lorfqu'il pourroit commander , il fe conten-
te de dire avec Saint Paul : Je vous en conju-
re par Camitié que vous avt[ pour moi , par Us
entrailles , par la douceur de Jtfus-Chrijl ; faites
ceci ,
fi vous m'aime^ H n'entreprend jamais la
correâion des pécheurs , fans avoir médité
ces paroles du même Apôtre à fon difciplo
Timothée : Si quelqu'un tombe ^faites-lui con-
noitre fa faute, vous qui êtes urt hommefpirituel %
vous fouvenant que vous pouve[ tomber dans les
mêmes pèches , & dans, des pêches plus griefs cn~
core, Toutes fes expreffions portent l'emprein-
te de la plus vive tendrefle* Mes petits enfants r
avec Saint Jean,,./? vous aimt^ Jefus-Chrift r
dit-i 1
vous ferei ce que je vous recommande ; je vous en,
conjure par Jefus-C/tri/l notre bon maître. Un Su-
périeur , qui ,*comme Saint Grégoire , fe con-
duira d'apre* les maximes que nous venons
d'expofer , gagnera infailliblement les cœurs
?
détruira le règne du péché, &
établira celiu
7zo 5t Max j mi l/en 3 M.
de la vertu. Puiffent ces maximes être adop-
tées par tous ceux qui font prépofés à
la tête
2
*
des Fidèles !

MÊME JOUR.
LE
SAINT MAXIMILIEN,
Martyr a Thébeste,
en Numidie.

IVf Aximilien étoit fils d'un Soldat


Romain , nommé Viôor , & conféquemment
obligé par les Loix de Cuivre la profeffion de
,

fon pere. Mais ilde fervir, pour le dé-


refiifa

livrer des tentations auxquelles la Foi des


Difciples de Jefus-Chrilt etoit alors expofée
dans les Armées. Les Officiers chargés de l'en-
rôlement des nouveaux Soldats , l'ayant con-
duit devant le Proconful , il y Ait mefuré fé-
lon Pufage , &
trouvé de la taille requife. On
voulut enfuite le marquer à la main &c lui
mettre le Collier de plomb , fur lequel le nom
& la devife du Prince étoient gravés. » Je
» ne m'enrôlerai point , dit Maximilien , &
» je ne recevrai ni la marque , ni le Col-
» lier. Le Dieu que je fers a pris mon nom
» & je ne puis plus m'engage r à un autre.
» Je fuis Soldat de Jefus-Chrift ; & je ne veux
» point être d'une profeffion où je ferois ex-
» pofé à offenfer mon Dieu. Sf l'on m'ôte la
» vie ,
je quitterai la terre , mais mon ame
» vivra dans le Ciel avec Jefus- Chrift mon
» bon maître. » Le Proconiul irrité de fa fer-
me te

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S AT AT T P JkU L 3 E.
mçté lecondamna à perdre la tête,
; Comme on le menoif au fupplice, il exhor- MARS
12.
toit les Chrétiens à demeurer fidèles
au
Seigneur , & à prier conflamment jufqu'à ce
qu'ils euffent obtenu une Couronne lembla-
ble à celle qu'il alloit recevoir. S'étant en-
fuite tourné vers fon pere il lui dit avec
,
un
vifage gai : » Je vous prie de donner à celui
» quj me coupera la tête , l'habit que vous
» m'aviez fait faire pour aller à l'Armée. Puif-
» fiez-vous être bientôt réuni dans le Ciel £
» votre fils , pour y louer &
y bénir éter-
» nellement avec lui le Dieu de gloire ». En
achevant ces mots , il reçut le coup qui ter-
mina fa Vie. Il n'étoit âgé que de vingt-un
ans , trois mois &
dix-huit jours. Son martyre
arriva en 296. Voyez fes Aâes dans D.
Ruinait.

SAINT PAUL,'
Premier Évêquë de Léon.*
»
»

en Bretagne* }

Paul foftoit d'une illuAre famille du pays


de Cornouaille dans la grande Bretagne» Il
,

pafla les premières années de fa vie Tous la


conduite de Saint Iltut , auquel on avoit con-
fié fon éducation , ainû que celle de Saint
Samfon fon coufin. U quitta enfuite fon Mo-
naflere , de l'avis dé Saint Iltut, fe retint &
dans un Défert, oîi il retraça la Vie des pre-
„miers Anachorètes. Quelque temps après.
Zz

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7*2 Saint P a u i , Ë.
il du pays de Cornouaîlle ,
fortit paffa &
dansPArmorique , ou petite Bretagne. II
u
s'artêta dans une Me , fituée vers la côte
quliabitoient les Ofifmiens , Peuple barbare
& plongé dans les ténèbres de Hilolâtrie. Là 9
caché aux yeux des hommes 9 il menoit une
vie vraiment angélique. Du pain de Peau &
fàifbient fa nourriture ordinaire ; il
y ajoiitoit
un peu de poiflbn les jours de grandes Fêtes.
Touché du déplorable aveuglement des
Ofifmiens , il pana fur le continent pour
leur prêcher la Foi. Sa Miffion eut le plus
heureux fuccès. Withur Comte ou Gouver-
neur de toute la côte, en écrivit au Roi
Childebert , &
fit fi bien , que Paul fut ordonné

Evêque. Le Saint mit tout en œuvre pour

3
nouvel Evêque ne penfà plus qu'à remplir
dignement les fondions de fon mini/lere ; &
Dic\i bénit tellement fes travaux , qu'il ex-
tirpa de fon Diocefe toutes les fuperlHtions
, du Paganifme. Withur lui ayant donné une
maifon qu'il avoit dans rifle de Bas, il en
forma un Monaftere où il mit des Moines
fervents qui 1 avoient fuivi daçs l'Armorique.
Comme il foupiroit avec ardeur après b
Solitude , il fe déchargea de FEpifcopat fur
un de fës difciples , ahn de paffer le refte de
fes joursdans la Retraite. Il mourut le n
Mars vers Pan 579. U étoit âgé de près de
,

cent ans (*). Ses Reliques furent transfé»

( a ) |
l'Armorique où il s arrêta d'à-
Saint Paul étoit Prêtre
lorfqu'U quitta U
Grande [bord, eft appcllée en Utia
Bretagne. La petite Ida 4c] MvfwU*. On croit qu« c'CÉ)

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SÀ i xt Paut, Ëè
tées à FléUry 6U
Saint Beiioit-fur-Loiré , du-
rant les Incùrfiôns des Normands* Mais elles UAM %U
ont été depuis difperfées par les CalvinifieSi
Saint Paul fîxâ fdn Sicgfc à Léon , Ville des
Ofifmiens , laquelle a pris fon nom* L'anciéâ
Bréviaire du Diocefe marque fa fête au iq
d'Oâobre * qui fut apparemment le jour de U
Tranflation de fes Reliques ; car elle eft mar>
ouée au 1 1 de Mars dans l'ancien Bréviaire
de Nantes , Sa dans ceux de plufieurs autr etf
Piocefes»
Voyez le P. le Côiiite , les Ëolkriclifte* *
& Doirç Lobineau , qui a donné la Vie du
Saint d'après fes Aâes , compofés par un
Moine <œ Fleur/ , vers la fin du dixième
fiecle*

i'Iflc de Moléne < fititft entre I diftancè de line ,


paroît êtré
celle d'Oueffant & la Côte. Le I l'Églife appellec de fon ironf
nier Oratoire qu'il bâtit I Lui-FqU
le continent, à peu del

Zzij

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y 14 S. Nicèphore y Pat. de Const.

XIII. JOUR DE MARS.


SAINT NICÈPHORE,
PAT RI ARCHE
DE CONSTANTINOPLE.
• Tire de fa Vit 9 icriu par Ignace, Auteur con*
êemporain , lequel fia Sabord Diacre de Confiait-
tinople 3 puis Evêqut de Nicce ; &
de Im relation
defin barmijfcrnent y donnée par Thiophanc Voye^
Fleuryj /. «i, 4<f, 47; &
Ceillier, T. i9
%
p. 467.

L'An S z 8»

HÊODORE pere de Nicèphore , étoït


TEmp•ereur Confhmtin Copro-
Secrétaire de
nyme. Mais fon attachement inviolable a la
Doârine de l'Eglife touchant les Saintes Ima-
ges , renverfa fa fortune & lui
perdre l'état
fit

qu'il avoit à la Cour de Conftantinople. Le


Frince , furieux de trouver dans fon iniflre M
une opposition invincible à l'impiété des Ico-
noclafles dont il s'étoit déclaré le partifan,
s'en vengea fur lui de la manière la plus cruel-
le. Il le priva de fa charge &
le bannit , après
l'avoir condamné à fouffrir des tourments hor-
ribles.
Le jeune Nicèphore , qui fut élevé fous

uigwzed by Google
S. NiciPHORE , Pat. de CoiïST.^i^
les yeux de fon père, croifibit tous les jouis
en âge &
en fageffe, &
s'animoit continuel- mars 13.
lement à la pratique de la vertu par les exem-
ples domeftiques qu'il avoit fans cefffe occa-
fion de remarquer. La mort lui ayant enlevé
fon pere de bonne heure , Eudocie fa mere con-
tinua de cultiver avec foin fes heureufes difpo-
fitions. Elle le formoit à la piété , tandis que
différents maîtres prenoient foin d'orner fon
efpritpàr l'étude des Lettres. Nicéphore n'eut
pas plutôt paru dans le monde > qu'il s'y fit nefteftimé
universellement eftimer par fa vertu , ainfi & honoré a

que pair l'étendue &


la variété de fes connoif» la Cour de
fances. Son mérite pénétra jufqu'à la Cour.
Conftantin &
Irène fa mere, qui gouver-
anun °-
^
noient alors l'Empire, qui étoient zélés &
pour la laine Doctrine, l'honorèrent de leur
confiance , &
lui donnèrent la charge que fon

c - ^
ei ira tira
r .
conçue de lui
ploi avec une capacité extraordinaire. Mais
il ne fe contentoit pas de fervir l'Etat par fes ?

talents ; il encore de toutes les for-


travailloit
ces à la défenfe de la Foi , à l'extindion &
de lHéréfie des Iconodaftes. Il fe fit admire*
tles Pères du feptieme Concile général , oit
il affifta en qualité de Commiflàirç de l'Em-
pereur*
Ce
jj ^ ,j

pour l'orthodoxie , joint à de gran- Patriarche,


zele
des vertus oc à une fcience peu commune , le
firent juger digne de fuccéder à Saint Taraife
Patriarche de Conftanùnople, mort en 806.
L/Eglife ne pouvoit gue gagner beaucoup à
ce choix, comme l'événement le prouva.
Nicéphore donna le jour de fon Sacre le té-
Z z ii)

Digitized
7 16 S, Nicèphorè Pat. de Const,
rnoignage le plus authentique de là pureté de
fa foi oc de fon horreur pour l'impiété du
13
femps, Il tint à fa main durant toute la cér
rémonie un écrit qu'il avoit çompofé pour
la défenfe des Saintes Images , mit en- &
fuite en dépôt derrière l'Autel 9 comme uij
gage de la fermeté avec laquelle il étoit dé-
termine à maintenir jufqu'à la njorf la fra*
fjition de i'Eglifeftf)-
Apeinefut-il aflis iurla Chaire Patriarchale;
qu'il entreprit la réformation des mœurs de
(on Dioceie. 1} y réuffit , en ajoutant la for*
çe de l'exemple à celle des exhortations. Il
étpit infatigable lorfqu'il s'agiflbit de remplir
Jç$ fbnftions dç fon miniftere. La douceur &
la patience furent les principales armes qu'il
employa contre le vice; il ne s'en fervit &
point inutilement. Mais la gloire qui lui revint
du changement opéré dans les moeurs de fes
Diocéfains, n'approche point encore de celle
flont lp couvrit la fermeté invincible avec la?
quelle il fquffrit les periecutions cjue les en*
pemis de la Foi lui fufcitçrent.
Lépn FArminien , Gouverneur de Nato e
f
I î

py^nf £té proclamé Empereur en 8 1 3 , FEgli-


fç trouva plongée dan$ de nouveaux trou?
fcïes Ce Prince , entièrement livré aux I co-
,

ftoçlafïes , ng s'occupa que des fnoyens de

( a
) Oq
trouve dans les Saint y expofbit clairement
Annales d« Baronius, fous les principaux myûeres de la
l'an 8x1 , & dans lefeptieme Foi , ainfî que la Doûrine de
^ome'des Conciles du P. i'Églife touchant l'invocation
Labbe , la Confcflion de Foi des Saints , & le culte que
quc Saint Nicéphore envoya Ton doit a leurs Images 6c à
au pape péon tH , aufli-tôt leurs Reliques.
inftallation. Le

Digitized by
S. Nicéphore , Pat. de Const. jxj
répandre leurs erreurs. La rufe, Partifîce , >

h violence , rien ne lui coutoit , pourvu qu'il t


vînt à bout de fes 4effeins. Il fentoit de quel
poids eût été parmi les Orthodoxes l'approba-
tion de Nicépnore ; auffi mit-il tout en ufage ^ zcIe

pour l'obtenir. Mais le faint Patriarche ne rut x^^u^.


pas plus touché de fes careffes, que de fes
menaces ». Prince , difoit-il à l'Empereur , vo$
» efforts font inutiles ; nous ne pouvons chan-
» ecr les anciennes traditions ; nous refpeâoos
» Tes Saintes Images , comme la Croix & le
» Livre des Evangiles». C'étoit un raifonnement
fans réplique. En effet, les premiers Icono-
çlaftes convenant qu'on pouvoit honorer la
Croix & le Livre des Evangiles , ils dévoient
conféquemment avouer qu on pouvoit auffi
honorer les Saintes Images , puifqu'il ne s'a-
giffoit de part 6c d'autre que d'un culte de
relation. Mais il n'eft pas rare de voir les Hé-
rétiques tomber en contradiction avec eux-
mêmes. La généreufe réponfe de Nicéphore
fut luivie d'une courte mais éloquente apo-
logie de la Foi Catholique. Il y prouva que
les Orthodoxes ne bleffoient en rien l'hon-
neur fuprême dû à la Divinité , puifque c'eft
à Dieu que fe rapporte le culte qu'ils ren-
dent aux Anges , aux Saints &c aux Prophè-
tes. Il en eft de même , ajouta le Patriarche,
du refpeô que nous avons pour les chofes
inanimées qui fervent au fervice divin , tels
que font les Temples , les Vafes facrés , &
les Images.
L'Empereur , naturellem ent impérieux , fut
indigné de-la réfi fiance qu'il eprouvoit. Il
ufa d'un flratagâme qu'il crut devoir être plus
efficace que les moyens qu'il avoit employés.

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7 î$S. Nie èp houe y Pat. de Const.
H ordonna quelques Soldats
fecre tement à
de traîner avec mépris une Image de Jefus-
Chrift qui étoit fur la grande Croix qu'on
i voit inife à luie des portes de la Ville. Ce
qui ayant été exécuté , il défendit d'y en remettre
une autre , fous prétexte d'empêcher une pa-
reille profanation. Le Patriarche vit bien qu'un
violent orage menaçoit I'Eglife ; mais il ne
fe découragea point. Plein de confiance en
pieu , il redoubla la ferveur de fes prières,
exhorta les Catholiques à demeurer fermes ,
1

âfiembla autour de lui plufieurs faints person-


nages , &
fe prépara à tout événement.
Léèrt , informe de ce qui fe paflbit , aflem-
ïbla quelques Evêques Iconoclaftes dans fon
'

Palais,, &fit dire à Nicéphore de s'y rendre

au plutôt , avec ceux de les Confrères qui te-


noientpour fon parti. Le Patriarche obéit, &
vint au Palais avec plufieurs autres Evêques
Catholiques. Lorfqu'ils furent en la préfence
de l'Empereur , ils le conjurèrent de nefe pas
"mêler du gouvernement de l*Eglife , -
&de le
laifier à ceux que Jefus-Chrift en a voit établis
Pafteurs. a Si l'affaire en queftion, dit Emi-
» lien de Cyzique , eft une affaire eccléfiaf-
» tique , qu'on la traite dans TEglife , fuivant la
» coutume , &
non dans le Palais. » Euthy-
mius de Sardes ayant pris la parole, ajouta:
» Depuis plus de huit cents ans que Jefus-Chrift
» eft venu au monde , on le peint &
on Fado-
» re dans fon Image. Qui ferolt aflez hardi
» que d'abolir une pratiaue fondée fur une
» tradition aufli ancienne ? » Saint Théodore
Studite parla après les Evêques, &
dit k l'Em-
pereur : » Seigneur, ne troublez pas l'ordre de
» i'Eglife. Dieu y a mis des Apôtres , des Pro-

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5. NicÉPHORE 3 Pat. de Const.jk)
» phetes , des Pafteurs , &
des Doôeurs ( i ) ;
» mais il n'a point parlé des Empereurs. Le *****
13.
» gouvernement de l'Etat vous eft confie ,
» comme celui de l'Eglife l'eft aux Pafteurs. »
Léon, tranfporté de fureur, chaffa les Evêques
Catholiques, & leur défendit de reparoitre
en fa préfence. Il en vouloit fur-tout à Nicé-
phore. Il ne penfa donc plus qu'aux moyens
de le perdre , &
il ne tarda pas à en trouver.

Les Evêques Iconoclaftes s'étant affemblés

dans le Palais Impérial, y tinrent un prétendu


Concile , auquel Nicéphore fut cité. Mais lé
Patriarche ne comparut point , parce que la
citation n'étoit pas canonique ; il répondit feu-
lement à ceux qui étoient chargés de la lui
faire : » Qui eft-ce qui Vous a donné cette au-
» torité ? Eft-ce le Pape , ou quelqu'un des
» autres Patriarches ? Vous n'avez aucune ju-
» rifdiftion dans mon Diocefe. » Il leur lut
enfuite le Canon qui déclare excommuniés
ceux qui ofent exercer quelque aûe de jurif-
diâion dans le Diocefe d'un autre Eyêqve f
puis leur ordonna de fe retirer. Cette réponfe
auroit dû intimider les partifans de l'erreur.
Mais l'Héréfie ne refpeae les loix de l'Eglife t
qu'autant qu'elle peut les faire fervir à fes
deffeins. Les Evêques Iconoclaftes continuè-
rent donc leur Affemblée,& prononcèrent
une Sentence de dépofition contre Nicépho-
re. L'Empereur , pour fatisfkire fa haine , enf
n-eft
mettant le fcomble à Finjuftice , l'envoya en
exil. Heureux encore d'avoir échappé aux piè-
ges qu'on avoit tendus fecretement à ùl vie.

1
i"
*

• *

( I ) Efhtf. IT. !/•

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,

730 S.Nicèphore 9 Pat. de Const*


Michel le qui fuccéda à l'Empereur
Bègue ,

MARS ij,^on m 8*0* , comme lui , les Ico-


fàvorifa
noclaftes , &pçrfécuta lç$ Catholiques ; de
forte que Nieéphore fut laiffé dans le lieu de
* fon exil. Il mourut le 2 Juin 818 , dans le
Monaftere de Saint Théodore, qu'il avoit fait
bâtir. Il étoit âgé d'environ 70 ans , en &
avoit paffé près de 14 en exil. Son corps fut
rapporté à Conftantinople en 846 , par Tor-
dre de l'Impératrice Théodore. La cérémonie
de cette translation fe fit le 1 3 de Mars , jour
auquel le nom du Saint fe trouve dans le Mar-
tyrologe Romain ( b ).

(f ) Saint Nieéphore a la if à la (Uite de George Syn-


fé plusieurs Écrits , qui font : celle. Elle rut auflî réimpri-
1°. un Abrité (THifioirt , qui mée à Venife en 1729 , dans
commence i la mort de l'Em- le corps de l'Hiftoire Byxan-
pereur Maurice , 8c finit au tine. Nous ne citons ici que
règne d'Irène & de Confia n- les meilleures Éditions.
tîn fon fils : ce qui com- 3°. La Sticomévie , C*eft-
prend un efpace d'environ à-dire, l'énumération des Li-
200 ans. Photius , Cod. 66 , vres facrés , arec le nom*
fait l'éloge de cette Hiftoire. bre des Verfets que ces Li-
Le P. Petau la fit imprimer vres contiennent. Elle eft
en Grec 5c en Latin i Parts ordinairement jointe à la
en iéi6 , in o&rvo. Elle fut Chronologie de Nieéphore,
réimprimée dans la même (bit dans les Éditions latines
Ville en 1648 , dans le corps foit dans les grecques. On ne
de l'Hiftoire Byzantine , &
à peut contefter cet Ouvrage
Venife en 1729, à la fuite à notre Saint. Voyez Ceillier,
des Hiftoriens qui ont écrit T. 18. p. 475-
depuis Théophane. 4 • Les Antirrhét iquts , OU
2°. Une Chronologie depuis Écrits contre les Ico noclaftes.
la Création du monde , jus- On en a inféré que lques - uns
qu'au temps où vivoit le dans la Bibliothèque des Pè-
Saint. On y a fait quelques res % dans VAuStu*ri*m du P.
additions dans les fiecles pof- Combefis , 8c dans les LtSio-
térieurs. Le favant P. Goar I de Canifius. Part.
Dominicain , la publia à Pa- I t. Edit. de Bafn. Les autre s fe
ris en 1632 avec des notes,
|
trouvent en MS dans les Bi-

Digitized by Google
S. Nicèphore Pat. de Coxst. , 731
un effet de fa très-grande ifliféricor-
C'eft par
de que Dieu envoyé des contradiôions âç de$ j^iRS 13.
épreuves à Tes ferviteurs. En fourni flam ainfi
de Pexercice à leur vertu , il purifie leurs a«?
mes, ÔÉ (es fait parvenir à ce degré de perfec-
tion qu'il exige de fes Elus. Les fouffrances
ont une efficacité que n'ont point les autres
pratiques de piété. Ne nous décourageons
donc point , fi les maladies , les traverfes i les
perfécutions nous empêchent de fairç le bien
que nous avions en vue, nous mettent &
dans Pimpofïïbilité de remplir les devoirs de
notre état. Dieu tient compte de la bonne
volonté , pourvu qu'elle loit accompagnée
d'unç foumiffion abioluç au* décrets de fa

'I "
bliotheques de Paris , de Ro- ciles
« T. 7. p. 1197, &c.
me 6c d'Angleterre. La pré- CoteHer en a publié quelr
fence réelle cft établie de la ques autres avec une lettre
manière -la plus claire 6c la à Hilarion 6c à Eurtrate.
plus precife dans un de ces Monum. frac» T.-J. p» <ff*.
Ecrits. Voyez Léori Allatius , 8°. S. Nicèphore compofa
L. j. de Confenf. EccUf. Occid. aum" un Ouvrage pour prou-
& Orient, e. ij. p. isar. On ver qu'Eufebe de Céfarée
retrouve prefque les mêmes étoit Arien , 6c qu'Épipha*
termes dans le Livre de ni de favorUoit l'erreur des
Chirubinu à Moyfe factis. Manichéens.
( Voyez Canifius ,
7*. Le P. Anfelme Banduri
a. Part.
X. p. i j i fit la Bibliothèque des Bénédictin de Ragufe , avoit
Pères , T. 9 ). projeté de donner une Édi-
0
5 . La Difpute avec V Em- tion de tous les Ouvrages de
pereur Lion V Arminien . fur la Saint Nicèphore i mais la
matière des Images. Voyez le mort l'en a empêché. En
P. Combefis, Orig. Confon- 1765 , il en publia un Prof
tin. Paris 1664. in-quarto. pechts , qui a été inféré tout
6*. La Lettre au Pape Lion entier dans la Bihliothtque
III, Nous en avons parlé dans Grecque de Fabricius , T. 6.
la Vie de Saint Nicèphore. p. 640. On trouve auûi une
7°. Dix-fept Canons inférés partie de ce ProfpeSut dans
dans la Colle&ion des Con- Oudin , de Script. 7*. 2. p. /?•

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73 * S. NiCéphore 3 Pat. de Const.
Providence. Abandonnons-nous à lui fans ré-
ferve ; il nous aime infiniment plus que nous
'
ne nous aimons nous-mêmes , & il lait beau-

coup mieux que nous , ce qui nous convient.


S'il nous afflige , ou qu'il permette que nous
foy ons la viâime de la méchanceté ou de l'in-
juftice des hommes , c'eft qu'il veut nous con-
duire à lui par le chemin de la croix ; c'eft
cju'il veut <jue nous acquérions cette précieu-

ie conformité avec fon Fils , dans laquelle fe


trouve un gage affuré de la béatitude éternel-
le ; c'eft enfin qu'il veut nous procurer le mo-
yen d'expier nos fautes , de détacher notre
cœur de toutes les choies de la terre , de fen-
tir notre foiblefle & notre mifere , de nous
défier de nos forces , & de mettre en lui tou-
te notre confiance. Quoi de plus confolant
S>our une ame qui foufFre, que de trouver dans
on état la preuve la plus fenfible de l'amour
de fon Dieu , & de penfer qu'il ne lui faut
pour fe fanéKfier , que de la patience^ôc de la
ioumiffion à la volonté divine !
SainteEuphrasje, V. 733

Ste. EUPHRASIE ou EUPHRAXIE, mars ,,.

Vierge.
Tiré defa Vie originale, publiée parRoJwàde^
/>. jJ/ • Cette Vie eff beaucoup plus correSe dan*
le Recueil des Bollandjûes* Voye[ le P. Marin ,
Vies des Pérès des Déferts d'Orient , T. a.
p. 101 & fuiv.

L'An 410.

A NtiGONe,
un
pere de notre Sainte , étoît
Seigneur de la première qualité , qui oc-
cupoit une place très-diftinguée à la Cour de
l'Empereur Théodofe le jeune , dont il ëtoit
proche parent. Il avoit époufé Euphrafie , qui
ne lui cedoit en rien du côté de la naiffance
& de la vertu. Dieu bénit ce mariage par la
naiffance d'une fille à laquelle on donna le nom
de <à mere ; & c'eft elle que l'Églife honore
en ce jour. Les premiers foins des chaftes
époux fiirent de remercier le Ciel de la fécon-
dité qu'il avoit accordée à leur union , & de
lui protefter qu'ils n'éleveroient leur fille que
pour l'Éternité. Ils s'engaeerent enfuite par
un vœu à paffer le refte de leur vie dans la
continence , afin de vaquer plus librement au*
exercices de la piété , dont ils voulçient &i*

re leur unique occupation. .* •

Un an s'etoit à peine écoulé depuis leur


vœu , qu'Antigone fut enlevé de ce mon-
de par h mort des Juftes. Plufieurs perfon-
nes voulurent engager Euphrafie, qui étoît

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734 Sainte Euphra$ie 3 P.
jeune ,à paffer à de fécondes noces ; mais
elle n'écouta aucune des proportions qui lui
fiirent raitësi Ltf commerce du inonde lui de*
Venant de jour tû jour plus \
charge par les
diftraâions qu'elle y trouvoit\elle fortit fe-*
creteméiif da Conftantinople , &
fe retira
avec fa fille ta Égypte, où elle âvoit de
riches pofleffions. Elle fixa fa dèmetire dans
le voifinage d'ufi Monaftere compofé de cent
trente Religieufes , qui édifioient par la prati-
que de toutes les vertus.
Elles ne fe nourriffoient que d'herbes de &
légumes , fans y mêler aucun aflaifonnement;
& ne mangeoient qu'après le coucher dû So-
leil. Il y en avoit plufieurs qui étoient deux

& même trois jours fans rien prendre. Vil cilice


étendu fur la terre nue leur fervoit de lit.
Leur habit étoit fait d'une étoffe très-pauvre &
très-rude. Elles travailloient des mains , &t
n'interrompoient prefque jamais l'exercice de
la prière. Elles foudroient les maladies avec
patience, & en remerciotent même le Seigneur,
parce qu'elles les regardoient comme un effet
de fa miféricorde. U falloit un danger réel pour
les déterminer à recourir aux Médecins ; en-
core ne vouloient-elles ufer que des remèdes
les plus communs. Elles favoient qu'un trop
grand foin de la fanté du corps nourrit l'a*
mour propre , entretient l'immortification 9
fête dans le relâchement, &
ruine même
quelquefois les tempéraments les plus ro-
buftes (a).

( a ) Ce foin exceffif de la
|
ment condamné par Saint
famé du corps a cté ftvére- 1 Ambroife, S<rrru xi. inPf* tr$

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,

Sainte Eupbrasie ,K 735


L'exemple de ces Religieufes frappoit extrê-
mement la mere de Sainte Euphrafie , étoit &
comme un aiguillon puiflant qui portoit
la
fans cefle à redoubler de ferveur dans tous
fes exercices. Souvent elle vifitoit le Monafte*
re afin de s'affermir de plus en plus dans le
défir de tendre à la perfeôion. Elle voulut afli-
gner aux Religieufes un revenu annuel fort con-
sidérable , fans autre charge que l'obligation de
prier Dieu pour le repos de l'ame de fon ma-
ri. Mais PAbbefle répondit au nom de toutes
fes Religieufes , oue la Communauté ne pour-
voit rien recevoir. » Nous avons renoncé
» dit-elle , à tous les biens &
à toutes les com-
» modités du fiecle , pour acheter le Royau-
» me du Ciel. Nous fommes pauvres , &
m nous délirons mourir dans la pauvreté, » Elle
n'accepta qu'un peu d'huile pour l'entretien
de la lampe de l'Oratoire , quelques par- &
fums pour brûler fur l'Autel.
La jeune Euphrafie, qui n'étoit encore âgée
que de fept ans , fe fentoit puiflamment por-
tée à vivre dans la Retraite. Elle en parla
à fa mere , &
lui demanda comme une grâ-
ce , la permiffion de fervir Dieu dans le Mo-
naftere. Celle-ci pleura de joie en confidérant
ce que la grâce opéroit dans fa fille. Elle lui
accorda fa demande , &
la préfenta quelque
temps après à la Supérieure , qui lui mit en-

«epar Saint Bernard, Bp. j*/. maladies > Ton ne fe fert è la


*l. ju.p.jiC. & Serm. jo. in Trappe que de remèdes com-
Cani. Le célèbre Abbé de muns , tels qu'Us convien-
Rancé l'a proferit aufil du nent à des perfonnes dé-
milieu des Solitaires qui fui* vouées par état à la pauvre-
vent Ta Reforme i ôt dans les té & à la mortification.
73<* Sainte Euphrasîe , V.
tre les mains une Image de Jefus-Chrift. La
MARS petite Euphrafie baifa refpechieufement lima-
1 3.
"ge, en difant:» Je fais vœu de me confacrer
» à Jefus-Chrilt pour le refte de ma vie. Sa
mere Payant *nfuite menée devant une autre
Image du Sauveur , elle y fit la prière fuivan-

m
» teftion. Elle n'aime & ne cherche que vous
;
» c'eft donc à vous feul qu'elle fe recoraman-
» de (£). » Puis fe tournant vers fa fille, elle
lui dit » Puiffe le Seigneur , qui a établi les
:

montagnes fur des Fondements inébranla-


» bles , vous confirmer toujours dans la crain-
» te de fon faint nom » A ces mots , elle la
!

remit entre les mains de la Supérieure , &


fortit du Monaflcre , les yeux baignés de
larmes.
Cette pieufe mere tomba malade quelque
temps après
, &
fut avertie que fa fin appro-
choit. ÈUe voulut , avant que de mourir
donner fes dernières inftru£Hons à fa fille, n
» Craignez Dieu , lui dit-elle , honorez vos
» Sœurs , & vous regardez comme leur fer-
» vante. Ne penfez jamais à ce que vous avez
» été félon le monde, &
ne dites jamais en
» vous-même que vous êtes iffue du fang des
» Empereurs. Soyez humble pauvre lur la &
» , afin que vous méritiez de participer
terre
m à la gloire &
aux richeffes du Ciel. Elle vé-
cut encore quelques jours, puis s'endormit
paifiblcment dans le Seigneur.

(b) Ce paflagc eft cité ! or. ;.


par Suint Jean bamafccne*|

La

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Sainte Eup hras i , V. 737
La nouvelle de fa mort étant parvenue à la
Cour de Conftantinople , l'Empereur Théo-
jyj^j *'*
dofe envoya chercher la jeune Euphrafie qu'il
avoit promife en mariage au fils d'un Séna-
teur , à la fortune duquel il s'intéreflbit beau-
coup. Mais la Sainte etoit trop affermie dans
fa vocation pour penfer à fortir du Monafte-
re. Elle fit donc la réponfe fuivante à Théo-
dofe : » Sachant , invincible Empereur %
» que j'ai promis à Jefus-Chrift de vivre dans
» ime chafteté perpétuelle , voudriez-vous que
» je violafle ma promefle , en époufant un
» homme mortel , qui deviendra bientôt la
» pâture des vers ? Je vous fupplie , par les
» bontés dont vous honoriez mes parents , de
» difpofer des biens qu'ils mfont laiffés , en fit-.
n veur des pauvres , des orphelins &
des Égli-
y> fes. Donnez la liberté à tous mes efclaves p
» 6c accordez à mes fermiers une remife de
» tout ce qu'ils doivent , afin qu'étant déli-
» vrée du foin de mes affaires temporelles , ;e
» puiffe fervir Dieu fans obftacie. Priez le
» Seigneur de me rendre toujpurs digne de
» lui. Pofe demander la même grâce à Tlm-
» pératrice votre époufe. L'Empereur ne put
retenir fes larmes en lifant cette lettre. Les
Sénateurs pleurèrent auffi lorfqullsen enten-
dirent la le£hire. » Voilà , à Théo-
dirent-ils
» dofe , une fille digne d'Antigone d'Eu- &
» phrafie ; elle fait honneur au fang illuftre
» qui coule dans fes veines ; c'eft un faint re-
» jeton d'une tige vertueufe».Théodofe, queU
que temps avant la mort arrivée en 395 , exé-
cuta pon&uellement les intentions d'Euphra-
fie,
:

Dégagée de tout foin terreftre , là jeunç


Aaa

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738 Sainte Evphrasie^V.
Vierge tendoit tous les jours à la perfeâîon
de Ton Etat. Elle eut beaucoup de combats in-
"
teneurs à foutenir , mais elle en fortit tou-
jours viâorieufe- Elle ne s'appercevoit pas
plutôt de la tentation , qu'elle alloit fur le
champ la découvrir à fon Abbefle. Son but en
cela etoit d'humilier le Démon , de fe pro- &
curer des avis falutaires , dont elle pût faire la
règle de la conduite. La Supérieure , très-ver-
fée dans la connoiflance des voies intérieures ,
la confoloit , &
lui indiquoit les moyens de
profiter de fes épreuves. Elle lui prefcrivoit
quelquefois des pratiques rudes humilian- &
tes , afin de la détacher toujours plus d'elle-
même , & de préparer par là fon ame à rece-
voir des grâces plus abondantes. Elle lui ordon-
na un jour de tranfporter d'un lieu à un autre
un tas de groffes pierres. La Sainte obéit fans
répliquer , &cela pendant trente jours de fui-
te. Cette parfaite obéifTance, jointe à d'autres
mortifications corporelles , lui valut une en-
tière viâoire fur le Démon , qui enfin la laifla
tranquille.
L'auftérité de la Règle ne fuffifoit point en-
core à la ferveur d'Euphrafie. Elle ne man-
gjeoit qu'autant qu'il falloit pour ne pas mou-
rir. Elle etoit deux , trois , & même quelque-
fois fept jours, fans prendre aucune nourriture.
Son humilité répondoit à fon abftinence. Pré-
férant toujours les plus bas emplois de la Com-
munauté , elle s'eftimoit heureufe d'être char-
gée de nétoyer les chambres des Sœurs , ou
de porter de l'eau à la cuifme. Le trait fuivant
montrera jufqu'où elle portoit l'humilité la &
douceur. Une fervante du Monaftere lui de-
manda un jour avec aigreur pourquoi elle ne

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S. THEODOkt, ÀÊÈÊ.
Jnangeoit qu'un* fois la femainé * fi pat ^ &
fcV 11T *!*£ ,
"

cette fingularité, elle vouloit fe diftiriguei' de$


M * 5< .

autres Sœurs, qui n'étoient point capables d'une


pareille abitinence* Euphrafie répondit qu'elle
n'agiflbit ainfi que par Tordre de fa Supérieur
re. La fervante la traita d'hypocrite , qui t&+
choit une vanité fecreté fous des apparences
fpécieufeSi La Sainte , fans rien répliquer , fe
jeta aux pieds de fon injufte accusatrice , lui
demanda pardon comme fi elle eût été coupa-
pie , & la conjura de lui accorder le fecours
de mourut en 410 , i l'âge dô
fes prières. Elle
du don des miracle*
trente ans. Elle fut honorée
avant &
après fa mort. Son nom eft marqué
au 1 3 de Mars dans le Martyrologe Romain.

MÊME J 0 V R.

SAINT THÉOPHANE ,

Abbé.
IThéophane étoit fils d'Ifaàd , Gouvei*
neur des Mes de l'Archipel. Son pere en mou-»
rant , nomma l'Empereur Conftantin Copro-*
nyme pour être fou tuteur. Comme il n'avoit
encore que trois ans , il étoit à craindre que
Conftantin ne le fit élever dans les erreurs des
Iconoclailes , qu'il fevorifoit de tout fort pou-
voir. Heureufement la Foi du jeûna Théopha-
ne ne reçut aucune atteinte , par les foins d'urt
domeftique fidèle , qui lui infpira de bonne
heure les fentiments a une piété folide , uné &
vive horreur de toute Doârine improuvée
par l'Eglife Catholique. Lorfqtt'il eut atteint
A a aij

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740 S. Théodore > Abbé.
l'âge viril , il fe rendit aux follicitations de fes
. amis qui le preflbient de fe marier. Mais le
jour môme de fes Noces , fe trouvant feul
avec fon'époufe , il lui tint des difeours fi tou-
chants fur la brièveté de la vie , fur le néant
des chofes de la terre , fur la crainte des Juge-
ments de Dieu , qu'il fit pafTer dans fon cœur
un ardent défir de fe confacrer fans réferve
au fervice du Seigneur. Elle s'engagea même
par vœu , à vivre avec fon mari dans une
continence perpétuelle. Quelque temps après
elle quitta entièrement le fiecle, embrafia &
l'Etat monaftique.
Quant à Theophane , il fonda deux Monaf-
teres dans la Myne , &
fe chargea de la condui-
te de l'un des deux ( a ). Il y vécut comme ua
homme parfaitement mort au monde à lui- &
même , uniquement occupé des exercices de
la pénitence &
de la pnere. Il parut avec
éclat au fécond Concile de Nicée, en 787,
Tous les Pères de l'Affemblée ne purent s'em-
pêcher d'admirer la fimplicitç , la modeftie
& l'humilité d'un homme qu'ils favoient avoir
occupé dans le monde une place fi diïHnguée,
Ils lui donnèrent des marques de leur vénéra-

tion , qui s'accrut encore Jorfqu'ils l'entendi-


rent parler fur le culte des Images avec au-
tant de force que de dignité.
Après la clôture du Concile , le Saint re-
tourna dans fon Monaftere ,
y reprit fes &
exercices avec une ferveur toute nouvelle.
Jamais il ne quittoit le cilice ; une natte lui

( a ) Près de la Proponti- c*eft-i-dirc , Grand-Champ , dvi


J
4c. On Uppclloit Mcgai-Jgrt) [ lieu où il étoit hàû,

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S. TH ÉO D 0 R E 1 A B B E. 741
fervoit de & une pierre de chevet
lit , ; dit
pain bis & de Peau fàifoient toute fa nourri- MAR$ f ?
iure. Sa fanté fe dérangea confidérablement à
l'âge de cinquante ans & ; reffentit des dou-
il

leurs fort aiguës de la pierre & d'une colique


néphrétique. Ses infirmités prefque continuel-
les , fe changèrent par fa patience , en une
fource de mérites.
Léon CArminien étant parvenu à PEmpire y
rènouvella en 814, la perfécution contre PE-
glife Catholique, &
proferivit les Saintes Ima-
ges, dont le culte avoit été rétabli fous le rè-
gne de Conftantin &
d'Irène. Ce Prince eût
bien voulu attirer dans fon parti Théophane
qu'il favoit être extrêmement confidéré par-
mi les Orthodoxes. Il mit donc tout en œuvre

pour le gagner. Le Saint ne donna point dans


le piège qu'on lui tendoic II fe rendit pour-
tant à Conftantinople , pour obéir à l'Empe-
reur ,-qui l'y mandoifc Quand il y fut arrivé
on lui remit de la part de Léon un billet
conçu en ces termes » Vos difpofitiotis pa-
:

» cifiques me donnent lieu de croire que vous


» êtes venu ici dans le deffein de confirmer par
» votre fuffrage mes fentiments fur la matière
» en queftion. Ce fera là le moyen de mériter
» ma faveur , &d'obtenir pour vous * pour
» vos parents, &
pour votre Monaftere , toutes
» les grâces qu'il eft au pouvoir d'un Empe-
» reur d'accorder. Si au contraire vous refii-
» fez d'entrer dans mes vues , fâchez que vous
» encourrez mon indignation , &
que vous en
» fentirez tout le poids , vous &
vos amis. »
Théophane , qui étoit entièrement déta-
ché des biens du monde , ne fut ni ébloui par
les promefles de l'Empereur , ni intimidé par
Aaa iij

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74* £ Th'ÈOP H AN E 3 Aà B È.
n I ggB menaces. Il lui fit cette généreufe répon*
fes
*
*"
c# infirme ÇO m nie je le fuis , je n'ai
^
MARS n,
» garde d'ambitionner les chofes que j'ai mé*
» prifées pour Jefus-rChrift dans ma jeunefife ,
» lorfqu'ii m'étoit facile d'en jouir au milieu
» du monde. Quant à mon Monaftere
. à &
» mes amis , je remets leur fort entre les mains
» de Dieu, Au refte fi vous croyez m'épou*
h vanter par vos menaces , comme on épou-
» vante un enfant aveç des vçrges , vous vous
» trompez. Car quoique je n'aye pas la force
h de marcher , &
quç je fois wjet à plufieurs
» autres infirmités corporelles , j'efpere que
» Jefus^Chrift me donnera le courage de fouf»
» frir pour la défenfe de fa caufe , tous les fup»
h plices auxquels vous pourrez me condamner,
^'Empereur , qui ne s'attendoit point à une
&mblabie réponle , en fut déconcerté. II ne
Eçrdit pourtant point encore toute efpérance.
chargea plufieurs perfonnes de parler au Saint
&ç de taire tous leurs efforts pour l'amener à fon
but. Mais ce moyen n'eut pas plus de fuccès
que le précédent. L'Ëmperçur entra alors dans
imç grande colère , &
ordonna que Théophane
fut renfermé dans un cachot. Le Saint y refta
deux ans , privé des chofes les plus nécçflaires
à la vie ,
malgré lç trille état de fa fanté , qui
dépériffoit de jour en jour. On eut même la

Jbarbarie de décharger fur fon corps jufqu'à


frois çents coups de fouet. Enfin on le tira du
fraçhot e n 818 ; mais ce fut pour l'exiler dans
Wfle de Samothrace. U y mourut dix-fept jours
après y êtrç arrivé , le 11 du mois die Mars*
Il s'eft opéré plufieurs guérifons miraçuleufes

par la vertu de fes Reliques.


Voyez Vie , écrite par un Auteur con*

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Sainte Rennoque V. 743 ,

remporain & les notes que les PP. Goar & ==


;

Combefis, de l'Ordre de Saint Dominique ,


MARS
ont faites furies Ouvrages du Saint, imprimés
à Paris en 1655 (£).

SAINTE KENNOQUE , VIERGE ,

EN É C O S S E.

L A douceur , la modeftie , l'humilité , 8ç


l'amour des chofes de Dieu , furent les vertus
qui cara&ériferent cette Sainte dès fon enfan-
ce. Comme elle étoit fille unique & héritière
d'une maifon riche &
noble , plufieurs perfon-
nes la demandèrent en mariage. Mais elle ne
voulut écouter aucune des propofitions qui
lui furent faites, afin de fe confacrer à Dieu
fans aucune réferve. Elle fe fit même Religieu-
fe dans un Monaftere du Comté de Fife. L'ef-
prit de pauvreté &
d'oraifon 9 accompagné
d'une admirable pureté de cœur , la condui-

( h ) Nous avons dé Saint l'Évêque pour lui rendre les


Théophaneune Ckrohographit fervices les plus fetrets S ,

ou Abrégé d'Hiftoire depuis pour être témoin de & con-


l'an 184 , où fmifîbit George duite). George auffi recom-
Syftcelle ,
jufqu'à Tan 813. mandable par fa vertu, que
le rtile n'en eft pas aflez par fon érudition ,mourut
polit ce qui Vient fans doute ers l'an 800. Il a une
laiffé
ce ce que les infirmités la & Chronçgraphic ou Abrégé d'Hif-
ùrifdn du Saint ne lui permi- toire univerrefle' depuis la
rent pas de le retoucher. Création du monde, jufqu'à
Théophane étoit intime ami l'an 284. On y trouve des
de George Syncelle ou Sé- fragments précieux , tirés de
cretaire du Patriarche Saint Manéthon» de Jules Africain,
Taraife. (On appelloit Syn- d'Eufebe &d'autres anciens
èclle celui des Clercs qui de- Auteurs.
meuroit dans la chambre de
744 S ai nt Heràl n , E.
firent en peu de temps à une fublime perfec-
mars i h tion* Son nom devint célèbre par les mira-
cles que Dieu accordoit à fes prières. Elle mou-
rut en 1007 j dans un âge fort avancé. Plu-
fxeurs Églifes d'ÊcofTe étoient autrefois dédiées
fous fon invocation. Il y en a une auprès de
Giafcov , qui s'appelle encore S. Kcnnockh
Kirk , c'eft-â-dire , Églife de Sainte Kennoque.'
Les Écoffois avoient anciennement beaucoup
de vénération pour les Reliques de cette Sainte,
On trouve une prière en fon honneur dans
le Bréviaire d'Aberdeen. Le nom de Sainte
Kennoque fe lit dans le Calendrier d'Adam,
King,
Voyez ce qui eft rapporté de fa Vie dans
la Cnronique de Scone , célèbre Abbaye
cTÉcoffe.

SAINT GÉRALD,
ÉVÊQUE EN ÉCOSSE.
^ ESaint,
&
Irlande , prit l'habit
qui étoit Anglois , pafla en
dans le Monailere de
Mégeo ou Mayo , fondé par Colman de Lindis-

farne, en faveur de ceux d'Angleterre. Il devint


iucceflivement Abbé &
Éveque. Il fonda deux
Monafteres, l'un d'hommes , l'autre de filles &
dont il donna le gouvernement à fa fœur,
nommée Ségrétie (4). Il mourut en 73 x , &
fut enterré a Mayo oh
encore une
, l'on voit
Eglife qui porte fon nom. Voyez Colgan.

(a) Le premier de ces Mo* trement appelle Tcmpul-GérmlJt


nflueres . fitué en Connacie , Le fécond étoit connu (bus 1©
étoit celui d'Êlythcrie , au- nom" de Tegh-na Saxon*

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S. Mochoèmoc^Abbé. 745

MARS ij,

SAINT MOCHOÊMOC ,

Abbé en Irlande.
JVlOCHOÉMOC ; appelle Pulchirlus paf
les Latins , fut élevé fous la conduite de S.
Congal ,dans le Monaftere de Benchor. Ce
fut à lui qu'on dut la fondation de la célèbre
Abbaye de Liath-Mochoémoc f près de la-
quelle on a depuis bâti la Ville de ce nom.
Ce Saint mourut le 13 Mars 65*. .

Voyez Colgan, & les Antiquités différais;


in Tab. Chron.

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74* Sainte Mat h i lde.

< X1K JOVR DE MARS.


S™. MATHILDE,
REINE DE GERMANIE.
1
4*
* *

TjW Ay2t Fi , 40 <uw apris fa mort ;


par Vordre de CEmptrtur Saine Henri. Ctttt Via
a été publiée par les Bollandijies 3 Aâ« San£t T.
7. p. 361. .

L'An 968

MARS 14,
m
Mahatu ,
ATHILDE
étoit fille

parmi les Saxons. Ses parents , qui a-


puiflant
, vulgairement appelfce
du Comte Thierry , Seigneur

voient beaucoup de religion , la firent élever fous


eafion ^ es y eux de f° n aïeule , Abbeffe du Monaftere

d'Erford. Elle puifa dans cette fainte École


un gout extraordinaire pouf Poraifon pour &
la leâure des Livres de pîété. Elle apprit auffi
à travailler à tous les ouvrages convenables
à fon fexe , &
contraâa infenfiblement fha-
bitude d'employer tous les moments à des
chofes férieufes , &
dighes d'une créature rai-
EUe eft ma- fonnable. Enfin arriva le temps de rentrer dans
riéc au Duc le monde , où la Providence Tappelloit.
de s»e# eune Mathilde fut mariée en 9 1 3 , à
j

Henri d'Othon , Duc de Saxe. Son mari ,


fils

rui étoit devenu Duc de Saxe , par la mort

le fon pere , arrivée en 9 1 6 , fut élu en 9 9 ,


1
pour fuccéder à Conrard , Roi de Germanie

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S a in te Mat ni ld e. 747
(a). Ce Prince réunifient beaucoup de piété
à toutes les qualités royales. Il etoit adoré
qui le regardoient comme
t ^
de fes Sujets ,

leur pere. Il avoit un foin extrême d'empêcher


qu'ils ne fWTent furchargés d'impôts ; auflî
fe piquoient * ils de reconnoifiance , lorfque
la guerre étoit allumée. Ils fervoient dans les
Armées à leurs propres dépens. Un zele auffi
généreux de leur part touchoit fenfiblement
le cœur d'Henri ; &
lorfque le feu de la guerre
étoit éteint , il leur faifoit reflentir les effets
de fa libéralité.
Tandis que Henri châtioit l'infolence des Ses vertus;
Hongrois &C des Danois , &
qu'il foumettoit
Ja Bavière à fon obéiffance , Mathilde rem-
portoit des viÛQires fur les ennemis de fon
falut : viâoires bien plus dignes d'un Chré-
tien 4 &c infiniment plus agréables à Dieu. Elle
vaquoit à la prière &
à la méditation , afin
de s'entretenir dans la ferveur l'humilité.&
Cet exercice avoit pour elle tant de charmes f
qu'outre le temps qu'elle y donnoit pendant
le jour , elle y çooiacroit encore une bonne
partie de la nuit. Les réflexions férietfes qu'elle
feifoit fur les vérités éternelles garantiflbient
?
ion ame des atteintes de ce poifon fubtil , qui
eft toujours caché fous les dehors fédinfants
des grandeurs humaines. Souvent elle vifitoit
les malades &
les affligés , qu'elle confoloit
&: exhortoit à la patience. Elle fërvoit les
pauvres , &C leur apprenoit à eftimer un état dont

(a) Henri fut furnommé des oî féaux de proie t félon


Wifeltur parce qu'il aimoit
y le gout de ion ficelé.
pa$onnémcnt à chauler avec

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748 Sainte Mathildé.
J. C. a choix & auquel font promifes le?
fait ,

récompenfes de la vie future. Elle procuroit


la liberté aux prifonniers ; ôclorfque les droits
de la JufHce s'oppofoient à leur élargifîe-
ment , elle allégeoit au-moins le poids de leurs
chaînes par d'abondantes aumônes. Le princi-
pal but qu'elle fe propofoit en cela , étoit de
porter ces malheureux à expier leurs crimes
par les larmes d'une fincere pénitence. Elle
avoit la confolation de voir le Roi fon mari
entrer dans fes vues , & s'emprefler à la fé-
conder dans l'exécution de toutes fes pieufes
entreprifes.
Henri étant tombé en apoplexie en 936 ;
la Reine eut tout lieu de craindre pour fes
jours. Elle alloit fouvent fe profterner aux
pieds des Autels , afin de folliciter fa guéri-
Ion auprès de Dieu. Mais lorfqu'elle eut été
inftruite de fa mort, par les larmes & les cris
du Peuple , elle fe fournit avec réfignation à
la volonté du Ciel. Elle fit venir en même
temps un Prêtre , qu'elle chargea d'offrir le
faint Sacrifice de la Méfie pour le repos de
fon ame. Elle donna enfuite à ce Prêtre les
Diamants qu'elle portoit , faifant entendre par
cette aâion , qu'elle renonçoit pour toujours
aux pompes & aux vanités du monde.
Mathilde avoit eu trois enfants de fon ma-
riage avec Henri , favoir , Othon , Henri , &
Brunon. Le premier oui fuccéda à fon père
dans le Royarûne de Germanie , fut couronné
Empereur à Rome en 961! , après avoir vain-
cu les -Bohèmes & les Lombards. Henri fût
Duc de Bavière , & Brunon Archevêque de
Cologne. Ce dernier eft honoré dans 1 Églife
d'un culte public.

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Sainte Mathilde. 749
Othon n'avoit été couronné Roi de Germa-
nie ,
qu'après de vives conteftations. Comme mars 14 .
cette Couronne étoit éleétive , Henri fon frère
quoique le plus jeune , la lui avoit difputée ; &
Mathilde par une injufte prédileôion , s'étoit Eiieeftper-
déclarée en fa faveur. Cette conduite de la Rei-^ cutéc P*1
"

656 to *
ne mere alluma le flambeau de la difcorde entre
les deux frères. Mathilde commit fans doute
une grande faute ; mais Dieu la lui fit expier
par les épreuves cju'il lui envoya. Othon &
Henri £e liguèrent contr'elle ^ &
la dépouil-
lèrent même de fon douaire 9 fous prétexte
quelle avoit épuifé l'État par des aumônes
inconfidérées. Mathilde fe fournit fans mur-
murer , aux décrets de la Providence qui la
châtioit, &
fouffrit en efpritde pénitence, des
coups d'autant plus fenfibles , qu'ils lui étoient
portés par la main de fes propres enfants. La
perfécution fut aufli longue que cruelle. Les
deux Princes rougirent pourtant à la fin de
l'indignité de leurs procédés ; ils fe réconci-
lièrent fincérement avec leur mere , lui &
rendirent tout ce qu'ils lui avoient enlevé.
Mathilde , rétablie dans fa première fortu-
ne , diftribua plus d'aumônes que jamais. Elle
fonda aufli cinq Monafteres &plufieurs Églifes.
Les deux principaux d'entre les Monafteres
qu'elle fonda , furent celui de Polden , dans le
Duché de Brunfwick ; &
celui de Quedlin-
bourg , dans le Duché de Saxe. Ce dernier fut
deftiné à des Religieufes ( b ). La Sainte s'y
retiroit de temps en temps pour goûter les

( h ) L'Abbcffe de Quediin- 1 de l'Empire^


première PrincefTe |

Digitized by
750 Saîxte Mat n îldë*
charmes de la folitude. Elle ne s'occupa ptu$
M ars 14 k re^e de fa vie , que de pratiques de piété
*
& d'œuvres de miféricorde. Son plus grand
plaifir étoit d'apprettdre aux Pauvres aux &
ignorants la manière de bien prier , comme
elle avoit déjà fait à l'égard de fes domefti*
ques* Elle étoit au Monaftere de Qiiedlin-
bourg , lorsqu'elle tomba dans la maladie dont
elle mourut. Elle fe confeflk à Guillaume , Ar-
chevêque de Mayence , fon petit-fils. Quelques
jours après , elle fit une Confeffion publique

<le fes péchés , en préfence des Prêtres des &


Religieuses du Monaftere. Elle reçut enfuite les
Sacrements de l'Euchariftie &
de TExtrême-
Sa mort.
Onâion , puis s^tant feit coucher fur un cilice
& s'étant mis de la cendre fur la tête , elle
expira tranquillement le 14 Mars 968. Son
corps eft à Quedlinbourg* Sainte Mathilde eft
nommée en ce jour dans le Martyrologe Ro-
main.

Le commencement de la vraie vertu , eft


de la défirer avec ardeiur , & de la demander
à Dieu , dans une intime perfuafion qu'elle eft
préférable à tous les Trônes du monde ; oue &
tous les biens créés ne font au prix d'elle qu'un
peu de fable &
de boue ( 1 ). Lorfqu'on a une
fois acquis ce précieux tréfor , il faut travail-
ler fans ceffe à ne pas s'en laifler dépofféder
c'eft-à-dire , prier avec ferveur , vaquer à la
méditation des chofes faintes , lire fouvent&
les Livres de piété. L'obligation d'ufer de ces
moyens regarde les gens du monde , coi

( I ) Sap. VIL 6.

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Sainte Mat hildè. 751
ceux qui vivent dans les Cloîtres. On peut
même dire qu'elle regarde les premiers aune
manière fpéciale , puifque fans cela il ne leur
eft pas poflible de fe garantir de cette multi-
tude de pièges qui font tendus de toutes parts
à leur innocence. Qu'ils jetent les yeux fur
Sainte Mathilde. Ce fut par les moyens que
nous venons d'indiquer qu'elle fauva fa vertu
de la féduûion des objets extérieurs , qui eft
bien plus dangereufe dans les Cours , que par-
tout ailleurs. Qu'oppoferont à cet exemple
tant de Chrétiens qui fe croient nés unique-
ment pour le plaifir , & dont toutç la vie fe
paffe aans un cercle perpétuel de leâures pro-
fanes, de converfations frivoles, & de vifites
inutiles ? Aveugles cru'ils font de ne pas fe mé-
nager au-moins quelques infiants pour rentrer
en eux-mêmes , oc pour s'entretenir dans cet
efprit de chriftianifme qui rendroit méritoires
tous les affujettiflements de leur état! Faut-il
qu'ils foient gratuitement efclaves dans le mon-
de, & qufeprès avoir été malheureux ici-bas ,
ils s'expofent à l'être pour toujours dans l'autre

vie!
75* S. Acepsimas s &c. MM.

^ SAINT ACEPSIMAS , EVÊQUE ,

SAINT JOSEPH, PRÊTRE ,

SAINT AITILAHAS , DIACRE


Martyrs.
Tiré de leurs Actes originaux , écrits en Cal»
daiqiu par Saint Maruthas , & publiés par M.
Ajfimani , A& Mart. Orient. T. i. p. 171.

L'An 580.
^1 'Est par les Àôes de ces bienheureux
Soldats de Jefus-Chrift , que Saint Maruthas
termine fon Hiftoire de la perféaition du Roi
Sapor , qui ravagea FEglife de Perfe durant
l'cfpace de quarante ans. Il nous affure que
vivant dans le voiiinage du Beu où fis avoient
été martyrifés , il s'étoit exactement informé
des principales circonltances de leurs combats f
& qu'il n'a rien dit qu'il n'eût appris de té-
moins oculaires. H entre en matière par les
paroles fui vantes.'
» Soyez-moi propice , Seigneur, je vous en
» conjure par de ces Martyrs
les prières
» Affifté de la grâce de Dieu , &
muni de votre
» protection , ô généreux Athlètes , j'entre-
» prendrai d'écrire les tourments incroyables
* que vous eûtes à fouffrir. Je ne peux y pen-
» fer, fans me fentir couvert de confufion, &c
» fans verfer des larmes ameres , à la vue de
» nies péchés Ovous qui lifez ce récit
» comptez

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S. Acepsimas 3 &c. MM. 753
» comptez les jours & les heures d'un efpace -
/
i

» de trois ans & demi que ces bienheureux j^^s I4


» Martyrs paflerent dans une affreufe prifon ;
» & fouvenez-vous que durant tout ce temps-
» là , il n'y a point eu de mois où ils n'ayent
» été plufieurs fois appliqués à la torture, point
» de jour où ils n'ayent eu à combattre contre
» leurs persécuteurs , point d'heure où ils
» n'ayent été menacés d'une mort certaine. Les
» jours de fêtes n'étoient pour eux que des
» jours de fouffrance.
La trente-feptieme année de la perfécution
du Roi Sapor , il parut un nouvel Edit , par
lequel ce Prince ordonnoit aux Magiftrats &
aux Gouverneurs des Provinces , de févir
contre les Chrétiens f avec une nouvelle ri-
gueur , & de leur faire fubir tous les genres
de fupplices imaginable*. Ce n'étqit pas qu'ils
euflent commis des crimes : on ne pouvoit leur
en reprocher aucun. » Mais , difoient les
Perles , ces gens-là aboliflent notre Doûri-*
» ne ; ils apprennent aux hommes à n'adorer
» qu'un feulDieu ; ils condamnent le culte du
» Soleil & du Feu ; ils détournent du mariage ;
» ils défendent de fervir dans les armées du
» Prince , & de frapper qui que ce foit ; ils
» permettent de tuer toutes fortes d'animaux
» & d'enterrer les morts ils difent enfin que
:

» Dieu , & non le Diable , efl le Créateur des


U !pfi mas
» Serpents & des Scorpions. J *

L Edit n eut pas plutôt ete publié, que I on tourmenté &


arrêta Acepfimas, Evêque d'Honite, en Affy-^e^prifim
rie. C'étoit un vénérable Vieillard âgé de
plus de quatre-vingts ans , mais d'une comple-
xion forte &robufte. On le conduifit chargé
de chaînes devant le Gouverneur de la Pro-
Bbb

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754 «S. Acepsimas J &c.MM.
vince , qui étoit pour lots à Arbellc ( a ). Le
& lui dit Aen•« le voyant, •
qu'il ne concevoit
MARS 14. Juge
^*t.c
i *• / j • •

pas comment il pouvoit nier la divinité du


Soleil , à laquelle tout l'Orient rendoit hom-
mage. Acepnmas lui répondit qu'il ne pouvoit
comprendre de fon coté comment des hom-
mes raifonnables préféraient la Créature au
Créateur , &
que pour lui il fe donneroit bien
de garde de deshonorer favieilleffe par une
femblable préférence. A peine eut-il ceffé de
parler , gue le Gouverneur ordonna qu'on lui
pieds avec degroffes chaînes,
liât les qu'on &
le couchât par terre. Il le fit enfuite fouetter
d'une manière fi cruelle , que fon corps tout
enfanglanté ne paroiflbit plus être qu'une feule
plaie. On le mit en prifon après cette horri-
jofeph & ble torture.
Aïthiiahas , Onarrêta dans le même temps Jofeph Pre-
auffiar-^
fcnt
retés.
de fieth-Catuba , &
Aïthiiahas Diacre de
Beth-Nuhadra , célèbre par fon favoir , fon
éloquence , &
la faintetc de fa vie. Ils forent
aum menés tous deux devant le Gouverneur ^
qui s'adreffant à Jofeph , lui demanda s'il ado-
roit le Soleil. » Pourriez- vous croire , répon-
» dit le Saint , que je voulufle adorer le So-
» leil , moi qui ai enieigné aux autres à le re-
» garder comme une créature inanimée , &
» qui n'a rien de divin. Il paroît que vous con-
» noiflez peu les Chrétiens. » Le Juge , irrité
de cette réponfe , le fit coucher par terre , &
le condamna à une cruelle fuftJgation. Le Mar-
tyr paffa par les mains de dix Bourreaux qui

( a) Ville que la dernière ! dre a rendue cçlcbrc»


défaite de Darius par Alexan- j

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S, Àçeps mas % Çfc. MM. 755
^Êmmm
le frappèrent fucceflivement. Son corps étoit -

dans un état , qu'on crut qu'il al-


fi affreux
loit expirer. Il levoit cependant les jreux au
Ciel ; oc ranimant Tes forces épuifées , il difoit
à haute voix » Je vous rends les plus grandes
:

» aûions de grâces, ô Jefus, Fils de Dieu, de,


» ce que par votre miféricorde , vous m'avez
» lave dans mon fang, comme dans un fécond
» Baptême , pour me purifier de mes péchés. »
Les Bourreaux , qui fe crurent infultes par ces
paroles , le tourmentèrent avec une nouvelle
fureur. Ils le chargèrent enfuite de chaînes , &
le mirent dans la prifon où étoit Ace pfimas.
On fit venir enfuite Aïthilahas. Lorlau'i} fut
arrivé , le Gouverneur lui dit : » Il n eft pas
h queftion d'employer beaucoup de paroles.
* Adore le Soleil , qui eft une Divinité ; mange
» du fang ; marie-toi Ç b ) ; obéis au Rpi , 6C
m je te laiffe la vie. J'aime mieux mourir , pour
h vivre éternellement , répondit le Saint , que
» de vivre aux conditions que vous me pro-
» pofez , pour être enfuite condamné à une
» mort qui ne finiroit jamais. » Le Gouverneur
ordonna auffi-tôt ou'on lui liât les mains fous
les genoux, &
qu on le mît enfuite fous une
grofle poutre , dont on fît prefler les deux ex-
trémités par douze hommes. Le Saint fouffrit
de-plus une longue fiiftigation. On ne cefla de
le tourmenter , que quand fes os furent diflo-.
qués , &
fa chair en lambeaux. Cette Queftion
le réduifit dans un tel état de foiblefte t qu'il

. (h) On voit par ce pafla*


J
.

ge , que par plufieurs I Occident , dans une cantj^


ainfi
autres , que les Clercs enga- I nence perpétuelle,
gér dans les Ordres facrér t J
1
Bbbij

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I

75 6 S. Acepsimas , &c. MM.


=^== ne pouvoit plus faire ufage de membres*
fes

mars 14. On fut donc obligé de le porter en prifon.


Le lendemain , nos faints Martyrs furent ra-
Souffranccs menés devant le Juge* On eflaya encore de
lestroiiMar-
j es épouvanter par des menaces , mais toujours

avec auffi peu de fuccès qu'auparavant. Rien


ne fut capable d'ébranler leur confiance. On
les étendit donc par terre ; & on leur lia les
côtes, les jambes, &les cuiffes , avec des cor-
des que l'on ferroit fi violemment, qu'on en-
tendoit le bruit que fàifoient leurs os en fe bri-
fant. Pendant ce temps-là , les Officiers qui
préfidoient à la Queftion , exhortoient les Mar-
tyrs à fe conformer à PÉdit du Roi. Mais ils
iren tirèrent que cette réponfe : » Nous met-
tons toiite notre confiance en Dieu , &
» nous n'obéirons point ». Leur invincible fer-
meté aigriffoit de plus en plus les Idolâtres ;
& fi on ne les condamna pas à mort ftir le
champ , ce fut pour leur faire fouffrir chaque
jour tout ce que la cruauté la plus rafineé peut
imaginer de lupplices. Ils réitèrent trois ans
en prifon , privés de tout fecours de la part des
hommes , & abandonnés à l'inhumanité des
Bourreaux les plus impitoyables.
Cependant le Roi arriva en Médie. Les
Martyrs furent tirés de prifon , &conduits
devant Adarfapor , le premier des Gouver-
neurs des Provinces de l'Orient. Il n*y avoit
plus en eux que quelques traces de figure hu-
maine. Ils étoient dans un état fi trifte , que
les Perfes eux-mêmes ne purent s'empêcher
d'être attendris &de verfer des larmes. Lorf-
au'ils furent en préfence d'Adarfapor 9 qui
etqit environné d'un grand nombre de Satra-
pes & de Gouverneurs t il leur demanda s'ils

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S. AcetsiMas y &c. MM. 757
j>rofeffoîent la Religion Chrétienne : » Oui ;

» répondirent-ils , &
nous n'adorons qu'un mars 14.
h Dieu , créateur &
fouverain maître de tou-
» tes chofes ». Comme le Juge les preflbit
d'obéir à l'Édit du Prince , Acepfimas prit la
parole , & dit : » Votre efpérance eft vaine ,
» fi vous comptez nous porter à abjurer notre
» Foi. Vous n'avez qu'à nous condamner aux
» fuppiiees que vous voudrez. Celiez de nous
» faire languir ; jamais nous ne nous laiflerons
» intimider par vos menaces. Nous avons appris
» à ne pas redouter la mort. C'eft le propre des
» Criminels de la fouhaiter , reprit le Juge ;
» ils fe trouvent par-là délivrés des peines qu'ils
» méritent. Vos défirs ne fecont donc point
» accomplis. Vous vivrez ; mais je vous ren-
» drai la vie auffi infuportable qu'une mort
» continuelle. Je veux que vous ferviez d'exem-
» pie à tous ceux de votre Seâe. A quoi bon
» toutes ces menaces , répliqua le Saint ; Dieu
» en qui nous mettons notre confiance , faura
» nous donner de la force &
du courage».
À ces mots , les yeux d'Adarfapor étincele- Mo" de s#

rent de rage ; il jura par la fortune du Roi fon


maître, que fi les Martyrs n'obéiflbientà l'inf-
tant , il rougiroit leurs cheveux blancs de leur
propre fang , qu'il détruiroit leurs corps , &
qu'il feroit réduire en poudre les moindres
parties de leurs cadavres. » Nous vous aban-
» donnons nos corps , dit Acepfimas. Quant '

» à nos ames , elles appartiennent à notre


» Dieu : exécutez donc vos menaces ; vous
» mettrez par là le comble à nos défirs. »
Adarfapor ne fe poffédant plus , ordonna que
le faint Vieillard fut étendu pçr terre , &
ccartelé par trente hommes , dont quinze ti-
Bbbiij

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7j 8 S. AcepsimAS s &c. MNf.
roient de chaque côté , les cordes attachées

9 t
aux différents membres de fon corps. Deux
Liâeurs le frappoient encore pendant ce
temps-là avec des courroies. Acepfimas ex-
pira au milieu de cet affreux fupplice. On
mit des Gardes auprès de fon corps pour em-
pêcher les Chrétiens de l'enlever ; mais ceux-ci
trouvèrent au bout de trois jours le moyen
de l'emporter fecretement. Il fut enterré par
les foins d'une fille du Roi d'Arménie , qui
étoit alors en otage chez les Perfes.
Jofeph &
Aïthilahas fubirent la même Quefc
tîon ; mais ils n'y perdirent pas la vie. Le der-
nier difoit au luge dans le plus fort de fes
tourments : » Vos tortures font trop douces >
y> vous pouvez les augmenter tant qu'il vous
» Adarfapor, faifi d'étonnement , s'é-
plaira.
cria : » Quoi , ces hommes défirent les fup-
> plices &
la mort , &
vont à l'un &
à l'au-
» tre , comme ils iroient à un feftin ! Ne vous
» en étonnez pas , dirent quelques Perfes qui
» étoient préients, ceci eft une fuite de leur

» Religion qui leur promet dans une autre vie


» un Royaume que les yeux du corps né
» fauroient voir. » Adarfapor ordonna qu'ils
fuffent tourmentés de nouveau, jufqu'à ce
cu'on eût mis en pièces les différentes parties
de leurs corps , oc qu'on eût prefque déta-
ché leurs bras des épaules. Il ajouta que s'ils
Turvivoient à cette féconde Queftion , on les
tranfporteroit dans leur pays, pour y être
exécutés à mort. Les deux Martyrs furvécu-
rent efFçftivement à leur fupphce. On les
tranfporta donc à Arbelle fur des bêtes de
charge. Us foufirirent beaucoup fur la rou-
te , tant de la pofture gênante où ils étoient

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S. ^Acèpsimas , &c. MM. 759
<jue de de leurs Gardes. Aufli-tôt
la barbarie
après leur arrivée, une Dame de la Ville mars
m.
d'Arbelle, nommée Jazdundoûe, obtint du
Gouverneur, au moyen d'une grofle fomme
d'argent , la permiffion de les garder quelque
temps dans fa maifon. Elle panla leurs plaies
arrofa leurs corps de fes larmes , &
puila dans
leurs inftruôions de puiflants motifs de s'atta*
cher de plus en plus au fervice de Jefus-Chrift.
Peu de temps après , les bienheureux Mar-
tyrs furent tires de la maifon de Jazdundoâe,
{>our être conduits en prifon. On
les y laifla
anguir pendant plus de fix mois dans une pri-
vation prefque générale de tous fecours. Sur
ces entrefaites arriva un nouveau Gouverneur,
qui furpaflbit tous fes prédécefleurs en cruau-
té. Il apportoit un Édit du Roi, par lequel
il étoit ordonné que tous les Chrétiens con-

damnés à mort foffent lapidés par ceux oui


profeffoient la même Religion. Les Fidèles
prirent la fuite , &
fe retirèrent dans les Bois
& les Déferts , pour n'être pas forcés à trem-
>er leurs mains dans le fang des Martyrs. On
es fit pourfuivre par des Soldats qui en ar*
rêterent plufieurs.
Cependant le nouveau Gouverneur fit com-
paroître les deux Saints devant fon Tribunal, confetôoo
Jofeph futfufpendulà tête en bas par les doigts de Jofeph &
des pieds, &
cruellement fouetté pendant «TAïthiUlus.
deux heures. Comme il parloit de la réfur-
reôion future promife aux Chrétiens, le
Juge qui l'entendoit , lui dit : » Comment rcnt.
v£™£
» lorfque tu feras reflufcité , te propofes-tu
» de me punir ? Jo seph On nous a appris à être
:

» doux , à rendre le bien pour le mal , à &


>> prier pour nos ennemis. Le Juge: Quoi, tu

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y6o S. A C EPS I M AS y &c. MM.
» me feras du bien , pour le mal que je te fais
» aujourd'hui ? Joseph : Il n'y aura plus alors
» de faveur à efpérer > ni de grâce a obtenir.
» Je prierai donc mon Dieu de vous amener
» à la connoiflance de fon nom , tandis mie
» vous êtes encore en cette vie. Le Juge : Tu
» penferas à ces chofes dans le monde oii je
» vais t'envoyer ; mais obéis au Roi dans ce-
» lui-ci. Joseph : La mort dont vous me me-
» nacez ne m'effraie point : elle eft l'objet de

Le Gouverneur interrogea enfuite Aïthila-


has. L'ayant trouvé dans les mêmes fentiments
que Jofeph , il fufpendre la tête en
le fit aufli
bas. Il ordonna pourtant à la fin , cju'on le dé-
tachât, dans l'efpérance qu'il fe laifferoit tou-
cher par l'exemple d'un Manichéen qu'on avoit
emmené. Cet Hérétique venoit d'abjurer /k
Religion , pour fe délivrer des tourments , ôt
fa i (bit , pour prouver la fincérité de fon abju-
ration , des chofes gue ceux de fa Seûe regar-
doient comme illicites. Mais le Saint protefta
qu'il n'imiteroit jamais ce miférable , & qu'il
mettoit une grande différence entre fa Reli-
gion , &
celle des Manichéens. Ceux-ci , ajou-
ta-t-il , n'adorent pas , comme moi , le vérita-
ble Dieu , &
n'ont point par conséquent les
mêmes Ces dernières paroles irri-
efpérances.
tèrent tellement le Gouverneur , qu'il condam-
na le Saint à une cruelle fuftigation : les Bour-
reaux le long temps ,
frappèrent fi avec tant &
de barbarie
?
au'il perdit
toute [connoiffance.
Un Majge qui 1 apperçut dans le lieu où il avoit
été jeté fans aucun mouvement, s'approcha de
lui par pitié , &
jeta un manteau fur fon corps ,
pour couvrir fes plaies &
fa nudité. Le Gou-

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S. Acèpsimas y &c. MM. j6\
verneur en ayant été informé , fit donner deux
cents coups au Mage , qui perdit lui-même 14,
connoiflance.
Cinq jours après ,
Thamfapor arriva au
Château de Beth-Thabala , qui n'étoit pas éloi-
gné d'Arbelle. Le Gouverneur lui envoya les
faints Martyrs. On leur promit la liberté la &
vie , s'ils vouloient manger du fang des animaux;
mais ils refuferent de taire ce qu'on exigeoit
d'eux. On leur offrit enfuite de prendre au-
moins le jus de quelques raifins , pour faire croi-
re au peuple qu'ils avoient pris du fane. » Loin
» de nous un tel crime , s'écrierent-ilSi Non ^
» jamais nous n'uferons de diffimulation; elle
» eft incompatible avec notre Foi ( b ). Leur mar*
Enfin , Tnamfapor &
le Gouverneur , après *****
avoir délibéré quelque temps , condamnèrent
les bienheureux Martyrs à être lapidés' par les
Chrétiens. Jofeph fut exécuté à Arbelle. On
avoit rajnaffé cinq cents Chrétiens pour fon
fupplice. Parmi eux étoit Jazdundoâe dont
nous avons parlé, plus haut. On exigea d'elle
qu'elle piquât feulement le Saint avec une plu-*
me, afin de paroître au-moins obéir aux ordres
du Roi. Mais il ne fut pas poffible de l'y déter-
miner ; & les Païens eux-mêmes furent forcés
d'admirer fa généreufe réfiftance. Les autres
Chrétiens eurent la foibleffe de lapider le Saint,
'on avoit enterré jufqu'au cou. On laifla des
S irdes auprès de fon corps , pour empêcher
les Fidèles de l'enlever ; mai? ceux-ci profite-

( c ) Nous avons déjà re- 1 Apôtres touchant l'abiHnence


marqué que le* Chrétiens ob- du fang des animaux. AS,
1

fervoient encore en plufieurs I XV* ap.


endroits la loi portée par les I

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?6i Saint Bonifacë 3 E.
rent d'un ouragan qui furvint la nuit du troï^
MARS 14.
û eme i our y pour emporter fecretement. S.
1
'
Aïthilahas fut lapidé dans la Province de
Peth-Nuhadra.
Saint Maruthas ajoute cpi'il s'opéra plufîeurs
miracles à l'endroit oii Saint Aïthilahas avoit
été martyrifé , &
qu'on y entendit un concert
des Efpnts céleftes. Nos Saints fouffrirent Tan
de J. C. 380 , le 70 du règne de Sapor , le &
40 de la perfécution. Sozomene parle d'eux
dans fon Hiftoire ( 1 ) , leurs noms fe trou- &
vent dans le Martyrologe Romain fous le 1*
d'Avril.

LE MÊME JOUR.
SAINT BO NIFACE,
É VÊ QUE DE ROSS, «

en Écoffe.

\J N zele ames en-


ardent pour le falut de
gagea' ce Saint à quitter l'Italie pour aller ,
prêcher l'Evangile au Nord de la Grande Bre-
tagne. Ayant débarqué près de l'embouchure
de la Tees , il y bâtit une Eglife fous l'invo-
cation de Saint Pierre. Il en bâtit une féconde
à Teillein ( a\ y &
une troifieme à Reftennet
( b ). Ses Prédications produisent des effets

( I ) Hifi. /. ». e. r?. guliers de Saint Augurtin v


• ( a ) À trois milles d'Àleâ. lorfque les Moftaftcres furent
) Cette Eglife étoit def-
( b détruits en Écoffe.
fervie par des Chanoines Ré-

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,

Saint Lvbïn\> É> 763


tnèrveilleux dans les Provinces d'Angus , de —
Buchan , d'Elgin , de Murray, de Roff. & De- mars 14,
^venu Evêque de Roff , il fonda plufieurs Egli-
fes dans cette Province , &
fit fleurir par-tout

l'efprit de piété &


de Religion. Il mourut vers »

Tan 6jo. On lit dans le Bréviaire d'Abèrdeen


qu'il fonda 150 Egliles ou Oratoires * 6c cju'â-
près fa mort , Dieu accorda un grand nom-
bre de miracles à fon interceffion.
Voyez le Bréviaire d'Aberdeen ; le Calen-
drier de King, fous ce jour ; Lefley Hijl.
^Scot. !.4;&C HeÛor Boétius , ffijl. L$.

SAINT LUBIN,
Êvêque de Chartres.
Lub in (c),qui étoitde Poitiers, fe fitRe-"
ligieux dans fon propre pays. Son application
à l'étude des Saintes Lettres , le rendit fort
habile dans la connoiffance de toutes les vé-
rités du falut. Huit ans après fon engagement
dans la Profeffion monaftigue , il demanda ,
& obtint la permiflion d'aller vifiter S. Avi*
3ui demeuroit dans le Perche. Il rencontra
'abord le faint Diacre Carilephe, connu fous
le nom de Saint Calais qui lui donna des
-,

avis falutaires , entr^autres celui de ne jamais


demeurer dans un petit Monaftere , parce
que d'ordinaire on y obferve mal l'obéiflance ,
chacun voulant être maître. Il alla enfuite

(a) En latin Ltoblnusm

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,

7^4 Saint Lubin , E.


- trduver le B. Avi dans fon Hermitage. Cé
^ Saint ne voulut point le retenir auprès de
lui ; il l'exhorta à pafler encore quelques an-
nées dans une Communauté de Religieux , &
lui dit de venir après le retrouver.
Notre Saint avoit formé le projet de fe re-
tirer dans la célèbre Abbaye de Lerins , mais
il ne l'exécuta point. Il s'arrêta près de Lyon

dans l'Me-Barbe , & fe mit fous la conduite


de l'Abbé Loup, qui avoit une grande réputa-
tion de fainteté. Les Religieux craignant de
tomber entre les mains des François , qui a*
voient déclaré la guerre aux Bourguignons , pri-
rent tous la fuite à l'exception de Lubin &
d'un bon Vieillard. Cependant les Troupes
des François s'emparèrent de l'Ifle. Les Soldats
fe faiiirent du Vieillard , & lui demandèrent
où l'on avoit caché ce qu'il avoit de plus y
précieux dans la Communauté. Celui-ci tout
tremblant les renvoya à Lubin. Mais fur le
refus que fit ce dernier de découvrir le fecret
de fes Frères , on le maltraita de la manière
la plus indigne.

^
Saint Lubin s'étant joint à deux autres So-
litaires , revintavec eux dans le Perche pour
vivre fous la conduite de Saint Avi. Ce Saint
les reçut tous trois avec beaucoup de charité ,
& leur donna de l'emploi dans ion Monafte-
re. Lubin y exerça la charge de Célérier , &
y demeura jufqu'à la mort de Saint Avi. U fe
retira enfuite dans le Défert de Charbonniè-
res ( b ) , où il pafla près de cinq ans , éloi-

( * ) Aux extrémités de la f pare la Beaufle d'avec le


forêt de Montmirail qui fé- 1 Maine.

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SaintLubin 3 E. 765
gp£ de tout commerce avec le monde. Ethé-
rius , Evêque de Chartres , inftruit de fa fain-
teté , l'ordonna Prêtre ,& le fît Abbé du Mo-
naftere de Brou en Perche. Il le donna pour
compagnon de voyage à S. Aubin ^Evêque d'An-
gers , oui alloit voir S. Céfaire d'Arles* Lubin
avoit deflein de finir fes jours à Lérins ; mais
Saint Céfaire lui perfuada de retourner au
Monaftere de Brou. Il fuccéda à Ethérius fur
le Siège de Chartres , en Il remplit fidè-
J44.
lement tous les devoirs d'un bon Pafteur , &
mourut en 5 57. Il avoit affifté au Concile V
d'Orléans , &
au II de Paris ( c\ On garde
fon chef dans la Cathédrale de Chartres ; le
refte de fon corps fut brûlé par les Calvinif-
tes en 1568. Saint Lubin eft nommé fous le
1 < de Septembre dans le Martyrologe Romain.
Mais fa fête fe célèbre deux fois l'an au Diocefe
de Chartres , favoir , le 14 de Mars le 1 &
de Septembre.
Voyez fa Vie , écrite avec beaucoup d'or-
dre, de précifion &
de fincérité , peu de temps
après Vzp. 590. Elle a été publiée par le P.
Labbe , T. 2. BU. MSS ; par les Bolîandiftes
*d 14 Mort. &
par le P. Mabillon , A3. Ben. T.
$A p. Voyez encore le Gallia Chrifi. nova.

(c) Le premier de ces! Taupe en j j


1.
Goaciks £ç tint en J49,
&J
,

7 66 S. Abraham s HÈRMtti.

JOUR DE MARS.
SAINT ABRAHAM
HERMITE
ET SAINTE MARIE,
SA NIECE,
Pénitente*
Tiré de fa Vie f icriu
par Saint Ephrcm Jbn
ami > Op. T. i. p. i , Edit. nova Vatic Voyc^

les Actes dit mime Saint y publiés en latin par


Lippoman ( 25 Octob. ) ; & par Surius ( iS
Mars ). // efi parlé de POriginal grec de ces Actes
dans Lambécius 9
Bibl. Vind. T. 8. p. 2.55 >
260 , %66 ; & dans le P. de Montfaucon^ Bibl.
Coiflin. p. m. On
trouve parmi les MSS de
la Bibliothèque de Saine Germain-dcs-Prhs deux
autres fortes d'Actes grecs de S. Abraham. Voye^
aujji M, Jofiph Affemani , Bibl. Orient. T. 1.

p, 38 & 3 96 > lequel parte Saprks la Chronique


& r Ouvrage de Koklius , intitulé : In-
d'Édeffc ;
troduôio in Hiftoriam , Rem lifterariant &
Slavorum , p. 316. AltQnavi* , 172g»
-

Vers l'An 3 60.

S AINT ABRAHAM naquit à Chidane


en Mcfopotamie , près de la Ville d'Édefle. Ses
parents , aufli recommandables par leur piété
que par leur nobleffe , lui donnèrent une ex-

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S. Abraham ^Hermtte. 767
cellente éducation eurent foin fur-tout
: ils 2=5=5
de lui infpirer de bonne heure l'amour de la
j^^j ,
vertu. Ils lui propoferent, quand il fut en âge
d'entrer dans le monde , de s'unir par les liens
du mariage , à une fille douée des plus rares qua-
lités. Le jeune Abraham eût bien voulu garder
le célibat ; il en demanda même la permiffioii
à fes parents. Mais n'ayant pu l'obtenir, il s'en-
gagea par pure obéiffance, dans un Etat pour
lequel il ne fe fentoit gue du dégoût. Au relie
fa liberté lui fut bientôt rendue.
Après la célébration de fes noces , & les
fèftins qui accompagnent unè pareille céré-
monie , il découvrit à fon époufe la réfolu-
tiôn oii il étoit de vivre dans une continence
perpétuelle. Il partit enfuite fecretement , Sa & retraite?

alla s'enfermer dans une cellule abandonnée


,
qui étoit environ à une lieue de la Ville d'E-
defle. On ne peut douter qu'il n'ait agi en cela
par une infpiration particulière du Ciel , fi tou-
tefois n'avoit pas obtenu le confentement de
il

fa femme. Sa
fuite défola fes parents fes a- &
mis. De toutes parts on fit les recherches les
plus exaâes ; Uce ne fut qu'au bout de dix-
fept jours qu'on trouva le heu de fa retraite.
On mit en oeuvre toutes les infbnces poflîbles
pour l'engager à revenir avec fon époufe ; mais
il demeura inflexible , & protefta que jamais il
n'auroit rien de commun avec le monde. Son
premier foin, après le départ de ceux qui l'a-
voient découvert , fut de murer la porte de fa
cellule. Il n'y laifla qu'une petite fenêtre par
,
laquelle il recevoit ce qui lui étoit néceflaire
pour fubfifter.
Abraham , uniquement occupé des vérités
éternelles , employoit tous fes moments à louer

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,,,

768 S. Abraham Hermjte. ,

Dieu , à l'adorer , à implorer fk miféricorde."


MARS 15. ^ avo ^ ' e ^on ^es ^armes (^ans k degré le plus
*
éminent. Son détachement des chofes créées
étoit abfolu. Il ne pofledoît qu'un manteau
&
un cilice , un petit vafe dont il fe fervoit
pour boire & pour manger. Les auftérités de
la pénitence avoient pour lui les charmes les
plus doux & ,n'en diminua jamais rien du-
il

rant les cinquante années qu'il paffa dans la


Solitudc -
11 éiftribu*
Tes biens aux ^Y avoit douze ans qu'il vivoit de la forte
Pauvres. lorfcjue la mort lui enleva fes parents. Com-
me ils lui laifToient des biens confidérables
& qu'il avoit rompu tout commerce avec le
liecle , il pria un ami vertueux qu'il avoit, de
recueillir la fucceflion , &
de la diftribuer aux
pauvres & aux orphelins- Cependant le bruit
de fa fainteté fe répandoit de proche en proche.
On accouroit de tous côtés pour le voir , &c
pour profiter de fes difeours , toujours pleins
d'onâion , de fagefle &
de grâce.
Près de la Ville d'Edefle étoit une Bourga-
de fort peuplée , dont les habitants adoroient
encore les Idoles. Tous les Millionnaires qu'on
y avoit envoyés n'avoient pu y répandre la
lumière de l'Evangile. Le mût de leurs tra-
vaux s'étoit borné à attirer fur eux mille mau-
vais traitements. L'Evêque d'Edeffe , qui avoit
toujours fort à cœur la converfion de cette
Bourgade , réfolut de faire une nouvelle ten-
tative. Il jeta les yeux fur Abraham , renommé
pour fa fainteté l'ordonna Prêtre , malgré
,

toutes fes oppofitions , &


le chargea d'aller
prêcher la Foi à cette portion de Ion Trou-
peau. Le Saint , durant toute la route , recom-
manda au Ciel l'ouvrage qu'il entreprenoit.
„ Seigneur

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5: Abraham , Hbrmite. j6$
» Seigneur, s'écrioit-il fouvent ,
daignez jeter
» des regards miféricordieux fur ma foibleffe. j^j^ x
^
» Afliftez-moi de votre grâce , afin que je puifle
» faire glorifier votre faint Nom. N'abandon-
» nez pas , ô mon Dieu , des peuples dont
» vous êtes le Créateur.
Lorfqu'il fut à la vue de la Bourgade, il ap- n convertît
perçut la fumée qui s'élevoït du milieu des Sa- ^f^t!
crifices offerts aux Idoles. Il verfa des larmes bitams é-
abondantes , &
redoubla l'ardeur de fes pria- toicm Païens
res. A peine fut-il arrivé , qu'il fe mit à prê-
cher la Do&rine de Jefus-Chrifl ; mais perfon-
ne ne voulut l'écouter. Il ne fe rebuta point.
Les Païens avoient beau le maltraiter le &
chafTer du milieu d'eux , revenoit toujours
il

à la charge avec le même zele. Trois ans fe


pafferent de la forte. La patience la dou- &
ceur d'Abraham touchèrent enfin ces Idolâtres ;
Ils ouvrirent les yeux fur une conduite qui leur
parohToit incompréhehfible , &
ne doutèrent
point qu'elle n'eût quelque chofe de divin pour
principe. Us renoncèrent tous à leurs fuperfti-
tions ,&
demandèrent, la grâce du Baptême,
Le Saint employa encore une année entière à
les confirmer dans la Foi au'ils avoient env
brafTée ; il fes pourvut enfmte de Miniflres zé-
lés , & retourna dans fa cellule.
Ilavoir un frère dans le monde ., tjuî mou-
rut peu de temps après fon retour. Celui-ci
laifla une fille, nommée Marie, qui étoiten- ch;!r& 2

core fort jeune. Le Saint voulant la former à ^


uirc
^
la vie relieieufe , la mit dans une cellule, voi-
fine de la fienne , afin d'être à portée de l'inf-
truire. Marie fit bientôt de grands progrès dans
le chemin de la perfeâion : elle devint un mo-
dèle accompli de vertu & de pénitence. Mais
Cco

Digitized
1

770 S. Abraham 3 ffermite.


rsssssss le Démon, qui méditoit fa ruine depuis long-
temps , trouva le moyen de lui ravir fon inno-
cence. L'inflrument dont il fe fervit , fut un So-
litaire corrompu qui venoit fouvent à fa cellu-
le, fous prétexte de confulter Abraham. Ce
mîférable , brûlé d'un feu impur , tendit des
pièges à fa chafteté , &
vint à bout de la faire
confentir à fon infâme paffion.
"

Marie n'eut pas plutôt commis le crime f


qu'elle en fentit toute l'horreur ; mais au lieu
d'en demander pardon à Dieu , elle fe livra aux
tranfports d'une douleur exceffive , &
finit par

tomber dans le défefpoir. Elle fe retira enfuite


dans une Ville éloignée de la demeure de foa
oncle , &
s'y abandonna aux plus honteux déf-
ordres. Abraham , qui ne favoit ce que la
nièce étoit devenue , pleuroit amèrement ion
malheur , &
follicitoit fa converfion par de

u convertit ferventes prières. Ce ne fut que deux ansapm


fa nièce tom- fon départ , qu il connut le heu qu elle habitoit.
bée dans le L'efpérance de retrouver cette Brebis égarée
ciefordrc.
de ffe i n de courir après elle. II
j^. in fpi ra j e

quitta donc fa cellule , changea d'habit , fc&


rendit à la maifon où il avoit appris que fa
nièce logeoit. Il demanda à fouper feul avec
elle. Mais quand ils furent l'un & l'autre tête à
tête , il ôta l'efpece de chapeau qui lui cou-
vr oit toute la tête , &
lui adrefla ces paroles
d'une voix entrecoupée de fanglots » Marie f
:

» ma fille , Marie , me connoiffez-vous ? Qu'eft


» devenu l'habit angélique de votre virginité ?
» Que font devenues ces larmes que vous ré-
» pandiez en la préfence de Dieu ? Que^ font
» devenues ces veilles , ces auftérités qui fei-
» foient vos délices } Comment , ma chère
» fille , êtes-vous tombée dans l'abîme du cri-

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S. Abraham, Hermite. 771
w me ? Pourquoi ne me fites-vous pas l'aveu =====
» de votre cnûte ? Je vous aurois aidé à ren- x

» trer en grâce avec Dieu,


Le Saint voyant fa nièce couverte de confu-
fîon , & faifie d'horreur , l'exhorta tendrement
à mettre fk confiance en Dieu, » Ne vous défet
* pérez pas, lui ditil^ je prends fur moi vos
h péchés ; croyez-moi feulement , & revenez
>t dans votre Solitude* Mon cher Ephrem eft
* défolé à votre fujet % & fait pour vous des
» prières continuelles. Il n'eft pas étonnant qu'on
» foit renverfé par terre dans lç combat , mais il
n eft honteux de ne pas fe relever. BannifTez la
» défiance : tous les nommes peuvent faire des
h chûtes ; c?eft une fuite de leur foiblefle natu-
» relie. Penfez feulement à implorer le fecour?
» de la grâce ; Dieu ne veut pas la mort du
* pécheur ; il demande feulement qu'il fe coi*r
» vertifle ». Marie, touchée de ces paroles , re-
prit courage , & promit d'obéir en tout à fon
Oncle. Le Saint la ramena avec lui dans fon
Défert , & la renferma dans la cellule qu'elle
âvoit d'abord habitée. Elle y pafla les quinze
dernières années de fa vie dans la pratique
de toutes les vertus. Nuit & jour elle pieu-
roit la perte de fon innocence , & puniflbit
fon corps par les plus rigoureufes macérations.
Dieu agréa fa pénitence , & la favorifa même
du don des miracles , trois ans après fa con-
verfion. Enfin elle termina fa vie par la mort
des Juftes. Saint Ephrem , qui la vit avant
qu'on l'enterrât , dit que fon vifage parut tout
rayonnant de gloire , &C qu'on ne douta point
qu'un choeur d'Anges n'eût porté fon ame dans
la bienheureufe éternité.
Saint Abraham furveçut cinq ans à fa nièce.
Cc c i
j

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77* S. Abraham Hermïte. 3 >

- La nouvelle de fa dernière maladie s'était ré-


jmrs Iî# pandue > on vint de toutes parts pour rece-
"
voir fa bénédiftion., Après fa mort , les Chré-
tiens tâchèrent de fe prQcurer quelque partie
de fes habits > dont le feui attouchement gué*
rit phifieurs malades* Ce font les termes
de Saint Ephremi , qui fat témoin oculaire
de ce qu'il rappQite. I*e nom de Sainte Marie
fe trouve dans Us Calendriers Grecs ; pour
celui de Saint Abrahanv, il fe lit dans les Ca-
.

lendriers Grecs j Latins , Cophtes (a). &


. Saint Abraham fut faire un Paradis de foa
Défert , parce qu'il y trouva Dieu , dont la
préfence fait tout le bonheur du Ciel. Jouit
iàntde la compagnie de Dieu de celle des &
Anges , il pouvoit bien fe paffer de converfer
avec les hommes. Comment auroit-il manqué
d'occupation ? Les jours &
les nuits lui fum-
foient à peine pour vaquer à la contemplation
des chofes ecleftes. Pendant qu'il exçrçoit foa
corps à un travail pénible , fon efprit fon &
cœur, avec toutes leurs facultés, étoient ab-
forbés en Dieu. Le fommeil même ne le fé-
paroit pas de fon Bien-aime 9 à caufe de la dif-
pofition habituelle de fon ame. Bel exemple
our les Chrétiens , obligés de vivre dans
E s diftraâions inséparables du fiecle Us imi- !

( a ) Les PP. Bollandus , T. t. & Comment, in Calen J*


Papebrok 8c Pagi, ont pré- Univ. T. /. p. 314* ad zy. 03,
tendu que Saint Abraham On lit dans la Chronique
Hermite avoit vécu près de d'Édeûe, que notre Saint
rHeUefpont, & long-temps écoitné à Chidane en Mé-
après Saint Éphrem. Mais fopotamie , &
qu ii vivoic
c'eft une erreur qui a été en l'an 667 des Grecs , c'eft-
fol dément réfutée par
i M. à-dire, 356 de Jefus-Chrift,
Jofcph AfTcmani, Bill. Orient.

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I

S,; Zacharie Pape. , 77$


-
teront Saint Abraham , s'ils contraûent la fainte
habitude de converfer intérieurement avec mars ij;
&
Dieu , fi fa volonté eft l'objet confiant de leurs
aSions, de leurs penfées, de leurs défirs. Alors
ils déviendront en quelque forte femblables au»
Séraphins , pour lelquels vivre &aimer font une
inême chofe. » Les Anges , dit Saint Grégoire le
» Grand , portent avec eux leur Paradis , quel-
» que part que Dieu les envoyé , parce qu'ils
» ne ceffent jamais de lui être unis , & cjuo
» demeurant toujours dans le fein de fon im-
» menfité , ils exercent leur miniftere dans le
» fanâuaire de fa divinité », Tel eft le bon-
heur du Chrétien , lorfqu'il fait fe faire au
milieu de fon propre cœur une folitude oii
il converfe continuellement avec Dievu

LE MÊME JOUR.
SAINT ZACHARIE,
Pape.
Z Acharie, Grec de Nation , fuccéda au

Pape Grégoire en 741. C'étoit un homme


III
d'une bonté &
d'une douceur fingulieres ; il
ne fe vengeoit de fes ennemis que par des bien-
faits , &
il faififlbit toutes les occafions d'obli-

ger ceux qui l'avoient perfécuté avant fon exal-


tation. On le vit expofer fes jours durant les
troubles occafionnés par la révolte des Ducs
de Spolete &de Bénévent contre Luitprand
Roi des Lombards.
Luitprand , qui connoiffoit l'éminente fàin-
teté de Zacharie , avoit pour lui une grande

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774 S. Z AC H ARI E , P APE:
vénération. A fa prière , il renvoya fans tan*
? on Prifoimiers cru'il avoit iaits pendant ht
MARS f5.
*
guerre , &
rendit à l'Eglife Romaine toutes les
Places qui lui avoient appartenu dans les Terri-
*
foires de Narni , d'Ofimo , de Numana , d'An-
Cône , &Valle - Grande. Le Saint
de la
ayant célébré les divins Myfteres à Terni,
en préfence des Lombards 9 édifia ces Peu-
ples par fa ferveur extraordinaire , s'attira &
de leur part les plus vifs fentiments de refpeft.
Quelque temps après , il fit un voyage à Pa-
trie , où étoit le Roi Luitprand. Son deffein
étoit d'obtenir de ce Prince la paix 5 la rèf- &
titution de plufieurs Places pour l'Exarchat de
Ravenne. Le Roi des Lombards refufà d'abord
ce qu'on lui demanda; maïs il fe rendit à la
fin aux inftarîces réitérées du faint Pontife.
Zacharie donna en plufieurs occafions des
preuves éclatantes de ion zele de fa pruden- &
ce. Il fit de fages Règlements pour reformer
les abus , pour maintenir la Difcipline , pour U
étouffer les femences de divifion qui trou-
bloient la paix de plufieurs Eglifes.
Saint Bonifkce , Apôtre d'Allemagne , lui
écrivit plufieurs lettres , pour le confulter
fur quelques difficultés. Il lui mandoit dans
une de ces lettres , qu'un Prêtre , nommé
Virgile , travailloit à mettre la divifion entre
.

lui & Odilon Duc de Bavière ; qu!outre ce- &


la il enfeignoit plufieurs erreurs, dont les prin-
cipales étoient , qu'il y avoit un autre monde ,
d'autres hommesfous la terre , un autre Soleil , une
autre Lune ( a ). Zacharie répondit qu'il fàlloit

( a ) Quoi alius maidus , & \


alius Sol & Luna. Ep. IO. T.
diihomines fub terra fait , ftu \ 6. Conc. p. 15. 21. & BibU

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S.Zacharie, Pape. 775
ïc dépofer , s'il à enfeigner de fem-
perfiftoit
blables erreurs. Mais on auroit tort de conclu-
MAKS i U
re de cette réponfe , ainfi que Font fait des
Ecrivains modernes, que le Saint Pontife con-
damnoit le fentiment de ceux qui admettoient
des Antipodes. Il avoit en vue certains Héréti-
ques qui foutenoient l'exiftence d'une race
d'hommes qui ne defcendoient point d'Adam,
& qui n'avoient point été rachetés par Jefus-
Chrift. D'ailleursne prononça point de ju-
il

gement en cette occafion , puifqu'il ordonna à


Virgile de venir à Rome , afin qu'on y exami-
nât fa Doftrine. Il y a toute apparence que Vir-
gile fe juftifia , puifqu'il fut élu peu de temps
après, Evêque de Saltzbourg (£).
Le faint Pape avoit une tendre charité pour
les malheureux. Ayant appris que des Mar-

Patr. inter Epift. S. Bonif. tien,


L'opinion de ceux dont il Il ne faut pourtant pas s'ima-
s'agit, étoit qu'ilyavoit fous giner qu'elle ait été généra*
terre des hommes qui n'a- le parmi les Philofophes Curé-
voient point Adam pour pere tiens, jufqu'au XVfiecle,
& qui n'avoient point été ra- comme l'a prétendule P. de
chetés par Jefus-Chrift. Or Montfaucon dans la Préface
elle pouvoir être condamnée qu'il a mife à la tête de Cof-
comme erronée , puifqu'elk me l'Egyptien. PhilophonUs,
contredit l'Écriture. Voyez qui Ttvoit fur la fin du VI
le Cardinal Baronius, fous fiecle , a démontré dans fon
Tan 784, n. 12. Livre de mundi Créât. I. 9. c.
{b) Plufieurs Philofophes *?»que Saint Bafile, Saint
anciens penfoient que la figu- Grégoire de Nyffe , Saint
re de la terre n'étoit point Grégoire de Nazianze , Saint
fphérique &
rejetoient l'exif- Athanafe , & la plus grande
tence des Antipodes. Cette partie des PP.
de l'Eglife,
erreur philofophique qui croyoient que la terre étoit
,
n'influoit en rien fur la Foi, ronde. Il
eh même mit mes*
a été adoptée par quelques non des Antipodes dans
Saint
Pères , comme par Saint hilaire in
Pf. 4. «. %y dans -,

Àuguftin , L. it.de Çh. JDei , Origene


, L a. de principe c. 5 1
c 9; par Bcde, L. 4. de princ. dans Saint Qémenf
Pape , &c.
fàiUf\ &par Cofinc l'Egyp-

Digitized by Google
776 S.ZACHÂttîÈ, Papê;
chands Vénitiens avoient acheté des Efclaves
à Rome , pour les revendre aux Mores d'Afri-
cjue , il leur reprocha d'abord un trafic fi inju-
'

rieux à l'humanité &


à la Religion , paya &
enfuite la fomme qu'on lui demanda pour ren-
dre, la liberté à tous ces Efclaves. Il orna la
Ville de Rome de plufîeurs Eglifes magnifiques
fit un grand nombre de Fondations In faveur

des Pauvres & des Pèlerins & affigna un re-


,

venu annuel fort confidérable pour l'entretien


des lampes de lTEglife de Saint Pierre. Il mou-
rut au mois de Mars de l'année 75 1. U eft nom-
mé en ce jour dans le Martyrologe Romain.
Voyez les Lettres de Saint Zacharie , les &
Pontificaux , T. <f. Conc. Voyez aufli Fleury
T. 2. 1.42. p. 349.
B
~ -
à
...
m m

'.
'
FIN DU SECOND VOLUME.

A VILLEFRANCHE DE ROUERGUE,
Deïïmprimerie de Pierre Vedeilhîé»
1764.

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TA B LE
DES NOMS DES SAINTS
DU SECOND VOLUME.
y u-n « a »
ii
t n n n mm
ii-rr ir-rr-n 11 11 11

PREMIER JOUR DE FÉVRIER.


S. Ignace , Êvique d*Antioche > Martyr. Page 5
S. Pione , /V&re & Martyr , ij
Sigebert , /îoi fAuftraJic , 25
5. /W/ 9 Évêque de Trois- Châteaux 9 3 1
Sainte B rigide > Vierge 9 ibid.
Rinnie , Vierge, 33

IL JOUR DE FÉVRIER.
Ztf Purification de la Vierge , 3^
Sut la Bénédiction des Cierges & la Proccffion qui
Je /ont en ce jour ,
5wr Ai pratique obftrvle dans FÈglife de relever
Us femmes après leurs couches , 41
^. Laurent Archevêque de Cantorbéry 9
, 4y
Flofeale, Évêque 9 46

III. JOUR DE FÉVRIER.


Blaife 9 Êvêque & Martyr 9 ^
Anjchaire 9
Archevêque 9
^
Sainte Wiriburge ,
fïtfy* , yj
Marguerite 9 dite d'Angleterre, Vierge, 60

Diaitized bv CiOOoIe
IV. JOUR DE FÉVRIER.
S. Andrl Corfini ,
Èvlqut , ûz
ss. Philéas 6
Philorome , Martyrs ,

S. Ifidoredt Pilufe^ TA
S. Rembcrt ,
Archevêque , 71
S. GUkrt , Fondateur des Glibertins ,
5. Modan % Abbl ,
5. Avenein , Solitaire ,

5. ib/epA <fc Léoniffk , Capucin ,

«S

V. JOUR DE FÉVRIER.
$<ri/2tt Agathe 9 Vierge & Martyre > 88
Les Joints Martyrs du Japon , S4
Noticefur Us Martyrs de la Chine 3 101
Plujîturs faints Martyrs dans le Pont i ioS
S. Abrahaamius , Evêquc & Martyr , ÎOQ
S. Avit , Archevêque , ibicL
5. Btrtulphc , Abbl III
SU Voel 9 Solitaire , «I'
5«i«/e Adélaïde, Vierge,'

VJ. JOUR DE FÉVRIER.


Dorothée > Vierge Martyre È &
S. Vaafty Évéque, 118
S, Amand , Évtque , xzt
Barfanuphe , Anachorète ,

VIL JOUR DE FÉVRIER.


4, Romuald 9 Abbé^FpnlL des Gamalduhs 9 116
Théodore JHcraclée, Martyr > X4.8
5. Richard, 151
S. Augule , Êviqiit jSr Martyr % 1%%
" "
si Trefaip) Prêtre, 15$
VÎIL JOUR DÉ FÉVRIER.
S. Jean de Matha , Fondateur dé POrde du TrU
nitairts
S* Êtienne
,

Fond»de COrdrt dt Grdndmont , 164


i
^
i
f» Pauly Eveque i tj%
S. Cuthman, iy^

IX. JOUR DE FÉVRIER*


Sainte ApollùriU i Vierge f \yj
S. Nïciphort , Martyr 3 181
S, Ansbert , Evêque , i8<
5. ThiUàu , Évêqut , \ 8g
Erhard, Abbé, 1 90

X. JOUR DE FÉVRIER.
Sainte ScolajBque , Vierge , i^i
&UKft Sotere, Vierge & Martyre , 196
Guillaume de Maleval , Hermitê $ 1 97^
Sainte Aujbtbcrte , Vierge , loi
Erhdph , Évtquê & Martyr , 107

XI. JOUR DE f ÊVRIËR.


5. Saturnin , 5". Datif, &C4 loS
Sévérin, Abbé, I14
Sainte Théodore, Impératrice , lîâ

XII. JOUR DE FÉVRIER.


Benoit eTAmanë, Abbé, lî2
$. Mélece y Patriarche , I14
5, Antoine , Patriarche , i3
Saura Eulalie , Vierge & Martyre , âjj
XIII. JOUR DE FÉVUIER.
sainte Catherine de Ricci > 234
S. Lé[in Évêque 9
, 239
S. PolyeuSe 9 Martyr 9 24
S. Grégoire II , Pape 9 244
S. Martinien , Hermite, 146
Fuktan 9 Évêque , - 245
^. Étienne , , 050
»L Modonnoc<TOJfory , 2ji
Z.* Bienheureux Roger , Bernardin 9 2f2

XIV. JOUR DE FÉVRIER.


& Valentin 9 Prêtre & Martyr, 2JJ
5. Maron , jtfAM , 255
SS. Cy/x#e 6» Méthode 3 2|8
Abraham 9 Évêque y 272
Auxence 9 Hermite 9 273
Antonin 9 Abbé , 27$
5. Conran , Évêque 9 276

XV. JOUR DE FÉVRIER.


ss. Faufiin 9 6t Jovite 9 Martyrs , 277
S. Sigefride,
Évêque 9 . 279
5. Quinide , Évêque 9 *
28

XVI. JOUR DE FÉVRIER.


5. Onljimc , 5. /W , 2#3
Élit &
fis compagnons , Martyrs 9 286
S. Grégoire 9 X
Pape , 2£&
Sainte Julicne, Purge &. Martyre 9 291
Tuncon , Evêque & Martyr / ibid.
XVII. JOUR DE FÉVRIER.
Flavicn , Archevêque y
SS. Theodule &
Julien , Martyrs,
S. Silvain d'Auçky 3 Evique #
S. Loman , Evêque ,
Fintan 9
Abbé 3

XVIII. JOUR DE FÉVRIER.


S. S'union , Evêque Se. Martyr ,
S S. Léon 6* Parigorius
\ Martyrs ,
S. Angilbert, Abbi ,

XIX. JOUR DE FÉVRIER.

XX. JOUR DE FÉVRIER.


Tyrannion ; Evique % &
plusieurs autres SS*
Martyrs , ?1I
^
S. Sadoth, Evique > 6t fis compagnons
, Mar-

Eteutkere Evique fi* Martyr ,


, 31^
S. Eucker, Evique
t 350
Sïw/i* Mildrede, Vierge fi- ^M^S; 333

XXL JOUR DE FÉVRIER.


«• , Evique & Martyr ,
Sevirien 3^6
ss. Germon & Randaut , Martyrs , 338
•s. Daniel , & Sainte Verda, Vierge , AfAf. 341
aiij
~
le Bienheureux Pépin Landen 9 $4$

XXII, JOUR D« FÉVRIER,


ta Chaire de S, Pierre à ^ntioehe % 34*
Saint* Marguerite de Cortone* Pénitente # J48
SS. Thalaj/è $ &
Limitée , Solitaire*, Jfo
$, Baradat , Solitaire , 35 î

XXIH, JOUR DÇ FÉVRIER.


% Sennus , Jardinier & Marty* 9 3^
£41*1* Milburge , Vierge 9 c 3^6
Boijil, Prieur , jj^S
Bienheureux Dojîthie , Moine \ 361
te R. Pierre Danden , Cardinal * Êvique $ ]6j
Noticefuries Ouvrages du B. Pierre J)amen, 374

XXIV, JOUR DE FÉVRIER*


Matthias, Apôtre 9 yj%
f$. Montan , Lucius y Flavien y &a MM. 379
$ 9 Prétextât , Archevêque 9 388
# v JEthg&êT* , dfe , 393
& têtard y Evique, 396
te Bienheureux Réhert cTArMflU ^'InJHtjzuur de
tOrdre de Fontcyraud* 197

XXV, JOUR HE FEVRIER.


Taraifi , Patriarche , 431
# . Viïlorin & Jes compagnons. Martyrs 41
#, Çcfa ire , Mçdeçin $
1
418
Sainte Walburge, Vierge 42a

XXVI JOUR DE FÉVRIER.


S Alexandre ,
.
Patriarche , 413
S. Porphyre Eviqut de Gaff
, >^ .433
S. ViBor £Arcis , 444

XXVII. JOUR DE FÉVRIER,


S. Liandre, Evique y 446
SS. Julien y Chronion & Bejas , Martyrs , 4^2
S. Thalilée^ Solitaire , 4U
S. Galmier, Serrurier , 454
AE/forjEv^h*
, , 6* Martyrfy 45^
$<u/?/e Honorine , f/e/gs 6* Martyre % 457
Alnoth, Anachorète , ibia.

XXVÏIL JOUR DE FÉVRIER. -

LesSS. MM. qui moururent pendant la grande Ptpt


dont la VÙle d*Alexandrie fut affligée , 458
5. Protere , Patriarche & Martyr % 461
55. Romain & Lupicin , fondateurs des Monajlc*
rcs du Mont-Jura , 46?

XXIX.. JOUR DE FÉVRIER.


S\ Ofwald , Archevêque , 4&7
Notice des principaux titres d'honneur & des prin±
cipales dignités qui étoient en ufagt parmi les

Anglo Saxons , 46%


c
S. Séver , Evéque , 47
NOMS DES SAINTS
du mois de Mars 3 inférés dans ce Volume?
i i i

PREMIER JOUR DE MARS.


>. David , Archevêque , 477
s. S wïdbtrt 9
Evéque Régionaire , 48?
5 f
Aubin 3 Evéque 9 487
/ , Evéque % 490
5- Monon , Martyr 9 491
5j Siviard, Abbé, 495
1, »

IL JOUR DE MARS.
'Les SS. Martyrs d'Italie , 494
5, Ciadde , Evéque 9 49$
j. Simplice , , yo<y
5. Maman y Evéque 3 fo^
5. Joavan , Evéque , 5 04
X< Vénérable Charles le Bon \ Cornu de Flandres
ibid.

III. JOUR DE MARS,


Watt Çunigonde % Impératrice , 507
& Anfiere Martyrs ,
ta. Aftf/za , 51 x
5j. Emétere & Chclidoine Martyrs i , 513
5. Guignolé , , 514
5. Lamalijfe , 5 1 %

IV/JOUR DE MARS.
Cafimir , PW/tf* </e Pologne , 519
j. JLxfltt , Martyr ,
P**/** 6* 514
j. Adrien , Evéque & Martyr , ja6
s. B afin y Evéque 9 517

<

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V. JOUR DE MARS.
ss. Adrien &Cubule , Martyrs , 51$
s. Kiaran , Evêque , 53 1,
s. Girafimt) AUé 9 53$
s. Tkiophik 9 Evêque f 53f
s. Virgile 9 Archevêque 9 53*
s. Draujîn > Evêque , J37
5. Roger , Religieux Francîfiain ; 53 £

VI. JOUR DE MARS.


j. Chrodegang ,
Evêque ;* 54e*
L* Bienheurtufe Colette Boilet ; f44
5. />â/0£is , ^fiW, 549
5. Baldrtdc , Evéqke,
.J?**
W/ir* Kimburge, &
autres Saintes \ ibicL
5. C<dW, 551

VIL JOUR DE MARS.


5. Thomas (TAquin , DoSeurde FEglifi ; 55J?
Notice des Ouvrages de S. Thomas a*Aquin y 571
jointe Perpétue , /Vfla*/ , 6» &arj a>m-
pagnonS) Martyrs , $Sç
jtfi/2/ le Simple * Anachorète , 604

VIII. JOUR DE MARS.


*. /un 4t Dieu , Fondateur de l'Ordre deJa Cha*
rué , 60S
Notice delà Vie du Vénérable Jean a*Avila > 619
s. Félix Êvêqui en Angleterre ,
9
62 Ç
J. Apollone , s, Philémon
,
Martyrs , 6x7

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5. Julien ^
Archevtque de Tolède ; " 619
s. Duthac , Évêque de Rof en ÉcoJJc , . 630
$U. Rofe de "Viterbe , Vierge , 631
j>Sinon , Évêque en Irlande , 631
* Pfalmode , ou 5. Saumay , Anachorète , 633

î IX. JOUR DE MARS.


Françoife , f«*v* , Fondatrice des Collaùnes
ou Oblatcs y 634
& Évêque de Nyffc ,
Grégoire ,
641
Afoace <fo Ouvrages de s. Grégoire de Nyffe , 645
5. /W/tf* , Évêque de Barcelonne , 650
ffi. Catherine ,
Vierge, & Abbcffe des Clarifies de
• Bologne, 65*

X. JOUR DE MARS.
£tt quarante Martyrs de Sébafte , 655
jj. Cîcîitf & Martyrs ,
Alexandre ,
661
j. Droclavcc, premier Abbé de s. Vincent ,
aujour-
d'hui st. Germain-dcS'Pre{ , 664
31. -^//tf/e \ fécond Abbé de Bobbio , 665
Mackeffoge , 0/* Kejfbge ,
Évêque , 666

XI. JOUR DE MARS.


5. £w/o£* , Pr*Yr* 6- Martyr , * * î 668
5. Sophrtne , Patriarche dé Jérufalm 9 Ï74
i. Conjlantin Martyr ,
,
, 67 9
J. AErigus ,
Évêque en Irlande , . 6#6
5. Vindicien , £v<^e <f^/ra5 6* <fc Cambrai , 68 1

5. Éuthyme , Évêque & Martyr , -68 J

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XII. JOUR DE MARS.
Grégoire 1$ Grand , Pape, & Dodear de rÊgli-
fif 685
Notice du Ouvrais de S. Grégoire le Grand 698
,
s. MaximUien , Martyr 9
710
s. Paul , premier Évéque de Léon
, 721

XIII. JOUR DE MARS.


f. Niciphore Patriarche de ConjlantinopU ,
,
714
Ste. Euphrafie , Vïeree 9
73 î
s. Thiopkane , Abbé 9
73 9
ste. Kennoque , J'/tfg* ,
74}
5. GV/ar*/ , Évéque ,
744
Mochocmoc , ~
74 j
sa
XIV. JOUR DE MARS.
ste. Mathilde , /tetà* Germanie , 746
* cepfimas , 70/<E/>A , Aithilahas , Martyrs ,752
Boniface^ Évéque de Rojff 762
,9, Lubin , Évéque de Chartres 9 763

XV. JOUR DE MARS.


Abraham,, Hermite , ySr f
Pénitente , 766
f Zacharie , Pape , 772

-F/jyr de z a Table.
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